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11 mars 2025
LE SÉNÉGAL DEVIENT PRODUCTEUR DE PÉTROLE : CE QUI POURRAIT CHANGER DANS LE PAYS
Le Sénégal est devenu officiellement un pays producteur de pétrole le mardi 11 juin 2024, avec l’annonce de l’extraction du premier baril de pétrole par une société étrangère dans le champ de Sangomar (Projet Sangomar).
Le Sénégal est devenu officiellement un pays producteur de pétrole le mardi 11 juin 2024, avec l’annonce de l’extraction du premier baril de pétrole par une société étrangère dans le champ de Sangomar (Projet Sangomar). L’opérateur Woodside, une entreprise australienne basée à Perth, détient 82 % des parts et la Société des pétroles et du Sénégal (Petrosen) 18 %. D’après le Document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (DPBEP) 2025-2027 publié en juin 2024 par le ministère des Finances et du Budget, le gouvernement du Sénégal prévoit une croissance économique rapide en 2024, qui pourrait atteindre 7,3 %, grâce à la production de pétrole du champ Sangomar, situé à environ 100 km des côtes dakaroises. Le pays espère engranger 30 milliards de dollars US de dollars US sur 30 ans grâce à l’exploitation des gisements d’hydrocarbures. Bertrand Tchanche a étudié le système énergétique et la consommation d’énérgie du Sénégal. Il explique à The Conversation Africa les avantages, les risques liés à l’exploitation du pétrole pour le Sénégal et les moyens pour les atténuer.
Quels avantages le Sénégal devrait-il, selon vous, tirer de l’exploitation de ses ressources pétrolières et gazières ? Pourriez-vous les décomposer en termes d’économie globale (PIB), de recettes publiques (fiscales) et d’emplois ?
Il y a forcément des avantages à exploiter ses ressources naturelles pour un pays, mais tout dépend de la gouvernance en place et des forces en présence. Le contexte géopolitique est lui aussi important. Il y a eu beaucoup de découvertes ces dernières années en Afrique : au Niger, en Ouganda, au Mozambique, en Côte d’Ivoire… le continent africain est très riche. Cependant, ces découvertes coïncident avec “la transition énergétique” que les pays développés tentent d’impulser ou d’imposer au reste du monde. Une transition qui n’en est pas une dans les faits car les chiffres montrent bien le contraire… Les énergies fossiles sont toujours en progression et auront encore un bel avenir devant elles. D’après les données de l’Agence Internationale de l’Energie basée à Paris, en France, on voit que la demande en énergies fossiles est encore croissante. La demande en ce qui concerne le pétrole est passée de 70 millions de barils par jour en 2000 à environ 100 millions de barils par jour en 2023. La même tendance haussière est observée pour le gaz (2600 à 4200 milliards de mètres cubes et le charbon (3200 à 5600 mégatonnes d’équivalent charbon (Mtce)).
En termes de recettes, c’est environ 700 milliards de FCFA par an (près de 1,147 milliards de dollars US) annoncés. Le gouvernement sur le court terme a annoncé des recettes de l’ordre de 576,3 milliards FCFA sur la période 2025-2027, réparties comme suit pour les trois années à venir: 127,7 milliards FCFA en 2025, 205,4 milliards FCFA en 2026 et 243,2 milliards FCFA pour 2027.
L’un des avantages sera probablement le rééquilibrage sur le long terme de la balance commerciale et du budget qui sont déficitaires avec de nouveaux revenus issus de l’exploitation des gisements de gaz et de pétrole. Mais il apparaît que le déficit budgétaire est très élevé, près de 800 milliards de FCFA (3 % du PIB). Le début de l’exploitation du pétrole coïncide avec la pression du Fonds monétaire international (FMI) qui enjoint aux gouvernements africains de supprimer les subventions sur les hydrocarbures.
Notons qu’une partie du déficit budgétaire est due à ces subventions qui permettent de maintenir une certaine justice sociale. Obéir aux injonctions du FMI signifierait privilégier le service de la dette et accroître l’inflation avec comme corollaire un coût élevé de la vie avec ses effets néfastes sur la population et les tensions sociales qui en découleraient. Le Nigeria est actuellement plongé dans une crise économique sans précédent à cause d’une mesure similaire adoptée par le nouveau président Bola Tinubu élu en mars 2023. La majorité des Nigerians ont plongé dans la pauvreté avec un taux d’inflation au-dessus de 30%.
Il y aura un petit effet sur les emplois directs où quelques milliers de personnes seront recrutées, mais c’est une goutte d’eau dans l’océan. Notons que le taux de chômage dans la population est de 22% mais bien au-dessus en ce qui concerne l’emploi des jeunes.
On peut s’attendre à des investissements dans différents secteurs, notamment ceux jugés prioritaires comme la santé, l’éducation, l’énergie, l’assainissement. Toutefois, le nouveau gouvernement doit encore travailler pour définir les projets et leur inclusion dans une programmation pluriannuelle. Il y a un déficit d’investissements visible dans les secteurs comme la santé, les transports ou l’éducation.
Quels sont les autres avantages ?
Il y a des avantages politiques : nouveaux partenaires, plus de moyens pour sa politique étrangère, augmentation de l’attractivité du pays. La géopolitique régionale s’en trouve modifiée du fait du partage de certains gisements avec les pays voisins comme la Mauritanie. Dans la perspective de la vente du gaz naturel liquéfié à l’international et de l’éventuelle connexion à un potentiel gazoduc vers l’Europe à partir du Nigeria, le Sénégal aura un rôle à jouer.
L’exploitation du pétrole et du gaz peut aussi constituer un réel motif pour revendiquer ou affirmer sa souveraineté. C’est sous ce prisme qu’il faut comprendre la renégociation des contrats voulue par les nouveaux dirigeants. En trame de fond, intervient la question du franc CFA car sans banque centrale, il est difficile de mettre en œuvre une quelconque politique. Il faut avoir la clé du coffre. Question importante : comment dans un contexte d’absence de souveraineté monétaire un pays peut-il s’en sortir sur le plan économique? Rappelons-nous, la dévaluation de franc CFA de 1994. Du jour au lendemain, on impose une dévaluation, et depuis les économies des pays dans les deux zones ont été affaiblies. Le déficit de la balance commerciale s’est creusé un peu partout. Ce fut un coup de frein à l’évolution économique de ces pays qui venaient de subir le programme d’ajustement structurel (PAS).
Combien de temps faudra-t-il pour que ces bénéfices soient pleinement réalisés ? Et pourquoi cela prendra-t-il autant de temps ?
Les bénéfices peuvent être rapides. Tout dépend de la politique gouvernementale. Si on demande d’attendre alors que les premiers barils sont déjà là, c’est comme si on demandait aux Sénégalais de ne pas compter sur le pétrole. On n’a pas à attendre, les urgences sont nombreuses. Il faut mettre en place des mécanismes qui permettent de réinvestir les bénéfices dans l’économie et la modernisation du pays.
Cependant, il faut signaler que la production du pétrole démarre dans un pays qui a un déficit budgétaire important, environ 1,2 milliard d’euros. Le gouvernement a déjà prévu d’emprunter jusqu’à 3,5 milliards d’euros par an dans les trois années à venir. Dans ce contexte, il y a le risque que les recettes attendues soient orientées vers le service de la dette au détriment des investissements.
Quels sont les risques économiques auxquels le Sénégal sera probablement confronté en tant qu’exportateur de pétrole et de gaz ?
Il n’y a aucun risque ! Vous faites allusion à la théorie de la malédiction des ressources. Mais regardez, dans les pays du Golfe Persique, en Norvège, en Russie, on ne peut pas dire qu’il y a véritablement un risque à exploiter son pétrole. La malédiction c’est ce que l’on veut mettre dans l’esprit des Africains. Il faut que nous comprenions une chose, la vie est un combat et il n’y a pas de jour de repos. Nous devons apprendre d’une part à bien gérer nos ressources et d’autre part à défendre nos intérêts. Jusqu’ici, cela n’a pas été le cas.
Que pensez-vous de la gestion par des pays comme le Gabon ou le Congo-Brazzaville de leur richesse pétrolière ?
Les pays africains ne profitent pas de leurs ressources naturelles pour la plupart. Les exemples sont partout. Parlant du pétrole, on peut citer les cas de la Libye, du Nigeria, ou du Congo. Il en est de même de l’uranium comme c’est le cas au Niger ou de l’or au Mali ou au Burkina Faso. L’Afrique dans l’architecture économique mondiale, et les pays du Sud en général ont un rôle qui leur est dédié, celui de fournir les matières premières aux usines des pays développés qui eux se sont donnés le rôle de manufacturier. Dès lors, tout est mis en place pour que ce déséquilibre persiste, et c’est à ce prix que le capitalisme survit.
Quelles mesures politiques le Sénégal peut-il mettre en œuvre pour gérer ou atténuer ces risques ?
Si on parle de risque de guerre, de tensions politiques en interne ou avec les pays voisins, ou de détournements de recettes, cela ne doit pas surprendre. Car il y a une grosse manne en jeu et les protagonistes se battront pour prendre ce qu’ils veulent. Il revient aux politiques et à toutes les forces en interne de placer l’intérêt du pays en premier. C’est dans la cohésion et l’unité que les Sénégalais pourront tirer profit des ressources de leur sous-sol.
Devant les intérêts supérieurs de la nation, les acteurs internes doivent pouvoir comprendre les enjeux et faire bloc. C’est dans l’unité qu’une nation peut faire face à ses ennemis et aucune force extérieure ne peut s’imposer sans les complicités en interne. Beaucoup de conflits autour du contrôle des ressources sont le fait des acteurs placés à l’extérieur et qui agissent par groupes interposés pour déstabiliser et piller des territoires.
THECONVERSATION.COM
QUAND L’ARMEE COLONIALE FRANÇAISE DECIMAIT LES « TIRAILLEURS SENEGALAIS », LE 1ER DECEMBRE 1944
Il y a quatre-vingt (80) ans, le 1er décembre 1944, à la levée du jour, des militaires français ouvraient le feu, sans merci, sur des «Tirailleurs Sénégalais» massés dans le camp de Thiaroye qui a accueilli les rapatriés de la Seconde Guerre mondiale
La mémoire du massacre de Thiaroye n'a pas disparu en Afrique de l'Ouest, particulièrement au Sénégal, lieu du drame. Il y a quatre-vingt (80) ans, le 1er décembre 1944, à la levée du jour, des militaires français ouvraient le feu, sans merci, sur des «Tirailleurs Sénégalais» massés dans le camp de Thiaroye qui a accueilli les rapatriés de la Seconde Guerre mondiale. Accusés de mutinerie par leur hiérarchie, ces soldats et ex-prisonniers de guerre originaires de toute l’Afrique occidentale française (AOF), avaient simplement osé réclamer le paiement de leurs arriérés de soldes de captivité. Une répression qui, selon la version officielle, faisait suite à une mutinerie. En prélude à la commémoration, Sud Quotidien revient sur cette histoire tragique, considérée comme l’un des pires crimes commis par l’Armée française à l’encontre des «Tirailleurs Sénégalais» et camouflée pendant plus de 60 ans.
Le 1er décembre prochain, le Sénégal va commémorer le 80e anniversaire d’un événement qui reste l’un des plus sanglants de l'histoire de l'Afrique de l'Ouest, dans les années 1940-1960. Un massacre qui concerne d’anciens prisonniers de guerre, des «Tirailleurs Sénégalais», dont certains s’étaient évadés et avaient rejoint la Résistance des Forces françaises. Tout est partie de ces années de Guerre. Après la défaite française de juin 1940, les Tirailleurs Sénégalais ont été faits prisonniers, d'abord avec les soldats français, puis enfermés dans les Frontstalags, c'est-à-dire les camps de prisonniers allemands situés en territoire français, dans la zone occupée, de l'automne 1940 à l'été 1944. Mais les dirigeants de l'Allemagne nazie ne voulaient pas de la présence d’«hommes de couleur» sur le sol allemand. A partir de 1943, la surveillance de certains de ces camps est assurée par des officiers et sous-officiers français, à la demande des autorités allemandes qui ont besoin de plus en plus de troupes pour combattre en U.R.S.S.
