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22 novembre 2024
Culture
LA GALERIE DES ARTS OFFRE UNE LIBRE EXPRESSION AUX ARTISTES
Le vernissage de l’exposition qui a pour thème «Mains Libres» entre dans le cadre des événements Off de la 15e édition de la Biennale des Arts de Dakar (Dak’Art 2024).
La Galerie des Arts du Soleil a accueilli, vendredi 8 novembre, plusieurs artistes africains dont un Sénégalais qui ont exposé leurs talents à travers des tableaux d’arts. Le vernissage de l’exposition qui a pour thème «Mains Libres» entre dans le cadre des événements Off de la 15e édition de la Biennale des Arts de Dakar (Dak’Art 2024). La Galerie donne ainsi libre cours à ces artistes d’exprimer leurs sentiments sans être liés par un thème préalablement défini.
«C'est l'expression libre puisque, le mois de mai passé, vous savez, la biennale a été reportée. Les artistes avaient travaillé sur des thèmes. Cette fois-ci, la Galerie a décidé que chaque artiste choisit son propre thème et développe sa sensibilité pour cette biennale», a déclaré Samson Gahoui, artiste-peintre béninois. L’artiste-béninois dit avoir développé, sur six œuvres, le thème de l’Amour et sur des Relations spirituelles. Et Gahoui d’indiquer : «J'ai débattu un peu sur l'Amour, sur la connexion sentimentale. J'ai parlé un peu des Relations entre le monde spirituel et le monde physique. J'ai développé beaucoup de choses dans les œuvres que j'ai exposées dans la Galerie»
A ce propos, «le ‘’Un pour tous’’ là, que j'ai exposé, c'est un puits dans lequel se trouve l'eau. En regardant, on voit que tous les êtres viennent dans ce puits. Les papillons, les oiseaux, les abeilles... tous viennent dans ce puits. Donc le puits est là pour tout le monde et tout le monde est là pour le puit», a-t-il expliqué, précisant son intention de montrer que le contenu du puits est vraiment vital, nécessaire à la survie de la créature divine. De son côté, Ibrahima Balayara, seul Sénégalais parmi ces artistes, s’est lui aussi réjouis de ce format de travail proposé par la Galerie des Arts du Soleil. «Ce qui me plait dans cette exposition, c'est qu'on n'est aucunement lié à un thème. On travaille librement», a s’est réjoui Ibrahima Balayara, artiste-peintre sénégalais sortant de l’Ecole des Beaux-Arts.
C’est ainsi que dans ses œuvres, souligne l’artiste-peintre habitant des Parcelles Assainies, on retrouve, en plus de la solidarité, les enfants victimes des conflits armées. «J'ai travaillé sur le cas des enfants innocents qu'on tue dans les guerres. De la même manière, j'ai travaillé sur le côté solidarité entre les filles et les hommes.» A propos de l’impact de ce vernissage dans sa carrière, l’artiste peintre-sénégalais confie : «cette exposition pourrait m'apporter une grande ouverture dans ma carrière artistique franchement parce que on a beaucoup amplifié, travaillé avec des toiles de très bonnes qualités. Et, comme nous sommes en période de biennale, les gens peuvent venir de partout (pour visiter) ; je pense que ça pourrait impacter énormément sur notre carrière», espère-t-il.
LA COMPLEMENTARITE ENTRE ART ET DROIT EN QUESTION
Dans le cadre de la Biennale de Dakar, la Fondation Léopold Sédar Senghor a accueilli une conférence sur le thème "Art et Droit", célébrant le lien entre ces disciplines à travers l'héritage de Senghor et la diversité artistique mondiale.
Dans le cadre de la Biennale de Dakar, la Fondation Léopold Sédar Senghor a accueilli une conférence sur le thème "Art et Droit", célébrant le lien entre ces disciplines à travers l'héritage de Senghor et la diversité artistique mondiale. Cette rencontre a rassemblé des experts du Sénégal et de divers horizons pour discuter de l'importance de la réglementation juridique dans le domaine artistique.
La première intervenante, le Professeur Chiara Modica Dona dalle Rose, présidente de la Foundation Dona dale Rose ( Italie) a évoqué son attachement personnel à la pensée de Léopold Sédar Senghor, rappelant l'importance de la préservation de la culture africaine et des valeurs humaines. Elle a souligné que la fondation est un lieu de convergence pour artistes et intellectuels qui, par leur diversité, enrichissent la mémoire collective et l'héritage de Senghor. L’intervention a également mis en avant la participation de figures académiques internationales, comme le professeur Carlo Condalani, qui étudie l’interaction entre mathématiques et art, illustrant l’esprit de collaboration entre différentes disciplines et pays.
Le professeur Sankhalé, ancien avocat spécialiste du droit des arts, a insisté quant à lui sur le rôle fondamental du droit dans les métiers de l’art. Fort de son expérience en tant qu’avocat et critique d’art, il a expliqué les défis juridiques auxquels sont confrontés les artistes, notamment en matière de droits d’auteur et de contrats. Il a illustré ces difficultés par des exemples concrets, tels que la gestion des droits d’image et la négociation de contrats pour les expositions, où de nombreux artistes peinent à protéger leurs intérêts. Selon lui, la sensibilisation au cadre juridique est essentielle pour éviter des malentendus pouvant nuire aux artistes et à leurs œuvres.
L’exposition à la Fondation Senghor a réuni des œuvres variées d’artistes internationaux, soulignant les thèmes de droits humains et de liberté. Parmi les œuvres exposées, on retrouve celles de Nello Petrucci, qui propose des fresques en hommage aux droits humains, et d’Angelo Cardi, dont une sculpture inspirée de Vénus met en avant l’héritage africain et la naissance de l’humanité. Cette conférence et l’exposition associée à la Biennale de Dakar témoignent de l’interconnexion entre l’art et le droit, et de l’importance de ces deux domaines pour la préservation et la célébration de la culture et de l’identité humaine. Cette exposition Off qui se déroule dans l’enceinte de la fondation va durer pendant toute cette période de la biennale. Ainsi, du lundi au vendredi de 9h 00 à 17 h 00, les visiteurs peuvent accéder librement à l’intérieur du site.
DES EXPERTS CULTURELS APPELLENT À REPENSER LES MUSÉES AFRICAINS
Diverses personnalités du monde de la culture, dont l’écrivain et Prix Nobel de littérature, Wolé Soyinka, ont préconisé, samedi, de nouvelles approches pour redéfinir les musées et s’éloigner des modèles occidentaux.
Diverses personnalités du monde de la culture, dont l’écrivain et Prix Nobel de littérature, Wolé Soyinka, ont préconisé, samedi, de nouvelles approches pour redéfinir les musées et s’éloigner des modèles occidentaux dans le contexte de restitution des objets d’arts africains.
‘’Nous n’avons pas à regarder très loin, si nous voulons être original, dynamique’’, a dit le militant politique et écrivain nigérian pour qui, il faut trouver un nouveau moyen d’accès aux musées.
Le romancier pose ‘’la nécessité profonde de musées relationnels”, en appelant à une politique de la ‘’restitution’’, voire de la ‘’réparation’’.
