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26 novembre 2024
Culture
DANS UN MEME SILLAGE
Une dizaine d’artistes barbadiens, une cinquantaine d’artistes sénégalais. Le village des arts a servi d’écrin à cet échange entre deux mondes que l’histoire et la géographie rapprochent.
Une dizaine d’artistes barbadiens, une cinquantaine d’artistes sénégalais. Le village des arts a servi d’écrin à cet échange entre deux mondes que l’histoire et la géographie rapprochent. Dans le cadre de la Biennale d’art contemporain de Dakar, la discussion est ouverte par ce programme «Transatlantique 1».
«Nous sommes le peuple qui a quitté Gorée, El Mina et tous ces ports esclavagistes d’Afrique.» Ces mots sont ceux de Nyzinga Onifa, coordonnatrice de l’exposition «Transatlantique 1». Ces mots ont raisonné durant l’exposition qu’une dizaine d’artistes peintres originaires de la Barbade tiennent au Village des arts de Dakar. Comme un pied de nez à l’histoire, ces artistes dont les ancêtres ont été déportés dans les cales des négriers, sont revenus en terre sénégalaise. Intitulée «Transatlantique 1», l’exposition est un dialogue entre ces artistes caribéens et leurs homologues sénégalais avec qui ils partagent les cimaises de la Galerie Léopold Sédar Senghor du Village des arts. Nyzinga Onifa a vécu au Sénégal pendant 10 ans. Et pour réduire le défaut d’information sur son île d’origine, elle a conçu ce programme d’échange aujourd’hui mis en œuvre par la Fondation culturelle nationale de la Barbade. Ces artistes, au nombre de 11, présentent 20 œuvres dans le cadre de cet échange. Face à eux, une cinquantaine d’artistes sénégalais. «L’art a cette valeur de rapprocher les peuples», souligne l’artiste Zulu Mbaye, partenaire dans l’organisation de cet évènement. Les liens entre l’Afrique et la Barbade sont bien réels. Il suffit de voir les thématiques explorées par les artistes. L’eau est en effet au centre des œuvres présentées par les Barbadiens. Risée Chaderton-Charles est une artiste dont les œuvres représentent des créatures sous-marines. Photographe d’art, elle se réjouit de voir la convergence d’intérêts autour de cet élément. «Ce qui m’a frappée, c’est le rapport avec la mer. L’eau représente beaucoup pour nous. Quand on se sent mal, on fait des libations, quand on a soif, on boit de l’eau et on se retrouve aux endroits où il y a de l’eau pour certaines formes de prières. J’explore la mer, les éléments et toute cette vie dans l’eau.» Engagé dans un travail de mémoire, David Guru présente Les arrivants, sculpture d’un vaisseau indigène africain précolombien. Il rend ainsi hommage à l’ingéniosité des Africains dans les Caraïbes avant l’arrivée de Christophe Colomb. Ras Akyem-i Ramsay navigue dans la conscience altérée d’artistes qui ont été aliénés, opprimés, marginalisés, emprisonnés et terrorisés. Son tableau où les couleurs éclatantes attirent le regard, représente des objets, le symbole de l’agitation intérieure.
De Dakar à la Barbade
L’Atlantique sépare l’Afrique de cet archipel de la Barbade. Mais Dakar reste la terre la plus proche après le Cap-Vert. «L’aspect géographique est très important. Il y a des archipels dans les Caraïbes et la Barbade, et tout le monde doit savoir que Dakar est la partie la plus proche de la Barbade. Quand vous traversez l’Atlantique, vous avez le Cap-Vert et ensuite la Barbade. Certains jours, nous avons un ciel noir comme s’il va pleuvoir, mais ce sont des nuages de poussière du désert du Sahara. Durant mes va-et-vient entre le Sénégal et la Barbade, j’ai perçu la nécessité d’avoir des relations entre les deux pays», explique Mme Onigua dont le désir de rapprocher ces deux peuples a donné naissance à ce programme artistique «Transatlantique 1». Mor Faye, Kemboury Bessane, Adama Ba, Fola Lawson, Zulu Mbaye, sont quelques-uns des artistes sénégalais qui participent à l’exposition.
La fête aurait pu être plus belle si les œuvres physiques des artistes barbadiens avaient pu être exposées. En effet, pour des contraintes liées au transport, ces œuvres ne sont pas encore parvenues à Dakar. Un déchirement pour ces artistes qui ont conçu leurs œuvres en perspective de cette rencontre avec le public sénégalais. Et ils n’ont pas hésité à le souligner durant ce dernier après-midi de conférence dans la salle d’exposition du Village des arts. «Je travaille sur la base des couleurs, ce qui transmet la manière dont je vis et ce que je ressens. Différentes couleurs bleues pour traduire différents aspects et moments de la mer. Ce que l’écran oblitère», déplore Risée Chaderton-Charles. Pour Ras Akyem-i Ramsay, voir son œuvre à travers un des écrans de télévision installés sur les murs et qui diffusent les œuvres en boucle est un véritable déchirement. «Les mots ne suffisent pas à traduire ce que je ressens», indique l’artiste.
ACTEURS ET PROFESSIONNELS A L’ECOLE DES BONNES PRATIQUES
La Direction du patrimoine culturel a organisé, la semaine dernière, un atelier de renforcement, portant sur la conservation et la préservation des œuvres artistiques au profit des acteurs, professionnels et techniciens.
La Direction du patrimoine culturel a organisé, la semaine dernière, un atelier de renforcement, portant sur la conservation et la préservation des œuvres artistiques au profit des acteurs, professionnels et techniciens. La rencontre a été le cadre pour aborder des questions comme la gestion des collections des œuvres, la législation sur la gestion des biens culturels, le riche patrimoine culturel inexploité des Armées, entre autres.
