SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
22 novembre 2024
Politique
LE PARI PERDU DE BARTH À DAKAR
Le maire de la capitale, qui rêvait de transformer cette élection en tremplin vers 2029, a vu sa stratégie voler en éclats face à la vague Pastef. Sa déroute, jusqu'à son propre bureau de vote, illustre la consolidation du pouvoir dans la région
Barth’ a perdu son pari dakarois. Le leader de Samm sa kaddu, qui a joué à imposer un duel à Sonko, a été battu dans la capitale. Même dans son propre bureau de vote ! C’est une leçon électorale pour le maire de Dakar qui voulait transformer l’essai de ces Législatives pour les prochaines locales, et aussi sans doute pour la présidentielle de 2029. Mais, toutes les stratégies qu’il a échafaudées ont volé en éclats après le triomphe de Sonko dans toute la région de Dakar. Surtout qu’il voulait construire son ascension à partir de Dakar pour aller à la conquête du reste du pays.
Il devra repasser. De toute façon, cela aurait été une surprise pour les suiveurs de l’actualité que Pastef perde ces élections 8 mois après l’élection triomphale de Diomaye.
La tradition a été respectée. Les élections législatives qui suivent généralement la présidentielle, sont toutes gagnées par le parti au pouvoir. Celles de ce 17 novembre n’ont pas dérogé à la règle. Pastef semble, au regard des tendances, gagner dans les grandes villes du Centre, rafler la mise au Sud, perdre le Nord, principalement le Fouta. Et mettre la main sur Dakar. En attendant la confirmation des résultats, Pastef peut se targuer d’avoir fait une bonne opération. En effet, à l’annonce des élections, ils n’étaient pas nombreux ces observateurs qui pouvaient miser sur une défaite de Pastef. Les enjeux étaient ailleurs. S’il était certain que Sonko allait rafler le Sud, des doutes subsistaient dans le Centre du pays, à Dakar et sa banlieue.
Alioune Sall, qui a tourné le dos à son frère pour s’allier avec Amadou Ba, n’avait pratiquement pas de concurrent à Guédiawaye. Pikine, qui d’ordinaire était un bastion du Pds, semble confirmer son choix de la présidentielle. Avec la sortie de Cheikh Oumar Diagne, Touba semblait vaciller. Tous ces départements ont basculé, confirmant ainsi leur choix à la dernière Présidentielle. S’il y avait vraiment un département qui nourrissait l’espoir des opposants, c’était Dakar. Son maire y jouait sa survie politique par procuration. En effet, Barthélemy Dias, en dirigeant la liste nationale de Samm sa kaddu, a soigneusement évité un combat contre son adjoint, Abass Fall de Pastef. Pour autant, le leader des «Patriotes» a les faveurs des tendances. Si elles se confirment, Abass Fall peut légitimement lorgner le fauteuil de Dakar dans 2 ans lors des locales.
LA CENA SALUE LE COMPORTEMENT EXEMPLAIRE DES CITOYENS
La Commission électorale nationale autonome (CENA) salue ”le comportement exemplaire des citoyens” qui ”ont mis en avant leur esprit civique” lors des élections législatives anticipées de dimanche.
Dakar, 18 nov (APS) – La Commission électorale nationale autonome (CENA) salue ”le comportement exemplaire des citoyens” qui ”ont mis en avant leur esprit civique” lors des élections législatives anticipées de dimanche.
Quelque 7.300.000 Sénégalais étaient appelés aux urnes dimanche pour élire 165 députés, dont 15 chargés de représenter les citoyens du pays vivant à l’étranger.
La liste de Pastef, dirigée par le Premier ministre Ousmane Sonko, a obtenu une large majorité de sièges à l’Assemblée nationale, selon les résultats partiels et provisoires publiés par les bureaux de vote au Sénégal et à l’étranger.
Dans la plupart des résultats aux élections législatives anticipées de ce dimanche, le parti du chef du gouvernement est souvent suivi des coalitions Sàmm Sa Kàddu et Takku Wallu Sénégal, respectivement dirigées par le maire de Dakar, Barthélémy Dias, et l’ex-président de la République, Macky Sall.
La liste Jàmm Ak Njariñ de l’ancien Premier ministre Amadou Ba joue aussi les seconds rôles aux côtés de celles de MM. Dias et Sall.
