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24 novembre 2024
Culture
NITDOFF, SYMBOLE DE LA RÉPRESSION DES VOIX DISSIDENTES AU SÉNÉGAL
Son arrestation intervenue en janvier dernier, fait suite à un live vidéo dans lequel il exprimait sa colère à l'égard du gouvernement sénégalais et du président Macky Sall, en raison du climat politique tendu à l'approche de la présidentielle
L'article paru sur le site de Jeune Afrique le samedi 9 septembre 2023, met en lumière la situation préoccupante de Nitdoff, une figure emblématique du rap sénégalais, actuellement détenu en prison.
Nitdoff, rappeur sénégalais influent depuis quinze ans et fervent défenseur de diverses causes, se trouve en détention depuis le 24 janvier. Son arrestation fait suite à un live vidéo dans lequel il exprimait sa colère à l'égard du gouvernement sénégalais et du président Macky Sall, en raison du climat politique tendu à l'approche de l'élection présidentielle.
L'artiste, reconnu pour son langage cru et ses prises de position politiques, a été accusé de "diffusion de fausse nouvelle, outrage aux magistrats et menace de mort". Il a été placé en détention provisoire à la maison d'arrêt de Rebeuss à Dakar.
Originaire de Louga, Nitdoff a émergé sur la scène du rap sénégalais en 2007 avec le titre "Kalashnikov". Son style musical et son engagement politique en ont fait une figure majeure du rap sénégalais, notamment en critiquant les dysfonctionnements et en défendant la jeunesse.
Son implication politique l'a également rapproché d'Ousmane Sonko, un opposant politique, avec qui il a collaboré pour dénoncer la corruption et la pauvreté. Certains estiment que cette relation avec Sonko est à l'origine de son arrestation.
Malgré son incarcération, Nitdoff continue de bénéficier d'un soutien considérable de la part de rappeurs, de fans et d'activistes qui réclament sa libération. La situation est difficile pour lui et sa famille, mais il reste fidèle à ses convictions en faveur de la liberté d'expression.
La détention de Nitdoff est devenue emblématique des tensions politiques au Sénégal et de la répression des voix dissidentes dans le pays. Elle soulève des questions sur le respect de la liberté d'expression et des droits de l'homme au sein de la nation. Cette affaire met en évidence les défis auxquels sont confrontés les artistes et les activistes qui osent critiquer le pouvoir en place et exprimer des opinions dissidentes.
MAME WOURY THIOUBOU LAUREATE DU GRAND PRIX INTERNATIONAL URTI DU DOCUMENTAIRE D’AUTEUR DE YAOUNDÉ
La réalisatrice sénégalaise Mame Woury Thioubou a remporté jeudi le Grand prix international Urti du documentaire d’auteur de Yaoundé pour son film intitulé ‘’Rebeuss, Chambre 11’’.
Dakar, 8 août (APS) – La réalisatrice sénégalaise Mame Woury Thioubou a remporté jeudi le Grand prix international Urti du documentaire d’auteur de Yaoundé pour son film intitulé ‘’Rebeuss, Chambre 11’’.
Le film a également a été également récompensé du Prix des œuvres numériques de la 42e édition de la conférence Urti clôturée jeudi dans la capitale camerounaise.
‘’A Yaoundé, au Cameroun avec deux prix remportés. Je suis heureuse de partager avec vous ces nouvelles distinctions pour +Rebeuss, Chambre 11+’’, a réagi la réalisatrice sur sa page facebook.
Le film documentaire de Mame Woury Thioubou a été distingué parmi la dizaine de films finalistes provenant notamment d’Italie, de la France, de la Corée du Sud, du Maroc ou encore de Sri Lanka, de Burundi et d’Ukraine.
‘’Je ressens une très grande satisfaction vu les membres du jury venant d’horizons Adifférentes. Cela veut beaucoup dire. Je suis dans le même temps gagnée par la tristesse en pensant à ces deux morts’’ qui ont inspiré le film, a expliqué la réalisatrice lors d’un entretien téléphonique.
De Brazzaville où elle participe à un atelier de cinéma, Mame Woury Thioubou révèle avoir dédié ces prix à ceux qui ont accepté de participer au film et aux deux jeunes morts dans les liens de la détention.
‘’Je remercie encore une fois l’équipe du film, les personnes qui ont participé à cette aventure avec moi. J’ai une pensée pour tous ceux qui sont derrière les barreaux », poursuit-elle.
