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23 avril 2025
International
LE COMBAT SCIENTIFIQUE DE CHEIKH ANTA DIOP RÉSONNE ENCORE AU LABORATOIRE CARBONE 14
Grâce à la datation au radiocarbone, ce haut lieu scientifique a révolutionné notre vision du passé africain. Et œuvre aujourd'hui pour une meilleure connaissance des défis environnementaux contemporains
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 31/12/2023
À l'occasion du centenaire de la naissance de Cheikh Anta Diop, célébré du 21 au 29 décembre 2023, le laboratoire Carbone 14 qu'il avait fondé en 1966 à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar a ouvert ses portes au public, révèle le site d'information RFI dans une dépêche en date du 29 décembre. Cette occasion a permis de mettre en lumière l'héritage toujours vivant laissé par le célèbre historien et scientifique sénégalais dans le domaine de la datation au radiocarbone.
Créé en 1966, le laboratoire Carbone 14 de Cheikh Anta Diop fut le premier du genre en Afrique. Par sa technique de datation au carbone 14, consistant à "analyser des objets comme des coquillages, du bois ou des ossements afin de connaître leur âge", il a permis de révolutionner l'histoire du continent en confirmant que "l'Afrique est le berceau de l'humanité", comme le rappelle le directeur par intérim Nouhou Diaby. Grâce aux travaux pionniers menés dans ce laboratoire, "on a pu mettre en évidence" que les "premiers hommes et les premières civilisations étaient nés en Afrique", réhabilitant ainsi l'histoire longtemps bafouée du continent.
Aujourd'hui, l'héritage de Cheikh Anta Diop perdure au laboratoire, qui poursuit ses activités de datation tout en élargissant ses recherches aux questions environnementales, à l'instar de la quantification de la pollution à Dakar. Selon l'ingénieur Alpha Omar Diallo, "être une force de proposition sur plusieurs thématiques comme la pollution atmosphérique, la pollution des eaux, la pureté de certains produits" permet d'"éclairer la lanterne des décideurs". Malgré une mise en sommeil dans les années 80, le laboratoire a repris du service au début des années 2000, prouvant la pérennité de l'œuvre scientifique débutée par le célèbre historien sénégalais il y a un demi-siècle.
LE PAPE FACE À LA FRONDE AFRICAINE SUR LA BÉNÉDICTION DES HOMOSEXUELS
Alors que l'homosexualité demeure un sujet tabou dans la plupart des pays africains, les prélats du continent expriment leur distance face à l'évolution doctrinale voulue par le pape François
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 30/12/2023
De nombreux prélats africains ont manifesté leur opposition à la récente décision du pape François d'autoriser sous certaines conditions la bénédiction des unions entre personnes de même sexe, révèle un article du Monde en date du 28 décembre 2023.
Selon le quotidien français, "si les avocats de la cause LGBTQ+ qui attendaient cette mesure depuis longtemps se sont réjouis, notamment en Belgique et en Allemagne, où l’épiscopat demandait une telle avancée, les représentants de l’Eglise catholique en Afrique ont fait montre d’une défiance quasi généralisée".
Le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa et président du symposium des conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar, a ainsi écrit le 20 décembre dernier pour exprimer "beaucoup de perplexité" face à la "déclaration [papale] qui se prête à de nombreuses interprétations et manipulations", selon Le Monde. Il demande une consultation des Eglises africaines afin de rédiger "une seule déclaration synodale, valable pour toute l’Eglise d’Afrique".
D'autres pays du continent comme le Malawi, le Cameroun ou le Togo ont également manifesté leur refus de mettre en application la réforme du pape. Le Togo "préconise ainsi aux prêtres de « s’abstenir » de bénir les couples de même sexe", précise l'article.
Plusieurs raisons expliquent cette hostilité africaine, encore selon la même source. L'homosexualité est interdite dans 32 pays africains et "la question des droits des homosexuels (...) y est bien trop épineuse". Par ailleurs, "les questions morales font partie des lignes de clivage entre l’Afrique et l’Occident".
Reste à voir l'issue des consultations voulues par les Eglises d'Afrique. Mais cette réaction sans précédent montre selon les experts une rupture avec Rome, même si nul ne parle pour l'heure de schisme.
par Abdoulaye Dieye
SUR LE CHEMIN DE LA PRÉSIDENTIELLE 2024, QUE D’INCERTITUDES ET DE POLÉMIQUES
EXCLUSIF SENEPLUS - En refusant de respecter une injonction de la CENA, la DGE a délégitimé l'Autorité. Si cette dernière usait de ses pouvoirs de dessaisissement ou substitution, les conséquences seraient majeures pour l'organisation du scrutin
Depuis que le président de la République est élu au Sénégal au suffrage universel, onze élections présidentielles y ont été organisées : en 1963, 1968, 1973, 1978, 1983, 1988, 1993, 2000, 2007, 2012 et en 2019. La première alternance au Pouvoir a eu lieu en 20OO et la seconde, en 2012. Beaucoup d’élections présidentielles[1] ont été suivies de contestations plus ou moins violentes au motif qu’elles n’ont pas été transparentes, qu’elles ont été émaillées de fraudes…
A chaque élection présidentielle, sa particularité.
Celle de 2012 (pour ne pas remonter plus loin) a été marquée, entre autres questions, par celle de la recevabilité de la candidature du président d’alors en exercice, le Président Abdoulaye Wade. Il est allé jusqu’à organiser un séminaire international animé par « des professeurs émérites, des doyens et professeurs venant des quatre coins du monde, pour simplement convaincre les sénégalais et la communauté internationale de la recevabilité de la candidature du Président Wade pour un troisième mandat. L’effet escompté n’a pas été atteint et la suite est connue.
Celle de 2019 a la particularité de s’être déroulée sans les opposants au pouvoir les plus en vue[2].
Tout porte à croire que l’élection de 2024 sera aussi marquée par la mise à l’écart de la principale figure de l’opposition, Ousmane Sonko. Élection présidentielle n’a jamais été marquée par autant d’incertitudes. Processus électoral a rarement été marqué par autant de polémiques.
I- Que d’incertitudes sur le chemin de 2024
Par décret n° 2023-339 du 16 février 2023, le président de la République a fixé la tenue de l’élection présidentielle à la date du 25 février 2024. La période de révision exceptionnelle des listes électorales a été fixée par le décret 2023-464 du 7 mars 2023. Pourtant, la rumeur à propos d’un report de la présidentielle est encore là.
1/ L’incertitude liée aux rumeurs actuelles d’un report de la présidentielle
Le Sénégal vit de rumeurs concernant la volonté du pouvoir en place de créer les conditions d’un report de la présidentielle de 2024.
Reporter la présidentielle suppose soit la prolongation du mandat du président de la République, soit sa démission à l’expiration de ce mandat prévue en avril 2024. S’agissant de la deuxième hypothèse (très improbable à notre sens), elle entraine la mise en œuvre de l’article 31 al 2 aux termes duquel, si la présidence est vacante par démission, empêchement définitif ou décès, le scrutin aura lieu dans les soixante (60) jours au moins et quatre-vingt-dix (90) jours au plus après la constatation de la vacance par le Conseil constitutionnel. En attendant la tenue du scrutin, le président de l’Assemblée nationale assure la suppléance.
