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26 avril 2025
Politique
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L’APR CONTESTE UN RAPPORT NON OFFICIEL ATTRIBUÉ À LA COUR DES COMPTES
Selon l’ancien ministre Pape Malick Ndour, ce document, non validé en Assemblée plénière, serait une manipulation destinée à discréditer Macky Sall et son régime.
L’Alliance pour la République (APR), le parti de l’ancien président Macky Sall, a tenu ce jeudi une conférence de presse à Dakar. À la tribune, Pape Malick Ndour, ancien ministre, a lu une déclaration liminaire visant à répliquer aux accusations contenues dans un rapport récemment attribué à la Cour des comptes.
Ce document, largement diffusé sur les réseaux sociaux depuis le 12 février 2025, est jugé par l’APR comme une « manipulation orchestrée » destinée à « ternir le bilan du régime précédent ». « Ce rapport n’a rien d’officiel », martèle M. Ndour, affirmant qu’il ne résulte pas d’une procédure régulière, comme l’exige pourtant la loi organique de la Cour des comptes.
Selon lui, ce texte présenté comme un audit des finances publiques de 2019 à 2024 n’aurait pas été adopté en Assemblée plénière des Chambres, comme le stipule l’article 19 de ladite loi. L’APR soutient que le document proviendrait en réalité de l’Inspection générale des finances (IGF), relevant du ministère des Finances, et aurait simplement été validé par la Chambre des affaires budgétaires et financières.
Un climat de suspicion dénoncé
La sortie médiatique de l’APR intervient dans un contexte de tension politique. Depuis son arrivée au pouvoir, accuse Pape Malick Ndour, le parti Pastef, aujourd’hui aux commandes, chercherait systématiquement à « discréditer le président Macky Sall, son parti et sa gouvernance ». Il évoque notamment les accusations de « maquillage des chiffres » formulées par le Premier ministre en septembre 2024, sans preuves tangibles selon lui.
Parmi les allégations les plus marquantes, celle d’un compte bancaire de 1 000 milliards de francs CFA appartenant à un ancien responsable. « Depuis, plus rien. Où en est cette enquête ? » s’interroge l’APR, qui exige des explications.
Un contre-rapport présenté comme une réponse structurée
Face à ce qu’elle qualifie de « tentative de manipulation de l’opinion », l’APR affirme avoir mis en place, sur instruction de Macky Sall, un groupe de travail chargé de produire un contre-rapport « solide, chiffré, documenté ». Ce document, rédigé en français et en anglais – et bientôt traduit en langues nationales – comprend quatre volets : un rappel des faits, une analyse de la forme et du fond du rapport contesté, une conclusion, et des annexes.
L’APR précise que ce contre-rapport sera transmis aux partenaires bilatéraux et multilatéraux, mais aussi rendu public via un site internet.
« Il ne s’agit pas simplement de répondre aux accusations, mais de rétablir la vérité face à une entreprise de diabolisation systématique », conclut Pape Malick Ndour.
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LES 13 VISAGES OUBLIÉS DE L'AFRIQUE LIBRE
Du Congo au Zimbabwe, du Mali à l'Afrique du Sud, les architectes des indépendances africaines tombent peu à peu dans l'oubli. Pierre Haski s'alarme de cette amnésie collective et propose un voyage édifiant à travers leurs parcours exceptionnels
Pierre Haski vient de publier "Décolonisations africaines", un ouvrage adapté de son podcast pour France Inter. Dans ce livre préfacé par l'historien Pap Ndiaye, l'auteur retrace le parcours de treize figures emblématiques qui ont façonné l'histoire des indépendances africaines.
De Patrice Lumumba à Nelson Mandela, en passant par Modibo Keita et Félix Houphouët-Boigny, le journaliste propose un voyage à travers les destins extraordinaires de ces "pères de la nation". Le projet est né d'un constat alarmant : les jeunes générations, y compris issues de la diaspora, méconnaissent souvent cette histoire fondatrice qui continue pourtant d'influencer l'Afrique contemporaine.