Il s’exprimait lors d’un symposium de deux jours (9-10 novembre) à Dakar organisé en marge de la 15e Biennale de l’art africain contemporain de Dakar (7novembre-7 décembre).
Pour Soyinka, ‘’il s’agit de présenter un musée dans lequel l’histoire est vraiment en plein cœur. Et c’est un défi pour ceux qui cherchent vraiment un thème dynamique pour un nouvel musée’’.
Dans son livre ‘’Le fardeau de la mémoire, muse du pardon’’ (1998), le Prix Nobel pousse cette idée de nouveaux musées au-delà des oppositions binaires entre l’esthétique des colonisateurs et celle des colonisés, en appelant à un concept de ‘’Restitution’’, sinon de ‘’Réparation’’.
‘’Qui possède le pouvoir de raviver l’effet esthétique du beau dans toutes les cultures, y compris celles qui ont été dévalorisées, rejetées ou détruites ? ‘’, s’est-il interrogé.
Selon lui, une esthétique de la ‘’restitution’’, au-delà de la simple reconnaissance des injustices historiques, est nécessaire et a le pouvoir de raviver l’effet de beauté dans toutes les cultures, permettant ainsi des modes d’engagement, de mémoire et de solidarité contre la domination culturelle répressive.
L’artiste peintre sénégalais, Viyé Diba invite quant à lui à réfléchir sur de nouveaux types de médiations entre les objets d’arts et ses populations pour redéfinir le nouveau contenu des musées.
‘’Il nous appartient d’organiser une économie parallèle avec le retour de ces objets’’, fait savoir M. Diba qui parle de ‘’délocalisation plutôt que de ‘’restitution’’ s’il s’agit de faire venir les œuvres d’art et de les mettre dans les mêmes musées comme en Occident.
La commissaire sénégalaise, Marie Hélène Pereira, qui travaille à la maison des cultures du monde à Berlin (Allemagne) estime que cette question de repenser les musées en Afrique est simplement une réflexion autour de nos espaces, de nos institutions qui sont des lieux de mémoire.
‘’Quant on dépasse l’aspect collection, création d’art, objet d’art, tangible, il est aussi important de réfléchir sur l’aspect immatériel, au patrimoine immatériel et voir comment les lieux de mémoire peuvent créer des espaces et des occasions pour apprendre de ce patrimoine immatériel’’, dit-elle.
Le symposium qui se poursuit ce dimanche est organisé par l’Université virtuelle Cheikh Hamidou Kane du Sénégal en partenariat avec l’université New York d’Abu Dhabi et le musée Guggenheim d’Abu Dhabi construit sur l’eau et dont l’inauguration est prévue en 2025.
FESTIVAL DES GRILLADES DE DAKAR, UN PONT CULINAIRE ENTRE LE SÉNÉGAL ET LA CÔTE D'IVOIRE
Plus qu’un rendez-vous gastronomique, l’événement a rassemblé près de 5000 visiteurs autour des saveurs sénégalaises et ivoiriennes, célébrant l’amitié entre les deux nations et l’impact économique de leurs échanges culturels.
Le samedi 9 novembre 2024, l’esplanade du Grand Théâtre national de Dakar a accueilli un événement haut en saveurs et en diversité : la première édition du Festival des Grillades de Dakar. Cette initiative vise à renforcer les liens économiques et culturels entre le Sénégal et la Côte d’Ivoire, en mettant à l'honneur la gastronomie comme vecteur d'unité.
Sous un soleil éclatant, un public enthousiaste, composé de diverses nationalités résidant au Sénégal, a profité de l’occasion pour découvrir et savourer une variété de grillades, allant des viandes (bovins, ovins, caprins) aux fruits de mer (poissons, coquillages, huîtres) en passant par les volailles (pigeons, cailles, perdrix).
Le commissaire général du Festival des grillades d'Abidjan, M. Eric Atta, a exprimé sa satisfaction quant au succès de cet événement. « Après 17 éditions à Abidjan, nous lançons aujourd’hui à Dakar la première édition du Festival des grillades de Dakar, et on est satisfait du déroulement. Près de 5000 visiteurs de différentes nationalités ont pris part à ce rendez-vous culturel », a-t-il précisé.
M. Atta souligne également l’impact économique de cette manifestation, en notant que l'approvisionnement en ressources animales et halieutiques pour le festival contribue directement au développement économique local.
Mme Maguette Diop, directrice de Thelma Business School et co-organisatrice de l’événement, a partagé la vision du festival : « Les objectifs du festival sont multiples. Il s’agit d’abord de créer cette passerelle entre la Côte d'Ivoire et le Sénégal et de renforcer les liens entre les deux peuples. Le festival est également une vitrine de notre savoir-faire culinaire, puisque le Sénégal est connu pour sa street food que nous avions envie d’exposer à la face du monde. »
Coorganisé par Thelma et le cabinet ivoirien Advantages Conseil, le Festival des Grillades de Dakar a rassemblé une vingtaine de restaurateurs de Dakar et d’Abidjan, proposant ainsi une expérience culinaire unique. De la cuisine de rue sénégalaise aux saveurs ivoiriennes, les visiteurs ont pu explorer la diversité et la richesse de la gastronomie ouest-africaine.
Cette première édition, en plus de célébrer les saveurs, pose les bases d’une collaboration entre le Sénégal et la Côte d'Ivoire, faisant de la gastronomie un puissant levier de rapprochement culturel et économique.
PAR Boubacar Boris Diop
DE POUSSIÈRE ET D'ÉTERNITÉ : POUR OUZIN ET CHACUN
EXCLUSIF SENEPLUS - Nés à quelques maisons d'écart, Babacar Mbow et Ousseynou Bèye ont partagé bien plus qu'une enfance. De leur bibliothèque de quartier aux luttes politiques, ils ont tracé un profond sillon dans la conscience nationale
Ceux qui ont connu séparément ces deux êtres d'exception pourraient s'étonner de les voir associés dans un seul et même hommage. Rien n'est pourtant plus naturel car "Chacun" et "Ouzin", nés à quelques maisons l'un de l'autre, ont été façonnés dans le même moule. Et ce moule, c'est tout simplement notre enfance médinoise placée sous le signe d'une saine insolence et d'une curiosité intellectuelle précoce. Il est dès lors aisé de comprendre pourquoi je conçois avant tout cet exercice - dont l'impérieuse nécessité n'a jamais fait l'ombre d'un doute dans mon esprit - comme un amical devoir de mémoire.
C'est avec émotion que l'espace culturel "Kër Maam Sàmba" de Ngor a accueilli le 18 octobre 2024 une cérémonie du souvenir dédiée à Serigne Babacar Mbow. Le choix a été ainsi fait de marquer non pas l'anniversaire de sa disparition mais plutôt celui de sa naissance et l'événement a été un hymne à une vie où l'action a constamment été, pour parler comme le poète, "la sœur du rêve". Pape Samba Kane avait du reste donné le ton en rappelant dans un bel article les années libertaires de "Chacun", celles où, cheminant avec nonchalance parmi les gars de la marge, il s'était soudain mis à prendre plus au sérieux la solidarité avec les déclassés que la lutte des classes qui l'avait pourtant hanté pendant les décennies précédentes. En cette fin de journée à "Kër Maam Sàmba" il a certes été question du bâtisseur de Mbàkke-Kajoor mais aussi, bien évidemment, de celui que j'appelle "Ponkalum Ndeem-Maysa" dans Doomi Golo, autrement dit le géant de Ndem-Meissa, également glorifié par Seydina Insa Wade qui lui fut très proche. Et comme bien souvent, la phrase si inspirée de Mao Wane a été reprise en écho : "Nous avons tous fait un seul et même rêve et "Chacun" a réalisé ce rêve."
