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26 avril 2025
Opinions
par Jean Pierre Corréa
NOUS PRENONS DATTES…EN UNION DE PRIÈRES
Et si l’on profitait de ce Ramadan pour faire baisser le niveau de ressentiment, ce lourd climat de tension politique, marqué par des déclarations et des accusations tous azimuts de vols et des doigts vengeurs pointés vers d’autres Sénégalais
Bismilhalléluia ! Seul l’état de grâce diffusé sur notre pays par les Patriotes sur fond de ruptures, pouvait en cet « An 1 » fondateur de notre « ça-m’est-égal », nous faire vivre dans l’œcuménisme caractéristique qui soude si bien nos populations, un mois de Ramadan concomitant et accompagnant les 40 jours de jeûne des chrétiens sénégalais.
Dieu, qui ne fait rien par hasard, nous accorde de vivre ensemble 26 jours durant, une grande intimité avec lui dans une stimulante et inspirante union de prières. Cette période, inédite à vivre, nous devons faire en sorte qu'elle Lui plaise et qu'Il l'agrée. Pour cela nous devons parfaire nos bonnes relations, faire qu'elles soient simplement excellentes, d'abord en respectant la forme et la particularité du culte de chacun, en recherchant et en cultivant tout ce qui nous rapproche. En acceptant nos différences, en reconnaissant qu'elles appartiennent à Dieu et qu'elles nous identifient.
Les Sénégalais qui aiment tant, au détour de chaque phrase, préciser qu’ils sont un peuple musulman, vont donc traverser 30 jours sans colères urbaines, sans médisances, et surtout sans mensonges, accompagnés durant 26 jours, par leurs frères catholiques, lesquels étrangement, depuis le début de l’ère statistique, plafonnent toujours à 5%, créant interrogation sur leurs capacités à faire, eux aussi des enfants…, mais je digresse…
Certains aiment à préciser que quand leurs amis chrétiens jeûnent, ils ne s’en rendent même pas compte, parce que simplement, ils ne les entendent pas gémir, ni se plaindre et évoquer leur jeûne pour justifier leurs paresses à faire leur boulot… Nous espérons rencontrer des hommes et des femmes qui ne se plaindront pas du jeûn, dans des bureaux climatisés, naviguant sur Facebook ou Whatsapp, alors que le Prophète Lui, PSL, s’est affranchi de l’épreuve sous 50°. Un peu de décence dans la complainte de l’affamé tout de même….
En théorie, nous devrions vivre à partir de ce samedi, 30 jours de bonheur, de félicité, de tranquillité, de partage et de fraternité, 30 jours sans colères urbaines, sans médisances, et surtout sans mensonges… Mon Dieu ! Quelle torture !
Le premier Ramadan de l'ère Pastef....
Voilà un Ramadan de rupture. Enfin le vrai Ramadan ! Les Sénégalais sont fauchés, ils ne pourront donc point se permettre de faire la razzia des étals de quelques enseignes ou des marchés. Ils feront donc des coupures de jeûne d’une grande frugalité, se contentant du minimum religieusement requis.
Et si l’on profitait de ce Ramadan 2025 pour faire baisser le niveau de haine et de ressentiment afin d’apaiser ce lourd climat de tension politique, marqué par des déclarations et des accusations tous azimuts de vols et des doigts vengeurs pointés vers d’autres Sénégalais sans autres preuves que cette rumeur, qui caractérise un des péchés capitaux en Islam, à savoir affirmer des choses sans en être certains. Pourquoi ne pas faire de ce Ramadan et de ce Carême 2025 l’occasion de faire preuve d’humilité, et de s’astreindre à ne pas attiser les antagonismes en ne s'adressant qu’aux tripes des sénégalais plutôt qu'à leurs cerveaux ?
Pourquoi ne pas faire de ce mois de Ramadan le réceptacle de la réalisation de toutes nos promesses et pas seulement faites sur les podiums électoraux de jeter tel ou tel autre opposant en prison ? Et le travail pour nos jeunes ? Et la vie moins chère ? C’est moins important que Farba en taule ?
Quelles valeurs se doivent de partager les Sénégalais en pleine période de spiritualité pour le bien de notre pays ?
On peut rêver durant ces 30 jours, de réseaux sociaux sans vulgarités ni injures, avec des acteurs sociaux qui privilégient une des recommandations majeures de l’Islam, à savoir la circonspection et la prudente retenue, qui empêchent d’avoir à proférer d’insoutenables conneries…Astafiroulah ! Je m’égare…
Ce sont aussi 50 jours durant lesquels nous serions bien inspirés de nous interroger sur les catastrophes et accidents en cascades qui s’abattent parfois sur le Sénégal. Et de nous demander si dans l’émission des prières que l’on envoie à Dieu à longueur de prêches, d’émissions de radio, de chants religieux nocturnes et perturbant la mobilité et la quiétude des citoyens, d’évocation pour jurer, de tous les Saints Hommes de Dieu qui peuplent notre spiritualité, de nous demander donc pourquoi, Dieu souvent ne nous entend pas. Y’a comme un problème de réception… Y’a un truc qui cloche…
Nous prions tous pour que tous ces sacrifices communs et prières communes, diffusent sur notre Sénégal paix et concorde, et surtout, redonnent aux populations de l’espoir et de la confiance en sa classe politique.
Profitons de ces 30 jours bénis pour réapprendre à envoyer des prières à Dieu… Si notre pays est propre, nickel chrome, il n’y a aucune raison que Ses Grâces ne nous mènent pas vers un vrai redressement, que notre jeunesse surtout, quémande de tout son désespoir.
Tout le Sénégal prend « dattes » …
Bon Ramadan… Bismilhalléluia !
par Abdoul Aziz Diop
L’UNIVERSEL DE SOULEYMANE BACHIR DIAGNE EST ENCORE UN PLURIVERSEL
EXCLUSIF SENEPLUS - Dans les deux œuvres « Universaliser : l’humanité par les moyens d’humanité » et « Ubuntu », le philosophe s’est longuement encombré de tours de prestidigitation pour rassurer qu’il n’y a d’universel qu’européen
Pour celles et ceux dont l’intérêt éthique et politique pour les théories sociales dont l’agenda s’oppose farouchement à celles dont la guerre est l’unique horizon incoercible pour l’humanité tout entière, la lecture de « Universaliser : l’humanité par les moyens d’humanité » (Albin Michel, Paris, 2024) du philosophe Souleymane Bachir Diagne s’accompagne ou est suivie, dans le pire des cas, de la lecture, de l’entretien - abusivement intitulé « Ubuntu » (Éditions EHESS, 2024) -, accordé par le philosophe à son amie Françoise Blum et préfacé par une autre amie - Barbara Cassin -, de l’auteur sénégalais. Dans les deux œuvres, Souleymane Bachir Diagne s’est longuement encombré de tours de prestidigitation pour rassurer ses deux grandes amies convaincues, elles, depuis la maternelle, quoique courtoises et généreuses, qu’il n’y a d’universel qu’européen.
Explications !
Après avoir acheté et lu, « Universaliser… », j’ai couru dans la rue, comme un enfant muni de quelques pièces de monnaies, pour aller acheter le bonbon dont je suis devenu subitement friand - Ubuntu -, ou le moyen éthico-politique de « rendre la communauté [humaine] meilleure ». Ubuntu comme lieu de ralliement des universels éparpillés aux quatre coins de la Planète. Pas pour ce qu’Ubuntu a que d’autre manière d’être seul ou collectivement n’ont pas, mais pour les similitudes frappantes entre le fond du mot bantou et le fond d’autres manières d’être sur lesquelles d’éminents auteurs non africains, aux États-Unis et en France, ont longuement planché.
Sur 126 pages d’entretien, toutes maquillées du titre élogieux Ubuntu, seulement trois pages (pp. 89-92) - 4 pages diminuées de certaines lignes des questions de l’intervieweuse et des blancs -, parlent vaguement d’Ubuntu. Déception du lecteur, mais dont l’interviewé donne l’explication à la fin de son entretien (p.125) : « Mon itinéraire et mon travail, qui ont été le sujet de cet entretien, sont ceux d'un philosophe africain. Par conséquent, c'est sur cette expression que je dirai quelques mots de conclusion. » Le fait est que l’entretien avec la parfaite complice Françoise Blum, qui passa le relais à Étienne Anheim sans qu’on ne nous dise d’ailleurs pourquoi à la fin de l’exercice (pp.109-125), aurait pu simplement s’intituler : « Contribution à la présence africaine en philosophie » comme le suggère pertinemment Souleymane Bachir Diagne lui-même.