En ce qui concerne la première hypothèse, il y a lieu de constater son « impossibilité » si l’on prend en compte la position du juge constitutionnel sénégalais. Notons d’abord que le droit constitutionnel, c’est la lettre et l’esprit de la Constitution mais aussi ce qu’en pense le juge constitutionnel. Ceux qui parlent de « prolongation du mandat du président de la République » ne tiennent apparemment pas compte de la teneur du Considérant 32 de la «décision» n°1/C/2016 dans lequel le juge constitutionnel dit clairement que Ni la sécurité juridique, ni la stabilité des institutions ne seraient garanties si, à la faveur du jeu politique ou au gré des circonstances notamment, la durée des mandats politiques en cours, régulièrement fixée au moment où ceux-ci ont été conférés pouvait, quel que soit au demeurant l’objectif recherché, être réduite ou prolongée. C’est cet argument que le juge constitutionnel avait brandi pour rejeter toute possibilité, pour le président Macky Sall, de réduire son mandat conformément à son engagement.
Puisque le Conseil constitutionnel, même s’il n’est saisi que d’une demande d’avis, statue par des décisions motivées (loi organique n° 2016-23 du 14 juillet 2016) et que ses décisions s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles (Article 92 al 3 de la Constitution de 2001), nous devons considérer que le Droit a été dit.
2/ L’incertitude liée aux rumeurs (définitivement dépassées ?) relatives au troisième mandat
Le flou entretenu par le président de la République sur sa volonté de briguer un autre mandat a été préjudiciable à la paix sociale. Cela résulte d’une part d’une écriture prêtant à interprétations, d’autre part, de l’attitude du chef de l’État qui s’est séparé de tous ceux qui ont soutenu qu’il n’a pas droit à un troisième mandat et a promu tous ceux qui ont dit le contraire. En vérité, plus qu’une simple promesse électorale, se limiter à ses deux mandats était un engagement pris et constamment réitéré par le président de la République aussi bien devant l’opinion publique nationale qu’internationale[3].
Nous avons la conviction que tout cela aurait pu être évité si le juge constitutionnel sénégalais avait eu une attitude autre que celle qu’il a adoptée. En effet, il convient de rappeler que c’est par lettre n° 0077 du 14 janvier 2016, que le Président de la République avait saisi le Conseil constitutionnel, aux fins d’examiner la conformité du projet de révision de la Constitution « à l’esprit général de la Constitution du 22 janvier 2001 et aux principes généraux du droit ».
Après avoir considéré que la demande du président de la République a été formulée en des termes généraux, le Conseil a donné sa propre compréhension de cette demande en considérant qu’il doit se prononcer sur « le respect des principes et des valeurs sur lesquels repose la Constitution ». C’est sur la base de ces valeurs et principes que le Conseil a écarté la possibilité pour le demandeur de réduire son mandat.
Je suis d’avis que pour avoir supprimé la disposition transitoire (c’est bien le Conseil qui l’a supprimée) qui était prévue à l’article 27 dans la rédaction initiale aux termes de laquelle cette disposition s’applique au mandat en cours, le Conseil est en partie responsable de ce qui nous est arrivé à savoir ces discussions et controverses à propos de la possibilité pour le Président de la République de briguer un troisième mandat. Il est vrai que le juge a justifié sa décision par le fait que la disposition n’était conforme ni à l’esprit de la Constitution, ni à la pratique constitutionnelle mais il aurait dû poursuivre son œuvre pédagogique en nous proposant une solution (une rédaction qui nous aurait épargné ce que nous avons vécu jusqu’à l’annonce de sa non candidature). Il pouvait par exemple suggérer au gouvernement de prévoir une disposition transitoire pouvant être rédigée de diverses manières[4]. N’est-ce pas que le Conseil a dit dans son avis qu’il y lieu de rédiger autrement l’article 103 du projet de Constitution (Il a même proposé la rédaction suivante : les dispositions de l’alinéa qui précède ne peuvent faire l’objet de révision sauf pour en étendre le champ d’application). En plus, le juge est allé très loin dans la correction du projet du gouvernement aussi bien dans la forme que dans le fond (Voir les articles 2, 3,4,5…). Le Conseil aurait dû adopter cette attitude pédagogique à propos de la disposition transitoire.
La déclaration du 3 juillet 2023 du président Macky Sall par laquelle il précisa qu’il ne briguerait pas un autre mandat a mis fin au débat et a fait revenir une certaine sérénité dans le pays.
3/ L’incertitude quant aux participants à l’élection présidentielle
Le chemin qui mène à la présidence de la République est parsemé d’obstacles au Sénégal. Selon l’article 28 de la Constitution, peut être candidat à la présidence de la République toute personne qui :
est exclusivement de nationalité sénégalaise ;
jouit de ses droits civils et politiques ;
est âgé de trente-cinq (35) ans au moins et de soixante-quinze (75) ans au plus le jour du scrutin
sait écrire, lire et parler couramment la langue officielle.
Pour être recevable, toute candidature doit être accompagnée :
- soit de la signature d’électeurs représentant, au minimum, 0.6% (44.231 électeurs) et au maximum, 0.8% (58.975 électeurs) du fichier électoral général dans au moins 7 régions à raison de deux mille (2 000) au moins par région ;
- soit de la signature d’élus représentant 8% des membres de l’Assemblée nationale, ce qui correspond à treize (13) députés.
- soit de la signature de cent vingt (120) chefs d’exécutifs territoriaux.
NB : Si le nombre d'électeurs représentatif du minimum, soit 44.231 parrains, n'est pas atteint, il n'est pas procédé au traitement automatisé du fichier. Si le nombre d'électeurs représentatif du maximum, soit 58.975 parrains, est dépassé, il n'est pas tenu compte du surplus qui est nul et non avenu
L’article L.29 du code électoral renseigne que ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale :
1- les individus condamnés pour crime ;
2- ceux condamnés à une peine d'emprisonnement sans sursis ou à une peine d'emprisonnement avec sursis d'une durée supérieure à un mois, assortie ou non d'une amende, pour l'un des délits suivants : vol, escroquerie, abus de confiance, trafic de stupéfiants, détournement et soustraction commis par les agents publics, corruption et trafic d'influence, contrefaçon et en général pour l'un des délits passibles d'une peine supérieure à cinq (05) ans d'emprisonnement ;
3- ceux condamnés à plus de trois (03) mois d'emprisonnement sans sursis ou à une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à six (06) mois avec sursis, pour un délit autre que ceux énumérés au deuxièmement ci-dessus sous réserve des dispositions de l'article L.28 ;
4- ceux qui sont en état de contumace ;
5- les faillis non réhabilités dont la faillite a été déclarée soit par les tribunaux sénégalais, soit par un jugement rendu à l'étranger et exécutoire au Sénégal ;
6- ceux contre qui l'interdiction du droit de voter a été prononcée par une juridiction pénale de droit commun ;
7- les incapables majeurs…
L’approche d’une élection présidentielle au Sénégal n’a jamais été aussi marquée d’incertitudes concernant les acteurs qui vont y participer. En dehors du filtre que constitue le parrainage, la « situation judiciaire » des opposants Ousmane Sonko, Khalifa Sall et Karim Wade constitue le facteur qui suscite beaucoup d’interrogations.
Le cas Ousmane Sonko, l’opposant le plus en vue du régime
Depuis sa troisième place à l’élection présidentielle de 2019 et ses résultats plus qu’honorables aux élections locales de janvier 2022 et législatives de juillet 2022, l’opposant Ousmane Sonko a eu beaucoup de démêlés avec la Justice. Auparavant, il a été radié de la fonction publique pour manquement au devoir de réserve. Il était Inspecteur principal à la Direction générale des Impôts et Domaines (DGID).
À deux mois de l'élection présidentielle, l'incertitude plane toujours quant à sa participation à la présidentielle.
