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1 décembre 2024
Opinions
PAR Jean-Baptiste Placca
L'OUA A SOIXANTE ANS, ET MAINTENANT ?
La solidarité apparaissait comme une des valeurs essentielles qui ont présidé à la création de l’OUA. Elle n’a cessé de décliner au fil des décennies. L’on peine à désigner des leaders pouvant, aujourd’hui, incarner la conscience morale de notre Afrique
En pleine commémoration du soixantième anniversaire de la création de l’OUA, une petite enquête, diffusée dans Afrique Économie, cette semaine, sur RFI, vous semble révélatrice des carences de l’union continentale. L’enquête porte sur la guerre entre armée et paramilitaires au Soudan. Avec des conséquences économiques dévastatrices, jusque dans le nord de la Centrafrique. En quoi cette enquête, menée par Clémentine Pawlotsky, illustre-t-elle les lacunes de l’Union africaine ?
Dans notre exercice, la semaine dernière, la solidarité apparaissait comme une des valeurs essentielles qui ont présidé à la création de l’OUA. Elle n’a cessé de décliner au fil des décennies, hélas ! L’enquête d’Afrique Économie illustre le dédain que peuvent avoir certains dirigeants africains pour les autres nations : tout le contraire de la solidarité et de l’union. Ils ne s’interrogent même pas sur les conséquences, dans les pays voisins, des désordres qu’ils créent chez eux. Les interlocuteurs de Clémentine Pawlotsky ont dressé la liste d’un certain nombre de produits de première nécessité, avec les prix, tels qu’ils étaient avant la crise, et tels qu’ils sont, depuis le début de cette guerre fratricide. Tous les prix ont, au minimum, doublé. L’État centrafricain n’ayant pas les moyens de subventionner ces produits vitaux, c’est donc à une mort économique certaine qu'Al-Buhran et « Hemedti » condamnent, fatalement, les populations de la préfecture de la Vakaga, en Centrafrique. Irresponsabilité !
Faut-il comprendre que ces dirigeants n’ont pas conscience des conséquences de leurs comportements ?
C’est, en tout cas, du mépris pour les autres. Ils mettent leur pays à feu et à sang, et tant pis pour les conséquences que cela peut avoir au-delà de leurs frontières. Ces généraux ne se soucient nullement des drames considérables qu’ils causent à des populations de pays qu’ils disent pourtant frères. Cette enquête est plus éloquente que tous les bilans que l’on pourrait dresser de ces six décennies d’existence de cette Organisation qui devait pousser les peuples à s’unir, pour se renforcer mutuellement. Or, jamais les acteurs politiques et militaires n’ont autant contribué à affaiblir leurs propres peuples, leurs voisins, donc, l’Afrique, avec une déconcertante propension à exporter tous azimuts la paupérisation et l’insécurité qu’ils engendrent chez eux.
DROIT À LA DÉSOBÉÏSSANCE CIVILE ET À LA RÉSISTANCE NON VIOLENTE
EXCLUSIF SENEPLUS - À travers le leader de Pastef, c’est la trajectoire historique que le Sénégal prendra pour les prochaines décennies qui se détermine. Personne ne pourra dire qu’il ne savait pas
L’histoire retiendra que le procès pour viol intenté contre Ousmane Sonko a été un procès politique perpétré par l’État du Sénégal contre un adversaire politique. Démonstration a en été clairement faite au cours de l’audience spéciale devant la Chambre criminelle de Dakar ce 23 mai 2023.
Il est apparu clairement que la Justice a été instrumentalisée pour « liquider » le président de Pastef, à tout le moins à l’empêcher d’être candidat à la présidentielle de 2024.
C’est pourquoi on a fait de cette audience spéciale un déballage pornographique : l’objectif étant non pas de faire jaillir la vérité mais de porter atteinte à l’honorabilité d’Ousmane Sonko, de le salir aux yeux des Sénégalais !
Voici un procès au cours duquel aucune preuve matérielle attestant du viol n’a été versée au dossier, les vidéos et audios annoncés depuis longtemps par l’accusatrice n’ayant jamais été produits. Tous les témoins appelés à la barre, à une seule exception près, ont déchargé Ousmane Sonko.
Voici un procès dont le ministère public même, face à l’absence de preuves matérielles a dû exprimer son « doute ». Et d’escamoter subrepticement l’accusation de « viol » pour lui substituer celui de « corruption de la jeunesse », notion vague et inique comme on le sait depuis au moins Socrate.
« M. le président, si toutefois vous ne pouvez pas qualifier des faits de viol, je vous prie de bien vouloir qualifier des faits de corruption de la jeunesse (détournement de la victime âgée de 19 ans au moment des faits par l’accusé) ». Et le Procureur de requérir dix ans de réclusion pour « viols » et cinq ans pour corruption de la jeunesse !
Le tour serait ainsi joué : Sonko out, la voie dégagée, « l’opposition réduite à sa plus simple expression », la victoire de monsieur Macky Sall pour un troisième mandat serait assurée. Le président grand seigneur, pourrait même se payer le luxe de se désister finalement, la pérennité du « système » étant assurée pour longtemps encore.
Le Sénégal face à son destin
En préparation du jugement attendu ce 1er juin, Ousmane Sonko exerçant son droit à la désobéissance civile et à la résistance non violente, veut en appeler au peuple sénégalais : c’est tout le sens de la Caravane de la liberté qu’il a lancé depuis deux jours à partir de Ziguinchor pour rallier Dakar par la route.
Or voici qu’à l’étape de Kolda déjà, les « forces de défense et de sécurité » se mettent en travers de sa route, jetant de grenades et tirant sur la foule, faisant encore un mort.
Il s’agit pour le camp du président Macky Sall de perturber et d’arrêter par tous les moyens cette Caravane. Il s’agit aussi d’intimider les Sénégalais. Les ministres Me Sidiki Kaba et Abdou Karim Fofana ont justifié d’avance ce dessein lors de leur conférence de presse de ce jeudi, en invoquant des cocktails molotov imaginaires et en assimilant gratuitement la Caravane de la liberté à …des « troubles à l’ordre public ».