Libérés par les Américains à la suite du débarquement de Normandie, l'Armée les regroupe progressivement dans des camps de transit de l'Armée française. A l'automne 1944, les autorités militaires françaises décident ainsi d'effectuer le rapatriement des troupes coloniales vers l'Afrique. Ils partent du Port de Morlaix (Finistère), le 5 novembre 1944, après avoir été placés dans des camps de transition. A ce sujet, l’historienne Armelle Mabon, Maître de Conférences à l’Université Bretagne Sud, qui a consulté les archives, informe qu’ils étaient au nombre de 1950 à 2000 à embarquer à Morlaix. Contrairement aux rapports des officiers et du gouvernement de l’AEF, qui n’avait mentionné plus que 1200 à 1300 à avoir débarqué à Dakar. Quoiqu’il en soit, les ex-prisonniers effectuent le voyage retour à bord du navire britannique, Circassia, du 5 au 21 novembre 1944. Le voyage relie Morlaix à Dakar, avec une escale à Casablanca au Maroc.
LE CAMP ET LE VILLAGE
Prochain point de chute des Tirailleurs : Thiaroye qui était, en 1944, un village d’agriculteurs et de pêcheurs de la banlieue dakaroise, situé à 15 km à l'Est de Dakar, devenue, en 1902, capitale de l'Afrique Occidentale Française (l'A.O.F), remplaçant dans cette fonction la ville de Saint-Louis. Le traité de concession, signé entre les autorités françaises et les habitants lébou du village, avait permis la construction du camp qui date de 1905. Le camp s'agrandit en 1913, et en 1920, il était l'un des plus grands camps militaires de l’A.O.F. Les autorités militaires françaises ont entrepris, en octobre 1944, de rénover le camp pour y accueillir les milliers de Tirailleurs Sénégalais rapatriés depuis la France.
Ces soldats doivent, à l'arrivée en A.O.F, toucher leurs droits, en premier lieu leurs soldes de captivité, qui peuvent correspondre à des sommes importantes, vu la durée de cette captivité. La circulaire n°2080 qui émane du ministère de la Guerre (Direction des Troupes coloniales – 21 octobre 1944), relevait à cet effet que «la solde de captivité des indigènes ex-prisonniers de guerre doit être entièrement liquidée avant le départ de la métropole. Le paiement devant intervenir un quart dans la métropole, trois quarts au moment du débarquement dans la colonie».
Dans un récit fait dans son cahier de l’histoire de Thiaroye, Françoise Croset révèle que le 27 novembre de cette année 1944, l’ordre a été donné à un groupe de 549 tirailleurs de prendre le train vers Bamako, pour regagner leurs régions d'origine. Leurs revendications financières n'ayant toujours pas été satisfaites, ces soldats, précise-t-elle, ont refusé de partir. Leur décision reste inflexible les jours suivants. «Nous ne partirons pas», déclarent les tirailleurs, en réponse à l'ordre donné par leurs officiers de sortir des baraquements et de se rassembler, le 29 novembre 1944.
Le sous-officier Doudou Diallo, lors de son interrogatoire, le 7 décembre 1944, après son arrestation, témoignera que lui-même, en tant que sous-officier, avait reçu l'ordre de faire rassembler les tirailleurs. Il précise : «c'était presque la totalité du détachement.»
Les tirailleurs restaient encore intransigeants et décidés à ne pas se laisser séparer, à rester unis. Autrement dit, à ne pas laisser les soldats originaires des régions rurales repartir dans leurs villages, avant que les réclamations aient été satisfaites. Françoise Croset rapporte que l’historien Jean Suret-Canales, qui vécut à Dakar à la fin des années 1940 et qui avait consulté les archives de Dakar, a confié à ce sujet que des rumeurs ont circulé parmi la population européenne de Dakar, à partir du 27 novembre, sur le risque d'un «soulèvement noir», d'un «massacre des Européens» à l'occasion de la fête musulmane de la Tabaski. Il n’en sera rien.
UN CRIME DE MASSE PREMEDITE
L’irréparable se produit le 1er décembre 1944, à 9h30. L’historienne Armelle Mabon, de l’université Bretagne-Sud, affirme, dans ses écrits, avoir un rapport de l’officier qui commandait l’opération de tir. Elle souligne que l’opération de tir a été décidée la veille, au moment où l’officier a fait venir chez lui, la veille au soir, le commandant des automitrailleuses. Les anciens prisonniers de guerre seront ainsi rassemblés sur ordre des officiers français, qui ont fait encercler la caserne de Thiaroye par des Tirailleurs Sénégalais du service d’ordre. Ils ont fait venir trois automitrailleuses, un half-track (engin semi-chenillé), un char américain.
Combien y a-t-il de victimes ? C'est là un premier point obscur à partir des archives officielles. Officiellement, on parle de 35 morts et 35 blessés. Il fallait faire passer cela pour une mutinerie au cours de laquelle les mutins auraient tiré les premiers. Alors qu’ils étaient désarmés. Un nombre que l’historienne réfute, en avançant qu’il y a eu près de 400 victimes, en ce sens que la hiérarchie militaire française de Dakar avait fait croire que les 35 victimes étaient dans des tombes anonymes du cimetière militaire de Thiaroye. Comme le reconnaitra, en février 2021, le ministre français Jean Yves Le Drian qui a fait état de l’existence de trois (3) fosses communes.
Après plusieurs années de recherches et de fouilles d’archives publiques et privées en France, au Sénégal et au Royaume-Uni, l’historienne Armelle Mabon, a pu établir que ce drame est bien un «crime de masse prémédité» puis maquillé en rébellion armée. Une machination a été mise en place pour dresser un bilan «mensonger» de 35 morts et camoufler les 300 à 400 victimes jetées dans des fosses communes.
Les archives de la justice militaire, conservées aux localités françaises de Le Blanc, dans l’Indre, permettent de remettre en cause la version des officiers supérieurs selon laquelle les tirailleurs du camp auraient été lourdement armés. Il n’y a pas eu de tirs de la part des tirailleurs. Les recherches d’Armelle Mabon et de Martin Mourre permettent d’affirmer que l’argument de la «rébellion armée» et de la nécessaire riposte armée ne résiste pas à la confrontation des différents documents. «L’absence de procès-verbal d’information du lieutenant de vaisseau Salmon, commandant les automitrailleuses qui avait reçu un ordre oral pour une mission bien précise, ajoutée à une chronologie des faits amputée du moment des tirs permet de supposer une possible préméditation.» Dans la journée du 1er décembre 1944, d’autres tirailleurs sont raflés, après le massacre. Des supposés meneurs ont été lourdement condamnés, dix ans de prison infligés à certains, pour rébellion armée, sur ordre des autorités militaires. Témoin oculaire, feu Doudou Diallo, ancien tirailleur et président des anciens combattants, racontait dans un de ses témoignages fait en 1983, l’histoire de sa propre arrestation. Le 30 novembre, il était parti comme d’habitude passer la nuit à Dakar, dans sa famille. Il est rentré au camp avec le car rapide dans la fin de la matinée du 1er décembre, ignorant des événements de l’aube au camp. «Au carrefour de Thiaroye, il y avait un détachement de tirailleurs, avec un caporal. Ils m’ont fait descendre. J’étais étonné, car je ne pensais pas qu’un caporal puisse arrêter un sergent et sous quel chef d’inculpation ? On m’a conduit devant les gradés français. Il y avait, en particulier, un adjudant-chef qui s’appelait Lerouge. On a commencé à me fouiller et à me traiter de façon incorrecte. J’ai réagi violemment parce que ne comprenant pas la raison de cette attitude. Je leur ai alors lancé, au comble de la colère : «C’est facile de faire la guerre à Thiaroye, mais si vous voulez vous battre, ce n’est pas ici qu’il faut le faire.»
On a pris cela pour la rébellion et les esprits étant surchauffés par les événements de l’aube, un officier français a donné l’ordre, qu’on me fasse taire, par tous les moyens. Les tirailleurs hésitaient, je leur ai crié : «Allez-y, qu’est-ce que vous attendez ? Les officiers étaient stupéfaits, ils ne pouvaient comprendre. J’avais vu la mort bien des fois.»
D’après des témoignages recueillis dans les années postérieures à la tragédie, les autorités obligèrent les tirailleurs arrêtés à traverser Dakar, menottés et sous la surveillance de soldats armés notamment de mitrailleuses. Quarante-cinq (45) ou quarante-huit (48) tirailleurs seront emprisonnés à la prison civile.
DES RAPPORTS SUR L’ABSENCE DE RESPONSABILITE DANS L’ÉTAT FRANÇAIS, L’OPERATION MILITAIRE RESTE OFFICIELLEMENT APPROUVEE
Le ministre des Colonies, Paul Giaccobi, qui a remplacé René Pleven, le 16 novembre 1944, approuvera les autorités de Dakar. Le 10 décembre 1944, il envoie un télégramme au Gouverneur général de Dakar : «Je ne puis que vous approuver d’avoir maintenu discipline». Il écrit, plus loin, qu’il attribue ces «incidents», ceux de Thiaroye et d’autres en métropole, «à deux causes seulement : la question de soldes et les défauts d’encadrement»
Un rapport pour le ministère de la Guerre est confié au général de Perrier et rendu public le 5 février 1945 ; le général de Perrier justifie l’opération armée du 1er décembre 1944 et considère les tirailleurs comme seuls coupables. Il considère comme légitime que le feu ait été ouvert pour rétablir l’ordre «dans cette circonstance»
L’autre rapport, fait sur instruction du ministère des Colonies par l’Inspecteur général de première classe Mérat, est rendu public le 15 mars 1945. Ce rapport conclut à l’absence de responsabilité de l’État français, quant au drame de Thiaroye. Il n’y a cependant peut-être pas unanimité des responsables gouvernementaux à Paris sur la légitimité de l’opération décidée par les autorités françaises de Dakar.
Mais, en tout état de cause, l’opération militaire contre les tirailleurs du camp de Thiaroye reste officiellement approuvée et la censure est maintenue sur les faits qui se sont déroulés. Les divergences sont restées dans le secret des archives, pendant des décennies.
ONDE DE CHOC A DAKAR, INDIGNATION DE ME LAMINE GUEYE, THIERNO AMATH MBENGUE…
Les événements de Thiaroye ont toutefois bouleversé la population de Dakar : malgré la censure exercée par les autorités coloniales, la nouvelle s’est très vite répandue et l’indignation fut très grande. L’historien Mariel Mourre nous rapporte le récit d’un habitant de Thiaroye, El Hadj Fall, récit que lui-même tient de ses parents : «Quand les militaires ont été attaqués, les rescapés se sont réfugiés au village. D’après mes parents, il y a même des villageois qui ont participé parce qu’ils ont essayé de sauver quelques militaires (…) C’était le seul village environnant, alors ils ont couru et sont entrés dans le village.».
En revanche, un conseiller colonial de Dakar, Thierno Amath Mbengue, appartenant au mouvement nationaliste lébou, prit l’initiative de s’adresser aux autorités militaires françaises de Dakar, en l’occurrence au général de Boisboissel, pour protester contre la répression très grave et la décision de «tirer sur des Tirailleurs sans armes» et lui faire connaître l’émotion des populations de la ville. Deux conseillers municipaux de Dakar, Ibrahima Thiaw et Chekeline Diop, s’associent à sa démarche, selon une note des Renseignements généraux de Dakar. Même indignation de la part de M. Alcantara, un riche négociant français d’origine portugaise, toujours d’après les Renseignements généraux relayés par l’historienne Françoise Croset.
Le président de l’Association des Anciens Combattants, Papa Seck Douta, annoncera après, le 1er décembre 1944, qu’il dénonce cette sanglante opération contre les ex-prisonniers rapatriés. Il contacte Maître Lamine Guèye, l’avocat sénégalais le plus célèbre de l’époque. Parmi les habitants français de Dakar, il y a, à l’époque, quelques militants communistes, organisés dans un Groupe d’Études Communistes. Selon le récit de l’historien Jean Suret-Canale, ces militants, réunis le 2 décembre, décident de demander à Paris une enquête parlementaire sur les événements du camp de Thiaroye, initiative qui n’a pas abouti.
Lamine Guèye, premier avocat africain du territoire de l’A.O.F et militant important de la S.F.I.O. (Section Française de l’Internationale Ouvrière), le Parti socialiste français d’alors, envoie, dès le 7 décembre 1944, une lettre à Gaston Monnerville, président de la Commission des Colonies à l’Assemblée Consultative, pour demander une enquête parlementaire. «C’est une question d’argent qui a amené les militaires à abattre, à coups de mitraillette, des Tirailleurs arrivés de France le 21 novembre 1944», écrit-il.