‘’Rebeuss, Chambre 11’’, un film de 49 minutes réalisé en 2022, mêle documentaire et animation pour interroger le système carcéral sénégalais.
Il est inspiré par l’histoire de Cheikh Ndiaye, âgé de 18 ans et Babacar Mané, 19 ans, morts dans la nuit du mardi 27 août 2019 à la prison centrale de Rebeuss, à Dakar.
‘’Cheikh et Babacar sont morts, mais des milliers de leurs concitoyens continuent à purger leur peine dans des conditions indignes‘’, a dit la réalisatrice.
La journaliste, cheffe du Desk culture du journal Le Quotidien, propose ainsi à travers ce film à une réflexion autour du système carcéral sénégalais.
‘’Le moment est venu de mener une réflexion profonde sur le système carcéral sénégalais. Depuis les indépendances, nous avons construit une seule nouvelle prison à Sébikotane. La plupart des maisons d’arrêt sont en ruine. Il est nécessaire de désengorger nos prisons et un meilleur respect pour les droits humains’’, a-t-elle plaidé.
La cérémonie du ‘’Grand Prix international Urti du documentaire d’auteur’’ a proclamé les résultats jeudi dans le cadre de la 42e édition de la conférence URTI 2023 à Yaoundé
‘’Créée en 1949, sous l’égide de l’Organisation des Nations Unis pour l’éducation, les sciences et la culture (UNESCO), l’URTI est la plus ancienne organisation audiovisuelle et la seule à vocation totalement internationale’’, fait valoir une note d’information.
‘’Cette union professionnelle organise des échanges de programmes de télévision et de radio, des Grands Prix internationaux audiovisuels, des coproductions, des ateliers de formation et des actions de promotion de la création audiovisuelle mondiale’’, a-t-on appris par la même source.
L’ACTEUR JEAN PAUL D’ALMEIDA N’EST PLUS
Acteur de séries sénégalaises et mannequin, Jean Paul D’Almeida est décédé, lundi 04 septembre, à Dakar, des suites d’un accident de la route, a annoncé la maison de production Enven Prod.
Acteur de séries sénégalaises et mannequin, Jean Paul D’Almeida est décédé, lundi 04 septembre, à Dakar, des suites d’un accident de la route, a annoncé la maison de production Enven Prod.
Un autre acteur a tiré sa révérence. La famille, les proches et cinéphiles sont plongés dans le désarroi, la consternation et une tristesse indescriptive à l’annonce de la brusque disparation du jeune acteur. Jean Paul D’Almeida est parti à la fleur de l’âge suite à un accident survenu il y a quelques jours. Il était un acteur connu sur le petit écran, dans le monde du cinéma et du secteur de la mode au Sénégal. D’origine métissée, son père est béninois et sa mère bissau-guinéenne, Jean Paul D’Almeida est né et a grandi à Dakar. Il s’est ainsi retrouvé très tôt sur les podiums en tant que jeune mannequin. Le défunt était aussi connu pour son engagement social à travers l’association «Acteur Social».
En tant qu’acteur, Jean Paul D’Almeida a joué dans plusieurs séries sénégalaises notamment «Idoles» et «Yaye 2.0». Son décès survient un peu plus de deux semaines après celui de son collègue Mentor Ba, un autre acteur des séries locales. Depuis l’annonce de son décès, les témoignages des proches et amis fusent de partout notamment sur les murs des réseaux sociaux.
«Oh le monde du cinéma est encore frappé par une très grande perte et une nouvelle très triste : notre collègue et ami Jean Paul d’Almeida dit JP est parti à jamais ; nous présentons nos condoléances à toute la famille proche et au monde du 7ème art», poste l’acteur Youssoupha Seck.