Pourtant une telle marche pacifique, de désobéissance civile, de mobilisation du peuple contre l’injustice et pour le respect des droits humains n’est pas inédite. Elle a été initiée par les apôtres de la lutte pour les droits de l’homme et pour les droits civiques par la non-violence que sont le Mahatma Gandhi et le Révérend Martin Luther King.
On pense ici à la Marche du Sel que le Mahatma Gandhi entama le 12 mars 1930 pour dénoncer le monopole que le colonisateur britannique exerçait sur le sel et protester ainsi contre l’occupation de son pays. Gandhi sera arrêté au bout de 300 kilomètres et emprisonné. Mais le processus qui conduira à l’indépendance de l’Inde en 1947 était dès lors lancé.
On pense aussi aux marches pour les droits civiques des Noris américains initiées par le Révérend Martin Luther King, notamment à celle sur Washington le 28 août 1963 et celle de Montgomery à Selma de février 1965.
C’est l’inspiration de ces marches qui anime encore la lutte contre le racisme systémique des Africains Américains, notamment le mouvement du Black Lives Mater.
Et maintenant ?
Le Sénégal est à la croisée des chemins.
Comme en 1963, quand Mamadou Dia a été finalement liquidé par Senghor et le Sénégal maintenu dans son ancrage de néocolonie française.
À travers Ousmane Sonko, c’est la trajectoire historique que le Sénégal prendra pour les prochaines décennies qui se détermine.
Il s’agit pour nous, faut-il le répéter, d’instaurer une démocratie réelle en lieu et place de cette démocratie illibérale et corrompue, de fonder une République véritablement indépendante et souveraine basée sur la séparation effective des pouvoirs et garantissant le respect des droits et libertés des individus.
Il s’agit de créer un État capable d’amorcer un véritable développement économique, social et culturel et d’améliorer enfin la vie des Sénégalais.
Il s’agit aussi de fonder un État capable de contribuer à un véritable rassemblement africain au niveau de tout le continent et de sa diaspora.
Les jeux sont faits.
Personne ne pourra dire qu’il ne savait pas ou qu’il n’avait pas compris ce qui se jouait. À chacun d’entre nous de se déterminer.
PS : J’entends bien les états d’âme de mes amis « droits de l’hommistes », démocrates et féministes sincères sur les propos injurieux d’Ousmane Sonko à l’endroit de son accusatrice. Mais comme le dit un autre de mes amis « comment reprocher à un homme qui a la tête sur le billot de hurler ? »
J’ajouterai qu’il ne s’agit pas pour nous d’élire à la tête du Sénégal un Saint homme, quelqu’un « Bou Sell » comme certains zélotes parmi nous le revendiquent, il est vrai.
Il s’agit seulement d’élire un homme capable de mettre en œuvre pendant son mandat le programme de révolution démocratique, souverainiste et panafricaniste que nous voulons.
Comme on le sait, le président Donald Trump a fait face pendant toute sa campagne électorale à des accusations d’infidélités conjugales, de viols et autres délits sexuels. L’État américain ne s’est pas saisi de ses accusations pour empêcher sa candidature.
Les Américains ont par la suite estimé dans leur majorité que M. Trump était digne d’être président des États-Unis. Et il me semble qu’il a exercé sa fonction à la satisfaction des Américains qui l’ont élu.
Les exemples sont nombreux à travers le monde, d’hommes politiques, de John Fitzgerald Kennedy et Bill Clinton aux États-Unis à Anwar Ibrahim en Malaisie, à François Mitterrand en France, accusés de délits sexuels, qui ont été par la suite élus démocratiquement et qui ont rempli honorablement leurs fonctions.
PAR Ciré Clédor Ly
LA DÉCADENCE DE L'ÉTAT
Le procès du 23 Mai a fini de convaincre les plus réservés, sur l’implication et la participation consciente de certains acteurs de la société au complot d’État ourdi contre le leader de Pastef
Le procès du 23 Mai a fini de convaincre les plus réservés, sur l’implication et la participation consciente de certains acteurs de la société au complot d’État ourdi contre le leader de Pastef, pour éliminer durablement ce dernier, non seulement de toute fonction élective, mais également de toute fonction publique avec une mort civile civique et politique.
Il a aussi permis de se convaincre de la décadence de l’Etat qui ne se fixe aucune limite pour atteindre ses objectifs, avec des détentions abusives et arbitraires de tous ceux qui sont soupçonnés être contre le 3ème mandat, des atteintes aux droits de la presse libre et indépendante, les atteintes à la liberté de circulation, les atteintes à la liberté d’opinion et de critiques des institutions, les atteintes graves au droit de participer aux affaires publiques de son pays et de compétition aux élections, les atteintes à la vie privée et à l’intimité des personnes avec l’usage des réseaux sociaux dont les administrateurs peuvent être identifiés, les menaces et usage de violences avec l’utilisation d’une force disproportionnée contre la population civile sous le couvert de la protection de l’ordre public, le jugement d’une accusée sans l’assistance d’un Avocat (de l’ouverture du procès à la mise en délibéré) pour jugement être rendu au 1er juin 2023, sacrilège suprême ……
Le réquisitoire du Procureur de la République s’abaisse comme une demande d’abandon des charges contre le principal opposant du Régime politique en place, décidé de l’écarter de la compétition pour l’accession à la magistrature suprême.
Il y a lieu de rappeler des principes basiques du droit criminel :
1- L’acte d’accusation qui est l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction, fixe définitivement et irrévocablement les limites de la saisine de la juridiction de jugement, et l’accusé Monsieur Ousmane Sonko n’a jamais été entendu au cours de l’information sur des faits relatifs à la corruption de mineurs, de même que du point de vue de la procédure et de la technique juridique, le juge d’instruction n’avait pas provoqué une demande de supplétif et le parquet non plus n’avait pas pris un réquisitoire supplétif pour étendre les poursuites à la corruption de mineurs de moins de 21 ans.