LE PROCES DE MARS 1945
L’organisation du procès fut l’occasion pour les autorités coloniales de Dakar de mener une propagande contre les tirailleurs ex-prisonniers. Quelques 34 tirailleurs ont comparu, les 5 et 6 mars 1945, devant le Tribunal militaire permanent de Dakar. Rien ne figure dans les archives sur les 14 autres tirailleurs qui avaient été arrêtés, le 1er décembre 1944, dans la journée et qui n’ont pas été inculpés. L’instruction, préalable au procès, a été menée à charge, du 2 décembre 1944 au 15 février 1945 : il s’agissait de démontrer la culpabilité des accusés.
Les chefs d’inculpation contre eux sont plus ou moins graves : «outrage aux supérieurs», «refus d’obéissance», «provocation de militaires à la désobéissance», «rébellion commise par des militaires armés au nombre de huit au moins». En clair, l’armée les accuse de mutinerie. La version officielle des événements du 1er décembre 1944, à savoir une répression par l’armée rendue nécessaire par cette «mutinerie» des tirailleurs, version établie dès le 1er décembre, est développée lors de l’instruction et du procès.
En septembre 1947, les avis individuels d’amnistie de chacun des condamnés sont signés, en application de cet article de loi. Contrairement à ce qui s’est écrit pendant des décennies, à la suite d’un article du journal Réveil, le président de la IVe République, le président socialiste Vincent Auriol, n’a jamais accordé de grâce amnistiante aux condamnés de Thiaroye. Il a cependant été sollicité par Senghor, élu député du Sénégal, et par Jean Silvandre, élu du Soudan. C’est à Senghor que, le 30 mai 1947, Marius Moutet, ministre de la France d’Outremer, apprend que les 18 demandes individuelles d’amnistie ont été transmises au ministère de la Guerre, avec avis très favorable.
BASSIROU DIOMAYE FAYE «OUVRE» UN NOUVEAU CHAPITRE
Vers un Comité ad hoc, chargé des préparatifs de la commémoration du 80e anniversaire de « Thiaroye 44 » et un rapport du drame qui sera soumis à la haute attention du président de la République
L’Etat sénégalais va mettre en place un Comité Ad Hoc, chargé des préparatifs de la commémoration du 80e anniversaire du Massacre des «Tirailleurs Sénégalais», le 1er décembre 1944, au camp de Thiaroye. L’annonce faite en Conseil des ministres, du mercredi 26 juin 2024, par le Premier ministre, Ousmane Sonko, est consécutive à la décision du président de la République de préparer cette cérémonie de souvenir de cet évènement tragique et page sombre de l’histoire du Sénégal et des anciennes colonies françaises d’Afrique. Le rapport de ce comité sera soumis à la haute attention du président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, au mois de septembre prochain. Cette initiative du président de la République, qui obéit d’emblée à un devoir de mémoire, est sans conteste une nouvelle étape dans la recherche de la vérité et de reconnaissance entreprise jusqu’ici. Le chef de l’Etat sénégalais marche ainsi sur les pas du président Abdoulaye Wade qui fut la première haute autorité à faire de la question des «Tirailleurs Sénégalais» un des points de sa politique intérieure et de ses relations avec la France. Mieux, il a institué, en août 2004, la tenue de la première Journée du «Tirailleur Sénégalais». En plus de la réhabilitation du cimetière «Tirailleurs» et l’érection d’une «Place du Tirailleur» au rond-point du Port autonome de Dakar (PAD), avec le monument symbole «Demba et Dupont».
Un Comité Ad Hoc chargé d’organiser la commémoration du 80e anniversaire du massacre des «Tirailleurs Sénégalais et Africains», le 1er décembre 1944, au Camp de Thiaroye, sera mis en place dans les prochaines semaines. L’annonce a été faite par le Premier ministre, Ousmane Sonko, en Conseil des ministres, le mercredi 26 juin 2024. Le comité se chargera de faire un rapport sur cet évènement tragique de l’histoire du Sénégal, de la France et de ses anciennes colonies en Afrique.
Cette initiative du président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, constitue une étape supplémentaire dans la recherche de la vérité sur ce chapitre sombre de l’histoire. En effet, les récits documentaires, cinématographiques, témoignages et différentes recherches sur cette tragédie, n’ont pas toujours dissipé les zones d'ombres sur l'origine de ce massacre innommable sur d'anciens prisonniers de Guerre rapatriés. Il n’y a pas encore de reconnaissance officielle du massacre que de nombreux historiens qualifient de «prémédité» et camouflé pendant plus de soixante-dix (70) ans. La mémoire du massacre de Thiaroye n'a toutefois jamais disparu en Afrique de l'Ouest, particulièrement au Sénégal, lieu du drame.
DIOMAYE FAYE SUR LES TRACES DU PRESIDENT WADE
Avec ce projet, le nouveau président du Sénégal, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, entre en droite ligne des jalons posés par ces deux prédécesseurs à la tête du pays. Après son élection, en 2000, l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade, avait en effet fait de la question des «Tirailleurs Sénégalais» un des points de sa politique intérieure et de ses relations avec la France. L’histoire des tirailleurs sénégalais fut inscrite dans le récit national officiel. Le président Wade avait annoncé, en août 2004, la tenue de la première Journée du Tirailleur Sénégalais. Alors que jusqu'au début des années 2000, les faits qui se sont déroulés au camp de Thiaroye, le 1er décembre 1944, sont restés quasiment ignorés en France. Au moment où le massacre a eu lieu, presque aucune information n'avait filtré, indique l’historienne Croset, jusqu'en France.
Lors de la cérémonie officielle, le 23 août 2004 (date anniversaire de la libération de la ville française de Toulon par les «Tirailleurs Sénégalais» qui avaient débarqué en Provence, le 15 août 1944), un représentant du gouvernement français, André Wiltzer, ancien ministre délégué chargé de la Coopération et de la Francophonie sous la présidence de Jacques Chirac, décide d’aborder la question. Il évoquera Thiaroye, parlant d’«un événement tragique et choquant qui suscite l'indignation, l'incompréhension et la tristesse pour ceux qui en ont été les victimes et pour leurs proches». C'est la première fois, rappelle Françoise Croset, qu'un personnage officiel français s'écarte de la version officielle, déclarant qu'il faut «réparer l'injustice et la violence commises à Thiaroye ; c'est d'abord le dire, ne pas oublier des hommes qui ont perdu la vie, le 1er décembre 1944, leur rendre hommage.» Quelques jours plus tard, le cimetière de Thiaroye, réhabilité pour l’histoire, est déclaré «Cimetière National», par un décret présidentiel promulgué par le président Wade : «Article premier - Le Cimetière de Thiaroye, où sont enterrés les Tirailleurs Sénégalais morts au cours de la répression coloniale du 1er décembre 1944, est déclaré Cimetière National. Le 23 août suivant son élection, le président de la République rend les honneurs aux victimes. Le 23 août de chaque année, le Premier ministre y dépose une gerbe de fleurs.» Si l'affaire de Thiaroye a commencé à sortir de l'oubli total et à avoir place publique dans le pays, les travaux d'historiens déjà publiés n’ont pas réussi à harmoniser les positions et contester la version officielle. Au sein de l’État français, la volonté de faire la lumière sur le massacre de Thiaroye rencontre encore de réelles résistances. Ce qui est sûr, c’est que la position officielle de l’État français connaitra un certain fléchissement.
FLECHISSEMENT DE L’ETAT FRANÇAIS
Lors de son premier voyage officiel en terre africaine, le 30 novembre 2014, le président de la République Française, François Hollande, qui avait promis de restituer les archives au Sénégal prononce un discours au cimetière de Thiaroye. Il utilise à nouveau l'expression de «répression sanglante», parle d’«événements tout simplement épouvantables, insupportables» et d'«affreuse tragédie». Il déclare qu'il n'y a pas eu rébellion et que les tirs contre les tirailleurs n'étaient pas des tirs de riposte. Il reconnaît que le nombre exact des victimes des tirs reste méconnu, ainsi que le lieu exact des sépultures des tirailleurs tués. Son discours est salué comme un geste important. S'agissait-il de se défaire enfin d'un dossier difficile, de déclarer que la France s'est mise à jour, a «honoré sa dette», comme le dit le président français dans son discours, qu'elle a tourné une page obscure de son histoire.
Ces déclarations n'ont pas empêché qu’un peu plus tôt, en novembre 2014, se tienne au Sénégal un Colloque d'historiens, organisé à l'initiative de l'Ambassade de France à Dakar, colloque sur l'histoire des troupes africaines dans les deux guerres mondiales, et qui a totalement ignoré le massacre de «Thiaroye 44». En effet, au sein de l’État français, la volonté de faire la lumière sur le massacre de Thiaroye rencontre encore de réelles résistances. Si la position officielle de l’État français s'infléchit, c'est parce que, précise l’historienne Françoise Croset, en France même, l'affaire de Thiaroye commence à sortir de l'oubli total. Les événements de Thiaroye commencent à avoir place publique en France. Le rapport sur la commémoration du 80e anniversaire de Thiaroye, commandé par le chef de l’Etat sénégalais, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, vient à son heure et permettra une avancée significative dans la recherche de la vérité et de reconnaissance.
LA RECETTE D'AMADOU TIDIANE GUIRO POUR LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE
Apportant sa pierre à l’édifice, le Professeur Amadou Tidiane Guiro a préconisé quelques pistes de solutions pour permettre au Sénégal d’atteindre cette souveraineté alimentaire
L’Académie nationale des sciences et techniques du Sénégal, sous l’égide du ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, a célébré hier, mardi 2 juillet, la Journée de la renaissance scientifique de l’Afrique. A cet effet, une conférence portant sur le thème : « La souveraineté alimentaire, droit ou objectif de politique ? » a été introduite par le professeur Amadou Tidiane Guiro qui a préconisé quelques pistes d’actions pour atteindre la souveraineté alimentaire au Sénégal.
La souveraineté alimentaire constitue un enjeu majeur pour le développement d’un pays. Conscientes de cela, les nouvelles autorités du pays se sont engagées à développer un programme pour atteindre l’autosuffisance alimentaire.
Apportant sa pierre à l’édifice, le Professeur Amadou Tidiane Guiro a préconisé quelques pistes de solutions pour permettre au Sénégal d’atteindre cette souveraineté alimentaire. Il introduisait une conférence sur ce sujet hier, mardi 2 juillet, lors de la célébration de la Journée de la renaissance scientifique de l’Afrique. « Il faut d’abord avoir une volonté politique d’opérer une rupture dans le secteur de l’agriculture. Pour la souveraineté alimentaire, ce sont tous les ministères qui doivent agir. Donc il faut une bonne synergie des actions. Il faut que le droit à l’alimentation soit réaffirmé et qu’on travaille véritablement dans ce sens », propose-t-il.
Le Pr Guiro suggère aussi une augmentation des investissements dans l’agriculture pour relever les défis de demain et assurer la sécurité alimentaire. Pour cela, il a souligné la nécessité de préserver nos ressources halieutiques et dans le secteur de l’élevage d’assurer l’alimentation du bétail, la santé génétique et surtout développer le secteur de l’agroalimentaire. Il préconise également la promotion des cultures vivrières au Sénégal.« On mène trop de pression sur la culture du riz. Or, si on développe la culture du mil, il y aurait moins de pression sur le riz qu’on importe. Les cultures de mil, mais, fonio dans l’avenir sont moins exigeantes en nous et nutritionnellement, ces aliments sont plus riches. Il faut aussi porter une attention particulière à l’arachide », indique-t-il.
Par ailleurs, Amadou Tidiane Guiro recommande au gouvernement de doter les institutions de recherche notamment l’Isra, l’Ita, les universités et les écoles de formation d’un budget digne de ce nom. Pour terminer, il invite les Sénégalais à consommer local et à changer de mentalités en produisant ce que nous consommons et en consommant ce que nous produisons. Pour lui, la souveraineté alimentaire ne doit pas être un slogan mais un combat de tous les jours qui doit engager tout le gouvernement, les acteurs et les populations.
Pour sa part Dr Ibrahima Agne, chercheur à l’Ipar, dans sa communication en tant que panéliste a souligné la nécessité d’élaborer une politique alimentaire au Sénégal pour s’accorder sur les voies et moyens d’arriver à la souveraineté alimentaire. « Cette politique alimentaire est essentielle, parce qu’elle nous permettra de voir quels sont les objectifs visés, avec quels moyens nous allons y arriver et en prenant quels sentiers », a-t-il laissé entendre.