Des leaders de l’opposition ont reconnu la victoire de Pastef et ont félicité son leader et ses candidats.
Dans un communiqué transmis à l’APS, l’organe de supervision des élections ”rend un hommage appuyé aux forces de défense et de sécurité, dont la présence était visible dans tous les lieux de vote’’.
Selon la CENA, les élections législatives anticipées ”se sont bien déroulées sur l’ensemble du territoire national et à l’étranger, dans une atmosphère calme, pacifique et sereine”.
Elle souligne que ”de l’ouverture des bureaux, à 8 h, à leur fermeture, aux alentours de 18 h, les citoyens se sont acquittés de leur droit de vote, confirmant une nouvelle fois l’attachement du Sénégal et des Sénégalais aux principes de la démocratie”.
La CENA rend également hommage aux différents candidats au scrutin, leurs partisans et leurs mandataires pour ”le civisme et l’esprit démocratique dont ils ont fait montre dans les bureaux de vote, permettant un comptage transparent des suffrages dans la sérénité”.
Elle salue enfin ”les missions d’observation électorale nationales et étrangères qui ont déployé sur le terrain des agents engagés et vigilants dont les constats confirment l’ancrage du Sénégal dans le camp des démocraties majeures”.
MACKY SALL FÉLICITE PASTEF
La tête de liste de la coalition Takku-Wallu Sénégal a félicité le parti Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) pour sa victoire aux élections législatives anticipées de dimanche...
La tête de liste de la coalition Takku-Wallu Sénégal a félicité le parti Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) pour sa victoire aux élections législatives anticipées de dimanche, soulignant que ‘’le peuple souverain s’est clairement exprimé’’.
‘’Je voudrais, en mon nom personnel et en celui des leaders et membres de la Coalition Takku Wallu Sénégal, féliciter la Coalition Pastef pour sa victoire à l’issue des élections législatives de ce dimanche 17 novembre 2024’’, a écrit Macky Sall sur son compte X.
L’ancien président de la République qui n’est pas rentré au Sénégal pour battre campagne avec ses troupes a souligné que ‘’le peuple souverain s’est clairement exprimé, confirmant une fois de plus sa maturité politique, son attachement aux valeurs républicaines et à la démocratie, socles de notre cohésion sociale et de notre vivre-ensemble’’.
Il a également remercié tous ses compatriotes ‘’sans exclusive, hommes, femmes, jeunes des villes, du monde rural et de la diaspora’’, et exprimé sa ‘’profonde gratitude à tous ceux qui ont bien voulu porter leurs suffrages sur la liste’’ qu’il a eu ‘’l’honneur de diriger’’.
‘’Nous restons un grand peuple, une grande nation. Nous sommes parce que le Sénégal est. Merci à tous. Que Dieu bénisse le Sénégal’’, a-t-il conclu
MACKY SALL DÉTRÔNE AMADOU BA
L'ex-Premier ministre n’est pas parvenu à conserver son titre de chef de l’opposition. Il ne sera pas, non plus, chef de l’opposition parlementaire. La faute à son ancien patron
Amadou Ba n’est pas parvenu à conserver son titre de chef de l’opposition. Il ne sera pas, non plus, chef de l’opposition parlementaire. La faute à son ancien patron. L’ancien président Macky Sall a pesé de tout son poids sur le scrutin de ce dimanche. Rien que pour ne pas se faire dribbler, ne pas se faire doubler par son ancien poulain et ex-Premier ministre. Tout était clair dans la tête de pas mal d’observateurs que l’ancien chef de l’Etat, ancien patron de la défunte Coalition Benno bokk yaakaar (Bby), en a toujours après le candidat malheureux de l’élection présidentielle, qu’il avait lui-même choisi avant de le combattre activement pour le conduire à la débâcle le dimanche 24 mars dernier.