2- Seuls le présumé viol et les menaces de mort ont fait l‘objet de mise en accusation.
Les juges ne peuvent donc suivre le Procureur de la République dans ses errements et devraient dans la logique de leur serment acquitter les accusés et bouter la politique hors du prétoire.
3- Les présumées menaces de mort ne peuvent être poursuivies distinctement du crime de viol qui l’absorbe en tant qu’élément constitutif de l’infraction.
4- Le cumul réel d’infractions est juridiquement impossible en l’espèce. Le juge d’Instruction et le Parquet ont péché par manque de sérénité et de discernement.
5- La disqualification du crime de viol en délit de corruption de mineurs relève d’un sport intellectuel auquel ne peut se livrer aucun juge surtout aux vues des éléments développés supra.
6- En Droit criminel, chaque infraction protège une valeur sociale et la disqualification comme la requalification ne se conçoivent que sur la même échelle de la valeur sociale protégée.
Les juges du 23 Mai se trouvent dans l’impossibilité juridique de disqualification.
7- Ma conviction est qu’il existe quelque part dans chaque Nation, des juges qui préservent leur âme de toutes les tentations et qui soient capables et prêts à assumer leur idéal de justice et de dire NON lorsque cela s’impose.
8- Le jugement qui sera rendu le 1er juin engagera un pays et pourrait influencer le comportement de plusieurs autres nations.
9- Les juges de Ndèye Khady Ndiaye, de Ousmane Sonko et de Adji Sarr sont déjà entrés dans l’histoire. Ce que l’histoire retiendra d’eux est différé au 1er juin 2023.
Ciré Clédor Ly est membre du pool des avocats d'ousmane Sonko.
PAR Gilles Yabi
TOUS LES MOYENS NE SONT PAS BONS POUR CONSERVER LE POUVOIR OU POUR LE CONQUÉRIR
Le Sénégal s’évertue à suivre l’exemple de la Guinée et de quelques autres pays africains avec des cycles récurrents de tensions, de manifestations, de répression, d’arrestations, de déploiement massif de forces de sécurité
Le 18 mars dernier, vous alertiez sur cette antenne sur la « tentation du chaos » au Sénégal. Se rapproche-t-on du chaos aujourd’hui, Gilles Yabi, alors qu’Ousmane Sonko a appelé à une mobilisation populaire pour l’accompagner à Dakar, à quelques jours du jour du verdict du procès qui s’est déroulé en son absence le 23 mai ?
Heureusement, le scénario du pire n’est jamais sûr. Mais le seul fait que le scénario du chaos fasse partie des scénarios possibles est déjà très inquiétant. Parmi les différents scénarios, celui du pire me semble même plus probable que celui qui verrait la tension politique et sociale chuter à quelques mois de l’élection présidentielle de février 2024.
Je ne commenterai pas le procès pour viols de l’homme politique Ousmane Sonko dont on attend le verdict le 1er juin, ni les prolongements par des déclarations d’une indélicatesse affligeante. Le coût économique et social pour le Sénégal, en plus des vies de jeunes perdues depuis mars 2021, est déjà considérable. Des amis de certains pays voisins du Sénégal, comme des Guinéens avec lesquels j’échangeais ces derniers jours, ne comprennent pas que le Sénégal s’évertue à suivre l’exemple de la Guinée et de quelques autres pays africains avec des cycles récurrents de tensions, de manifestations, de répression, d’arrestations, de déploiement massif de forces de sécurité.
Version remaniée et actualisée de sa thèse soutenue à l’université Paris VII, l’ ouvrage de Céline Labrune Badiane, s’est attachée à identifier les dynamiques politiques, économiques et sociales
Une histoire de l’institution scolaire en Casamance 1860-1960
On retrouve dans cet ouvrage tous les enjeux de la scolarisation dans les pays sous domination coloniale, avec la volonté de former des cadres supplétifs, susceptibles de répondre aux besoins de la puissance impériale. C’est ainsi qu’au Sénégal, la première charte de l’enseignement pilotée en 1903 par le lieutenant-gouverneur, Camille Guy, était « essentiellement pratique et professionnel », avec un contenu tenant compte essentiellement des potentialités du milieu.
Faisant « office de colonie d’avant-garde dans le processus de scolarisation », le Sénégal a bénéficié d’un ensemble d’infrastructures post primaires, à travers notamment l’implantation de l’Ecole Normale d’Instituteurs et d’autres structures professionnelles. Les quatre communes qu’étaient Gorée, Rufisque , StLouis, Dakar, ont grandement profité de l’ offre scolaire coloniale du fait de leur statut particulier. L’auteure établit ainsi, qu’à partir de 1895, dans le cadre de la communauté de l’Afrique occidentale française (Aof) , s’était fait sentir en plus d’un maillage administratif, un besoin de formation d’agents locaux subalternes.
Pour ce qui est de la Casamance, objet d’étude de cet ouvrage, seuls les centres administratifs ont été dotés d’écoles dont les premières ont été ouvertes à Sédhiou, Carabane et Ziguinchor. Ces implantations ont correspondu à des « localités où la France disposait de garnisons, d’une administration et de maisons de commerce ». Dans cette mission d’éducation, il est à relever le rôle primordial dévolu à l’Eglise, avec des missionnaires beaucoup plus soucieux de propager la religion catholique. Toutefois ce rôle important dans la construction et le développement de l’œuvre scolaire en Casamance, sera quelque peu freiné par le combat anticlérical remporté en 1903 en métropole par les Républicains. Vu que le processus de scolarisation était principalement assuré par les congrégations religieuses, il s’en est suivi un contrôle exclusif par l’administration coloniale de l’instruction publique, du fait de l’inadéquation entre les objectifs, les méthodes des écoles congréganistes et la politique coloniale en matière d’enseignement.
