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23 avril 2025
International
par l'éditorialiste de seneplus, félix atchadé
LA RAISON DE L’ÉTAT NÉOCOLONIAL
EXCLUSIF SENEPLUS - Il est difficilement acceptable de justifier au nom de la « raison d’État » que Sonko soit privé d’élection alors que jusqu’à ce jour il a inscrit son action politique dans les normes constitutionnelles sénégalaises
Félix Atchadé de SenePlus |
Publication 03/01/2024
Diverses explications ont été données à la stratégie désordonnée, parfois insolite et malheureusement toujours pathétique avec laquelle l’administration électorale et judiciaire sénégalaise tente depuis plusieurs mois d’empêcher le maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko, d’être candidat au scrutin présidentiel du 24 février 2024. Sans trop nous appesantir sur les raisons invoquées au début pour lancer l’« entreprise de sabotage » et qui à notre avis relèvent du jeu classique de dénigrement du concurrent politique (caricature de ses affiliations idéologiques, accointances alléguées avec des sociétés secrètes, intentions inavouées, etc.), nous parlerons de la toute dernière : la « raison d’État ».
D’abord évoquée par des piliers médiatiques plus ou moins sérieux du pouvoir, elle a été reprise par le député-maire de Dakar, Barthélemy Dias, de la période « cul et chemise » avec le régime. Elle est devenue depuis quelques semaines un élément de langage du camp présidentiel. Cette trouvaille est une réponse au député Ayib Daffé, mandataire du candidat Ousmane Sonko qui a qualifié de « banditisme administratif » les refus réitérés de la Direction générale des élections (DGE) placées sous l’autorité du ministre de l’Intérieur de respecter les décisions de justice favorables à l’édile de Ziguinchor.
Qu’est-ce que la « raison d’État » ? En quoi est-elle une justification possible aux moyens utilisés par tout pouvoir pour s’affranchir des contraintes de l’État de droit ? Quelle est la nature de l’État sénégalais ? Quelles sont les circonstances de sa genèse et dans quelle trajectoire historique s’inscrit-il ?
Dans cet article, nous prenons le parti de défendre la thèse que l’élection à venir est susceptible de changer radicalement la trajectoire de l’État postcolonial sénégalais si Ousmane Sonko et les forces sociales qui le soutiennent en sortent vainqueurs. Plus l’échéance approchera et davantage les tenants du pouvoir soutenus en cela par la classe dominante et ses relais médiatiques prendront des libertés avec le droit et les traditions démocratiques sénégalaises.
L’État, la « raison d’État », le droit et la démocratie
Il ne s’agit pas ici de donner une définition de l’État, nous nous satisferons d’en souligner les aspects qui en font une réalité tangible. Il s’agit d’une organisation politique et administrative reconnue d’un point de vue juridique par une « communauté d’États » et qui préside aux destinées de sociétés d’individus implantées sur un territoire déterminé grâce à une bureaucratie et des capacités de coercition s’imposant à tous. Dans notre modernité, l’État a pour rôle de garantir la sécurité, le bien-être et le développement de ses citoyens. Partant de ces caractéristiques, il s’agit d’une nouveauté quand on prend en compte la longue histoire de ce territoire que nous désignons aujourd’hui sous le vocable Sénégal.
La notion de « raison d’État » est souvent utilisée pour désigner la justification de certaines actions ou politiques menées par un État au nom de ses intérêts supérieurs ou de sa sécurité nationale. Elle est invoquée lorsque des mesures exceptionnelles sont prises, même si elles vont à l’encontre de certains principes ou valeurs démocratiques. La plupart des historiens des idées font remonter à Machiavel, un théoricien italien de la politique i du XVIe siècle, le concept de « raison d’État ». Dans son fameux livre Le Prince, il soutient qu’il arrive que pour préserver la stabilité et la sécurité de l’État, que les dirigeants violent certains principes moraux. Dans le contexte moderne, la raison d’État est souvent invoquée pour justifier des actions telles que la surveillance de masse, la restriction des libertés individuelles, l’utilisation de la force militaire ou la manipulation dans les relations internationales. Par exemple, un gouvernement peut justifier la surveillance de ses citoyens au nom de la sécurité nationale, de la lutte contre le terrorisme, etc.
La démocratie repose sur l’idée que tous les citoyens ont des droits fondamentaux et une voix dans la prise de décision politique. Le droit joue un rôle essentiel dans la consolidation de la démocratie en garantissant l’égalité devant la loi, les libertés individuelles et collectives, ainsi que la justice sociale. Il limite également le pouvoir de l’État et des gouvernants en établissant des mécanismes de contrôle et de responsabilité. La question fondamentale est de savoir si la « raison d’État » peut coexister avec la démocratie. Quand on comprend que la « raison d’État » peut être utilisée comme un prétexte pour commettre des abus de pouvoir et violer les droits de l’homme. Plus graves, les actions menées au nom de la « raison d’État » peuvent en réalité affaiblir la sécurité et la stabilité à long terme, en sapant la confiance des citoyens et en alimentant le mécontentement populaire. Nous sommes de ceux qui pensent qu’utilisée en privilégiant l’intérêt général, la « raison d’État » est nécessaire pour garantir la sécurité et la stabilité d’une nation, et qu’elle peut être conciliée avec les principes démocratiques par des mécanismes de contrôle appropriés. Tout cela étant dit, il est difficilement acceptable de justifier au nom de la « raison d’État » qu’Ousmane Sonko soit privé d’élection alors que jusqu’à ce jour il a inscrit son action politique dans les normes constitutionnelles sénégalaises et la pléthore d’avocats qu’il a recrutés, montre que le droit, les cours et tribunaux sont des instruments de premier ordre dans sa quête du pouvoir présidentiel. Malgré ses réserves, pourquoi devons-nous prendre au sérieux l’énoncé des tenants du pouvoir et leurs relais ?
Le réel et la réalité
Les philosophes nous enseignent qu’il y a lieu de distinguer entre le réel et la réalité. Ils nous disent : « si le réel est bien ce qui est et, en tant que tel, un et absolu, la réalité en est la représentation, et même la reconstruction ». Au-delà de la réalité de l’État que nous avons énoncé plus haut, que se cache-t-il ? Karl Marx considère que derrière le voile de l’État neutre et au service de l’intérêt général, il y a quelque chose de moins reluisant. Pour lui, l’État est intrinsèquement lié à la classe dominante et ne peut pas être neutre ou impartial. Marx affirme que l’État agit en faveur de la classe dominante en protégeant ses intérêts économiques et en réprimant toute contestation ou révolte de la classe ouvrière. Pour Marx, l’État est un outil de coercition et de contrôle social, utilisé pour maintenir l’ordre et garantir la domination de la classe capitaliste.
Lénine tout en se réclamant de Marx, verra dans l’État une circonstance opportune pour les classes sous domination. Pour lui, la classe ouvrière devait renverser l’État bourgeois existant et mettre en place un nouvel État dirigé par les travailleurs eux-mêmes. Antonio Gramsci, un théoricien marxiste italien du XXe siècle, nous a permis de mieux comprendre le « réel » de l’État. Il a développé le concept de classe dominante dans le cadre de sa théorie de l’hégémonie. Selon Gramsci, la classe dominante ne se contente pas d’exercer son pouvoir économique, mais cherche également à maintenir sa domination en influençant et en contrôlant les institutions culturelles et politiques. La classe dominante, selon Gramsci, ne se limite pas à la bourgeoisie capitaliste, mais comprend également des éléments de la classe moyenne et des intellectuels. Gramsci affirme que la classe dominante maintient son pouvoir en créant un consensus culturel au sein de la société, en façonnant les idées, les valeurs et les croyances qui sont acceptées par tous. Cela se fait principalement par le biais de l’hégémonie culturelle, c’est-à-dire l’influence culturelle et idéologique exercée par la classe dominante sur les classes subalternes.
Gramsci soutient que la classe dominante utilise les institutions et les pratiques culturelles, telles que l’éducation, les médias, la religion, etc., pour promouvoir son idéologie et ses intérêts. Par exemple, les médias peuvent présenter une vision biaisée de la réalité qui favorise les intérêts de la classe dominante, tandis que l’éducation peut enseigner des valeurs qui renforcent la position de la classe dominante dans la société. L’objectif de la classe dominante, selon Gramsci, est de maintenir son pouvoir et de prévenir la prise de conscience de l’exploitation par les classes subalternes. Cela est réalisé en créant un consensus culturel qui fait accepter aux classes subalternes l’ordre social existant comme naturel et juste. Pour lutter contre la classe dominante, Gramsci préconise la construction d’une contre-hégémonie, c’est-à-dire le développement d’une nouvelle vision du monde et d’une nouvelle culture qui remet en question l’ordre établi. Tous ces éléments conceptuels nous aident à comprendre ce qui est en jeu au Sénégal, au Sahel et dans bien d’autres endroits en Afrique.