Il est difficile de ne pas analyser la situation judiciaire de Ousmane Sonko comme un complot « politico-judiciaire » visant à l’écarter de la présidentielle de février 2024 compte tenu du degré d’implication de l’Etat dans le processus judiciaire et de l’enchainement des évènements suivants ayant comme dénominateur commun, la remise en cause de son éligibilité.
Une éligibilité en question suite à l’affaire « Sweet beauty »
Accusé de viols et autres infractions, il refuse de comparaître le jour de son procès, le 23 mai, dénonçant un complot politique et se réfugie à Ziguinchor. Il est ramené de force à son domicile dakarois par le GIGN et placé sous haute surveillance policière. Il a été reconnu coupable « de corruption de la jeunesse » en première instance, le 1er juin 2023, et condamné par contumace à deux ans de prison ferme.
La première conséquence du jugement par contumace d’un individu est que la personne jugée ne peut pas faire appel. Il s’y ajoute que, même si le contumax a un avocat, ce dernier ne peut le défendre parce que son client est absent. Ces principes ont été strictement appliqués lors du procès du 1er juin.
Si, après la condamnation le contumax vient à être arrêté, le jugement est non avenu. C’est le code de procédure pénale en son article 356 qui prévoit que si les accusés jugés par contumace se constituent ou s'ils viennent à être arrêtés avant les délais de prescription, l'arrêt de condamnation est anéanti de plein droit et il est procédé à nouveau dans les formes ordinaires à moins que le contumax déclare expressément, dans un délai de dix jours, acquiescer à la condamnation.
Arrêté le 28 juillet 2023 sous le prétexte d'un vol de téléphone portable, il est poursuivi pour appel à l’insurrection, association de malfaiteurs, atteinte à la sûreté de l’État, complot contre l’autorité de l’État, actes et manœuvres à compromettre la sécurité publique et à créer des troubles politiques graves, diffusion de fausses nouvelles, mise en danger de la vie d'autrui, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et placé sous mandat de dépôt.
Tout porte à croire alors que le jugement de la Chambre criminelle qui l'a condamné se trouve anéanti de plein droit en application de l’article 356 du code de procédure pénale sus visé d’autant plus qu’il a vite rédigé une lettre adressée à l'Administrateur du Greffe du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar (TGIHCD) reçue le 03 août 2023, lui signifiant sa décision de ne point acquiescer au jugement.
Le Garde des sceaux, ministre de la Justice, ignorant le principe selon lequel il est interdit de distinguer là où la loi ne distingue pas, conteste l’anéantissement du jugement de la Chambre criminelle au motif que le contumax n'a pas été arrêté dans le cadre de l'exécution du jugement du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar. Il cherchait à établir le caractère définitif de la condamnation de Sonko justifiant sa radiation des listes électorales annoncée le 03 août 2023 par le sous-préfet des Almadies. Entre temps, par décret n°2023-1407 du 31 juillet 2023 le parti Pastef a été dissout pour manquement à ses obligations en vertu de l’article 4 de la Constitution et de l’article 4 de la loi n° 81- 17 du 6 mai 1981 relative aux partis politiques, modifiée par la loi n° 89-36 du 12 octobre 1989.
La question a été tranchée par le TIHC de Dakar après que la décision de radiation a été contestée au tribunal de Ziguinchor conformément à l’article L43 al 2 du code électoral[5] et que la Cour suprême a cassé et renvoyé l’affaire devant le juge de Dakar. Le TIHC considère… qu'il est dit à l'article 307 que le jugement de contumace est anéanti de plein droit lorsque le condamné est arrêté ou s'il se constitue prisonnier avant la prescription de la peine ; qu'il n'est pas discuté que le sieur Sonko est arrêté et détenu ; que même à supposer comme le prétend l'Etat du Sénégal, qu'il s'agit d'une arrestation pour autre cause, dès lors que le contumax fait connaitre de façon expresse lors de son arrestation son état de contumax et déclare qu'il n'acquiesce pas au jugement, l'article 307 du CPP doit trouver application ; …que l'applicabilité des dispositions de l'article 307 CPP est d'autant plus incontestable qu'il est loisible au contumax, tant que la peine n'est pas prescrite, de se constituer prisonnier pour anéantir le jugement sauf à déclarer son acquiescement dans les dix jours ; qu'en le détenant, l'Etat le prive de cette faculté et ne peut, par conséquent, prétendre maintenir les effets de cette condamnation. C’est sur cette base que Le TIHC de Dakar a ordonné, le jeudi 14 décembre, la réintégration sur les listes électorales de Ousmane Sonko. Il a confirmé le jugement rendu en octobre par le juge de Ziguinchor. Cette décision a relancé sa candidature à la présidentielle de février 2024. Il avait alors jusqu'au 26 décembre pour déposer sa candidature et recueillir ses parrainages mais l’administration électoral a persisté dans son refus de lui remettre ses fiches de parrainage.
Nous ne comprenons pas pourquoi les services du ministère de l’Intérieur ont persisté dans le refus d’exécuter la décision de justice.
Nous ne comprenons pas quel est le fondement juridique du refus de la Caisse des dépôts et consignations -CDC- de recevoir le cautionnement de O. Sonko.
Nous ne comprenons pas l’attitude attentiste de la CENA à qui le législateur sénégalais a reconnu le pouvoir d’intervenir à tous les niveaux du processus électoral depuis l’inscription sur les listes électorales jusqu’à la proclamation provisoire des résultats. Elle est chargée de faire respecter la loi électorale de manière à assurer la régularité, la transparence, la sincérité des scrutins en garantissant aux électeurs, ainsi qu’aux candidats en présence, le libre exercice de leurs droits.
Une éligibilité en question suite à l’affaire « Mame Mbaye Nang »
Dans une autre affaire de diffamation, l’ayant opposé au Ministre du Tourisme M. Mame Mbaye Niang, Ousmane Sonko est condamné en première instance à deux mois de prison avec sursis et 200 millions de francs CFA de dommages et intérêts. Alors que la partie requérante semblait satisfaite du jugement, c’est le Procureur de la République qui a fait appel confirmant les accusations d’une implication de l’Etat dans une affaire privée et son « intérêt » à obtenir une condamnation remettant en cause l’éligibilité de Sonko.
La Cour d'appel qui a statué en deuxième ressort, le 30 mars, a alourdi la peine en infligeant au maire de Ziguinchor, une condamnation de six (6) mois assortis du sursis pour "diffamation et injures" tout en maintenant la sanction pécuniaire.
L’objectif de priver O. Sonko de son éligibilité n’est pourtant pas atteint si l’on procède à une lecture très stricte de l’article L 29 du Code électoral.
O. Sonko n’a été condamné ni pour crime, ni pour vol, escroquerie, abus de confiance, trafic de stupéfiants, détournement, corruption et trafic d'influence, contrefaçon, ni pour l'un des délits passibles d'une peine supérieure à cinq (05) ans d'emprisonnement. Il n’est pas en état de contumace. Une interdiction du droit de voter n’a pas été prononcée contre lui. Il est frappé d’une condamnation de six (6) mois assortis du sursis. Or, l’article L29,3 vise ceux qui sont condamnés à une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à six (06) mois avec sursis, pour un délit autre que ceux que nous venons d’énumérer.
Il faudra attendre de savoir ce que le pourvoi en cassation introduit devant la Cour suprême donnera, pour en avoir le cœur net.