« Présence africaine en philosophie » ! Et pourquoi pas « Philosophie africaine » ? En refermant l’un après l’autre les deux ouvrages dont nous avons fait état dans l’introduction de ce papier, nous arrivons à la conclusion que l’auteur se refuse à être philosophe après en avoir payé tout le prix, se contentant d’être seulement en philosophie. Une autoflagellation intellectuelle qui fait que Souleymane Bachir Diagne récuse l’idée d’une « philosophie islamique » pour ne revendiquer pour le prestigieux monothéisme abrahamique qu’une « philosophie en islam ». Le Sénégalais en philosophie s’en explique lui-même : « Parler de philosophie islamique équivaut à imaginer qu'on puisse se poser la question de la philosophie de tel ou tel aspect de l'islam (la prière, le jeûne, etc.), alors que philosopher en islam, c'est une manière pour moi d'étudier ce mouvement intellectuel de réception et de traduction de la philosophie grecque et hellénistique dans le monde de l'islam. Je continue le travail de philosophe de la traduction qui a été le mien lorsque je m'occupe aussi de philosophie islamique. Toutefois, dans le milieu universitaire, la nomenclature dit « philosophie islamique »... Il faut donc se résigner à la nommer ainsi, à condition de préciser qu'il ne s'agit pas de s'intéresser à la philosophie de la prière, à la philosophie du jeûne, etc., mais d'examiner le rôle que la traduction a joué dans l'ouverture de l'islam à la Grèce. » Bien inutile est alors le tour de prestidigitateur dès lors que Souleymane Bachir Diagne définit, comme le lycéen qu’il fut, la philosophie par « l’amour de la sagesse » ou par la faculté (deleuzienne) de créer des concepts grâce auxquels le philosophe - pas l’individu ou le groupe en philosophie -, construit par la pensée les faits qu’il conquiert sur les préjugés - prénotions dans l’acception de Durkheim et présuppositions dans celle de Marx Weber -, et les constate.
Quand un jour l’idée de philosopher - pas d’être en philosophie -, me vint à l’esprit, je me mis à écrire pour me convaincre moi-même de philosopher et ça donna ceci : « C’est naturellement avec beaucoup d’humilité que nous traitons ici de philosophie et de questions philosophiques. Une définition tirée d’un manuel scolaire de philosophie dit de la philosophie qu'elle est “une réflexion critique sur les questions fondamentales”. Quand, à titre d’exemple, notre but est d’être heureux, la question fondamentale portera sur le lien entre la richesse et le bonheur plutôt que sur l’emploi le plus rémunérateur pour atteindre ce but. La question philosophique se reconnaît alors par des attributs qui font qu'elle concerne tous les êtres humains, qu'elle n’est pas de l’ordre de la science, qu'elle relève de l’argumentation et qu'elle porte sur le sens des mots ou sur la valeur des choses. » Qu’en pense Souleymane Bachir Diagne ? Si le philosophe n’y pense que du bien, il doit enfin se convaincre que l’ouverture de l’islam à la sagesse grecque qui iradia toute l’Europe requiert de cette partie, intellectuellement introvertie du monde, la même ouverture vis-à-vis de la philosophie islamique dont dépend aussi l’universalité intégrale pour qui récuse vraiment la « pluriversalité » ou « diversalité ».
Peintre, écrivain et lithographe français de notoriété mondiale, Étienne Dinet (1861-1929) - El-Hadji Nasr-Ed-Dine après s’être converti à l’islam et s’être rendu aux lieux saints de l’islam -, soutint que c’est « en exposant clairement la doctrine de l’islam, religion simple, naturelle et logique qui a fait de ses adeptes des hommes imbus de sincérité, de franchise et de tolérance [que l’on contribue] à l’établissement d’une entente cordiale entre les hommes de bonne volonté ». Convaincu de « la plus grande vénération pour Moïse et pour Jésus » des musulmans, Dinet écrit, dans la préface de son livre « Pèlerinage à la Maison sacrée d’Allah », que « le jour où les Juifs et les chrétiens professeront la même vénération pour Mohammed, la paix au Proche-Orient sera définitivement assurée ».
L’autre grande querelle du Sénégalais en philosophie est celle faite aux « postcoloniaux » et aux « décoloniaux » pour cause de « postcolonialité » et de « décolonialité », les reléguant à l’enfermement : « Je refuse de m'enfermer dans une posture postcoloniale ou décoloniale. Si quelqu'un me convie à débattre autour de l'universalisme et de la pensée décoloniale ou postcoloniale, je n'accepte pas qu'on me cantonne dans cette dernière. Nous avons besoin de penser ensemble la relation entre universalisme et postcolonial ou décolonial. Je n'entends pas endosser le rôle de celui qui parlerait au nom de sa particularité, selon son identité d'auteur postcolonial ou décolonial. Penser est penser la totalité à la manière de Léopold Sédar Senghor, d'Aimé Césaire et d’Edouard Glissant. Le processus de décolonisation qui se poursuit sous nos yeux doit être appréhendé comme ce mouvement qui fait fond sur le pluriel du monde en même temps qu'il est d'orientation vers un horizon d'universalité. Ainsi, on ne s'enferme pas dans des concepts de postcolonialité ou de décolonialité.
On en tient compte, mais on ne s’enferme pas. »
En même temps, Souleymane Bachir Diagne admet, juste avant qu’« il y a eu une sorte de spécialisation ou de division du travail, [dans le monde américain et africain et dans la région de l’Amérique du Sud], entre le postcolonial et le décolonial ; il est certain toutefois que ces courants sont voisins, car tous deux soulignent la nécessité de perpétuer le travail de décolonisation ». Être juste avec Souleymane Bachir Diagne, c’est aussi faire état du chapitre très important - le cinquième de son essai « Universaliser… ». Titre du chapitre : « Décoloniser pour universaliser ». Là, Diagne interprète le Sénégalais Alioune Diop en ces termes (p.124) : « Le propos qui fait du Congrès de Rome [des artistes et écrivains noirs] de 1959, tenu juste avant l'année considérée comme celle des indépendances africaines, le moment philosophique qu'il fut et la leçon qu'il porte sur la question d'un “universel latéral” pour notre temps tiennent en ces mots que nous avons déjà cités et qu'il faut maintenant commenter plus avant : “Désoccidentaliser pour universaliser, tel est notre souhait. Pour universaliser, il importe que tous soient présents dans l'oeuvre créatrice de l'humanité”. »
Du surplomb au latéral
Un « universel latéral » ou « universel horizontal » dont Diagne ne peut revendiquer intégralement la copropriété éthique, philosophique et politique sans faire pivoter de quatre-vingt-dix degrés l’image (voir l’illustration au début de cet article) en première de couverture de l’ouvrage - « De langue à langue » -, qu’il a consacré à la « l’hospitalité de la traduction » (Albin Michel, Paris, 2022). Et ce d’autant plus que Souleymane Bachir Diagne qui se veut le philosophe de la traduction, n’y va pas avec le dos de la cuillère quand il écrit (pp.103–104) : « Je prends la traduction elle-même comme thème, comme manière de comprendre la notion d'universel ; c'est ce dont je traite dans le livre. J'y présente la traduction en tant qu'un humanisme, la traduction étant précisément cet art de construire des ponts entre les mondes, de donner hospitalité dans ma langue à ce qui s'est pensé et créé ailleurs. Je ne suis pas dupe, la traduction peut être aussi domination, pour faire allusion à l'ouvrage de Pascale Casanova, la relation entre les langues n’étant pas toujours paisible. Il faut compter avec les rapports de hiérarchie : les langues qui se traduisent le plus sont les langues les plus prestigieuses - être traduit en anglais permet une certaine forme d’expansion de la capacité que sa propre pensée a d’atteindre les audiences les plus larges. Il faut aussi reconnaître qu'il y a des formes de traduction qui se confondent avec la domination : traduire la réalité d'une culture donnée dans les termes de sa propre langue pour l'usage et la consommation de ceux qui parlent le même idiome c'est la définition même de la bibliothèque coloniale - est une forme de violence, au même titre que la mensuration des crânes. La traduction est aussi cela, mais ne s'y réduit pas. Traduire désigne ce moment particulier où un être humain confronte deux langues et fait en sorte qu'elles se parlent. Ce geste a une signification philosophique, éthique, de construction d'une communauté de faire humanité ensemble. » Mais horizontalement comme du côté droit de l’illustration de l’article par où commence l’universel intégral comme allégement de charge pour l’humanité tout entière et non du côté gauche par où prospère l’universel de surplomb - vecteur d’un certain pluriversel -, comme fardeau qui fait toujours que l’Europe philosophe pendant que tout le reste du monde, à la traîne, ne peut qu’être en philosophie (européenne).
Par Kadialy GASSAMA
LE DEFICIT BUDGETAIRE ET L’ENDETTEMENT ONT DES EFFETS MULTIPLICATEURS SUR LA CROISSANCE
La préoccupation principale de tout pouvoir public, c’est de mettre en place les conditions optimales pour un bon environnement des affaires afin de développer la propension à mobiliser des capitaux étrangers pour investir dans son pays.
La question fondamentale posée à travers l’audit des comptes de l’Etat et le rapport de la Cour des comptes pour la certification, relève du niveau du déficit budgétaire autour de 12% en 2023 contre 4, 9% annoncé, et de l’encours de la dette publique au 31 décembre 2023 autour de 99% du Pib contre 74, 41% annoncé. Ce sont là les résultats, au bout du compte, de l’évaluation de la gestion de l’Etat faite par la Cour des comptes sur la période 2019-2024.