L’État sénégalais derrière le rideau
L’État sénégalais indépendant a été construit sur des institutions (parlement, armée, administration territoriale) mises en place par les régimes coloniaux et sur un principe de souveraineté sanctifié par la communauté des États déjà existants. Il est un legs de la colonisation française et s’inscrit dans une continuité historique où les remises en cause ont été fréquentes, mais très sévèrement réprimées. C’est une histoire très militarisée. La conquête coloniale française a été menée, que ce soit en Afrique de l’Ouest, en Afrique centrale ou à Madagascar, à travers des opérations violentes de « pacification » visant à détruire toute résistance. Dans les années qui ont précédé la décolonisation, la France a utilisé à nouveau la force militaire pour casser les mouvements et partis indépendantistes, comme au Cameroun (1955-1960) ou quelques années plus tôt à Madagascar (1947-1948), avant d’installer au pouvoir des dirigeants politiques qu’elle avait choisis. Au début des années 1960, à la domination impériale directe s’est substituée une relation sans équivalent ailleurs dans le monde, désignée par les vocables de « Françafrique », « État franco-africain », etc. À l’indépendance de ces territoires, en 1960, ce nouveau cadre permet de faire de l’Afrique francophone la sphère d’influence exclusive de la France. Sur le plan pratique, Paris met en place des dispositifs techniques, économiques, monétaires (franc CFA) culturels, etc. dans une logique affichée de coopération et d’aide au développement et pour mieux conserver son influence et son accès aux matières premières africaines. Le Sénégal contemporain est le produit de cette histoire. Sa spécificité : est d’être la vitrine démocratique du pré carré français. Il n’en reste pas moins un État néocolonial en ce sens qu’il continue de subir la domination et l’exploitation économique, monétaire politique ou culturelle de la part de la France.
Au Sénégal, les relations entre l’État colonial puis postcolonial et les sociétés relativement hétérogènes ont certes été problématiques. Elles ont pu se normaliser grâce à ce que le politiste Donal Cruise O’Brien (1941-2012) a appelé le « contrat social sénégalais » qui a été scellé sur la base de ce que l’historien sénégalais Mamadou Diouf nomme « le modèle islamo-wolof ». Dans ce cadre, les confréries musulmanes sénégalaises ont joué un rôle important dans ces relations, offrant un lien efficace entre l’État et la société. Dans ce contrat, le gouvernement récompense les élites en leur octroyant diverses formes de parrainage officiel, y compris des ressources matérielles.
En retour, les hommes de religion au Sénégal offrent surtout une protection à leurs disciples contre les abus des représentants de l’État. Sous le régime de Senghor, le contrat clientéliste entre l’État et les confréries a atteint son apogée. Par la suite, pour des raisons d’ordres économiques (ajustement structurel), l’urbanisation, la montée de l’individualisme, la montée des idées réformistes dans les confréries et dans l’islam de manière général, ce modèle s’est essoufflé. En même temps qu’agonise ce système d’alliance de la bourgeoisie politico-bureaucratique garante des intérêts de l’ancienne puissante coloniale et des élites issues des processus cooptation montaient les idées nationalistes qui expliquent dans le retard économique et social du pays par le maintien des liens d’assujettissement à la domination française.
Dans le même temps émergeait une bourgeoisie nationale ayant fait son « accumulation primitive » dans l’économie populaire encore appelée secteur informel et ayant des références idéologiques qui s’imposent comme des alternatives aux discours de la classe dominance actuelle. C’est l’alliance de ces forces qui est au cœur du dispositif de soutien à Ousmane Sonko. C’est une alliance qui ne cache pas son ambition de subvertir l’ordre établi. Elle a d’autant plus les coudées franches et des chances de gagner la bataille de l’hégémonie culturelle qu’en face le discours ne s’est pas renouvelé, n’offre aucune perspective de lendemains enchanteurs et se complait à annoncer l’apocalypse en cas de changement. Ils devraient lire Gaston Berger : « Demain est moins à découvrir qu’à inventer. »
En 2019, alors que beaucoup d’analystes considéraient sa candidature comme celle du témoignage, Ousmane Sonko avait mobilisé plus de 15 % du corps électoral en développant un thème de campagne considéré jusqu’alors comme un tabou : le franc CFA. Sa critique de la « mal gouvernance » avait également séduit une partie de l’électorat. Néanmoins, le vote en sa faveur avait été circonscrit à la diaspora d’Europe et d’Amérique, aux régions de Dakar et Ziguinchor et les centres urbains d’autres régions. Cinq ans plus tard, son potentiel électorat a évolué. En plus de celles évoquées plus haut, il a été rejoint par des forces sociales qui aspirent à l’hégémonie et qui remettent en cause le vieux contrat social sénégalais et sa figure tutélaire : la France. Dans un contexte sahélien de perte d’influence de la France, l’enjeu électoral sénégalais prend la forme d’une épreuve de survie pour l’État néocolonial. C’est sa « raison » qui est à l’œuvre dans tous les manquements au droit, à la démocratie et la justice. C’est ce qui rend compte de ce que Ayib Daffé appelle le « banditisme administratif ». Ce n’est pourtant qu’un… euphémisme.
LIBÉRATION DE DÉTENUS POLITIQUES, LA CEDEAO ACCULE LE BURKINA
La CEDEAO interpelle le président de la transition, le capitaine Ibrahim Traoré, et lui demande de libérer immédiatement les personnes arrêtées dans les manifestations et « tentatives » de coup d’Etat.
Au rebours des autres interpellations, celle de l’ancien chef de la diplomatie burkinabé n’est pas passée inaperçue. En effet, pour faire libérer Ablassé Ouédraogo, c’est la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui est montée au créneau pour s’en prendre au régime burkinabé. Dans un communiqué, l’organisation régionale interpelle le président de la transition, le capitaine Ibrahim Traoré, et lui demande de libérer immédiatement les personnes arrêtées dans les manifestations et « tentatives » de coup d’Etat. « C’est une procédure illégale et arbitraire », indique la CEDEAO s’agissant des réquisitions. Enfonçant le clou, l’organisation invite le pourvoir burkinabé à prendre toutes les mesures urgentes en vue d’un « retour rapide à l’ordre constitutionnel ».
La réponse du gouvernement de la transition du Burkina Faso n’a pas tardé à se faire entendre. « Le gouvernement de transition n’entend pas se laisser divertir par des communications qui procèdent d’un imaginaire débordant et tronqué sur la situation réelle de notre peuple», réplique-t-il.
Si les autorités burkinabè n’ont pas fait dans la dentelle, c’est parce que également la CEDEAO semble oublier les « régimes démocratiquement élus » pour ne s’en prendre qu’aux régimes de transition. Une politique de deux poids deux mesures qui exaspère. En effet, pendant que la CEDEAO exige la libération de détenus politiques au Burkina, plus d’un millier, en plus du leader de l’opposition, sont dans les prisons sénégalaises sans que cela ne suscite de réaction de sa part. La même chose pourrait être dite de la Côte d’Ivoire ou encore du Bénin où les opposants souffrent souvent le martyr. Seulement, pour la CEDEAO, qui faut-il le rappeler a été créée par des militaires, les régimes de transition n’ont pas droit au chapitre.
RÈGLEMENT DES CONFLITS EN AFRIQUE, ALIOUNE TINE HONORÉ
Le Prix Award pour la paix, la sécurité, la médiation et le règlement des conflits en Afrique a été décerné au fondateur de Afrika Jom Center par Le Magazine panafricain Afrique Démocratie.
Le Prix Award pour la paix, la sécurité, la médiation et le règlement des conflits en Afrique a été décerné au fondateur de Afrika Jom Center par Le Magazine panafricain Afrique Démocratie. Le choix porté sur l’ancien patron de la Raddho s’explique par ses combats pour la démocratie, les libertés, et les droits humains au Sénégal et un peu partout en Afrique. Depuis 2011 Alioune Tine se fait remarquer par comme une sentinelle de la démocratie et de L’état de droit. On se rappelle le rôle important qu’il a joué dans le combat contre la candidature de Me Wade à travers la manifestation du 23 juin 2011.
MBAPPE, ENTRE PARIS ET L'APPEL DES SIRÈNES
Le prodige de Bondy se retrouve face à un dilemme. Il doit choisir entre rester au PSG ou tenter un nouveau challenge ailleurs. Plusieurs prétendants sont déjà à l'affût pour attirer la star
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 02/01/2024
Alors que son contrat au Paris Saint-Germain prend fin en juin prochain, Kylian Mbappé se retrouve dans la même situation qu'il y a un an et demi: libre de s'engager dès le 1er janvier avec le club de son choix pour la saison suivante. Comme le rapporte le site d'information Le Parisien, "pour la deuxième fois de sa carrière au PSG, Kylian Mbappé est libre de s’engager pour un autre club, quitte à le rejoindre l’été prochain, pour la nouvelle saison".
Parmi les prétendants, deux clubs sont particulièrement à l'affût selon la source: le Real Madrid et Liverpool. Le géant espagnol "rêve constamment de l'accueillir" après les échecs des tentatives de recrutement précédentes. De son côté, Liverpool représente "le candidat le plus crédible et dangereux pour le PSG" avec un Jürgen Klopp qui "lui fait les yeux doux depuis neuf ans", note Le Parisien.
Pour autant, une prolongation au PSG n'est pas à exclure. Comme l'affirme l'attaquant lui-même en mars dernier après l'élimination en Ligue des Champions: "Je suis ici, je suis très content et, pour l’instant, je ne pense à rien d’autre qu’à faire les beaux jours du PSG". Depuis cet été agité, les relations avec sa direction se sont d'ailleurs "normalisées de manière spectaculaire" selon le média.