Les cas Khalifa Sall et Karim Wade
Lancés officiellement le 31 mai courant, les travaux du dialogue national initié par le chef de l’Etat ont été clôturés le 22 juin. Ils ont été présentés par une bonne partie de l’opinion comme devant rendre possible les candidatures de Khalifa Sall et Karim Wade. Le nouvel article L.28, modifié par la loi n° 2023-16 du 18 août 2023 dispose que Nul ne peut refuser !'inscription sur les listes électorales : aux personnes qui, frappées d'incapacité électorale à la suite d'une condamnation, bénéficient de la réhabilitation ou font l'objet d'une mesure d'amnistie ou de grâce.
Pour les personnes bénéficiant d'une mesure de grâce, !'inscription sur les listes électorales ne pourra intervenir qu'après l'expiration du délai correspondant à la durée de la peine prononcée par la juridiction de jugement, s'il s'agit d'une peine d'emprisonnement, ou d'une durée de trois (03) ans à compter de la date de la grâce, s'il s'agit d'une condamnation à une peine d'amende.
Des interrogations demeurent malgré tout quant à la participation des « graciés) à l’élection de 2024. La grâce, contrairement à l’amnistie, n’efface que la peine mais laisse intacte l’infraction commise et la condamnation prononcée. Quelle sera la position du juge devant la déclaration sur l’honneur par laquelle un candidat, condamné à une peine d’amende, atteste être en règle avec la législation fiscale du Sénégal ? Que contient le volet n°3 du casier judiciaire des deux candidats ?
Karim Wade est-il de nationalité exclusivement sénégalaise ?
II- que de polémiques
a/ Polémique à propos de la portée de l’article 2 du décret n° 70-1216 du 7 novembre 1970
Autrement posée, la polémique a porté sur l’aptitude de l’Agent Judiciaire de l’Etat à intervenir en matière électorale ou autre en qualité de représentant de l’Etat.
Pour les avocats du candidat O. Sonko, l'Agent Judiciaire n'est pas recevable à intervenir dans la cause concernant la radiation de leur client puisqu'il ne dispose d'aucune attribution en matière électorale.
Comme réponse, la partie Etat a invoqué l'article 2 du décret n°70-1216 du 7 novembre 1970 portant création de l'Agence judiciaire de l'Etat et fixant ses attributions aux termes duquel : l'Agence judiciaire de l'Etat est chargé du règlement de toutes les affaires contentieuses où l'Etat est partie et de la représentation de l'Etat dans les instances judicaires. Toute action portée devant les tribunaux et tendant à faire déclarer l'Etat créancier ou débiteur pour les causes étrangères à l'impôt ou au domaine doit, sauf exception prévue par un texte spécial être intentée, à peine de nullité, par ou contre l'Agent judiciaire de l'Etat. Pour les avocats de l’Etat, la Direction Générale des Elections, la Direction de l'Automatisation du Fichier et le Ministère de l'Intérieur n'étant pas dotés de la personnalité juridique, l'intervention de l'Agent judiciaire est juridiquement fondée.
A travers l’arrêt n° 72 du 17 novembre 2023, la Cour suprême, statuant sur le pourvoi en cassation formé contre la décision du Président du Tribunal d'instance de Ziguinchor, a considéré que sans avoir à justifier d'un mandat, l'Agence judiciaire a un pouvoir de représentation générale de l'État, sauf lorsqu'un texte confère cette prérogative à d'autres services et celle-ci est admise toutes les fois où une entité ou autorité administrative dépourvue de la personnalité juridique et, par conséquent, de la capacité d'ester en justice, est en cause.
Cela ne semble pas être l’avis de l’ancien ministre, Mamadou Abdoulaye Sow, Inspecteur du Trésor à la retraite pour qui, si, comme l’admet la Cour suprême, l’AJE a un pouvoir de représentation générale de l’État qui lui est donné par un texte de 1970, comment comprendre alors que l’article 54 du décret n° 95-040 portant organisation du ministère de l’Économie, des Finances et du Plan ait prévu que (l’AJE) peut …recevoir mandat spécial de toute administration ou de toute personne publique ou organisme parapublic… pour les représenter en justice ou dans un contentieux extrajudiciaire .
Le TIHC de Dakar intervenant sur la question, considère que le requérant, en saisissant le juge chargé du contentieux de l'inscription sur les listes électorales aux fins d'obtenir l'annulation de la mesure de radiation a, lui-même, installé l'Etat dans la cause puisque l’acteur dont les actes sont contestés, c’est le Directeur de l'Automatisation des Fichiers, une autorité administrative déconcentrée, agissant en cette qualité et, par conséquent au nom de l'Etat du Sénégal. Le juge considère que la représentation de l'Etat dans le contentieux de l'inscription sur les listes électorales n'étant pas conférée à aucune autre entité, il va sans dire que cette prérogative revient à l'Agent judicaire.
b/ Polémique à propos du caractère suspensif ou non du recours en cassation après une décision du tribunal d’instance
La Direction Général des Elections a refusé d’appliquer la décision de réintégration du candidat Sonko conformément à l’ordonnance n°01/2023 en date du 12 octobre 2023 du Président du Tribunal d’Instance de Ziguinchor qui a annulé la mesure de radiation de ce dernier des listes électorales et ordonné sa réintégration par les services centraux du ministère de l’intérieur sur la liste électorale de la commune de Ziguinchor ainsi que sur le fichier général des électeurs au motif qu’il pendait un pourvoi en cassation au niveau de la Cour suprême. Nous sommes d’avis qu’il s’agit d’une violation manifeste du code électoral qui énonce très clairement que la décision du président du Tribunal est rendue en dernier ressort, autrement dit, elle ne peut faire l’objet d’appel. La seule possibilité offerte à la partie non satisfaite, c’est un recours en cassation devant la Cour Suprême, conformément aux dispositions de la loi organique sur ladite Cour. Or, celle-ci ne prévoit que certaines hypothèses de suspension d’une procédure par un recours[6].
Il y a quand même eu des Sénégalais qui ont soutenu le caractère suspensif du pourvoi en cassation introduit devant la Cour suprême en arguant du fait qu’il importe de tenir compte de l’hypothèse de la cassation par le juge suprême de la décision d’instance. Le cas échéant, il risque d’y avoir réintégration suivie d’une nouvelle radiation si la Cour suprême casse et tranche la question autrement ou si elle renvoie devant une autre juridiction d’instance qui ne confirme pas le premier jugement.
Au-delà de la polémique, l’attitude de la DGE, a fait naître des suspicions légitimes quant à la neutralité et l’aptitude de l’administration électorale pour garantir la transparence et la sincérité du scrutin à venir ainsi que l’égalité des candidats. Or, le système électoral doit promouvoir des conditions d’exercice garantissant la transparence et la sincérité du scrutin ainsi que l’égalité des candidats.
La confiance des acteurs à une élection comporte un enjeu fondamental et même vital : le maintien de la croyance en la vertu de la légitimité démocratique. Cela n’est pas à négliger.
1. Éviter la pléthore de candidats à la candidature passe par un meilleur encadrement de l’opération « retrait de fiches de parrainage ». On pourrait instituer un cautionnement remboursable au candidat dont le dossier a été jugé recevable par le juge constitutionnel. Autant de candidats à la candidature (plus de 260 finalement) contribue à décrédibiliser la station présidentielle.
2. L’épisode du refus de la DGE de respecter une injonction de la CENA, doit faire réfléchir. Elle a enlevé toute crédibilité à cette Autorité. Quelle serait les conséquences d’une décision de la CENA de mettre en exécution les pouvoirs que lui confère la loi, à savoir les pouvoirs de dessaisissement ou de substitution d’action ?
Il est opportun d’étudier les possibilités de rattacher la DGE à la CENA et d’en faire son bras technique.
