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22 novembre 2024
Politique
PASTEF FACE À L'HISTOIRE DES VAINQUEURS
Depuis un quart de siècle, chaque présidentielle victorieuse a été suivie d'un raz-de-marée aux législatives pour le camp des vainqueurs. De Wade à Macky, la règle n'a jamais failli, laissant présager un scrutin favorable pour les Patriotes ce 17 novembre
(SenePlus) - La victoire appelle la victoire au Sénégal, du moins quand il s'agit des législatives post-présidentielles. Une analyse de Jeune Afrique (JA) dévoile pourquoi le parti d'Ousmane Sonko peut aborder sereinement le scrutin du 17 novembre.
L'histoire électorale sénégalaise des 25 dernières années est sans appel. Comme le rappelle JA, "jamais un parti porté au pouvoir lors d'une présidentielle n'a vu son étoile pâlir à l'occasion des législatives qui ont suivi."
Les chiffres sont édifiants. En 2012, Macky Sall et sa coalition Benno Bokk Yakaar ont raflé 119 sièges sur 150 à l'Assemblée nationale. Plus tôt, en 2001, Abdoulaye Wade et sa Coalition Sopi s'étaient adjugé 89 sièges sur 120, soit près de 75% de l'hémicycle.
Une opposition en lambeaux
Le contexte actuel semble encore plus favorable pour Pastef. Selon Jeune Afrique, l'opposition se présente dans un état de grande fragilité : "reconfigurée", "morcelée" et "littéralement asphyxiée". Les chiffres de la présidentielle sont parlants : 17 candidats sur 19 n'ont totalisé que 9,93% des suffrages.
L'ancien camp présidentiel lui-même est en pleine recomposition. Le média panafricain note que "le parti de Macky Sall a troqué in extremis, à deux mois et demi du scrutin, son alliance durable avec les partis de la gauche sénégalaise contre une nouvelle avec ses anciens 'frères' libéraux."
Les défis de l'après-victoire
Malgré ces conditions favorables, des nuages pointent à l'horizon. Le magazine souligne que les électeurs de Pastef sont "frustrés de n'avoir pas encore vu le mythique 'Projet' brandi par le tandem patriote – aujourd'hui décliné sous forme de 'Vision 2050' – traduit en actes."
Plus inquiétant encore, le style de gouvernance d'Ousmane Sonko, "volontiers provocateur voire belliqueux" selon l'analyse, pourrait éroder sa popularité d'ancien opposant.
L'horizon 2027
Le véritable test pour Pastef pourrait survenir début 2027, avec les élections locales qui "marqueront la première véritable sanction de la gouvernance patriote", selon Jeune Afrique. D'ici là, une victoire aux législatives, qui pourrait aller jusqu'à "la majorité qualifiée des 3/5e" permettant de modifier la Constitution sans référendum, semble à portée de main.
Seul précédent qui pourrait tempérer cet optimisme : en juillet 2022, Macky Sall avait failli expérimenter une cohabitation inédite, passant à "deux sièges" d'une situation politique jamais vue dans l'histoire du pays.
POUR UN VOTE SANS HEURTS
Le temps est venu pour les citoyens-électeurs de désigner leurs nouveaux représentants à l’Assemblée nationale. Après vingt-et-un jours de campagne électorale caractérisés par les violences physiques, la balle est maintenant dans le camp du peuple
Les électeurs vont exprimer leur droit de vote ce dimanche, pour choisir les 165 députés devant composer l’Assemblée nationale et constituer la XVème législature. Après une campagne électorale émaillée de violences, les nombreux appels à la sérénité et à la retenue devraient contribuer à faire régner un climat de paix pour un scrutin sans heurts. Le citoyen est ainsi appelé à élire une majorité parlementaire, par le biais d’un «vote utile».
Le temps est venu pour les citoyens-électeurs de désigner leurs nouveaux représentants à l’Assemblée nationale. Après vingt-et-un jours de campagne électorale caractérisés par les violences physiques, avec des attaques contre des cortèges ou convois de candidats, de même que l’incendie du siège d’une coalition et le placement sous mandat de dépôt de plusieurs dizaines d’éléments préposés à la sécurité d’une coalition, la balle est maintenant dans le camp du peuple.
Devant l’absence de programme et de contrat de législature, pour qui battra le cœur des électeurs, ce dimanche 17 novembre ? En tout cas, la réponse n’est pas trop évidente pour être simple. Face à une question à choix multiple, pour quelle réponse optera le détenteur du droit de vote ? Le «vote utile» pourrait être un de ses tout premiers choix. A ce propos, la balance pencherait vers le camp du pouvoir ou de la principale coalition de l’opposition. Tout dépendra du sens que l’électeur voudra donner à cette expression ou posture à adopter.
Ira-t-on vers une sanction contre ceux qui incarnent le pouvoir depuis le 24 mars dernier, après qu’ils ont fait sept (7) mois à la tête du pays ? Leur gestion des affaires publiques ayant été fortement remise en cause, les uns et les autres se demandent s’ils ont des chances de remporter haut la main le scrutin de demain. Une tradition voudrait que les tenants du régime gagnent, car jusqu’ici un parti au pouvoir n’a jamais perdu ses premières élections législatives au Sénégal.
Toutefois, l’opposition, du moins les plus grandes coalitions qui la composent, croit en ses chances d’imposer la cohabitation au soir du vote.