Nous pouvons cependant noter des différences entre les anciennes publications de la Cour des comptes relatives aux exercices antérieures à 2023 et la nouvelle évaluation portant sur la période cumulée 2019-2024. Ces différences entre les chiffres mêmes de la Cour des comptes portant sur les mêmes matières et entre les deux gestions, peuvent provenir de la non-prise en compte dans les évaluations, de certaines dettes relevant du secteur parapublic à un temps T (dette du secteur parapublic=1500 milliards de F Cfa au 31 décembre 2023), ou de financements innovants de projets avec des lettres de confort de l’Etat, ou même du choix optionnel de dates de prise d’effets dans la comptabilisation des actifs et passifs, compte tenu de la variation des taux de change et des taux d’intérêt dans les marchés. Il peut arriver, en effet, que la valorisation des transactions et de stocks d’actifs et de passifs puisse être fondée sur des principes autres que la valeur du marché, par exemple la valeur nominale ou le coût historique, ou l’inverse, laquelle valorisation peut conduire à des chiffres différents suivant les différentes hypothèses optionnelles de départ.
Dès lors, certaines différences de comptabilisation peuvent provenir de facteurs explicatifs ayant trait à des approches différentes, en dehors d’une volonté de maquillage des chiffres ou de falsification des chiffres. On peut présenter un déficit budgétaire réduit en fin d’exercice en faisant des reports à l’année suivante ou en déplaçant certaines créances sur des organismes publics divers, comme on peut présenter un budget en fort déficit en faisant l’inverse, tout dépend de la posture. C’est dire que le niveau du déficit budgétaire et celui de l’endettement peuvent résulter du choix optionnel de certaines hypothèses de départ ou de l’existence de plusieurs paramètres aléatoires pour aggraver ou minimiser les taux suivant des approches différentes, et cela renvoie fondamentalement à des questions de doctrine économique et de politique économique.
L’approche de l’ancien régime de la politique budgétaire et de l’endettement était une approche du creusement du déficit pour financer l’investissement et, de ce fait, stimuler l’activité économique dans son ensemble selon les principes de la théorie keynésienne ; l’essentiel, c’est de ne pas entrer dans le surendettement, or, le surendettement est loin d’être atteint au Sénégal. Les néo-souverainistes, quant à eux, veulent procéder à l’équilibre budgétaire, à l’inexistence d’un déficit budgétaire ou, tout au moins, à un déficit budgétaire réduit, laquelle approche, au vu des capitaux internes limités dans nos pays, va ralentir les investissements et donc la croissance économique, et favoriser le chômage et l’inflation, des phénomènes que nous constatons de nos jours, alors que le Sénégal était dans une phase d’une bonne d’accumulation interne du capital qui a connu un net ralentissement.
Le but était de rechercher des moyens pour stimuler une forte croissance économique afin de remonter la pente, après l’impact de la crise sanitaire (Covid en 2020), de la crise climatique (inondations 2021, 2022) et de la crise sécuritaire (djihadisme à nos portes) sur l’économie. S’endetter pour investir à la suite de chocs exogènes, c’est développer un plan de relance pour fouetter l’activité économique et la croissance afin de remonter la pente. Nous pouvons dire que durant toute la période 2019-2022, le Sénégal était frappé par des chocs exogènes au point qu’il avait fallu développer des politiques volontaristes pour capter des capitaux extérieurs en vue de booster la croissance.
Les Usa sont à 125%, la France a 111%, le Japon à 225% d’endettement, par rapport à leur Pib, alors que le Sénégal est autour de 80%, si l’on prend l’option de ne pas intégrer la dette du secteur parapublic dans la dette globale de l’Etat. C’est pourquoi les critères du pacte de stabilité et de convergence de l’Union économique et monétaire (Uemoa) doivent être réajustés à des taux plus élevés en ce qui concerne l’endettement, avec les évoluions et transformations économiques de nos Etats.
Le Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz affirmait que «la croissance économique durable repose sur l’investissement». C’est aussi ce que Thomas Piketty confirmait : «La dette publique n’est pas un problème en soi, c’est l’absence de croissance qui l’est.» C’est dire que les néo-souverainistes sont dans l’approche d’une économie néo-mercantiliste, aux antipodes d’une économie ouverte basée sur la multipolarité pour favoriser des investissements structurants. Or, l’économie sénégalaise, dans sa structuration actuelle, est une économie ouverte, d’abord sur la sous-région et la région en termes d’échelle pour la compétitivité, ensuite sur le monde.
Dès lors, l’approche néo-souverainiste du nouveau régime est en inadéquation avec la structure actuelle de l’économie sénégalaise et va nous mener, s’il n’y a pas de changement de cap, au désinvestissement et recul de la croissance économique. Si seulement nous prenons la contribution autour de presque la moitié du budget national de la diaspora sénégalaise dans le Pnb, dans un pays où l’épargne nationale des agents économiques reste faible, nous comprendrons qu’on est dans une situation d’une économie ouverte. Si également nous prenons le potentiel du secteur touristique jadis florissant, qui apportait beaucoup de devises et d’emplois, nous aboutirons aux mêmes conclusions d’une économie ouverte.
Au-delà de l’exploitation du pétrole et du gaz qui est une avancée majeure pour l’économie sénégalaise, des marges extraordinaires de croissance économique existent dans notre pays, surtout dans le secteur industriel du métal, des phosphates ou d’autres ressources minières importantes. Il suffit de pouvoir capter des capitaux pour investir en restaurant la confiance des partenaires internationaux. Rien que le secteur touristique apporte à la France plus de 100 milliards d’euros, là où les Etats-Unis et la Chine sont les économies mondiales attirant le plus d’investissements directs étrangers.
La préoccupation principale de tout pouvoir public, c’est de mettre en place les conditions optimales pour un bon environnement des affaires afin de développer la propension à mobiliser des capitaux étrangers pour investir dans son pays.
Kadialy GASSAMA
Economiste Rue Faidherbe X Pierre Verger Rufisque
Par Amadou DIA
GOUVERNANCE ET ARROGANCE : L’ART DES INCOMPETENTS AU SENEGAL
Tant que l’arrogance primera sur la responsabilité, le développement restera un mirage et la confiance entre gouvernants et citoyens continuera de s’effriter
Au Sénégal, la gouvernance est trop souvent marquée par une arrogance qui cache une incompétence notoire. Ceux qui occupent les sphères du pouvoir, censés être des serviteurs du Peuple, adoptent un ton condescendant et autoritaire, confondant leadership et mépris, gestion et improvisation, compétence et clientélisme.
Loin d’être une démonstration de force ou de maîtrise des affaires publiques, cette posture arrogante est en réalité le refuge des dirigeants en manque de vision et de rigueur. Elle se traduit par un déni constant des réalités vécues par les citoyens, une communication arrogante et un refus systématique de la critique. Dans ce contexte, toute remise en question des décisions publiques est perçue comme une attaque personnelle, et les voix discordantes sont réduites au silence par la répression ou le mépris.
Ce phénomène est d’autant plus préoccupant que l’arrogance en politique est souvent le signe d’une absence de résultats concrets. Incapables d’apporter des solutions aux défis économiques, sociaux et environnementaux du pays, certains dirigeants se réfugient dans une posture défensive, préférant imposer leur volonté plutôt que de dialoguer avec les citoyens. Cette attitude crée une rupture entre gouvernants et gouvernés, aggravant la crise de confiance qui mine nos institutions.
L’arrogance des dirigeants se manifeste aussi dans leur gestion des crises. Face aux revendications populaires, aux mouvements citoyens et aux critiques légitimes, la réponse est trop souvent une communication arrogante, teintée de menaces et de mépris. Pourtant, une gouvernance efficace repose sur l’écoute, l’humilité et la capacité à s’adapter aux besoins de la population. Loin d’être un signe de faiblesse, reconnaître ses erreurs et engager un dialogue constructif est une marque de grandeur et de responsabilité.
Cette situation est également favorisée par un système où la compétence est rarement le critère principal de nomination aux postes de responsabilité. Le népotisme et le clientélisme permettent à des individus peu qualifiés d’occuper des fonctions stratégiques, non pas pour leurs compétences, mais pour leur loyauté envers le pouvoir en place. Dès lors, plutôt que de chercher à exceller dans leurs missions, ces responsables adoptent une posture arrogante pour masquer leur incapacité à gérer efficacement les affaires publiques.
Pourtant, il est encore possible de changer cette dynamique. Le Sénégal regorge de talents, de cadres compétents et de jeunes leaders capables d’impulser une nouvelle vision basée sur la transparence, la compétence et la responsabilité. La gouvernance ne doit pas être un exercice d’auto-satisfaction, ni un espace réservé à ceux qui excellent dans l’art de mépriser le peuple. Elle doit être un engagement envers l’intérêt général, fondé sur l’écoute et la quête permanente d’efficacité.