On y retrouve aussi des disparités de genre dans le processus de scolarisation. Alors qu’il était « d’une fille pour 3 garçons scolarisés avant la laïcisation de l’enseignement » l’écart s’était considérablement creusé. Il y avait une mauvaise fréquentation des écoles du fait des tâches domestiques, économiques, liées à la culture des terres. Les absences étaient pour beaucoup en rapport avec le calendrier agricole de même qu’aux structures éducatives parallèles comme l’école coranique.
Ce n’est qu’après la seconde guerre mondiale que les effectifs féminins ont commencé à décoller.
L’école avait aussi un impact économique avec la formation de futurs consommateurs et producteurs. Il ressort comme l’a noté le Pr Ibrahima Thioub, qu’au-delà du rôle de la langue française comme véhicule de la culture coloniale, l’école agit « nécessairement sur l’identité, l’être , le corps et le destin de ceux qui l’ont fréquentée ». Aussi « avec la scolarisation ont émergé de nouvelles formes de sociabilités, de nouvelles habitudes de consommation, de nouvelles pratiques culturelles (théâtre, dancing », de nouvelles modes vestimentaires propres aux « jeunes » scolarisés ». Céline Labrune Badiane souligne par ailleurs plusieurs liens entre l’école et le conflit casamançais avec notamment à partir des années 1970, l’impasse dans laquelle s’engageait l’école en n’offrant plus les débouchés espérés. Il est aussi question des luttes de pouvoirs autour de l’école dont le refus est vécu comme la manifestation d’une défiance vis-à-vis du système colonial ou alors son attractivité comme moyen d’ascension sociale. Et ont défilé des noms qui continuent d’avoir une certaine résonnance dans la région, notamment Arfang Sonko, qui a contribué au développement de l’école dans le Boulouf, contrairement à Benjamin Diatta, chef de la province d’Oussouye, qui n’avait créé aucune école au cours de son règne. Parler de l’école en Casamance, c’est aussi forcément faire un clin d’œil à des exemples de réussite qui ont eu un impact sur la scolarisation en Casamance. Emile Badiane, sorti en 1935, major de sa promotion de l’Ecole Normale William Ponty. Assane Seck, universitaire et homme d’Etat, ancien Pontain. Paul Ignace Coly..
Version remaniée et actualisée de sa thèse soutenue à l’université Paris VII, l’ ouvrage de Céline Labrune Badiane, maîtresse de conférence en histoire contemporaine à l’Université Assane Seck de Ziguinchor, s’est attachée à identifier avec brio les dynamiques politiques, économiques et sociales qui permettent d’appréhender les logiques qui ont prévalu dans les politiques de scolarisation dans les pays sous domination coloniale.
PAR AMADOU TIDIANE WONE
NON, NON ET NON !
POINT DE MIRE SENEPLUS - Pour avoir été de ceux qui, depuis le début, ont exprimé publiquement leur soutien à Sonko je ne saurais me taire face à ce qui me semble une dérive langagière malheureuse
Pour avoir été de ceux qui, depuis le début, ont exprimé publiquement leur soutien et leur sympathie à Ousmane Sonko ainsi qu’à Pastef- Les-Patriotes en tant que projet politique porteur, et nécessaire, dans la vitalité démocratique de notre pays, je ne saurais me taire face à ce qui me semble une dérive langagière malheureuse.
Je suis de ceux qui suivaient, en direct, la déclaration d’Ousmane Sonko depuis Ziguinchor. J’ai arrêté au moment où il a sorti des propos qui ne lui ressemblent pas. Dans la forme comme dans le fond.
J’en suis profondément désolé !
Même si je comprends la pression insoutenable que subissent Ousmane Sonko et ses proches depuis plus de deux ans, je ne suis pas du tout d’accord avec son écart de langage !
Ses ennemis jurés, ainsi que tous ceux qui sont hostiles au changement dans notre pays, pourraient saisir cette occasion inespérée de fédérer leurs énergies pour parachever la diabolisation, à moindre frais, de celui qui pourrait porter, le plus loin possible, l’alternative nécessaire et impérieuse que nous attendons depuis 60 ans !
Alors même que se déroule un procès, dont les minutes circulent, en temps réel, dans tous les réseaux sociaux, il lui était loisible de laisser les citoyens libres de se faire une opinion. Et elle lui était largement favorable !
Trop de communication tue la communication !
Cela dit, et comme je l’ai toujours assumé, le combat (dont nous partageons les idéaux avec Ousmane Sonko et tous les Patriotes) est articulé autour de la défense de valeurs et de principes. Rien ne saurait nous en détourner.
Dire une vérité désagréable à un ami est la moindre des dignités. Sous ce rapport, la direction de Pastef devrait, impérativement, se donner les moyens de ramener le débat au plan purement politique, après la fermeture de cette phase judiciaire. Quel que soit le verdict qui sera rendu.
Cette séquence judiciaire peu honorable devrait servir de terreau au réveil de tous ceux qui sont convaincus que le Sénégal vaut mieux que ce qui nous a été donné à voir et à entendre ces jours-ci.
Sur le fond de l’affaire nous avons, comme chaque citoyen, notre intime conviction. Nous l’exprimerons en temps et lieux. Car, la présomption d’innocence court jusqu’à la prononciation du verdict. Tariq Ramadan ne vient-il pas d’être acquitté faute de preuves ?
Respectons les institutions en toutes circonstances en attendant de les changer !
Jummah Mubaarack !