Les «petits» poucets, eux, vont chercher, de leur côté, à se tailler une place à l’Hémicycle.
Le taux de participation au scrutin sera une inconnue. Les électeurs vont-ils sortir pour voter massivement ? Certains ne seront-ils pas motivés à aller exprimer leur droit de vote ? Rien n’est sûr. Les nombreuses foules ayant accompagné les cortèges, caravanes et meetings ne sont pas forcément un indicateur très fiable pour déterminer l’attitude des électeurs.
Le contexte qui avait prévalu lors de l’élection présidentielle de mars dernier n’est plus de mise. Le quotidien des Sénégalais est devenu un casse-tête, du fait de la cherté de la vie et des autres difficultés se dressant devant eux.
LA CASAMANCE, CETTE HISTOIRE QUE LE SÉNÉGAL PEINE À REGARDER EN FACE
Dans un pays où 85% des citoyens ignorent la date du début du conflit, la publication d'une étude historique soulève des vagues. Entre tabou politique et amnésie collective, le plus vieux conflit d'Afrique peine à trouver sa place dans les mémoires
(SenePlus) - L'annonce par le Premier ministre Ousmane Sonko de l'interdiction d'un ouvrage historique sur la Casamance ravive un malaise profond au Sénégal. Selon une enquête de Jeune Afrique (JA), cette décision révèle la difficulté persistante du pays à aborder sereinement l'histoire de cette région.
"Nous sommes un État unitaire, du nord au sud, de l'est à l'ouest. Nous ne voulons pas d'autonomie", a martelé Ousmane Sonko lors d'un meeting électoral à Ziguinchor le 1er novembre. Dans sa ligne de mire : l'ouvrage "L'Idée de la Casamance autonome" de l'historienne française Séverine Awenengo Dalberto.
La polémique autour de ce livre, que le Premier ministre accuse de participer à un "projet de déstabilisation", met en lumière un paradoxe saisissant : ce sont d'abord les opposants au pouvoir qui ont soulevé la controverse, l'APR de Macky Sall dénonçant le "mutisme" des autorités face à sa présentation prévue à Dakar.
Le grand vide historiographique
Une étude révélatrice du laboratoire Laspad de l'université Gaston-Berger, citée par Jeune Afrique, expose l'ampleur du problème : seuls 25,6% de la production scientifique sur la Casamance est sénégalaise. Plus troublant encore, 85% des Sénégalais ignorent la date exacte du début du conflit, et 65% ne savent pas ce que signifie le sigle MFDC.
"L'histoire de ce conflit n'est enseignée ni au primaire ni au secondaire, et à l'université encore moins, ce qui est non seulement surprenant mais troublant", soulignent les chercheurs Mame Penda Ba et Rachid Id Yassine dans leur étude.
La tension est palpable lorsqu'il s'agit d'évoquer le sujet. "Si l'initiative venait d'un Sénégalais, cela pourrait aller. Mais ce n'est pas aux Français de venir nous parler de la Casamance", confie à Jeune Afrique un proche du Premier ministre, seul membre du parti au pouvoir ayant accepté de s'exprimer sur la question.
Pour l'historien Nouha Cissé, cité par le magazine, le "déficit de production" sur l'histoire de la région n'est "pas forcément imputable à l'État". Il pointe la responsabilité des Casamançais eux-mêmes : "On se plaint d'une situation dont on est responsable, parce qu'on ne s'est pas intéressé à notre propre histoire."
Les enjeux politiques actuels
À la veille des législatives anticipées du 17 novembre, la position d'Ousmane Sonko prend une dimension particulière. "Je comprends Ousmane Sonko. Après des années à se faire taxer de rebelle, à être accusé d'avoir des accointances avec le MFDC, ce livre était du pain béni pour se démarquer de la rébellion", analyse un acteur politique de Ziguinchor cité par Jeune Afrique.
La question qui se pose désormais est celle de la réconciliation avec l'histoire. Comme le souligne JA, le défi pour le Premier ministre sera de réussir à apaiser la Casamance, cette "plus belle perle du collier Sénégal" selon l'expression d'Abdou Diouf, tout en permettant un débat serein sur son histoire.
LE COMMERCE "ÉQUITABLE" QUI ABANDONNE SES BRODEUSES SÉNÉGALAISES
Derrière la façade glamour de la Compagnie du Sénégal et de l'Afrique de l'Ouest, une réalité sombre se dessine : des dizaines de femmes ont travaillé pendant des années sans contrat, payées une misère pour des produits revendus à prix d'or à Paris
(SenePlus) - Des coussins brodés d'amour vendus dans le Marais parisien aux partenariats prestigieux avec les plus grandes marques de luxe, la Compagnie du Sénégal et de l'Afrique de l'Ouest (CSAO) semblait incarner le rêve d'un commerce équitable réussi entre la France et le Sénégal. Mais une rcente enquête de Mediapart vient briser cette belle image.
La CSAO, créée en 1995 par Valérie Schlumberger, s'est forgé une réputation d'entreprise éthique exemplaire. En 2020, comme le rappelle Mediapart, le magazine M du Monde vantait sa "fibre solidaire" et la qualifiait de "pionnière française en matière de commerce éthique et équitable". L'entreprise a su cultiver cette image, notamment grâce à la participation de l'actrice Léa Seydoux - fille de la fondatrice - dans ses campagnes publicitaires, et à des coups d'éclat comme les coussins brodés "Emmanuel" et "Brigitte" offerts au couple présidentiel en 2018.