Beaucoup estiment qu'il serait "étonnant" que Mbappé quitte le club de la capitale dans l'immédiat. Ayant obtenu "tout ce qu’il voulait", "partir maintenant n’aurait pas de sens" pour le champion du monde 2018 qui ne trouverait pas "ailleurs un tel cadre politique pour s’exprimer". Néanmoins, le contexte sportif, avec une Ligue 1 devenue trop étriquée, pourrait le pousser vers un nouveau défi.
Réponse au plus tôt en janvier ou après le championnat d'Europe en été ? Tout reste ouvert pour l'avenir de Kylian Mbappé.
par Nioxor Tine
LA RÉTRO 2023 DE NIOXOR
De l'affaire Sonko à la dissolution du Pastef, en passant par la candidature du Premier ministre Amadou Bâ, retour sur les manœuvres du camp présidentiel visant à museler l'opposition et à perpétuer le pouvoir
Fin décembre 2022, le Premier ministre Amadou Bâ, à sa sortie d’un séminaire intergouvernemental avec son homologue française, avait péremptoirement déclaré : » le seul problème entre nos deux pays, c’est qu’il n’y a pas de problème » (sic).
De là, à en conclure qu’il est le cheval sur lequel l’ancienne métropole coloniale mise pour perpétuer le système françafricain, il n’y a qu’un pas que certains observateurs (dont Nioxor Tine) ont vite fait de franchir. Surtout, quand on se rappelle, que le président Macky Sall aussi avait eu les faveurs des dirigeants français, qui l’avaient élevé au rang de Grand Chevalier de la Légion d’honneur, en 2008, année de sa séparation houleuse, d’avec Me Abdoulaye Wade.
Voilà donc l’homme que Benno nous propose pour assurer la continuité désastreuse de la politique pro-occidentale jusque-là mise en œuvre, depuis toujours.
Un malheur ne venant jamais seul, l'indésirable Madame Le Pen a effectué, en début d’année, une visite privée coïncidant - signe du destin -avec une série d’accidents meurtriers dans notre pays et a même eu l’insigne honneur d’être reçue en audience par le Chef de l’Etat, qui lui aurait même accordé une subvention. Quelle mouche a donc pu piquer le Président de la République, pour qu’il fasse preuve de tant d’égards à l’endroit de cette personnalité politique française, tant controversée, qui n’a cessé, depuis sa tendre enfance, à l’ombre de son facho de père, à stigmatiser nos compatriotes et les autres frères africains résidant en France.
Il y a ensuite deux accidents spectaculaires de la circulation, qui relèvent davantage de dysfonctionnements dans la conception et la mise en œuvre des politiques publiques dans le domaine du transport que de la responsabilité des acteurs du secteur. Ces drames routiers peuvent même être considérés comme des indicateurs de mal-gouvernance.
Le 18 janvier eut lieu le renvoi de l’affaire opposant Ousmane Sonko à Adji Sarr, témoignant d’un dévoiement sans précédent de notre vie démocratique digne d’un démolisseur de nos institutions, d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, en rapport avec notre nouveau statut de pays pétrolier et gazier.
Cette gestion autoritaire des affaires publiques se traduit par une exacerbation de la tension sociopolitique avec notamment l’interdiction du meeting de Mbacké et la coupure arbitraire du signal du groupe de presse Walfadjri faisant ressembler notre pays à une dictature sud-américaine, comme le Chili d'Allende.
L’inauguration, en février, du pont de Marsassoum baptisé du nom de M. Famara Ibrahima Sagna, ancien ministre sous l’ère socialiste aurait pu symboliser l’établissement de passerelles entre les diverses familles politiques de notre pays. Nos autorités devraient cesser d’instrumentaliser les cérémonies de parrainages ou de décorations, dans le but d’utiliser d’illustres personnalités nationales comme faire-valoir de politiques, qui ne sauraient les engager.
Le 16 mars dernier, un mois jour pour jour après que les FDS l’aient sorti, de force, de son véhicule en brisant, une deuxième fois, la vitre de son véhicule, le monde entier a pu assister, en direct, aux brimades et agressions physiques voire aspersions de produits chimiques sur le leader du Pastef. Ces actes méprisables s’inscrivent dans cette stratégie visant à saper les bases de la respiration démocratique initiée, il y a 23 ans, lors de la première alternance du 19 mars 2023, en somme, un désir chimérique de passer du paradigme d’alternance démocratique à celui de présidence à vie.
Quelques semaines plus tard, à l’issue du défilé du 4 avril, encore plus martial que d’habitude, le président annonce un appel irrationnel au dialogue tombant comme un cheveu dans la soupe, dans un contexte où des centaines de militants politiques croupissent en prison.
Dans la nuit du 8 au 9 avril, s’éteignait Ibrahima Sène, membre de la direction du PIT-Sénégal, icône de la gauche sénégalaise, trois semaines avant son 77ième anniversaire. Si Sémou Pathé Guèye, autre grande figure de ce parti, lui aussi disparu, était un brillant esprit, un grand philosophe, on pouvait considérer Ibrahima comme la "cheville ouvrière théorique" du Parti, au cœur de tous les débats, actif dans l'élaboration de ses positions théoriques, devenues controversées dans la dernière période.
Selon Dooleel PIT-Sénégal, le septième congrès va intervenir dans un contexte d’affaiblissement organisationnel de la gauche, qui a laissé le champ libre au régime de Macky Sall, conduisant au démantèlement des contre-pouvoirs et par conséquent au recul de l’Etat de droit. Le 7ième congrès s’est inscrit dans la trajectoire de reniement des engagements pris devant le peuple, avec des silences embarrassés voire complices, qui ont fini par devenir embarrassants pour tous les militants de la gauche véritable.
Toujours en avril, Idrissa Seck mettait un terme à son compagnonnage avec le président de la République entamé à la Toussaint de 2020 et publiait une lettre de démission remplie de tergiversations et d’atermoiements. Ce faisant, il imitait les vieilles ruses de son mentor Me Abdoulaye Wade, qui avait l’habitude de rendre sa démission du poste de ministre du gouvernement de majorité présidentielle, à la veille des élections.
Le mois de Mai voit une cascade de condamnations (procès portant sur une prétendue diffamation et sur un viol fictif) s’abattre sur le président Ousmane Sonko, faisant dire à l’homme politique Cheikh Tidiane Dièye, que Macky Sall « cherchait à détruire un rêve porté par des millions de sénégalais ». C’est dans ce contexte aggravé par l’incarcération de centaines de militants du PASTEF, que le régime du Benno-APR va organiser un pseudo-dialogue imposé à la classe politique pour valider la transmutation de notre modèle démocratique, déjà sérieusement abîmé en autocratie pétrolière.
Il n’est, dès lors pas étonnant, que dès le lendemain de l’ouverture officielle de cette mascarade aux allures de conspiration et suite au verdict arbitraire sur l’affaire Adji Sarr, de violentes émeutes éclatent à Dakar, consacrant ainsi le droit légitime de résistance à l’oppression.
La répression violente de ce mouvement d’humeur des jeunesses patriotiques, avec à la clé, des dizaines d’arrestations injustifiées et plusieurs morts par balles, revêtant parfois l’allure d’exécutions extra-judiciaires ne pouvaient pas ne faire penser à la glorieuse journée du 23 juin 2011. Là également, il s’était agi d’un soulèvement populaire, dont Macky Sall faisait partie des sponsors, qui avait donné un coup d’arrêt à une tentative de tripatouillage de la Constitution finalement, très vite annulée par le président Abdoulaye Wade.
Le président Macky Sall dut, lui aussi, faire marche arrière à l’occasion d’une allocution solennelle, en date du 3 juillet. Il y annonça sa renonciation à briguer un troisième mandat, qu’il n’avait jamais osé assumer pleinement, préférant se cacher derrière une réponse de normand (ni oui ni non). Il s’agissait là de l’échec partiel du projet autocratique visant à maintenir notre pays dans la dépendance néocoloniale.
La reculade ou « repli tactique » du président de l’APR sur le troisième mandat a contribué à démobiliser l’opposition, qui ne réalise toujours pas qu’à lui tout seul, un simple dimanche électoral sans soubassement programmatique ni unité populaire, ne peut suffire à remédier au sort tragique de peuples opprimés comme le nôtre. De son côté, le président Sall assiste, impuissant, à l’implosion de sa coalition minée par des querelles intestines entre factions diverses, menaçant sa cohésion et même l’existence de son régime funeste. Il n’en poursuit pas moins la persécution de ses adversaires politiques, refusant obstinément de décrisper l’atmosphère politique.
Signe des temps, l’arrestation d’Ousmane Sonko en fin juillet et la dissolution du Pastef début août, sont intervenues au surlendemain du putsch au Niger, c’est-à-dire à un moment où le pré-carré français en Afrique occidentale rétrécit comme une peau de chagrin. La dissolution illégale de ce parti ressemble, à s’y méprendre à un putsch préventif contre un éventuel danger de révolution patriotique, populaire et panafricaniste.
Personne n’aurait pu imaginer qu’au 21ième siècle, le peuple sénégalais devrait encore se battre pour le respect des normes démocratiques minimales. Et pourtant, la bataille fut longue depuis la dictature du Parti-Etat senghorien jusqu’à la première alternance de 2000, puis la deuxième de 2012. Après l’échec de la dévolution monarchique du pouvoir entre le président Wade et son fils, ce fut au tour de Macky Sall de revenir sur les engagements pris, entre les deux tours de la présidentielle de 2012. Toutes ces turpitudes de politiciens libéraux ont fini par entraîner une régression majeure affectant notre système démocratique, dont l’exemple le plus emblématique se trouve être le récent décret de dissolution du Pastef.