Par Youssoupha BA
NOUS SOMMES TOUS DES SESAG
La carte nationale de presse constitue aujourd’hui un prétexte commode pour les policiers de la Sûreté urbaine et le procureur de la République pour embastiller des "mal pensants"
Au moment d’écrire ces lignes pour exprimer mon désarroi et la peine qui m’animent, je tiens d’abord à envoyer mon soutien moral et mes prières à celui que je considère comme un ami et frère, à savoir Serigne Saliou Guèye. «Grand», je sais que, là où vous êtes, vous êtes seul physiquement mais pas moralement car il y a des milliers et des milliers de Sénégalais à vos côtés pour vous soutenir. Et ça ce n’est pas le fait du hasard. Ces marques de sympathie, d’estime, d’affection, de respect, de reconnaissance sont le fruit de votre engagement, de votre courage mais surtout de la constance dont vous avez toujours fait montre. C’est aussi le résultat des positions que vous avez toujours défendues n’en déplaise à certains. C’est ça qui vous a valu ce sort qui fait partie des épreuves de la vie.
Connaissant votre foi en Dieu, je ne doute point que vous allez pouvoir surmonter cette épreuve avec dignité. Je suis d’autant plus confiant que heureusement qu’on peut tout vous reprocher sauf d’être mêlé à un détournement de deniers publics, une participation à un complot, un trafic de faux billets de banque ou de drogue, un meurtre, une entreprise d’enrichissement illicite, de blanchiment d’argent, une magouille foncière ou toute autre faute de ce genre. Il paraît que parmi les motifs de votre garde à vue figure l’usurpation de fonction parce que vous ne disposez pas d’une carte nationale de presse. Bon d’accord ! Dans ce cas on attend de voir que tous les journalistes qui n’en disposent pas, au nom d’un traitement équilibré et aussi de l’égalité de tous les citoyens devant la loi, soient poursuivis pour le même délit. C’est sûr que si tel est le cas on risque de délocaliser le siège de la Maison de presse dans des casernes de police ou gendarmerie car tous les commissariats et toutes les brigades de ce pays ne suffiraient pas à contenir tous les usurpateurs présumés qui se réclament du noble métier de journaliste et qui l’exercent d’ailleurs mais sans disposer de la carte nationale de presse. Laquelle constitue aujourd’hui un prétexte commode pour les policiers de la Sûreté urbaine et le procureur de la République pour embastiller des mal pensants.
Sachez aussi que l’encre de votre plume, l’écho de votre voix toujours au service de l’intérêt général et non d’intérêts particuliers sont toujours dans le cœur des Sénégalais. Et nul doute que votre nom va dépasser nos frontières car des journaux étrangers, très intéressés par ce qui se passe dans notre pays depuis un certain temps, vont traiter votre cas qui a déjà frappé d’autres journalistes et télévisions sénégalais. Je prie bien sûr que vous recouvriez la liberté le plus rapidement possible. Mais en attendant que mon souhait se réalise j’imagine le vide que vous allez laisser sur le plateau de « Ndoumbélane » avec vos commentaires très pertinents doublés de clashs avec votre ami Oumar Faye qui, à coup sûr, doit se sentir très mal ainsi que ma sœur Néné Aïcha Ba. Ma pensée va aussi à toutes ces générations de journalistes que vous avez formés et dont certains en ont formés d’autres à leur tour. A tous ces hommes de presse, j’ai envie de leur dire ceci : « vous, vous êtes journalistes par la détention d’une simple carte de presse mais votre formateur à ce beau métier est en prison car il n’en dispose pas ! »
Par Mamadou Oumar NDIAYE
OPPOSANT EN AFRIQUE, UN SACRE MÉTIER
Si notre si indépendante justice a fini de faire ses preuves en matière de liquidation d’opposants, elle ne détient pas pour autant la médaille d’or continentale dans cette discipline
Sans préjuger de la décision que notre glorieuse justice rendra mardi prochain dans l’affaire de « viols répétés » et « menaces de morts » — l’inénarrable procureur y a ajouté la charge de « corruption de la jeunesse » pour corser le dossier ! — pour laquelle il est poursuivi, l’opposant Ousmane Sonko, sauf improbable miracle divin ou vigoureuse mobilisation de ses partisans, peut faire son deuil de sa participation à la présidentielle de février prochain. Pour cause, des juges de la cour d’appel de Dakar ont déjà scellé son sort en le condamnant à six mois de prison avec sursis assortis de dommages et intérêts de 200 millions de francs à verser à celui qui le poursuivait et qui n’est autre que l’actuel ministre de la Justice et poids lourd du parti au pouvoir. Un régime qui, visiblement, de même que l’on dit que le facteur sonne toujours deux fois (du nom d’un film culte !), a jugé plus sûr de faire condamner plutôt deux fois qu’une l’homme qui risque de lui ravir le pouvoir s’il n’est pas arrêté par des manœuvres judiciaires. Il était donc plus sûr, pour le régime de Benno Bokk Yaakar (BBY), d’avoir deux fers au feu judiciaire ! Condamné une première fois, donc, pour « diffamation » et « faux et usage de faux », le leader du parti Pastef peut s’attendre à l’être une deuxième fois pour « viols répétés » et « menaces de mort ». Si ce n’est pour corruption de notre belle jeunesse… Les vieux que nous sommes sont priés d’aller se rhabiller !
Jamais deux sans trois, dit-on. L’adage s’est vérifié dans notre pays où, depuis l’accession du président Macky Sall au pouvoir en 2012, Ousmane Sonko est le troisième opposant idéalement placé à une élection présidentielle à être éliminé par la justice. Honni soit qui mal y pense. Avant lui, les opposants Karim Wade et Khalifa Ababacar Sall avaient écopé de lourdes condamnations judiciaires pour, respectivement, « enrichissement illicite » et « escroquerie aux deniers publics ». Et si l’actuel maire de Ziguinchor n’est pas (du moins pas encore) passé par la case prison, c’est tout simplement parce qu’en mars 2021 ses partisans avaient déclenché de violentes émeutes pour s’opposer au probable ticket de séjour tous frais payés à l’hôtel zéro étoile de Rebeuss que s’apprêtaient à lui offrir les juges. Un ticket dont les deux « K » avaient déjà bénéficié leur permettant d’avoir tout le loisir de goûter au confort ainsi qu’au charme discret de cette maison d’arrêt et de correction…
Cela dit, si notre si notre si indépendante justice — j’évite de mettre des guillemets à ce mot pour ne pas m’exposer à des poursuites pour « exercice de la profession de journaliste » par la Sûreté urbaine de la Police ! — si donc notre si indépendante justice a fini de faire ses preuves en matière de liquidation d’opposants, elle ne détient pas pour autant la médaille d’or continentale dans cette discipline. Florilège d’exploits judiciaires.
