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23 avril 2025
International
LA FRANCE RENOUVELLE SES ÉQUIPES EN CHARGE DE L'AFRIQUE
Remaniement au sommet sur les dossiers africains. Le Quai d'Orsay opère d'importants changements en nommant de nouveaux responsables pour prendre en main la politique française en Afrique, après une série de crises
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 29/12/2023
Selon un article publié le 19 décembre 2023 par le journal Le Monde, de nombreux changements ont eu lieu au sein du ministère français des affaires étrangères concernant les questions africaines. Christophe Bigot, directeur de l'Afrique et de l'océan Indien depuis 2020, a été remplacé par Emmanuelle Blatmann, ambassadrice de France au Nigeria.
Ce remaniement, qualifié de "jeu de chaises musicales" par Le Monde, intervient après "la succession des coups d'Etat au Sahel et le recul de l'influence française dans la région" et marque selon le journal la volonté "d'ouvrir un nouveau chapitre". Christophe Bigot, reconnu pour sa compétence mais aussi critiqué pour sa gestion des crises, n'a pas informé ses équipes de son remplacement.
Cet été, la France a également connu un échec au Niger avec le coup d'Etat militaire du général Abdourahamane Tiani, troisième pays sahélien à tomber aux mains de militaires hostiles à la présence française. Emmanuel Macron a durci le ton mais la junte a exigé le départ de l'ambassadeur et des soldats français.
Autre signe de la crise, le poste de conseiller Afrique de l'Elysée est longtemps resté vacant avant que Jérémie Robert, ancien conseiller d'affaires africaines de Jean-Yves Le Drian, n'accepte de le prendre en charge. Ces changements visent selon Le Monde à "rebâtir une ligne politique en Afrique" dans un contexte régional difficile.
TENSIONS ENTRE L'ÉTAT ET LA VILLE DE DAKAR AUTOUR DE L'ORGANISATION DES JOJ 2026
Premier accroc dans l'organisation des JOJ 2026 ? La mairie de Dakar s'insurge contre un conseil interministériel auquel elle n'a pas été conviée et menace de saisir le CIO si la collaboration avec l'État ne s'améliore pas
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 28/12/2023
Alors que les Jeux Olympiques de la Jeunesse (JOJ) de Dakar 2026 approchent à grands pas, des tensions apparaissent entre les principaux partenaires que sont l'État du Sénégal et la Ville de Dakar.
Dans un communiqué publié mercredi 27 décembre 2023, la maire de Dakar s'insurge contre le fait d'avoir "appris par voie de presse" la tenue d'un conseil interministériel au cours duquel le chef de l'État aurait "soi-disant, salué le travail des différents acteurs". Or, déplore la Ville de Dakar, elle n'a été "associée ni de près ni de loin à cette rencontre".
Citant son maire, le communiqué municipal dénonce vigoureusement "cette démarche sélective et sectaire" et menace de saisir le Comité International Olympique si besoin. La Ville rappelle également que "le choix de la Capitale Sénégalaise pour abriter ces Jeux, est d'abord le résultat des multiples et dynamiques actions menées par les autorités municipales et leurs services compétents".
Plus loin, elle souligne que "la Flamme Olympique a été remise au Maire de la Ville de Dakar", revendiquant "toute sa place dans l’organisation de cet évènement sportif mondial". Les autorités municipales appellent enfin l'État à "faire preuve de transparence" et à respecter "l'esprit du mouvement olympique en s'inscrivant dans une démarche inclusive et participative".
Ces déclarations tendues illustrent les tensions naissantes autour de la gouvernance des JOJ 2026, dont la réussite nécessitera une collaboration étroite entre l'État central et la capitale sénégalaise, hôte de l'événement.
EXACERBER LES TENSIONS ALORS QU’UNE ÉLECTION EST CENSÉE APAISER CELLES-CI
RAPPORT SENEPLUS D’ANALYSE PRÉ-ÉLECTORALE – Quelle est la portée du pouvoir de supervision de la Cena ? Une Administration peut-elle s’y opposer ? Une décision de justice faisant l’objet d’un recours peut-elle l’entraver ? (3/3)
(EXCLUSIF SENEPLUS) - Un autre sujet de désaccords entre les parties prenantes dans le processus électoral est celui lié aux prérogatives des divers acteurs du processus électoral et la question de leur chevauchement. Cette question s’est posée avec une acuité particulière et une intensité presque dramatique dans la mesure où elle recélait deux enjeux majeurs : la possibilité juridique et factuelle d’une participation de l’opposant Sonko à la présidentielle et, d’un point de vue plus institutionnel, le rôle et les pouvoirs de la CENA dans le processus électoral.
A la suite du jugement rendu par le Tribunal de Ziguinchor annulant la radiation de Ousmane Sonko des listes électorales et ordonnant sa réinscription (jugement du 12 octobre 2023), les « mandataires » de celui-ci se sont présentés à la Direction des élections afin de récupérer les fiches nécessaires au « parrainage » de leur candidat, toujours emprisonné. La direction des élections – qui est un démembrement du ministère de l’Intérieur – a opposé un refus au motif que ledit jugement faisait l’objet d’un recours et que celui-ci en « suspendait » l’exécution.
De leur côté, les avocats de l’opposant ont fait valoir qu’un tel caractère suspensif ne figurait nulle part dans la loi. Ils ont alors saisi la CENA, laquelle a demandé à la Direction des élections de remettre les fiches de parrainage au candidat. Cette dernière a derechef opposé un refus et les conseils de M. Sonko ont alors demandé à la CENA de se substituer à l’Administration en vertu de son pouvoir général de supervision du processus électoral (art L5 et L11 du Code électoral) et de son pouvoir « de dessaisissement et de substitution » de toute défaillance (art L13).
Entretemps, sans doute indisposé par la décision de la CENA, le président de la République a pris un décret renouvelant entièrement la composition de l’institution, le mandat de l’équipe sortante étant au demeurant épuisé depuis des années. Ce décret lui-même n’a pas tardé à être contesté devant la Cour suprême, certains des nouveaux membres s’étant illustrés dans le passé par des prises de positions partisanes, au mépris donc de l’exigence d’impartialité attendue d’eux.
En l’occurrence, la Direction Générale des Elections (DGE) a refusé, en dépit des dispositions pertinentes du code électoral, de respecter la décision du Tribunal d’Instance de Ziguinchor en invoquant le caractère non définitif de cette décision. Les dispositions du code électoral sont pourtant très claires. Elles prévoient que tout citoyen omis sur la liste électorale ou victime d’une erreur purement matérielle portant sur l’un de ses éléments d’identification et détenant son récépissé peut exercer un recours devant le président du Tribunal d’Instance dans les vingt (20) jours qui suivent la publication de la liste électorale, soit directement, soit par l’intermédiaire de la CENA. C’est cette disposition que les avocats du candidat Sonko ont mis en œuvre en saisissant le Président du Tribunal d’Instance de Ziguinchor, lieu de son inscription. Ce dernier, conformément à la loi, a statué dans les délais fixés puis a notifié sa décision dans les deux (2) jours à l’intéressé et à l’administration locale.