Tant que l’arrogance primera sur la responsabilité, le développement restera un mirage et la confiance entre gouvernants et citoyens continuera de s’effriter. Il est temps que la gouvernance sénégalaise évolue vers plus d’humilité et de compétence, car c’est dans le respect du Peuple et la recherche de solutions concrètes que réside la véritable force d’un leadership éclairé.
Amadou DIA Conseil en travail social Consultant formateur
Responsable politique à Ourossogui
Par Khady GADIAGA
LES ENJEUX DES CHANTIERS DU MIEUX VIVRE ...
Dans toutes les grandes périodes de bifurcation historique, il y a une double polarisation : une polarisation régressive à laquelle, en général, nous sommes plus attentifs parce qu’elle est d’autant plus spectaculaire que le système d’information ...
«Là où croît le péril, croit aussi ce qui sauve », disait Hölderlin. Dans toutes les grandes périodes de bifurcation historique, il y a une double polarisation : une polarisation régressive à laquelle, en général, nous sommes plus attentifs parce qu’elle est d’autant plus spectaculaire que le système d’information est construit pour mettre en scène ce qui va mal ; mais il y a aussi une polarisation créative, même si elle est encore insuffisante.
Pourtant, les états comme les individus sont vulnérables et notre histoire, tout en prétendant s’afficher comme éliminant tous risques, a un coût. Aucune assurance tous risques ne l’en préserve.
Le progrès sans limite n’écarte pas l’incertain. Nous pouvons au moins décliner trois principes d’espérance au sein de la désespérance dont le visage de la banqueroute entre autres périls est l’improbable. Il faut donc repérer, au cœur même du pire, les éléments qui sont mouvants parce que, dans cette espèce de course de vitesse qui se joue entre se perdre ou redresser la barre, la seule chose qui soit impossible est le statu quo. Nous sommes dans des situations à la fois improbables et dynamiques qui peuvent être régressives, mais aussi créatives.
Tout ce plaidoyer pour dire qu'il faudra du temps, de l'énergie créatrice, de la persuasion et du travail de cohésion pour instaurer de véritables chantiers du mieux-vivre.
Alors, quels sont ces chantiers qui permettent de passer de politiques de survie à des politiques de vie, fécondes et créatrices en dépit des écueils que nous percevons? Plusieurs doivent être menés conjointement.
Le premier est celui du contrôle des revenus. La lutte contre l’accroissement des inégalités qui gangrène la coexistence est un chantier majeur, accompagné d’une révolution fiscale visant à une plus grande justice sociale qui seule permettra d’affronter plus paisiblement les échéances inéluctables qui se profilent. Il pourrait se formuler ainsi: «Il n’est pas possible à un individu de gagner plus en 1 mois ce que quelqu’un gagne en 1 an».
Le deuxième chantier concerne la propriété privée. La solidarité, si elle passe par un rééquilibrage des revenus, passe aussi par une limitation drastique de l’accumulation patrimoniale qui, avant d’être une propriété privée, doit être considérée comme des biens communs dont l’usage doit être pris en charge par toutes les formes possibles d’associations d’acteurs et d’usagers. On pourrait ici s’inspirer de la notion de jubilé rappelée par David Graeber (Histoire de la dette) qui organise régulièrement un réajustement des patrimoines. L’économie sociale et solidaire en trace déjà les pistes.
Troisième chantier et non le moindre, apprendre à vivre mieux avec moins: «Moins de biens, plus de liens». L’épuisement des ressources, la nocivité de la croissance (qui en fait, si elle est un simulacre de bonheur, est cause de malheur pour ceux qui en sont les victimes) et une conjoncture mondiale précaire doivent nous conduire à une simplicité de vie.
Il nous faut retrouver la ferveur des joies simples et bannir le gaspillage et les dépenses de prestige. Se nourrir, se vêtir, avoir un toit, pouvoir se soigner, se réjouir ensemble, prendre soin les uns des autres, doivent être autant de repères qui balisent les chemins à parcourir.
Quatrième chantier majeur: l’éducation. Refaire de l’école un lieu d’apprentissage de l’entraide et non plus de la réussite des trajectoires individuelles et concurrentes. C’est peut-être là la clef de voûte de l’édifice à reconstruire.
De ce chantier doivent émerger des pratiques culturelles délivrées des impératifs d’une société marchande qui restreint les aptitudes à l’imagination et à la création tout en occasionnant une diarrhée de productions parfois dénuées de tout intérêt, sinon celui de répondre au besoin compulsif de saturer l’espace public pour écarter tout véritable renouveau.
Cinquième et non moins essentiel chantier : l'évaluation systématique des politiques publiques et la promotion des changements tout azimut de paradigmes sociétaux.
Mesurer de façon ponctuelle l'action de nos gouvernants et la perception qu'en ont les électeurs serait salutaire pour corriger et rééquilibrer l'exécution des politiques publiques. Tout comme la participation citoyenne implique de jeter un regard attentif sur divers aspects de la vie politique comme le taux de participation aux processus électoraux, le niveau de l’engagement social et de l’action militante, l’efficacité des différentes méthodes de participation publique, la compétence civique ainsi que le niveau de l’éthique sociale des citoyens. On doit également considérer l’influence qu’exercent les principaux acteurs de la scène publique que sont les politiciens et les médias puis se demander si l’espace décisionnel accordé aux citoyens est suffisant ou s’il n’y a pas lieu de l’élargir et de l’augmenter de façon significative. Enfin, il importe de jeter un regard attentif aux nouvelles formes de participation citoyenne élaborées et expérimentées depuis un certain nombre d’années déjà...
Pour garder son pouvoir, il faut que l'État se mette en mode d'apprentissage continu. Il faut comprendre qu’il est désormais et plus que jamais nécessaire de vivre intensément le présent, tout en le réinventant. Il faut penser loin et agir dans un temps tridimensionnel : le passé, le présent et l’avenir. Pour y arriver, encore faut-il ne pas ignorer, ne pas refuser et ne pas immobiliser.
Garder le pouvoir, c’est agir donc ; agir pour protéger le bien commun, au-delà de ses intérêts individuels.
Pour conclure, nous dirons que le choix que nous avons à faire désormais, à l’instar du titre de cette contribution, est de vivre et non pas de survivre. Vivre dans la confiance qu’un avenir demeure ouvert et non pas survivre sans joie dans la méfiance et les sécurités aliénantes.
Ce qui est sûr aujourd’hui, c’est que nous avons en main la responsabilité de dégager de nouveaux horizons, et si nous n’avons pas les recettes politiques préétablies de notre avenir, nous avons en tout cas l’ardente obligation de lutter et de résister à l’inacceptable qui avait pendant tout le règne libéral droit de cité.
Ce sont là des procédés de lutte contre la déshumanisation d’une terre qui ne demeurera habitable que dans la mesure où nous éliminerons les aveuglements et la domination des forces obscures du capitalisme, de l’argent et de la finance et de ses errements.
Peut-être, par delà nos hypocrisies, par une réelle volonté politique retrouverons-nous le sens du doux commerce et de la reddition auquel croyait l’une de nos lumières universelle, Montesquieu, un doux commerce pour tous et non pas pour des prédateurs ignobles et avides qui en ont accaparé les bienfaits pour ruiner notre monde et ceux qui l’habitent.
Jummah Mubarak à toutes et à tous !
Par Hamidou ANNE
AU G20, LE PLAIDOYER DE MACKY SALL POUR L’ALLEGEMENT DE LA DETTE
Olusegun Obasanjo, Macky Sall, Joyce Banda, Jakaya Kikwete, Nana Akufo-Addo et Ameenah Gurib-Fakim, Hailemariam Desalegn et Yemi Osinbajo se sont réunis autour de l’Initiative des leaders africains pour l’allégement de la dette (Aldri)
Ce 27 février 2025, les anciens présidents Olusegun Obasanjo, Macky Sall, Joyce Banda, Jakaya Kikwete, Nana Akufo-Addo et Ameenah Gurib-Fakim, l’ancien Premier ministre Hailemariam Desalegn et l’ancien vice-président Yemi Osinbajo, réunis autour de l’Initiative des leaders africains pour l’allégement de la dette (Aldri), ont signé «La Déclaration du Cap», pour «une action audacieuse et urgente en vue d’un plan global d’allégement de la dette pour l’Afrique et d’autres pays en développement victimes du fardeau excessif de la dette».
«Plus de la moitié de la population africaine vit dans des pays qui dépensent plus en paiements d’intérêts qu’en éducation, en santé ou en climat.»
En vue de relever les défis des Odd des Nations unies, de l’Agenda 1963 de l’Ua et de l’Accord de Paris sur le climat, l’Afrique a besoin de mécanismes spécifiques, afin de bénéficier de financements innovants, à faible coût et à des conditions favorables à son économie.
Les leaders de l’Aldri proposent deux volets : une restructuration globale de la dette des pays fortement endettés et une réduction du coût du capital pour tous les pays en développement.