L'auteur, ancien correspondant de l'AFP en Afrique du Sud pendant l'apartheid, évoque avec émotion sa rencontre avec Nelson Mandela, qu'il considère comme la figure la plus exemplaire pour son courage et sa sagesse politique. Il met également en lumière des personnalités sous-estimées comme Sylvanus Olympio, premier président du Togo, économiste brillant assassiné pour sa rigueur gestionnaire.
Pierre Haski souligne le paradoxe troublant de certains parcours : des idéalistes de la libération transformés en dirigeants autoritaires face aux défis concrets du pouvoir, à l'image de Robert Mugabe au Zimbabwe.
Pour l'auteur, comprendre cette période historique est essentiel pour construire aujourd'hui des relations internationales plus équilibrées et égalitaires entre les continents.
"Décolonisations africaines" est disponible aux éditions Stock.
DIOMAYE FACE AU DÉFI D'UNE CEDEAO FRACTURÉE
Le président sénégalais, dont la candidature est évoquée avec insistance pour succéder à Bola Ahmed Tinubu, pourrait devenir l'architecte d'une refondation nécessaire de l'organisation régionale, fragilisée par le départ des pays de l'AES
Le 22 avril 2025, Accra ne sera pas seulement la capitale du Ghana, mais aussi celle de toutes les interrogations ouest-africaines. Alors que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’apprête à célébrer ses cinquante années d’existence, c’est un demi-siècle de doutes et de remises en question qui s’invite à la table des ministres des Affaires étrangères. En toile de fond, une question cruciale : qui prendra la tête de l’organisation après Bola Ahmed Tinubu ? Et surtout, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye acceptera-t-il de relever ce défi périlleux ?
La succession de Bola Ahmed Tinubu à la tête de l’organisation, président du Nigeria depuis 2023 et président en exercice de la CEDEAO depuis juillet 2023, fait écho.
Diomaye, la présidence attendue mais incertaine
Depuis plusieurs semaines, le nom de Diomaye Faye revient avec insistance dans les couloirs diplomatiques d’Abuja, Lomé, Cotonou ou Nouakchott. Élu en mars 2024 dans un contexte de rupture démocratique, le chef de l’État sénégalais incarne pour beaucoup une figure d’apaisement, capable de réconcilier la CEDEAO avec ses principes fondateurs : souveraineté, solidarité, coopération.
En principe, la présidence tournante de l’organisation devrait revenir à un chef d’État francophone, et plusieurs voix se sont discrètement élevées pour appuyer une candidature sénégalaise. Mais selon des sources diplomatiques parvenues à Afrique Intelligences, Diomaye Faye, qui avait décliné l’offre en 2024 pour se consacrer à la stabilisation interne de son pays, hésite encore. “Aujourd’hui, assumer la présidence de la CEDEAO revient à s’exposer à la critique de toutes parts, sans garantie d’efficacité”, commente un diplomate sous anonymat.
Son entourage évoque un contexte défavorable : une CEDEAO affaiblie, divisée par le départ de trois membres majeurs (le Mali, le Niger et le Burkina Faso), minée par les critiques sur son efficacité, et accusée d’avoir manqué d’impartialité face aux transitions militaires. Pourtant, sa posture mesurée, sa neutralité perçue vis-à-vis des régimes militaires, ainsi que son discours réformateur et souverainiste, font de lui un candidat presque naturel à la présidence de la CEDEAO, en quête d’un second souffle.
Au cours des deux dernières années, Tinubu a dirigé l’organisation dans l’un des contextes les plus houleux de son histoire. Son mandat, marqué par les tensions avec les juntes du Sahel, une tentative infructueuse de rétablissement de l’ordre constitutionnel par la pression diplomatique et économique, et des divisions entre États membres, arrive à expiration sans que personne ne semble vouloir lui succéder.
Un anniversaire sous tension
La célébration du cinquantenaire de la CEDEAO, créée le 28 mai 1975 à Lagos, devait être un moment de fierté collective, célébrant les acquis de l’intégration régionale : libre circulation des personnes, passeport commun, instruments de coopération économique et diplomatique. Mais à l’aube de ce jubilé d’or, le tableau est plus que contrasté. La CEDEAO apparaît fragilisée, contestée, et à court de solutions consensuelles.