Depuis lors, Macky Sall n’en démord pas. Il n’a pas, donc, lâché le morceau. Réputé être un leader politique opiniâtre, très obstiné et très coriace quand il s’agit pour lui de mener un combat politique, il s’est affiché devant le camp d’en face, incarné par le leader de la «Nouvelle Responsabilité». Ne laissant aucune place au dialogue, encore moins aux concessions, Macky Sall a posé des actes. Cela transparaît da ns sa contestation de la liste de «l’intercoalition» mise en place à Guédiawaye et composée de son jeune frère Aliou Sall, ancien maire de la ville du même nom et son ancienne ministre de la Jeunesse, Néné Fatoumata Tall. A cette dernière, le président du parti Alliance pour la République dont elle est membre de la première heure, déniera sa qualité de responsable de son organisation politique. L’ancien Président Macky Sall poussera même le bouchon plus loin, en donnant une consigne à ses militants et à ses sympathisants. Celle-ci consistait, ni plus ni moins, à ne pas exprimer, au soir du dimanche 17 novembre, son devoir citoyen devant l’urne en faveur de cette liste dont les composantes proviennent des coalitions «Jamm ak njariñ» et «Takku Wallu Senegaal». Conséquence : la mayonnaise a apparemment pris et Macky Sall a obtenu ce qu’il a visé et voulu. Il a battu campagne et fait battre campagne contre… son frangin
Les élections législatives sont des élections majeures. Elles entrent dans l’histoire politique. C’est une autre étape dans la carrière politique de l’ancien Premier ministre. Au point de susciter en lui pas mal d’interrogations. A l’heure du bilan de cette étape de son parcours politique parsemé d’embûches et de crocs-en-jambe, Amadou Ba est appelé à se reconstruire. A se repositionner afin d’arriver à se tailler une place de choix dans un landerneau politique en reconfiguration continue.
La marche risque d’être longue. L’heure des grands travaux a sonné pour le leader de la «Nouvelle Responsabilité». Comment se défaire d’un adversaire aussi coriace que Macky Sall. Un adversaire politique qui n’avance pas masqué. Qui n’a pas encore rangé les armes. Puisqu’en perspective des prochaines élections locales, il n’est pas exclu que l’ancien locataire du palais de la République revienne à la charge par la magie d’un autre plan «mackyavelique» dont il a le secret. Macky Sall n’a pas été Maoïste pour rien. Pour les observateurs qui l’oublieraient, l’ancien maire de Fatick a tété au biberon d’And-jëf/Mrdn, devenu Aj/Pads sous la férule de son ancien allié, Landing Savané, avant de rejoindre la demeure politique du pape du Sopi, Me Abdoulaye Wade. Tout ce parcours formate l’ancien gauchiste devenu libéral et forge son caractère politique. Au point de le pousser à parvenir à priver celui qu’il avait «invité» au «banquet» de l’Alliance pour la République, d’un probable, qui sait, «Grand soir», sept mois après son départ mouvementé de l’Etat.
Avec sa performance d’hier, Macky Sall a les moyens de se repositionner sur l’échiquier politique. N’étant pas le maître du jeu, il pourra se montrer incontournable et «intraitable» pour d’éventuelles alliances à nouer en vue des prochaines joutes électorales.
TAKKU WALLU SÉNÉGAL REMPORTE LE SCRUTIN DANS LA COMMUNE DE RANÉROU
La coalition Takku Wallu Sénégal dirigée par l’ancien chef de l’Etat Macky Sall a remporté dimanche, les élections législatives dans les centres de vote de la commune de Ranérou (nord) avec 993 voix, selon les résultats provisoires issus du dépouillement
La coalition Takku Wallu Sénégal dirigée par l’ancien chef de l’Etat Macky Sall a remporté, dimanche, les élections législatives dans les centres de vote de la commune de Ranérou (nord) avec 993 voix, selon les résultats provisoires issus du dépouillement des urnes.
Takku-Wallu Sénégal devance le parti Pastef, qui a obtenu 475 bulletins favorables. La liste Jamm ak Njerin arrive en troisème position avec seulement 78 voix.
DEFAITE DE L’INTER-COALITION : UNE OPTION TARDIVE NON PAYANTE
La mise en place tardive d’une inter-coalition n’a pas produit les effets escomptés pour l’opposition, lors du scrutin d’hier. Les électeurs n’ont pas été séduits par cette offre électorale.
La mise en place tardive d’une inter-coalition n’a pas produit les effets escomptés pour l’opposition, lors du scrutin d’hier. Les électeurs n’ont pas été séduits par cette offre électorale.