Pourtant, la réalité vécue par les brodeuses sénégalaises était bien différente. "Cela faisait plus de dix ans que je travaillais à l'atelier de Gorée, j'ai même été cheffe, mais je n'ai jamais eu de contrat", confie Sokhna à Mediapart. Cette absence de contrat de travail concernait l'ensemble des dizaines de brodeuses employées au fil des années.
Des conditions de travail éprouvantes
Les témoignages recueillis par le site français d'investigation dépeignent un tableau peu reluisant des conditions de travail. "On avait mal au dos, aux jambes, on passait la journée assises sur une chaise en bois, mais on ne pouvait rien dire, car on voulait gagner notre petit quelque chose", explique Aya, une ancienne brodeuse.
La situation s'aggravait lors des visites d'Ondine Saglio, directrice artistique et fille de la fondatrice. "Elle nous faisait parfois travailler beaucoup plus, elle nous suppliait même de venir le week-end pour qu'elle puisse repartir avec un maximum de produits", révèle Sokhna. Sans congés payés ni protection sociale, les travailleuses ne bénéficiaient d'aucun des droits prévus par le Code du travail sénégalais, y compris le congé maternité.
Le système de rémunération révèle un déséquilibre flagrant. Les brodeuses recevaient environ 5 euros par coussin, alors que ces mêmes pièces étaient vendues jusqu'à 90 euros dans la boutique parisienne de la CSAO. Comme le calcule amèrement Sokhna : "Il suffisait qu'ils vendent deux ou trois coussins pour obtenir mon salaire par mois, alors que je pouvais produire jusqu'à quatre cents coussins par mois."
Face à ces accusations, Valérie Schlumberger, interrogée par Mediapart, se retranche derrière un argument juridique : "La CSAO ne compte aucun salarié au Sénégal, car elle collabore avec des artisans et des structures locales indépendantes." Elle justifie les prix de vente par les coûts des matières premières, du transport et des taxes.
Une fermeture brutale aux conséquences dramatiques
En mars 2024, l'atelier de Gorée ferme brutalement ses portes. Initialement annoncée comme temporaire, cette fermeture s'avère définitive. Les conséquences sont catastrophiques pour les brodeuses. "Depuis la fermeture, je n'arrive qu'à payer mon loyer, mais je ne peux plus donner à manger à mon enfant ni payer le transport pour qu'il se rende à l'école", témoigne Sokhna.
La colère des anciennes travailleuses est palpable : "Valérie n'oserait pas faire ça en France, faire travailler des gens pendant dix ans sans contrat, et tout arrêter du jour au lendemain sans les dédommager." Sur des dizaines de brodeuses, une seule a obtenu un dédommagement, après des mois de négociations acharnées.
Cette affaire soulève des questions fondamentales sur la réalité du commerce équitable. Comment une entreprise peut-elle se revendiquer éthique tout en privant ses travailleuses des protections sociales les plus élémentaires ? Le cas de la CSAO illustre les limites d'un système qui, sous couvert de bonnes intentions, peut perpétuer des pratiques d'exploitation.
L'enquête de Mediapart met ainsi en lumière le fossé entre l'image vertueuse d'une entreprise "éthique" et la réalité vécue par les travailleuses qui ont contribué à son succès, rappelant l'importance d'une vigilance constante sur les pratiques réelles des entreprises se réclamant du commerce équitable.
LE SCRUTIN DES LÉGISLATIVES ANTICIPÉES CRISTALLISE L’ATTENTION DE LA PRESSE QUOTIDIENNE
’’Après les discours, place aux urnes’’, titre en une le quotidien national Le Soleil, comme pour signaler la fin de la campagne électorale. Le journal informe au passage de la mise en place du dispositif électoral en vue d’un un bon déroulement du vote.
Dakar, 16 nov (APS) – Les quotidiens dakarois parvenus ce samedi à l’Agence de Presse sénégalaise (APS) ont mis l’accent sur le scrutin des législatives de ce dimanche 17 novembre, indiquant qu’après une campagne électorale âprement disputée, l’heure est venue pour les citoyens de se rendre aux urnes.
’’Après les discours, place aux urnes’’, titre en une le quotidien national Le Soleil, comme pour signaler la fin de la campagne électorale. Le journal informe au passage de la mise en place du dispositif électoral en vue d’un un bon déroulement du vote.
Il se fait en même temps l’écho des assurances du directeur général des élections, Biram Sène. ‘’Nous sommes fin prêts sur le plan de la logistique’’, déclare ce dernier dans un entretien accordé au Soleil.
Il assure qu’un dispositif est mis en place pour permettre aux citoyens impactés par les inondations liées à la crue du fleuve Sénégal et de la Falémé, son principal affluent, de pouvoir voter. ‘’Des pirogues ainsi que des véhicules seront mobilisés par les autorités administratives concernées toute la journée pour assurer la navette entre les lieux de recasement, les berges et les lieux de vote’’, signale M. Sène.