[1] Ce fut le cas des élections de 1963, 1968, 1978, 1988 et 1993
[2] A Karim Wade et Khalifa Sall, on a créé une situation judiciaire empêchant toute possibilité de participation. Accusé d’avoir profité de ses fonctions pour détourner 1,8 milliard de francs CFA de la régie d’avance de la mairie de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, a été condamné à 5 ans de prison ferme au terme d’un procès qui aura duré près de deux mois et demi.
En ce qui concerne Karim Wade, même si son arrestation était pratiquement une demande sociale, les sénégalais ont été surpris de constater que sur une liste de 25 personnes de l’ancien régime citées comme devant être poursuivies, seul ce dernier a finalement été poursuivi et condamné en 2015, ce qui l’éloigna de l’élection présidentielle de 2019.
A l'ouverture du Groupe consultatif 2014 pour le Sénégal, réunissant le pays, ses bailleurs et partenaires techniques et financiers (PTF), le Président SALL a déclaré ce qui suit : ' …La réforme ramènera à cinq ans, renouvelables une seule fois, le mandat de sept ans pour lequel j'ai été élu. Elle sera d'application immédiate. En visite de travail à Paris, il soutint, à l’issue d’un déjeuner avec son homologue français qu’il fera bel et bien un mandat de 5 ans au lieu de 7. (…il y a déjà une commission que j’ai confiée au président Amadou Makhtar Mbow qui est en train de travailler sur la question. Cette commission me soumettra des propositions, parmi lesquelles la première mesure sera la réduction du mandat en cours de 7 à 5 ans. Que ce soit par référendum ou par un vote à l’Assemblée, je réduirai mon mandat à 5 ans ».
Les différentes déclarations du président de la République exprimées à propos du mandat et qui circulent à travers des vidéos ont été émises entre 2016 et 2018. Cela rend inopérant l’argument selon lequel ceux qui ont voté « oui » au referendum de 2016 ont balisé la voie du « second quinquennat ». Qui n’a pas entendu le Président de la République dire que s’il est élu en 2019, il accomplit son deuxième et dernier mandat et qu’en 2024 « parénassi ».
Voir ci-dessous un extrait de l’avant-projet de Constitution proposé :
Article 151
Le président de la République en fonction termine son mandat au cinquième anniversaire de la date de son élection. Seules ne lui sont pas applicables au cours du présent mandat, les dispositions prévues à l’article 63 al 2.
Le mandat en cours du Président de la République lors de l'adoption de la présente Constitution est compris dans le décompte du nombre de mandats autorisé.
[5] Aux termes de l’article L 43 al 2 du Code électoral, tout citoyen omis sur la liste électorale ou victime d’une erreur purement matérielle portant sur l’un de ses éléments d’identification et détenant son récépissé peut exercer un recours devant le Président du Tribunal d’Instance dans les vingt (20) jours qui suivent la publication de la liste électorale, soit directement, soit par l’intermédiaire de la CENA.
[6] Aux termes des dispositions combinées des articles 36 et 74-2 de la loi n° 2017-09 sur la Cour suprême, le délai de recours et le recours ne sont suspensifs que dans les cas suivants :
1- en matière d’état ;
2- quand il y a faux incident ;
3- en matière de vente immobilière ;
4- en matière pénale, sauf, d’une part, en ce qui concerne les condamnations civiles et, d’autre part, l’existence de dispositions législatives contraires ;
5- dans les cas suivants :
déclaration d’utilité publique ;
expulsion d’étranger ;
extradition ;
litiges relatifs à l’élection aux conseils des collectivités territoriales.
Le professeur Abdoulaye Dièye est enseignant au département de droit public de la faculté des Sciences juridiques et politiques de l'UCAD
par Jean Pierre Corréa
DU CALME BARTH, Y’A PAS LE FEU AU LAC
Anne Hidalgo n’assiste pas à toutes les réunions préparatoires de Paris 2024, et Barthélémy Dias n’est pas le seul maire concerné par les JOJ 2026, il est d’égale dignité avec ceux de Diamniadio et de Saly
D’abord l’information qui a fait office de « polémiques » n’est parue que dans les colonnes d’un seul quotidien sur la pléthore que compte notre pays, ce qui aurait dû amener notre gaillard de maire à plus de circonspection avant de ruer dans des brancards qui vont s’avérer sans poignées et qui vont le mettre dans une situation inconfortable pour le coup.
Pourtant Barthélémy Dias depuis quelques années, fait une sans-fautes, le maire de la capitale a pris de l’épaisseur, de la prestance, sans perdre son mordant de « Boy Town », qu’il assène d’une langue toujours bien pendue et adossée à ce qui est un mélange de fierté et de dignité. L’homme a de qui tenir, les fruits ne tombent jamais loin des arbres.
Mais comme on dit, « la politique est un jeu de séquences, il faut se battre quand il le faut, dialoguer lorsque c’est nécessaire et rester calme quand il n’y a pas lieu de s’énerver. Or la séquence de la réunion du Palais entre le président Macky Sall et le CNOSS, qui prépare les JOJ de 2026, était une séquence qui imposait d’être circonspect et attentif, certes, mais surtout honnête et clairvoyant. Au lieu de cela, Barth s’est laissé aller à ces rodomontades qui le caractérisaient encore naguère, menaçant de tout simplement interdire le déroulement de cet évènement universel à Dakar, si d’aventure, une autre réunion se tenait sans lui…Rien que ça !
Il est important de souligner, que le chef de l’État a le droit, alors qu’il est en train de mettre de l’ordre dans ses tiroirs, à trois mois de quitter ses fonctions, de faire le point entre les services dépendant de son pouvoir de président et les organisateurs, pour voir si tout se passe comme il faut et renforcer certaines initiatives à cet effet.
Il n’a jamais été question de minimiser l’importance du maire de Dakar dans un tel évènement, et cela lui a déjà et maintes fois été démontré. Anne Hidalgo n’assiste pas à toutes les réunions préparatoires de Paris 2024, et Barthélémy Dias n’est pas le seul maire concerné par les JOJ 2026, il est d’égale dignité avec ceux de Diamniadio et de Saly.
Cette séquence est un signe de nervosité qui serait en train de gagner le maire de Dakar, et ça ne lui ressemble pas. Mais de là à menacer de ses foudres une institution aussi importante que le CIO, c’est confondre « Angleterre et pomme de terre » … C’est méconnaître l’architecture même d’une telle institution séculaire… Du calme Barth ! Y’a pas le feu au lac !
C’est vrai qu’il a de quoi s’inquiéter, puisqu’avec le verdict rendu vendredi dernier par la Cour suprême, son mandat de député dépend à présent du bon vouloir du pouvoir en place, même si le plus inquiétant demeure le risque de perdre la mairie de Dakar.
Pourtant, d’après les textes régissant le code des collectivités locales, il ne court en principe aucun risque d’être destitué. Il est bon de préciser « en principe » … Mais on n’en est pas encore là, et il faut tout en restant calme, croire que l’architecte du dialogue qu’il a été, a pu l’être grâce à sa nouvelle stature et à ses lectures toujours justes d’une situation politique gazeuse, que ses positions fermes ont contribué à dissiper.
Alors, dès lors, pourquoi donc s’énerver ? Dakar accueillera les JOJ de 2026. Que ça plaise ou non au maire de la capitale. « Meroum guinar safoul tousinier ».
TCHAD, UNE NOUVELLE CONSTITUTION PROMULGUÉE
Le président tchadien, Mahamat Idriss Déby Itno, a promulgué, vendredi, la nouvelle constitution du pays après que la Cour suprême a rejeté le recours en annulation des résultats du référendum du 17 décembre.