Il faudra revoir sa copie. Tel pourrait être l’un des principaux enseignements que l’opposition doit tirer des résultats du scrutin des Législatives anticipées de ce dimanche 17 novembre. Sept mois après l’élection présidentielle, chercher à se positionner au-devant de la scène politique nationale n’a pas été une démarche couronnée de succès politique. La mise en place d’une inter-coalition, composée des trois (3) plus grandes coalitions électorales en lice pour la course à l’Assemblée nationale, «Takku Wallu Senegaal», «Jamm ak njariñ» et «Samm sa kaddu», n’a pas séduit l’électorat qui s’est détourné de cette offre électorale.
Une des principales fautes de ces trois regroupements de partis politiques, mouvements et autres acteurs évoluant sur la scène publique a été d’avoir mûri très tardivement cette démarche politique. Soit dit en passant, celle-ci a été expérimenté pour la première fois dans les mœurs politiques par les défuntes coalitions de l’opposition d’alors : Yewwi askan wi (Yaw) et Wallu. Ce qui leur avait permis, lors des élections législatives de 2022, d’avoir un nombre de quatre-vingt députés pour les besoins de la XIVème législature, enterrée par le Président Bassirou Diomaye Faye avec la dissolution à laquelle il a procédé le jeudi 12 septembre dernier, après deux ans de mandature de la Représentation nationale.
Penser rejoindre la Place Soweto en rangs serrés devait être un plan habile concocté assez tôt par les stratèges politiques des adversaires de la coalition au pouvoir pour espérer récolter un nombre important de sièges à l’Hémicycle.
Echouer, hier, à imposer la cohabitation au régime du Président Bassirou Diomaye va ainsi les rendre groggy.
Les choix tardifs de l’opposition pour une unité d’action électorale n’ont manifestement pas séduit la majorité des électeurs ou un nombre important d’entre eux. Avoir changé sa tactique au début du processus électoral -pré-campagne et campagne électorale- a fini d’être contre-productif pour les adeptes de cette option politique. Il faudra donc repasser pour une nouvelle démarche électoraliste… victorieuse.
par Mohamed Gueye
OBSERVATIONS SUR LE TRIOMPHE DE SONKO
Plus qu’à la présidentielle de mars 2024, Ousmane Sonko a fait de la victoire de son parti un triomphe personnel. Il a voulu réaffirmer sa forte emprise sur l’appareil de son parti et ses orientations, mais aussi le caractère incontournable des décisions
Plus qu’à la présidentielle de mars 2024, Ousmane Sonko a fait de la victoire de son parti un triomphe personnel. Il a voulu réaffirmer sa forte emprise sur l’appareil de son parti et ses orientations, mais aussi le caractère incontournable des décisions qui vont influer sur nos vies pendant au moins les cinq prochaines années, sinon plus.
On peut dire que le triomphe est sans conteste. Les résultats provisoires des élections législatives publiés hier, à la fermeture des bureaux de vote, indiquent une victoire écrasante du parti dirigé par le Premier ministre Ousmane Sonko. Pastef/Les Patriotes n’a, semble-t-il, fait nulle concession à ses adversaires dans la lutte pour la conquête du Parlement. Aucun département ne semble avoir échappé à la boulimie de M. Sonko et de ses amis. Et s’il est encore très tôt pour faire des prévisions, on pourrait néanmoins augurer qu’au moins 100 députés vont être aux ordres du Premier ministre. Et si cela se réalise, on peut faire plusieurs observations à partir de la nouvelle configuration de la chambre basse.
Sonko «encombrant» mais plus inutile
La première observation est que Ousmane Sonko a fini d’établir sa totale hégémonie sur la scène politique sénégalaise. Pour notre bien ou le mal de notre pays, rien ne pourra plus se faire dorénavant sans son sceau. Et le triomphe électoral qu’il a ainsi dessiné, lui donne le loisir de décider de son avenir proche ou lointain. Il pourrait ainsi, si telle était sa volonté, quitter la Primature, où il vit avec l’incertitude d’un sort lié à un décret -chose que certains observateurs jugent irréalisable, mais on ne sait jamais…- pour se réfugier au Perchoir de l’Assemblée, et occuper de facto la place de la deuxième personnalité de l’Etat. Ce poste stratégique ne diminuerait en rien l’influence qu’il exerce sur le gouvernement dont la plupart des ministres, sinon tous, sont ses obligés.