La manipulation, l’emballage, le transport, l’entreposage, l’inventaire, la gestion des biens culturels, entre autres, ont été les questions soulevées lors de l’atelier organisé la semaine dernière par la Direction du patrimoine culturel, portant sur la conservation et la préservation de la production artistique. L’activité a été un prétexte d’échanges avec des patriciens et autres acteurs du secteur sur les enjeux liés à la conservation et à la préservation de la production artistique, la nécessité d’accorder une importance toute particulière aux techniques et matériaux utilisés dans la production, les techniques de restauration des œuvres d’art endommagées.
En provenance de la Suisse, la facilitatrice de la rencontre, Andréa Hoffmann Drobrynski, conservatrice et restauratrice d’œuvres d’art, a assuré que les échanges ont été «extrêmement riches avec des personnes de différents domaines et institutions». Consciente de l’effet et des enjeux que pose le dérèglement climatique sur la promotion des arts, elle a exhorté les professionnels à «trouver des conditions stables, autant pour la température que l’humidité. Bref, des moyens d’adaptation pour que les œuvres ne souffrent pas plus par rapport au réchauffement climatique». Pour la préservation de la mémoire culturelle et collective, Mme Hoffmann explique qu’il faut «accompagner les artistes qui écrivent l’histoire avec une structure stable entourée par des experts armés de leurs compétences et expérience».
Revenant sur la pertinence de l’organisation d’une telle activité, le directeur du Patrimoine culturel, Omar Badiane, dit : «Le pourquoi d’une telle activité est a trouvé dans le lien entre la Direction du patrimoine culturel et les arts. Etant entendu que le patrimoine culturel est l’ensemble des segments culturels. C’est la mère des cultures. D’où notre transversalité d’une part, et d’autre part, le processus de mise en valeur des arts est surtout lié à la dimension mémorielle.» Selon lui, une œuvre d’art est destinée à un public. C’est aussi un témoignage, un message. «C’est un témoignage sur les méthodes et techniques utilisées à une époque, des traces d’un génie créateur. C’est quelque chose qu’il faut comprendre comme ça», a laissé entendre le directeur du Patrimoine culturel.
A l’en croire, quand un artiste crée, «sa préoccupation première si ce n’est pas une performance, c’est que son œuvre transcende le temps et les générations. C’est à ce niveau que la direction trouve sa mission et s’engage à compléter le maillon de gestion». Cette rencontre vient renforcer le dispositif de la Biennale de Dakar. «C’est comme ça que notre Biennale va continuer à grandir», dit-il. La conservation des œuvres d’art et leur préservation est à la fois un enjeu et une préoccupation pour les professionnels du secteur. A cet effet, dira le directeur du Patrimoine culturel, la conservation fait appel à des métiers et «il y a pénurie dans ce domaine».
Ce, poursuit-il, en expliquant que «malheureusement nous ne formons pas dans nos écoles de formation dans ces métiers». Pourtant, la conservation est une niche d’emplois si elle est bien exploitée. A cet effet, le directeur du Patrimoine soutient que «c’est une niche d’emplois en somnolence». Il poursuit : «Ce qui structure l’environnement de l’artiste, c’est un ensemble de métiers qui ne sont pas disponibles.» Le Sénégal gagnerait beaucoup à structurer cet environnement et permettre de trouver de nouveaux créneaux d’emplois pour l’insertion des jeunes. En outre, Omar Badiane d’informer que l’ensemble des «mesures précautionnelles, des interventions directes sur l’œuvre s’étudient» d’une part, et d’autre part, «la réglementation autour de l’œuvre, son récit n’est pas offert au professionnel du milieu».
Selon notre interlocuteur, «même dans nos musées, les personnes ne sont pas formées à la conservation et à la préservation des œuvres alors que ce sont les lieux où se perdent plus d’œuvres». A en croire le directeur du Patrimoine culturel, il faut «reconnaître qu’on n’a pas développé une approche endogène, un modèle de savoir dans la gestion des œuvres d’art». Et, pour lui, la question qui est mise sur la table est avant tout le retour des biens du patrimoine culturel africain. Réunissant une vingtaine de participants venus de Dakar et de l’intérieur du pays, ils étaient des conservateurs de musée, des médiateurs culturels, des administratifs à avoir participé à la rencontre.
EXCLUSIF SENEPLUS - La Biennale transforme l'école ARUBA en un écrin où dialoguent les œuvres des maîtres disparus et contemporains. Les designers sénégalais y démontrent que l'art peut sublimer l'architecture
Ce samedi 16 novembre 2024, la Biennale de Dakar a connu un de ses plus forts moments et offert aux Dakarois et étrangers de passage, une de ses plus belles expositions dans un endroit qui a le mérite poser la problématique entre architecture, urbanisme et beaux-arts, dans toute son acuité, à savoir, l’école Supérieure d’architecture, d’urbanisme et des beaux-arts de Dakar, ARUBA.
Il s’est agi dans ce lieu d’une rare beauté d’exposer des grands maîtres de notre peinture, parfois disparus comme Félicité Kodjo, Amadou Sow, Ibrahima Kébé ou Souleymane Keïta, ou d’une grande actualité créatrice comme Abdoulaye Konaté, Soly Cissé, Serge Corréa, Moussa Traoré, Chalys Lèye, Birame Ndiaye ou d’accueillir un collectif de designers sénégalais dont les créations valorisent l’architecture, et posent avec talent l’idée d’urbanité, étincelle vivante de l’urbanisme s’il en est.
Les invités furent saisis de cette présence d’architectes et d’urbanistes de renom qui à l’instar de Sawalo Cissé, illustrent ce que fut cette célèbre école de Dakar d’architecture et des beaux-arts de l’époque Lods, symbole esthétique d’une certaine idée de Dakar, ville qui par la poétique de son nom et de son architecture inspira le titre d’un de ses plus beaux albums à John Coltrane.