«JP, un ami, un frère. Depuis l’annonce de cette terrible nouvelle, je ne cesse d’entendre ta voix, de me rappeler ta gentillesse. Nous allons tous y passer un jour, tu avais tellement de choses à faire encore, tellement de projets dans la tête. Que chacun s’y prépare, nous partons un à un sans même nous dire au revoir au moment où on ne s’y attend pas. Mes sincères condoléances à ta famille, tes collègues du cinéma sénégalais et de la mode, à tes amis et à l’ensemble des Sénégalais qui aimaient te suivre. Au Revoir Jean Paul D’Almeida», regrette un proche. Autre réaction : «Repose en paix, Diambar. Ton professionnalisme et ta rigueur dans le travail restent deux qualités qui m’ont particulièrement marqué dans ta carrière. Jean Paul D’Almeida était un acteur dans beaucoup de séries télévisées au Sénégal. Parallèlement, il posait pour plusieurs couturiers et réalisait des spots publicitaires pour divers produits. Il était très actif dans les initiatives sociales et culturelles de son terroir (SICAP) et au-delà. Un jeune pétri de talent et d’humanisme est parti. Qu’Allah ait pitié à ton âme.»
Le rappeur Simon Kouka s’incline, lui aussi, devant la mémoire de l’acteur. «Salaam à tous. Triste Nouvelle. Rest in Power#Jean_Paul_Dameida (JP). Ne l’oubliez pas dans vos prières… Ku bakh, yarou yeug nit fonk nit. Toutes nos condoléances à sa famille, ses amis, ses proches… May God bless your Soul bro.»
L’As quotidien présente ses sincères condoléances au monde de la culture sénégalaise, aux parents, proches et amis du défunt.
TOUBA DANS LA FERVEUR DU MAGAL
Des dizaines de milliers de fidèles convergent depuis lundi tôt le matin vers la grande mosquée de Touba pour prier et se recueillir à l’occasion de la célébration la 129e édition du Magal, en souvenir du départ en exil au Gabon du fondateur du mouridisme
Des dizaines de milliers de fidèles convergent depuis lundi tôt le matin vers la grande mosquée de Touba pour prier et se recueillir à l’occasion de la célébration la 129e édition du grand Magal, en souvenir du départ en exil au Gabon de Cheikh Ahmadou Bamba (1853-1927), le fondateur du mouridisme, l’une des principales confréries musulmanes du Sénégal.
L’évènement religieux se tient cette année en plein hivernage, ce qui a rendu difficile les déplacements dans la ville sainte en proie à des inondations en dépit de l’important dispositif de pompage des eaux déployé par les autorités.
Sur le plan sécuritaire, la Police nationale a engagé un effectif de 4106 fonctionnaires ainsi que des moyens logistiques conséquents pour assurer la sécurité des personnes et des biens.
’’Relativement au dispositif du grand Magal, un effectif de 4106 fonctionnaires de police et des moyens logistiques conséquents sont engagés pour couvrir les communes de Touba, Mbacké, Diourbel et Bambey, soit une montée en puissance de 352 agents de plus, comparé à l’année dernière’’, a déclaré, samedi, le Directeur de la sécurité publique, le commissaire divisionnaire Ibrahima Diop.
Il a précisé que cet important dispositif est composé des personnels de la sécurité publique des différents commissariats de la région de Diourbel, de la direction de l’Office central de répression du trafic illicite des stupéfiants, de la direction de la surveillance du territoire, des unités spéciales et de la brigade prévôtale.
A ce dispositif physique, s’ajoute un dispositif technique avec des drones, de la vidéosurveillance entre Touba et Mbacké, selon le Directeur de la sécurité publique.
La gendarmerie a annoncé avoir déployé 3707 hommes , 150 véhicules, 80 motocyclistes, 03 ambulances médicalisées.
Conformément à la tradition républicaine, le président de la République, Macky Sall, était à Touba jeudi pour sa visite de courtoisie au Khalife général des mourides. Le chef de l’État s’est entretenu avec le guide religieux Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, à Darou Miname, un quartier de la ville de Touba.
Devant le Khalife, le président de la République, Macky Sall, a réitéré sa décision de ne pas se présenter à l’élection présidentielle du 25 février 2024.
‘’Je voudrais réitérer devant vous mon engagement de ne pas me présenter à l’élection présidentielle du 25 février prochain. C’est un engagement que j’avais pris depuis ma campagne de la dernière élection présidentielle’’, a déclaré le chef de l’État.
‘’L’année prochaine, à pareil moment, un autre président de la République sera là pour effectuer le ziarr (visite de courtoisie) et délivrer le message de la nation’’, a-t-il ajouté.
Le ballet des hommes politiques de la majorité comme ceux de l’opposition s’est poursuivi dans la ville sainte dans ce contexte pré-électoral.