L’autre position, pas si inconfortable que cela, serait de mettre à la présidence de l’Assemblée, un de ses hommes liges, à travers lequel il pourra contrôler l’action de «ses» députés, et continuer à maintenir sa proximité physique avec le Président Bassirou Diomaye Faye dont on a tendance à croire qu’il ne se contente pas de lui murmurer à l’oreille, mais plutôt qu’il lui chuchote ses actions.
La seconde observation est que le Peuple sénégalais est resté constant et logique dans ses choix. Malgré une campagne dure et impitoyable, où les acteurs ne se sont pas fait de cadeaux, où ses adversaires ont dévoilé une face des moins reluisantes de Ousmane Sonko, les électeurs n’ont pas voulu se dédire et lui ont renouvelé la confiance qu’ils lui avaient portée en mars 2024. Ils n’ont pas voulu «lui donner la tête et retirer la langue», comme on dit. Et cela est une leçon.
Ses détracteurs disaient qu’il fallait libérer le Président Faye de «l’emprise néfaste de Ousmane Sonko». En privant ce dernier de la majorité à l’Assemblée, on réduisait ce dernier à son rôle préféré d’opposant au pouvoir, qu’il semble affectionner. En plus de créer un équilibre institutionnel, on rognait les ailes au leader de Pastef, en permettant au chef de l’Etat de prendre des décisions sans avoir à s’en remettre à son Premier ministre. Juste ou pas, ce calcul est totalement remis en question. Les Sénégalais ont décidé de donner à Ousmane Sonko les moyens de mener sa politique, pendant les 5 années à venir, avec toutes les conséquences que cela va emporter dont la première est que le duo Sonko mooy Diomaye reste soudé. Et ses opposants devront avaler la couleuvre de voir aux côtés de Diomaye, un Sonko, toujours «encombrant», mais pas «inutile» pour ses amis.
Macky et ses comptes avec Amadou Ba
L’autre observation est que, dans l’opposition, la bataille du leadership reste encore d’actualité. Les 35% récoltés par Amadou Ba à la Présidentielle de mars ont été balayés et le jeu est refait. Tel que les tendances se dessinaient dans la soirée d’hier, il n’était pas certain que sa Coalition Jamm ak njariñ se retrouve à la seconde position, derrière Pastef. Dans beaucoup de localités, elle a été fortement chahutée par les listes de Samm sa kaddu dirigée par Barthélemy Dias et Takku Wallu conduite par Macky Sall. Ainsi, à Fatick et dans le Fouta, Macky Sall vient largement en tête pour l’opposition, devançant même Pastef dans certains centres de vote.
Cette configuration donne raison à ceux qui ont pensé que Macky Sall n’avait qu’une seule ambition en se portant à la tête d’une liste électorale concurrente de celle de Amadou Ba, c’était de régler définitivement les comptes d’une querelle née de la dernière Présidentielle, et incidemment, tenter de casser définitivement les ambitions politiques de son dernier Premier ministre. Il faudra à ce dernier faire preuve d’autant ou plus d’agilité politique pour, d’abord, ne pas mourir politiquement, mais surtout, pouvoir rebondir avec force malgré les deux revers qu’il vient de subir.Il doit surtout tenir compte du fait que l’arène politique va se renouveler grandement d’ici les cinq prochaines années, quand les électeurs seront à nouveau appelés à exprimer leurs suffrages.
Barth’ dans le flou
La même observation est valable pour le maire de la Ville de Dakar, Barthélemy Toye Dias. Sèchement battu dans le département de Dakar et jusque dans son bureau de vote, il a encore été une fois victime de la «sonkomania» ambiante. La première fois, à la Présidentielle, il n’a pas été en mesure d’aider son champion, Khalifa Sall, dont il était le directeur de campagne, à résister à la déferlante de «Sonko mooy Diomaye». Comme beaucoup, il a pensé que les électeurs, en voulant en finir avec Macky Sall, ont opté pour un «vote utile», qui écartait le leader de Taxawu Senegaal.