La décision du président du Tribunal est rendue en dernier ressort, autrement dit, elle ne peut faire l’objet d’appel. La seule possibilité offerte à la partie non satisfaite, c’est un recours en cassation devant la Cour Suprême, conformément aux dispositions de la loi organique sur ladite Cour. Or, celle-ci ne prévoit d’effet suspensif d’un recours que dans certaines hypothèses, qui ne concernent absolument pas le contentieux électoral.
C’est dire que la DGE n’est absolument pas fondée à refuser d’appliquer la décision de réintégration du candidat SONKO conformément à l’ordonnance n°01/2023 en date du 12 octobre 2023 du Président du Tribunal d’Instance de Ziguinchor qui a annulé la mesure de radiation de ce dernier des listes électorales et ordonné sa réintégration par les services centraux du ministère de l’intérieur sur la liste électorale de la commune de Ziguinchor ainsi que sur le fichier général des électeurs.
La DGE a également refusé de respecter une injonction de la Commission électorale nationale autonome (C.E.N.A). En effet, suivant requête en date du 30 octobre, la C.E.N.A a invité la DGE à prendre, en relation avec tout concerné du ministère chargé des élections, les mesures nécessaires pour faire tenir à la disposition du mandataire de Monsieur Ousmane Sonko et ce dans les meilleurs délais, la fiche de parrainage, la clé USB ainsi que tout autre outil de collecte prévu par la loi. La DGE a opposé une fin de non-recevoir à cette demande avec comme explication qu’elle s’en tenait à son précédent communiqué[1].
Dans le même temps, les développements récents de la situation politique nationale ont mis en évidence des limites de l’organe de supervision des élections qu’est la CENA, certaines lui étant imputables, d’autres étant le fait des autorités politiques elles-mêmes, et notamment du président de la République.
C’est à la C.E.N.A que le législateur sénégalais a reconnu le pouvoir de contrôler et de superviser l’ensemble des opérations électorales et référendaires. Elle veille, en particulier, à leur bonne organisation matérielle et apporte les correctifs nécessaires à tout dysfonctionnement constaté. La C.E.N.A fait respecter la loi électorale de manière à assurer la régularité, la transparence, la sincérité des scrutins en garantissant aux électeurs, ainsi qu’aux candidats en présence, le libre exercice de leurs droits. La C.E.N.A a le pouvoir d’intervenir à tous les niveaux du processus électoral depuis l’inscription sur les listes électorales jusqu’à la proclamation provisoire des résultats.
Alors que toute l’opinion se demandait comment la C.E.N.A comptait donner suite à la position de la DGE, quelle attitude, elle allait adopter, allait-elle mettre en œuvre les pouvoirs que lui reconnait la loi à savoir prendre des décisions immédiatement exécutoires d’injonction, de rectification, de dessaisissement, de substitution d’action, nonobstant son pouvoir de saisine des juridictions compétentes.
La réponse à toutes ces interrogations a été donnée par le Président de la République qui, à travers le décret n°2023-2152 du 03 novembre 2023, a nommé une nouvelle équipe de la CENA. Le mandat de presque la totalité des membres de l’équipe qui venait d’être renouvelée avait expiré depuis, pour certains, deux ans et demi. C’est une anomalie que le chef de l’Etat a tenté de réparer avec beaucoup d’irrégularités dans le décret et à un moment où, tout laisse croire, qu’il s’agit d’une punition de l’ancienne équipe.
C’est le code électoral qui dispose que la C.E.N.A comprend douze (12) membres nommés par décret. Ils sont choisis parmi les personnalités indépendantes exclusivement de nationalité sénégalaise, connues pour leur intégrité morale, leur honnêteté intellectuelle, leur neutralité et leur impartialité, après consultation d’institutions, d’associations et d’organismes tels que ceux qui regroupent Avocats, Universitaires, Défenseurs des Droits de l’Homme, Professionnels de la communication ou toute autre structure.
Deux membres parmi les douze nommés ne sont ni neutres ni impartiaux. Il s’agit de militants du parti au pouvoir. Il s’agit de Monsieur Cheikh Awa Balla Fall, Inspecteur général d’Etat à la retraite et de Monsieur Serigne Amadou Ndiaye, Professeur d’Université à la retraite. Leur militantisme (le premier l’assume ouvertement à travers une vidéo qui a circulé sur les réseaux sociaux[2]) est connu de tous. L’on aura, apparemment pas pris en compte la « jurisprudence » Amadou Abdoulaye DIeng nommé, en 1993, Président de l'Observatoire national des élections (O.N.E.L) à la veille de l'élection présidentielle alors qu’il était impliqué dans le mouvement de soutien Horizon 2000 pour la réélection du président Abdou Diouf. La contestation fut vive et le Conseil d’Etat saisi à travers un recours pour excès de pouvoir. Le juge n’aura pas à trancher car le Président de l’O.N.E.L démissionna quelques jours après.
En nommant douze membres de la CENA, le président a implicitement mis fin aux fonctions de M. Seydou Nourou BA dont le mandat ne doit expirer qu’au mois d’octobre 2024. Il a été nommé membre de la CENA par le décret n°2018-1930 du 9 octobre 2018. Le législateur dispose pourtant qu’il ne peut être mis fin, avant l’expiration de son mandat, aux fonctions d’un membre de la CENA que sur sa demande ou pour incapacité physique ou mentale, dûment constatée par un médecin désigné par le Conseil de l’Ordre, après avis conforme de la CENA.
M. Abdoulaye Sylla, Inspecteur général d’Etat à la retraite a été nommé par décret n°2023-2153, Président de la C.E.N.A alors qu’il est membre du Conseil constitutionnel (il a été nommé par décret n°2018-2126 du 6 décembre 2018 pour un mandat de 6 ans). Nous présumons qu’il a démissionné du Conseil constitutionnel après avoir suivi la procédure prévue à l’article 5 de la loi n° 2016- 23 du 14 juillet 2016 qui dispose : il ne peut être mis fin, avant l’expiration de leur mandat, aux fonctions des membres du Conseil constitutionnel que sur leur demande ou pour incapacité physique, et sur l’avis conforme du Conseil.
Incontestablement, des leçons doivent être tirées de ces événements très récents. Elles font apparaître la nécessité de répondre aux questions suivantes :
Quelle est la portée du pouvoir de supervision de la CENA ? Une Administration peut-elle s’y opposer ? Une décision de justice faisant l’objet d’un recours peut-elle l’entraver ?
Le mandat des membres de la CENA peut-il subsister dans les faits alors qu’’il est théoriquement épuisé ? Quel doit alors être le comportement des membres de l’institution eux-mêmes et celui de l’autorité qui nomme ? Au-delà des discussions juridiques, cet épisode, ne met-il pas en évidence une forme de désinvolture à l’égard des institutions, de divers côtés ? Quelle doit être la « dignité » d’un organe de ce type ?