La réunion ministérielle prévue à Accra marque le lancement officiel des festivités, mais aussi l’entrée dans une phase critique de repositionnement politique. L’enjeu dépasse la symbolique : il s’agit de sauver l’idée même de communauté régionale, dans un contexte où le retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger, formalisé en janvier 2025, laisse un vide institutionnel inquiétant.
AES : rupture ou réconciliation ?
La fracture sahélienne, incarnée par la création en septembre 2023 de l’Alliance des États du Sahel (AES), reste la blessure la plus visible. Les régimes militaires dirigés par Assimi Goïta, Ibrahim Traoré et Abdourahamane Tiani ont claqué la porte de la CEDEAO, dénonçant les ingérences, les sanctions arbitraires, et l’absence de dialogue sincère. En réponse, l’organisation a tenté d’isoler les dissidents, avec peu de résultats concrets, si ce n’est l’accélération d’un découplage stratégique.
Mais depuis février, une nouvelle dynamique s’esquisse. Réunis à Bamako les 22 et 23 février 2025, une vingtaine de ministres de l’AES ont ouvert la porte à une reprise des discussions, dans un “esprit constructif”. Tout en réaffirmant leur indépendance, ils disent vouloir mettre en avant “l’intérêt supérieur des populations”. Une ouverture timide, mais qui offre une fenêtre de dialogue, à condition que la CEDEAO, elle aussi, accepte une forme d’autocritique sur ses pratiques passées.
Si elle venait à accepter la présidence, la figure de Diomaye Faye pourrait jouer un rôle charnière dans ce rapprochement. Son discours d’Addis-Abeba, en mars, appelant à “réinventer la CEDEAO sur des bases égalitaires et de souveraineté assumée”, a été perçu comme une main tendue à toutes les parties, sans compromission avec les principes démocratiques.
Des dossiers épineux sur la table
En attendant la clarification sur la présidence, la réunion d’Accra devra trancher plusieurs points sensibles, dont le plus immédiat est la gestion du patrimoine de la CEDEAO dans les pays sortants. À Ouagadougou et Niamey notamment, des bureaux, centres de formation et locaux logistiques de l’organisation restent en suspens. “Le sort de ces biens collectifs est désormais source de tension diplomatique. Des représentants des États membres craignent une rétention ou une expropriation silencieuse”, confie une source proche du dossier.
Les propositions formulées par les ministres seront soumises à validation lors du prochain sommet des chefs d’État prévu en juillet. D’ici là, la question de la gouvernance de l’organisation reste entière, et la présidence de transition pourrait être décisive dans la refondation ou l’effondrement progressif de l’institution.
À 50 ans, la CEDEAO traverse une crise existentielle. Sa légitimité est contestée aussi bien par les opinions publiques que par plusieurs gouvernements membres. Sa voix s’est affaiblie dans les grands débats africains. Son modèle est concurrencé par des initiatives parallèles comme l’UEMOA, l’AES, ou même la Zone de libre-échange continentale (ZLECAF). Et pourtant, le besoin d’intégration régionale n’a jamais été aussi pressant, face aux défis sécuritaires, économiques, migratoires et climatiques.
Le défi immédiat est donc double : sauvegarder l’existant, tout en ouvrant les chantiers d’une refondation durable. C’est peut-être ici que le leadership d’un homme neuf, indépendant des appareils traditionnels, respecté pour sa parole rare et sa vision sobre, pourrait faire la différence.
Bassirou Diomaye Faye, s’il accepte la présidence de la CEDEAO, ne réglera pas tous les problèmes. Mais il pourrait incarner une volonté de rupture avec les impasses anciennes et ouvrir un cycle de reconstruction du projet ouest-africain, à condition d’être soutenu par ses pairs et par les peuples.
Car pour qu’un jubilé soit plus qu’un souvenir, il faut qu’il serve à réécrire l’avenir.