Les assurances pour un bon déroulement du vote sont relayées aussi par le Quotidien et Enquête. Les deux journaux rapportent les propos du ministre de l’Intérieur, Jean-Baptiste Tine, qui indique que ‘’toutes les conditions sont réunies’’ pour une bonne tenue du scrutin. ‘’Pour un scrutin calme, le général Tine montre le chemin’’, lance Enquête.
‘’La voix au peuple’’, titre le Quotidien. Il souligne que les électeurs vont pouvoir exprimer leur droit de vote ce dimanche pour choisir les 165 députés devant composer l’Assemblée nationale.
‘’Après une campagne électorale émaillée de violence, les nombreux appels à la sérénité et à la retenue devraient contribuer à faire régner un climat de paix pour un scrutin sans heurts’’, écrit le journal.
Le quotidien L’As met lui aussi en exergue les assurances du général Tine.
‘’Après les candidats, la voix aux citoyens’’, titre Vox Populi, relayant au passage les appels à la paix du Forum du justiciable et du Forum civil. Deux organisations qui invitent ‘’les Sénégalais à rejeter fermement toutes formes de violence le jour du scrutin et à s’abstenir de tout acte pouvant saper la paix et la cohésion sociale’’.
L’Observateur s’intéresse aux ‘’Je et enjeux d’un scrutin’’, évoquant ‘’une élection, deux scénarii et mille incidents’’. ‘’Un scrutin, de multiples enjeux’’, affiche pour sa part Libération, alors que l’Info parle des ‘’enjeux d’un scrutin’’.
‘’Elections législatives anticipées du 17 novembre : A vos cartes !’’, lance Sud Quotidien, indiquant que le triangle Dakar-Thiès-Diourbel est ‘’au centre des attentions’’ avec ses 3.468.924 électeurs.
Et de s’interroger : ‘’Qui va remporter la bataille de Dakar ? Le Fouta restera-t-il un titre foncier de Macky ?’’.
A VOS CARTES !
7 371 890 millions d’électeurs inscrits dans le fichier sont appelés aux urnes le 17 novembre prochain dans le cadre des législatives anticipées. Ils devront choisir 165 députés qui constitueront la 15e législature.
7 371 890 millions d’électeurs inscrits dans le fichier sont appelés aux urnes le 17 novembre prochain dans le cadre des législatives anticipées. Ils devront choisir 165 députés qui constitueront la 15e législature. Après 21 jours de campagne électorale, va-t-on assister à une situation de «remontada» de l’opposition ou plutôt la confirmation de la large victoire obtenue par le nouveau pouvoir lors de la dernière présidentielle ?
Après 21 jours d’une campagne électorale émaillée de quelques scènes de violences, à Dakar, à Koungheul et à Saint-Louis, ce sera au tour des citoyens de s’exprimer en choisissant ceux qui les représenteront dans l’hémicycle. L’histoire politique retiendra que pour la première fois, des élections législatives anticipées sont organisées au Sénégal. Cette législature sera la 15ème depuis l’indépendance. L’enjeu de ces élections, convoquées par le président de la République dans la foulée de sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale le 12 septembre se trouve dans le triangle formé par les régions de Dakar, de Thiès et de Diourbel.
En effet, les 3 468 924 inscrits sur le fichier électoral de ces trois régions constituent près de la moitié des 7 371 890 suffragants répertoriés sur le fichier électoral. Ce trio régional se distingue également par son quota important de sièges au scrutin majoritaire. Sur les 112 sièges en jeu des 46 départements sur le territoire national et les 08 départements de la diaspora, 37 députés viendront de ces trois régions. La liste qui parviendra à obtenir le plus grand nombre de voix dans ce triangle, prend une sérieuse option non seulement dans la course pour le contrôle des 53 sièges sur la liste nationale (proportionnelle) mais aussi pour le contrôle de la future Assemblée nationale.
Outre ces localités, l’enjeu de ces législatives anticipées du 17 novembre se jouera dans les départements de Keur Massar, de Rufisque, de Ziguinchor, de Dakar et de Guédiawaye, de Tivaouane, de Saint-Louis , de Kaolack, de Matam, de Fatick, de Diourbel et de Tambacounda. En effet, nonobstant le faible quota de sièges qui leur est attribué (02 sièges maximum), ces localités peuvent jouer un rôle non négligeable au décompte final des postes de députés obtenus par les coalitions ou partis en lice pour ces joutes anticipées. Chaque coalition va jouer son va-tout pour essayer de remporter les élections dans ces localités dont la plupart ont été remportées par la coalition « Diomaye Président » lors de la dernière présentielle du 24 mars dernier.
Scrutin à grand enjeu pour le nouveau pouvoir en quête de majorité parlementaire pour décliner sans entraves son Projet dit « Vision Sénégal 2050 », l’élection de demain, dimanche 17 novembre, soulève moult interrogations chez les Sénégalais, surtout les observateurs de la scène politique. La principale interrogation est de savoir si la nouvelle opposition (ancien pouvoir), défaite à la présidentielle de mars 2024, retrouvera des couleurs face à la déferlante Pastef et alliés sortie victorieuse des dernières élections, avec 54% des suffrages valablement exprimés. Même si les élections (présidentielles et législatives) ne sont pas du même type, force est de reconnaître que l’idée de revanche et/ou de confirmation de la victoire ne manque pas de titiller les acteurs des deux camps. Comme le Sénégalais lambda qui se demande qui remportera la bataille de Dakar ou si le Fouta restera encore le «titre foncier» de Macky, au cours de ces législatives anticipées.
par Babacar Mbow
LE SÉNÉGAL ET LA RESTITUTION
EXCLUSIF SENEPLUS - Quand Bachir Diagne cite Amadou Makhtar Mbow pour suggérer une acceptation de l'exil des œuvres africaines, il fait un tour de passe-passe intellectuel troublant. Car la position de Mbow sur la question n'a jamais été équivoque
Il y a des esprits parmi les esprits ! Des esprits tellement sophistiqués qu'ils peuvent reconfigurer la pensée radicale en une pensée conformiste.