Après avoir renoncé, bien malgré lui à son troisième mandat chimérique, le président Macky Sall a revêtu son costume d’autocrate-marionnettiste pour proposer à ses militants comme candidat, une personnalité, non pas la plus consensuelle, mais celle dont la contestation entraînera le moins de dégâts possibles.
En refusant au mandataire du président Ousmane Sonko de disposer des fiches de parrainage, la direction générale des élections a posé un acte aussi arbitraire que symboliquement chargé et un abus de pouvoir.
Il faut donc se dresser pour la tenue d’élections transparentes, apaisées et inclusives pour – loin des tentations de putsch militaire - trouver une issue heureuse aux contradictions venues à maturité par le biais d’une révolution démocratique pacifique, suivant l’héritage des Assises Nationales.
Il faut se rendre à l’évidence ! Autrefois présenté comme un havre de démocratie et de paix, notre pays est en train de se transformer en dictature, devant l’indifférence générale de la communauté internationale, la même, qui détourne le regard, quand l’armée israélienne pilonne les modestes demeures palestiniennes de Gaza. Mais la jeunesse sénégalaise, qui veille au grain, ne veut ni de restauration d’ordres anciens ni de nouvelle alternance trompeuse, car l’’heure de l’alternative a sonné.
C’est la grande zizanie au sein de Benno Bokk Yakaar, à tel point qu’on se demande, si ses dirigeants ne vont pas trouver un autre candidat de substitution ou simplement déclarer forfait.
L’accession du président Macky Sall au pouvoir fut placée sous le signe de l’espoir (Yakaar), en droite ligne de la dynamique des Assises Nationales. Douze ans après, c’est le désenchantement !
De fait, nous assistons à la mise sous tutelle des principales institutions de notre pays, par une mafia politico-bureaucratique, qui s’attelle à piller impunément nos ressources nationales et fait tout pour se maintenir, ad vitam aeternam au pouvoir.
A quelques semaines de la date du 25 février 2024, l’espoir d’une nouvelle aube naissante est en train de poindre à l’horizon. Au-delà des péripéties électorales, une certitude s’impose : le camp de la continuité néocoloniale est politiquement défait. Il appartient maintenant au peuple sénégalais, dans ses diverses composantes à construire une véritable alternative sociopolitique dans la période à venir.
par Amadou Tidiane Wone
POLITIQUES DE LA MISÈRE ET MISÈRES DE LA POLITIQUE
Le bilan matériel du président sortant est bien loin de ce que l’on pourrait penser d’un pays émergent. Les réalisations déclarées sont autant de remparts cache-misère d’une réalité peu reluisante du pays
Les œuvres humaines sont imparfaites. Par nature. Un bilan humain doit toujours comporter deux colonnes. Les succès d’une part. Les échecs de l’autre. C’est la balance, d’un côté ou de l’autre, qui donne du crédit positif ou négatif au bénéfice de son auteur. Cela en conformité avec le verset 9 de la Sourate 55 du Saint Coran, Ar. Rahmane : « Donnez [toujours] le poids exact et ne faussez pas la pesée ». En ne donnant, par exemple, qu’un seul versant du bilan… Lorsque l’on liste les réussites, il faut aussi énoncer les contre-performances et les échecs. Ne serait-ce que pour mieux mettre en valeur les succès !
Le dernier message solennel du président de la République à la nation sénégalaise doit donc être apprécié à l’aune des promesses faites en 2012 d’une part. Mais ces promesses, ainsi que les réalisations qui en ont été les conséquences, doivent également faire l’objet d’une évaluation détaillée des coûts réels des réalisations, rapportés à leur opportunité, et aux impacts objectifs sur le quotidien des citoyens de notre pays. Un catalogue de réalisations ne suffit pas à établir les bons choix stratégiques qui les motivent ni les acquis structurants pour le pays qui en découlent. Il va falloir regarder, dans le détail, les réalisations, les modalités de passation des marchés, le respect des règles y afférentes, les retombées de ces réalisations sur le développement de notre pays. Notamment en termes d’emplois effectivement créés dans la durée, autre que les emplois journaliers ou saisonniers. Mais aussi quel impact sur le dynamisme du secteur privé national ? Il faut également et, par-dessus tout, traquer les coûts cachés, déceler les surcoûts dus à la corruption, identifier les détournements éventuels d’objectifs et/ou de deniers publics pour avoir une idée précise de l’état des lieux à la veille de changer de président de la République. Évaluer la CREI, première institution judiciaire réactivée en 2012, aurait dû faire l’objet d’un paragraphe, au moins, dans le discours du chef de l’État. Que d’accusations lancées à l’époque dont on ne saura jamais le bien fondé ni les issues finales. Quelle sera la suite des dossiers de l’OFNAC placés « sous le coude » du président sortant ? Autant de sujets absents du message d’adieu et qui nous laissent un goût d’inachevé…
Nous espérons que ce travail de fourmi sera effectué par les différents candidats à la succession du président de la République. Car, c’est sur son bilan, et sur les nouvelles perspectives offertes par les candidats à sa succession, que devra se dérouler la campagne électorale à venir. Mais non sous la forme de monologues parallèles si commodes pour ceux qui n’ont, au fond, rien à dire !
En attendant, il semble bien que le bilan matériel du Président sortant, soit bien loin de ce que l’on pourrait penser d’un pays émergent ! Les réalisations déclarées sont autant de remparts cache-misère d’une réalité peu reluisante de notre pays dont le classement parmi les pays les plus pauvres du monde est sans appel. Toutes les nouvelles autoroutes masquent une détérioration, dans le même temps, du réseau des routes nationales de notre pays. L’entretien et l’élargissement du réseau des routes nationales me semblent urgents et nécessaires. Car, parallèlement à l’autoroute allant vers Kaolack, emprunter la route nationale qui y mène, relève du parcours du combattant : les nids de poules et le cortège incessant de camions qui font la liaison internationale avec les pays voisins, sont à la limite du supportable. Les localités n’ayant accès ni à l’eau courante ni à l’électricité sont légion à l’intérieur du pays. Que dis-je ? Dans la banlieue de Dakar et dans certains quartiers de la capitale, la précarité est visible à l’œil nu ! Des abris provisoires (qui durent…) faisant office de salles de classe à des classes où s’entassent plus de 100 élèves ( !) Il y’aurait matière à regrets. Tout de même. Ayons le triomphe modeste !
Au demeurant, la multiplication des autoponts et trémies, dans Dakar intra muros, a-t-elle eu les effets escomptés sur la fluidité de la circulation ? Aux usagers d’y répondre ! Les embouteillages récurrents, intempestifs et lassants, sont-ils le signe d’une amélioration notable de la fluidité attendue des gros investissements liés au TER et au BRT ? Évidemment qu’avec des cortèges qui ouvrent la voie avec des motards on a une vue déformée de la réalité. J’ai connu cela.
La multiplication des universités, fermées pour certaines, est-elle à ranger dans la colonne des succès ? Les contenants (bâtiments flambants neufs) valent-ils les contenus pédagogiques et les perspectives professionnelles et éducatives qui en constituent les vocations ?
Au bout de douze années de Présidence de S.E. Macky Sall, les sénégalais sont-ils plus heureux ? Mieux dans leur peau ? Mieux dans leurs têtes ? L’accès aux soins de santé et aux services éducatifs de qualité est-il garanti pour tous ? Questions simples… Questions incontournables pour faire une balance juste.
En vérité, s’il y’a un élément essentiel du bilan qui a été passé sous silence, c’est le bilan immatériel : les assauts répétés sur notre vivre-ensemble, la cacophonie de l’ignorance dans les réseaux asociaux, la méchanceté qui ne se cache plus mais qui dégouline de baves incendiaires jusque dans les travées de l’Assemblée Nationale, le mal vivre des jeunes qui fuient notre pays avec l’énergie du désespoir, les tensions ethniques latentes, les raidissements dans le landerneau politicien où les débats aboutissent systématiquement devant les cours et tribunaux… La chasse aux sorcières qui, depuis quelques années, a rempli nos prisons d’adolescents aux portes de la vie. Tout cela alimente un stress général qui fait douter, jusque dans les premiers soutiens du président Macky Sall dont d’aucuns, et non des moindres, ont refusé de le suivre dans le choix de son successeur…
L’après APR a commencé ! Avec quelles conséquences imprévisibles ? L’avenir est à venir car, les militants de la première heure se sont fait voler la mise par des transhumants qui guettent, déjà, la moindre occasion pour déménager. Juste le temps de voir dans quel sens tourne le vent. On peut gager que l’après parrainage sera riche de retournements de situations. Misères de la politique ! En conséquence, de nouvelles configurations des forces en présence vont survenir. Espérons qu’au bout de ce gymkhana les intérêts supérieurs de notre peuple seront saufs !
Alors, qui pour nous tirer de toutes ces calamités ?