Dakar, 29 déc (APS) – Le président tchadien, Mahamat Idriss Déby Itno, a promulgué, vendredi, la nouvelle constitution du pays après que la Cour suprême a rejeté le recours en annulation des résultats du référendum du 17 décembre.
Les Tchadiens ont approuvé à plus de 85 % la nouvelle constitution du pays lors d’un référendum organisé le 17 décembre.
Le texte a été entériné jeudi par la Cour suprême du pays à la suite de la publication des résultats officiels.
La haute juridiction du Tchad avait auparavant rejeté le recours en annulation du Bloc Fédéral, une coalition de l’opposition, qui contestait les résultats en pointant des irrégularités dans le déroulement du vote.
Dans la foulée de la promulgation de la nouvelle constitution, le Premier ministre, Saleh Kebzabo, a annoncé avoir remis sa démission au président.
‘’Conformément à la pratique républicaine et aux usages, suite à la promulgation de la Constitution ce jour, j’ai remis au président de transition ma démission de Premier ministre ainsi que celle de mon Gouvernement’’, a-t-il indiqué sur le réseau social X.
Mahamat Idriss Déby Itno, 37 ans, est au pouvoir depuis la mort de son père, Idriss Déby Itno, en avril 2021.
Le jeune dirigeant s’était engagé auprès de l’Union africaine à organiser des élections après une transition de dix-huit mois.
La durée de la transition a été par la suite allongée de deux ans au sortir d’un dialogue national contesté par des opposants.
Ce dialogue a dans le même temps ouvert la voie à la participation de Mahamat Idriss Déby à la prochaine présidentielle annoncée pour 2024.
INVESTITURE SOUS LES CRITIQUES POUR AMADOU BA
Désigné comme successeur de Macky Sall, le Premier ministre semble peiner à s'imposer comme figure de proue de la majorité, au point de susciter l'ire de certains alliés contraints à la dissidence. Ses soutiens s'alarment d'une campagne qui ne décolle pas
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 29/12/2023
Investi par le parti au pouvoir pour l'élection présidentielle du 25 février 2024, le Premier ministre sénégalais Amadou Ba doit faire face aux candidatures dissidentes d'autres cadres de la majorité, révèlent des informations publiées dans Le Monde le 29 décembre 2023.
Devant une assistance acquise à sa cause réunie au King Fahd Palace de Dakar, hôtel de luxe de la capitale, Amadou Ba a promis lors de son investiture le 21 décembre dernier de "marquer le Sénégal comme le président de l'emploi" et de faire du pays "une société de plus d'équité sociale et de prospérité partagée", selon le quotidien français.
Cependant, "sa campagne ne prend pas" et risque de se solder par "un désastre", prédisent en privé des cadres de la majorité. L'inquiétude est telle que certains n'hésitent plus à le dire publiquement, à l'image du ministre du Tourisme Mame Mbaye Niang qui "assume" d'avoir jugé dans Le Monde qu'"il ne passe même pas au premier tour" sur la base "d'études".
Ce faisant, le candidat du camp présidentiel se retrouve confronté à de sérieuses dissidences. L'ancien ministre de l'Intérieur Aly Ngouille Ndiaye et l'ex-Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne se sont lancés dans la course à la présidence, dénonçant selon Le Monde l'illégitimité" d'Amadou Ba, encarté à l'Alliance pour la République (APR) seulement depuis 2017.
"Si les candidatures de son clan sont validées par le Conseil constitutionnel, Amadou Ba aura ses propres alliés contre lui", constate l'analyste politique Babacar Ndiaye, cité par le journal. Car derrière ces dissidents se cache un sentiment d'"aigreur de ne pas avoir été choisis" par le président Macky Sall pour porter les couleurs de la majorité.
Promoteur du Plan Sénégal Emergent, Amadou Ba compte sur les réalisations économiques et infrastructures de l'ère Macky Sall. Mais pour imprimer son style et différencier sa campagne de celle de son mentor, le grand commis de l'Etat a du pain sur la planche, alors que le retrait de Macky Sall rend inéluctable la perte d'influence de ce "chef d'Etat [qui] tenait son parti d'une main de fer".
par Khadim Ndiaye
CHEIKH ANTA DIOP, 100 ANS AUJOURD’HUI
A l'occasion du centenaire de sa naissance, replongez dans les souvenirs que Jan Carew a laissés de sa rencontre avec Cheikh Anta Diop en 1972 en Éthiopie
En 1972, Cheikh Anta Diop se rend à Addis-Abeba (Éthiopie) pour assister à la Conférence annuelle de l’Association of African Studies (ASA) qui se tient dans l’immeuble de l’Organisation de l'unité africaine (OUA).
Diop y est accueilli par Tsegaye Gebre-Medhin (1936-2006), son disciple éthiopien, qu’il dirigera en thèse sur le théâtre égyptien dans les années 1980. Il y rencontre également Jan Carew (1920-2012), homme de lettres d'origine guyanaise, qui enseignera plus tard à Princeton et Northwester University.
La conférence enregistre la présence d’un autre invité de marque : le Guyanais Walter Rodney, auteur du fameux ouvrage, How Europe Underdeveloped Africa.
Jan Carew, narrateur enchanteur, rapporte quelques détails de ce séjour qu’il passa en compagnie de si distingués participants.
« Rodney et Diop ensemble à Addis-Abeba, quel événement historique ! », s’exclame-t-il. Le premier, « fils de la diaspora africaine », avait, selon ses termes, « consacré sa vie d'érudit-militant à entretenir la flamme de la libération africaine », tandis que le second « avait usé de ses formidables dons intellectuels, de son courage et de sa vision d'une Afrique libérée, pour redonner à ce continent et à ses peuples la place qui leur revient dans l’histoire du monde ».
Diop et Rodney n’ont pas pu, malheureusement, échanger longuement. Ils se sont croisés en passant, sollicités qu’ils étaient, tous les deux, par les interpellations de nombreux étudiants et curieux venus assister à la conférence. Décrivant leur aura et l’attraction qu’ils exerçaient lors de cette rencontre, Carew note que les deux illustrent invités étaient « comme des lions intellectuels au milieu des moutons académiques lors de cette conférence de l’ASA en 1972 ».
Carew loue également leur intégrité morale, soulignant chez eux, « le même genre d’honnêteté intellectuelle et d'intégrité morale » qui faisait grimacer les « accommodants ».
Ce face-à-face de 1972 entre ces deux grands esprits était leur première et dernière rencontre.
En marge de la conférence, Tsegaye, emmena Diop et Carew en excursion d’une journée durant laquelle ils découvrirent les beautés de la campagne éthiopienne.
Carew raconte exquisément le périple : « Nous traversâmes des lits de rivières asséchés et nous nous reposâmes à l’ombre d’acacias solitaires que les charbonniers avaient épargnés. Le premier lac que nous avons visité se trouvait dans un immense bassin concave bordé de collines blanchies jusqu’à l’os. Une combinaison de bûcherons débauchés, de pluies et d’érosion avait dénudé le paysage de sa végétation. Au bord du lac, il y avait un arbre sacré comme une sentinelle solitaire qui contemplait son image dans l’eau calme. L’écorce était tachée de sang sacrificiel et des centaines de clous avaient été enfoncés dans son tronc. »
Au cours de l’excursion, ils rencontrent une vieille femme que Carew décrit comme « courbée en deux sous le poids d'un énorme paquet de fagots ». La femme, poursuit Carew, « monta lentement la colline, équilibrant son fardeau et agrippant la terre de ses pieds nus. Elle luttait, non seulement avec le poids de son baluchon, mais aussi contre un vent froid et persistant. »
De manière spontanée, les trois hommes allèrent à sa rencontre pour l’aider. « Son visage, rapporte Carew, qui avait été brûlé par le vent et le soleil pendant des décennies, avait des rides profondes creusées par les saisons de labeur, en portant et en élevant des enfants et en luttant contre les angoisses quotidiennes. Pendant un instant, il y eut un regard effrayé dans ses yeux. Tsegaye lui parla doucement, mais elle continua péniblement, ignorant notre offre d'aide. »
Cheikh Anta Diop insista et la suivit. Se faisant aider de Tsegaye qui traduisait ses propos, Diop arriva à persuader la vieille dame d'accepter un don d'argent à sa famille. Ce que Carew qualifia de « geste d'amour, de compassion et d'amitié ».