COUP DE RABOT DIPLOMATIQUE AMÉRICAIN EN AFRIQUE
L'administration Trump s'apprête à fermer près de 30 représentations diplomatiques à l'étranger, dont plusieurs en Afrique. Les ambassades au Lesotho, en RDC, en RCA et au Soudan du Sud figurent sur la liste des suppressions programmées
(SenePlus) - L'administration Trump envisage de fermer près de 30 ambassades et consulats à travers le monde, selon un document interne du Département d'État obtenu par CNN. Cette décision s'inscrit dans une vaste réorganisation diplomatique visant à réduire considérablement la présence américaine à l'étranger.
Parmi les fermetures prévues figurent plusieurs représentations diplomatiques en Afrique, notamment les ambassades au Lesotho, en République du Congo, en République centrafricaine et au Soudan du Sud. Le document recommande également la fermeture d'un consulat en Afrique du Sud.
Cette réduction significative de la présence américaine sur le continent africain intervient alors que d'autres puissances, comme la Chine, y renforcent leur influence diplomatique et économique.
Au total, le document préconise la fermeture de 10 ambassades et 17 consulats. Outre les missions africaines, sont également concernées des représentations en Europe (Malte, Luxembourg, France, Allemagne, Bosnie-Herzégovine, Royaume-Uni), en Asie (Corée du Sud) et dans les Caraïbes.
Le document suggère que les responsabilités des ambassades fermées soient transférées aux missions diplomatiques des pays voisins.
Les recommandations incluent également une réduction de la présence américaine en Somalie et en Irak, deux pays clés dans la lutte antiterroriste.
Ces changements s'inscrivent dans le cadre d'une refonte plus large du dispositif diplomatique américain, alors que l'administration Trump, sous l'impulsion du Département de l'Efficacité Gouvernementale (DOGE) soutenu par Elon Musk, cherche à réduire drastiquement l'appareil gouvernemental.
Tammy Bruce, porte-parole du Département d'État, n'a pas souhaité commenter le document interne ni les plans de réduction drastique du Département d'État, renvoyant les questions à la Maison Blanche.
Il reste incertain si le secrétaire d'État Marco Rubio a approuvé ces fermetures proposées.
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DES FONDS DÉTOURNÉS RETROUVÉS DANS DES PARADIS FISCAUX
Des démarches judiciaires ont été engagées pour récupérer l'argent concerné. Les autorités n'excluent pas des déplacements à l'étranger pour accélérer les procédures
Le Procureur Financier a révélé lors d'une conférence de presse ce jeudi que l'enquête sur la gestion des fonds Covid a permis de localiser d'importantes sommes d'argent dissimulées à l'étranger, notamment dans des paradis fiscaux.
"Des montants ont été repérés et tracés dans des pays étrangers", a confirmé le magistrat, précisant que des commissions rogatoires internationales avaient déjà été transmises aux autorités judiciaires des pays concernés.
Pour accélérer les procédures de récupération de ces avoirs, le Procureur n'exclut pas que des déplacements soient organisés prochainement dans ces juridictions afin de "booster la procédure" et "faciliter la coopération judiciaire".
Interrogé sur la question des cautionnements accordés de façon apparemment inégale entre les différents mis en cause, le Procureur a défendu la position du ministère public. "Toutes les fois que nous avons estimé que les conditions étaient remplies, une suite favorable a été donnée. Dans le cas contraire, nous nous sommes opposés", a-t-il déclaré.
L'enquête impliquerait également plusieurs ministres dont les noms n'ont pas été révélés. Le Procureur a indiqué que "le temps venu, vous serez informés par la procédure qui sera discutée au niveau de l'Assemblée nationale", faisant référence aux résolutions de mise en accusation qui seront débattues au sein de l'hémicycle.
Cette affaire s'inscrit dans le cadre des investigations sur la gestion des fonds Covid, dont les rapports ont été transmis au parquet général il y a environ un mois, puis au procureur de la République la semaine dernière, permettant d'accélérer les procédures.