En principe, on se donne un chef d’État pour qu’il rassemble et apaise son peuple. Qu’il contribue, par son comportement exemplaire, à le tirer vers le haut par l’incarnation des valeurs cardinales garantes de l’harmonie et des équilibres sociaux. Au moins, une certitude que j’ai acquise au bout de ces douze ans : Un chef d’État ne doit pas rester chef d’un parti ! Est-ce si difficile à comprendre ?
Nous attendons donc des engagements fermes, de la part de ceux qui vont briguer nos suffrages, sur ce point crucial pour la restauration de l’État de Droit, et le renforcement de la crédibilité de nos institutions. Ce sera le premier pas vers une dépolitisation de l’appareil d’état qui doit se mettre au service des intérêts supérieurs de la Nation et non servir les intérêts d’un parti ou d’un clan. Pour réparer notre pays si abîmé, plus qu’un homme providentiel ou une femme, il va falloir beaucoup d’humilité à tous les sénégalais, mais aussi beaucoup de courage ! Pour changer en chacun de nous ce qui doit l’être ! Nos valeurs sociales et morales sont à terre. Le culte de l’apparence et du gain facile, à tous prix, a atteint des niveaux inadmissibles. L’argent-roi est devenu la nouvelle idole avec son cortège de comportements outranciers orchestrés par des politiques de la misère qui ravalent les citoyens au rang de laudateurs impénitents. Et cela passe le temps à organiser des cérémonies, dites religieuses parfois, pour se flatter les uns les autres. Juste un prétexte pour rassembler le contenu des enveloppes gouvernementales et les subsides des pauvres. Le mal est profond. Les hommes politiques auront-ils le courage de nettoyer la plaie en profondeur ? Et d’apporter le langage de vérité qui sied face au gouffre ? Une rupture profonde d’avec nos lassitudes est devenue pressante et nécessaire. Le morcellement de la classe politique en micro-organisations sans âmes, ni visions, toutes ces formes d’escroqueries qui prospèrent à la faveur du prisme déformant des réseaux sociaux, doivent faire l’objet d’un traitement en profondeur, avec intelligence et fermeté.
Bref, il faut absolument siffler la fin de la récréation si notre génération veut faire œuvre utile !
En attendant, bonne année à tous et à toutes ! Meilleurs vœux de bonne santé et de bonheur tout simplement !
Vivement la fin février 2024 dans la Paix, et le début du vrai changement !
L’ÉGYPTE ET L’ÉTHIOPIE DEVIENNENT OFFICIELLEMENT MEMBRES DES BRICS
L’Égypte et l’Éthiopie sont devenues officiellement membres des BRICS, ce 1er janvier, après leur admission, lors du 15e sommet de cette organisation tenue en Afrique du Sud, en août dernier.
Dakar, 2 janv (APS) – L’Égypte et l’Éthiopie sont devenues officiellement membres des BRICS, ce 1er janvier, après leur admission, lors du 15e sommet de cette organisation tenue en Afrique du Sud, en août dernier.
Les deux pays africains, qui font partie des cinq nouveaux membres avec l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Iran, rejoignent ainsi l’Afrique du Sud, qui était jusque-là le seul du continent à faire partie des BRICS.
L’Éthiopie est le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique avec 123 millions d’habitants, derrière, le Nigéria, qui en compte 216 millions.
L’Égypte, quant à elle, avait déjà rejoint en mars dernier la Nouvelle banque de développement (NDB) des BRICS, opérationnelle depuis 2015, et dont l’objectif est ‘’de mobiliser des ressources pour des projets d’infrastructure et de développement durable dans les marchés émergents et les pays en développement’’, lit-on sur le site internet de l’institution financière.
L’Argentine également invitée à devenir membre en août ne fera finalement pas partie du groupe. Son nouveau président, l’ultralibéral Javier Milei ne souhaite pas que son pays intègre le bloc.
Les BRICS, une plateforme importante de coopération entre les marchés émergents et les pays en développement, est composé à l’origine du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud.
Avec l’adhésion officielle de l’Egypte et de l’Éthiopie, de l’Arabie saoudite, des Emirats arabes unis et de l’Iran, les BRICS compte désormais dix membres.
MACKY SALL FELICITE FELIX ANTOINE TCHISEKEDI POUR SA REELECTION
Le président sénégalais a adressé, lundi, ses ‘’chaleureuses félicitations’’ à Félix Antoine Tshisekedi réélu à la tête de la République démocratique du Congo pour un second mandat de 5 ans.
Dakar, 1er jan (APS) – Le président sénégalais a adressé, lundi, ses ‘’chaleureuses félicitations’’ à Félix Antoine Tshisekedi réélu à la tête de la République démocratique du Congo pour un second mandat de 5 ans.
‘’Chaleureuses félicitations au Président Félix Antoine Tshisekedi suite à sa réélection à la Magistrature suprême de la RDC, avec mes vœux les meilleurs pour la réussite de son nouveau mandat’’, a déclaré Macky Sall sur le réseau social X.
Le président sortant de la République démocratique du Congo (RDC), Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, a été réélu pour un nouveau mandat après être largement arrivé en tête de l’élection présidentielle du 20 décembre avec un score de 73, 34 %, a annoncé, dimanche, la Commission électorale nationale indépendante (CENI).
Selon les chiffres provisoires rendus publics par la CENI, Félix Tshisekedi a obtenu plus de 13 millions de voix sur près de 18 millions de votes lors de cette élection à un seul tour. Le candidat arrivé en tête avec au moins de 20 % des suffrages peut être déclaré vainqueur, d’après la loi électorale congolaise.
Les résultats officiels seront annoncés le 10 janvier par la Cour constitutionnelle du pays.
Près de 44 millions d’électeurs congolais étaient appelés aux urnes le 20 décembre 2023 pour élire un président de la République, des députés à l’Assemblée nationale et des représentants aux assemblées provinciales. Vingt candidats étaient en lice pour l’élection présidentielle.
par Michel Ben Arrous et Liora Bigon, avec Mame Thierno Cissé
LE SOLDAT SÉNÉGALAIS DE NATHAN ALTERMAN, UN TIRAILLEUR AU LEVANT
EXCLUSIF SENEPLUS - La crise de mai 1945 en Syrie impliquant 2 bataillons de tirailleurs sénégalais manipulés par la France en débâcle, a longtemps été occultée. L'un des rares témoignages en est un poème hébreu traduit ici en français et wolof
Michel Ben Arrous et Liora Bigon, avec Mame Thierno Cissé |
Publication 02/01/2024
La crise de mai 1945 en Syrie, à laquelle participèrent deux bataillons de tirailleurs sénégalais, a très tôt été recouverte d'un voile d'amnésie. L'une des rares traces de cette crise de décolonisation et de ses acteurs sénégalais, manipulés par l'empire français en pleine débâcle, est un poème en hébreu, contemporain des évènements. Nous en présentons, pour la première fois, une traduction en français ainsi qu'en wolof.
Le 9 mai 1945, un bataillon de tirailleurs sénégalais débarque du croiseur Montcalm à Beyrouth. Le 17, un second bataillon débarque du Jeanne d'Arc. Les tirailleurs sont aussitôt acheminés en Syrie, dont la marche vers l'indépendance était ponctuée de violentes manifestations antifrançaises. Le 29 mai, le commandement français donne l'ordre aux tirailleurs, appuyés par des bombardements intensifs, de prendre Damas d'assaut. S'ensuivent trois jours de combats de rue, de saccage et de pillages. La dernière nuit avant le cessez-le-feu, celle du 31, est "une nuit de dagues et de couteaux". C'est aussi la dernière nuit du tirailleur anonyme, mort "dans l'éther des médications", auquel le poète israélien Nathan Alterman consacre, quelques jours plus tard, un poème sobrement titré "A propos d'un soldat sénégalais". En voici nos traductions, en français et en wolof:
A propos d'un soldat sénégalais
Qu’on enrôla pour la Guerre mondiale et qu’on envoya après la victoire dans la tourmente des émeutes et des rivalités franco-britanniques au Levant
Jëm ci ab soldaar, doomu Sénégal
Bu ñu dugaloon ca Xeex bu mag ba dajoon Adduna te, gannaaw ndam la, ñu dellu ko dugal ca coowu xeexi mbedd yaak kujje ga doxoon ca diggante tubaab yaak àngale ya ca Levant
A l’orée du Sénégal, à l’orée du Sénégal,
un petit Sénégalais
grandissait, grandissait.
Aux palmiers il grimpait, dans les vagues se baignait.
Froides sont les vagues à l’orée du Sénégal.
Ca catal Sénégal, ca catal Sénégal,
ab xale, domu Sénégal a nga fa
di màgg, di màgg.
Di yéeg ca ron ya, di sangu ca duus ya.
Sedd lañu def, duus ya ca catal Sénégal.
Puis vint un fonctionnaire, un fonctionnaire colonial est passé,
avec une lourde corde sénégalaise l’a attaché.
Jékki, ndawal nguur gi ñëw fa, ndawal nguurug nootkat ya jaar fa,
yeew ko ak buum gu diis.
Puis dans les plantations il travailla,
et charge sur charge, sur son dos on chargea.
Et quand ses forces furent épuisées,
du travail forcé il se sauva.
Mu doxe fa, di liggéey ca tool ya,
sëf ci sëf, sëf wu nekk ñu bootal ko.
Ba dooleem jéexee,
liggéey yu sañul bañ ba la rëcc.
Puis autour d’un fouet il se tordit à terre.
Longs sont les fouets au Sénégal, longues leurs lanières.