Parmi les signataires de la Déclaration du Cap, figure en bonne place le Président Macky Sall dont l’agenda international, durant ses deux mandats à la tête du Sénégal et ensuite dans le cadre du Pacte de Paris pour les peuples et la planète (4P), s’est toujours inscrit dans le cadre d’une refonte du système économique et financier mondial, avec un axe majeur relevant de l’allègement et de la soutenabilité de la dette.
L’aide au développement a montré ses limites ; elle n’est pas efficace pour réduire les écarts entre pays en développement et nations industrialisées. L’Afrique, pour relever les défis de l’émergence, a besoin d’un volume massif de capitaux, qui proviendrait des investissements directs étrangers et d’une dette soutenable.
Encore sur ce sujet de la gouvernance mondiale, le Sénégal, sous Macky Sall, a toujours été au cœur de la réflexion et de l’action pour la transformation des économies africaines. Le lancement du Plan Sénégal émergent, en 2014, répondait à l’impératif de changer la structure des politiques publiques. Jusque-là réduites à l’enjeu de la réduction de la pauvreté, les politiques publiques sénégalaises se structuraient désormais autour d’une vision conquérante, celle de l’émergence dont la condition sine qua non était la création d’une croissance génératrice d’emplois et d’inclusion sociale. Le Pse a pu obtenir un soutien conséquent de la Communauté internationale, avec la tenue de deux groupes consultatifs où le Sénégal a mobilisé des engagements de près de 4000 milliards de francs Cfa pour la phase 1 et 7356 milliards pour la phase 2.
Cette confiance des partenaires publics et privés était due à la crédibilité de la signature du Sénégal, à la solidité et la cohérence de son plan de développement et au sens du leadership qu’incarnait notre pays.
Transformer le visage de son pays, élaborer une ambition de rattrapage notamment infrastructurel, réinstaurer l’espoir face au fatalisme du sous-développement nécessitent une volonté prométhéenne, mais aussi une confiance en interne et en externe. Celle-ci permet d’engager les composantes de la Nation autour d’une politique de l’émergence et les partenaires pour investir et accorder des prêts conséquents. Face aux tenants de slogans d’estrade et aux théoriciens du misérabilisme, il faut rappeler une évidence : il n’y a pas d’alternative à la dette et à l’attrait de capitaux massifs pour relever les défis des infrastructures, de l’industrialisation, de l’emploi en vue de créer les conditions d’une prospérité partagée.
L’Afrique, comme l’a rappelé récemment le Président Sall lors de sa Keynote speech lors d’un panel de l’Atlantic Council, est une terre de ressources incommensurables, notamment par la jeunesse de sa population dans un monde qui vieillit, les ressources naturelles, les immenses espaces de terres arables, les cours d’eau et la vitalité créatrice de ses jeunes et ses femmes. Ce sont autant de potentialités qui peuvent nuancer les défis nombreux mais pas insurmontables. L’heure n’est pas au fatalisme ni au repli sur soi, encore moins à l’apitoiement. Un chef, c’est d’abord la compétence, la crédibilité et le prestige ; c’est aussi un propulseur d’espoir et un embrayeur de récits d’espérance, qui chasse les démons de l’apathie et du découragement.
Pendant douze ans, le Sénégal sous Macky Sall a pesé en Afrique et dans le Sud Global sur la réforme de la gouvernance mondiale. Dakar a été un centre névralgique pour imposer le sujet de la dette, sa structure, les possibilités qu’elle offre, mais aussi les potentialités de développement que son service obère pour des dépenses sociales, notamment dans des secteurs vitaux comme l’éducation, la santé, la culture et le sport. Le Président Sall a plusieurs fois interpellé les pays industrialisés sur des aspects concrets de la dette liés aux taux d’intérêts dont les paiements prennent une part conséquente dans les budgets nationaux.
Il y a également le sujet relatif aux délais de remboursement, car pour des infrastructures qui doivent changer la vie de plusieurs générations, les créanciers réclament des délais de paiement trop courts. Or, aucun pays n’a relevé le défi du développement à travers une stratégie à court terme ; l’architecture de la dette doit épouser les contours du long terme en vue de son efficacité, de son efficience et pour lui permettre d’avoir un impact auprès des populations, notamment les jeunes et les femmes.
Il faut aussi aborder la question lancinante des primes d’assurance très élevées -parfois jusqu’à 15% pour les mieux lotis-, et que rien ne justifie quand il s’agit de l’Afrique. Sur ce sujet précis, il faut rappeler, pour la dénoncer, une grande injustice. La «prime à l’Afrique» est un mécanisme inique qui surévalue le continent en matière de risque. Or, une étude de Moody’s révèle que le taux de défaut sur les projets d’infrastructures est plus faible en Afrique qu’en Asie et en Amérique latine.
Propulser une ambition, faire preuve de leadership et porter la flamme de l’espoir ont aussi une valeur relative à l’atténuation de la perception du risque. Mais le nouveau dogme de gouvernance érigé au Sénégal, qui veut que les autorités en charge vilipendent leur pays, accusent leur administration de maquillage de comptes et entonnent la mélodie sinistre d’un «Etat en ruine», apporte le discrédit, éloigne les investisseurs et soumet le Sénégal à la dure loi de l’ajustement structurel. Ainsi, à la suite de sorties malheureuses des actuelles autorités, Moody’s a immédiatement abaissé à deux reprises la note souveraine du Sénégal. La note B3 promet aux Sénégalais des lendemains troubles, si un infléchissement dans le discours et la pratique ne s’opère rapidement.
Gouverner c’est agir, ce n’est pas la loi du bavardage permanent. Le Sénégal a une tradition d’hommes d’Etat qui, face aux défis de leur époque, ont toujours pris leurs responsabilités, conformément au rôle que le pays a toujours joué en Afrique et dans l’ancien périmètre du Tiers-monde, désormais le Sud Global. En appelant à un Consensus de Dakar, en décembre 2019, au sujet d’une réforme de la dette, en présence de nombreux chefs d’Etat et du Fmi, le Président Sall visait une soutenabilité de la dette africaine pour desserrer l’étau des créanciers sur nos économies fragiles.
Comme président en exercice de l’Union africaine, le Président Sall a multiplié les discours et actions en faveur de la facilitation de l’accès aux capitaux, pour construire des infrastructures de développement ; et ceci conformément au sens de l’histoire car l’Europe, après la Guerre, a été reconstruite grâce à un volume de prêts à des conditions avantageuses. L’Allemagne, par exemple, a pu asseoir une économie forte et dynamique du fait, entre autres, de la restructuration et la réduction à 62% de sa dette dans le cadre de l’Accord de Londres de 1952.
Au surgissement de la pandémie du Covid-19, Dakar a pris le leadership de la campagne internationale pour l’annulation de la dette des pays africains. Selon un rapport de la Banque mondiale, «les pays en développement ont dépensé un montant inédit de 1400 milliards de dollars au titre du service de leur dette extérieure, la charge des intérêts ayant atteint en 2023 son niveau le plus élevé depuis vingt ans. Les paiements d’intérêts ont augmenté de près d’un tiers et se sont élevés à 406 milliards de dollars, grevant dans de nombreux pays les budgets pouvant être alloués à des domaines critiques tels que la santé, l’éducation et l’environnement».
Pour la Banque africaine de développement, «l’Afrique a payé 163 milliards de dollars au titre du service de la dette en 2024». Ce chiffre était de 61 milliards de dollars de 2010. L’institution précise que «la structure de la dette africaine a changé de façon spectaculaire. Alors que la dette bilatérale représente désormais 27% de l’endettement, contre 52% en 2000, la dette commerciale compte pour 43% de l’endettement total (20% en 2000)».
Pour finir, un mot sur l’actualité sénégalaise qui, avec ce régime, prend les allures d’un fait-divers permanent, loin des grandes concertations mondiales en ce moment à Cape Town. Le rapport de la Cour des comptes, en dépit d’une méthodologie douteuse et des conclusions hâtives et confuses, n’est point alarmant sur le sujet de la dette, que même le ministre de l’Economie a jugé «soutenable», malgré les harangues vaines de son Premier ministre.
Le Sénégal s’est endetté non pour des dépenses de prestige, mais pour financer son développement. La dette utile du pays est visible et matérialisable partout. Elle est dans les rames du Ter, les bus du Brt, les amphithéâtres des universités, les salles d’urgence des hôpitaux, les 2000 MW d’électricité produite en douze ans -le Sénégal était à 500 MW en 2012-, les milliers de kilomètres de routes, d’autoroutes, de pistes rurales de production, les navires et avions qui désenclavent la Casamance, les Datacenter… Le Sénégal, sous le Président Macky Sall, s’est donc endetté pour financer des investissements structurants dont la finalité exclusive est la transformation structurelle de l’économie, la croissance et la génération d’un capital humain capable de conduire notre pays à l’émergence. Le Sénégal de ces douze dernières années a ainsi pu inspirer une respectabilité sur la scène internationale au regard de l’ambition qu’il a propulsée à la face du monde.