Le très turbulent camarade Mao ne croyait pas si bien dire et je m'en vais expliquer ce que j'entends par là.
Autour de leur seizième année, des gamins de la rue 5 X Blaise Diagne et environs sont tombés amoureux d'un coin de terre dans un village de la Petite-Côte dénommé Samgedj - orthographe hélas non garantie - au point de vouloir faire de ces quelques hectares en friche une somptueuse latifundia. Pendant des nuits et des journées entières notre imagination quelque peu déréglée a fait s'élancer vers les cieux des milliers de plants d'orangers, de manguiers et même d'arbres fruitiers exotiques et nous avons discuté tout feu tout flamme de la meilleure manière de prendre soin de notre chimérique bétail et de rentabiliser la volaille qui ne l'était pas moins. C'était complètement fou car autant que je me souvienne nous ne nous sommes rendus sur place que deux fois. Qui étaient donc ces adolescents pas vraiment tranquilles ? Ouzin et son jumeau Assane alias "Grand Laze" étaient de l'aventure, de même que "Ben" Diogaye Bèye ou le regretté Makhtar Mbaye-Doyen ; votre humble serviteur était lui aussi dans le coup tout comme, bien entendu, "Chacun" ainsi que le plus sauvage anarchiste jamais enfanté par la Medinaa, feu Assane Preira Bèye qui avait d'ailleurs trouvé un nom assez conquérant pour notre juvénile utopie : "Ëllëg Samgedj !". Dans cette affaire, c'est Preira qui avait été à la manœuvre du début à la fin tandis que, chose intéressante, le futur Maître de Ndem restait plutôt en retrait. On peut même se demander si Babacar Mbow y a seulement repensé au moment où Sokhna Aïssa et lui faisaient d'un somnolent village du Bawol un formidable lieu de vie et d'initiatives sociales aussi originales les unes que les autres. C'est que le bien curieux épisode de Samgedj est probablement sorti de toutes les mémoires et il ne m'est revenu à l'esprit que ces jours-ci, lorsque ces adieux à deux amis très chers m'ont obligé à me replonger dans mes plus lointains souvenirs. Mais, même évanescent, ce moment reste capital en ce qu'il permet de mieux comprendre les fantastiques réalisations ultérieures du disciple de Cheikh Ibra Fall de même que le parcours militant exemplaire d'Ouzin.
Et nous n'en étions pas à une extravagance près : à une époque où la mode était aux "Assoc's" et où l'on ne pouvait presque draguer aucune fille si on ne se faisait pas appeler Bebel, Johnny ou Elvis, nous avons créé, bien avant les actuelles ASC, le "Culture et Loisirs Club". Les deux principaux animateurs du CLC étaient déjà "Chacun" et Ouzin. On aura peut-être du mal à le croire mais ce club d'enfants éditait un journal culturel - ronéoté, cela va de soi - qui affichait sur la couverture de chaque numéro la même phrase de David Diop, qui sonnait déjà comme le cri de ralliement de prétentieux artistes en herbe : "La littérature est l'expression d'une réalité en mouvement, elle part de la réalité, la capte, saisit ce qui n’est que bourgeon et l'aide à mûrir." On devinera sans peine pourquoi ce magazine s'appelait "Le bourgeon"... Peut-être s'en trouve-t-il encore deux ou trois exemplaires dans les archives de l'IFAN où, sérieux comme ce n'était pas permis, nous allions parfois le déposer.
Le CLC avait également monté une bibliothèque au domicile des Bèye et les samedis après-midi nous y organisions dans la cour des séances de lecture collective à haute voix. Nous choisissions de préférence de courts récits comme L'étranger de Camus ou Sous l'orage de Seydou Badian Kouyaté afin de nous réserver le temps d'en discuter un peu avant de clore la session. Je me souviens que La métamorphose de Kafka nous avait vivement impressionnés et que Tchen, le héros de La condition humaine fascinait tout particulièrement Ouzin. Je ne serai nullement surpris de l'entendre des années plus tard reprendre au détour d'une discussion philosophique la phrase que Malraux met dans la bouche de son jeune révolutionnaire tourmenté et impatient que l'on a d'ailleurs dit inspiré par Chou-En-Laï : "Heureusement, on peut agir..." Sacré camarade Ouzin ! Je peux témoigner que jusqu'aux dernières heures de ta vie, le 21 juillet 2024, tu ne t'es jamais réveillé un seul matin sans te demander ce que tu pourrais bien faire ce jour-là pour aider les personnes de ton entourage ou rendre meilleure la société sénégalaise.
Notre bibliothèque était cependant bien pauvre comparée à celle de la "Maison des Jeunes et de la Culture" - sise alors à l'actuel emplacement de la mosquée omarienne. Nous y avions pratiquement élu domicile. Ravis de notre assiduité, Médoune Diop, son directeur, membre actif de l'UPS que nous traitions de réactionnaire sans savoir exactement ce que cela voulait dire, nous avait autorisés à y monter un ciné-club. Si j'ai bonne mémoire, Et la neige n'était plus d'Ababacar Samb Makharam et Hiroshima, mon amour d'Alain Resnais furent les deux films les plus fréquemment mis en discussion lors de ces soirées ouvertes au public. C'est là que nous avons vu le maladroit Sarzan de Momar Thiam - d'après le conte éponyme de Birago Diop - et À bout de souffle de Godard. C'était quelque chose, sa séquence finale, cette fuite éperdue, apparemment vers nulle part, de Belmondo... Tant de romans et de films, objets de nos vives querelles, ont en grande partie contribué à faire de Ben Diogaye Bèye un cinéaste, de Serigne Babacar Mbow un essayiste et de moi-même un romancier.
C'était la grande époque du PAI clandestin et le fait que des gamins d'un quartier populaire aussi emblématique que la Medina aient un tel penchant pour les débats d'idées ne pouvait pas échapper à l'attention de ses chasseurs de têtes. C'était d'autant plus évident que Magatte Thiam, une des éminentes figures de ce parti marxiste-léniniste, était apparenté à la famille Bèye tout comme d'ailleurs un autre de ses camarades, le futur avocat Charles Guissé. Ils venaient nous initier patiemment aux splendeurs du matérialisme dialectique et dans la foulée un cercle de discussion plus politique et social que littéraire fut mis en place. En plus des visites régulières de Magatte Thiam et Charles Guissé, nous y reçûmes plusieurs fois un aîné comme Amady Ali Dieng et en une occasion au moins un certain Abdoulaye Wade. Aucun de nous n'a jamais milité au PAI mais c'est bien cette formation politique qui a envoyé notre ami Assane Preira, jeune scientifique surdoué, faire ses études d'ingénieur dans la petite ville de Lauchhammer en Allemagne communiste. Il lui avait fallu transiter par le Mali de Modibo Keita et je me souviens comme si c'était hier de nos adieux sur le quai de la gare de Dakar, une scène que j'ai du reste fidèlement rapportée dans Le Temps de Tamango.