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LE BILAN D'ÉTAPE DE LA TRAQUE AUX BIENS DÉTOURNÉS
En seulement sept mois d'existence, le pôle judiciaire financier affiche une moisson impressionnante : 15 milliards de francs CFA saisis, 92 véhicules confisqués et 262 personnes arrêtées, selon le procureur El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla
Le procureur de la République financier, El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla, a présenté ce jeudi un bilan impressionnant des activités du pôle judiciaire financier (PJF) depuis sa création. En seulement sept mois d'opération, cette institution a réalisé des avancées significatives dans la lutte contre la délinquance économique et financière dans le pays.
Opérationnel depuis le 17 septembre 2024, le PJF a pour mission de traquer le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme, la corruption et autres infractions à caractère économique sur l'ensemble du territoire national.
Les résultats sont déjà considérables : 262 personnes ont été arrêtées dans le cadre de 292 procédures. Ces affaires proviennent de diverses sources, notamment 142 dossiers transmis par les unités d'enquête, 122 dossiers redirigés par le tribunal de grande instance de Dakar, ainsi que des rapports de l'IGE et de l'OFNAC.
Le procureur a détaillé l'impressionnant inventaire des biens saisis : 92 véhicules de marques diverses confiés à l'ONAD, 11 titres fonciers à Rufisque et Bambourg, 2 titres fonciers provisoirement inscrits au nom de l'État du Sénégal, ainsi que plusieurs pirogues et moteurs.
Plus frappant, le montant total des sommes saisies ou cautionnées s'élève désormais à 15 milliards de francs CFA, une augmentation spectaculaire par rapport aux 2,5 milliards enregistrés il y a seulement deux à trois mois.
"La lutte contre la délinquance économique et financière demande du temps et de la détermination", a souligné le procureur, évoquant les défis liés aux enquêtes internationales et à la dissimulation des avoirs criminels. Il a néanmoins réaffirmé que "la lutte pour la sauvegarde des deniers publics sera menée de façon rigoureuse, dans le respect de la présomption d'innocence, des droits de la défense et des prérogatives de chaque acteur judiciaire."
Le pôle judiciaire financier poursuit activement ses investigations, avec plusieurs enquêtes en cours confiées aux sections de recherche de Dakar, Tivaouane et Saint-Louis, dont certaines devraient être bouclées d'ici fin avril 2025. Par ailleurs, la Division des investigations criminelles a été saisie hier pour examiner le rapport de la Cour des comptes sur la gestion des finances publiques de 2019 à mars 2024.
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CINQ ANCIENS MINISTRES VISÉS PAR DES POURSUITES DANS L'AFFAIRE DES FONDS COVID
Intervenant à la conférence de presse organisée à Dakar ce jeudi, le procureur de la République a souligné que les personnes concernées seront traduites devant la Haute Cour de justice si l’Assemblée votait une résolution de mise en accusation
Des poursuites judiciaires seront lancées contre cinq anciens ministres, dont la responsabilité serait engagée dans les manquements notées dans la gestion du Fonds Force-Covid 19, a annoncé jeudi à Dakar, Mbacké Fall, le procureur de la République près la Cour d’appel de Dakar.
Intervenant à une conférence de presse organisée au Palais de justice de Dakar, M. Fall a souligné que les personnes concernées seront traduites devant la Haute Cour de justice si l’Assemblée nationale votait une résolution de mise en accusation.
Le procureur général près la Cour d’appel de Dakar, le procureur de la République près le tribunal de grande instance hors classe de Dakar et le procureur de la République financier participent à cette rencontre avec les journalistes organisées au Palais de justice de Dakar.
La conférence de presse se tient après que le procureur de la République financier, El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla, a confirmé la veille, par le biais d’un communiqué, avoir saisi la Division des investigations criminelles (DIC) aux fins d’enquêter sur les différents points soulevés par un référé en date du 3 avril 2025, émanant du procureur général près la Cour d’appel de Dakar, Mbacké Fall.