L'art de l'architecte et celui de l'urbaniste sont ici étroitement liés ; aucun architecte ne peut ignorer tes contraintes urbanistiques de l'implantation du logement ; aucun urbaniste ne peut ignorer les contraintes spécifiques du logement qui permettent soit leurs groupements, soit leurs dispersions.
Cette exposition est vivante et vivace d’élégance et de poésie, et exprime par le choix même des exposants, ce que les concepteurs de ARUBA, amenés par Emile Diouf, Abib Diène, Chérif Diattara, Saabibou Diop ou Coly Faye, souhaitent inculquer à leurs étudiants : Une ville se pense. Tandis que la nôtre est à panser.
Faites un tour à ARUBA, vous en serez émerveillés par le talent de nos artistes exposés, et aussi part la collection privée des œuvres de Abib Diène et Emile Diouf entre autres, et vous serez conquis par cet environnement propice à la création et au travail d’urbanisme nécessaire au développement de nos villes, pour que la pensée qui y est diffusée nous éloigne de l’idée que nos architectes aujourd’hui soient rémunérés au kilo de béton.
ARUBA nouveau concept est le lieu où l'art et l'architecture entretiennent un lien étroit et complexe, tissant un dialogue continu au fil des époques. L'architecture, bien que souvent considérée comme une discipline scientifique pour sa part technique, est indéniablement un art dans sa dimension créative.
En visitant cette exposition, vous découvrirez que le programme d'architecture d’ARuBA-Sup est conçu pour former les futurs leaders du domaine, en leur offrant une solide base théorique et pratique, tout en mettant l’accent sur l’innovation, la durabilité, et l’expertise technique. Vous comprendrez alors qu’en mettant l'accent sur les concepts de durabilité, d'inclusion sociale et d'innovation, ARUBA offre une formation complète aux futurs urbanistes à la gestion des espaces urbains, au développement durable, et aux pratiques d’aménagement du territoire.
Parce que l'accent est mis sur la créativité, l'innovation et le façonnage des matériaux, il s‘agit de permettre aux étudiants de développer des compétences artistiques, techniques et pratiques appliquées à la conception architecturale et urbaine.
Vous qui rêvez encore de toutes les beautés de nos espaces urbains traversés par les talents de nos artistes et architectes urbanistes, faites un tour au Point E, Rue A angle Avenue Cheikh Anta Diop, vous serez réconciliés avec vos désirs d’urbanités et de civilités urbaines.
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ENTRE LE COUP DE CŒUR ET LE COÛT DE L’ŒUVRE
Dans cette entrevue réalisée dans le cadre de la 15 édition de l’art africain contemporain de Dakar, le peintre Omar Lionel Sow, dit O’Lio se dévoile à cœur ouvert a AfricaGlobe Tv. Artiste autodidacte, O’lio a trois décennies d’expérience derrière lui et
Dans cette entrevue réalisée au village des arts, dans le cadre de la 15 édition de l’art africain contemporain de Dakar, le peintre Omar Lionel Sow, dit O’Lio, se dévoile à cœur ouvert à AfricaGlobe Tv. Artiste autodidacte, O’lio a trois décennies d’expérience derrière lui et a parcouru le monde avec son art.
Le Dak’art 2024 bat son plein. Le village des arts vibre aussi au rythme de cette grand-messe de l’art africain contemporain. Occasion de découvrir des artistes qui ne sont pas toujours au-devant de la scène. C’est dans ce cadre que nous rencontre O’Lio, un peintre aguerri.
Trouvé dans son atelier au village des arts, sis a Yoff, O’Lio a accepté de nous parler de son parcours, ses débuts, de l’œuvre d’art et des artistes, mais aussi du rapport qu’entretiennent les Africains avec l’art. Si enfant, il a toujours eu l’art dans les veines et gribouillait presque partout, cet artiste d’intuition, en fréquentant les grands noms de la peinture, des devanciers expérimentés, a pu affiner son propre pinceau et trouver sa technique grâce au couteau.
Du point de vue de la technique de création, O’Lio dit ne pas faire d’esquisses. quand vient l’inspiration, il prend son couteau et fonce. D’ailleurs c’est avec un couteau qu’il travaille en général, le pinceau ne servant qu’à faire des finitions et à signer l’œuvre.
En parlant du rapport et de l’acquisition des œuvres d’art par les Africains, Omar Lionel Sow soutient que tout est dans le coup de cœur que l’on peut avoir
Selon lui en effet, devant une toile, tout le monde peut avoir un coup de cœur. Seulement, très souvent en Afrique, entre le coup de cœur et le coût de l’œuvre, l’écart peut être abyssal. Puisque c’est une question de moyens. Très souvent, le prix que le visiteur est prêt à débourser est en deçà de la valeur réelle de l’œuvre. Et pourtant il peut avoir un réel coup de cœur pour une œuvre. L’autre observation que fait cet peintre c’est que l’africain se donne le temps de discuter le prix
L’artiste regrette par contre, la mauvaise compréhension que bien d’hommes et femmes politiques au Sénégal ont parfois de ce que c’est que la culture. Parce qu’il le faut le savoir, l’art ne se résume pas à la musique et la danse. La musique n’est pas l’art, la musique est un art. Ou sont les autres expressions artistiques ?
CHEIKHOU GUEYE ET MAÏMOUNA FALL COURONNES A OUAGA
Cheikhou Guèye alias Sanekh a remporté le «Sotigui» de la meilleure interprétation masculine dans une série Tv, tandis que Maïmouna Fall remporte le «Sotigui» du meilleur Espoir africain dans une série Tv.
Le Sénégal s’est illustré, ce samedi, à la 9e édition des «Sotigui Awards» qui s’est tenue dans la capitale du Burkina Faso. Cheikhou Guèye alias Sanekh a remporté le «Sotigui» de la meilleure interprétation masculine dans une série Tv, tandis que Maïmouna Fall remporte le «Sotigui» du meilleur Espoir africain dans une série Tv.