Il est normal avec un tel départ dans la vie de se retrouver très vite pris dans le tourbillon de la politique et s'il est un moment de notre jeunesse où les destinées de "Chacun" et Ouzin se sont confondues au point de n'en faire qu'une, c'est bien celui-là. Tous deux ne croyaient qu'en l'action directe et n'ont jamais hésité à pousser ce désir de résultat concret et immédiat jusqu'à ses conséquences extrêmes. Le temps viendra où les énormes risques pris par Babacar Mbow pourront être racontés et - il est bon de le savoir - le frêle Ouzin a tenu tête des jours durant à des tortionnaires bien décidés à le faire passer à table. Ce qui différenciait ces deux-là, c'est que "Chacun" y allait toujours avec le cœur et une secrète conviction de la vanité de l'existence humaine alors que le "camarade Ouzin" était un pur cérébral, raisonneur en diable. Peu bavard mais trop humain pour être hautain, n'élevant jamais la voix, il n'en était pas moins animé en toutes circonstances par une viscérale envie de convaincre. Sa façon d'analyser avec une froide rigueur les phénomènes sociaux et les événements politiques, d'anticiper les probables contre-arguments de son interlocuteur pour les anéantir l'un après l'autre, forçait l'écoute de tous et sa capacité à emporter l'adhésion des uns et des autres en faisait rapidement un leader naturel dans les nombreux groupes dont il était toujours l'un des membres les plus déterminés. Lui et moi n'avons pas toujours été d'accord sur tout - loin s'en fallait - mais jusqu'à la fin j'ai accepté sans le moindre problème son autorité intellectuelle. Bien des fois il m'a dissuadé d'exprimer publiquement mes vues pas vraiment consensuelles sur tel ou tel sujet et a posteriori ses conseils, que j'ai toujours suivis sans rechigner, se sont avérés salvateurs. Merci, Maître, d'avoir si souvent su me retenir au moment où j'allais lâcher de grosses conneries. De n'être plus en mesure de me bagarrer avec toi sur telle ou telle question nationale m'amène parfois à douter, le temps d'un éclair, de la réalité de ta disparition. Cela cause une petite souffrance, fugace mais vive, qui donne presque envie de sourire de la bonne blague que pourrait bien être, à la fin des fins, notre présence sur cette terre.
Au milieu des années soixante, chaque fois qu'il y avait des troubles à l'université de Dakar, des réunions supposées clandestines se tenaient dans la vaste concession des Bèye dont une entrée donnait sur la rue 3 et l'autre sur la rue 5. J'ai le très net souvenir d'Abdoulaye Bathily, leader estudiantin en vue de l'époque, venant présider l'une d'elles. Les relations entre Ouzin et Bathily se sont prolongées bien au-delà de cette période, dans le feu des luttes syndicales, et l'ancien Secrétaire général de la LD a été l'un des premiers à m'appeler le matin même de la disparition d'Ouzin. Notre ami commun René Lake venait de l'informer de mes liens particuliers avec le défunt et il avait réussi par mon entremise à présenter directement ses condoléances à la famille, ce à quoi il tenait tout particulièrement. Les textes d'adieu de Bathily et Mansour Aw, écrits pour toute une génération, ont su dire avec force l'abnégation d'un citoyen à l'engagement sincère que chaque frère d'armes pouvait si aisément prendre pour un confident ou même pour un quasi frère de sang.
Quant à Serigne Babacar Mbow, il faut remonter aux toutes premières années de sa vie pour avoir une idée claire de son singulier destin. Je crois bien que c'est un de nos "grands" de la Médina du nom de Lamine Gaye qui, le voyant passer avec une jeune fille, lui a lancé sur un ton moqueur : "Ah ! C'est chacun avec sa chacune !" Cette innocente taquinerie allait être l'acte de naissance d'un surnom de légende. Ceux qui s'émerveillent aujourd'hui de son exceptionnel parcours doivent savoir que dès sa plus tendre enfance tout a réussi à "Chacun". En voilà un qui était vraiment né sous une bonne étoile ! Son père, l'austère et grave Omar Ndoya Mbow, était un entrepreneur prospère - je crois me rappeler qu'il avait construit entre autres le cinéma Al Akbar - et puisque nos parents à nous peinaient à joindre les deux bouts, nous n'étions pas loin de le considérer comme l'homme le plus riche du monde. Il y avait de quoi : alors que nous devions nous contenter de nos anangoo délavés et de nos culottes courtes, "Chacun" se pavanait déjà en costard et cravate dans les rues du quartier. En ce temps-là on croisait d'illustres basketteurs, footballeurs ou athlètes à chaque coin de la Medinaa - Ouzin et Grand Laze ont du reste été des internationaux de volley-ball et notre ami Djiby Diop passe aujourd'hui encore pour le plus grand handballeur sénégalais, voire africain, de tous les temps. Si je rappelle cette réputation de vivier de sportifs de la Medinaa, c'est pour montrer qu'il suffisait à "Chacun", ailier au pied gauche magique, de le vouloir pour devenir une des légendes du football sénégalais. Lamine Diack l'avait bien compris, qui s'arrangeait pour l'emmener lui-même tous les jours à l'entraînement du Foyer France Sénégal, revenant avec lui à "Niangène" après chaque séance. Mais Babacar Mbow, qui n'était pas du genre à laisser qui que ce soit décider de son itinéraire de vie, a très vite dévié de la voie ainsi tracée pour lui. Faire une carrière de footballeur ne l'intéressait juste pas et par la suite il a complètement cessé d'y penser. En voici une preuve parmi d'autres : alors que la passion du foot accompagne la plupart des fils de la Medinaa pendant toute leur existence, lui le plus doué d'entre tous ne savait sans doute plus distinguer à la fin de sa vie entre le grand Barça et l'Olympique de Ngor. Ce n'était cependant pas par arrogance car il ne se serait jamais permis de mépriser les choix des autres. Il était tout simplement passé à une autre dimension du réel, non pas supérieure - il n'y a aucune hiérarchie en matière de passions humaines - mais radicalement différente. Au plan politique aussi, Serigne Babacar avait complètement cessé d'être de notre bas monde. Ce n'est pas lui qu'on aurait pu intéresser aux querelles politiciennes qui nous excitent bien plus que nous ne voulons l'admettre. Je m'en suis bien rendu compte à l'occasion d'un séjour à Mbàkke-Kajoor en compagnie de Ndiack Seck, Pape Samba Kane et Ouzin. Au cours d'un petit aparté, il m'avait annoncé la visite d'une personnalité politique vouée aux gémonies - à tort ou à raison - par la rumeur publique. J'ai essayé de l'inviter à la prudence mais c'était peine perdue car il n'avait jamais entendu parler de ce monsieur dont le nom avait pourtant été sur toutes les lèvres au cours des mois précédents !