Dans ledit référé, transmis au ministère de la Justice, le juge demande notamment l’ouverture de procédures pénales à la suite de l’audit du rapport sur la situation des finances publiques (gestion de 2019 au 31 mars 2024), lequel a révélé des actes et faits susceptibles de qualifications pénales, fait-on savoir dans le communiqué.
IBRAHIMA NDOYE, UN MAGISTRAT DROIT DANS SES BOTTES
De l'affaire Cheikh Béthio à celle de l'étudiant Fallou Sène, l'actuel chef du parquet de Dakar n'a cessé de prouver que sa seule boussole reste la loi, quitte à s'attirer les foudres des puissants
“La plume est serve, la parole est libre”. Dans la justice sénégalaise, Ibrahima Ndoye aura beaucoup contribué à rendre tout son sens à ce principe universel, notamment dans l'affaire Bara Tall, en 2011. Magistrat indépendant, rigoureux et très à cheval sur les principes, l'enfant de Yeumbeul, Ibrahima Ndoye, est aussi décrit comme un homme très pieux qui, pour rien au monde, ne va transgresser sur les principes.
“Notre Mohamed Bouazizi local”. C'est le surnom que le grand journaliste Alioune Ndiaye avait donné au procureur Ibrahima Ndoye, dans sa chronique “Nation alitée”, une rubrique qui paraissait au journal ‘’L'observateur’’. C'était au sortir du procès très médiatisé de l'homme d'affaires Bara Tall, dans le cadre du fameux dossier politico-judiciaire des chantiers de Thiès.
Pourquoi ce sobriquet ? Le célèbre chroniqueur justifiait dans son texte : “D’une manière très symbolique, il s’est immolé par le feu de la passion patriotique. Lors du procès de l’entrepreneur Bara Tall, il a fait un aveu courageux et suicidaire. Son intime conviction est faite : le dossier est vide, malgré son réquisitoire sévère.”
Parquetier respecté, tenu par le principe de la hiérarchie, il venait de sacrifier à son devoir de subordination, mais tout en exprimant le fond de sa conscience. “Sa révolte est le début d’une grande révolution dans la magistrature de ce pays”, soulignait le chroniqueur de ‘’L’Obs’’.
C'était le vendredi 20 mai 2011. Sokhna Fatou Sy, journaliste au quotidien national “Le soleil”, était au tribunal. Elle se souvient encore de ce réquisitoire inédit, mais aussi de ce procureur pas comme les autres. “C'était la première fois que j'assistais à un procès avec ce genre de réquisitoire. Il avait tenu à se conformer aux instructions écrites qu'il avait reçues, mais à la fin, il a souligné qu'il n'est pas convaincu de la culpabilité de monsieur Bara Tall. Il avait ajouté qu'on lui a prescrit de requérir cinq ans, que son éthique professionnelle l'obligeait à requérir une telle peine, mais son intime conviction est que Bara Tall n'avait rien fait”, rappelle la chroniqueuse judiciaire, obligée à l'époque de se rapprocher des avocats pour y voir plus clair.
En effet, la plume est serve, mais la parole est libre. Entre autres phrases choc de ce procès entré dans les annales, la journaliste retient : “Il y a vraiment des passages inoubliables. Comme quand il clamait haut et fort que son éthique de conviction ne lui permettait pas de dire qu'il y a surfacturation dans ce dossier, contrairement à ce que défendaient les instructions de la hiérarchie.”
Sorti du Centre de formation judiciaire en 2000, l'alors jeune magistrat venait d'entrer dans les annales de la justice sénégalaise, dans le cercle restreint de ceux qui osent dire non aux puissants qui incarnent le pouvoir Exécutif. À peine deux mois plus tard, il est affecté à Thiès comme procureur plein. Pour certains, c'était une “sanction”, pour d'autres une promotion. Fonctionnaire dévoué et très engagé, le jeune Lébou de Yeumbeul avait rejoint son poste, avec la même détermination de servir la justice, de faire honneur à son serment, convaincu que le magistrat, en toutes circonstances, doit rester indépendant. “Lorsque la politique entre par la porte du tribunal, le droit en sort par la fenêtre”, disait-il clairement lors du procès Bara Tall, rappelle Fatou Sy.