Le Grand Magal de Touba, organisé sous sa forma actuelle depuis 1928, est un évènement religieux annuel commémorant le départ en exil au Gabon (1895-1902) de Cheikh Ahmadou Bamba, le fondateur du mouridisme, l’une des principales confréries musulmanes du Sénégal.
Né vers 1854, Cheikh Ahmadou Bamba s’est attribué le titre de Khadimou Rassoul, « serviteur du prophète ».
Il est le fils de Mouhamad Ibn Abiballah, plus connu sous le nom de Mor Anta Saly, un serviteur de l’aristocratie princière, juriste-conseiller, un imam très respecté des musulmans et des rois. Sa mère, Mame Diarra Bousso, surnommée « Diarratoullahi », proche d’Allah, était reconnue pour sa piété.
Ahmadou Bamba qui préféra rester loin des palais dira: « si mon défaut est la renonciation aux vanités des princes, c’est là un précieux vice qui ne me déshonore point ».
Il assimila le Coran et certaines sciences religieuses telles que la théologie, la prière et le droit musulman etc. Jusqu’en 1882, Ahmadou Bamba s’occupa de l’enseignement de son père tout en écrivant des Ouvrages dans le domaine de la jurisprudence, de la théologie et le perfectionnement.
Après la mort de son père, Ahmadou Bamba devient un guide et fonda la voie mouride dans un contexte de domination coloniale française. Ce qui était d’ailleurs vu d’un très mauvais œil par l’administration coloniale.
Le colon français, craignant que les enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba, résistant anticolonial, suscitent un soulèvement populaire, décide de l’exiler au Gabon entre 1895 et 1902.
‘’Le motif de mon départ en exil est la volonté que Dieu a eue d’élever mon rang jusqu’auprès de Lui, de faire de moi l’intercesseur des miens et le serviteur du Prophète Mohamed (PSL)’’, avait, selon la tradition, indiqué Cheikh Ahmadou Bamba.
Khadimou Rassoul (serviteur du prophète Mohamed) est resté sept ans au Gabon, sur l’île inhospitalière de Mayombé, bravant toute sorte de dangers, rapporte le magazine de l’APS consacré à la célébration de la 129e du Magal.
Il y a supporté toutes sortes de brimades de la part du colonisateur français engagé plus dans une croisade contre l’islam, au Sénégal. Des années de surveillance, de privation, de solitude et de persécutions, lit-on dans la publication.
Ahmadou Bamba est mort en 1927 à Diourbel. Mais son héritage est perpétué depuis lors par ses fils : Serigne Mouhamadou Moustapha Mbacké (1927-1945), El Hadj Falilou Mbacké (1945-1968), Serigne Abdoul Lahat Mbacké (1968-1989), Serigne Abdou Khadr Mbacké (1989-1990), Serigne Saliou Mbacké (1990-2007).
La disparition en 2007 de Serigne Saliou Mbacké a ouvert l’accession des petits-fils au Khalifat : Serigne Mouhamadou Bara Mbacké (2007-2010), Serigne Sidy Moctar Mbacké (2010-2018).
Serigne Mountakha Bassirou Mbacké est le Khalife général des mourides depuis 2018.
Le Magal, terme wolof voulant dire rendre hommage, célébrer, magnifier, est commémoré en souvenir de cet exil qui marque le début d’une somme d’épreuves supportées en conscience par le cheikh, suivant un pacte contracté avec son créateur.
Chaque année, des dizaines de milliers de pèlerins prennent d’assaut la ville de Touba pour se recueillir et prier à l’occasion du Magal, qui est également un moment de convivialité et d’hospitalité à travers les ‘’berndé’’, ces copieux repas servis aux pèlerins.
Concernant les retombées économiques de l’évènement, Serigne Abdou Lahat Gaïndé Fatma, président de la commission culture et communication du Magal de Touba, a signalé que ‘’les dernières évaluations datent de 5-6 ans, et faisaient ressortir un chiffre d’affaires de 250 milliards injectés dans l’économie nationale’’.
‘’Cela concerne l’ensemble des secteurs d’activités. Vous pouvez faire le calcul et voir ce que l’Etat en tire en termes de taxes et autres. Le Magal est un événement qui booste l’économie nationale comme le hajj et la oumra boostent l’économie saoudienne. Nous disons toujours que l’Etat doit en faire un levier de développement, pas seulement le Magal, mais aussi l’ensemble des événements religieux’’, a-t-il confié au Magazine ‘’Vitrine’’.