Dans notre génération, les choix partisans définitifs ont été souvent précédés ou accompagnés par la mise en place de clubs culturels très politisés, "Lat-Dior" chez Ouzin à la Medinaa, "Africa" chez Ousmane William Mbaye à Jëppël et "Frantz Fanon", sans aucun doute le plus important et le mieux organisé, à notre maison familiale des HLM1. Babacar Mbow résidait toujours à la Medinaa et était donc théoriquement membre de "Lat-Dior". Mais il refusait déjà de se laisser brider et circulait librement d'un club à l'autre. Il était accueilli partout à bras ouverts et se comportait non pas comme le copain de tout le monde mais bien comme le meilleur copain de chacun, soit dit sans jeu de mots. Il faut savoir que le "Chacun" de ce temps-là respirait la joie de vivre avec ses moqueries, sa tendance à foutre le bordel et ses formidables éclats de rire. Il n'en était pas moins fasciné par des forces secrètes soupçonnées d'on ne sait quelles sombres manigances pour infléchir nos choix de vie. Quand donc avait-il pris la décision de ne jamais se laisser impressionner par personne ? Cette force de caractère se traduisait par un goût prononcé pour les défis plus ou moins absurdes. C'est ainsi qu'au cours de "vacances révolutionnaires" dans un village du Saalum, voyant un charmeur de serpents à l'œuvre, il fendit la foule et sous le regard ahuri du magicien, s'empara du reptile et se mit à l'enrouler autour de son cou. La légende s'en est un peu mêlée puisqu'on a affirmé par la suite que le charmeur de serpents est mystérieusement décédé au cours de la même nuit ! Ce qu'il faut surtout retenir de cette histoire, c'est la force mentale de "Chacun" qui lui a permis, dans les moments cruciaux de son existence, d'imposer sa volonté aux êtres et aux événements. En tant qu'écrivain, je peux bien avouer aujourd'hui que je n'ai pas eu à aller chercher bien loin les personnages les plus désaxés - au sens le plus strict, et pas forcément péjoratif, du terme - de mes romans. J'avais pour ainsi dire "Chacun" à portée de plume. Ou Assane Preira. Ou "Ben". Et la Léna de mon premier livre de fiction s'inspire d'une militante à la beauté quasi surréelle avec son éternelle coiffure afro, une pasionara en quelque sorte, dont nous étions tous follement amoureux. Eh bien, "Chacun" en était plus follement amoureux que nous tous au point de la surnommer dans ses moments de rêverie poétique "La femme sans chair".
Un autre souvenir de ces années tout à fait spéciales.
En 72 ou 73, "Chacun" est venu passer près d'un mois à la maison que Souleymane Ndiaye "Jules" et moi-même avions louée sur la rue de France à Saint-Louis. La police était sur ses traces à l'époque et il devait poursuivre sa route vers la Mauritanie où il comptait se faire oublier. Tout s'est bien passé et à vrai dire Jules et moi n'étions de dangereux agitateurs qu'entre les murs de nos salles de classe du lycée Charles de Gaulle. L'histoire aurait toutefois pu se terminer par un désastre puisque, via un cousin inspecteur au commissariat de la Pointe-Nord que nous hébergions, notre domicile était très fréquenté par des policiers et l'un d'eux, devenu un copain, ne nous quittait presque jamais, campant littéralement chez nous de l'aube à minuit. Eh bien, j'apprendrai quelque trente ans plus tard, en lisant un article de Mamadou Oumar Ndiaye, que le bonhomme était accusé d'avoir battu à mort Omar Blondin Diop à la prison de Gorée et que les potentiels commanditaires de son crime l'avaient affecté à Saint Louis pour qu'il s'y fasse oublier ! Cela faisait éprouver un sentiment étrange de se rappeler après plusieurs décennies à quel point "Chacun" - qui de toute façon ne nourrissait jamais de préjugés envers un être humain - appréciait ce policier. Je tiens à ajouter pour être juste que ce dernier, décédé lui aussi il y a quelque temps, a toujours nié les accusations formulées contre lui.
Si Babacar Mbow a su enfanter des mondes, c'est parce qu'il était fondamentalement un poète. Parmi les vers qu'il aimait marteler avec une force inouïe, pour son propre plaisir ou celui de son entourage, ceux-ci sont restés gravés dans ma mémoire : "Affaires en foule/Remue-ménage et phénomènes/Le jour s'en va peu à peu déclinant/J'aime la patrie de Lénine au bord de la Volga/J'aime la patrie de Lénine militante et combattante." Que pouvait bien signifier ce bout de texte si délicieusement rythmé ? Selon "Chacun", il provenait d'un poème de Maïakovski mais je ne le croyais qu'à moitié. Il y avait sûrement un peu de lui là-dedans. Quoi qu'il en soit, j'ai toujours trouvé une si mystérieuse beauté à ces vers que j'ai profité du premier prétexte narratif pour les glisser tels quels dans Le Cavalier et son ombre.
Tout cela montre pourquoi l'idée d'un colloque sur Serigne Babacar Mbow, soulevée à "Kër Maam Sàmba", fait si pleinement sens. Il avait réussi sans se forcer à faire de sa vie réelle une œuvre d'art tout en transformant ses cogitations parfois délirantes en œuvres concrètes, d'une remarquable utilité publique.
Il paraît que quand Ouzin nous a quittés, Djiby Diop - l'ex-champion de handball mentionné plus haut - a interpellé les compagnons d'enfance présents : "Qui d'entre nous a jamais entendu Ousseynou Bèye sortir une insulte de sa bouche ?" (Kan ci nun moo mas a dégg Uséynu Béey mu saaga ?) C'était une question à la fois simple et extrêmement brillante, du genre de celles qui vous imposent un temps d'arrêt pour faire défiler dans votre esprit les scènes de la vie d'un être humain et dans ce cas précis finir par admettre que eh bien, aussi incroyable que cela puisse paraître, personne n'a jamais vu Ouzin s'emporter ou encore moins se laisser aller à proférer des obscénités. Cela s'appelle avoir de la classe. J'ajouterai simplement que c'était tout aussi inconcevable pour "Chacun" et ce, longtemps avant qu'il ne devienne Serigne Babacar Mbow. Bien que fermement attaché à ses certitudes, il jugeait indigne de lui de se montrer agressif et on pouvait même parler à son propos d'une certaine douceur. S'il a très tôt considéré Assane Preira Bèye comme son frère jumeau - par l'âge et par un goût partagé pour les dérapages métaphysiques - "Chacun" avait le plus grand respect pour la puissance intellectuelle et la force de conviction d'Ouzin.
Quelques semaines après la disparition de Serigne Babacar, Codou, Ndiack et moi-même avons rendu visite à Ouzin et Penda à Kër-Masaar. Ils nous ont alors appris que "Chacun" et Sokhna Aïssa étaient venus y passer une journée avec eux. À l'évocation de ce qui avait été de toute évidence une pudique cérémonie des adieux, le regard d'Ouzin a brillé d'un singulier éclat - je ne l'oublierai jamais - et nous avons tous reparlé ce dimanche-là de "Harlem", de Ndeem-Maysa et de Mbàkke-Kajoor, c'est-à-dire de l'essentiel. De ce qui, en triomphant du temps et de la mort, donne paradoxalement à toute vie humaine du sens et un parfum d'éternité.
par Fatoumata Hane
DE LA CENSURE DE LA RECHERCHE ACADÉMIQUE EN DÉMOCRATIE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le livre de Séverine Awenengo Dalberto, que j’ai lu, est loin d’être le brûlot que l’on décrit. Cette censure contribue au particularisme de la Casamance, nourrissant les imaginaires que ce livre s’attache à déconstruire
Le livre de Séverine Awenengo Dalberto, que j’ai pris le temps de lire, est bien loin d’être le brûlot que l’on veut nous présenter ! Ces dernières années, le « pluriversalisme décolonial » a conduit de nombreux chercheurs, africains comme européens, à interroger la fabrique des savoirs et la production des connaissances sans avoir à se justifier ou risquer d’apparaître comme des imposteurs.