Les crispations nées de cet événement – qui ne sont pas terminées au moment où ces lignes sont écrites – nécessitent sans doute une précision du rapport de la CENA, organe indépendant, avec les autorités en place, quelles que soient celles-ci.
Les scénarios possibles -
A la lecture du contexte politique et social sénégalais actuel, trois (3) grands scénarios nous paraissent concevables, chacun d’eux appelant quelques recommandations.
Scénario 1 :
Il est le plus « optimiste » et suppose réunies les conditions suivantes :
Toutes les personnes emprisonnées à la suite des événements politiques qui ont secoué le pays sont libérées avant les élections ;
Ces élections sont parfaitement inclusives, le parti « Pastef » notamment, dissous, est réellement – et non, bien sûr, juridiquement, formellement – « représenté » dans la compétition ;
Les décisions rendues par les juridictions appelées à intervenir d’ici février 2024 ne sont pas sérieusement contestées ;
L’élection elle-même se déroule sans accroc majeur et un vainqueur est désigné sans que sa victoire ne souffre de contestation importante.
Dans un tel cas de figure, des initiatives pour le renforcement du système démocratique sénégalais pourraient néanmoins être imaginées après les élections. Il prendrait la forme d’une éradication de quelques problèmes de fond révélés ces deux ou trois dernières années : la question du mandat et des pouvoirs du président de la République, le rôle et la place de l’organe chargé d’arbitrer les élections (la CENA), la problématique de l’indépendance de la justice…
Scénario 2 :
Il est le plus « pessimiste » et recouvrirait les réalités suivantes :
Les personnes emprisonnées n’auraient aucune chance d’être libérées et ne participeraient donc pas à l’élection ;
Celle-ci ne serait pas inclusive, des candidats majeurs seraient écartés de la compétition ;
Le soupçon de « partialité » de la CENA et des tribunaux, fondé ou non, est largement partagé ;
L’élection elle-même pourrait être entachée de fortes contestations parce qu’il existe un contentieux préélectoral substantiel.
Scénario 3 :
C’est un scénario « intermédiaire ». Il serait constitué des éléments suivants :
Les personnes actuellement emprisonnées le resteraient ;
L’opposant Ousmane Sonko resterait également emprisonné et ne pourrait se présenter au scrutin ;
Néanmoins, cette frange radicale de l’opposition s’identifie à une personne dont la candidature est déclarée recevable ;
La campagne électorale elle-même se déroule de façon correcte et, rien ne laisse envisager la possibilité d’une contestation de la sincérité du scrutin.
Les Scénarios 2 et 3, de notre point de vue, ne se distingueraient pas sur le plan des recommandations qu’ils appellent. Celles-ci pourraient être les suivantes :
les arbitres du jeu électoral seraient solennellement rappelés à leurs devoirs : la CENA et le pouvoir judiciaire, mais aussi l’Autorité de régulation des médias (CNRA). Compte tenu de la particularité du contexte, ils veilleront à très scrupuleusement exécuter leur mission. La société civile pourrait même, dans cette perspective, mettre en place des formes de dispositif de veille qu’elle pourra déterminer ;
les partis politiques seront encouragés ou appuyés dans leur volonté d’être présents à toutes les étapes du processus de l’élection ; seule leur présence étant, en dernière analyse, le moyen d’éviter des fraudes ou des contestations ;
les candidats aux élections, notamment présidentielles, devront publiquement prendre l’engagement d’accepter les résultats définitifs du scrutin. Il convient de rappeler que dans l’histoire politique sénégalaise depuis 2000, un tel engagement a eu un effet cathartique sur l’élection. Et de fait, les tensions post- électorales ont toujours été instantanément résorbées par des déclarations de reconnaissance de la victoire de l’autre camp. Il en a été ainsi en 2000 et en 2012. Il est incontestable qu’il a eu un effet dans le dénouement pacifique de l’élection et il a bien été obtenu, de la part des candidats, entre les deux tours.
Deux réserves doivent être faites en conclusion :
Il est évident que le climat préélectoral n’est pas serein. Si l’élection de février 2024 se déroulait mal au surplus, il est certain que la tension socio-politique s’aggraverait dangereusement. Au débat sur la légitimité de l’élection – qui tourne autour de son caractère inclusif ou « fermé » - ne doivent pas s’ajouter des soupçons de mauvaise organisation matérielle ou de fraudes.
Si des mesures de « désescalade » ne sont pas prises d’ici février 2024, et si notamment le scénario 2 décrit ci-dessus se produisait, les lendemains électoraux pourraient également exacerber les tensions alors qu’une élection est censée apaiser celles-ci.
À suivre le premier rapport de 2024 à partir du 1er janvier.
[1] Communiqué ainsi libellé « …Sur celle question, il y a lieu de préciser qu’il n’y a pas encore de décision définitive, l’Etat du Sénégal ayant décidé d’exercer les voies de recours qui s’offrent à lui.
Par conséquent, le dossier suit son cours judiciaire… »
[2] En 2019, il a mis en place le mouvement de soutien TGV à Guédiawaye pour la réélection de Macky
PAR Tamsir Anne
QUELLE POLITIQUE LINGUISTIQUE POUR LE SÉNÉGAL ?
EXCLUSIF SENEPLUS - Il devrait s’agir de trouver un système original, multilingue, qui élève les langues nationales à une égale dignité que le français et qui s’ouvre davantage à d’autres grandes langues internationales
La question des langues nationales s’est invitée de façon inattendue dans le débat politique national. Des commentaires faits par le chef de l’état sur l’écriture des langues nationales avaient dans une récente sortie soulevé une vague de protestations et inspiré des mises au point. Ce qui est important ici est de rappeler que la codification des langues nationales est régie par plusieurs décrets dont le premier est le Décret présidentiel no 71566 du 21 mai 1971. Des décrets ultérieurs en 1975, 1985 et 2005 ont apporté des ajustements et correctifs nécessaires. Bien que les défis à ce niveau soient mineurs, des réformes s'avéreront, comme pour toute langue vivante, toujours utiles dans le futur. Les questions fondamentales de ce débat, auxquelles la classe politique dans son ensemble devrait répondre, sont plutôt relatives à la place et au statut que les hommes politiques aspirant à diriger le Sénégal entendent accorder aux langues nationales. Quelles stratégies ont-ils définies dans leurs programmes concernant ces problématiques et quelles mesures concrètes prévoient-ils d'adopter pour les mettre en œuvre ?