L’académie des «Sotigui» a décerné, ce samedi, ses traditionnels awards. L’audiovisuel sénégalais s’est bien distingué à cette cérémonie. Le comédien sénégalais Mame Cheikhou Guèye et l’actrice Maïmouna Fall, remportent respectivement le «Sotigui» de la meilleure interprétation masculine dans une série Tv et le «Sotigui» du meilleur Espoir africain dans une série Tv. Mame Cheikhou Guèye est ainsi couronné pour son interprétation du rôle de Ndiouga Thiam dans la série Bété Bété. Il y incarne le rôle d’un patriarche attaché aux traditions familiales et qui cherche vaille que vaille à sauvegarder l’unité de sa famille. La série Bété Bété, produite par Evenprod de Ibou Guèye, a remporté un franc succès au Sénégal et dans d’autres pays africains. De même, Maïmouna Fall est aussi distinguée pour son rôle dans Cœurs brisés d’Evenprod.
Les «Sotigui Awards» sont organisés chaque année par l’académie des «Sotigui». Cette 9e édition s’est tenue dans la capitale du Burkina Faso du 13 au 16 novembre 2024, avec le Mali comme invité d’honneur. Et c’est l’actrice camerounaise Stéphanie Tum qui se voit couronnée du «Sotigui» d’or pour son rôle dans When the leeves broke, de Teen Derrick Musing. Elle remporte également le «Sotigui» de la meilleure actrice de l’Afrique centrale. En Afrique de l’Ouest, c’est la comédienne malienne Fatoumata Coulibaly qui remporte le «Sotigui» de la meilleure actrice de l’Afrique de l’Ouest pour son rôle dans Taane de Aliou Ifra Ndiaye.
Au total, 16 trophées ont été décernés, en plus des trophées d’honneur qui sont allés à l’acteur ivoirien Oméga David et au Nigérian Osita Iheme. 4 jours durant, cette 9e édition des «Sotigui Awards» a été marquée par des masterclass, des projections de films, des panels autour du thème : «Quel barème salarial pour l’acteur comédien du cinéma en Afrique ?» Profitant de cette tribune, les acteurs du 7e art ont plaidé pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des acteurs et comédiens de l’Afrique et de sa diaspora. «C’est une question cruciale, car beaucoup de nos comédiens qui font les beaux jours du cinéma, qui sont des modèles dans le domaine du cinéma, évoluent malheureusement dans des conditions difficiles, ça c’est inacceptable. Il convient donc de trouver les mécanismes pour que l’industrie du cinéma puisse garantir aux comédiens qui sont la cheville ouvrière de la réussite cinématographique, de pouvoir profiter pleinement des retombées de leurs talents», indique le ministre d’Etat, ministre de la Communication, de la culture, des arts et du tourisme du Burkina Fasso, Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo, cité par Burkina 24.
Les belles feuilles de notre littérature par Amadou Elimane Kane
LE SILENCE DU TOTEM OU LA RESTITUTION DE L’ESTHÉTIQUE AFRICAINE
EXCLUSIF SENEPLUS - À travers le personnage de Sitoé Iman Diouf, anthropologue confrontée à son héritage sérère dans les sous-sols d'un musée parisien, Fatoumata Sissi Ngom explore les multiples facettes de la spoliation culturelle
Notre patrimoine littéraire est un espace dense de créativité et de beauté. La littérature est un art qui trouve sa place dans une époque, un contexte historique, un espace culturel, tout en révélant des vérités cachées de la réalité. La littérature est une alchimie entre esthétique et idées. C’est par la littérature que nous construisons notre récit qui s’inscrit dans la mémoire. Ainsi, la littérature africaine existe par sa singularité, son histoire et sa narration particulière. Les belles feuilles de notre littérature ont pour vocation de nous donner rendez-vous avec les créateurs du verbe et de leurs œuvres qui entrent en fusion avec nos talents et nos intelligences.
« Le roman, [...] est la seule forme d'art qui cherche à nous faire croire qu'elle donne un rapport complet et véridique de la vie d'une personne réelle » - Virginia Woolf.
La reconstruction minutieuse d’un récit, à travers l’écriture et l’imaginaire, est un élément fondateur de l’architecture du roman. Le genre du roman est cette représentation du réel qui oscille entre données objectives et données subjectives. Mais par sa structure narrative et esthétique, le roman peut parfois transcender la réalité à tel point qu’une autre matérialité est possible. Au seul moyen de la fiction, le récit romanesque peut prendre l’allure d’une vraisemblance troublante. Le roman est une convention littéraire ancrée dans l’existant et dans ce qui n’a pas encore été révélé.
Le roman Le silence du totem de Fatoumata Sissi Ngom est un récit qui pose la question de l’histoire revisitée par l’imaginaire, tout en remodelant l’édifice du patrimoine africain. Car le cœur du récit tient un équilibre juste entre un schéma romanesque qui sert de tableau et celui de raconter la véritable histoire du pillage des œuvres d’art en Afrique, au moment de la colonisation et des missionnaires européens, toujours en quête de puissance. Par le prisme du roman, Fatoumata Sissi Ngom pose la problématique de la restitution des œuvres d’art qui est un enjeu majeur du XXIe siècle pour la reconnaissance du patrimoine africain.
Sitoé Iman Diouf, dont les parents sont d’origine sérère, communauté du Sénégal, est une brillante anthropologue qui travaille au Musée du Quai Branly à Paris. Elle se voit confier une troublante mission, celle d’exposer des œuvres africaines, restées cachées aux yeux du grand public dans les sous-sols du musée, pour permettre à un oligarque russe d'acheter une pièce à prix d’or. Dans les profondeurs de ce trésor secret, Sitoé découvre rapidement une statue Pangool, originaire du Khalambass, région de sa propre famille et dont le symbole protecteur appartient au peuple sérère. Cette statue de bois somptueuse représente un guerrier avec un corps d’homme et une tête de serpent avec d’immenses yeux jaunes, l’animal totem du peuple sérère. Ainsi Sitoé, dont le prénom est emblématique de la culture sénégalaise, clin d’oeil à Aline Site Diatta qui fut une héroïne de la résistance à la colonisation, est chargée d’une double mission, celle de mettre en lumière les œuvres dormantes et surtout de faire en sorte de les restituer à la terre des origines.