De l’escroquerie immobilière au trafic de bébés, faites votre choix !
En juin 2016, l’opposant Moïse Katumbi, richissime ancien gouverneur du Katanga et l’un des favoris à l’élection présidentielle de son pays, la République démocratique du Congo (RDC), voit le régime du président Joseph Kabila susciter des poursuites judiciaires contre lui pour « escroquerie immobilière » au détriment d’un ressortissant grec avant de le poursuivre directement pour « recrutement de mercenaires ». Pour l’ « escroquerie », il est condamné à un an de prison ferme par le tribunal de Lubumbashi, une peine qui a eu pour effet de le rendre inéligible. Avant le prononcé de la sentence, il s’était fait la malle…
Quelques mois plus tard, la juge Chantal Ramazani, qui avait prononcé cette peine, s’enfuit à l’étranger et déclare que d’intenses pressions avaient été exercées sur elle par le patron de la puissante Agence nationale de renseignement (ANR) en personne, pour qu’elle condamne Katumbi.
De ce côté-ci du continent, au Niger, l’opposant Hama Amadou, ancien Premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale, bien placé pour la présidentielle de 2016, est accusé de… « trafic de bébés » et embastillé ! Malgré tout, bien que se trouvant en prison, il avait pu « participer » à la présidentielle et emmener au second tour le président Mahamoudou Issoufou ! Lequel, ayant vaincu sans péril, a donc triomphé sans gloire à l’issue de cette seconde manche durant laquelle son principal adversaire était privé de liberté.
En Côte d’Ivoire, l’opposant Guillaume Soro, qui fut Premier ministre et président de l’Assemblée nationale lui aussi, n’a pas pu se présenter à la dernière élection présidentielle. Il a été condamné à la prison à vie en 2021 pour « déstabilisation » après avoir écopé d’une peine de 20 ans de prison ferme l’année précédente sous l’accusation d’avoir, en 2007, acheté sa résidence avec des fond publics. Son véritable « crime », c’est d’avoir voulu se présenter à la présidentielle de son pays, celle d’octobre 2020, contre l’avis du président Alassane Dramane Ouattara (ADO) dont il était l’allié jusque-là. Le même ADO avait pourtant été privé de concourir à cette compétition pour cause de nationalité douteuse par le président Henry Konan Bédié. A l’époque, le concept d’ « ivoirité » avait été opportunément sorti par des intellectuels apprentis sorciers (de la même engeance que ceux qui veulent pousser le président Macky Sall à faire un troisième mandat… pardon un deuxième quinquennat !) pour barrer la route à l’ex-gouverneur de la Bceao et leader du RDR (Rassemblement des Républicains). Les Ivoiriens stigmatisés comme étant des « allogènes » avaient dû mener une lutte armée pour chasser le successeur du président Bédié et installer leur champion au pouvoir après avoir renversé Gbagbo avec le soutien décisif de l’armée française. Ironie de l’histoire : c’est le même Guillaume Soro, qui avait dirigé cette lutte armée à la tête de la rébellion des « Forces nouvelles » — et donc porté au pouvoir Alassane Dramane Ouattara — qui a été condamné à la perpétuité par la « justice » de ce dernier et réduit à mener une vie d’apatride et de proscrit !
Un troisième larron nommé Barrow
A l’intérieur même des frontières sénégalaises, mais dans le pays étranger qu’est la Gambie, l’ancien président Yaya Jammeh a fait jeter en prison par sa « justice » l’opposant historique Bakary Darboe. Au cours de la manifestation organisée par l’opposition pour exiger sa libération, l’un de ses adjoints, Solo Sendeng si je ne m’abuse, est arrêté à son tour. Affreusement torturé, il meurt en prison. L’opposition est décapitée à quelques semaines de l’élection présidentielle. Désemparée, ses leaders se réunissent en catastrophe et désignent sans illusions un de leurs cadres du nom d’Adama Barrow, un personnage plutôt falot. Il paraît que, lorsqu’il a appris que le choix de ses adversaires s’était porté sur cet ancien vigile à Londres mais qui s’était reconverti dans l’immobilier, il se serait écrié que ce n’était même pas la peine qu’il batte campagne. De fait, il avait fait le service minimum mais, contre toute attente, avait été battu par Barrow ! Le même scénario risque de se produire au Sénégal si le président Macky Sall et son principal opposant Ousmane Sonko se neutralisent mutuellement au cours de leur « mortal kombat »…ouvrant ainsi un large boulevard à un troisième larron qui pourrait très bien être tout aussi terne qu’Adama Barrow !
Ailleurs sur le continent, et à part les pays cités ci-dessus, les opposants ne sont guère mieux traités, les chefs d’Etat en place estimant que leur meilleure place, c’est la prison. Ainsi, en Tunisie, le leader du parti islamiste Ennahda, qui est le chef de l’opposition, est actuellement en prison pour « apologie du terrorisme ». L’ancien président de l’Assemblée des représentants du peuple purge une peine d’un an.