S’appuyer sur des théories complotistes ou des arguments misogynes et racistes est la posture la plus simple pour imposer une position, influencer l’opinion ou promouvoir une censure inconcevable dans une démocratie qui se revendique ouverte et majeure. Cette censure contribue au particularisme de la Casamance, nourrissant les « imaginaires » que ce livre s’attache à déconstruire. Elle participe également de la servitude intellectuelle à laquelle la politique cherche à nous contraindre. Cette menace pèse non seulement sur le métier d’historien, mais sur l’ensemble des sciences humaines et sociales, marquant un déclassement de la production intellectuelle.
Instrumentaliser un objet de recherche revient à construire un récit biaisé, bien plus dangereux que de simplement interdire la commercialisation d’un livre – qui, paradoxalement, bénéficie d’une promotion accrue – dans un pays où peu de gens lisent et dans un contexte où les plateformes numériques facilitent la diffusion des publications. Au point que certains témoins ayant participé à l’ouvrage hésitent aujourd’hui, invoquant une temporalité mal adaptée au contexte actuel du Sénégal. Je reprends à mon compte ce que dit Mbougar Sarr sur le temps: il n’y a pas de moment idéal pour publier. Le temps politique n’est pas celui de la science, pas plus que le temps qui rythme la société. Cette recherche a débuté en 2000, et certains aspects ont déjà fait l’objet de publications par la même autrice ainsi que par d’autres collègues chercheurs.
Va-t-on reprocher à Armelle Mabon son livre sur le massacre de Thiaroye ? Assurément, non ! Les enjeux sont ailleurs : le Sénégal devrait, sur cette question, exiger la déclassification des rapports militaires afin que cette histoire soit connue et que la France s’acquitte de ses dettes matérielles et morales.
Pour en revenir à mon propos, ce livre dont je ne ferai pas une note de lecture, interroge l’historicité de l’idée d’autonomie de la Casamance dans les imaginaires coloniaux. Les sources utilisées (archives offrant diverses interprétations) contribuent à façonner et figer l’unité territoriale du Sénégal. L’idée d’autonomie, soutenue dans une perspective utilitariste et économique par les colons, nourrit en retour les imaginaires de la « différence casamançaise » qu’elle consolide. Le refus de l’autonomie est sans cesse réaffirmé, car elle ne servait que des ambitions personnelles, politiques et économiques. L’autonomie reste donc une hypothèse théorique ; les politiques actuelles rappellent à bien des égards les dispositifs mis en place pour consacrer l’unité territoriale et l’ancrage de la Casamance au Sénégal.
On observe une concordance entre les politiques de désenclavement et la valorisation du potentiel économique, ayant valu à la région le premier plan quadriennal du Sénégal en 1959 et, plus récemment, les importants programmes d’investissement au cours de ces vingt dernières années. Les politiques successives de décentralisation se basent sur cette autonomie des territoires qui en font des possibles territoriaux. L’Acte III de la décentralisation le consacre à travers trois de ces principes que sont la subsidiarité, la péréquation et l’autonomie de chacune des collectivités territoriales. Il y a une différence, plus que conceptuelle, entre autonomie et indépendance. Je passe sur la contribution des élus de la Casamance aux manifestations politiques : leur vote pour le « Oui » à l’indépendance du Sénégal révèle l’unicité de notre histoire politique et sociale. Qu’est-ce qui fait peur dans l’interprétation des archives et des sources historiques : la réactivation des imaginaires sur le rattachement de la Casamance au Sine-Saloum, ou l’effort de construction d’un récit et de production d’une histoire qui nous libèrent de toutes sortes de mystifications ?
Professeure Fatoumata Hane est Socio-anthropologue, Uasz.
KALIDOU KASSÉ VA DÉDIER UNE EXPOSITION D’ART À L’EMPLOI DES JEUNES
Invité de l’émission Salam Sénégal, l’artiste peintre partage les nouveautés de la 15e édition de la Biennale de Dakar, marquées par des expositions inclusives et une sélection paritaire. Pour lui, l’art n’est plus une affaire d’élite.
Kalidou Kassé, artiste peintre est l’invité de Salam Sénégal. Son invitation s’inscrit dans le cadre de l’ouverture de la 15e édition de la biennale de l’art contemporain africain, membre du comité d’orientation de l’art contemporain africain.
Il est venu d’emblée sur la particularité de cette 15e édition de la biennale. Elle se résume en général aux trois innovations dont « le salon du design qui est revenu, l’exposition dédiée aux collectionneurs sénégalais, mais aussi la sélection qui a tenu à la parité entre femme et homme » dit-il. Pour lui, cette dernière ne s’est pas faite de manière « automatiquement » mais découle « des propositions qui nous ont amené à cela ». De son avis « ce sont les 3 particularités de cette exposition ».
L’artiste a par ailleurs senti « un engouement du monde entier de participer à cette biennale» par ce qu’ils « savent que la biennale a une dimension internationale » d’autant plus que c’est « la quatrième biennale du monde ». Elle a été repoussé à ses tout débuts parce qu’il y a un calendrier international de toutes les biennales du monde comme celle de Venise, ou aux États-Unis ». Mais celle de Dakar était toujours confiné par ses mouvements domestiques » et en suivant « l’actualité beaucoup de collectionneurs, d’amateurs d’art ont compris qu’avec les problèmes de contexte politique, le report était nécessaire et se sont remis pour venir au mois de novembre ». Report qui a d’ailleurs eu un impact positif selon Kalidou Kassé : « sur le plan non seulement de l’organisation mais aussi sur le plan de proposition artistique que nous avons reçu ».
Relever le défi de l’emploi
Membre du comité d’orientation, Kalidou Kassé compte organiser une exposition pour répondre à la problématique de l’emploi des jeunes. Pour le peintre c’est « justement le grand défi ». Et « nous devons y travailler ». Il révèle que son marché d’art qu’il compte organiser à la Place du Souvenir Africain cette année va être dédié « aux jeunes parce que la dernière édition tenue il y a deux ans, j’avais invité beaucoup de monde venant de la sous-région et de l’Amérique mais j’ai senti l’absence des jeunes et c’est pourquoi je me dis qu’il me faut corriger cela » ajoute-il. Donc son rendez-vous prochain va être dédier « exclusivement aux jeunes ». Le choix sur les jeunes s’explique par le fait que « le monde de l’art regorge de potentialités non seulement économique » et que «de nouveaux métiers émergent dans ce secteur » qui peut-être une aubaine face aux questions de l’emploi des jeunes. Pour cela, l’artiste fait référence « au commissaire d’exposition, de l’historien de l’art, du médiateur et même le métier de scénographe entre dans ce cadre aujourd’hui ».