Sur la question de la consommation et de nos habitudes alimentaires, il pense qu’il faut reconquérir notre souveraineté mentale. « Contrairement à ce que nous pensons, nos habitudes alimentaires ne sont pas statiques. Elles sont dynamiques. Ce que nous mangeons vers les années 60 ou 70, nous ne le mangeons pas aujourd’hui. Par exemple, le milieu rural ne connaissait pas le pain ni le riz sauf en Casamance, mais aujourd’hui tous ces produits ont conquis le milieu rural », soutient-il.
Selon lui, pour repenser ces habitudes alimentaires, il faut un consensus national. « Si nous élaborons une politique alimentaire claire, nous nous pouvons agir sur les préférences, sur la disponibilité et sur l’accès », a-t-il préconisé.
Par El Hadj Boubou SENGHOTE
REPONSE AU PROFESSEUR FATOU SARR SOW (SUITE ET FIN)
…Et Madame le Professeur Fatou Sarr Sow de poursuivre, dans l’émission télévisée (et non l’enregistrement vidéo ainsi que nous l’avions dit, par erreur, dans la première partie de notre réponse) qui, semble-t-il, était consacrée au métissage culturel :
…Et Madame le Professeur Fatou Sarr Sow de poursuivre, dans l’émission télévisée (et non l’enregistrement vidéo ainsi que nous l’avions dit, par erreur, dans la première partie de notre réponse) qui, semble-t-il, était consacrée au métissage culturel :
6)-« Thierno Souleymane Baal, son quatrième ascendant se prénomme Niokhor ; Niokhor BAAL. Niokhor tout le monde sait que c’est un Sérère. Ses grands-parents sont des Wolofs. Ils ont fait la révolution ici, à Pire Sanokhor… »
Ainsi que nous l’avons déjà indiqué supra, aucun des ascendants de Ceerno Sileymaani BAAL ne se prénomme Niokhor, Niokhor BAAL. Ils ne sont ni Sérères ni Wolofs. Ses ascendants sont originaires de la tribu peule des Woɗaaɓe, du clan des BARI, dans le Maasina, au Soudan (actuel Mali). D’où les liens de parenté de Ceerno Sileymaani avec Hammadi Lobbo Aysata, le père de Seexu Ahmadu.
Côté Fuuta-Tooro, Ceerno Sileymaani qui est né à Boode, de Raasin-Sammba-Bukar-Maalik, appartient à la dynastie maraboutique des Ceerno Asso. Ainsi que cela saute aux yeux, les ascendants au Fuuta-Tooro (Sénégal) du cousin de Saydu Atumaan TAAL (le père d’Al Hajji Sheexu Umar TAAL al Fuutiyyu-qu’Allah les agrée tous) sont, respectivement, dans l’ordre croissant : Raasin, Sammba, Bukar, Maalik, etc.). Point de Niokhor ! De par sa mère Maymuuna aussi, Ceerno Sileymaani BAAL est de la lignée des SALL de Doɗel (Département de Podor).
Nous l’avions également dit : aucun des grands-parents de Ceerno Sileymaani BAAL n’a pris part à la Révolution de 1776. Parmi les condisciples de Ceerno Sileymaani, à Pir Saniokor, nous pouvons citer: Tafsiir Muhammed Ibraahiima BAH (de Mbantu), Abdul Qaadiri KAN (de Koɓɓillo), Tafsiir Jaabiri JALLO (de Dimat), Tafsiir Ahmad Sammba (de Jaaba), Ceerno Abdul Kariim DAF (de Seeno-Paalel), Ceerno Muhammed Ibraa WAN (de Mbummba), Ceerno Saydu Atumaan TAAL, père d’Al Hajji Sheexu Umar TAAL al Fuutiyyu (de Halwaar), Elimaan Bubakar KAN (de Dimat), Ceerno Baylaa Pereejo Soh’en (de Haawre), Tafsiiru Aamadu Hammaat WAN (de Kanel), Ceerno Abdarahmaan SAL alias “Teenantaa-Jaŋngooɓe” (de Jañnjooli), Tafsiiru Jaabiri JALLO (de Jaañum), Ceerno-Molle Mammadu Lih (de Ciloñ), Alfaa Amar Seydi Yero Buso (de Hoore Foonde), Alfaa Aamadu Nah alias “Elimaan Lewaa” (de Sooriingo), Ceerno Yuusuf LAAM (de Jaarangel), Ceerno Ceewol (de Doondu), Ceerno Hammadi GAY (de Ɓunndu), Tafsiir Sammba Cillo (de Daaka).
Tels étaient les éminents membres de l’Amicale des Etudiants du Fuuta à Pir, acteurs de la Révolution qui dura au moins dix (10) ans avant de triompher en 1776!
Quid également de Khaly Amar FALL que plusieurs se plaisent à rappeler que c’est à lui que les artisans de la Révolution de 1776, une révolution encore inédite en Afrique et même dans le reste du monde, doivent leur éducation religieuse, pour être passés par l’Université de Pir Saniokor dont il est le fondateur ?
Khaly Amar FALL, de son vrai nom Hammaat Paate Koli FAAL (Khaly aussi est une déformation de Qaadi signifiant le Juge, une fonction à laquelle il avait été nommé), est né à Guédé (un village du Fuuta), vers 1555, de Paate Koli FALL (originaire du Kayor) et Jeegi BAH, sa mère, originaire du Fuuta.
De source proche de ses descendants, nous apprenons que de par son père, Khaly Amar FALL est l’arrière-petit-fils de Mandestu (Mandesit) FALL qui devait succéder au Burba Jolof, à la mort de ce dernier. Mais du fait d’une certaine infirmité dont il souffrait, il n’a pu être intronisé et le Ceddo qu’il était, s’exila au Fuuta qui, à l’époque, se présentait comme étant la partie la plus islamisée de la Zone. Après avoir embrassé l’Islam, Mandesit FALL resta au Fuuta où il fonda une famille, donnant ainsi naissance à Kouly (Koli) FALL, lui-même père de Paate Koli FAAL (Pathé Kouly FALL) qui n’est personne d’autre que le père du futur Qaadi, Hammaat Paate Koli FAAL (Khaly Amar FALL).
Hammaat Paate Koli FALL a grandi dans la famille de sa mère, qui est « Toucouleur ». Après avoir mémorisé le Saint Coran, au Fuuta, il alla parachever sa formation religieuse en Mauritanie. De retour au Fuuta, il épousa Koudi Loomel et Aïssata KANE, qui lui donnèrent, chacune, trois (03) enfants. Il retourna au Kayor, pays de ses ancêtres, au début du seizième siècle, précisément au temps du cinquième Damel, Makhourédia Kouly.
Arrivé au Kayor, il eut droit, de la part de sa famille, à un accueil des plus chaleureux. Il sollicita et obtint du Damel une vaste étendue de terre, dans une zone appelée Saniokor où habitaient des bergers peuls. Il se fixa dans cet endroit, qu’il valorisa en y fondant, en 1603, l’école qui deviendra l’Université Islamique Sénégambienne de Pire. Le Damel le nomma Qaadi. Mais il ne resta au Kayor que pour une très courte période; les Kayoriens ne pouvant supporter d’avoir pour Qaadi un Haalpulaar sur tous les plans, qui ne comprend et ne parle que le pulaar et pas un seul mot wolof ! Se sentant lui-même étranger au pays de son arrière-grand-père, Qaadi Hammaat Paate s’en retourna chez lui, au Fuuta !
De nombreuses années plus tard, son fils aîné Demmba, accompagné de ses frères et de sa petite-sœur Faama, alla s’installer à Saniokor où il reprit la direction de l’Université. C’est à cette époque que les Ceerno Sileymaani et autres allèrent fréquenter la célèbre Université, pour y approfondir leurs connaissances islamiques.
Dans son livre « MESURE DE L’ARABOPHONIE DU SENEGAL » (édition 2017, page 40) aussi, Dr Mamadou Youry SALL, Chercheur-Enseignant à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis du Sénégal, précise que lorsqu’il est arrivé au Fuuta, Mandestu s’y maria et eut des enfants. Le premier d’entre eux portait le nom de Koli Teŋella, du nom du fondateur de la dynastie deeniyaŋke. La mère de Hammaat Paate Koli Mandestu FAAL (Ammar ou Amar FALL pour les ressortissants de Kayor), « Jeegi BAH, était une princesse deeniyaŋke. Elle était la grand-mère du célèbre guerrier Sammba Gelaajo Jeegi.
Toujours d’après le Dr Mamadou Youry SALL, Ammar FALL a effectué son apprentissage du Coran au sein de sa famille, au Fuuta. Puis il a intégré le foyer de Ceerno Mustafaa BAH du village de Teekaan. Il a ensuite fréquenté des écoles du Nord : Wallaata et Shinguiɗ notamment. De retour au Fuuta, il fonda son école à Gaani Hammee Juulɗo. Mais du fait de l’insécurité qui gagnait la vallée, consécutivement à la défaite de Naasiru al Diin, il migra vers Dimat d’où il partit pour rejoindre sa famille royale dans le Kayor.
Fier d’avoir en lui un cousin auréolé de sciences, le Damel le reçut avec tous les honneurs, le nomma Qaadi et lui octroya un vaste domaine pour lui permettre d’y ouvrir un foyer d’enseignement. Ainsi naquit l’école de Pir Saniokor, dans le premier quart du 17ème siècle. Toutefois, ne maîtrisant pas le wolof, il retourna au Fuuta au bout de quelques années seulement.
L’Institution continua néanmoins de fonctionner. Le retour de ses enfants quelques années plus tard, a renforcé la crédibilité de l’Institution. Bien plus tard encore, son arrière-petit-fils Malamin Buubu FAAL fit venir du Fuuta de nombreux théologiens spécialistes, pour renforcer le corps enseignant. Tafsiir Hammadi Ibraa BAH de Mbantu, qui fut l’Imam de la Mosquée de Pir était de ceux-là.
C’est le regroupement de ces professeurs en un lieu, permettant d’apprendre les différentes disciplines de sciences islamiques, en plus de la langue arabe, qui attirait les étudiants des différentes régions. Car auparavant, il fallait parcourir de nombreux villages pour acquérir ce capital de connaissances ! De nombreuses ramifications de l’Ecole virent le jour dans les régions du Kayor et du Baol.
Sachons donc raison garder et ne nous y trompons plus : A l’Université de Pir Saniokor, les Ceerno Sileymaani BAAL, Almaami Abdul Kader KANE et autres étaient bien eux, chez leur grand-père Hammaat Paate Koli qui a lui-même appris auprès de leurs grands-parents, au Fuuta et en outre, fils de leur arrière-grand-mère Jeegi BAH !
Voilà, de façon ramassée, pour l’histoire de l’Université de Pir Saniokor qui, il faut donc en convenir, après Allahu Ta’aalaa L’Omniscient et Omnipotent, doit sinon tout du moins largement au Fuuta et aux marabouts fuutaŋkooɓe
7)- « Elimane Abdou Khadr, lorsqu’il a mené la Révolution Tooroodo, est allé au Walo où il a voulu instaurer la Charia. Parce que le Walo était Musulman ; n’oublions pas que Ndiadiane NDIAYE et Mbarka Mbo, ce sont leurs grands-parents qui étaient venus pour implanter l’Islam. »
Selon la tradition orale wolof, Ndiadiane NDIAYE, était le fils d’Abou Bakr ben Omar ou Abou Bakr ibn Omar (connu aussi sous le nom d'Abou Dardai, un chef de guerre almoravide qui a été tué en novembre 1087) et Fatoumata SALL, une princesse « Haal pulaar » de Guédé. Toutefois, aux termes de la tradition orale sérère, la version wolof suivant laquelle Ndiadiane serait le fils d'Abou Bakr, est erronée. Selon cette tradition, Ndiadiane NDIAYE monta sur le trône du Djolof sous le règne de Maissa Waly DIONE (le premier Guelwar à régner chez les Sérères du Royaume du Sine). Les Sérères poursuivent, indiquant qu’aussi bien Ndiadiane que NDIAYE, sont un prénom et un nom d'origine sérère. Certains ont avancé l'argument suivant lequel le père de Ndiadiane serait Lamane Boukar NDIAYE, un Sérère du Waalo, et sa mère Fatoumata SALL, fille de Lamtoro Ibrahima SALL.