C’est cette respectabilité, acquise successivement depuis le Président Senghor jusqu’au Président Sall, qui confère à ce dernier cette place au cœur de la réforme de la gouvernance internationale.
«L’allègement de la dette n’est pas une charité. C’est un investissement dans un avenir prospère, stable et durable -pour l’Afrique et l’économie mondiale.»
C’est à Cape Town, au G20 présidé pour la première fois par un pays africain, que se joue actuellement le destin du monde, dans un moment de fractures et d’incertitudes dans le Sahel, de retournement américain sur l’Ukraine, d’inquiétude sécuritaire européenne et de promesse africaine de prospérité.
Macky Sall, théoricien du «multilatéralisme inclusif», est partie prenante d’un monde où toutes les cartes se rebattent, loin, très loin des querelles picrocholines partisanes. Et c’est toujours le Sénégal qui gagne, n’en déplaise aux esprits étriqués mus uniquement par la négation du Sénégal.
Hamidou ANNE
Militant de l’Alliance pour la République
Par Fara Njaay
DE FARA NJAAY AUX POETES ZACHARIA SALL ET AR GUENS JEAN MARY
Coin des lettres - Que nul n’entre ici s’il n’a pas de poésie dans son cœur
Poètes, mes semblables… Hommes de rien, mais de tout, vous qui savez poser les mots justes sur les émotions les plus profondes, recevez ma part de poésie. D’humanité !
Sans vous rappeler – à tous les deux – que lorsque j’ai lu vos textes si puissants, si vrais, j’ai été en proie au doute quant au destin de l’humanité. D’une part, vous vous indignez face à un acte barbare qui s’est récemment déroulé en Haïti : un gang a brûlé vif un bébé de deux mois sous les yeux de sa mère. Quelle horreur ! D’autre part, vous semblez poser la question de la place de la poésie dans un monde qui se déshumanise. Qui se défait.
Le fait est là, la question cruciale. Tout se joue en cet instant fragile. Le silence face à cette situation serait un abîme. Je me réjouis donc de savoir que vous, poètes, accordez une place à la souffrance des autres. Mieux encore, vous portez un regard empreint d’empathie sur la misère humaine. Voilà l’une des raisons, parmi mille autres, qui donnent à la poésie tout son sens. Son prestige
Je suis contraint de dire que le poème ne pèse rien face aux armes. Néanmoins, il demeure un puissant souffle qui brave le chaos. Et même si la poésie n’est pas une voix dominante dans ce monde, elle est une voix qui compte. Quand les cœurs sont étreints, les lumières éteintes, elle reste la dernière braise dans l’hiver des âmes.
Poètes, mes semblables…
En lisant, de manière croisée et sensée, vos textes, j’ai retenu trois mots qui, me semble-t-il, condensent tout l’esprit de vos propos : vivre, espoir et poésie. Vivre, c’est avoir l’audace de combattre les dangers. Danser avec le vent des défis. Senghor avait déjà senti, en 1950, qu’il était urgent de protéger l’homme contre la tyrannie des robots. Cela nécessite un combat… L’espoir ? Je crois qu’il est une force spirituelle qui donne sens à notre vie. Il est la douce lumière qui perce l’obscurité. Une étincelle qui ranime les cœurs fatigués et ouvre la voie vers un avenir insoupçonné. « L’espérance luit comme un brin de paille dans l’étable », écrivait Jules Supervielle. Et la poésie, au-delà d’un art, traduit les émotions les plus profondes, les pensées les plus universelles. Cette idée me fait penser à Paul Laurence Dunbar, Claude McKay, Langston Hughes et Sterling Brown. Tous des poètes renaissants. Renaître, c’est le maître mot. Pour cela, il nous faut du courage. De l’audace !
Bref, suivant ce triptyque, les hommes ont l’obligation de vivre poétiquement dans l’espoir. Bien sûr, pour que le monde ne se défasse pas… s’il en est encore temps. J’espère qu’il en soit ainsi. Ce qui est certain, dans l’espace fracturé du monde moderne, où le sacré et le numérique s’entrelacent dans le ballet silencieux des algorithmes, il nous faut encore plus de voix pour explorer les fondements qui régissent nos vies.
Chers amis poètes...
Je dois maintenant vous dire que, tant qu’un seul vers subsiste, tant qu’un seul cœur écoute, l’humanité n’est pas entièrement perdue.
UN LEVIER ESSENTIEL CONTRE LA DESINFORMATION AU SENEGAL ET AU KENYA
En tant que spécialistes des médias et de la communication de masse, nous avons mené une étude afin d’évaluer l’efficacité des stratégies de lutte contre la désinformation et les pratiques de factchecking
La diffusion de la désinformation n’est pas une nouveauté en Afrique mais, ces dernières années, le rythme et le volume des “fake news” (fausses nouvelles lancées en connaissance de cause le champ médiatique) ont pris des proportions plus larges et plus inquiétantes. Des études ont montré que les Africains sont exposés à la désinformation de façon régulière. Or, sur le continent, déterminer la véracité des informations accessibles revient à chercher une aiguille dans une botte de foin. Face à ce défi, le fact-checking (vérification des faits) et l’éducation aux médias sont souvent présentés comme des remparts.
En tant que spécialistes des médias et de la communication de masse, nous avons mené une étude afin d’évaluer l’efficacité des stratégies de lutte contre la désinformation et les pratiques de factchecking. Cette recherche repose sur 42 entretiens réalisés en 2021 avec des professionnels des médias au Kenya et au Sénégal.
Les participants sont soit des journalistes, des spécialistes de fact-checking ou acteurs influençant les politiques médiatiques (fonctionnaires du gouvernement, employés de think tanks, universitaires).
Le fact-checking : pratiques et perception
Au Kenya comme au Sénégal, le factchecking s’impose comme stratégie de réaction contre la désinformation. Les fact-checkeurs et les journalistes sont au premier rang pour vérifier et déterminer l’exactitude des informations partagées en public (par exemple, la vérification des publications faites par les utilisateurs des réseaux sociaux) ou des contenus créés au niveau interne pour être diffusés par l’entreprise de presse. Les services de fact-checking les plus populaires utilisés par les participants sont PesaCheck, Piga Firimbi et AfricaCheck.
Dans ces deux pays, les méthodes de vérification reposent sur le recoupement des sources différentes et l’utilisation d’images et de vidéos. Les fake news les plus répandues ont trait à la politique et aux sujets d’ordre sanitaire. Les informations vérifiées sont disséminées sous divers formats à travers des reportages, des publications sur les réseaux sociaux et la production de courtes vidéos sur des contenus qui ont été authentifiés.
Le recoupement de l’information
Notre étude montre que les professionnels des médias au Sénégal et au Kenya recoupent les informations avant leur diffusion. Ce processus implique la consultation de sources primaires ainsi que le recours à des experts pour éclairer et contextualiser les contenus à vérifier. Les participants définissent les experts comme des spécialistes dans un domaine particulier ou des personnes qui font des contributions régulières sur le sujet à travers les médias.
En plus de la vérification des informations auprès des sources et des experts, on note une tendance émergente au niveau des entreprises de presse qui consiste à créer des desks dédiés au fact-checking pour vérifier les informations avant leur diffusion. Pour éviter que les journalistes et rédacteurs ne diffusent de fausses informations, les participants des deux pays étudiés révèlent que les organes de presse ont formé leurs employés à l’utilisation d’outils de vérification.
La vérification des images et des vidéos
Les images et vidéos diffusées sur les réseaux sociaux mêlent souvent vérités et manipulations. Pour vérifier ces contenus, les professionnels font usage de techniques de recherche d’images inversées, une technique rendue possible par la géolocalisation et l’existence d’un grand nombre d’images disponibles en ligne que les fact-checkeurs peuvent comparer. L’outil de recherche inversée de Google est le plus utilisé.
En effet, la géolocalisation à travers Google Maps permet de situer le lieu exact où une image a été prise et le comparer au lieu indiqué sur le contenu à vérifier. Pour les vidéos, les professionnels utilisent un outil appelé InVID qui permet de générer les images d’une vidéo. Ces images sont ensuite géolocalisées par le moyen d’une technique de recherche d’images inversées.
Perceptions sur l’efficacité de la vérification des faits
Les professionnels des médias des deux pays perçoivent la vérification des faits comme une stratégie efficace qui devrait être encouragée pour lutter contre la désinformation. Le fact-checking est un moyen efficace pour vérifier les contenus, même s’il est essentiel de prendre en considération l’importance de la liberté d’expression et d’éviter que le gouvernement ou le secteur privé soient responsables de l’exactitude des informations partagées sur les plateformes médiatiques.
La plupart des participants ont loué les actions des entreprises de réseaux sociaux comme X (ancien Twitter) et Facebook visant à restreindre les fausses informations partagées par l’ancien (actuel) président américain Donald Trump. En dehors de ces avis favorables, beaucoup de critiques pensent que les entreprises de réseaux sociaux font peu d’actions pour contrecarrer la désinformation. D’ailleurs la récente décision du groupe Méta de mettre fin à son programme fact-checkeurs et de le remplacer par des notes de la communauté pourrait conduire à une nouvelle prolifération des fausses informations sur les plateformes du groupe propriétaire de Facebook, Instagram, Threads, and WhatsApp.