Mais intéressons-nous surtout à notre chère Afrique noire. Au Cameroun, l’opposant Maurice Kamto a goûté au confort des prisons de ce pays d’Afrique centrale pour avoir manifesté avec ses partisans contre les résultats de la présidentielle de 2018. Au bout de neuf mois de prison, il a été gracié par le président Paul Biya… Qui détient avec son homologue et voisin, l’Equato-Guinéen Teodoro Obiang Nguema, le triste record continental des chefs d’Etat qui se sont le plus éternisés au pouvoir. En Guinée Equatoriale, donc, l’opposant historique Severo Moto, qui vit en exil en Espagne, a été maintes fois condamné par contumace, dont une fois à mort, pour des complots imaginaires. Autre grand démocrate qui ne fait pas dans la dentelle avec ses opposants, le Rwandais Paul Kagame. Si ces derniers ne sont pas traqués jusqu’à l’étranger et éventuellement trucidés, ils sont emprisonnés comme Mme Victoire Ingabire, emprisonnée de 2013 à 2018.
Terminons par le voisinage où, en République de Guinée-Conakry, le président de la Transition, l’ancien légionnaire français Mamady Doumbouya, a fait raser par des bulldozers, et sans autre forme de procès, les domiciles des deux figures de proue de l’opposition, Cellou Dallein Diallo et Sidya Touré. Sur les décombres de ces demeures acquises légalement, il a fait construire des écoles.
On pourrait multiplier les exemples à l’envi.
Juste pour dire qu’en Afrique, l’opposition peine encore à trouver sa place dans le jeu politique. Jeu ? On devrait plutôt parler de guerre, les opposants, et surtout s’ils sont des leaders ayant des chances d’accéder au pouvoir, étant considérés comme de dangereux ennemis à abattre par tous les moyens. Et pourtant, on le sait, pas de démocratie sans opposition, ce système démocratique supposant la compétition électorale et la confrontation des idées et des programmes. Sans compter que, depuis Montesquieu, on sait qu’il faut que le pouvoir arrête le pouvoir. Nos pouvoirs législatifs et judiciaires* étant couchés et asservis aux potentats qui nous gouvernent, seules les oppositions — et la presse là où elle est libre — peuvent faire office de contrepouvoirs. Hélas, de contrepouvoirs, nos chefs d’Etat ne veulent justement pas. Pour dire qu’être opposant en Afrique, c’est un sacré métier dont l’exercice passe forcément par la case prison ! S’il ne conduit pas au cimetière…
Dans ce naufrage généralisé de nos systèmes judiciaires vassalisés par les pouvoirs exécutif régnants, on peut tout de même citer quelques juges courageux comme l’Ivoirien Epiphane Zoro Bi Ballo, qui valida le certificat de nationalité de l’opposant Alassane Dramane Ouattara avant de prendre la fuite. Ou encore, on l’a dit, la juge Chantal Ramazani de RDC qui, après avoir condamné Moïse Katumbi, s’est exilée elle aussi en expliquant avoir subi de fortes pressions du patron de l’Agence nationale de Renseignement (ANR) en personne pour condamner l’opposant. Mais l’acte le plus courageux dans ce domaine est venu du Kenya où, en 2017, la justice a purement et simplement annulé la réélection du président sortant, Uhuru Kenyatta, pour « irrégularités ». Le scrutin avait été repris et Kenyatta avait de nouveau gagné.
Qu’on me permette, pour finir, de dire quelques mots sur le dialogue national qui s’ouvre ce mardi à Dakar. Je considère que, déjà, son format fourre-tout avec l’invitation de trop de chapelles parfois folkloriques ne sera pas signe d’efficacité et donnera plutôt à ces assises des allures de Tour de Babel où les gens ne parleront pas le même langage et seront à hue et à dia.
Plus fondamentalement, dans les conditions actuelles, un dialogue sans le chef de l’opposition qu’est Ousmane Sonko ne peut servir à rien. La clef de la paix et de la stabilité se trouve entre les mains de deux hommes : le président de la République, maître des forces de défense et de sécurité ainsi que de la justice, et Ousmane Sonko, général de la rue. La pacification de la situation passe par des entretiens entre les deux hommes car, encore une fois, aucun des participants à ce dialogue ne dispose de divisions dans le sens où les entendait Staline, c’est-à-dire combattantes, lorsque Churchill lui avait parlé d’une éventuelle alliance avec le Pape.
Emédia
CORRUPTION DE (LA) JEUNESSE !
Beaucoup de Sénégalais ont découvert le délit de «corruption de jeunesse» à partir du réquisitoire du procureur dans l’affaire Sonko-Adji Sarr. Bon à savoir qu’il existe. Mais finalement on serait tenté de dire que cette formule colle mieux aux politiques
Beaucoup de Sénégalais ont découvert le délit de « corruption de jeunesse », à partir du réquisitoire du procureur dans l’affaire Sonko-Adji Sarr. Bon à savoir qu’il existe. Mais finalement, l’on serait tenté de dire que cette formule colle mieux aux hommes politiques, dans d’autres circonstances. Ils corrompent les jeunes par des emplois… qu’ils ne voient presque jamais. Ils les utilisent comme bouclier parfois.
La jeunesse n’existe que lorsqu’ils en ont besoin. Ils en usent et… abusent. Parce qu’une frange décisive pour leur avenir politique. Mais ils ne se soucient guère de leur devenir. Ça s’appelle corruption de la jeunesse.
Par Cheikh Tidiane GADIO
60 ANS D’UNITÉ AFRICAINE (OUA-UA): UN PAS EN AVANT, UN PAS EN ARRIÈRE OU LE CULTE DU SURPLACE !
L’intégration africaine est aujourd’hui frappée de plein fouet par les défis majeurs de notre sous-région et de notre continent que sont l’économie criminelle, l’insécurité galopante et le terrorisme violent
Contrairement aux grands ensembles autrefois dominés et appauvris (Chine, Inde, Brésil) qui de nos jours ont pris le large tout en exigeant la reconfiguration de la géopolitique mondiale, l’Afrique, elle, fait du surplace et fait encore face à ses grands défis du début des indépendances : UNITÉ, INTÉGRATION, SÉCURITÉ ET DÉVELOPPEMENT !