Mais hier, c’était à lui de relever le gant, d’autant plus qu’entre Sonko et lui, la rivalité transcendait dorénavant les clivages politiques. Entre eux, l’affrontement tournait à la violence physique, et le fils de Jean-Paul Dias avait à cœur de démontrer qu’il n’était pas redevable à Pastef d’être devenu maire de la capitale. Sa déroute électorale doit le pousser à revoir de manière urgente sa stratégie politique ; car c’est pour lui une question de vie ou de mort.
S’il a pu se présenter aux élections malgré sa condamnation dans la mort de Ndiaga Diouf, il n’est pas dit que ses anciens amis, qui cherchent à le détrôner de la mairie de Dakar, ne vont pas trouver des artifices pour le faire tomber. Disciple de Khalifa Sall, les tribulations de ce dernier sous Macky Sall ne doivent pas avoir été effacées de sa mémoire. Et l’histoire pourrait se répéter pour lui. Plus grave encore, pour lui qui a le regard à l’Horizon 2029, une majorité parlementaire de Pastef ne lui chercherait-elle pas des cafards pour l’éliminer de la course à cette échéance, mettant ainsi prématurément fin à une carrière politique qui jusque-là s’annonçait prometteuse ?
Macky Sall a eu raison pour le parrainage
Par ailleurs, la forte déroute des nombreuses autres listes démontre une nouvelle fois qu’il est plus que temps de réformer les institutions de ce pays. On ne peut comprendre qu’avec plus de 300 partis officiellement reconnus, il n’y en ait pas un qui soit en mesure de s’aventurer seul à demander leurs suffrages aux électeurs. Même Ousmane Sonko a dû massivement recourir à des transhumants, race qu’il a toujours honnie, pour s’assurer une victoire dans des zones où son implantation n’était pas profonde. Pire, avec la suspension du système de parrainage, nous nous sommes retrouvés obligés de choisir entre 41 listes. Le plus drôle étant que même les mandataires dans les bureaux de vote comprenaient que personne ne pouvait tenir les 41 bulletins dans ses mains, et donnaient l’option de ne prendre que 5 bulletins. D’ailleurs, certaines listes, en dehors des inter-coalitions, n’avaient même pas de mandataires dans certains bureaux.
A ces 41 listes pour lesquelles on a confectionné des listes, accordé du temps d’antenne et accordé des équipes de journalistes, combien auront obtenu 0, 5% des suffrages ? La caution qu’ils ont payée n’a pu couvrir les dépenses occasionnées pour leur donner la parole, quand certains véhiculaient des thèses xénophobes et particulièrement dangereuses pour la cohésion nationale. Il n’est pas moralement et matériellement acceptable que des choses de ce genre continuent d’élection en élection. Il est plus que temps de revoir le mode de sélection des candidats aux suffrages des Sénégalais. Et hormis cela, voir si les partis qui n’osent pas se présenter à des élections sous leur propre bannière méritent encore longtemps de concourir aux suffrages de leurs concitoyens, et d’abuser des ressources des contribuables. Le parrainage imposé en son temps par Macky Sall, quoiqu’imparfait, avait eu le mérite de nous éviter ce genre de spectacle décourageant pour une démocratie qui a besoin de se renforcer.
Par Hamidou ANNE
LE PEN, TRUMP, SONKO ET LEURS JUGES
Les populistes n’invoquent la Justice que quand celle-ci est en indélicatesse avec d’autres citoyens, leurs adversaires
J’ai suivi avec grand intérêt, ces derniers jours, le procès de Marine Le Pen et ses collaborateurs au sujet de délits supposés d’emplois fictifs au Parlement européen. En effet, il est reproché à la cheffe du parti français d’Extrême-droite, un système organisé de fraude qui faisait supporter les salaires de ses collaborateurs politiques par le Parlement européen. Le préjudice constaté est de 7 millions d’euros. En attendant la peine, les procureurs ont requis cinq ans de prison, ainsi que cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire. Ceci signifie que si les juges suivent les procureurs, elle serait inéligible pour la présidentielle 2027 dont elle est la grandissime favorite. L’intéressée a réagi, arguant «une atteinte à la démocratie», l’organisation de sa «mort politique», l’inféodation du Parquet à l’Exécutif, etc.