‘’Vous allez à La Mecque, c’est 9 millions de visiteurs chaque année pour le hajj et la oumra. Les Saoudiens en tirent près de 20 milliards de dollars [plus de 12 000 milliards de francs CFA]. Rien qu’à Touba, nous recevons 10 millions de personnes par an : le Magal en attire 5 millions. Vous prenez les autres Magal et ziars, les week-ends, c’est minimum 5 millions’’, a-t-il ajouté.
Selon lui, ‘’en termes de rentrée de devises, c’est entre 475 voire 500 millions de dollars [plus de 300 milliards de francs CFA]. Donc nous avons du travail à faire à ce niveau-là. C’est pourquoi, nous pensons que l’Etat doit faire des évènements religieux un levier de développement économique, de concert avec les familles religieuses pour que le Sénégal puisse en tirer le plus grand profit’’.
PRIÈRES ET RECUEILLEMENT AU MAUSOLÉE DE CHEIKH AHMADOU BAMBA
De nombreux pèlerins ont pris d’assaut lundi dans la matinée, le mausolée de Cheikh Ahmadou Bamba (1853-1927), le fondateur de la confrérie mouride, à l’occasion du Magal, le grand événement religieux commémorant son départ en exil au Gabon
De nombreux pèlerins ont pris d’assaut lundi dans la matinée, le mausolée de Cheikh Ahmadou Bamba (1853-1927), le fondateur de la confrérie mouride, à l’occasion du Magal, le grand événement religieux commémorant son départ en exil au Gabon, a constaté un reporter de l’APS.
A l’intérieur de la grande mosquée de Touba, les pèlerins ont constitué de longues files pour se recueillir au mausolée de Cheikh Ahmadou Bamba. Un passage presque obligatoire pour beaucoup d’hommes et de femmes qui viennent prendre part à cet événement religieux annuel.
Pour certains disciples, cet endroit est un lieu où toutes les prières formulées sont exaucées par le Seigneur.
Les femmes et les hommes sont séparés grâce à un dispositif mis en place par le Dahira Moukhadimatoul Khidma, en charge de la gestion de la grande mosquée de Touba. Ils sont aidés dans cette tâche par des policiers postés à l’entrée comme à la sortie des lieux .
Sokhna Coumba Niang, qui s’est recueillie dans le mausolée, ne cache pas sa joie et rend grâce à Dieu de l’avoir permis d’assister encore une fois à cet événement. Cette disciple dit prendre part au Magal depuis la fin califat de Serigne Fallou Mbacké (1945-1968), le deuxième Khalife de Serigne Touba. Elle soutient avoir prié pour la paix au Sénégal et un bon hivernage.
Contrairement à elle, Khadim Fall lui attendait tranquillement son tour. Le jeune homme de vingt-cinq années environ, malgré la longue file, compte attendre pour se recueillir auprès de son homonyme, fondateur de la confrérie mouride, Cheikh Ahmadou Bamba dit Khadim Rassoul (le Serviteur du Prophète).
Selon lui, il n’est pas question de venir jusqu’à Touba sans passer par le mausolée de Cheikh Ahmadou Bamba. ‘’C’est un passage obligatoire pour tous disciples », a-t-il soutenu.
A côté des disciples qui effectuent leur ziar, d’autres sont en train de lire le Coran et les « qacaïds », les écrits du fondateur de la confrérie mouride, dans l’enceinte de la grande mosquée.
Cela fait partie, selon eux, des actions à accomplir à l’occasion du grand Magal conformément aux recommandations de Cheikh Ahmadou Bamba.
Ce dernier avait recommandé aux disciples, pour commémorer son départ en exil, d’offrir à manger et à boire (les berndés), à lire le Saint Coran, à s’entraider et à déclamer des qacaïds (ses écrits).
Les mausolées de Serigne Fallou et de Serigne Saliou Mbacké, des fils de Cheikh Ahmadou Bamba, sont également pris d’assaut par des dizaines de milliers de pèlerins.
NDIAREM, DERNIÈRE ÉTAPE D'UNE VIE TOTALEMENT DÉVOUÉE À DIEU
Diourbel, anciennement Ndiarem, est un passage obligé pour tous ceux qui veulent en savoir plus sur l’histoire du mouridisme, la confrérie fondée par Cheikh Ahmadou Bamba
Diourbel, anciennement Ndiarem, est un passage obligé pour tous ceux qui veulent en savoir plus sur l’histoire du mouridisme, la confrérie fondée par Cheikh Ahmadou Bamba.