Aucun programme de leader politique ne semble, à notre connaissance, esquisser de politique linguistique claire, allant au-delà de simples pétitions de principes et constats d'échec. Leurs positions, quelle que soit par ailleurs leur affiliation politique, restent généralement vagues et évasives. Le temps d’une campagne électorale la créativité des uns et des autres pour trouver des noms porteurs d’adhésion populaire (Aar Senegaal, Ànd defar Senegaal, Bennoo Bokk Yaakaar, Taxawu Senegaal, Yewwi Askan etc.) ne connaît plus de limite. Cependant, une fois élus, ils reviennent systématiquement au français, une langue que, selon les estimations les plus optimistes, plus de trois quarts de la population ne comprennent pas. Le français serait-il la barrière, dont parlait Cheikh Anta Diop il y a plus de quatre décennies, que les politiciens érigent arbitrairement entre eux et la population pour échapper au contrôle populaire ? Comment s’étonner dès lors que la participation citoyenne tant proclamée demeure un vœu pieux ? Lorsque l'écrasante majorité des populations se sent déconnectée ou ne comprend pas le sens des politiques publiques formulées dans une langue qui leur reste étrangère, le dialogue de sourds devient inévitable. Le sens des textes législatifs et juridiques, des programmes politiques, économiques et sociaux élaborés majoritairement sans leur concours leur reste globalement opaque et inaccessible. Pourtant, la dimension linguistique est évidente dans les diverses crises récurrentes qui secouent notre société : crise de la citoyenneté, crise des valeurs, divorce entre administration et administrés, crises politiques et sociales.
La démocratie par exemple, étymologiquement le gouvernement du peuple par le peuple en langue grecque, ne peut véritablement fonctionner dans une langue que le peuple ne comprend pas. Le débat démocratique, hormis les périodes électorales, reste essentiellement le domaine d'une minorité ayant le privilège de maîtriser la langue française. La question du troisième mandat qui a fortement secoué les fondements de notre système démocratique lors des deux premières alternances est édifiante à ce sujet. Car, en dehors de ses aspects proprement juridiques, il s’est également agi d’une querelle sémantique sur l'interprétation d'une disposition de la constitution, qui à notre sens, n’aurait dû souffrir d'aucune ambiguïté. Si l’on s’en souvient encore, l’un des experts français, commis il y a plus d’une dizaine d’années par le président Wade, avait laconiquement déclaré qu’il ne s’agissait pas d’une question de droit mais de français.
En réalité, contrairement à des préjugés tenaces, la question des langues nationales n'est ni une préoccupation dépassée ou secondaire, mais se trouve bien si l'on y regarde de près au cœur des défis du monde moderne. L’exemple de l’Union Européenne, dont nous nous suffisons des langues, devrait nous donner à réfléchir. L’UE est en effet aujourd’hui la grande championne de la diversité linguistique dans le monde avec un total de vingt-quatre langues officielles. Tous les actes juridiques de l’Union doivent être disponibles dans ses 24 langues officielles. La charte des droits fondamentaux de l’Union postule par ailleurs le droit pour tout citoyen de communiquer avec les institutions européennes dans l’une des 24 langues officielles de l’UE, et les institutions sont tenues de lui répondre dans la même langue. L'argument de la diversité linguistique, utilisé dans le contexte sénégalais pour écarter l'impératif de considérer effectivement les langues nationales dans toutes les politiques publiques, perd de son poids au regard de ces expériences. Les énormes avancées technologiques dans le domaine du traitement automatique des langages naturels permettraient également de réduire sensiblement la complexité de certains problèmes.
Une autre idée reçue voulant réduire la langue à un simple outil de communication, à un « code dépersonnalisé » est également à rejeter. Au-delà d’être l’outil de communication le plus sophistiqué qui se puisse concevoir encore, la langue est loin d’être neutre ; elle véhicule toujours une vision spécifique du monde et transporte des valeurs, des modes de vie et de pensée. La langue est autant une mémoire qu'une empreinte distinctive d'une culture qui se construit et s'articule à travers elle. Elle modèle, comme disait le linguiste américain Sapir, du seul fait qu’elle est langue l’univers intellectuel, moral, spirituel, que nous pensons. Par conséquent la crise des valeurs et la crise de la citoyenneté devraient être réexaminées sous ces différentes optiques.
La crise endémique de l’école également, qui implique autant la baisse générale du niveau des élèves que la perte de compétence non seulement en français mais aussi dans les langues nationales, mériterait l’exploration de nouvelles pistes.
L'Unesco recommande depuis des décennies un modèle d'enseignement multilingue basé sur les langues maternelles pour améliorer significativement les performances des apprenants. Les nombreuses études et programmes menés depuis plusieurs années par l’organisation internationale convergent dans leurs résultats sur les points suivants : les enfants qui apprennent les six à huit premières années de leur scolarité formelle dans leur langue maternelle ont non seulement de meilleurs résultats scolaires que leurs pairs qui reçoivent un enseignement dans une langue qui leur est totalement étrangère, mais ils développent également une plus grande aptitude à apprendre une autre langue étrangère et obtiennent de meilleurs résultats dans les disciplines scientifiques. Enfin, sur le plan psychologique, un enseignement dans la langue maternelle renforce l'estime de soi et favorise la créativité, au lieu d'une simple mémorisation par cœur. Il va sans dire, espérons-nous, que de tels résultats ne sauraient en rien découler automatiquement de l’introduction des langues nationales. Plusieurs autres facteurs clés de succès, d’ordre politique, social, culturel et organisationnel sont tout aussi déterminants. Bref il devrait s’agir de trouver un système original, multilingue, qui élève les langues nationales à une égale dignité que le français et qui s’ouvre davantage à d’autres grandes langues internationales, africaines d’abord, mais aussi au chinois et japonais par exemple. La prise en compte effective des langues nationales dans un enseignement multilingue, loin d'impliquer un chauvinisme ou une volonté de repli sur soi, peut bien au contraire signifier plus d'ouverture sur le monde sans pour autant se suicider culturellement.
La politique a de toute évidence un rôle capital à jouer dans cette grande entreprise de transformation de nos différents systèmes sociaux. La tâche est certes ardue et demande des efforts conjugués et l’adhésion de tous les segments de la société. Elle sera même le labeur cumulé de plusieurs générations, mais notre génie propre, notre capacité de tirer profit de l’expérience d’autres peuples ainsi qu’une volonté politique inflexible nous permettront de relever à coup sûr, haut la main, tous les défis. Nous sommes convaincus que la maîtrise et le développement des langues nationales sera comme en Europe a l’époque de la Renaissance le catalyseur d’un renouveau intellectuel, scientifique, politique, culturel et moral.
Dans ce domaine comme dans d'autres, nous devons seulement avoir le courage de faire nos propres expériences, d'apprendre et de tirer profit de nos erreurs, plutôt que de continuer à vivre avec des leçons, des certitudes et des vérités qui ne sont pas les nôtres.
Dr. Tamsir Anne est Senior IT-Consultant, auteur-chercheur.
JACQUES DELORS, ANCIEN PRÉSIDENT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE, EST DÉCÉDÉ
A la tête de la commission européenne, l’ancien ministre de l’Economie sous le magistère de François Mitterrand, avait joué un grand rôle dans la mise en œuvre concrète de la construction européenne.
Dakar, 27 déc (APS) – Le français, Jacques Delors, ancien président de la Commission européenne (1985-1995) est décédé mercredi à Paris à l’âge de 98 ans, ont annoncé plusieurs médias français.