Poursuivant leur chemin, les trois hommes semblaient fusionner avec la nature. Diop, solide, paraissait infatigable. « En marchant, écrit Carew, dans les collines où l’herbe desséchée avait été aplatie par le vent, et où Diop ne semblait jamais se fatiguer, nous nous arrêtions pour regarder un pélican se poser gracieusement sur la surface ensoleillée du lac. »
Subjugué par l’énergie du Sénégalais, déployée tout au long du séjour, Carew conclut : « Diop semblait avoir réussi une enviable harmonie entre énergie physique, spirituelle et intellectuelle. Je n’ai pas pu m’empêcher de le voir en contraste frappant avec les nombreux intellectuels noirs que je devais rencontrer constamment lors de conférences, et qui, dans leur tentative frénétique de redorer leur héritage et d’être acclamés par leurs mentors blancs, se déchiraient littéralement psychologiquement. »
Eh bien, cet homme sur lequel Jan Carew ne tarissait pas d’éloges aurait eu 100 ans aujourd’hui
par Alioune Dione
CHEIKH ANTA DIOP, INTINÉRAIRE D’UN SAVANT COURGEUX ET ANTICONFIRMISTE
Cheikh Anta Diop est avant tout un mémoire vivant, le panthéon du savoir nègre qui a su remettre sur les rails une vérité mise sous silence depuis plusieurs générations. Ces réflexions ne doivent pas être laissées aux oubliettes
« L’ignorance de l’histoire de son peuple est une forme de servitude ».
La lumière a jailli le 29 décembre 1923 dans le terroir de Caytu, un village se situant à 29 kilomètres du département de Bambey dans la région de Diourbel. C’est dans cette contrée qui se trouve à 150 Kilomètres de Dakar que Cheikh Anta Diop, digne fils de la Linguère Maguette Diop et du jeune Massamba Sassoum Diop qui décède peu de temps après la naissance de son prodige, a vu le jour. Orphelin de père, le jeune Cheikh Anta passe son enfance sous la tutelle d’érudits soufis, ce qui lui confère une base d’enseignement coranique et philosophique ancrée dans l’esprit du mouridisme. Son intelligence frappe très tôt son entourage, ce qui lui donna la possibilité d’entamer ses études scolaires à l’école française de Diourbel. Dès son arrivée à Diourbel, il vit sous le toit de Cheikh Ibra Fall, disciple ésotérique de Cheikh Ahmadou Bamba et père adoptif de Cheikh Anta, il lui inculqua la rigueur et l’ardeur du travail, valeurs intrinsèques du mouridisme.
Diourbel fut un terroir de formation et d’émancipation pour Cheikh Anta Diop, son enseignement en primaire fut sanctionné par le certificat de fin d’études primaires qu’il obtint en étant le premier du centre. Après sa réussite, il retrouve sa mère à Médina dans la banlieue dakaroise pour s’inscrire au lycée Vallenhoven qui est l’actuel lycée Lamine Guèye. Sa soif de connaissances et ses bases linguistiques solides en Wolof lui poussent à vouloir créer un alphabet commun pour les langues africaines. Un projet osé qu’il va abandonner pour mieux poursuivre sa carrière scientifique. Cheikh Anta fit sa première partie d’études secondaires à Dakar mais ses différends avec son professeur de français M. Boyau lui poussent à quitter Dakar pour s’inscrire en série mathématique au lycée Faidherbe de Saint Louis.
Esprit curieux, Cheikh Anta finit par obtenir son baccalauréat en Mathématique à Saint Louis, diplôme qu’il va réenrichir par son brevet de capacité coloniale en philosophie à Dakar. Parcours typique d’un jeune intellectuel à la conquête du savoir. Cette ingéniosité acquise si tôt lui conduit à Paris où il s’inscrit au lycée Henri-IV pour devenir ingénieur en aéronautique. Parallèlement, il va s’inscrire à la Sorbonne où il décroche sa licence de philosophie.
Préparant sa thèse sur l’historiographie africaine intitulée De l’antiquité Nègre Egyptienne aux problèmes culturels de l’Afrique Noire d’Aujourd’hui dans laquelle, il affirme l’origine négroïde de la civilisation égyptienne, Cheikh Anta peine à réunir un jury pour sa soutenance. Ce refus des académiciens d’être membres du jury de sa thèse n’avait rien d’académique mais il était d’ordre idéologique. Le jeune chercheur sénégalais venait de faire bouger la ligne de stabilité scientifique sur l’hégémonie hellénistique comme source et fondement de toute science.
Les idéologues de ce refus cherchaient à protéger une supériorité scientifique et culturelle de l’Occident à l’égard des autres « races » secondaires, de ce fait, ils ne pouvaient pas accepter cette « vérité » qu’avançait un jeune nègre. Le combat d’historicité qu’a entamé Cheikh Anta a laissé perplexes le monde scientifique et surtout les Egyptologues sur l’origine négroïde des égyptiens. Une thèse que Cheikh Anta n’est pas le premier à avancer mais il est le premier à le démontrer avec tant d’acuité. Son courage intellectuel pour montrer que la scientificité n’obéit pas à des critères standards lui rapproche d’Aimé Césaire qui s’est battu pour lui trouver une maison d’édition. Quoi de plus normal que de publier cette thèse chez un éditeur africain ? L’ouvrage fut publié dans Présence Africaine, une maison d’édition créée par le philosophe Sénégalais Alioune Diop pour définir l’originalité africaine. L’ouvrage publié sous le titre Nations nègres et culture va bousculer l’univers intellectuel occidental. Historien, socio-anthropologue, philosophe et scientifique Cheikh Anta s’est battu sur tous les fronts de la science pour défendre sa thèse. Cette opiniâtreté lui a valu l’acceptation de sa soutenance en 1960. Cette soutenance polémique qui a duré sept heures de temps fut sanctionnée par une mention honorable pour tenir l’intellect rebelle hors des amphithéâtres occidentaux. Les critiques qui lui ont été faites sont d’ordre bibliographique et méthodologique pourtant dans le fond du problème aucune antithèse concernant l’origine négroïde de l’Egypte antique.
Cette brèche historique qu’à ouvert Cheikh Anta dans le monde scientifique ne sera pas laissée inexplorée. De conférence en conférences, d’ouvrage en ouvrages, Cheikh Anta approfondit sa pensée avec des arguments à la fois comparatifs, linguistiques et génétiques. L’ouvrage Nations nègres et culture vu comme un nouveau souffle de revalorisation de la conscience africaine n’en est pas seulement un ouvrage de galvanisation des Noirs et d’anoblissement des origines nègres, il est avant tout une thèse scientifique affirmant l’origine négroïde et monocentrique de l’Égypte antique. Elle démontre une souveraineté scientifique de l’Afrique noire dans les mathématiques, la géométrie et les sciences dites molles, ce qui lui opposera aux fondateurs du mouvement de la négritude qui s’axaient plutôt sur une relativité culturelle alors que Cheikh Anta Diop va au-delà d’une relativité qui ne décrit pas la réalité historique des faits.