L’éducation aux médias : pratique et perceptions
Former le public sur comment vérifier les contenus est une mesure proactive qui aide à freiner la dissémination de la désinformation en impliquant le plus grand nombre, en plus des professionnels des médias. De cette façon, les professionnels partagent avec le public les procédés de vérification des faits qu’ils utilisent comme une forme d’éducation aux médias. Au Kenya, les organes de presse produisent des vidéos et des tutoriels sur la façon de vérifier les informations diffusées sur internet. Africa Check aussi réalise des productions sur les méthodes de vérification des informations.
Les organisations de fact-checking telles que Africa Check et les organes de presse jouent un rôle crucial non seulement dans la vérification des contenus mais aussi la formation des consommateurs de contenus sur comment vérifier les informations avant de les partager sur les réseaux sociaux ou leurs applications de discussion. Ainsi, les vidéos sur l’éducation aux médias sont traduites en langues locales pour mieux faciliter leur consommation par le public. Elles deviennent accessibles aux créateurs de contenus et aux consommateurs qui ne comprennent pas le français ou l’anglais.
Au Sénégal, Africa Check a noué un partenariat avec une station de radio communautaire pour offrir des formations en éducation aux médias dans une langue locale. L’initiative consiste à vérifier des faits, traduire les articles en langue nationale Wolof et ensuite partager les informations sur WhatsApp. Grâce à ce partenariat avec une radio communautaire locale, les éléments partagés sur WhatsApp sont diffusés auprès des auditeurs pour atteindre un public souvent négligé par les médias mainstream.
Perception sur l’efficacité de l’éducation aux médias
L’éducation aux médias est perçue par les personnes interrogées comme une stratégie proactive qui peut donner au public une certaine autonomie lui permettant d’exercer lui-même son esprit critique et de vérifier lui-même les faits. Promouvoir l’éducation aux media peut renforcer la perspicacité du public, lui permettre de faire du fact-checking, vérifier des contenus, et corriger de fausses informations s’il est motivé à le faire.
Les journalistes et les fact-checkeurs du Kenya et du Sénégal ont exprimé la même perception, en insistant sur l’importance de l’éducation aux médias pour juguler la diffusion des fausses informations. En outre, ils ont insisté sur le fait que l’éducation aux médias n’est pas seulement importante pour le public. Pour réussir dans le combat contre la désinformation, les professionnels des médias ont aussi besoin de formation pour rester au fait des changements technologiques et des stratégies et techniques utilisées par les propagandistes de la désinformation.
La vérification des faits et l’éducation aux médias sont ainsi considérés comme complémentaires et efficaces. Les professionnels des médias suggèrent une approche hybride qui combinerait les deux méthodes de façon à permettre aux consommateurs des médias d’être des usagers critiques, en disposant d’une bonne compréhension des techniques de vérification des faits.
Des limites difficiles à surmonter
Cependant la mise en pratique de ces approches se heurte à plusieurs obstacles, notamment la réticence des responsables gouvernementaux à répondre aux demandes d’information, souvent par crainte d’une vérification critique de leurs déclarations. La diversité culturelle et linguistique en Afrique représente un autre défi pour les professionnels des médias, d’autant que la traduction des contenus vérifiés en langues locales n’est pas chose aisée et requiert beaucoup de temps et des moyens financiers conséquents.
Par ailleurs, au Sénégal et au Kenya, tout comme dans beaucoup de pays d’Afrique, l’éducation aux médias n’est pas encore inscrite dans les programmes d’enseignement. Investir dans des programmes d’éducation aux médias dans les écoles va nécessiter des activités de traduction et d’interprétation, qui somme toute, posent de sérieux défis en termes d’expertise, d’argent et de temps.
En plus de la création des desks de factchecking dans les rédactions et la sensibilisation du public sur les dangers de la désinformation, la promotion de l’éducation aux médias à tous les niveaux (médias, mosquées, églises, entreprises, écoles, universités,) devrait être une priorité absolue.
A cet égard, l’école, à côté des médias, devrait être la pierre angulaire malgré les coûts que cela pourrait induire. A défaut d’en faire un programme d’enseignement en bonne et due forme, l’organisation de semaines des médias à l’école, comme c’est le cas dans des pays comme la France, pourrait constituer un pas décisif dans cette direction.
Par Ibou FALL
LA CASAMANCE, COMBIEN DE VOYOUCRATIES ?
Combien d'accords de paix déjà signé avec le Mfdc ? Soit l’Etat dont la mission est de maintenir l’ordre et la souveraineté dans toute la République, en est capable ; soit il ne l’est pas et doit lâcher les régions qu’il ne peut plus administrer
On efface tout et on recommence ? Le «meilleur Premier ministre de tous les temps», selon son employeur, vient de faire un saut de puce cette semaine à Bissau, pour y signer un énième accord de paix avec l’un des multiples chefs de faction du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), César Atoute Badiate. Une des têtes brûlées de la région qui n’iront sans doute pas en vacances avec le mystérieux Salif Sadio, qui aurait apparemment sept vies… César Atoute Badiate, son lieutenant dans une autre vie, tentera de le dégommer pour prendre le commandement de la faction armée.
Depuis, ils se regardent en chiens de faïence.
Ironie du sort : au même moment, le Général Souleymane Kandé, celui-là même qui nettoie méticuleusement les poches de rébellion il y a de cela peu, est envoyé au placard en Inde.
Des accords de paix, combien l’Etat sénégalais en signe-t-il avec le Mfdc ? Déjà, en 1991, les députés du Pds dont Laye Diop Diatta et Oumar Lamine Badji, conduits par Marcel Bassène, réalisent l’exploit de rencontrer les chefs rebelles dans le maquis et obtiennent qu’ils déposent les armes.
C’est l’hebdomadaire du mardi d’alors, Le Témoin, qui annonce la bonne nouvelle. Ces braves députés prennent contact avec la présidence de la République qui engage des discussions. Marcel Bassène et ses collègues sont en première ligne pour conduire les négociations de paix en Casamance qui finissent par les «Accords de Cacheu».
Un bien pour un mal ? Crise au Pds : son patron, Me Abdoulaye Wade, tout nouveau ministre d’Etat à la présidence de la République, est furieux… Le bénéfice politique de cet exploit lui aurait bien servi à plastronner, parce qu’il ne sert à presque rien à la Présidence. Certes, il a ouvert le bal de la Croix Rouge avec Elisabeth Diouf cette année-là. C’est la rare mission d’importance qu’on lui confie…
Sauf que les députés de Casamance lui gardent alors un chiot de leur chienne. Ils ne sont pas représentés dans le gouvernement alors que si le Pds a une base affective en dehors de Dakar, c’est bien dans le Sud. Ils lui remontent les bretelles à son domicile sans ménagement, en attendant de solder leurs comptes.
Là, c’est fait…
A l’époque, les figures mythiques des combattants du Mfdc sont, entre autres, Sidy Badji et Léopold Diatta. L’Abbé Augustin Diamacoune, figure tutélaire du mouvement indépendantiste, vient de sortir de prison depuis une loi d’amnistie qui les élargit, lui, les combattants du Mfdc et les poseurs de bombes de 1988. L’Histoire nous prouvera que ce n’est pas la meilleure idée du moment…
Des accords de paix qui ne seront jamais respectés, le Mfdc et l’Etat du Sénégal en signent plusieurs : en 1991, 2001, 2022 et, derniers en date, 2025.
La vérité est plus prosaïque : quand des citoyens décident de prendre les armes contre leur pays pour remettre en question l’intégrité territoriale, il n’y a plus lieu de discuter… Soit l’Etat sénégalais dont la mission régalienne est de maintenir l’ordre et la souveraineté dans toute la République, en est capable ; soit il ne l’est pas et doit lâcher les régions qu’il ne peut plus administrer.
Ça ne se discute pas.
De tout temps, la guerre et la zizanie engendrent des économies qui enrichissent les marchands de paix. Des «messieurs Casamance», des repentis au train de vie onéreux, des intermédiaires trop zélés pour être honnêtes, cela fait bien quatre décennies que la rébellion en entretient. Passons sur les droits-de-l’hommiste à l’indignation intéressée, qui se font leur beurre au passage, la zone de non-droit dont l’économie se base sur le trafic de chanvre indien, de bois et de la noix de cajou, les queutards aux droits de cuissages gratuits, le racket légitime au nom de la noble cause…
Lorsque les rebelles déposent les armes en 1991, ça n’a rien à voir avec une brusque prise de conscience : à l’époque, le Général Abdoulaye Dieng, Gouverneur militaire de Ziguinchor, ne fait pas dans le détail. Il pousse le sens de l’honneur jusqu’à emmener avec lui sa famille à son lieu d’affectation, parce que son pari est de faire de la région une zone sûre où ses enfants iront à l’école et les citoyens pourront dormir fenêtres ouvertes… La légende voudrait qu’une importante colonne du Mfdc venant de Guinée-Bissau, coincée lors d’un passage, aurait été décimée par l’Armée sénégalaise, laissant les irrédentistes quasiment sans force.