Ces esprits, dans leur rayonnement, leur éclat, peuvent nous amener à adopter l’ivrai pour le vrai, et le fallacieux pour le substantiel. Cependant, nul ne collera cette épithèque au Professeur Bachir Diagne, Hasbounallah ! Cependant !
Les récentes déclarations du Professeur Diagne citant Amadou Makhtar Mbow : « Ces peuples [les peuples africains] savent bien que la destination de l’art est universelle […] Ils sont conscients que cet art qui parle de leur histoire, de leur vérité, ne s’adresse pas seulement à eux […], qu’ils se réjouissent que d’autres hommes et d’autres femmes ailleurs aient pu étudier et admirer l’œuvre de leurs ancêtres… », dans « Objets africains « mutants »et la question de la restitution », Musée d’Ethnographie de Genève, 3 mai 2024 (https://www.meg.ch/en/expositions/remembering). Hic ! Et, « … à la fin des années 1970, [Mbow] a lancé un fervent plaidoyer en faveur de la restitution du patrimoine des anciennes colonies, tout en reconnaissant que ce patrimoine avait pris racine dans sa terre d’emprunt. » Restitutions d’œuvres : « Les objets d’Afrique sont chez eux au Louvre », 13/10/2024 (http ://www.la-croix.com/culture/restitutions-d-œuvres-les-objets-venus-d’Afrique-sont-chez-eux-au-Louvre-20241013). Ces déclarations appellent une clarification pour restituer Mbow dans le discours de la restitution.
Dans les déclarations ci-dessus, « l'esprit non sophistiqué » peut percevoir Mbow comme un accommodant aux positions suprématistes occidentales sur la restitution. Il y a donc lieu de clarifier les choses, surtout après la conférence inaugurale de Mbow au département des Études de l’Afrique du Nouveau Monde de l’Université internationale de la Floride de Miami en 2015, qui est peut-être sa dernière déclaration publique sur le sujet. Mbow est venu à Miami accompagné de sa fille, la Dr. Marie Amie Mbow. Par ces moyens, nous nous éloignons de toute controverse ou querelle pour restituer Mbow dans les débats.
La Dr. Joan Cartwright de l’Université Southeastern de Nova, lors des questions et réponses qui ont suivi la conférence de Mbow, demanda : « Il y a eu des cas où vous avez semblé atténuer votre demande de restitution des objets africains volés. Pouvez-vous clarifier votre position pour la Diaspora africaine » ?
La réponse de Mbow, qui reflétait exactement sa déclaration de 1989 à la résidence du Professeur John Henry Clark à Harlem, New York, visite organisée par Seydina Senghor, est claire et précise : « Le retour des objets africains est fondamental pour que l’Afrique se reconnecte à son passé dans la construction de son avenir. » Mbow a réitéré ce message de reconnexion pendant la semaine de son séjour à Miami aux flux de visiteurs haïtiens et afro-américains dans mon arrière-cour.
Là encore, l’esprit sophistiqué a des manières de sublimer les faits pour servir les intérêts d’un agenda. Loin de moi l’idée de coller cette caractéristique au Professseur Diagne. Mais comment les jeunes intellectuels doivent-ils comprendre ses prédilections à brouiller la clarté de ces intellectuels noirs ? Prédilections qui semblent émerger de « l’antre des alchimistes », à travers lequel nous sommes désormais appelés à faire abstraction des pensées et des pratiques intellectuelles radicales noires ?
L’émergence de discours qui semblent reterritorialiser l’Afrique dans les entrailles de la suprématie occidentale devient un fardeau très lourd à porter. Ainsi, dans un article sur SenePlus paru le 7 mai 2024, Amadou Lamine Sall appelle à la privatisation de la Biennale de Dakar à travers une « Fondation Art Mécénat International ».
Sall cite Jean Loup Pivin : « … La survie de la Biennale ne viendra que dans son externalisation vers une structure tierce […] avec un État qui [doit] cesser de faire semblant de savoir le faire… » Le Sénégal ne capitalise pas sur cet engouement formidable, mais, au contraire, le détruit. Sa gestion étatique remet en cause sa crédibilité et interdit toute autre forme de financement. » Mon Dieu ! Jean Loup Pivin est désormais le bwana en matière de souveraineté culturelle africaine que la biennale de Dakar est appelée à incarner. On en a la nausée !
J’ai entendu exactement les mêmes arguments de la part d’autres Sénégalais à la Foire 154 de Marrakech, au Maroc, l’année dernière. Que des Sénégalais puissent s'asseoir autour d'une table avec des Français engagés dans la démolition de la République, et que tout ce qu'ils puissent dire, soit « Ça fait mal, mais c'est la vérité », était si méprisable que nous avons décidé de ne plus rejoindre leur soi-disant « groupe multiculturel » à Marrakech.