Et ensuite, quand les armées furent convoquées par les nations,
on l’enrôla au secours de la civilisation.
Laxasu na ci yar ba koy caw, bërangu na ca suuf.
Yar yee ko gudd ca Sénégal, car yee ko gudd.
Ñu teg ca ne, ba réew ya taxawalee xare ya,
ñu dugal ko ca wallu lay tax ñu naan nite.
Il s’enfonça dans la fumée, ploya sous l’éclair rugissant,
et ses lèvres noires furent couvertes de sang.
Mais coiffé d’une chéchia tropicale,
d’une chéchia tropicale,
il marchait avec les libérateurs de l’Europe, il marchait d’un pas égal,
et on lui expliquait tout le temps comme il faut, tout le temps,
que pour la civilisation,
l’on combat et l’on meurt.
Et quand soudain cessa le carnage, quand le silence tomba sur les combattants,
il comprit que la civilisation était sauvée.
Mu xuus ca saxaar sa, sëgg ndax dooley melax may riir,
dereet ji di siit ca tuñam yu ñuul ya.
Terewul, ak mbaxana koppateem,
mbaxana koppateem,
muy dox ànd ak ñay yewwi Europe, di dox, yem ak ñépp,
fu mu fa tollu, ñu di ko tegtal, ca na mu ware, dëkk ca
naan ko, lay tax ñu naan nite,
xeexal ko, dee ca.
Jékki, reyante ba dakk, tekk ga law ca ña doon xeex,
mu xam ne, lay tax ñu naan nite mucc na.
Et il dit en lui-même : « Tu ne te reposes pas souvent,
repose-toi un peu… » Et c’était une nuit
au Levant.
Mu ne ci xelam « Doo faral di noppalu,
noppalul tuuti… » Ag guddi la woon
ca Levant.
Et c’était une nuit de dagues et de couteaux,
une nuit de concessions, une nuit de pétrole,
une nuit d’experts et de capitaux.
Une nuit anglo-arabo-française au Liban.
Oui,
une des nuits du Moyen-Orient.
Guddig xeej ak i paaka la woon,
guddig moomeelu suuf, guddig pétrole,
guddig boroomi xam-xam ak alal.
Guddi gu àngale-araab-tubaab séq ca Liban.
Waaw,
genn ci guddiy Moyen-Orient.
… Quand sur son dos ils le traînèrent à l’hôpital,
il interrogeait encore, en vain, la nuit orientale :
Qu’était-il arrivé ? Dans sa tête en sang tournoyaient cette nuit
les fusillades, les émeutes et les grandes vagues de chez lui.
Le Sénégal et la France ! Le Sénégal et les Anglais !
Un Sénégal d’enfants et d’anciens, tous Sénégalais !
Sénégal d'hier et de toujours, Sénégal de tous les futurs,
Le Sénégal des Alliés victorieux !
…Ba ñu ko jaaxaanalee di ko diri jëmale ko loppitaan,
guddig penku ga tontuwul lenn ca laajam ya mu dëkke :
Lan moo xewoon ? Ca guddi googu, ca biir boppam bay nàcc, mu nga cay daw
fetalante ya, xeexu mbedd ya ak gannaxi dëkkam yu mag ya.
Te àdduna xeex na, te àdduna am na ndam, te àdduna mucc na
ngir sa njëriñ, Sénégal ! Ngir yow, Sénégal ! »
Ainsi délira-t-il, jusqu’à sa mort, dans l’éther des médications.
Et la question du Levant
fut portée devant l’assemblée des nations.
Et l’on commença à en disputer
et ceux qui représentaient le Sénégal
étaient tous
Blancs.
Noonu, mu wéy di waxtu ba dee, ci éther ja ànd ak garab ya.
Te li jëm ci Levant
ca pécum xeeti àdduna la mujj.
Ñu tàmbali koo waxtaane
te ña fa toogaloon Sénégal
ñépp
di ñu weex.
Le souffle de ce poème, publié en juin 1945 à Tel Aviv dans le quotidien Davar, anticipe de quelques années les textes de Senghor et de Birago Diop sur les tirailleurs. Sa perspective reste unique.
Senghor, on s'en souvient, s'adressait dans son "Poème liminaire" (Hosties noires, 1948), à ses "frères d'armes" de manière générique, "frères noirs à la main chaude sous la glace et la mort". Il défendait leur honneur en "déchirant" symboliquement, et toujours collectivement, "les rires banania sur tous les murs de France". Le poème d'Alterman reconstitue plutôt un destin singulier, individuel, les grandes étapes d'une unique vie volée.
Le "Sarzan" de Birago Diop (Contes d'Amadou Koumba, 1947), sergent Keita devenu Sarzan-le-fou, était comme le soldat anonyme d'Alterman un personnage singulier, mais Birago se gardait à dessein de décrire ses années de guerre. L'avant et l'après suffisaient à montrer une transformation radicale. L'enfant de Dougouba était parti à Kati, "de Kati à Dakar, de Dakar à Casablanca, de Casablanca à Fréjus, puis Damas". Il était revenu aliéné, au sens propre: étranger à lui-même, à son village et à ses traditions, se vouant désormais à "tuer les croyances [...] extirper les superstitions [...] les manières de sauvages". Ses années de tirailleur, qui l'avaient à ce point changé, restaient l'énigme centrale du conte.
Alterman suit son "Soldat sénégalais" pas à pas, de l'enfance à la mort – une enfance qu'on devine insouciante, évoquée à grands traits naïfs de manière à contraster avec l'intensité croissante des épreuves ultérieures: travail forcé, évasion, arrestation, mobilisation forcée, en Europe d'abord puis au Levant, où la mort le surprend, littéralement, en plein délire. Jusqu'à son dernier souffle, le soldat demande à son père de se réjouir, persuadé d'avoir "sauvé la civilisation" et de l'avoir fait "pour ton bien, Sénégal!" Ici se rejoignent les trois auteurs. Alterman, Birago et Senghor, depuis des perspectives différentes et complémentaires, disent ensemble l'hypocrisie absolue d'une colonisation soi-disant civilisatrice qui dispose des tirailleurs, de leur humanité et de leurs vies, au gré de ses seuls intérêts.
Encore Senghor et Birago avaient-ils eux-mêmes servi, colonisation oblige, sous le drapeau français. Mais Alterman? Que vient faire un soldat sénégalais sous sa plume?
Nathan Alterman (1910-1970) était l'une des grandes voix de la poésie moderne hébraïque. Sa chronique hebdomadaire dans Davar était si populaire que chaque vendredi à l'aube, les lecteurs les plus impatients se pressaient à la porte de l'imprimerie pour être sûrs d'obtenir une copie du journal. Ses poèmes, en page deux, trouvaient un écho considérable dans l'arène culturelle et politique locale, tant pendant la période du Mandat britannique en Palestine qu'après l'établissement officiel de l'État d'Israël en 1948. Cette année-là, Davar eut l'idée de publier en volume, et d'offrir à tout nouvel abonné, l'intégrale des poèmes écrits par Alterman depuis 1943. Les abonnements doublèrent aussitôt – et Alterman continua sa chronique jusqu'en 1967.
Sa renommée, Alterman la doit à parts égales à ses qualités proprement littéraires et à l'acuité de ses commentaires sur l'actualité. L'hébreu est une langue particulièrement dense, qui dit beaucoup de choses en peu de mots et peut aussi dire plusieurs choses au moyen d'un même mot ou d'infimes variations. La poésie d'Alterman mobilise des tournures anciennes, des images et des formes tirées de l'hébreu bibliques, et les réassemble selon une prosodie créative qui joue sur les rythmes de la langue, les assonances et les formes de versification. Par-delà sa sobriété, sa dureté apparente, son style reconnaissable entre tous autorise autant le lyrisme que la satire. Poète organique, dirait Gramsci, Alterman tient pour Davar la chronique d'une histoire chaude, brûlante, l'histoire en train de se faire. Ses textes portent sur la guerre, la Shoah et les pogroms en Europe, les réfugiés juifs que l'administration coloniale britannique considère "illégaux" et refoule de Palestine mandataire, les tensions judéo-arabes, le mouvement des kibboutz et les luttes ouvrières, la création d'Israël... Plusieurs de ses poèmes, censurés par les autorités britanniques, sont devenus des chants immensément populaires.
L'empathie d'Alterman pour le "soldat sénégalais" exprime une solidarité de fait – la fraternité des subalternes, manipulés comme des pions sur l'échiquier des puissants. Aux lendemains de la Première Guerre mondiale, la Société des Nations avait donné mandat à la Grande-Bretagne d'administrer les "provinces arabes" de l'ex-empire ottoman, vaincu et dépecé. La Grande-Bretagne exerçait une "tutelle provisoire" sur la Mésopotamie (correspondant à peu près à l'Irak actuel) et la Palestine; la France sur la Syrie et le Liban (ensemble désignés comme "le Levant"). Toute l'ambiguïté du système mandataire, qui signifiait en réalité une domination de type colonial, résidait dans le caractère "provisoire", indéfini, de la tutelle.