La médiation des députés du Pds tombe-t-elle alors à pic ? Le Général Dieng, si ça ne tenait qu’à lui, terminerait le travail… Sauf que les députés du Pds s’interposent pour organiser la paix.
On ne saura jamais vraiment quels liens le Pds et le Mfdc tissent contre le régime de Abdou Diouf. Tant que Léopold Sédar Senghor est au pouvoir, Abdoulaye Wade, comme Augustin Diamacoune Senghor, respecte la République. Aucune foucade, pas d’excès.
Est-ce le placide Diouf qui les énerve ?
En 1993, en pleine Présidentielle, alors que la rébellion casamançaise fait des siennes, le candidat Wade déclare urbi et orbi que pour battre campagne dans le Sud, il n’a pas besoin de protection, il y est chez lui. Certes, sa mère, Aïda Dabo, est du Sud. Mais ça ne suffit pas à expliquer qu’il s’y sente autant en confiance…
Les années Wade ne serviront à rien : des mallettes distribuées à quelques repentis ne font pas la paix. C’est vrai, un général bissau-guinéen trop zélé à soutenir la rébellion meurt de manière bizarre dans le maquis, et les rebelles doivent déménager chez Yahya Jammeh pour maintenir leur standing.
S’il faut retenir de la gouvernance de Macky Sall un bilan positif, c’est bien sûr la question casamançaise.
Chapeau bas, de mauvaise grâce…
La première mesure stratégique aura été de virer Yahya Jammeh du pouvoir en Gambie, dès 2016. Puis, le pont de Farafégny qui rend le sentiment d’appartenance à une même Nation aux deux parties : venir du Nord et partir du Sud deviennent si faciles…
Confier au p’tit Colonel Souleymane Kandé la Zone Sud, ce n’était pas con ? Un homme d’honneur qui fait le ménage et nettoie les poches les plus sordides de cette voyoucratie : grottes de munitions, plantations de chanvre indien, trafic de bois… Rien n’échappe à la rigueur de ces gens d’armes qui réduisent à néant cette délinquance institutionnalisée sous le vocable de rébellion.
Lorsque le pétrole et le gaz sénégalais passent de simples vues de l’esprit à projets nationaux, dans le monde, ça donne des idées. La rébellion casamançaise, par exemple, pourrait servir de Cheval de Troie, en plus de quelque politicien aussi exalté que cupide, capable de drainer du monde. Pourquoi négocier avec des gens qui ont pris les armes contre leur pays ? Les traitres, on les passe par les armes.
par Thierno Guèye
APPEL À LA DÉSOBÉISSANCE SYNDICALE
EXCLUSIF SENEPLUS - De quelle légitimité peuvent se prévaloir ces leaders syndicaux pour nous inviter à suivre des mots d’ordre de grève dans le contexte manifeste de crise actuel dont la gravité est sans précédent ?
Alors que notre pays est à l'agonie, ceux qui devaient se retrousser les manches et se serrer la ceinture pour le tirer d'affaire ont pris la décision ferme de l'achever, malgré le diagnostic sans appel de ses médecins.
Dans le contexte critique actuel, qu’aucun leader syndical, quel que soit son bord, n’ait l’outrecuidance de nous demander de faire grève après le carnage financier que vient de subir le Sénégal sous le régime de Macky Sall et la profonde crise démocratique que nous venons de traverser.
Notre conviction profonde est que l’ex-président avait un plan machiavélique de déstabilisation du Sénégal en vue de confisquer le pouvoir en dépit de la lettre et de l’esprit de la Constitution. À cette fin, la manipulation éhontée des syndicats ne fut qu'un volet, après l'achat d'armes dissimulées à hauteur de plusieurs dizaines de milliards, si l'on en croit les révélations du quotidien Yoor-Yoor (26 janvier 2023, N° 00061) et d’autres organes de presse de la place à ce sujet. À cela s’ajoute la corruption de fonctionnaires partisans nommés à des postes stratégiques dans les appareils exécutifs et judiciaires. L’ex-président Sall est certes parti, mais les effets de son projet funeste continuent à nous hanter tout en faisant des ravages dans tous les secteurs de la vie socio-économique. Si nous ne sommes pas vigilants, il réussira à déstabiliser notre pays en tirant les ficelles de l'extérieur. Seuls notre loyauté au Sénégal et notre engagement pour sa libération permettront de déjouer ce plan machiavélique et hautement criminel. Notre pays va mal ! Notre pays est au bord du gouffre ! Nul ne saurait l'ignorer.
Alors que nous venons d’apprendre que notre pays, après avoir subi des assauts d’une violence inouïe de la part de Macky Sall et ses acolytes, est au bord de la banqueroute, des camarades syndicalistes se permettent d’inviter nos collègues à la grève, comme si le rapport de la Cour des comptes et ceux des autres corps de contrôle n’avaient jamais existé. C’est à se demander si ces agitateurs sont des Sénégalais et s’ils sont au courant des jours sombres que notre pays est en train de traverser.
De quelle légitimité peuvent se prévaloir ces leaders syndicaux pour nous inviter à suivre des mots d’ordre de grève dans le contexte manifeste de crise actuel dont la gravité est sans précédent ?
Ces leaders syndicaux restés bruyamment silencieux quand le peuple avait besoin de les entendre sur les injustices et les exactions qu’il subissait. Ces syndicats universitaires qui ont fait preuve de lâcheté, de fourberie et de déloyauté vis-à-vis de nos collègues et de nos étudiants. Où étaient-ils lorsque l’ex-Recteur Amadou Aly Mbaye et ses acolytes au sein de l’université de Dakar ont pris la décision ignoble de fermer l’université Cheikh Anta Diop pendant l’équivalent d’une année scolaire pour des raisons politiques ? Où étaient-ils lorsque la plupart des organisations de la société civile rejoignaient le F24 pour défendre la démocratie et sauver notre pays des griffes des prédateurs criminels qui l’avaient pris en otage ?
Ces leaders syndicaux, après leur silence infâme lors des évènements qui se sont produits de 2021 à 2024, ont subitement retrouvé un « courage » après l’heure et une « combattivité » sans adversaire dans un contexte où tout danger est écarté et la page des exactions du régime de Macky Sall est définitivement tournée. Leur lâcheté et leur mauvaise foi nous sont insupportables !
Notre exaspération face à l’inertie de nos syndicats était telle que des collègues du Sudes de la Fastef alliés à d’autres camarades du Sudes et du Saes, après avoir interpellé nos secrétaires généraux respectifs en vain, avaient commencé à entreprendre des démarches, et s’étaient même réunis pour créer un troisième syndicat dissident, dans le but de déjouer l’inaction complice de nos centrales respectives. Malheureusement, cette initiative n’avait pas abouti, mais nous invitons les camarades qui avaient été à l’origine de cette idée à se joindre à nous afin de la relancer, en vue de nous sortir des manipulations récurrentes de ces vampires du syndicalisme, collabos du régime déchu, mercenaires et porte-étendards de la nouvelle opposition, qui ne vivent que du sang et de la sueur de leurs pauvres collègues. Quelle infamie !
Nous espérons que cette initiative aboutisse enfin, en vue de contrecarrer les manipulations grossières et antipatriotiques de nos leaders syndicaux actuels. En effet, ces derniers ne peuvent plus nous représenter légitimement, en aucune façon, particulièrement après leur posture dans ce contexte de crise sans précédent qui malmène les fondements mêmes de notre Nation.
Dans les circonstances actuelles, que personne ne compte sur nous pour servir des intérêts occultes qui ne sont pas ceux de notre peuple meurtri, fussent-ils ceux de nos corporations. Les revendications agitées actuellement, quelle que soit leur légitimité, ne sauraient justifier les actions radicales auxquelles nous convient ces sombres syndicalistes, lâches, politiciens encagoulés (mais démasqués) et manipulateurs (mais démasqués). Nous désavouons leurs stratégies de la terre brûlée !
Le Sénégal a besoin de nous et de notre loyauté inconditionnelle. Que ceux qui veulent participer au salut de notre pays se lèvent et combattent fermement ces leaders malavisés, quelle que soit leur corporation, pour mettre fin à cette imposture cynique qui n’a que trop duré !
La désobéissance syndicale et la mobilisation pour le Sénégal, voilà ce à quoi nous appelons tous les citoyens soucieux de l’avenir de ce pays afin que le jub, jubal, jubbanti ne soit pas qu’un vulgaire slogan désubstantialisé, afin que le jub, jubal, jubbanti ne soit pas qu'une simple profession de foi, afin que le jub, jubal, jubbanti deviennent le nouveau visage tant attendu du Sénégal.
Dr Thierno Guèye est Enseignant-chercheur/Formateur à l’Ucad, Syndicaliste .