Le paradoxe est que lorsque le gouvernement néocolonial de Macky Sall tuait et mutilait la jeunesse sénégalaise, lorsque la dissidence était réprimée par l'emprisonnement, et que la corruption rampante gangrenait à la fois l'État et les organismes sociaux, ces « voix de leur maître » étaient silencieuses, incapables de comprendre la possibilité d'une « Afrotopia ».
Replaçons Mbow dans son contexte discursif afin que l’on ne méprenne pas la carte pour le territoire. Les formations raciales sont un phénomène esthétique et les pratiques esthétiques sont des structures racialisées. « Les Africains se réjouissent que d’autres hommes et femmes étudient et admirent l’œuvre de leur ancêtre ?» Ainsi, tenter de séparer l’esthétique de la politique revient à méconnaître les conditions mutuelles qui soutiennent les pratiques de représentation. La vivacité et l’esthétique de l’être est l’esthétique comme forme de vie, l’esthétique comme schéma pour considérer la vivacité du phénomène et le phénomène de vivacité, la qualité de la lumière par laquelle nous scrutons nos vies. En alliant l’esthétique à la vivacité, comme dans « culture et développement » le thème de la lecture inaugurale de 2015, Mbow nous invitait à nous tourner vers les capacités d’animation évidentes dans l’objet d’art pour un appel à une politique antiraciste qui va au-delà de la dialectique réactive et des stratégies de représentation des tenants d’une universalité occidentale vers autre chose, expérimentant la durée, la sensation, la résonance et l’affect – un engagement envers la sensibilité africaine. Aucun peuple ne peut se réjouir qu’un autre lui dérobe ses potentialités.
Que la jeunesse sénégalaise sache que l’efficacité d’un peuple oppressé dans le combat intellectuel, soit en tant que diffuseur ou en tant que récepteur dans les systèmes influencés par cette hiérarchie épistémologique, dépend de sa compréhension de l’obsolescence de toute contestation de la nature de la vérité au profit de la contestation du contrôle de la vérité. Parce qu’en fin de compte, « nul autre que nous-mêmes ne pourra libérer notre esprit ». Laissons Mbow transiter vers les ancêtres ! Les morts sont muets.
Babacar Mbow est Directeur exécutif du Consortium des Études Africana de la Floride, Miami.
Par Babacar P. Mbaye
LE MONUMENT DE REIMS, L'HISTOIRE OUBLIEE DES TIRAILLEURS SENEGALAIS
Quand Reims célèbre la mémoire des Tirailleurs, c'est toute une histoire d'héroïsme et de liens humains qui ressurgit. De la défense de 1918 aux mariages mixtes pendant l'occupation nazie, la ville a tissé une relation unique avec ces soldats africains
A partir du 19 novembre à la gare de Reims, et ce pour un mois, les Chemins de fer français vont organiser une exposition sur l’engagement des soldats africains pour la France. Ceci dans le cadre notamment des commémorations des festivités de la Libération et du 80ème anniversaire du massacre de Thiaroye.
Le choix de la ville de mettre à l’honneur les Tirailleurs sénégalais ayant combattu pour la France a une grande importance mémorielle. Car en 1918, les bataillons de Tirailleurs sénégalais ont défendu et sauvé la ville de l’offensive allemande. Ce souvenir marque encore les habitants de cette ville de l’Est du pays. Pour leur rendre hommage, les Rémois se sont donc cotisés pour financer ensemble un monument « Aux héros de l’armée noire », inauguré sous l’ovation générale en 1924. La même année, une réplique du monument est érigée à Bamako, symbole du lien qui unit la France aux tirailleurs ayant combattu au péril de leur vie au cours des grandes guerres.
En 1940, la tragédie reprend ses droits. Les nazis occupent la France, détruisent et imposent aux prisonniers africains un traitement d’une rare cruauté, avant de les orienter dans les travaux des usines de la ville où ils se sont mêlés aux habitants créant ainsi des liens entre Africains et Rémois.
Soutenues par un souvenir commun, ces interactions de plus en plus fréquentes avec la population rémoise ont finalement favorisé la restauration de liens anciens. Dans une logique de cohésion et de partage, Rémois et tirailleurs se sont ainsi engagés dans une relation renouvelée, à la faveur d’un apprentissage du français, de la lecture et de l’écriture, la population rémoise aidant aussi ces soldats à se nourrir et s’habiller. Bien des mariages ont ainsi fleuri dans cette période étrange où tous s’unirent dans le désespoir commun de l’occupation. C’est au détour de tels événements que les Tirailleurs sénégalais ont si profondément entremêlé leur histoire à celle des habitants de l’ancienne métropole. Une fois n’est pas coutume, quelques années plus tard les soldats sénégalais contribuaient à nouveau à la libération de la France, en investissant cette fois-ci leur bravoure dans le débarquement de juin 1944 dont le Sénégal, par une délégation dirigée par le ministre Biram Diop, est allé célébrer le 80ème anniversaire en Provence. Mais au même moment, une nouvelle déchirure se formait encore dans le secret des villes anciennement occupées. Les ex-prisonniers africains ayant noué des liens jusqu’à matrimoniaux avec la population française, se voyaient ouvrir la possibilité de retrouver leur pays. D’ailleurs, à ce sujet, Amadou Mahtar Mbow, décédé récemment, racontait que la gendarmerie française est venue lui demander de rentrer au Sénégal après la Guerre. Il avait répondu : « Donc pour faire la guerre, je suis le bienvenu en France, mais après je dois rentrer chez moi. Je ne vais nulle part, je reste en France pour reprendre mes études ! »
Mais certains n’ont pas eu son cran et sont repartis dans leurs pays respectifs. Des Français se sont ainsi mobilisés pour que leur départ ne soit pas synonyme d’oubli. C’est dans cadre qu’un travail mémoriel est mis en œuvre par des associations, des institutions et des personnalités. Ce travail mémoriel a vocation à rendre hommage aux Tirailleurs sénégalais, à honorer leur mémoire et à souligner leur courage pendant leurs combats au nom d’une cause qui leur est parfois inconnue au fond.