La Deuxième Guerre mondiale faisait bouger les lignes. Conséquence de la défaite française en 1940, le commandement militaire des forces alliées au Moyen-Orient avait échu à la Grande-Bretagne pour la durée de la guerre. Le commandement britannique déclencha l'Opération Exporter l'année suivante, lui permettant de déloger les forces vichystes de Syrie – forces qui étaient alors principalement constituées de troupes coloniales, parmi lesquelles trois bataillons du 17e régiment de tirailleurs sénégalais. Le gouvernement de Vichy avait entre-temps choisi de quitter la Société des Nations, ce qui, du point de vue des nationalistes syriens, soutenus par l'Allemagne, valait cessation immédiate du mandat et reconnaissance implicite de l'indépendance syrienne. Ajoutons-y, en Palestine sous tutelle britannique, les appels au soulèvement lancés par le grand mufti de Jérusalem, Amin al-Husseini, allié de l'Allemagne nazie contre le colonisateur anglais, et l'on comprendra que le temps des mandats, non seulement touchait à sa fin, mais que celle-ci serait tout sauf simple.
Dopés par la libération de Paris (août 1944), les Français entendaient imposer à la Syrie naissante des accords garantissant leurs intérêts au Levant. La France souhaitait mettre en place une convention qui rendrait obligatoire l'enseignement du français dans les écoles publiques, s'opposait à l'armement de la gendarmerie syrienne en armes lourdes, et voulait aussi maintenir en territoire syrien des "troupes spéciales" sous commandement français. Les nationalistes syriens ne voulaient rien concéder. Les Britanniques, qui avaient quelques années plus tôt chassé les forces vichystes et conservaient pour quelques mois encore le commandement militaire sur toute la région, trouvaient aussi les exigences françaises passablement exagérées. Il n'en fallait pas plus pour que De Gaulle, toujours prompt à soupçonner des "intrigues anglaises", réelles ou imaginaires, et à attiser les rivalités, décide de passer en force. On connaît la suite. Trois jours de violence extrême, Damas à feu et à sang, et une débâcle française. La France n'obtint rien. Ses troupes furent renvoyées de Syrie. Humiliation suprême, elles furent cantonnées avant leur évacuation dans des garnisons syriennes, avec interdiction d'en sortir, sous contrôle de militaires anglais.
Que reste-t-il des tirailleurs au Levant? A El-Mina, la ville portuaire de Beyrouth, une petite communauté de Libanais métis, descendants des tirailleurs sénégalais. Quelques travaux universitaires confidentiels, un grand vide dans les manuels d'histoire. Un poème en hébreu.
Combien d'histoires oubliées? L'une d'elles, peu connue, a été rapportée par Moshe Dayan, le visage israélien le plus connu de la Guerre des Six jours (1967). Dayan, dont l'œil recouvert d'un bandeau noir deviendrait le signe distinctif, avait encore ses deux yeux en 1941. Il avait cette année-là rejoint une unité locale combattant aux côtés des Britanniques, avec mission de s'emparer des ponts stratégiques autour du village d'Iskenderun (aujourd'hui en Turquie) dans le cadre de l'invasion britannique du Levant contre les forces vichystes. Son unité atteignait la zone qu'elle était censée occuper quand retentirent des coups de feu. Les tirs venaient d'un officier français et d'un tirailleur sénégalais. "J'ai pointé sur eux la mitrailleuse que j'avais en ma possession et j'ai regardé avec des jumelles pour déterminer leur emplacement exact. C'est à ce moment qu'une de leurs balles m'a touché aux yeux", témoignerait Dayan sur son lit d'hôpital. Que son bandeau sur l'œil soit dû à un Français ou à un Sénégalais, cela relève de l'anecdote. Plus significatif est le fait que deux types de tirailleurs se trouvaient alors face à face. L'un, côté français, était Sénégalais. L'autre, Moshe Dayan, était sujet colonial des Britanniques. Deux colonisés s'affrontant dans une guerre qui n'était pas la leur.
Nous voulions depuis longtemps présenter ce poème à des lecteurs sénégalais. L'autorisation des ayants-droit d'Alterman, de son éditeur Hakibbutz Hameuchad et de ses petits-enfants, Nathan Slor et Yael Slor Marzuk, nous est parvenue à l'été. Le coup d'État au Niger donnait alors au vieux poème, 78 ans déjà, une nouvelle actualité: une autre "guerre des autres" couvait. La CEDEAO menaçait de rétablir manu militari le président déchu, la France poussait à la "fermeté", le Sénégal s'interrogeait: faudrait-il, ou non, envoyer là-bas nos Diambars? Puis la poussière est retombée, les putschistes se sont installés, et nous avons pris le temps de peaufiner notre travail de traduction. Nous étions presque prêts quand le 7 octobre nous a surpris. L'assaut du Hamas contre les kibboutz du sud d'Israël. La riposte de Tsahal à Gaza. La guerre des images et des mots, sommant chacun de se positionner, de s'aligner sur des solidarités primaires, de juger ce que les commentateurs les plus péremptoires ne connaissent que de loin, et si peu, et si mal. Comment parler de poésie quand déferle la haine, quand chacun ampute de moitié sa capacité d'empathie, quand notre humanité commune se fait hémiplégique? Nous voulions éviter que la publication d'un poème israélien ne soit prétexte à un regain d'invectives, de commentaires malveillants et d'inutiles passions.
Devions-nous différer indéfiniment sa publication? Y renoncer? Nous avons finalement fait le pari que non. La parole poétique pourrait bien être celle qui manque tant à notre époque, et à chacun, pour rétablir du doute et de la nuance dans des certitudes trop rigides.
QUAND LA MACHINE ÉLECTORALE GRINCE
RAPPORT SENEPLUS D’ANALYSE PRÉ-ÉLECTORALE - Suspicions de politisation de l'administration, immixtion marquée de la justice dans la sphère partisane, entraves persistantes à certaines candidatures : de multiples facteurs exacerbent les antagonismes
(EXCLUSIF SENEPLUS) - Le présent rapport d’analyse est le deuxième à être élaboré et le premier de cette année 2024, dans la perspective de l’élection présidentielle de février prochain qui a lieu au Sénégal, le premier rapport ayant été rédigé il y a près d’un mois (fin novembre 2023).
Depuis l’élaboration de ce premier document, certaines données contextuelles demeurent : la question de l’indépendance des acteurs du processus électoral (Direction générale des élections, CENA etc.), ainsi que celle de l’interprétation des dispositions du code électoral relatives à l’éligibilité par exemple. D’autres données sont apparues depuis la production du rapport précédent : au moins deux décisions de justice rendues par le Tribunal d’instance de Dakar et par la Cour suprême, l’entrée dans le jeu préélectoral de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui est l’organisme qui reçoit la caution (de 30 millions) déposée par les candidats, ainsi que l’investiture de certaines personnes comme candidats officiels de formatons ou de coalitions.
A près d’un mois et demi du scrutin, il s’agit d’évaluer la conjoncture socio-politique sénégalaise, en essayant d’y repérer les facteurs qui concourent à l’apaisement d’une situation préélectorale préoccupante et les facteurs qui, au contraire, contribuent à accroître la tension entre les acteurs.
Au-delà de cette analyse de la conjoncture actuelle, le lien sera établi, chaque fois que nécessaire, avec des éléments qui ont été soulignés dans le rapport précédent. Cette approche inscrite dans une forme de continuité est nécessaire, non seulement parce que des faits précédemment évoqués subsistent encore, mais parce qu’il a été souligné qu’il existe des racines institutionnelles ou des causes structurelles aux dysfonctionnements que le pays vit à l’heure actuelle.
Evaluation de la conjoncture socio-politique
Cette évaluation consiste, ainsi qu’il a été dit, en une identification d’éléments de détente et d’éléments de tension dans le contexte actuel.
Eléments de détente
On peut en trouver dans la libération récente d’une vingtaine de prisonniers, dont au moins trois sont des membres du parti « Pastef », dissous il y a quelques mois. Ces personnes étaient emprisonnées depuis près de dix mois, dans le cadre d’une vaste opération d’arrestations de dirigeants de ce parti politique.
Les décisions de relaxe ont été rendues par le tribunal correctionnel de Dakar, le 22 novembre et le 13 décembre 2023.
Il s’agit incontestablement d’un facteur de décrispation, des voix ayant régulièrement appelé à « libérer les prisonniers d’opinion » au Sénégal.
Deux circonstances doivent cependant amener à tempérer l’effet apaisant de ces verdicts judiciaires. D’une part, les personnes relaxées ne bénéficieront d’aucun mécanisme de réparation du préjudice qu’elles ont subi, alors même que l’activité professionnelle de certains d’entre eux a ainsi été arrêtée et, surtout, il reste encore beaucoup de personnes embastillées pour les mêmes raisons. Une amélioration notable de la situation ne découlera que de la libération d’un nombre important de prisonniers, et non d’un élargissement au compte-gouttes de ces personnes dont certaines ignorent toujours les véritables charges qui pèsent sur elles.
Eléments de tension
Il existe à l’heure actuelle, au moins trois données qui sont de nature à aggraver la tension préélectorale au Sénégal. Il s’agit :
de l’incapacité à sortir de l’impasse en dépit des décisions de justice rendues ;
du sentiment d’une implication systématique de l’Administration dans le jeu politique et électoral ;
des interactions nocives entre l’agenda judiciaire et l’agenda politico-électoral.
Chacun de ces points doit être expliqué.