Elle dénonce une Justice «aux ordres», qui voulait l’empêcher de concourir au suffrage universel. «Mais, au-delà de moi, c’est le peuple français qui, en réalité, est empêché (…) de voter pour la candidate qu’il souhaite», ajoute-t-elle. J’ai tout de suite reconnu le refrain de la chanson de la victime brimée soi-disant par le «système». Marine Le Pen ainsi que tous les populistes usent et abusent de la rhétorique du complot quand ils sont devant la Justice et risquent une condamnation.
Après son départ du pouvoir en 2020, Donald Trump a fait l’objet de dizaines d’accusations. Il a été condamné pour certaines. Naturellement, le truculent président américain a lui aussi accusé les juges, arguant que les procès étaient «truqués» et que les juges étaient «corrompus». Aucune remise en cause, aucune tenue, mais l’usage de la défense de rupture, avec toujours en première ligne le prétexte d’un système inique qui voudrait annihiler la voix du peuple. Trump avait dit à l’issue d’une condamnation que le vrai procès sera pour le 5 novembre, avec le jugement du peuple souverain. Il faut reconnaître qu’il a remporté celui-là, malgré les accusations nombreuses dont certaines très graves, malgré l’attaque du Capitole du 6 janvier et malgré les propos hallucinants tenus quasi quotidiennement contre les magistrats, l’Administration, ses adversaires et toutes celles et tous ceux qui refusaient de se plier à ses désidératas.
La logique populiste est implacable, et elle est éculée. Ils ne sont coupables de rien et sont victimes de tout le monde. Tout le «système» est mis en place pour freiner leur montée politique et les combattre par l’usage détourné des lois. Au Sénégal, ce scénario a été éprouvé pendant trois années de procédures judiciaires, qui ont visé un homme dont l’irresponsabilité n’a pas de limite. Si Marine Le Pen, par exemple, fait l’objet d’accusations concernant l’usage de fonds publics au préjudice de l’Europe, notre bonhomme lui a été sous le coup d’affaires toutes privées.
D’abord visé par une plainte au pénal d’une compatriote, il a été sommé devant un tribunal d’apporter les preuves de ses accusations. Dans les deux cas, il a été condamné à la suite d’accusations privées. Dans les deux cas, il a refusé de faire face à ses accusateurs. Dans les deux cas, il a refusé de faire face à la Justice de son pays. Ses arguments, comme ceux de Trump et Le Pen aujourd’hui, ont consisté à invoquer la rhétorique du complot, de l’abus de pouvoir et de la volonté de l’empêcher d’être candidat. Il a appelé au «Mortal Kombat» pour ne pas se présenter devant un juge, qualifié de partisan, avant que son collègue et successeur, lui, ne reçoive le sobriquet de «lâche». L’histoire est facétieuse : celui qui disait détenir toutes les preuves du complot qui le visait, en huit mois d’exercice, n’en a sorti aucune. Au contraire, les rodomontades, les menaces, les accusations, le bruit permanent sont notre quotidien avec lui depuis le 2 avril 2024. Celles et ceux qu’il accusait de complot vaquent calmement à leurs occupations.
Les populistes n’invoquent la Justice que quand celle-ci est en indélicatesse avec d’autres citoyens, leurs adversaires. De vieilles vidéos de Mme Le Pen sont ressorties, où elle accusait toute la classe politique française de «piquer dans les caisses», sauf son parti. Trump a accusé les démocrates de toutes sortes de forfaits dont les plus farfelus, sans jamais apporter la moindre preuve. Notre bonhomme, lui, est coutumier des déclarations grossières et outrageuses, et a usé de la rhétorique du «système» du «Tous pourris !», mais se montre si léger quand il s’agit d’éclairer l’opinion sur les scandales présumés de l’Onas et de l’Aser. Pour Trump, Le Pen ou Sonko, la logique est la même : nous sommes victimes du système quand nous sommes appelés à la barre, mais dans l’exercice de nos responsabilités publiques, nous n’allons rendre aucun compte parce qu’au fond, nous sommes la Justice. Ce qui change seulement, c’est qu’aux Etats-Unis et en France, la presse, la Société civile et les intellectuels sont en général attentifs au devoir de responsabilité qui leur incombe
Chez nous, le larbinisme, la couardise et l’opportunisme ont élu domicile dans ces milieux, et ce depuis longtemps.