Engouement des Sénégalais à l’art
Mais les défis à relever sont nombreux. C’est à se demander si les sénégalais s’intéressent davantage à l’art.
Pour le connaisseur qu’ils « sont nombreux à venir à cette exposition Dakar ». Kassé se dit « agréablement surpris parce que hier j’étais à l’ancien palais et les sénégalais venaient jusqu’à à minuit. Chaque Sénégalais qui arrive me parle d’un projet artistique et j’ai vu qu’ils sont en train d’être concentré à la réalité de la création artistique. Ce n’est plus donc une affaire d’élite comme le prétendent certains.
Pour lui, cette étape est dépassée depuis longtemps. C’est comme si on dit que l’art ne nourrit pas son homme. Or que l’art nourrit son homme parce que nous sommes au 21e siècle. Kalidou explique qu’aujourd’hui tous les canaux sont ouverts pour dire cela par ce que « nous avons des gens qui se sont mis dans la collection artistique ». C’est qui a suscité un peu « l’exposition des collectionneurs dont je suis le commissaire ». Sa surprise fut de « voir dans ces collections, des œuvres qui peuvent coûter plus de 300 millions comme ce que détiennent Mourtala un des plus grands collectionneurs du Sénégal ».
Remercier le Président
Pour le moment dit-il, il faut remercier le Président de la République qui a rendu hommage aux artistes disparus, lors de l’ouverture de la biennale. Un acte extrême important et émouvant trouve-il, parce que « les familles de ces artistes disparus sont restés chez eux à regarder la télévision en écoutant la voix de leur père, oncle, grand-père qui fait chaud au cœur. Et cela était l’élément déclencheur de tous les artistes qui ont compris le message du président de la république.
L’intelligence artificielle ne doit pas tuer la création
Au-delà de la communication du Président, « nous l’avons compris que nous allons plus vers le numérique » souligne Kalidou. « Le monde devient de plus en plus numérique et les artistes doivent aller vers cela. Nous ne devons pas avoir peur de l’intelligence artificielle et d’autres ». Pour lui, « le cœur de la création ne doit pas être tué par ces nouveaux outils qui arrivent » d’où la nécessité de les prendre avec beaucoup de précautions.
ABOUBACRINE SOW PRONE UNE MEILLEURE VALORISATION DE LA LANGUE ARABE
Professeur d’arabe depuis plusieurs années et pur produit du daraa, Aboubacrine Sow, formateur en discipline arabe au Crfpe de Thiès, est l’auteur de l’ouvrage Appui à l’enseignement de la grammaire, la morphologie et la conjugaison.
Pour reconnaître la richesse culturelle et linguistique portée par l’arabe, mais également aider les enseignants, les apprenants et même les personnes qui sont intéressées à parler cette langue, Aboubacrine Sow, formateur en discipline arabe au Crfpe de Thiès, vient de sortir un ouvrage intitulé «Appui à l’enseignement de la grammaire, la morphologie et la conjugaison».
Professeur d’arabe depuis plusieurs années et pur produit du daraa, Aboubacrine Sow, formateur en discipline arabe au Crfpe de Thiès, est l’auteur de l’ouvrage Appui à l’enseignement de la grammaire, la morphologie et la conjugaison. La cérémonie de dédicace de ce manuel scolaire a eu lieu samedi dernier au Lycée Demba Diop de Mbour. L’amour de de langue arabe a poussé l’auteur à aller en Mauritanie, en Tunisie et enfin au Maroc, pour mieux l’apprendre. Après ses études, il est revenu au Sénégal pour faire des formations professionnelles. «J’ai fait la Fastef, la Caem, le Caes. J’ai enseigné dans les écoles privées traditionnelles, les écoles privées modernes et les écoles publiques. J’ai aussi constaté que la bibliothèque sénégalaise en langue arabe est presque vide. Je me suis dit pourquoi ne pas essayer d’apporter ma contribution à cette bibliothèque», a déclaré Aboubacrine Sow lors de la cérémonie de dédicace. Il a également souligné qu’au-delà de cet aspect, il veut que les générations futures puissent bénéficier de son travail, comme les gens de sa génération ont eu la chance de bénéficier du travail de leurs anciens. «C’est cela qui m’a inspiré, après quelques efforts, à sortir ce livre qu’on peut considérer comme un manuel scolaire. Le titre du livre, c’est Appui à l’enseignement de la grammaire, la morphologie et la conjugaison pour l’arabe langue vivante au Sénégal -tous les niveaux. Donc, ce sont trois éléments indispensables pour maîtriser une langue. Le livre peut aussi appuyer l’enseignant, mais en même temps l’apprenant, pour la pratique ou l’apprentissage de la langue arabe», a précisé le formateur au Crfpe de Thiès.
Selon lui, la langue arabe fait partie des premières langues étrangères à être pratiquées au Sénégal et jusqu’à présent, il y a beaucoup de mots arabes dans le wolof. Ce qui fait que les Sénégalais pratiquent cette langue sans même le savoir. «Beaucoup de Sénégalais aussi ont le complexe de parler cette langue. D’ailleurs, on veut confiner cette langue et la réserver juste pour les cérémonies religieuses. Cette langue est enfermée dans les cérémonies mortuaires, les baptêmes, les mosquées et autres. Il faut savoir que ce qui est valable pour les autres langues l’est aussi pour l’arabe. C’est une langue vivante, c’est une langue de la société que l’économie, la technologie, la politique, entre autres, utilisent.» Ce livre va ainsi motiver les jeunes, les apprenants pour qu’ils puissent parler sans gêne cette langue. Il va aussi faciliter pour les enseignants, les élèves et même ceux qui ne sont pas dans le milieu scolaire, la maîtrise de cette langue. L’auteur révèle aussi que l’écriture de ce livre est partie d’une émission qu’il fait chaque mercredi à la radio Xew-Xew Fm à Mbour, et qui s’intitule Jariba arabiyataka, «Tester votre arabe». «Pour mieux faire la promotion de cette langue, j’ai pensé écrire ce livre qui va sillonner le monde pour enrichir l’apprentissage de cette langue», précise Aboubacrine Sow
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L’ART AU SERVICE DES POPULATIONS
Le président Faye a exprimé un intérêt soutenu pour l'économie culturelle, mettant en lumière son potentiel de création de richesses et d'opportunités d'emploi, en particulier à l'ère numérique.
Dakar a vibré hier, vendredi, au rythme de l'ouverture de la 15e édition de la Biennale d'art contemporain africain, le Dak'Art, qui se tient du 7 novembre au 7 décembre au Grand Théâtre de la capitale sénégalaise. Cet événement, devenu un rendez-vous incontournable depuis 1996, a été marqué par l'allocution du président de la République, Bassirou Diomaye Faye, qui a souligné l'importance de l'art dans la société.
Le président Faye a exprimé un intérêt soutenu pour l'économie culturelle, mettant en lumière son potentiel de création de richesses et d'opportunités d'emploi, en particulier à l'ère numérique. « Le numérique occupe une place grandiose dans l'économie culturelle. Il peut valoriser le patrimoine et créer des emplois pour les jeunes », a-t-il affirmé, insistant sur la synergie entre la technologie et l'art comme moteur de développement.