A la tête de la commission européenne, l’ancien ministre de l’Economie sous le magistère de François Mitterrand, avait joué un grand rôle dans la mise en œuvre concrète de la construction européenne à travers, entre autres, la signature de traités économiques, la réforme de la politique agricole à l’échelle européenne et les accords de Schengen.
LE LAURÉAT DU SUPER PRIX GRAND BATISSEUR CONNU LE 21 AVRIL 2024, À DUBAÏ
A travers un communiqué de presse parcouru par lesoleil.sn, Barthélemy Koumé, le Commissaire général de The Africa Road Builders-Trophée Babacar Ndiaye, a annoncé la tenue de la Conférence inaugurale prévue du 17 au 21 avril 2024, à Dubaï
A travers un communiqué de presse parcouru par lesoleil.sn, Barthélemy Koumé, le Commissaire général de The Africa Road Builders-Trophée Babacar Ndiaye, a annoncé la tenue de la Conférence inaugurale prévue du 17 au 21 avril 2024, à Dubaï, aux Émirats Arabes Unis. Cette 9e édition sera l’occasion, d’après le directeur général de Acturoutes, de désigner le lauréat du Super Prix « Grand Bâtisseur », un trophée qui sera attribué à un Chef d’État africain dont le pays a enregistré des réussites, au regard du thème général de l’année à savoir :« qualité des infrastructures routières et développement de l’Afrique ». Il est ainsi indiqué dans ledit communiqué que le lauréat 2024 succédera à Andry Rajoelina, lauréat 2023, dont le pays (Madagascar) est l’invité spécial de la Conférence Inaugurale 2024.
Précisant dans la foulée, que la désignation du lauréat se fait par le Comité de Sélection composé de journalistes répartis sur l’ensemble de l’Afrique, M. Koumé relève que les Trophée Bâtisseurs et le Super Prix Grand Bâtisseur-Trophée Babacar Ndiaye, dont les lauréats seront connus à l’issue de la Conférence inaugurale, seront officiellement remis lors de la Conférence finale, à l’occasion des Assemblées annuelles de la Bad (Banque africaine de développement), en mai 2024 à Nairobi (Kenya).
« Ils réuniront en un même endroit les décideurs, les maîtres d’ouvrages, les bailleurs de fonds et les exploitants issus ou travaillant dans toutes les régions de l’Afrique, ainsi que les journalistes des cinq régions du continent et leurs invités », ajoute le Commissariat général qui dit ouvrir un appel à communication à tous les partenaires, entités ou experts souhaitant faire une présentation, tout en appelant à la mobilisation de tous pour des échanges riches et diversifiés au profit du développement de l’Afrique.
« Aussi, dans l’esprit de ce grand rendez-vous, est-il demandé à toutes les entreprises ou institutions œuvrant en Afrique de faire connaître leurs meilleures réalisations en matière de route et de transports, en vue de la désignation des lauréats 2024 du «Trophée Bâtisseur » de The Africa Road Builders », a-t-il notamment lancé. Selon la note, il est institué, à partir de l’édition 2024, plusieurs catégories pour le « Trophée Bâtisseur » en vue de « renforcer la valorisation de tous les acteurs qui concourent à la réussite d’un projet, de la conception à l’exploitation, en passant notamment par le financement et la conduite des travaux ».
Créé en 2016, The Africa Road Builders – Trophée Babacar Ndiaye a été inspiré par le cinquième président de la Banque africaine de développement (Bad), le Dr Babacar Ndiaye. L’événement est placé, depuis son lancement sous le parrainage de la Banque africaine de développement et de son président, Dr Akinwumi Adesina.
GUINÉE, L'INCENDIE DU DÉPÔT DE CARBURANT À CONAKRY EST COMPLÈTEMENT ÉTEINT
Le gouvernement guinéen a annoncé que l'incendie du principal dépôt d'hydrocarbures du pays, qui a fait 24 morts et 454 blessés selon un nouveau bilan, était "complètement éteint" neuf jours après son départ
Le gouvernement guinéen a annoncé que l'incendie du principal dépôt d'hydrocarbures du pays, qui a fait 24 morts et 454 blessés selon un nouveau bilan, était "complètement éteint" neuf jours après son départ, selon un communiqué transmis mercredi à l'AFP.
"Les opérations de refroidissement de tous les segments de l'installation pétrolière se poursuivent. Toutefois, la zone du sinistre reste fermée au public pour des fins d'investigations", souligne le gouvernement. L'incendie était jusqu'à présent maîtrisé, mais non éteint.
Le nombre de décès est porté à 24, parmi lesquels 11 corps demeurent non identifiés, dit le communiqué. Les déclarations sur les personnes portées disparues se poursuivent. Sur les 454 blessés accueillis dans les structures de soins depuis le sinistre, 31 sont encore hospitalisées et 423 ont regagné leurs familles.
Au niveau de la qualité de l'air, les relevés à Kaloum montrent une amélioration des indicateurs, mais le port du masque reste recommandé, indique le gouvernement. Il avait rétabli samedi la reprise de la distribution d'essence, en la rationnant à 25 litres par véhicule, 5 litres par moto et tricycle, avec l'interdiction de servir des bidons. Les camions-citernes avaient repris leur circulation sous escorte, notamment en provenance de la Sierra Leone voisine.
Un premier recensement avait dénombré 800 bâtiments endommagés, la plupart dans un rayon de 500 mètres autour de l'épicentre de l'incendie. 460 ménages ont bénéficié des kits de vivres distribués par le gouvernement et la distribution continue afin de couvrir les 2.141 ménages affectés, précise le communiqué. En tout, plus de 11.000 personnes ont été affectées directement par l'incendie.
Par Fadel DIA
BYE BYE, LA FRANCE !
Ce n’est pas nous qui quittons la France, c’est la France qui nous quitte, et nous ferme ses portes, l’une après l’autre, y compris celles que nous croyions les mieux verrouillées
Ce n’est pas nous qui quittons la France, c’est la France qui nous quitte, et nous ferme ses portes, l’une après l’autre, y compris celles que nous croyions les mieux verrouillées. Elle n’a pas seulement quitté le Mali, le Burkina Faso et le Niger, (et encore il ne s’y est agi que de fermer des bases et des ambassades), elle est après l’adoption de la loi Macron sur l’immigration, sur le point de quitter nos consciences.
Adoptée le lendemain de la Journée Internationale des Migrants, issue d’un projet hors contrôle du gouvernement, ficelée en trois heures par une commission parlementaire réduite et sous les directives du pouvoir exécutif, votée dans la panique, sous les acclamations de l’extrême droite qui a salué en elle une « victoire idéologique », c’est une loi dont la légitimité même pourrait être mise en cause. Sa promulgation devrait être l’occasion de tourner définitivement la page de la France célébrée chez nous comme « la patrie des droits de l’Homme », de pays des lumières, celui qui a inscrit la Fraternité sur le fronton de ses édifices. Il est vrai que ce n’est pas seulement elle mais toute l’Europe qui se ferme à nous, avec cet éternel paradoxe qui la caractérise puisqu’en même temps, elle nous reproche d’emprunter les autres portes qui s’ouvrent devant nous !