L’intégration africaine est aujourd’hui frappée de plein fouet par les défis majeurs de notre sous-région et de notre continent que sont l’économie criminelle, l’insécurité galopante et le terrorisme violent (40.000 victimes de Boko Haram au Nigéria de 2009 à nos jours).
A ces deux fléaux s’ajoutent la montée exponentielle de l’économie criminelle, la souffrance des centaines de milliers de déplacés victimes de la terreur de l’extrémisme violent, la déstabilisation de nos États et l’effondrement de certaines de nos institutions qui ont parfois provoqué des changements anticonstitutionnels suivis de négociations ardues sur les formes et la durée des transitions nécessaires au retour à l’ordre constitutionnel normal.
Comme si toutes ces plaies n’étaient pas suffisamment handicapantes, d’autres chocs violents dus à la crise sanitaire et à la crise alimentaire, sont venus alourdirle déficit et le passif de nos pays en matière de développement. Tous ces constats prouvent que le bilan de 60 ans de l’OUA-UA est plus que mitigé, voire carrément décevant.
L’espace UEMOA, comme l’espace sous-régional CEDEAO, comme au fond tout le continent, souffre de la combinaison funeste de tous ces facteurs négatifs qui viennent alourdir le bilan au demeurant pas très reluisant de 60 années et plus de politiques de développement et d’intégration de l’Afrique.
Comment alprs allons-nous faire pourreprendre « l’initiative historique » comme disait le professeur Houtoundji, mutualiser nos forces, nos souverainetés et libérer (le mot n’est pas fort) une nouvelle fois et pour de bon l’Afrique ?
Telles sont les lourdes taches qui attendent nos leaders, nos acteurs politiques, nos Sociétés civiles, nos Think tanks, et toutes les forces vives du continent en particulier les jeunesses et les femmes.
On sait aussi que l’ère des nouvelles menaces n’a pas effacé celle des anciennes menaces que sont :
L’insécurité alimentaire : le monumental savant et agronome émérite, le regretté Professeur Moussa Seck, nous avait averti depuis les années 90 : « l’arme alimentaire peut-être plus redoutable que l’arme nucléaire ! » La guerre en Ukraine et ses effets mondialisés en 24 heures lui donnent absolument raison. On craint tous l’arme nucléaire mais on souffre ici et maintenant de l’arme alimentaire. Pour lui, l’Afrique qui devait se nourrir et nourrir le monde ne devait pas être aussi violemment impactée par la tragique guerre de la Russie contre l’Ukraine.
L’exode de notre ressource N° 1 : la jeunesse africaine. Professeur Moussa Seck disait un milliard de jeunes africains, ce sont deux milliards de bras pour déplacer des montagnes et mettre l’Afrique en orbite vers toutes les autosuffisances et toutes les souverainetés. Dommage il n’a pas été écouté pendant plus de 30 ans de prêche au service de l’agriculture, du Panafricanisme et du développement de l’Afrique. QUEL GACHIS !
L’effondrement des institutions attesté parle retour des coups d’État (5 réussis en Afrique de l’Ouest, deux avortés en moins de deux ans),
Impuissance des organes de l’Unité et de l’intégration africaine devant les vrais défis du continent : paix et sécurité, intégration économique africaine, insécurité alimentaire, terrorisme, armée africaine, siège de membre permanent avec droit de véto au Conseil de Sécurité des Nations Unies, poursuite de la balkanisation et même de l’hyper-balkanisation qui vise des pays aussi essentiels que la RDC, le Soudan, le Mali, le Nigéria entre autres.
Au total on peut constater une véritable paralysie du schéma retenu pour l’intégration africaine avec des Communautés économiques régionales (CERs) en crise, une organisation continentale (l’Union africaine) mal financée et presque sans pouvoirs réels cédés par ses membres qui se considèrent farouchement comme « des États indépendants et souverains » !
Malgré notre constat qui est difficilement contestable, la Banque africaine de développement (la BAD) nous propose de voir plutôt « le verre à moitié plein » en parlant de dividendes de l’intégration régionale :
Ce qui est problématique dans cette vision, c’est qu’elle doit d’abord admettre, qu’après 60 ans d’intégration africaine, les échanges intra-africains sont autour de 16% (Chiffre BAD), 40% de la population africaine vit en-dessous du seuil de pauvreté, 600 millions d’africains sur 1 milliard 300 millions vivent sans électricité et 300 millions sont au bord de la famine. On peut bien vouloir partager l’optimisme de la BAD, mais il est difficile de voir « le dividende de l’intégration régionale !» dans ces chiffres. Peut-être que la donne pourra évoluer avec la ZLECA, l’avenir nous le dira
Pour nous au demeurant tant que l’approche économique et non politique de l’intégration africaine va continuer à prévaloir le Renouveau de l’Afrique ira à la cadence d’une « tortue qui a des freins ». C’est pour cela que l’unité politique des Etats africains est devenue un impératif incontournable, un impératif de survie. À défaut de proclamer immédiatement les États-Unis d’Afrique, transformons au moins nos CERs en Unions Politiques régionales : Fédération des États de l’Afrique de l’Ouest, de l’Afrique centrale, australe, orientale, septentrionale. Cinq fédérations plus l’Alliance Panafricaine des Peuples et États de la Diaspora africaine pour organiser la transition vers les États-Unis d’Afrique de Nkrumah, Cheikh Anta, Marcus Garvey et tant d’autres.
C’est là une mission sacrée qui appartient aux Leaders accélérateurs de l’Histoire qui eux ont un véritable sens du Destin et de la Mission.
Par DR. Cheikh Tidiane GADIO
* PRESIDENT DE L’INSTITUT PANAFRICAIN DESTRATEGIES,
* ANCIEN MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES DU SENEGAL
PS : Cet article est tiré de ma leçon inaugurale délivrée à Abidjan en Juillet 2022 lors du Forum sur « La nécessité de l’intégration pour le développement du secteur privé africain » et de mon bilan de l’Intégration africaine publié dans la revue des Enfants de Troupe.