LE PASTEF FAIT CARTON PLEIN
Les premières projections donnent 129 sièges sur 165 au parti présidentiel. L'opposition, avec seulement 20 sièges répartis entre Samm Sa Kaadu (5) et Takku Wallu (15), se trouve réduite à sa plus simple expression, en attendant le reste des répartitions
(SenePlus) - Selon les projections du statisticien Mamadou Yauck, publiées dimanche 17 novembre à minuit, le Pastef obtient une majorité absolue historique à l'Assemblée nationale. Le parti au pouvoir raflerait 129 sièges sur les 165 à pourvoir, soit largement au-dessus de la majorité absolue fixée à 83 députés.
Ces premières estimations révèlent un véritable raz-de-marée en faveur du parti du Premier ministre Ousmane Sonko, tandis que l'opposition se trouve fortement fragmentée. La coalition Samm Sa Kaadu n'obtiendrait que 5 sièges, et Takku Wallu 15 sièges. Les 16 sièges restants demeurent encore à pourvoir.
Face à l'ampleur de ces résultats provisoires, les principales forces d'opposition ont rapidement concédé leur défaite. La coalition Samm Sa Kaadu et l'ancien Premier ministre Amadou Ba ont admis leur revers quelques heures seulement après la fermeture des bureaux de vote.
Autre enseignement de ce scrutin : la participation s'établit à 49,72%, selon les projections de Mamadou Yauck. Un taux qui témoigne d'une mobilisation importante des électeurs pour ces législatives anticipées.
Cette configuration, si elle se confirme dans les résultats officiels, donnerait au parti au pouvoir une marge de manœuvre considérable pour faire adopter ses projets de loi au Parlement.
LE WANEP REVELE SES PREMIERES OBSERVATIONS
Si 61,7% des bureaux ont ouvert à l'heure, quelques retards ont été constatés dans certaines zones. Le matériel électoral était disponible dans 98,8% des cas pour départager les 41 listes en compétition
Les Sénégalais sont appelés à départager les voix entre les 41 listes en lice au scrutin législatives qui se déroule ce dimanche 17 novembre 2024. Ainsi, afin de veiller au bon déroulement du scrutin, le réseau ouest africain pour l’édification de la paix a déployé 100 observateurs dans 42 des 46 départements du Sénégal, évalués comme potentiellement zone à risques de violences électorales. A cet effet, une analyse des données collectées auprès de ses observateurs a permis de faire une appréciation sur les éléments relatifs à l’ouverture des bureaux de vote.
La cellule de veille du WANEP a révélé ces premières appréciations sur le déroulement du scrutin de ce dimanche 17 novembre 2024, au Sénégal, après une analyse des données collectées auprès de ses observateurs dépêchés sur le terrain.
Ainsi, en ce qui concerne le respect des procédures prévues par la loi pour l’ouverture des bureaux de vote, le réseau ouest africain pour l’édification de la paix (WANEP) a relevé de façon générale que les procédures ont été respectées. En effet, selon le WANEP 98,7% des membres du bureau de vote sont présents à l’ouverture. De même 61, 7% ont respecté l’heure d’ouverture ont fait constater les observateurs du WANEP.
Par contre, des insuffisances ont aussi été notées sur les données fournies par ces observateurs. A en croire à la cellule de veille du WANEP, 38,7% des bureaux de vote ont connu des manquements liés à un léger retard quant au démarrage effectif
Aussi dénote ces observateurs, dans 02 bureaux de vote, l’absence d’un membre du bureau notamment l’assesseur a été constaté au niveau du centre de Médina Bambilor et à l’école Badara Sarr dans la commune de Mbour.
S’agissant de l’opérationnalité des bureaux de vote notamment la disponibilité du matériel technique, le WANEP a fait constater que sur l’ensemble des bureaux de vote observés, 98,8% du matériel électoral était disponible, précisant toutefois, un léger retard lié une non disponibilité de bulletins de vote, d’encre indélébile et des copies de liste d’émargement.
Le réseau ouest africain pour l’édification de la paix a aussi fait noter dans le cadre de ses observations un incident mineur. Celui-ci d’après le WANEP est lié au non-respect de l’ordre de rangement des listes qui a causé un retard dans un bureau de vote au niveau de l’école Patte d’Oie Builders. Un incident qui a été d’ailleurs vite résolu, permettant au scrutin de démarré.