Nicolas Sarkozy avait démontré son ignorance de l’histoire de l’Afrique, Emmanuel Macron s’illustre par sa méconnaissance de l’histoire de la France. Le jeune homme immature en politique dont l’arrivée au pouvoir reste encore une énigme a, par cette loi, qu’il dit pleinement assumer et qui ne lui inspire ni honte ni regret, provoqué une rupture politique et morale et mis en cause les principes républicains fondamentaux qui ont fait la démocratie française. C’est une loi qui a dû se faire retourner dans leurs tombes tous ces enfants de l’immigration que sont Léon Gambetta, Emile Zola, Marie Curie, Paul Valéry etc. qui ont vécu sous une république à laquelle la France doit la reconnaissance du droit au sol. Comme on n’est jamais trahi que par les siens, ce sont aussi des enfants de l’immigration, qui sans doute ne laisseront pas les mêmes traces dans l’histoire, Gérald Darmanin, Eric Ciotti, Elisabeth Borne, Yaël Braun-Pivet etc. qui sont parmi les principaux artisans de cette déconstruction.
L’immigration a toujours été, en France, le disque dur du FN puis du RN, et avant de devenir le nouveau flambeau des Républicains, elle a fait l’objet d’une incroyable inflation législative (29 lois en quarante ans). C’est pourtant la première fois qu’une loi sur l’immigration cède sur toutes les lignes rouges de l’extrême droite et reprend ses principales revendications, dont la plupart ne figuraient pas dans le document laborieusement élaboré en 18 mois par le gouvernement -restriction des prestations sociales accordées aux immigrés en situation régulière, exclusion des sans papiers à l’hébergement d’urgence, remise en cause de l’aide médicale d’Etat ;
- glissement vers la préférence nationale et remise en cause des principes d’égalité des droits ;
- limitation du droit au sol dont l’automaticité n’est plus reconnue, mesure qui est pourtant sans lien avec une loi sur l’immigration ;
- durcissement du regroupement familial …
Cependant c’est sur une autre des dispositions de cette loi que je préfère m’appesantir, car si elle ne s’applique qu’à une population restreinte, c’est une mesure chargée de symboles parce qu’elle concerne une catégorie que l’on croyait sacralisée, celle des étudiants. Désormais, en France, il y a chez les étudiants aussi, les bons et les mauvais migrants, et parmi ces derniers figurent ceux qui viennent des pays d’Afrique qui sont à la fois les plus pauvres et les seuls à n’avoir que le français comme unique langue d’enseignement. Il leur est désormais exigé, de s’acquitter, au préalable, d’une caution retour qui ne leur sera restituée que lorsqu’ils quitteront le territoire français, car il est hors de question qu’ils y prennent racines. C’est une forme de prime d’otage, une « marchandisation de l’université », dénoncée par les plus prestigieuses structures d’accueil qui jugent qu’elle dégrade un domaine où précisément la France avait conservé une certaine attractivité. Pour nous, c’est un reniement de l’engagement de l’ancienne puissance coloniale à solder ses comptes et à constituer une communauté solidaire avec ceux auxquels elle avait imposé l’usage de sa langue, et par un curieux hasard, le Niger vient de suspendre sa participation à la Francophonie dont il était l’un des trois membres fondateurs! Cette ségrégation qui ne dit pas son nom ne servira qu’à ternir la réputation de la France comme « terre d’excellence d’enseignement supérieur et de recherches », au moment où on annonce qu’elle ne compte que 4 universités dans le top 100 du dernier classement académique (dit de Shanghai) des meilleures universités mondiales. Alors tant qu’à acheter une place, autant la choisir dans les meilleures, et dans celles qui forment dans des langues qui offrent bien plus de possibilités d’emplois que le français !
Bye bye à la langue française, avait lancé le Rwanda en décidant de basculer de la francophonie à l’anglophonie, et moins de vingt ans ont suffi pour opérer le revirement car, on l’oublie trop souvent, la langue française est une langue très minoritaire dans les pays africains communément appelés francophones. Il est peut-être temps, pour ces pays, de s’interroger s’il ne leur faudrait pas passer directement à la phase suivante : bye bye la France !
Pour en revenir à elle justement, on s’y inquiète que la nouvelle loi ait fracturé la majorité, au point de faire naître une fronde de députés et de ministres. C’est un évènement anecdotique car le macronisme ne survivra pas à Emmanuel Macron qui laissera le nom du président qui avait solennellement promis de faire barrage aux idées de l’extrême droite et qui en fin de compte, aura servi de passeur aux idées lepénistes. Ce qui serait plus lourd de conséquences ce serait que cette loi, qui est texte le plus régressif jamais voté en France sur l’immigration et dont le ministre de l’Intérieur lui-même a reconnu qu’il contenait des « mesures contraires à la constitution », s’avère inapplicable, ou improductive, ou sans effet sur les difficultés qu’elle était censée régler. On peut en tout cas noter qu’elle a déjà suscité une levée de boucliers qui fait vaciller ses auteurs et qui est le fait de parties qui comptent dans le pays et qui n’ont pas toujours les mêmes intérêts : universitaires, responsables humanitaires, professionnels de santé, syndicats, chefs de collectivités territoriales, mais aussi chefs d’entreprises dont certains ont estimé que la France allait avoir besoin de près de 4 millions de travailleurs étrangers d’ici au milieu du siècle.
On assiste ainsi à ce paradoxe : ce sont les initiateurs de la loi, dont le président de la République et la Première Ministre, qui supplient le Conseil Constitutionnel de servir de « voiture-balai à leur conscience », selon le mot d’un de leurs opposants, et de mettre fin à leur calvaire en sabrant les mesures qui font débat.
Dans le langage diplomatique tout ce jeu ressemblerait à de la real- politique, dans le langage ordinaire il porte le nom d’opportunisme ou plus simplement de lâcheté !
LIBERTÉ D’EXPRESSION BOUSCULÉE, INSTRUMENTALISATION DE LA JUSTICE
RAPPORT SENEPLUS D’ANALYSE PRÉ-ÉLECTORALE – Comme jamais auparavant, une recrudescence d’arrestations, ouverture d’enquêtes ou mises en examen pour diffamation, diffusion de fausses nouvelles, atteinte à la sécurité de l’État... (2/3)
(EXCLUSIF SENEPLUS) - A l’heure actuelle, trois gros points de désaccord obèrent le climat préélectoral au Sénégal. Ils tournent autour de la liberté de manifestation et la liberté d’expression, le traitement judiciaire des opposants et les prérogatives des différents acteurs du processus électoral et la question de leur chevauchement.