A l'heure actuelle, il n'y a pas de consensus au niveau des historiens à ce sujet, même s’il est constant que la notion d'Abou Bakr, père de Ndiadiane NDIAYE, a été rejetée. Pour feu le Pr Cheikh Anta DIOP en tout cas, un Arabe ne saurait avoir NDIAYE pour patronyme. En effet, selon feu le Pr Cheikh Anta DIOP et Egbuna P. Modum: « L'histoire nous apprend que le roi N'Diadian N'Diaye du Djoloff, le premier roi de la valaf [Wolof], était d’une mère Toucoulor et d'un père arabe. Mais il existe des preuves de contradiction ici. Le fils d'un Arabe ne peut guère supporter le totémique nom N'Diaye. Et il est de notoriété publique que, à la fois le nom et le prénom de ce roi viennent de l'exclamation "C'est N'Diadian N'Diaye" (« calamité » ou « extraordinaire », en langue sérère) faite par un marabout sérère … [voyante Sérère]» (Cf. Diop Cheikh Anta et Modum, Egbuna P. Towards the African renaissance: essays in African culture & development, 1946-1960, p. 28. Karnak House -1996).
Le règne de Ndiadiane NDIAYE, l’ancêtre mythique des Wolofs, aurait duré de 1200 à 1249. Par ailleurs, d’après certains chercheurs, le mot « walaf » est l’ancêtre du mot « wolof ». Djolof MBENGUE, le fondateur du premier village wolof, se serait établi, avec plusieurs groupes wolofs, « dans ce qu’on appelait alors le pays ‘’LAF’’. En wolof le mot ‘’wa’’ signifie ‘’ceux venant de’’, donc ‘’wa-laf’’ désignait ceux venant du pays ‘’Laf’’. Ce pays ‘’Laf’’ est, avec le royaume du Waalo, l’un des lieux de naissance de l’ethnie wolof. Plus tard le mot walaf devint wolof. »
A ce propos, il nous a été donné de constater que dans son ouvrage « NATIONS NEGRES ET CULTURE », feu le Pr Cheikh Anta DIOP écrivait chaque fois « valaf » pour désigner « wolof ». Cela pourrait résulter d’une faute de frappe ; la lettre « V » n’existant pas dans l’alphabet wolof ! Comme quoi, pour le Pr Cheikh Anta DIOP aussi, la version relative à « Wa Laf » pourrait être digne d’intérêt pour les chercheurs.
Pour ce qui concerne l’Islam, il est tenu pour établi que les Soninkés et les « Toucouleurs » du Fuuta avaient déjà embrassé cette Religion d’Allah dès le VIIIème siècle, soit sitôt après leurs contacts après les Berbères, donc bien avant l’arrivée des Almoravides, qui ne date que du XIème siècle. La reconversion des Peuls (Pasteurs), des Sérères et des Wolofs n’interviendra que bien plus tard. Il est rapporté que c’est vers le XIème siècle, « que le flambeau du ‘’Jihad’’ fut repris par Abu Abdallah Ibn Tilouat et par son gendre Yahya Ibn Ibrahim al Ghali, auxquels succédèrent Yahya Ibn Umar Lamtuni, tous deux petits-fils de Talagagin » (Cf. La première hégémonie peule-Le Fuuta Tooro de Koli Teŋella à Almaami Abdul, page 88).
8)-« Donc…, mais à l’issue d’une bataille, avec le Kayor, celui-ci lui (à Elimane Abdoul Kader) donna en mariage sa fille, Arame Bakar MBOOJ. De toutes les épouses d’Elimane Boubacar, c’est Arame Bakar qui lui donna le plus grand nombre d’enfants. Tous les grands dignitaires aujourd’hui Pulaar, leurs grands-parents sont issus d’Arame Bakar. PARENA, Mariame WANE LY, c’est Arame Bakar sa grand-mère...»
Il y a manifestement une confusion à ce sujet! D’abord il ne s’agit pas d’Arame Bakar MBOOJ, mais plutôt d’Arame Bakar FAAL, fille du Damel Amari Ngoone Ndeela Kummba FAAL. C’est celle-là qu’Almaami Abdul Kader KAN avait épousée.
Ensuite, la femme qu’Elimaan Buubakar KAN épousa et qui lui donna de nombreux enfants et une illustre descendance s’appellerait, elle, Jaawo Joop MBOOJ (Diawo Diop MBODJ). Ce mariage fait partie, avec deux autres, de ce qui a été appelé « Les mariages diplomatiques », consécutivement à la défaite du Waalo à Ndeer. Le Professeur Seydou Boly KANE (Paix à son âme) rapporte que lorsque le Waalo perdit la bataille, les vaincus, après concertation, se dirent : « Vu que nous ne pourrons combattre nos ennemis de tous les côtés, essayons de conclure un accord de cessez-le-feu. »
Dans cette perspective, les Walo-Walo donnèrent la Linguère Dieumbeutt MBODJ, fille de la Linguère Fatim Yamar Khouriyaye en mariage à l’Emir du Trarza, en l’occurrence Mohamed El Habib, fils d’Amar Ould Mokhtar, l’Emir du Trarza qui avait détruit Ndeer ; tandis que sa petite-sœur Rokhaya Ndatté Yalla MBODJ, se maria avec Marosso Tassé DIOP, le frère du père de Lat-Dior. Rokhaya Ndatté Yalla a eu comme enfant Sidiya DIOP dit Sidi Léon, qui fréquenta l’école des Fils de Chefs, puis l’école polytechnique d’Alger, avant son intronisation comme Barak au Waalo. C’est ainsi que ces trois mariages ont contribué à l’apaisement politique de la zone. »
L’attaque de la ville de Ndeer eut lieu le 05 ou le 07 mars 1820 (les versions divergent sur la date). Les chansons traditionnelles du Fuuta relatent : « Ñande Ndeer Yanaa, Elimaan na darii. Conndii na feccee, omo tasbaa kurus-Yee!” (Le jour de l’attaque de Ndeer, Elimane était là debout. Lorsqu’on distribuait la poudre, il égrenait le chapelet.)
Ajoutons qu’à l’Ecole des Fils de Chefs dont la première promotion comprenait neuf élèves, Sidiya DIOP avait pour condisciples Abdou Salam KANE, ancien Chef de Canton de Kanel (1907- 1955), Bouna Alboury NDIAYE, dernier souverain du Royaume du Jolof et ancien Chef de Province du Jolof, le fils de Yero Boli DIAWO, entre autres (qu’Allah leur fasse miséricorde, ainsi qu’à tous nos disparus).
A notre avis, le fait qu’Arame Bakar ait eu plus d’enfants que ses co-épouses est, certes, une faveur émanant d’Allahu Ta’aalaa. Mais cela ne lui confère pas forcément la préséance sur les autres épouses d’Elimane. Cette faveur ne signifie pas qu’elle est la meilleure d’entre toutes les autres épouses d’Elimane! C’est Allah L’Omnipotent et Omniscient Qui donne ce qu’Il veut à qui Il veut parmi Ses esclaves et Ses servantes !
Sayyida Aasiya, l’épouse de Pharaon le damné n’a pas eu d’enfants. Mais le Très-Miséricordieux lui a construit un palais en Son Paradis. Sokhna Mariama n’a eu qu’un seul enfant, en la personne de Seyyidina Issa. Sayyida Aïcha, la mère des Croyants n’a pas eu d’enfants tout comme les autres épouses du Messager universel (excepté Sayyida Khadija) !
Toutes ces bienheureuses femmes ainsi que les Croyantes qui vivaient du temps du Sceau des Envoyés et des Prophètes, ont reçu l’assurance d’avoir le Paradis pour demeure éternelle ; cependant que rien n’est encore évident pour les autres femmes du monde, les Croyantes parmi les épouses des autres Prophètes mises à part !
Cela dit, cette manière de présenter les choses, de vouloir toujours mettre en avant une certaine Ethnie, en dit assurément long sur les intentions de Madame le Professeur qui tire chaque fois la couverture d’un seul bord ! De la part d’un cadre de son rang, d’une intellectuelle de son niveau, c’est inquiétant!
9)-« Donc, cela dit, Koly Tengella en personne, lorsqu’il quitta Ngabou, fit le tour du Sénégal, il passa par le Saloum où il épousa Mbossé à qui le terroir du Bosséa dans le Fouta doit son nom. »
Encore une fois, nous sommes au regret de dire : Non, Professeur ! Lorsque Koli Teŋella s’activait entre 1512 et 1537, le Bosséa existait déjà depuis longtemps ! Très longtemps !
10)- « Donc on a un métissage culturel tellement extraordinaire que ces cultures-là, quand Koly Tengella a créé, est revenu dans le Fouta, il a dit que désormais tous les Haalpulaar vont parler le peul. »
Le seul fait que Madame le Professeur ait désigné « les Haalpulaar », suffit comme preuve que la langue pulaar était déjà parlée dans la zone ; « les Haalpulaar » étant ceux qui parlent le pulaar! Faut-il toujours rappeler que « le Peul » ne désigne pas une langue mais quelqu’un de l’Ethnie des Fulɓe ? C’est Pullo qui est francisé en Peul. N’empruntez pas tout à Cheikh Anta DIOP qui, non content de considérer que les Peuls, les Toucouleurs et les Laobés bien qu’ayant tous en partage la même langue, à savoir le Pulaar, n’appartiennent pas pour autant à la même Ethnie, sont différents les uns des autres !
Ne suivez pas inconditionnellement les traces de Cheikh Anta DIOP pour qui les Peuls parlent le peul, les Toucouleurs le toucouleur et les Laobés le laobé ; confondant ainsi, dramatiquement, Ethnie, Caste et Langue ! Car le Savant sénégalais Cheikh qui ne sait rien du Fuuta et du Pulaagu, qui en sait plus sur l’Egypte que sur le Sénégal, n’a pas toujours raison.
11)-« Donc, c’est pour dire qu’on est fondamentalement un Peuple tellement métissé, que vouloir présenter tel comme appartenant à telle ethnie… Moi je n’aime pas entendre des qualificatifs du genre un tel est Diola, le patronyme de tel autre est ( )… Mais c’est pour montrer qu’aujourd’hui, au Sénégal, on doit arrêter de dire qu’un tel est ceci ( ). »
Sachez-vous désolidariser dès fois de votre maître Cheikh Anta pour qui « …un Africain conscient doit se dégager de tout préjugé ethnique et acquérir une nouvelle forme de fierté : la vanité d’être Valaf, Toucouleur Bambara, etc. doit faire place à la fierté d’être Africain, tant il est vrai que ces cloisons ethniques n’existent que par notre ignorance » (Cf. NATIONS NEGRES ET CULTURE-page 793).
Nous sommes enclins à penser que le but manifeste de ces gesticulations n’est autre que de chercher à effacer des langues et cultures qu'Allah à créées. Le Créateur de l’Univers a dit que s'Il l’avait voulu, Il aurait fait de nous une seule communauté. Mais il Lui a plu de faire de nous ce que nous sommes : « Oh hommes ! Nous vous avons créés d'un mâle et d'une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entreconnaissiez. Le plus noble d'entre vous, auprès d'Allah, est le plus pieux. Allah est certes Omniscient et parfaitement Connaisseur » (Sourate 49, verset 13).
Allah L’Omniscient a fait de nous des hommes et des femmes de différentes couleurs, de différentes tribus ou ethnies et de différentes langues, afin que nous échangions et nous enrichissions mutuellement par nos différences. C'est là, la Volonté d'Allah. Les ethnies sont une réalité. Vouloir le nier serait synonyme d’acte de rébellion contre Le Créateur Suprême.
Toutes les langues sont importantes auprès d’Allaahu Ta’alaa Qui les a Lui-Même enseignées à son premier Prophète et père de l’Humanité: Seyyidinaa Adama (Sur lui le Salut). Allaahu Ta’alaa a même mis en évidence l’importance de la langue dans le verset 4 de la Sourate “Rahmaan”: “Allamahul-Bayaan”.
En nous créant tels que nous sommes, avec nos diverses langues, L’Omniscient ne S’y est assurément point trompé. Existons donc tous et coexistons harmonieusement, chacun dans l’acceptation de l’autre.
Nous saisissons l’occasion pour présenter nos excuses à Monsieur Makhtar DIOUF, auteur de : LE SENEGAL-LES ETHNIES ET LA NATION, que nous avions, par mégarde, prénommé Mamadou, dans la première partie de notre REPONSE A MADAME LE PROFESSEUR FATOU SARR SOW !