En octobre 1963, un nouveau monument est inauguré à Reims pour honorer la résistance de la ville. Une plaque y figure et témoigne de la reconnaissance rémoise envers les Tirailleurs sénégalais. Acteurs d’une partie l’histoire, il s’agit de perpétuer le souvenir de ces anciens combattants dans la mémoire collective loin des anathèmes, des raccourcis faciles et des jugements a postériori toujours périlleux.
A l’approche du centenaire de la Première Guerre mondiale, en 2014, l’idée de restituer le monument initial et de raviver le souvenir de cette histoire a émergé de nouveau dans la capitale de la Champagne. Le 6 novembre 2018, dans le cadre des célébrations du centenaire de l'Armistice de 1918, le président français Emmanuel Macron et feu Ibrahim Boubacar Keïta ont présidé la cérémonie d'inauguration de ce monument qui trône désormais au cœur de la ville, rappelant l barbarie de la guerre mais honorant la mémoire de cette armée africaine qui a risqué sa vie pour une nation étrangère et permettant sa libération du joug du nazisme. Ce monument aux héros, reconstruit sur le modèle du monument de Bamako, symbolise la mémoire des Tirailleurs sénégalais. Récemment une experte de cette question soulignait que le monument était l’emblème d’une reconnaissance sans borne, pour des soldats à qui il était demandé de se battre sur un sol étranger, contre un ennemi inconnu. Le 19 novembre prochain, c’est donc un retour sur toute cette histoire chargée d’émotion qu’organise la ville de Reims, via la mobilisation de nombreuses archives photos et témoignages de tirailleurs, prêtés par l’Office nationale des combattants et victimes de guerre. Point d’orgue de la journée, une séquence de projection du film Tirailleurs dans lequel notre compatriote Omar Sy est l’acteur principal, est programmée dans un petit cinéma de la ville. Elle sera suivie d’une table-ronde, réunissant spectateurs, étudiants et universitaires spécialistes de la question mémorielle. L’historien sénégalais Cheick Sacko sera notamment à l’honneur et évoquera son travail de plusieurs années sur les monuments français rendant hommage aux soldats africains qui fleurissent et honorent tout le territoire.
Nous espérons que le Sénégal sera représenté à cet évènement pour rappeler le sens du sacrifice de ces héros dont nous commémorons une partie à Thiaroye le 1er décembre prochain. Aussi, cette histoire méconnue du souvenir des Tirailleurs sénégalais à Reims devra être mise en exergue et racontée dans les écoles en France et au Sénégal.
par Sadibou Sow
IMAM BACHIR, LE PRECURSEUR À LA VOIX DOUCE, EST PARTI
C'est l'histoire d'un homme qui a su apporter la lumière dans les heures sombres de l'université de Saint-Louis. Sa capacité à allier profondeur spirituelle et joie de vivre en a fait un modèle pour toute une génération
C’était dans les années 90. L’université de Saint-Louis commençait déjà à perdre sa belle réputation de havre de paix où n’entraient que quelques élus parmi la crème de l’école sénégalaise. À la session unique d’octobre 1993 succéda l’année invalidée de 1994 où les étudiants durent vider le campus presque à la sauvette. Quelle humiliation ! 1994, c’était aussi l’année de la fameuse dévaluation du Franc cfa avec la misère économique qu’elle causa dans tout le Sénégal. À la rentrée universitaire suivante, les conditions de vie sur le campus s’étaient tellement détériorées que certains étudiants en arrivaient à abandonner tout bonnement Sanar (comme on appelle familièrement cette université plantée à 14 km à l’est de Saint-Louis) pour retourner chez eux. L’affaissement des repères moraux suintait aussi bien dans les discours politiques que dans les productions artistiques. Les chants et les danses servaient de plus en plus d’exutoire pour défier les codes moraux comme si une nouvelle génération cherchait à faire un doigt d’honneur à tous les repères.
Dans cette atmosphère de démoralisation qui semait le doute dans les cœurs et les esprits, il y avait, parmi cette jeunesse estudiantine, quelques individus qui trouvaient leur réconfort dans la spiritualité. Dans les chambres et dans les espaces aménagés pour servir de salle de prière, on se rencontrait souvent entre amis, camarades de classe ou de « village » (comme on désignait les résidences universitaires) pour parler de religion, notamment de l’islam.