Au sujet de la liberté de manifestation, il convient de rappeler, d’abord, que c’est parce que les mesures de police administratives sont potentiellement dangereuses pour les libertés publiques que l’obligation de les motiver est forte[1]. Au Sénégal, le juge a, de son propre chef, élargi le domaine d’application de la motivation obligatoire à propos des décisions qui restreignent l'exercice des libertés publiques. Il l’a clairement signifié dans l’affaire LD/MPT[2] en sanctionnant l’absence de motivation alors qu’aucun texte n’obligeait l’administration à faire connaître les motifs d’une décision d’interdiction d’une manifestation pacifique sur la voie publique. Les mesures de police sont encadrées assez strictement par les textes et sont strictement contrôlées par le juge.
Le juge veille à ce que les autorités de police administrative ne portent pas atteinte à l’exercice d’une liberté publique, au-delà de ce qui est nécessaire au maintien de l’ordre.
Dans bon nombres d’affaires connues dans la passé, (affaires « Alioune Tine (CS 13 octobre 2011) ; « Sidia Bayo » (CS, 13 janvier 2015), « Amnesty international Sénégal » (CS, 09 juin 2016), « Assane Ba » (CS, 23 mai 2019), le juge sénégalais a considéré que, s’il incombe à l’autorité administrative compétente, de prendre les mesures qu’exige le maintien de l’ordre, elle doit concilier l’exercice de ce pouvoir avec le respect des libertés garanties par la Constitution. Le juge rappelle très souvent à l’autorité administrative, que la loi n° 78 – 02 du 29 Janvier 1978 relative aux réunions lui permet en son article 14 d’interdire toute réunion publique, (mais, que) cette interdiction ne peut intervenir que s’il existe une menace réelle de troubles à l’ordre public et si elle ne dispose pas de forces de sécurité nécessaires pour assurer la sécurité des citoyens[3].
En dépit de ce rappel, l’autorité administrative persiste dans l’interdiction des manifestations avec comme motifs « entrave à la circulation », « risque d’infiltration ». Elle semble ignorer que la jurisprudence est une source de la légalité administrative. Elle semble n’avoir pas compris les règles de droit encadrant l’activité de l’administration - que l’on qualifie souvent de sources de la légalité administrative - sont nombreuses et ont des origines variées. Par ordre décroissant dans la hiérarchie des normes, il s’agit des sources à valeur constitutionnelle, des sources internationales, des lois, des principes généraux du droit, des décisions juridictionnelles, des règles jurisprudentielles et des actes édictés unilatéralement par l’administration elle-même.
Or ces derniers temps, l’exercice de la liberté de manifestation, qui figure pourtant dans la Constitution, a été presque systématiquement entravé par l’autorité administrative. Ces entraves sont à la fois une cause et une conséquence : elles s’expliquent par le climat politique tendu, mais leur persistance nourrit également un tel climat. On notera ainsi, s’agissant de la période la plus récente, que :
Le projet de manifestation du 17 juin 2022 par la coalition de l’opposition « Yewi Askan Wi » a été interdite au motif de risque de trouble à l’ordre public ;
Le 6 janvier 2023, une autre manifestation de l’opposition dénonçant la gestion irrégulière des « fonds Covid » a été interdite, au motif que la place de la Nation, qui devait abriter l’événement, était en cours de travaux ;
Le 9 juin 2023, la manifestation du F 24, front de partis et d’organisations d’opposition, a également été interdite ;
Enfin, le 8 septembre 2023, une autre manifestation dédiée à la libération des détenus politiques a également été interdite.
De manière quasi rituelle, les interdictions administratives se fondent sur le risque de trouble à l’ordre public. Plus accessoirement, l’Administration s’est prévalue de la violation de certaines dispositions du code électoral (art L61 interdisant toute propagande durant les trente (30) jours précédant l’ouverture officielle d’une campagne électorale).
Ces interdictions administratives et leur multiplication s’expliquent en réalité par une sorte de climat insurrectionnel latent, deux soulèvements d’ampleur ayant eu lieu : en mars 2021 et en juin 2023, tous liés au traitement judiciaire de l’opposant Ousmane Sonko.
La menace qui pèse sur le droit de manifester est également liée à la persistance c’est-à-dire à la non-abrogation de l’« arrêté Ousmane Ngom » - du nom d’un ancien ministre de l’Intérieur- (arrêté du 20 juillet 2011 interdisant les manifestations « de caractère politique » dans le centre- ville de Dakar).
Il convient pour finir de souligner qu’au cours de la première phase du dialogue national, la question de l’effectivité de la liberté de manifestation a été longuement débattue. Le moins que l’on puisse dire est donc que son acuité demeure.
Des libertés individuelles remises en cause -
S’agissant plus spécifiquement de la liberté d’expression, l’autre droit fondamental fortement remis en cause ces derniers temps, il convient de rappeler, au préalable, qu’en démocratie, la libre communication de ses pensées et de ses opinions est un des droits les plus élémentaires. Ce droit est cependant bien borné. Ce droit s'exerce dans les conditions prévues par la loi. Les journalistes ou chroniqueurs, hommes politiques et simples citoyens l’auront appris depuis les évènements de juin 2021. On aura noté, comme jamais auparavant au Sénégal, une recrudescence d’arrestations, ouverture d’enquêtes ou mises en examen pour diffamation, pour diffusion de fausses nouvelles, pour déclarations de nature à troubler l’ordre public, pour atteinte à la sécurité de l’État. Le problème aujourd’hui au Sénégal, est que le traitement judiciaire discriminatoire des abus de la liberté d’expression. Selon que l’on est dans l’opposition ou du côté du pouvoir, ce traitement sera sévère ou complaisant.
Comment peut-on comprendre, dans un Etat où tous ces droits et toutes ces libertés énumérées à l’article 8 de la loi fondamentale, que tant de violations des droits et libertés puissent se produire ? Il est vrai que ces droits s'exercent dans les conditions prévues par la loi encore que, parfois, c’est la base légale de ces violations qui n’existe pas. En effet, nous avons cherché mais nous n’avons pas trouvé la base légale de cette décision de « barricader » un opposant, de le priver de son droit d’aller et venir.
Que reste- t-il aux partis politiques quand tout appel à la mobilisation des militants est assimilé à un appel à l’insurrection et peut entrainer un emprisonnement, quand les militants et sympathisants sont interdits d’accès aux sièges des partis politiques et quand les demandes de manifestations sont systématiquement interdites ?