12)- « Car on disait que les Wolofs sont métissés. Mais il n’y a pas plus métissé que le Pulaar ! Il n’y a pas plus métissé que le Pulaar..! »
Si une telle bourde provenait de l’un de nos autres esclaves Sérères, nous aurions compris ; nos chers cousins étant ce qu’ils sont ! Mais de la part de Madame Fatou SARR, épouse SOW ! Non, Madame SOW ne devrait simplement pas faire la confusion : «Mais il n’y a pas plus métissé que le Pulaar ! » Elle martèle, y revenant une seconde fois (veuillez excuser pour le pléonasme): « Il n’y a pas plus métissé que le Pulaar ! »
«Le Pulaar » est une langue ! Le Pulaar qui est également appelé « Fulfulde » dans d’autres pays est la langue des Fulɓe qui, encore une fois, sont tous ceux et toutes celles qui ont en commun l’usage de cette langue! Arrêtez de faire la faute ! Arrêtez tous d’entretenir la confusion ! En tout cas le Pullo du Sénégal, lui, établit toujours un distinguo net entre les mots « Jolof » (un terroir du Sénégal), « Jolfo » (un citoyen du Jolof) et « Jolfe » (la langue du Jolfo)!
Et puis, c’est feu le Pr Cheikh Anta DIOP lui-même qui a dit que « les Wolofs sont métissés » : « Le wolof serait né de la déformation du sérère par tous ces éléments étrangers : Saras, Sarakollés, Congolais, Toucouleurs, Peuls, Laobés, etc… » (Cf. Nations nègres et Culture-édition juin 2023, page 786).
C’est bien feu le Pr Cheikh Anta DIOP qui a dit qu’il n’y a pas plus métissé que le Valaf (Walaf, terme devenu Wolof) : « Chez les Valafs aucune des sept dynasties régnantes n’est originaire du pays. Les Sogon sont des Socés qui auraient été encore nombreux du temps de Ndiadiane Ndiaye avant d’être refoulés en Casamance. Les Gélvar sont des Sérères du Sine-Saloum. La mère de Déthié Fou Ndiougou, le prince qui a fondé la première dynastie de Damel, était originaire de Vagadou (ancien emplacement de Ghana). La dynastie des Guedj est d’origine populaire : elle naquit après le coup d’Etat que le Cayor ait connu, celui de Damelrat Soukabé, dont la mère était une femme du peuple et venait, disait-on, du côté de la mer, Guedj en Valaf. La dynastie des Bey est une famille ‘’porte-bonheur’’ (d’après l’opinion populaire), dans laquelle les princes aspirant au trône avaient l’habitude de choisir, momentanément, leurs femmes. Les Dorobé, à notre avis, proviennent de la caste, ou de l’ordre célèbre des Torobé qui étaient des Peuls » (Cf. NATIONS NEGRES ET CULTURE-page 791).
Disons quelques mots sur les Peuls (Fulɓe) qui, de l’avis de feu le Pr Cheikh Anta DIOP « étaient, à l’origine, des Nègres qui se sont métissés par la suite avec un élément blanc étranger venu de l’extérieur » (Cf. Page 616 de « NATIONS NEGRES ET CULTURE ». Idem pour les « Toucouleurs » qui seraient issus eux-aussi d’un métissage.
Pour feu le Pr Cheikh Anta DIOP, « les Peuls, comme les autres populations de l’Afrique Occidentale, seraient venus d’Egypte » (Cf. NATIONS NEGRES ET CULTURE-page 612). D’après feu le Pr Cheikh Anta DIOP, « Comme les autres populations qui composent le peuple nègre, les Toucouleurs sont venus du Bassin du Nil, de la région dite ’’ Soudan anglo-sahélien’’ (page 616).
Selon le Pr Cheikh Anta DIOP, « il existe, à l’heure actuelle, en Abyssinie, une tribu appelée Tekrouri, ce qui donne à penser, au cas où les Toucouleurs du Sénégal seraient une fraction de cette tribu, que la région du Tekrour, loin d’avoir donné son nom aux Toucouleurs, aurait reçu le sien de ceux-ci lorsqu’ils s’y installèrent. Il existe également un Nyoro (Massina) au Soudan Français, où les Toucouleurs ont aussi séjourné avant d’arriver dans la région qui portera le nom Tekrour au nord du Sénégal, d’où ils descendront lentement vers ce fleuve, dont les rives ont porté aussitôt le nom de Fouta-Toro » (page 627-618).
Mis à part quelques pays de la sous-région, on ne trouve nulle part ailleurs dans les nombreux autres pays africains de Fulɓe d’un côté et Toucouleurs de l’autre ! On n’y trouve que des Fulɓe et rien de plus ! On n’y parle pas, à l’image du Pr Cheikh Anta DIOP et consorts, d’Ethnie des Toucouleurs, encore moins de celle des Laobés.
Et dire que feu le Pr Cheikh Anta DIOP n’a pas manqué de recommander fortement à ses concitoyens Valafs d’arrêter de regarder de haut les autres : « …Cette étude démontre que le sang qui coule dans nos veines est un mélange de sang sérère, toucouleur, peul, laobé, congolais, sarakollé et sara (peuple des négresses à plateau). Dès lors, que reste-t-il du mythe d’une race pure, douée d’une supériorité qui l’incite à traiter les autres de LAKAKAT ? » (Cf. NATIONS NEGRES ET CULTURE-page 793).
Aucune médiocrité ne peut dépasser la contre-vérité, et aucun degré de ridicule ne peut se situer au-dessus d'une invention de faits historiques. Comme quoi, avec cette parfaite aisance dans la sordide assurance de la manipulation et le travestissement des faits, il n'y a pas que les conteurs des traditions orales qui embellissaient les récits. Si de grands érudits font déjà du jésuitisme un fonds de commerce médiatique, nous allons inévitablement vers l'immensité de la médiocrité dans l'ensemble de nos domaines...
Autant reconnaître simplement que provenant les uns comme les autres du même endroit et parlant tous, par surcroît, la même langue, ceux que l’on appelle Peuls, Toucouleurs et Laobés constituent une seule Ethnie ! Car le fait que certains parmi eux soient des pasteurs, d’autres des agriculteurs (ce qu’ils sont tous, par ailleurs), ou des pêcheurs, ou des spécialistes du bois, ou des artisans du textile, ou des artisans des métaux, ou des artisans du cuir, etc. ; en somme, qu’ils soient tous « Les décorateurs de la vie sociale par leur technicité ou par leurs talents ou dons, maîtrisés à la suite d’un long apprentissage », ainsi que les a décrits le respecté Yaya WANE, ne les empêche pas d’appartenir à la même Ethnie !
Nous saluons, à ce propos, le travail remarquable de l’historien et sociologue malien Youba BATHILY, un Soninké-Mandingue de 59 ans, auteur de nombreux ouvrages (Oralité, Bulletin du collectif des historiens du Sahel-Soudan, N°3 Mai 2015 ; Rois et Peuples de l'Empire du Ghana-Editions Kindle, 2018 ; Localisation Des Anciennes Occupations Humaines au Sahel: Selon La Tradition Orale-Editions Mieruba, Bamako, 2018 ; West Africa before the Empire of Ghana, Smashwords Editions, 2018 ; Avant l'Empire du Ghana, Editions Mieruba, 2019 ; Après l'Empire du Ghana. Entre les Empires du Ghana et du Mali. Editions Mieruba, 2019 ; etc.).
En narrant les péripéties du voyage jusqu’à l’arrivée des Fulanis (les Fulɓe) en Afrique de l’Ouest, le Pr Youba BATHILY nous dit que les traditions orales des Assouanikes et Harratines récoltées en 2005 à Djidda (sud de Guiré dans le cercle de Nara) de Diffa et près de Maradi (Niger), renseignent sur le fait qu'à la recherche de pâturage, les Fulanis, qui parlaient une langue appelée Warama, auraient quitté la région de Woromiya éthiopien sous la conduite du patriarche Kaw BAH. La traversée du territoire éthiopien des Fulanis appelés autrement Pouls, s'est déroulée dans la difficulté et accompagnée de perte de vies et de bétail.
Il indique qu’ils ont récolté un récit intéressant sur l'histoire de l'immigration des Peuls, qu’ils ont appris que ceux-ci sont venus de l'Ethiopie, par le Soudan, le Tchad, le Nigeria, le Niger en rentrant au Mali par la région de Ménaka. Les Peuls auraient quitté l'Ethiopie 1122 ans avant l'Hégire (donc, vers 500 avant Jésus) pour atteindre la région de Ménaka vers l'an 21 après Jésus. Ils sont rentrés dans le pays de Ménaka 521 ans après avoir quitté l'Ethiopie. Ils ont traversé la région de Tombouctou huit ans après leur départ de Ménaka (Tombouctou vers l'an 29 et la région de Mopti est atteinte vers l'an 5), puis la région de Mopti vingt-cinq ans après Tombouctou.
Venant de l'ouest (Anderamboukane, Ménaka), les Peuls traversèrent le fleuve Niger, dans la commune de N'Tillit, puis le pays de Gossi, Inadiatafane, Bambara-Maoude, Diaptodji, Dangol Bore. Ils passèrent par Ouroube-Doude, Konna et Dialoube pour encore traverser le fleuve Niger au Sud du lac Debo par la commune de Bimbere-Tama. Certains s'installèrent entre San (Est de Ségou) et Goundaka (Est de Mopti), ces derniers pâturaient au bord des collines dogons du Gondo où vivaient le Bobo ou Bwa, c'est dans cette cohabitation qu'ils sont devenus des cousins à plaisanterie des Bobo.
Les Peuls prirent la direction Ouest pour passer par le Nampalari, Sokolo et Niono (Nord de Ségou). Ils vont encore traverser le fleuve Niger sur des berges situées entre Ségou et Markala (actuelle commune de Pelengana, Ségou) pour se diriger vers l'Ouest de l'actuel cercle de Dioila (sur de Kulikoro) au cours de neuf ans soit 63 après leur départ de la région de Mopti. Ils vont atteindre le Djitoumou en l'an 97 soit trente-quatre années après avoir quitté la région de Dioïla ; puis le Wassoulou (Ouest de Sikasso) huit ans plus tard soit en l'an 105 et le Mandé (Ouest de Bamako) vingt-neuf ans après la région du Wassoulou (en 134 après Jésus).
Les Peuls arrivèrent au Khasso en 148 soit quatorze ans après avoir quitté la région du Mandé et ils ont atteint le sud du Fleuve Sénégal qu'ils vont appeler Futa-Toro quarante-trois ans après avoir quitté la région du Khasso (Kayes au Mali). Ils baptisent en 177 une autre région montagneuse plus au Sud en Futa-Diallo (Guinée) vingt ans après avoir quitté la région du Futa-Toro soit en l'an 197. Les Peuls vont s'installer sur les berges septentrionales du Fleuve Sénégal dix-sept ans plus tard (en 214). Ils arrivent sur le territoire de Nioro et de Koumbi (capitale de l'empire du Ghana) en 343, soit 965 ans après leur départ d’Éthiopie.
Les Peuls apportèrent une nouvelle langue en Afrique de l'Ouest. Ils vénéraient les fétiches et les ancêtres restés dans leur pays d'origine. Leur savoir-faire médicinal consistait à lire des formules incantatoires, à extraire des médicaments dans les excréments ou la bile de vache. Ils apportèrent également des chansons dont les plus célèbres sont Oussef (louange à un ancêtre éthiopien) et Sefema (chant sur l'amour).
En préfaçant « La première hégémonie peule : Le Fuuta Tooro de Koli Teŋella à Almaami Abdul » du Pr Oumar KANE, le Pr Amadou Mahtar MBOW, ancien Directeur général de l’UNESCO » dira, fort à propos que: « « …Les Fulɓe constituent le seul groupement ethnique de l’Afrique de l’Ouest à avoir essaimé, de manière presque continue, de l’Atlantique à l’actuelle République du Soudan à l’Est, tout en gardant leur langue et les éléments essentiels à leur culture. Très islamisés, pour beaucoup, ils ont été des propagateurs actifsde la foi et des éducateurs avisés. Leur science et leur piété leur ont valu la considération dans les pays où ils arrivaient. Ils ont pu ainsi, tout en intégrant des éléments autochtones, préserver leur cohésion et mettre en place de nouveaux Etats parmi les plus florissants de leur temps. Ces Etats disparus, ni la conquête et l’occupation coloniales, ni les indépendances n’ont pu entamer leur existence communautaire» (page 9).