Car au-delà du tissu narratif du roman qui navigue entre le récit d’enquête, le conte, le roman d’exploration et le surnaturel, créant ainsi une tension littéraire remarquable, l’auteure met en scène tous les enjeux qui existent pour la restitution de l’art africain et de l’éthique qui doit l’accompagner. Révéler l’existence du patrimoine africain en lui donnant un sens anthropologique est une manière fondatrice de rendre le récit africain tangible et légitime. Car l’art, sous toutes ses formes, et la symbolique de son esthétique sont au cœur de la narration africaine qui peut permettre sa réhabilitation.
Poser la problématique de l’histoire africaine, dévoyée par la colonisation, s’inscrit dans un ensemble plus vaste qui est celui de parler de l’importance de matérialiser les arts africains pour rendre visible l’esthétique africaine dans une démarche historique, patrimoniale et artistique.
Fatoumata Sissi Ngom écrit ici un livre incontournable pour comprendre ce que signifie, dans toute sa symbolique, la restitution des arts en Afrique. Il ne s’agit ni de folklore, ni de marchandisation, mais vraiment de faire parler les arts africains pour constituer un patrimoine enrichi de la vérité et qui sert à ressouder le puzzle de la culture africaine.
De plus, ce roman écrit en 2018, procède par anticipation car le programme de restitution des œuvres d’art africaines proposé par Emmanuel Macron a été annoncé en France en 2020. Avec le ministère de la Culture, le président français a même fait une proposition de loi seulement en février 2023, une nouvelle législation en faveur des pays propriétaires mais non encore promulguée. Ainsi, Fatoumata Sissi Ngom fait œuvre visionnaire en proposant ce récit car la problématique du patrimoine africain est centrale dans la reconstruction identitaire et dans l’émergence de la renaissance bâtie sur l’idée que la culture africaine est multiple et que l’art y a inscrit ses symboles ancestraux.
Le vrai roman, c'est celui dont la signification dépasse l'anecdote, la transcende, fonde une vérité humaine profonde, une morale ou une métaphysique.
C’est pourquoi je pense qu’il est plus que nécessaire de lire Le Silence du totem car celui-ci nous offre, à travers le genre romanesque, de nous approprier de notre patrimoine africain. Tout Africain, tout humaniste devrait lire ce livre car la vérité se cache dans les interstices de l’histoire, un mythe qui a été élaboré par d’autres et des légendes qu’il convient toujours de remettre en cause toujours dans la reconstruction de notre mémoire culturelle et de notre patrimoine historique.
Amadou Elimane Kane est écrivain poète.
Le silence du totem, Fatoumata Sissi Ngom, éditions L’Harmattan, collection Écrire l’Afrique, Paris 2018.
PENDA MBOW PLAIDE POUR UNE CULTURE D’ÉLITE AU SERVICE DU SOUTIEN POPULAIRE
Lors d’un talk à la Biennale de Dakar, l’historienne et ancienne ministre de la Culture a insisté sur l’importance du mécénat d’État et d’une vision systémique reposant sur la culture.
L’historienne et ancienne ministre de la Culture, professeur Penda Mbow, a appelé, vendredi, à “penser à développer une culture d’élite pour financer la culture populaire’’.
‘’Il faudra penser à développer une culture d’élite pour financer la culture populaire. Nous devons reconstituer cette élite à partir de la culture et d’un élitisme républicain assumé’’, a-t-elle déclaré.
L’universitaire sénégalaise intervenait lors d’un talk axé sur le thème : ‘’Leadership politique et politiques culturelles au Sénégal : de l’héritage de l’enfant de Diogoye [Basile Diogoye, père de Léopold Sedar Senghor] à l’avènement de Diomaye’’ organisé dans le cadre de la 15ème Biennale de l’art africain contemporain de Dakar (Dak’art) qui se poursuit jusqu’au 7 décembre prochain.
Selon elle, le Sénégal ‘’ne peut pas avoir une vision systémique, sans se référer ou mettre comme socle, la culture’’.
Elle a de ce fait invité à retourner vers le mécénat d’Etat, soulignant la prise de conscience du nouveau régime sur l’importance que revêt la culture et ce qu’elle peut représenter pour sa politique et sa vision systémique.
Selon elle, ‘’à mesure que nous avançons, les politiques culturelles dans ce pays redimensionnent la vision culturelle qu’avait Senghor’’, le premier président de la République du Sénégal.
Pour sa part, l’artiste peintre, Amadou Kane Sy dit ‘’Kan-Si’’, estime que le Sénégal n’a jusqu’à présent pas encore utilisé la culture pour se reconnecter avec son ‘’être profond’’, afin de mettre en place des projets en connexion avec les communautés.
‘’Il faudra qu’on arrive à reconnecter la biennale [Biennale de l’art africain contemporain de Dakar] et le Sénégal profond, et les préoccupations du Sénégal’’, suggère-t-il.
Kan-Si propose également la mise en place d’une vraie politique de décentralisation culturelle.
‘’Une seule mesure à prendre pour les politiques culturelles au Sénégal, serait de travailler sur les interactions entre les différents départements. Au-delà du découpage ministériel, une véritable politique d’intégration. Voilà la transversalité de la culture’’, a pour sa part prôné le professeur de littérature africaine, Ibrahima Wane, enseignant-chercheur à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD).