C’est dans ce contexte que les frères Diop débarquèrent à Sanar. D’abord il y avait Mouhamed Diop, l’imam-étudiant qui psalmodiait le Quraan d’une voix à la fois si forte et belle que tu lui en voulais presque quand il récitait des sourates courtes à l’aube ou la nuit. Ensuite arriva Bachir. Avec ce dernier, la première chose que je retiens, c’est une sorte d’évolution/révolution dans les sermons du vendredi. Devenu imam de la mosquée de l’UGB, il aimait choisir des sujets plus pragmatiques et axés sur la vie quotidienne des jeunes sénégalais, en général, et des étudiants en particulier. Comme son frère Mouhamed, Imam Bachir (c’est ainsi qu’on l’appelait déjà), était d’autant plus à même de comprendre son contexte social qu’il menait une vie estudiantine intense: il jouait dans les équipes de foot, faisait des arts martiaux, assistait aux séances de thé où on discutait à bâtons rompus, aidait parfois à vendre à une des boutiques privées du campus, et surtout, en tant que Diop, il ne ratait pas l’occasion de chambrer les Ndiayes, ses parents à plaisanterie ; le sens de l’humeur, c’était son affaire. Imam Bachir avait ce sourire radieux qui accompagnait cette voix douce.
Sur ce campus où cohabitaient une diversité de courants religieux, imam Bachir Diop aimait trouver des compromis sans se compromettre. Sa simplicité, sa sincérité, sa patience, sa droiture faisaient de lui un homme affable et accessible à qui les étudiants qui éprouvaient des difficultés dans leur cheminement spirituel n’avaient pas peur de se confier. Car ils trouvaient en lui une oreille attentive et un cœur apaisé enclins à tendre une perche salvatrice plutôt qu’à servir un jugement moral écrasant.
Imam Bachir, tu as été un précurseur et une excellente nouvelle pour Sanar. Qu’Allah, dans Sa Rahma infinie, t’accueille au Firdaws majestueux et qu’il veille sur ta famille jusqu’à ce qu’elle te retrouve en compagnie du sceau des prophètes, notre Habib (Sallallaahu a’leyhi wa Sallah) au sourire sublime.
Aamiin.
Ton frère en Allah.
AUX ÉTATS-UNIS, LE MYTHE DU VOTE IDENTITAIRE
David Brooks révèle, dans une analyse au New York Times comment l'inflation, la sécurité et la politique étrangère façonnent les choix électoraux des citoyens américains, au-delà des clivages communautaires
(SenePlus) - Dans un édito publié le 14 novembre dans le New York Times (NYT), David Brooks remet en question les certitudes sur le vote identitaire aux États-Unis. Le chroniqueur démontre, chiffres à l'appui, que les prévisions basées sur l'appartenance ethnique ou le genre se sont révélées largement erronées lors des dernières élections.
"Les Démocrates ont perdu parce que tous les groupes, à l'exception des Blancs, se sont rapprochés de Donald Trump durant ce cycle", résume le sociologue Musa al-Gharbi, cité par Brooks. Un constat qui bouscule les théories établies : Kamala Harris a réalisé de moins bons scores que Joe Biden en 2020 auprès des électeurs noirs, des femmes, des Latinos et des jeunes. Paradoxalement, elle n'a surpassé son prédécesseur qu'auprès des électeurs blancs, particulièrement les hommes blancs.
Le chroniqueur du NYT s'interroge sur ces résultats qui défient la logique apparente : "Beaucoup d'entre nous évoluons avec des modèles mentaux défectueux. Beaucoup d'entre nous traversons la vie avec de fausses hypothèses sur le fonctionnement du monde."
Brooks pointe du doigt une vision du monde héritée des mouvements de libération qui ont marqué les dernières décennies : droits civiques, libération des femmes, droits des homosexuels et des personnes trans. Cette approche, qui divise la société entre "privilégiés" (hommes blancs hétérosexuels) et "marginalisés" (tous les autres), se heurte aujourd'hui à une réalité plus complexe.
L'auteur souligne que les catégories utilisées manquent souvent de pertinence. Selon une étude du Pew Research Center qu'il cite, 32% des Américains d'origine asiatique, 30% des Hispaniques et 23% des Noirs se sont mariés hors de leur groupe ethnique en 2022. Plus frappant encore, 58% des Hispaniques s'identifient également comme blancs.
"Les gens ne se comportent pas comme des ambassadeurs de tel ou tel groupe. Ils pensent par eux-mêmes de manière inattendue", observe Brooks, qui appelle à dépasser une vision binaire opposant oppresseurs et opprimés. Le chroniqueur rappelle que les électeurs sont préoccupés par des questions concrètes comme l'inflation, la criminalité ou la politique étrangère, qui transcendent les clivages identitaires.
Pour Brooks, il est urgent de construire "une vision sociale aussi moralement convaincante que la politique identitaire mais qui décrit mieux la réalité." Il cite le juriste britannique Patrick Devlin qui, dès 1959, avertissait : "Sans idées partagées sur la politique, la morale et l'éthique, aucune société ne peut exister."
Face à ces constats, le chroniqueur du New York Times plaide pour une approche plus nuancée, prenant en compte la complexité des individus au-delà de leur appartenance à un groupe. Une réflexion qui intervient à un moment crucial pour la démocratie américaine, alors que le pays s'apprête à vivre une nouvelle pésidence Trump.