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LES UNES DE LA PRESSE DE CE MERCREDI 3 JUILLET 2024
Sud Quotidien, Walf Quotidien, Le Témoin Quotidien, Révélation Quotidien, L'As, Libération, L'Observateur, Stades, EnQuete, Yoor-Yoor Bi, Bes Bi le jour, Le Soleil
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Baadoolo - 15 juillet, l’anniversaire et la Dpg
Pros, billaay yaay seef ! Cette Dpg inédite si mbedd mi sera aussi une fête. A moins que la majorité revienne à de meilleurs sentiments. Mais ces invitations au corps diplomatique, intellectuels, universitaires... seront aussi pour son anniversaire, 15 juillet 1974. Du saf sapp parce que du am nguewël. Sans Pekh, ni Haaj Mansour, ni Garmi... Cette Dpg sera aussi un joli gâteau. Parce que sans questions. Eh Mbaye ! Mais Benno ne compte pas lui faire cadeau. 50 ans, ça se fête !
Les résultats de la mission de Thierno Madani à Médina Gounass «Des acquis jamais obtenus depuis 45 ans»
«Des acquis jamais obtenus depuis 45 ans». C’est le résumé du résultat de la médiation de Thierno Madani Tall entre les communautés de Médina Gounass, le 28 juin dernier. Un communiqué indique «les 2 parties ont été sensibilisées sur la nécessité de vivre dans une entente et des promesses et engagements ont été pris pour parfaire la relation et la cohabitation». La note ajoute : «La mission a débuté chez le khalife Thierno Amadou Tidiane Ba où des tête-àtête ont eu lieu en privé et à la mosquée, de 11h à 17h. Puis, elle s’est rendue chez Thierno Mounirou Baldé, khalife du Fouladou, de 18h à 22h.» La source précise que le doyen de la communauté Fouladou de Dakar, Thierno Abdoul Wahab Seydi était dans la délégation et a «exprimé devant le khalif Thierno Amadou Tidiane Ba, son souhait pour une bonne cohabitation entre les deux communautés.» Thierno Madani Tall, qui était accompagné d’une délégation de 26 personnes qui a quitté Dakar et de 12 personnes venues de Tamba, a «vivement remercié toute la population de Médina Gounass et environs».
Thierno Bocoum tire sur le Pm «L’hôtel Azalaï, sur le domaine maritime, appartiendrait à ses amis»
Le leader du mouvement Alliance générationnelle pour les intérêts de la République (Agir) a fait face à la presse ce mardi. Thierno Bocoum a évoqué plusieurs sujets dont le comportement du Premier ministre, l’hôtel Azalaï et la nécessité pour l’opposition de se regrouper. «Nous encourageons les autorités vers la rupture. Cependant, nous avons été surpris par le comportement de Ousmane Sonko qui attaque tout le monde, un Sonko qui ne respecte pas les institutions ni les Sénégalais. Il n’a pas les capacités d’un Premier ministre. Il y a un défaut de respect des institutions et un manque de respect envers le peuple sénégalais», a-t-il dit. L’ancien député est formel : «Le jour où Ousmane Sonko fera sa Dpg hors de l’Assemblée nationale, on considérera qu’il n’est plus le Premier ministre.» Il a aussi dénoncé ce qu’il appelle «l’affaire la plus scandaleuse». Il s’agit pour lui de l’hôtel Azalaï qui, d’après lui, «appartiendrait à des ‘’amis’’ de Sonko, et est bâti sur 7 000 mètres carrés, sur le littoral». Avant de rappeler que «c’est là où le Pm et le président Diomaye avaient établi leur quartier général juste après leur accession au pouvoir. L’hôtel Azalaï est dans le domaine public maritime. Qu’ils nous disent comment cela est possible ?»
Annonce d’un préavis de grève - Les travailleurs de l’Aviation civile menacent de tout paralyser
Le Syndicat national des travailleurs de l’aviation civile du Sénégal (Synatracs) menace de paralyser les activités, informe Seneweb. Son Secrétaire général, Mamadou Diop, a annoncé le dépôt d’un préavis de grève. Les travailleurs interpellent le président de la République. Selon lui toutes les branches de l’aéroport sont en difficulté. Le 26 juin dernier, c’est l’Intersyndicale des travailleurs de l’aviation civile dont fait partie le Synatracs qui s’était réunie pour dénoncer, entre autres, «le manque de réponse des autorités face aux urgences du secteur, les arriérés de paiement de l’Isa des travailleurs de l’Asecna, la situation des agents menacés d’expulsion de la Cité batterie». Une dizaine de syndicats déplorent «le mutisme sidérant de la tutelle face aux urgences de plus en plus acerbes du secteur».
Modernisation et digitalisation de l’Assemblée nationale Guy Marius Sagna dénonce le don de la Koica
Les travaux de rénovation de l’hémicycle ont officiellement pris fin, avait annoncé l’Assemblée nationale, la semaine dernière. Ce projet de modernisation et de digitalisation a été financé par l’Agence coréenne de coopération internationale (Koica). Ce mardi, le député Guy Marius Sagna a critiqué cette option. «Je dénonce l’inscription ‘’Republic of Korea. Koica’’ sur les micros qui a été imposée, tolérée le premier jour de l’utilisation de l’hémicycle réhabilité, parce que ces micros ont été offerts par la Corée», a-t-il écrit dans une note. Selon lui, c’est «une honte qu’une Assemblée nationale accepte ce genre de don et en même temps qu’elle refuse, depuis septembre 2022, de rendre compte aux 165 députés de la gestion de ses budgets». Il en déduit que «cette Assemblée est tout sauf nationale d’autant plus qu’elle ne s’intéresse pas à la présence militaire française au Sénégal, ni au franc CFA, ni à rien ayant un rapport avec la souveraineté».
Jean Baptiste Tine répond au maire de Colobane «Ma circulaire s’adressait aux autorités administratives»
«C’est la première fois que je vois un maire qui n’est pas destinataire d’une circulaire qui dit que c’est le ministre de l’Intérieur qui m’a chargé de le faire. Le ministre de l’Intérieur ne suggère rien au maire. Parce qu’il y a ce qu’on appelle des pouvoirs déconcentrés et pouvoirs décentralisés. Ma circulaire s’adressait aux autorités administratives. Est-ce qu’il y a eu des problèmes au niveau de Rufisque ? Il n’y a pas beaucoup de problèmes à Rufisque parce que le truc était bien encadré. Je pense que vous avez d’autres problèmes à Colobane et tout le monde s’est engouffré dedans. Et ce n’est pas très bien».
L'ASSAUT DES MULTINATIONALES SUR LE MARCHÉ SÉNÉGALAIS
Après les Grands Moulins de Dakar, Patisen et Avisen, c'est au tour de Sédima, fleuron avicole national, d'être convoité par des capitaux étrangers. Pour la Confédération nationale des employeurs, l'État se doit de préserver ces champions industriels
Après les Grands Moulins de Dakar rachetés à des centaines de millions d’euros par les Américains de Seabord, Patisen plusieurs dizaines de millions d’euros par la Marocaine Al Mada, Avisen racheté par Olam, c’est au tour de la Sedima de subir l’assaut de grandes multinationales qui, à partir du Sénégal, visent le marché de la CEDEAO. Le manque de soutien de l’État regretté par Alla Sène Guèye, président de la commission économie et finances de la Cnes.
’Le groupe Sedima en vente, près de 2 500 emplois en jeu’’. Cette information donnée par le journaliste Omar Fédior, hier sur sa page Facebook, a été largement relayée. Chacun y allant de son commentaire. Pour les uns, l’État doit racheter l’entreprise, en tout cas tout faire pour que la société ne tombe pas dans le capital privé étranger. Pour les autres, il faut que l’État vienne en aide au chef d’industrie, le fondateur de la Sedima, Babacar Ngom, quelles que puissent être par ailleurs leurs divergences.
Président de la commission chargée de l’économie et des finances de la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (Cnes), Alla Sène Guèye se veut très clair : ‘’Je pense que l’État doit être plus regardant dans ces genres d’opérations, concernant des ventes d’entreprises. Lorsque des entreprises étrangères veulent racheter des entreprises sénégalaises qui évoluent dans des secteurs stratégiques, il faut que l’État puisse intervenir. Perdre Sedima aujourd’hui, c’est perdre une partie de notre souveraineté. Je pense que l’État doit mettre en place des mécanismes pour la sauvegarde de nos champions’’, plaide le spécialiste.
Si beaucoup de Sénégalais ont été surpris et choqués par cette annonce soudaine de la vente de la Sedima, ils sont nombreux les acteurs économiques qui ne l’ont guère été.
Cela fait, en effet, plusieurs mois que l’entreprise familiale vit des moments difficiles. Interpellé sur la question, cette source précise : ‘’Je ne suis pas au courant d’une vente, mais cela ne me surprendrait pas.’’ À la question de savoir pourquoi, elle rétorque : ‘’C’est très simple. Un entrepreneur travaille sur des projections avec des chiffres. Si les perspectives de croissance de ses revenus ne sont pas bonnes, au mieux, il freine ses projets d’investissement, au pire, il désinvestit. Le problème, au Sénégal, c’est que l’entreprise n’est pas soutenue.’’
La famille Ngom aurait déjà vendu plus de 50 % de l’entreprise
Dans le cas de la Sedima, elle a en plus la malchance de devoir vivre avec un régime avec lequel elle a eu quelques bisbilles dans le passé. L’un des points de divergence a été l’affaire Ndingler dans laquelle l’actuel président a toujours été en désaccord avec les Ngom. S’y ajoute sa fille et non moins directrice générale de la boîte qui s’est engagée en politique et se positionne comme opposante au régime du président Bassirou Diomaye Diakhar Faye et d’Ousmane Sonko.
D’ailleurs, récemment, l’affaire Ndingler est revenue sur la table et il a été fait état d’une volonté du Premier ministre de restituer les terres aux paysans, alors même que Babacar Ngom réclame un titre foncier sur les mêmes terres. Des événements qui montrent, s’il en était encore besoin, que si la vie a été difficile pour les Ngom sous Macky Sall, elle risque de l’être encore plus sous Diomaye Faye.
Selon certaines sources, les Ngom auraient déjà vendu plus de 50 % de leurs actions dans la Sedima à des Américains. Aujourd’hui, ils sont plus dans d’autres secteurs dont l’immobilier, avec notamment Batix. Interpellé sur les négociations entre GMD (Grands Moulins de Dakar) et Sedima, nos sources estiment qu’en réalité, GMD a toujours discuté avec Sedima. Mais Babacar a toujours posé une condition : conserver la majorité des actions de son entreprise. Sauf que dernièrement, les conditions financières se sont nettement détériorées et le magnat de l'aviculture aurait revu sa position. Il aurait cédé la majorité, mais pas à GMD. ‘’Déjà, il y avait des difficultés avec le fisc. Aujourd’hui, c’est sûr que les nouvelles autorités vont remettre sur la table l’affaire Ndingler. Je pense que toute cette atmosphère a un peu pesé sur la balance’’, informe un ancien cadre de l’entreprise à notre source. Malgré ces affirmations, des sources proches du PDG insistent qu’à ce jour, Babacar Ngom continue de contrôler l’entièreté des actions de son entreprise.
Des sources proches de la famille soutiennent que Babacar Ngom contrôle toujours l’entièreté des actions
Ainsi, la perte du contrôle de la Sedima par Babacar Ngom risque d’allonger la liste des entreprises qui échappent peu à peu aux champions industriels nationaux. Plusieurs secteurs considérés comme de souveraineté sont concernés par ce phénomène. Il en est de l’agro-industrie qui défraie aujourd’hui la chronique avec la Sedima. Avant cette entreprise, il y a eu le cas des Grands moulins de Dakar vendue par la famille Mimran à la firme américaine Seabord ; Avisen qui a été racheté par Olam, mais aussi Patisen qui a été reprise par la Marocaine Al Mada.
Selon M. Guèye de la Cnes, ceci est de la faute principalement de l’État. ‘’L’État doit être plus regardant sur les filières stratégiques. Si quelqu’un veut vendre, l’État doit voir d’abord comment l’accompagner, s’il est possible de l’accompagner. Sinon, si la vente n’est pas évitable, un organisme comme le Fonsis doit pouvoir intervenir pour que l’entreprise n’échappe pas aux capitaux sénégalais. C’est comme ça que ça se passe dans plusieurs pays’’.