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DAK’ART, LA BARBADE SE RECONNECTE À L’AFRIQUE
EXCLUSIF SENEPLUS - Chaque Biennale permet aux fils et filles d’Afrique dispersés dans les Amériques de revenir sur la terre-mère. Les Barbadiens ont fait le pas grâce à «Transatlantique 1».Nyzinga Onifa, la coordonnatrice du projet explique l’intérêt
Tous les deux ans depuis 1990, la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar permet aux fils et aux filles d’Afrique dispersés à travers le globe, notamment dans les Amériques, du fait de la tragédie de l’esclave, de se retrouver sur leur terre d’origine. Qu’ils soient d’Amérique du Nord, d’Amérique Latine ou des Caraïbes, ils reviennent partager et se reconnecter à la terre mère d’Afrique. À cette 15e édition, une dizaine d'artistes barbadiens sont à Dakar grâce a ECEA*, une organisation qui a elaboré le projet d'exposition intitulée « Transatlantique 1 ». Nzinga Onifa, coordonnatrice du projet, nous explique dans cet entretien avec AfricaGlobe Tv.
Au Dak’art 2022, nous découvrions Yrneh Gabon, ce Jamaïcain dont les tests ADN ont prouvé qu’il est balante donc potentiellement originaire de la Casamance, la Gambie ou la Guinée Bissau, aire géographique où l’on trouve ce peuple ouest-africain. Pour cette 15e édition du Dak’art, une bonne délégation barbadienne, composée d’une dizaine « de talentueux artistes » est y est représentée avec l’exposition dénommé « Transatlantique One ». Un projet pensé et conçu trente ans plus tôt des après la deuxième édition du Dak’art et qui a connu des péripéties sans que l’initiatrice, la Barbadienne Nzinga Onifa, ne renonce.
Le désir de reconnexion de la Barbade à l’Afrique n’est pas récent. L’histoire remonte à 1993 lorsque Nzinga Onifa, la coordinatrice du projet « Economic and cultural exchange with Africa (ECEA) , y a séjourné une dizaine d’années à Dakar pour le compte des Nations Unies. Un séjour au cours duquel elle dit s’être rendu compte de ce qu’il y a trop peu d’information sur la Barbade. Mais aussi choquée de ce que manifestement des Africains ne posent pas de question sur ce que sont devenu ceux qui ont été déportés du continent quelques siècles auparavant.
En revanche, bien souvent, on lui demandait d’où vient-elle et où se trouve la Barbade qui pourtant n’est qu’ à environ à 5 heures de vol de Dakar bien avec une ligne directe. Même si l’on est dans les Caraïbes. Sur la persistance de ces questions, Nzinga Onifa, en quittant Dakar, s’est résolue à travailler pour créer un rapprochement entre l’Afrique et la Barbade à travers la culture. Elle à cet effet fait part aux différentes autorités sénégalaises et barbadiennes depuis ces années et donc forcément tous les régimes qui se sont succédé aussi bien à la tête du Sénégal que de la Barbade. Il a donc fallu un très long chemin et l’initiatrice n’a pas abandonné. Finalement, l’aboutissement a été cette année 2024.
Elle a réussi a emmené une dizaine d'artistes qui exposent au village des arts a Yoff. Seulement, il s’est passé un fait très regrettable au grand dam des artistes barbadiens. En effet, pour des raisons logistiques et administratives, leurs œuvres n’ont pas pu atterrir à Dakar pour démarrer la Biennale en bonne et due forme alors que ce 8 novembre, elles devraient être vues.
Dans la foulée, les autorités du village des arts ont essayé de trouver une solution qui ne satisfait personne. En effet, le village des arts a fait installer des écrans qui présentent les œuvres des artistes. Une situation absolument regrettable pour les artistes qui à l’unisson disent que ce dispositif technologique de rechange déforme et dévalorisent leur travail à tout point de vue parce qu’elle ne rend nullement compte de la réalité de leur art.
Tout de même, ils reconnaissent au village des arts d’avoir essayé d’apporter cette solution, ils n’en veulent ni n’accusent leurs interlocuteurs du Sénégal qui n’en sont pour rien dans ce couac d’ordre administratif. Mais ils sont émus d’être revenus à la Maison, grâce à la Biennale. La délégation souhaite que Transatlantique 1 ne soit qu’un point de départ et que l’on verra Transatlantique 2, 3, 4 et jusqu’ à l’infini. Nzinga Onifa qui est maître d’ouvrage du projet dans cette entrevue espère que les œuvre atterriront à Dakar avant la fin de la biennale.
La coordinatrice de Transatlantique Nzinga Onifa estime qu’il y a tellement de choses que les fils et filles d'Afrique dispersés de par le monde peuvent partager avec l'Afrique en termes de business, de culture, d'éducation de science et de technologie. Son souhait est que cette reconnexion avec l'Afrique puisse s’approfondir et qu’il y ait beaucoup d’échanges culturels notamment entre étudiants sénégalais et barbadiens : que les jeunes barbadiens viennent au Sénégal étudier l’art et que les étudiants sénégalais puissent, de leur côté, se rendre à la Barbade pour se nourrir de la richesse culturelle de cette île caribéenne. « Nous avons à apprendre les uns des autres entre frères et sœurs d’Afrique », estime Nzinga Onifa.
Pour sûr, la volonté de reconnexion est réelle. D’ailleurs, Nzinga Onifa qui est aussi artiste designer, n’a pas toujours porté son présent nom qui est typiquement africain. Elle portait à la naissance un nom de colon dont elle a décidé de se débarrasser pour porter un nom authentiquement africain. Cette volonté de reconnexion parfois est freine par l’image qu’est vendu de l’Afrique par les médias du Nord.