La publication de l’œuvre de Cheikh Anta en 1954 annonce une rupture de perception rendant caduques toutes les théories qui avançaient l’origine polycentrique de l’Homme. Son courage intellectuel et son anticonformisme scientifique se confirment juste après sa soutenance où il prend le chemin du retour au Sénégal pour former les futurs intellectuels. Pourtant, sa candidature à la chaire de Sociologie à l’université de Dakar fut rejetée afin qu’il ne puisse pas formater les nouveaux étudiants à adhérer aux théories qu’il avançait. Ce rejet du poste d’enseignant-chercheur à ladite université qui porte son nom aujourd’hui va lui ouvrir les portes de l’IFAN où il sera assistant sous la direction de Théodore Monod. Ses travaux à l’IFAN sur le Mali et son laboratoire de datation des échantillons archéologiques par la méthode de radiocarbone lui donnent accès à des données qui vont plus éclairer sa thèse sur l’origine négroïde de l’Egypte et les relations socioculturelles et historiques que partagent les ethnies africaines et ceux des égyptiens antiques. Cette posture rebelle de l’intellect qui affirme que l’humanité a pris naissance en Afrique n’a pas manqué de résistances même chez ses disciples comme Amadou A. Dieng qui affirme : « l’un deçà de l’homme et l’au-delà de l’homme ne peut être connu par l’homme ». Cette critique est loin d’être scientifique dans la mesure où il est tout son ancrage repose sur une doctrine ésotérique refusant à l’Homme la capacité d’être à la fois sujet et objet de son origine et de son devenir.
Malgré la richesse de son parcours intellectuel, l’engagement politique de Cheikh Anta Diop fut un moment déterminent de son itinéraire intellectuel. Élevé dans un environnement mouride ou le nationalisme et l’anticolonialisme sont des doctrines for imprégnées, Cheikh Anta avait très tôt intériorisé les prérequis idéologiques contre toute négation ou domination. Ce qui lui a valu cet attribut d’adolescent hostile à l’autorité que lui taxait M. Boyau. Cette idéologie contestataire lui pousse à lutter farouchement contre la colonisation. Engagé en politique dès l’année 1947, Cheikh Anta consacre sa vie aux indépendances africaines. Il milite au Rassemblement Démocratique Africain dont il devient le secrétaire de 1950 à 1953. Dans cette organisation Diop fustige l’union française entre les pays africains et la France et propose un État fédéral africain. Ses prises de position à l’encontre de la Métropole vont se poursuivre jusqu’aux indépendances des pays africains en général et celle du Sénégal en particulier.
Dès 1961, Cheikh Anta Diop créa le Bloc des Masses Sénégalaises. Son engagement politique sera la cause de son emprisonnement en Juillet 1962, il sera libéré le mois d’Août de cette dite année. Son parti BMS fut dissout par le président Léopold Sédar Senghor en 1963. Suite à cela, il fonde le Front National Sénégalais pour contrecarrer la politique pro-occidentale Senghorienne, le parti sera interdit en 1964. En 1976, il crée un nouveau parti, le Rassemblement National Démocratique (RND), déclaré illégal peu après. Senghor démissionne du pouvoir en décembre 1980 et Abdou Diouf son successeur supprime les lois interdisant la formation de partis politiques. De cette façon, les charges qui pesaient contre Cheikh Anta Diop ne sont plus valables et le RND est légalement reconnu. Cependant, après les élections, Anta Diop refuse d’occuper le siège obtenu à l’Assemblée nationale pour protester contre ce qu’il considère comme des élections frauduleuses. Son esprit nationaliste et anticonformiste ne l’a pas propulsé en politique mais il a permis l’éclosion d’idées foisonnantes donnant corps et âme à l’afrocentrisme. Cheikh Anta au-delà de son apport intellectuel a donné un nouveau souffle de vie aux africains afin qu’ils se départissent de leur pessimisme ambiant et des affirmations fallacieuses faisant des peuples africains des populations non prométhéennes, primitifs et anhistoriques.
Cheikh Anta Diop est avant tout un mémoire vivant, le panthéon du savoir nègre qui a su remettre sur les rails une vérité mise sous silence depuis plusieurs générations. Ces réflexions ne doivent pas être laissées aux oubliettes car elles permettent un renouveau culturel et scientifique et déclenche un vent de changement et d’autonomie qui commencent à souffler partout en Afrique.
« Il faut veiller à ce que l’Afrique ne fasse pas les frais du progrès humain. (..) froidement écrasée par la roue de l’histoire. (…) On ne saurait échapper aux nécessités du moment historique auquel on appartient ».
Alioune Dione est Socio-anthropologue, auteur : Afrique et Contemporaneïté.
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CINQ CHOSES À SAVOIR SUR CHEIKH ANTA DIOP
Cet esprit brillant suscita une véritable levée de boucliers en France lorsqu’il osa écrire, en 1954, que les habitants de l’Egypte ancienne appartenaient au monde négro-africain
Il y a cent ans, le 29 décembre 1923, naissait Cheikh Anta Diop, l'une des personnalités mythiques de l’Afrique contemporaine, aux côtés de Kwamé Nkrumah, Patrice Lumumba ou Thomas Sankara. Voici cinq choses à savoir sur le grand savant sénégalais.
Cet esprit brillant suscita notamment une véritable levée de boucliers en France lorsqu’il osa écrire, en 1954, que les habitants de l’Egypte ancienne appartenaient au monde négro-africain. Cheikh Anta Diop était un inlassable militant de la réappropriation de l’histoire africaine par les Africains.
LE RETOUR EN GRÂCE DE LA JUNTE NIGÉRIENNE
La politique d'isolement menée à l'encontre des putschistes nigériens prend fin progressivement. Des signes concordants témoignent d'une volonté croissante des pays sahéliens et des partenaires occidentaux de renouer le contact avec Niamey
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 29/12/2023
Après plusieurs mois de tension, certains États de la région sahélienne affichent désormais leur volonté de resserrer les liens avec les autorités de transition au Niger, selon Le Monde du 26 décembre 2023.
Dernier en date, le Maroc qui a reçu samedi 23 décembre à Marrakech le ministre nigérien des Affaires étrangères Bakary Yaou Sangaré ainsi que ses homologues du Mali, du Burkina Faso et du Tchad, dans une initiative rare depuis les coups d'État survenus dans ces pays. L'objectif annoncé est de "lancer une initiative Atlantique pour favoriser l'accès des États du Sahel à l'océan Atlantique". Le Maroc se dit "prêt à mettre à leur disposition ses infrastructures routières, portuaires et ferroviaires pour soutenir cette initiative", selon un communiqué de l'agence marocaine MAP.
Même des pays qui avaient initialement fermement condamné le putsch au Niger en juillet dernier, comme le Bénin, se montrent désormais plus conciliants. Le président béninois Patrice Talon a ainsi exprimé sa "volonté de voir se rétablir rapidement les relations" avec les pays concernés par des coups d'État.
Cette évolution reflète la volonté croissante des États de la région de mettre en œuvre une "realpolitik", alors que des enjeux politiques, sécuritaires et économiques majeurs sont en jeu, notamment l'exploitation à venir du pétrole nigérien. D'autres partenaires internationaux comme l'Allemagne et les États-Unis se disent également désormais prêts à renouer le dialogue avec Niamey. Autant de signes suggérant que l'isolement des autorités de transition au Niger prend désormais fin.