Au-delà du marché sénégalais, les grandes firmes internationales visent surtout les marchés régionaux. Dans le cas de la Patisen, par exemple, ‘’c’est une manière de contourner le refus de la demande du Maroc d’adhérer à la CEDEAO. Puisqu’on lui refuse cette adhésion, il contourne l’interdiction en achetant des entreprises CEDEAO. Tout l’amont, ils vont l’amener du Maroc. On peut même utiliser la Patisen pour écouler dans cet espace. On ne construit pas une industrie nationale forte de cette manière’’.
Agro-industrie, téléphonie, banques, assurance… Ces secteurs de souveraineté qui échappent aux champions locaux
En sus de l’agro-industrie, il y a également des secteurs névralgiques comme la téléphonie, les assurances, les banques, autant de secteurs sur lesquels l’État livre des pans de sa souveraineté à des étrangers.
Il y a quand même de bons exemples qui devraient inspirer. ‘’Quand BNP Paribas a voulu vendre sa filiale, la Bicis, l’État est intervenu et a pesé de tout son poids pour que la banque soit reprise par un national. Voilà ce qu’il faudrait faire. Si les capitaines d’industrie locaux sentent le soutien de l’État, il n’y a aucune raison pour qu’ils ne puissent pas prendre le flambeau’’.
Avec le nouveau régime, l’espoir est permis, selon le responsable à la Cnes. Il rappelle les propos du président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, lors du dernier Conseil des ministres. ‘’Je pense que le président de la République a pris la pleine mesure de la situation. Quand des entreprises sénégalaises sont créées depuis zéro, avec de l’expertise sénégalaise, du management sénégalais, quand on vend, l’État doit avoir son mot à dire. Quand il y a des difficultés, l'État doit pouvoir les soutenir. On ne peut pas prendre sa fille et la donner en mariage au premier étranger qui vient’’.
DETTE UEMOA, LE BÉNIN SURCLASSE LE SÉNÉGAL, LA CÔTE D’IVOIRE INDÉBOULONNABLE
Le pays de la téranga, deuxième économie de l'Union, est désormais relégué au troisième rang sur les marchés financiers internationaux, où Cotonou et Abidjan bénéficient d'une plus grande confiance des créanciers.
Deuxième économie de l’Union économique et monétaire ouest-africaine, le Sénégal est relégué au troisième rang sur les marchés financiers internationaux où les créanciers font plus confiance au Bénin et à la Côte d’Ivoire.
Cela ressemble à une course effrénée vers l’endettement et les eurobonds. À la faveur de la nouvelle alternance, on avait cru que le Sénégal pourrait lever un peu le pied sur l’accélérateur de la dette, mais il faudrait encore attendre. Les nouvelles autorités souverainistes, sur ce point, entament leur magistère en continuant l’œuvre de leurs prédécesseurs. Ceci semble même être assumé par le ministère des Finances qui, dans son communiqué relatif à la dernière levée de 750 millions de dollars US d’eurobonds, se réjouit en ces termes : ‘’Les résultats obtenus confortent l’État du Sénégal dans son statut d’émetteur de référence, eu égard notamment à la qualité et à la crédibilité de sa politique économique.’’
Ce retour du Sénégal sur le marché international des eurobonds ne manquera pas de booster le niveau de la dette en monnaie étrangère, jugée par beaucoup d’économistes comme néfaste pour nos économies. À la fin de septembre 2023, informe le bulletin statistique de la dette publique pour le 4e trimestre (ministère des Finances), l’encours global de la dette publique était estimé à 15184,7 milliards F CFA. Il était constitué à 67% de dette extérieure et 33% de dette intérieure. Selon le bulletin, la dette extérieure est essentiellement constituée d’un endettement en monnaie étrangère, soit 99 % contre 1 % seulement en francs CFA. Dans le détail, c’est réparti comme suit : 46 % en euros, 41 % en USD, 5 % en CNY, 1% en CFA et 7 % dans d’autres devises.
Par rapport au Bénin et à la Côte d’Ivoire, le Sénégal est loin d’être un exemple en matière de politique d’endettement, si l’on en croit en tout cas les principales agences de notation. Paradoxalement, les trois pays étaient en même temps sur le marché financier international des eurobonds. Alors que le Sénégal cherchait à mobiliser 750 millions USD, le Bénin a levé le même montant à un taux certes légèrement plus élevé (7,9 %), mais pour une maturité deux fois plus longue, soit 14 ans contre 7 ans pour le Sénégal.
Depuis quelque temps, s’accordent à dire nombre d’experts, les marchés font plus confiance au pays de Patrice Talon qu’au Sénégal.
La ruée vers les eurobonds
Selon Standard and Poor’s, le Bénin surclasse le Sénégal sur bien des points. En effet, ‘’le 19 avril 2024, l’agence de notation S&P a rehaussé la notation de crédit de la République du Bénin, la faisant passer de B+ avec une perspective Positive à BB- avec une perspective Stable’’.
Avec cette notation, indique le site spécialisé, le pays ‘’surclasse le Sénégal (noté B+/B) grâce à une batterie de réformes de l’environnement des affaires et à une discipline budgétaire saluée par l’agence de notation’’. Il se hisse au même niveau que la Côte d’Ivoire, première économie de la zone UEMOA, qui caracole en tête depuis bien longtemps.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que pendant que le Sénégal navigue dangereusement dans la zone rouge, le Bénin, lui, prend le chemin inverse pour en sortir de plus en plus.
Selon le dernier rapport de la Caisse autonome de gestion de la dette du Bénin, ‘’l’encours de la dette publique s’est établi à 6 508,52 milliards F CFA en décembre 2023, soit un taux d’endettement de 54,91 %’’ contre environ 75 % pour le Sénégal.
Pour la Côte d’Ivoire, la dette se chiffrait fin 2023 à plus de 25 000 milliards F CFA, soit un ratio de 58,1 % par rapport au PIB chiffré à 47 913 milliards et une croissance de 7,2 %.
Maitre de conférences et agrégé en économie, l’Ivoirien Prao Yao Séraphin revient sur la bonne santé de la Côte d'Ivoire, en se basant sur les principales notations des agences de référence. ‘’Suite à une évaluation de l’agence de notation financière Fitch Ratings, le lundi 19 juillet 2021, le pays a vu sa note de crédit de long terme passée de B+ à BB- avec une perspective stable. À cette date, cette notation était la meilleure du continent après celle du Maroc (noté BB+ par Fitch)’’.
Par la suite, indique-t-il, le 19 mai 2023, l’agence de notation Standard and Poor’s (S&P Global Ratings) a confirmé ses notes de crédit souverain à long et à court terme en devises étrangères et locales de la Côte d’Ivoire, BB-/B avec perspectives stables. Last but not least, le 1er mars 2024, l’agence de notation internationale Moody’s, a rehaussé la notation de crédit de la Côte d’Ivoire, de Ba3 (Perspective Positive) à Ba2 avec perspective stable, explique le professeur qui précise : ‘’La Côte d’Ivoire reste ainsi un pays qui rassure aux yeux des investisseurs et plus singulièrement auprès des agences de notation.’’
Ces notations, souligne-t-il, sont essentielles sur le marché financier international, car elles sont déterminantes dans les capacités du pays à lever des fonds de même que pour les modalités d’emprunt. Le professeur Séraphin est revenu sur les principales données utilisées pour procéder à ces notations. Selon lui, elles relèvent de quatre grandes familles. En premier, il y a les performances économiques qui font état de la capacité d’un pays à générer de la croissance (variables retenues : croissance, inflation…), l’analyse des finances publiques qui permet de juger la trajectoire et la soutenabilité à terme de la dette publique (dette publique, déficit public, service de la dette…), l’analyse des risques externes afin de mesurer l’intégration et la dépendance des pays vis-à-vis de l’extérieur dans les échanges de biens et de capitaux (échanges commerciaux, balance des paiements, dette détenue par les non-résidents…) et enfin les perspectives politiques basées sur des indicateurs structurels pour évaluer la flexibilité et la qualité des institutions.
Ces dernières années, le Sénégal a particulièrement souffert, selon les spécialistes, de la crise politique qui était à l’origine de nombreuses appréhensions des marchés et autres agences de notation. Dans une contribution, le professeur Abou Kane de la Faseg/Ucad disait : ‘’Entre 2021 et 2024, la situation du Sénégal a inquiété tous les investisseurs. Apparemment, ils ne se sont pas encore remis de leurs émotions et stress malgré la levée de l’incertitude politique.’’ Le professeur revenait aussi sur les autres facteurs, dont l’évolution du déficit budgétaire, la soutenabilité de la dette, la qualité de la gestion macroéconomique.
Les éclairages de Prao Yao Séraphin, maitre de conférences agrégé en économie
Le spécialiste ivoirien, Prao Yao Séraphin, est revenu sur les tendances globales de la dette dans l’espace UEMOA. À entendre ses explications, s’il y a un cas qui doit vraiment inquiéter, c’est la Guinée-Bissau qui traine un ‘’risque de surendettement élevé’’ avec un ratio dette/PIB de l’ordre de 79,8 %.
Pour autant, la situation du Sénégal doit aussi appeler à la vigilance, selon le spécialiste, avec le dépassement du seuil de 70 % fixé par les critères de convergence de l’organisation communautaire. Pendant ce temps, le Togo s’en approche avec 68 %, constate l’économiste.
Pour la Côte d’Ivoire, explique le Pr. Séraphin, l’encours de la dette a augmenté de 52,1 % du PIB en 2021 à 56 % du PIB en 2022 puis à 56,7 %, fin juin 2023 (58,1 % selon les chiffres du ministère de l’Économie en fin 2023, NDLR). ‘’Le risque de surendettement du pays reste modéré, mais volatil’’, relève l’agrégé en économie, non sans préciser : ‘’Le taux d’endettement de la Côte d’Ivoire reste inférieur au seuil fixé par l’UEMOA (70 % du PIB). Sur la période 2016-2023, le service de la dette capte environ 39,34 % de ses recettes budgétaires.’’
Selon lui, grâce à l'adoption de mesures fiscales innovantes et à la maitrise des dépenses, le déficit budgétaire a été ramené à 4,1 % du PIB, soit le niveau le plus bas depuis 2019, et en baisse par rapport aux 5,5 % de 2022. ‘’Cette amélioration est due à un accroissement des recettes totales de 0,7 % pour atteindre 15,0 % du PIB, tandis que les dépenses publiques ont diminué de 0,6 % pour atteindre 19,2 % du PIB. L'assainissement budgétaire devrait se poursuivre à moyen terme, le déficit budgétaire diminuant encore pour atteindre 2,7 % du PIB d'ici à 2026’’.
La dette en monnaie étrangère, la vraie gangrène
Chez les pro-endettements, on a souvent tendance à dédramatiser. D’aucuns vont même jusqu’à s’interroger sur la pertinence des critères de convergence que l’on brandit très souvent comme un plafond de verre pour les États. Le problème d’ailleurs, pour beaucoup de pays, c’est moins le niveau de la dette qui préoccupe, mais plutôt la nature de la dette souvent libellée en monnaie étrangère avec les fameux eurobonds. Le professeur Prao Yao Séraphin revient sur les niveaux de la dette extérieure qui renseignent approximativement sur la dette en monnaie étrangère des pays. ‘’En ce qui concerne le rapport dette extérieure-dette intérieure, souligne-t-il, le Bénin (73,1 %) dispose de la proportion la plus importante, suivi du Niger (64,6 %). Quant au Sénégal, il est à 63,3 % contre 60,7 % pour la Côte d’Ivoire’’.
En dehors de l’exception nigérienne, les putschistes sont généralement bien notés sur ce plan. Le Mali (50,2 %) et le Burkina Faso (46,8 %) disposent des plus faibles proportions, ce qui pourrait s’expliquer par les tensions entre ces pays et les principaux bailleurs occidentaux. Cela dit, la tendance globale, selon le Pr. Séraphin, est à la baisse de la proportion de dette extérieure. ‘’La part de la dette extérieure demeure la plus importante (60,9 % du PIB en 2022 contre 39,1 % pour la dette domestique), mais a diminué par rapport à 2021 (63,9 % du PIB), traduisant ainsi la volonté des États d'accroître la part des ressources issues du marché régional’’, a-t-il renchéri.
PS : Il faut rappeler que le ministère des Finances du Sénégal s’est souvent défendu, en ce qui concerne le taux d’endettement par rapport au PIB, en invoquant une différence de calcul avec les voisins. Alors que ces derniers se conforment aux directives de l’UEMOA en ne considérant que la dette de l’administration centrale, le Sénégal lui intègre dans ses 75 % la dette du secteur parapublic.