En effet, la propagande des médias occidentaux qui semble entretenir un désir compulsif de montrer des images négatives sur l’Afrique, a réussi à inoculer une certaine réticence et une méfiance des Africains de la diaspora vis-à-vis de l’Afrique. Les Barbadiens y ont aussi été victimes de cela. Ainsi, longtemps, certains voient l’Afrique à travers les guerres, les maladies, les cataclysmes, etc. qui leur sont présentés par les télévisions du Nord.
La coordinatrice du projet, Nzinga Onifa se réjouit qu’aujourd’hui avec l’avènement d’Internet, de plus en plus d’Afro-descendants, commencent à découvrir véritablement l’Afrique et de fait, ces stéréotypes sur le continent, commencent à tomber. Par conséquent, ils se montrent de plus en plus enthousiastes à se reconnecter à leur terre d’origine. Ce qui ouvre davantage des perspectives de reconnexion. Mais une question que s’est très souvent posée Nzinga c’est pourquoi les Africains ne posent pas de questions sur ce que sont devenus les Africains déportés dans les Amériques ? C’est peut-être le moment que tous se la posent.
* ECECA est une organisation florissante qui se consacre à la défense et à la promotion de la culture, de l'éducation, des affaires, de la santé et du bien-être en tant que rouages essentiels du développement sociétal et de la camaraderie internationale entre l'Afrique, la Barbade et le reste des Caraïbes.
par Babacar Mbow
LE SÉNÉGAL ET LA RESTITUTION
EXCLUSIF SENEPLUS - Quand Bachir Diagne cite Amadou Makhtar Mbow pour suggérer une acceptation de l'exil des œuvres africaines, il fait un tour de passe-passe intellectuel troublant. Car la position de Mbow sur la question n'a jamais été équivoque
Il y a des esprits parmi les esprits ! Des esprits tellement sophistiqués qu'ils peuvent reconfigurer la pensée radicale en une pensée conformiste.
Ces esprits, dans leur rayonnement, leur éclat, peuvent nous amener à adopter l’ivrai pour le vrai, et le fallacieux pour le substantiel. Cependant, nul ne collera cette épithèque au Professeur Bachir Diagne, Hasbounallah ! Cependant !
Les récentes déclarations du Professeur Diagne citant Amadou Makhtar Mbow : « Ces peuples [les peuples africains] savent bien que la destination de l’art est universelle […] Ils sont conscients que cet art qui parle de leur histoire, de leur vérité, ne s’adresse pas seulement à eux […], qu’ils se réjouissent que d’autres hommes et d’autres femmes ailleurs aient pu étudier et admirer l’œuvre de leurs ancêtres… », dans « Objets africains « mutants »et la question de la restitution », Musée d’Ethnographie de Genève, 3 mai 2024 (https://www.meg.ch/en/expositions/remembering). Hic ! Et, « … à la fin des années 1970, [Mbow] a lancé un fervent plaidoyer en faveur de la restitution du patrimoine des anciennes colonies, tout en reconnaissant que ce patrimoine avait pris racine dans sa terre d’emprunt. » Restitutions d’œuvres : « Les objets d’Afrique sont chez eux au Louvre », 13/10/2024 (http ://www.la-croix.com/culture/restitutions-d-œuvres-les-objets-venus-d’Afrique-sont-chez-eux-au-Louvre-20241013). Ces déclarations appellent une clarification pour restituer Mbow dans le discours de la restitution.
Dans les déclarations ci-dessus, « l'esprit non sophistiqué » peut percevoir Mbow comme un accommodant aux positions suprématistes occidentales sur la restitution. Il y a donc lieu de clarifier les choses, surtout après la conférence inaugurale de Mbow au département des Études de l’Afrique du Nouveau Monde de l’Université internationale de la Floride de Miami en 2015, qui est peut-être sa dernière déclaration publique sur le sujet. Mbow est venu à Miami accompagné de sa fille, la Dr. Marie Amie Mbow. Par ces moyens, nous nous éloignons de toute controverse ou querelle pour restituer Mbow dans les débats.
La Dr. Joan Cartwright de l’Université Southeastern de Nova, lors des questions et réponses qui ont suivi la conférence de Mbow, demanda : « Il y a eu des cas où vous avez semblé atténuer votre demande de restitution des objets africains volés. Pouvez-vous clarifier votre position pour la Diaspora africaine » ?
La réponse de Mbow, qui reflétait exactement sa déclaration de 1989 à la résidence du Professeur John Henry Clark à Harlem, New York, visite organisée par Seydina Senghor, est claire et précise : « Le retour des objets africains est fondamental pour que l’Afrique se reconnecte à son passé dans la construction de son avenir. » Mbow a réitéré ce message de reconnexion pendant la semaine de son séjour à Miami aux flux de visiteurs haïtiens et afro-américains dans mon arrière-cour.
Là encore, l’esprit sophistiqué a des manières de sublimer les faits pour servir les intérêts d’un agenda. Loin de moi l’idée de coller cette caractéristique au Professseur Diagne. Mais comment les jeunes intellectuels doivent-ils comprendre ses prédilections à brouiller la clarté de ces intellectuels noirs ? Prédilections qui semblent émerger de « l’antre des alchimistes », à travers lequel nous sommes désormais appelés à faire abstraction des pensées et des pratiques intellectuelles radicales noires ?
L’émergence de discours qui semblent reterritorialiser l’Afrique dans les entrailles de la suprématie occidentale devient un fardeau très lourd à porter. Ainsi, dans un article sur SenePlus paru le 7 mai 2024, Amadou Lamine Sall appelle à la privatisation de la Biennale de Dakar à travers une « Fondation Art Mécénat International ».
Sall cite Jean Loup Pivin : « … La survie de la Biennale ne viendra que dans son externalisation vers une structure tierce […] avec un État qui [doit] cesser de faire semblant de savoir le faire… » Le Sénégal ne capitalise pas sur cet engouement formidable, mais, au contraire, le détruit. Sa gestion étatique remet en cause sa crédibilité et interdit toute autre forme de financement. » Mon Dieu ! Jean Loup Pivin est désormais le bwana en matière de souveraineté culturelle africaine que la biennale de Dakar est appelée à incarner. On en a la nausée !