“Lorsque la politique entre par la porte du tribunal, le droit en sort par la fenêtre”, disait-il dans le procès Bara Tall
Affecté à Thiès, Ibrahima ne tardera pas à exprimer sa hargne et sa détermination à faire régner la loi. Notamment dans l'affaire du double meurtre de Madinatoul Salam, où il n'a pas hésité d'inculper le puissant guide religieux feu Cheikh Béthio Thioune, malgré une forte pression populaire et de la famille maraboutique. Là également, il s'est montré intraitable, prouvant que sa seule boussole reste la loi. Certains n'ont d'ailleurs pas manqué de parler de zèle. “C'est un magistrat qui tient beaucoup à son indépendance ; quelqu'un à qui on peut faire confiance pour faire face aux pressions, d'où qu'elles viennent ; qu'elles soient d'origine religieuse, politique ou autre”, confie cette connaissance.
En octobre 2015, il revient dans la capitale, où il est nommé substitut du procureur spécial près la Cour de répression de l'enrichissement illicite, en remplacement du tout puissant Antoine Diome promu par Macky Sall agent judiciaire de l'État. C'était après la condamnation de Karim Wade et de ses amis. Mais Ndoye ne va pas durer à ce poste, avant d'être nommé comme procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint-Louis. À Dakar et à Thiès, il va encore s'illustrer à travers notamment l'affaire de l'étudiant Fallou Sène tué en 2018 lors des affrontements avec les forces de l'ordre. Ndoye monte encore au front et témoigne de sa volonté de faire la lumière, malgré la sensibilité du dossier qui implique des éléments de la gendarmerie. Et comme cela a été promis, il aura accompli toutes les diligences avant de transmettre le dossier au juge d'instruction.
Bara Tall, Cheikh Béthio, Fallou Sène : l'intransigeance du magistrat
Parquetier ayant marqué la justice dans la vieille ville, il revient à Dakar en tant qu'avocat général près la Cour d'appel. Poste qu'il va quitter à la faveur de la dernière alternance pour redevenir chef du très stratégique parquet de Dakar, devenant ainsi la cible de toutes les attaques, de toutes sortes de pressions. Quand l'Exécutif appelle à des pressions sur la justice, les esprits ne peuvent ne pas penser à lui, puisqu'il en incarne un segment très important dans l'administration de la justice.
Un de ses collaborateurs rassure sur son intégrité et son courage à faire face. “C'est un magistrat très rigoureux et intègre. Bien que je le connaisse, je ne lui demanderai jamais un service contraire à la loi”, témoigne ce collaborateur sous l’anonymat. Avant d'ajouter : “Ce n'est pas un magistrat à qui l’on dicte ce qu'il doit faire. Il est très à cheval sur les principes et sur la règle de droit.”
Notre interlocuteur revient aussi sur la rigueur du procureur en donnant des illustrations. “Les réunions au niveau du parquet commencent ces temps-ci à 7 h 30. Ce qui prouve à suffisance son engagement et sa rigueur”, soutient-il.
Un acteur de la justice : “Ce n'est pas un magistrat à qui l’on dicte ce qu'il doit faire.”
Depuis qu'il est à la tête de ce parquet très stratégique, difficile de le prendre à défaut. Arrivé dans un contexte où la justice était très décriée, Ibrahima Ndoye est parvenu à prendre des actes très courageux. D'abord, alors que l'instruction était presque la règle pour les dossiers politiques, il a opéré des changements majeurs en faisant juger rapidement en flagrance la plupart des personnalités politiques sur qui pesaient des indices suffisants et concordants.
Dans certains cas, son service n'a pas hésité à laisser les personnes poursuivies rentrer chez elles, malgré les pressions. Des actes qui n'ont pas manqué de frustrer certains responsables du régime qui ne ratent pas une occasion pour l'exprimer, poussant le ministre de la Justice Ousmane Diagne à recadrer et à défendre ses hommes en qui il a renouvelé toute sa confiance. “Je n'ai jamais accepté qu'on fasse pression sur moi (en tant que procureur, NDLR), surtout dans un sens déterminé. Qu'on ne compte pas sur moi pour exercer la moindre pression sur les magistrats du siège. Je n'ai aucune autorité sur eux”.