L’incapacité à sortir de l’impasse malgré les décisions de justice intervenues
La décision rendue par le Tribunal d’instance de Dakar, le 14 décembre dernier a, après le jugement du Tribunal de Ziguinchor du 12 octobre, décidé d’annuler la radiation de M. Ousmane Sonko, principal opposant, et d’ordonner sa réinscription sur les listes électorales, réinscription qui permet sa candidature à la présidentielle. Le Tribunal de Dakar avait été saisi sur renvoi par la Cour suprême qui, le 17 décembre, avait cassé le jugement du Tribunal de Ziguinchor.
Or, cette nouvelle décision n’a nullement éclairci la question de la participation du principal opposant. Non seulement l’Etat est resté mutique sur son intention d’exercer un recours – qui consisterait en un pourvoi de cassation -, mais, forts du caractère suspensif du jugement dernièrement rendu, les partisans de M. Sonko ont immédiatement cherché à recueillir des « fiches de parrainage » auprès de la Direction générale des élections – rattachée au ministère de l’Intérieur -, ce qui leur a été refusé, pour la deuxième fois.
En somme, et en dépit des décisions de justice intervenues, l’Administration refuse de délivrer des fiches de parrainages à M. Sonko.
A l’heure actuelle, et devant cette impasse presque totale, les yeux se tournent vers le Conseil constitutionnel, qui doit recevoir et apprécier les candidatures. L’espoir des partisans de M. Ousmane Sonko repose, semble-t-il, sur une jurisprudence passée du conseil, dans laquelle celui-ci avait entendu sanctionner l’incurie de l’Administration en ne faisant pas supporter à un candidat les errements commis par celle-ci. Il s’agit de la décision n°E/3/98 du 15 avril 1998.
C’est dans le courant du mois de janvier 2024 que ce verdict attendu devrait intervenir.
Le sentiment d’une implication systématique de l’Administration dans le jeu électoral et partisan
La situation s’est aggravée du fait de deux nouvelles données.
D’une part, la Caisse des dépôts et consignations (CDC), censée recueillir la caution des candidats, a refusé de recevoir celle du candidat Sonko. Cela donne le sentiment qu’en plus de la bataille qu’il doit livrer sur le front judiciaire, l’opposant doit se battre contre une Administration qui fait également obstacle à sa candidature. Le sentiment qu’une Administration jusque-là réputée non partisane soit mêlée à des enjeux d’élections et de pouvoir contribue certainement à « charger » davantage le contentieux préélectoral.
Il faut y ajouter une information qui est loin d’être anecdotique ou seulement symbolique : c’est que les « portes » de la DGE comme celles de la CDC sont « restées fermées ». Autrement dit, les mandataires de M Sonko n’ont même pas été « reçus », aucun dialogue – au sens élémentaire d’échange de mots – n’a eu lieu. Cette fermeture est révélatrice de l’impasse dans laquelle se trouve aujourd’hui le « dialogue politique » au Sénégal.
Il faut mettre en relation cette posture de l’Administration avec les entraves rencontrées par un autre candidat, M. Khalifa Sall, dans une tournée qu’il a récemment effectuée dans le pays. Le 30 novembre, celui-ci mentionnait dans un communiqué des « entraves persistantes rencontrées par son cortège », du fait notamment des forces de la gendarmerie. Le 5 décembre, une déclaration de la même veine était enregistrée.
Ces événements, qui sont inquiétants à quelques jours de l’ouverture officielle de la campagne électorale, posent, à un autre niveau, la question de la neutralité de l’Administration sénégalaise dans un contexte préélectoral.
Le soupçon d’une instrumentalisation de la justice à travers les interactions entre l’agenda judiciaire et l’agenda politico- électoral :
Deux décisions judiciaires viennent alourdir le climat actuel.
L’une est la décision, rendue par la Cour suprême le 22 décembre dernier, qui rejette le pourvoi formé par l’actuel maire de Dakar dans une affaire pour laquelle il a été condamné à deux ans de prison dont six mois de prison ferme et une condamnation à payer 25 millions à la famille d’un jeune homme décédé dans les violences préélectorales de 2011. Cette sentence pourrait entraîner la déchéance du mandat de député que le maire de Dakar, Barthélémy Dias, détient actuellement.
Une telle déchéance ne devrait en principe intervenir que suite à une demande faite par le Garde des Sceaux ; or, on sait que l’actuelle détentrice du poste, avocate de profession et femme politique ayant rallié le parti au pouvoir, était également le conseil de M. Dias il y a quelques années, dans la même affaire…
Il s’agit là, certes, de hasards de l’histoire, mais il est clair qu’ils ne contribuent pas, dans le contexte actuel, à dissiper les liaisons dangereuses qui existent entre la justice et la politique au Sénégal.
La seconde décision, dont il est question ici, n’est pas encore rendue, au moment où ces lignes sont écrites.
Elle aura également pour cadre la Cour suprême, le 4 janvier 2024, et opposera M. Ousmane Sonko au ministre du tourisme Mame Mbaye Niang. En première instance et à la suite d’une plainte en diffamation, l’opposant avait été condamné à une peine deux mois de prison avec sursis et à verser 200 millions de F CFA au plaignant. Le verdict de la Cour d’appel avait été plus sévère puisqu’il infligeait la peine de 6 mois de prison avec sursis à M. Sonko. Cet autre feuilleton judiciaire est également mis en relation avec l’éligibilité de l’opposant.
Scenarios/Recommandations
A l’heure actuelle, il s’agit de mettre en exergue l’importance décisive que revêt la décision que le Conseil constitutionnel rendra au sujet des candidatures. Plus précisément, le conseil est attendu sur deux points :
une question générale : le traitement des parrainages reçus. On se souvient que le parrainage, qui est une technique de sélection des candidatures, a été introduite dans le système électoral national par une loi constitutionnelle de 2016 et qu’en 2019, des candidats importants ont vu leur dossier rejeté pour des motifs techniques, liés au traitement informatique des parrainages et d’aucuns avaient alors crié au scandale. Si l’on devait assister à la même sévérité, il est évident que le contentieux s’alourdirait de griefs adressés au juge constitutionnel, en plus des griefs nourris à l’encontre la justice judiciaire et de l’Administration.
Il faut rappeler ici deux choses. D’une part, le Conseil constitutionnel du Sénégal a essuyé dans le passé des critiques sévères, dues à sa jurisprudence en général et au traitement de la candidature du président Wade en 2012. D’autre part, il est du pouvoir de ce juge de « moduler » son pouvoir d’annulation des candidatures, de concevoir son office en termes moins sévères sur la question du parrainage et de construire une jurisprudence « apaisante », plutôt que productrice de tensions. Tout dépend de la compréhension que le juge constitutionnel lui-même a de sa mission dans un contexte donné.
Une question spéciale : celle de la recevabilité de la candidature de M. Sonko ou de quelqu’un qui lui est apparenté politiquement.
A l’aune du tableau qui vient d’être dressé, deux scénarios majeurs nous paraissent concevables : un « pessimiste » et un autre « un peu plus optimiste ». L’absence d’un troisième scénario, qui serait encore plus réjouissant, s’explique par le fait que, de notre point de vue, une telle perspective rassurante s’éloigne au moment où ces lignes sont écrites. Cela signifie qu’à notre sens, l’élection de février 2024 est déjà grevée de sérieuses hypothèques et qu’en tout état de cause, une appréciation positive ou laudative des conditions de préparation de celle-ci est désormais exclue.
Premier scénario : Pessimiste
Il n’y a pas de libération importante de prisonniers, le Conseil constitutionnel rejette beaucoup de candidatures dont celle de M Sonko ou de quelqu’un d’apparenté, aucune mesure de décrispation n’est prise, des candidats continuent de subir des tracasseries diverses : c’est alors la légitimité même du scrutin de février 2024 qui pourrait en pâtir.
Second scénario : Un peu plus optimiste
Le conseil Constitutionnel se montre assez « libéral » dans son traitement des dossiers de candidature, la justice judiciaire n’a pas rendu, d’ici-là, de décisions se traduisant par l’élimination de candidats, la candidature de M. Sonko ou quelqu’un de proche est admise : sans que tous les problèmes soient aplanis (il resterait notamment des personnes en prison, dont éventuellement M Sonko), on pourrait aller vers un scrutin relativement apaisé en février 2024.
En tout état de cause, des initiatives pourraient être prises par les organisations de la société civile, pour contribuer à la sérénité de l’élection. Ce sont les recommandations suivantes :
Elaboration, pas nécessairement formelle, d’une « éthique » de la campagne électorale à laquelle seraient conviés tous les candidats, qui seraient alors invités à des rencontres pour exprimer leur adhésion à cette éthique ;
Encourager les candidats à non seulement éviter des déclarations de nature à préjuger des résultats (« victoire dès le premier tour » par exemple) mais à accepter le verdict des urnes si l’élection se passait bien dans l’ensemble ;
Dépasser la conjoncture actuelle et travailler ultérieurement, selon des modalités à déterminer, sur les limites structurelles de la démocratie sénégalaise et du processus électoral dans son ensemble. Il faut cependant être clair sur ce point : la démarche suggérée sera plus ambitieuse qu’une simple revue technique ou un audit du fichier, initiatives déjà prises de nombreuses fois dans le passé. Il s’agirait d’aller plus loin : éloigner le spectre de la politisation de l’Administration et assortir tout manquement de sanctions.
Ci-dessous, le rapport de décembre précédemment publié en trois volets :