Le thème de cette édition, « The Wake » (en français, « le Sillage » ou « l'Éveil »), résonne profondément dans la démarche artistique et intellectuelle de l'événement. Inspiré par l'ouvrage de la professeure Christina Sharpe, The Wake: On Blackness and Being, le thème explore la condition noire à travers des prismes littéraires, visuels et artistiques, abordant les notions de deuil, d'exhumation et de résilience. Cette orientation thématique vise à relier le passé et l'avenir avec une importance égale, unissant mémoire et promesse.
Dans un discours empreint de sagesse, le président Faye a évoqué le rôle fondamental de l'art dans la compréhension du monde et la quête d'harmonie. « L'art facilite la compréhension du monde, le rend moins angoissant et aide à défricher la place que l'homme doit y occuper, en symbiose avec tous les autres êtres », a-t-il déclaré, soutenant que l'esthétique et l'éthique partagent des valeurs communes et indissociables. Portant une attention particulière à l'éthique, le président a rappelé que « l'éthique est une valeur cardinale de nos cultures de tradition ». Il a souligné l'engagement du gouvernement, conduit par le Premier ministre Ousmane Sonko, à incarner les valeurs de droiture et d'exemplarité. « JUB JUBAL JUBANTI », des concepts que l'on pourrait reprendre par rectitude et réparation, s'inscrivent au cœur de l'action gouvernementale, illustrant la nécessité de corriger les torts passés envers la communauté.
Enfin, le chef de l'État a invité la population, et en particulier la jeunesse, à s'approprier cet événement d'envergure et à participer activement aux diverses manifestations culturelles prévues. « Le Dak'Art est un espace où l'art africain contemporain s'exprime, se célèbre et se promet, enrichissant la scène culturelle internationale », a-t-il conclu, promettant ainsi un mois de célébrations artistiques intenses.
par l'éditorialiste de seneplus, Amadou Elimane Kane
QUAND LA SCIENCE NE RELÈVE PAS DE PROCÉDÉS IDÉOLOGIQUES
EXCLUSIF SENEPLUS - Les histoires sont véhiculées par des narrateurs, même s’ils se déclarent détachés et objectifs, ils sont le plus souvent les témoins de la fondation d’un champ scientifique et surtout culturel
Amadou Elimane Kane de SenePlus |
Publication 08/11/2024
Ainsi, le discours de la science n’est jamais neutre et à tout moment, il peut être orienté par une idéologie. C’est à ce carrefour que nous devons rester en alerte. En effet, certains historiens, écrivains ou scientifiques peuvent surgir, de nulle part d’ailleurs, pour nous vendre, au nom de la science, des procédés idéologiques, qui nous installent dans le détournement de la vérité historique, pouvant mener à la falsification et à l’aliénation.
Quand on parle des sciences, on présuppose être dans la posture « de ne pas savoir », à la lumière des véritables scientifiques qui remettent en cause en permanence les théories. Cette disposition à tordre un concept scientifique pour en faire émerger un autre est à la base de tout travail épistémologique.
Pourtant, la science prend aussi sa véracité par le récit que l’on en fait. La profondeur réflexive et humaine joue un rôle incontestable dans toutes les théories de l’observation scientifique. Au préalable, il faut préciser que chaque expérience, chaque connaissance est induite par un récit et chacune possède une forme narrative. Or, la question du récit est plus subjective que celle de la rationalité des sciences.
Les théories sont mises à l’épreuve par une série de vérifications et les histoires sont jugées en fonction de leur vraisemblance, ce qui est possible et vérifiable, ce qui relève au fond de la « vraie » science. La science a recours aux hypothèses, mais celles-ci sont falsifiables, sans pour autant que la théorie se modifie. Ainsi on peut considérer que les grandes théories scientifiques sont plus proches des « histoires » qu’il n’y paraît.
La science est le produit d’agents humains qui sont caractérisés par des désirs, des croyances, des savoirs, des intentions, des engagements qui forment en quelque sorte des situations inattendues comme dans les récits.
Les histoires sont véhiculées par des narrateurs, même s’ils se déclarent détachés et objectifs, ils sont le plus souvent les témoins de la fondation d’un champ scientifique et surtout culturel.
La pensée occidentale, depuis les Grecs, défend l’idée d’un monde rationnel où tout est susceptible d’être expliqué. Mais les théories scientifiques dépendent aussi des données spéculatives, des contextes culturels, des histoires, des fables, des mythes, des métaphores qui permettent de valider les hypothèses.
Ainsi, le discours de la science n’est jamais neutre et à tout moment, il peut être orienté par une idéologie. C’est à ce carrefour que nous devons rester en alerte. En effet, certains historiens, écrivains ou scientifiques peuvent surgir, de nulle part d’ailleurs, pour nous vendre, au nom de la science, des procédés idéologiques, qui nous installent dans le détournement de la vérité historique, pouvant mener à la falsification et à l’aliénation.
C'est encore malheureusement le cas quand il s’agit du récit africain et des apports scientifiques qu’il est en mesure d’apporter, s’agissant de son expérience et d’un environnement culturel donné.
Les idéologues, soi-disant scientifiques, oublient, de manière systémique, la vérité historique pour faire entendre un discours qui procède de l'illusion et de la manipulation. Il en va de même en ce qui concerne l’espace de l’information. Trop souvent, on assiste au détournement de la vérité au profit d’une idéologie qui consiste à faire croire à un récit inventé de toute pièce, afin de prolonger la domination à l'œuvre. Or, sur le terrain de la pensée historique, tout est contestable et tout est mouvement.
Ces récits organisés vont à l’encontre de notre vivre ensemble encore trop fragile et ces procédés continuent de déstabiliser le continent africain.
Lorsqu’on entend un historien dire “ce que je dis est strictement historique”, on peut questionner les documents sur lesquels il s'appuie, exhumer les archives qui ont été utilisées, tout en se demandant qui les a façonnées, à quel moment et dans quel contexte.
Nous armer de science jusqu’aux dents, préconisait le professeur Cheikh Anta Diop et cette affirmation est celle que nous devons porter en bandoulière, sans nous laisser enfermer dans des soleils trompeurs qui viennent d’une sphère qui n’est pas notre réalité.
C’est à nous de donner du sens à ce que nous avons, à ce que nous savons, à ce que nous sommes pour sortir de l’instrumentalisation qui nous détruit et fait de nous de simples consommateurs, sans histoire et sans référents socio-culturels.
Voici le préalable à toute théorie scientifique ou informationnelle. Il s’agit de questionner en permanence les paramètres, les méthodes employées, qui relèvent encore des opinions et des règles idéologiques, en nous assurant que les thèses du récit africain sont les nôtres. Ces théories que nous pouvons faire émerger en augmentant notre matériel de recherche, qui se doit de rétablir des critères objectifs, sont la source de notre propre narration. Dans ces conditions et seulement celles-ci, nous serons en mesure d’opérer des ruptures épistémologiques et de construire notre propre récit scientifique.
Amadou Elimane Kane est enseignant, poète écrivain et chercheur en sciences cognitives.