Ousmane Diagne d'ajouter : “Je suis extrêmement satisfait de la façon dont la justice est rendue, dont les magistrats s'acquittent de leurs obligations, de leurs prérogatives. Cela montre que la justice a changé. Il n'est plus dit qu'un opposant ou quelqu'un en délicatesse avec le pouvoir, s'il a des problèmes, que les gens s'attendent fatalement à une condamnation. Il est arrivé qu'il y ait des décisions de relaxe, des décisions de classement sans suite que nous assumons en toute responsabilité”, tranche-t-il.
Magistrat assidu, ponctuel et engagé, Ibrahima Ndoye est aussi peint comme un homme très pieux, humainement très bon. “Je n'ai pas connu mieux que lui dans la magistrature. C'est quelqu'un qui s'investit sur les problèmes des gens”, indique un de ses collaborateurs, non sans mettre en exergue sa grande piété.
La grande question, c'est de savoir si le magistrat va continuer d'être droit dans ses bottes ou s'il va céder aux pressions qui, depuis quelque temps, fusent de partout.
THIERNO ALASSANE SALL RÉAGIT À L’ARRESTATION D'ABDOU NGUER
Selon le leader de La République des valeurs, tous les Sénégalais savaient que l'arrestation d'Abdou Nguer n'était qu'une question de jours. Il déplore que "les tribunaux pour mal-pensants fonctionnent à plein régime".
L’arrestation de l’activiste Abdou Nguer, survenue cette semaine, continue d’alimenter les débats au sein de la classe politique. Le leader de La République des valeurs, Thierno Alassane Sall, a réagi ce jeudi, estimant que cette interpellation était attendue : "Tous les Sénégalais savaient que son arrestation n’était qu’une question de jours", écrit-il dans un message diffusé sur le réseau X.
"Ce qui le rend insupportable, c’est qu’il allie une (im)pertinence caustique à une maîtrise de ses sujets qui insupportent au plus haut point l’exécutif, le Pastef et bon nombre de ses militants, pourtant habitués à en proférer des vertes et des pas mûres. Après bien d’autres, le voilà désormais aux prises avec le procureur", poursui-t-il.
Au-delà de cette arrestation, Thierno Alassane Sall appelle à une réévaluation des priorités du pays. Il déplore que "les tribunaux pour mal-pensants tournent à plein régime" alors que d'autres secteurs importants, comme l'économie et l'enseignement supérieur, peinent à avancer.
"Pendant ce temps, l’économie piétine, les entreprises se languissent, et l’enseignement supérieur accumule près d’une année de retard", précise-t-il.
ALIOUNE TINE PLAIDE POUR UNE LIBÉRATION SOUS CAUTION DE FARBA NGOM ET TAHIROU SARR
Le fondateur d'Afrikajom Center appelle à étendre la libération sous caution aux deux hommes d’affaires, estimant que la justice doit être cohérente et non discriminatoire, quel que soit le statut ou la fortune des personnes mises en cause.
Alioune Tine, fondateur de Think-Thank Afrikajom Center a, à travers un post sur X (anciennement Twitter), lancé un appel, ce jeudi en faveur de Farba Ngom et Tahirou Sarr.
Le membre de la société civile souhaite que la libération sous caution accordée à des personnes arrêtées pour détournement présumé de derniers publics dans le cadre du rapport de la Cour des comptes, soit appliquée « aux milliardaires » Farba Ngom et Tahirou Sarr. Selon lui, ce serait cohérent et juste de l’appliquer pour eux.
Pour le défenseur des droits de l’homme, l’application des textes ne devrait absolument pas être discriminatoire.
« Il nous faut une politique pénale plus respectueuse de la dignité de la personne humaine. Notre politique pénale répressive et peu respectueuse de la dignité humaine est héritée du colonialisme. Il faut la repenser », a-t-il ajouté.