J’ai entendu exactement les mêmes arguments de la part d’autres Sénégalais à la Foire 154 de Marrakech, au Maroc, l’année dernière. Que des Sénégalais puissent s'asseoir autour d'une table avec des Français engagés dans la démolition de la République, et que tout ce qu'ils puissent dire, soit « Ça fait mal, mais c'est la vérité », était si méprisable que nous avons décidé de ne plus rejoindre leur soi-disant « groupe multiculturel » à Marrakech.
Le paradoxe est que lorsque le gouvernement néocolonial de Macky Sall tuait et mutilait la jeunesse sénégalaise, lorsque la dissidence était réprimée par l'emprisonnement, et que la corruption rampante gangrenait à la fois l'État et les organismes sociaux, ces « voix de leur maître » étaient silencieuses, incapables de comprendre la possibilité d'une « Afrotopia ».
Replaçons Mbow dans son contexte discursif afin que l’on ne méprenne pas la carte pour le territoire. Les formations raciales sont un phénomène esthétique et les pratiques esthétiques sont des structures racialisées. « Les Africains se réjouissent que d’autres hommes et femmes étudient et admirent l’œuvre de leur ancêtre ?» Ainsi, tenter de séparer l’esthétique de la politique revient à méconnaître les conditions mutuelles qui soutiennent les pratiques de représentation. La vivacité et l’esthétique de l’être est l’esthétique comme forme de vie, l’esthétique comme schéma pour considérer la vivacité du phénomène et le phénomène de vivacité, la qualité de la lumière par laquelle nous scrutons nos vies. En alliant l’esthétique à la vivacité, comme dans « culture et développement » le thème de la lecture inaugurale de 2015, Mbow nous invitait à nous tourner vers les capacités d’animation évidentes dans l’objet d’art pour un appel à une politique antiraciste qui va au-delà de la dialectique réactive et des stratégies de représentation des tenants d’une universalité occidentale vers autre chose, expérimentant la durée, la sensation, la résonance et l’affect – un engagement envers la sensibilité africaine. Aucun peuple ne peut se réjouir qu’un autre lui dérobe ses potentialités.
Que la jeunesse sénégalaise sache que l’efficacité d’un peuple oppressé dans le combat intellectuel, soit en tant que diffuseur ou en tant que récepteur dans les systèmes influencés par cette hiérarchie épistémologique, dépend de sa compréhension de l’obsolescence de toute contestation de la nature de la vérité au profit de la contestation du contrôle de la vérité. Parce qu’en fin de compte, « nul autre que nous-mêmes ne pourra libérer notre esprit ». Laissons Mbow transiter vers les ancêtres ! Les morts sont muets.
Babacar Mbow est Directeur exécutif du Consortium des Études Africana de la Floride, Miami.
DIOMAYE A VISITÉ L’EXPOSITION INTERNATIONALE DE LA BIENNALE DE DAKAR
Le chef de l'Etat a parcouru, ce vendredi, les œuvres des 58 artistes sélectionnés pour cette 15e édition. Sa visite a été saluée comme un geste fort pour rehausser le prestige de cet événement culturel majeur.
Le chef de l’Etat, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a visité, ce vendredi, l’exposition internationale (In) de la 15e Biennale de l’art africain contemporain de Dakar (Dak’Art) qui se poursuit jusqu’au 7 décembre prochain, a constaté l’APS.
Après la cérémonie d’ouverture officielle qu’il a présidée, jeudi 7 novembre, au Grand théâtre national, le président de la République est venu voir, cet après-midi, les œuvres des 58 artistes sélectionnés dans le ‘’In’’.
A son arrivée, il a été accueilli par le secrétaire d’Etat à la culture, aux Industries créatives et au Patrimoine historique, Bakary Sarr, le secrétaire générale de la biennale, Marième Ba, et la directrice artistique, Salimata Diop.
Pendant plus d’une heure, le chef de l’Etat a fait le tour des différents espaces aménagés pour la circonstance, notamment l’exposition des collectionneurs au premier étage, la section design, avant de poursuivre sa visite et voir les œuvres des différents artistes.
Le président Faye s’est aussi rendu à l’espace hommage où il a été accueilli par la plasticienne Anta Germaine Gaye.
Il a suivi attentivement les explications données par la directrice artistique et les deux commissaires d’expositions, Kalidou Kassé et Ousmane Mbaye.
Il a aussi vu les œuvres des artistes primés notamment celle de Dior Thiam, Prix de Cedeao et le Grand Prix Léopold Sédar Senghor la Martiniquaise Agnès Brezephin.
Bassirou Diomaye Faye ne s’est pas exprimé à la fin de sa visite, mais a tenu à recevoir un cadeau de la biennale composé de catalogues de cette édition et d’une affiche, entre autres.
Bacary Sarr a salué cette visite du chef de l’Etat qui, a-t-il dit, est ”un grand honneur”.
”C’est tout un honneur de faire le parcours de la visite avec le chef de l’Etat. Tout au long du parcours, on a vu tout l’intérêt que le président de la République a accordé à ce travail artistique qui a été fait en général, les œuvres, le format, l’itinéraire, etc.”, s’est félicité M. Sarr.
Il estime que cette visite est une manière de ”rehausser” l’événement. ”Mais cela aidera à mieux asseoir le prestige de la biennale”, a-t-il ajouté.
Pour Salimata Diop, ce déplacement du président de la République est ”un symbole, une reconnaissance”.
”Cela s’est bien passé. Le président dit être content de cette visite. Ce qui nous a fait très plaisir et nos équipes surtout dans ce contexte où il est très occupé, il a tenu à venir voir le travail qui a été réalisé pour nous féliciter”, a-t-elle salué.