Comment comprendre avec tous ces droits et libertés :
qu’un ministre puisse s’arroger, illégalement, le droit de suspendre le signal d’une TV au point d’amener la Cour suprême à lui rappeler son incompétence, ce pouvoir n’étant reconnu qu’au Conseil National de Régulation de l’Audiovisuelle (CNRA). En effet, l’article 210 du Code de la Presse, accorde une telle compétence à cette autorité. L’incompétence est un moyen que le juge peut soulever d’office, vu que c’est un moyen d’ordre public ;
les « retours de parquet » qui n’ont aucun fondement légal. Dans la pratique judiciaire, on appelle « ordre de mise à disposition » l’acte par lequel, un magistrat (le Procureur par exemple), après réception d’un dossier de déferrement dont le règlement relatif à l’inculpation n’est pas encore définitif, confie à la Police ou à la Gendarmerie la ou les) personnes poursuivies. Elle y sera gardée avant de lui être présentées à nouveau. Le problème, c’est les abus notés qui sont assimilables à une volonté d’humilier, de punir…
cette tendance à amener en instruction des cas évidents de flagrant délit…pour punir ; (sinon comment expliquer des cas manifestes de flagrant délit amenés en instruction ?) ;
cette instrumentalisation politique de l’infraction de « terrorisme ». Les modifications du code pénal et du code de procédure pénal de 2021 permettent désormais de qualifier d’« actes terroristes » des infractions qui existaient déjà dans le corpus juridique sénégalais. On a beau se créer une base légale en créant de nouvelles infractions qualifiées ou assimilées à des actes terroristes et passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à la perpétuité, en y incluant la participation à un mouvement insurrectionnel, la violence, le vol commis contre des personnes et les préjudices causés lors de rassemblements. Mais toute personne de bonne foi sait que ce qui s’est passé au Sénégal ces deux dernières années n’a rien à voir avec ce qui s’est passé aux USA le 11 septembre, ce qui se passe au Soudan, ce qui se passe au Mali, au Burkina…
La dissolution intervenue après une décision de justice aurait fait moins désordre si elle pouvait être justifié par une décision de justice ayant établi la réalité des faits reprochés avec toute la rigueur de l’autorité de la chose jugée. Le cas échéant, l’on n’épiloguerait pas sur le fait que celui qui a la compétence de dissoudre a aussi la casquette d’un chef de parti qui voit l’occasion offerte de sortir du jeu le chef du parti probable empêcheur de gagner à coup sûr la prochaine présidentielle de 2024.
l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques -
Il s’agit d’un point capital de la crise actuelle. Jamais les prisons sénégalaises n’avaient accueilli autant de personnes poursuivies pour des motifs liés à leurs convictions politiques. Le nombre d’un millier de « prisonniers d’opinion » est ainsi régulièrement avancé, les vagues d’arrestations ayant notamment eu lieu au lendemain des émeutes de juin 2023. Parmi les personnes arrêtées, on compte des députés et des élus locaux notamment.
Des images volontiers « spectaculaires » ont jalonné ce processus politico-judiciaire : garde –à-vue d’opposants, bris de la vitre du véhicule de l’opposant Sonko, stationnement de véhicules militaires blindés devant son domicile des semaines durant, arrestations du député Guy Marius Sagna etc.
Des incriminations graves ont pu être articulées contre des hommes politiques, comme l’atteinte à la sûreté de l’Etat, le discrédit des institutions, voire le terrorisme.
Des organisations comme « Amnesty international » ont en conséquence mené la campagne « Ensemble, demandons justice pour les victimes de la répression violente des manifestations au Sénégal ». De même, la Cour pénale internationale a été saisie d’un dossier mettant en cause divers dignitaires du régime.
Dans la foulée, si l’on ose dire, les autorités ont pris une mesure inédite : la dissolution d’un parti politique, le parti « Pastef » dirigé par Ousmane Sonko. Ce dernier, individuellement, fait l’objet d’une série de procédures judiciaires touchant l’infraction de viol – de « corruption de la jeunesse » dira finalement la Justice – et de diffamation – contre un membre du gouvernement -.
Il s’agit de bien comprendre que cette mobilisation de l’appareil judiciaire dans un contexte politique s’inscrit dans une sorte de continuité : deux autres opposants, Karim Wade et Khalifa Sall, emprisonnés dans le passé, ont été empêchés de participer aux élections de 2019 notamment du fait de leur condition judiciaire. A l’heure actuelle, il n’est pas exclu qu’un troisième opposant, Ousmane Sonko, soit victime du même procédé : l’élimination judiciaire d’opposants politiques.
De telles réalités posent certainement la question de la neutralité politique de la justice. Du moins l’implication de l’appareil judiciaire dans des enjeux politiques et électoraux est-elle de nature à poser le problème de l’indépendance de ce troisième pouvoir.
En tout état de cause, le débat ne manquera pas d’être posé au lendemain des élections en vue. En attendant, son acuité ne fait aucun doute, d’autant que dans les semaines à venir, l’intervention de divers acteurs judiciaires (Cour d’appel et Cour suprême au sujet de procès visant des individualités, Conseil constitutionnel au sujet de l’examen des candidatures à l’élection) pourrait de nouveau faire planer le spectre d’une « instrumentalisation de la justice » à des fins politiques.
Rappelons, pour finir, les dispositions du Code électoral susceptibles d’être concernées par l’éligibilité des candidats : L28 à L.31 inclus. Ces articles touchent pour l’essentiel les condamnations pénales qui empêchent l’inscription sur les listes électorales.
[3] Le juge sénégalais semble avoir fait sienne l’affirmation du commissaire du gouvernement Corneille dans l’arrêt Baldy du 10 août 1917 : « en matière de police, la liberté est la règle et la restriction, l’exception ».
RDC, LE GOUVERNEMENT INTERDIT LA MANIFESTATION DE L’OPPOSITION PRÉVUE MERCREDI
En République démocratique du Congo (RDC), le gouvernement interdit la première mobilisation de l’opposition prévue demain. Un rassemblement qui doit exiger l’annulation des scrutins du 20 décembre.
En République démocratique du Congo (RDC), le gouvernement interdit la première mobilisation de l’opposition prévue demain. Un rassemblement qui doit exiger l’annulation des scrutins du 20 décembre. L’opposition pointe des irrégularités massives et exige même la mise en accusation des dirigeants de la commission électorale.
Le gouvernement congolais interdit la première mobilisation de l’opposition prévue demain pour exiger l’annulation des scrutins. Lors d’une conférence de presse ce mardi, le numéro deux du gouvernement, Peter Kazadi, vice-Premier ministre, en charge de l’Intérieur et de la sécurité, a prévenu que les forces de sécurité seront mobilisées pour s’assurer que la marche n’ait pas lieu.
« Je peux vous rassurer, il n’y aura pas cette marche tout simplement parce que cela ne cadre pas avec le contexte. Cela ne cadre pas non plus avec le processus. Cela viole les dispositions légales qui prévoient que la contestation des résultats se fasse devant la Cour constitutionnelle, ou le tribunal compétent », a aussi déclaré Peter Kazadi.
Pour mercredi 27 décembre, le candidat et opposant Martin Fayulu, Denis Mukwege et d’autres candidats ont appelé à une mobilisation massive à Kinshasa. Les opposants affirment qu’ils n’accordent aucun crédit aux opérations électorales dont les résultats partiels sont en train d’être publiés, rapporte notre correspondant à Kinshasa,Patient Ligodi. Ils sont également ouverts à d’autres opposants qui ne sont pas signataires de leur communication. « Nous avons commencé certaines discussions. Si les gens sont d’accord, qu’ils viennent. Nous sommes là. Nous avons les bras ouverts. Ce que nous allons faire le 27 décembre. Nous pouvons le dupliquer partout. Les autres peuvent se dire qu’ils le feront à Lubumbashi ou à Goma », explique Martin Fayulu.