C’est dans cette cité que Cheikh Ahmadou Bamba vécut les quinze dernières années de sa vie, parachevant ainsi sa mission sur terre au service de Dieu et des hommes.
Si le nom de Ahmadou Bamba se confond avec Touba, l’on ne peut évoquer la vie du cheikh sans mentionner Diourbel ou Ndiarem, la ville du centre du Sénégal où il a passé quinze ans de sa vie.
Après deux déportations au Gabon puis en Mauritanie, les autorités coloniales voient son influence encore plus grandissante. Ses fidèles deviennent de plus en plus nombreux.
C’est ainsi que la décision de le mettre en résidence surveillée à Ndiarem fut prise.
Dans la concession du commandant d’alors, il occupe trois cases, mais le cheikh exprime en son for intérieur le désir d’avoir une mosquée. Il aurait volontiers échangé sa frugale demeure contre une « demeure de Dieu », une mosquée.
Le colon pensait qu’en l’emmenant à Diourbel, place moderne, grouillante et fêtarde, il réussirait à ramollir sa foi et sa dévotion. Mais c’était méconnaître celui que les manuels d’histoire désignent comme un « apôtre de la guerre sainte pacifique », le vrai jihad, qui consiste à rompre totalement avec ses attaches terrestres pour ne consacrer sa vie qu’à l’adoration de Dieu.
L’obsession d’une mosquée était devenue si pressante que Serigne Touba prit trois bouts de bois pour en délimiter une dans son lieu de résidence surveillée.
« Il posa un bout de bois de chaque côté et le troisième devant lui pour indiquer la qibla », renseigne Aladji Fallou Lèye, un des conservateurs du patrimoine mouride à Diourbel. « Mais le commandant de cercle, qui ne voulait pas d’une mosquée, même en schéma, fit dégager toute cette charpente », ajoute-t-il.
Toujours est-il que le cheikh restera treize mois, du 13 janvier 1912 au 18 février 1913, dans cette résidence, sous l’œil du colon.
Malgré cette situation, les disciples affluaient de partout des contrées environnantes pour voir cet homme qui était revenu sain et sauf des déportations, brimades et acharnements de toute sorte de l’administration coloniale. Une administration coloniale qui avait achevé de disloquer les royaumes de la Sénégambie ou de soumettre leur porte-étendard.
Contre mauvaise fortune bon cœur, elle consentit, dans un semblant d’élargissement, à laisser enfin le cheikh s’établir dans une zone de son choix, mais toujours dans Diourbel.
Keur Gu Mag, haut-lieu du mouridisme
C’est ainsi qu’il aménagea à Keur Gu Mag (La Grande demeure, en wolof). A voir les dimensions de la résidence – 300 mètres sur 500 mètres -, ce lieu n’a pas usurpé son nom. Rebaptisé par lui « Al boukhatou Moubaaraka » ou « la Place bénie », le cheikh y a résidé de 1913 à 1927, année de sa disparition.
Selon Lèye, « c’est dans cette demeure qu’il a célébré, pour la première fois, le 10 octobre 1920, le Magal, et ce, jusqu’en 1927 ». Il ajoute : « Serigne Touba l’avait acheté à 400 francs de l’époque, en 1917, payés par Meissa Sellé Ndiaye. L’acte d’achat a été signé pour le cheikh par Cheikh Issa Diène ».
Aujourd’hui, entièrement reconstruit en dur, l’édifice abrite plusieurs pièces, à l’époque des baraquements, plus emblématiques les unes que les autres par les histoires dont elles recèlent.
Dans l’une d’elles, dénommée « Baytûl Kitab » ou « La Chambre du Savoir », des effets personnels du cheikh sont soigneusement conservés : des malles en fer et en bois contenant des manuscrits du Coran et des khassaides, quelques vestiges de la mosquée où il effectuait ses cinq prières, des bouilloires, des gobelets et autres récipients, des candélabres, etc.
C’est à sa devanture qu’a été prise la célébrissime photo en noir et blanc du cheikh debout, seul, le visage couvert d’un châle. Cette photo dont la rumeur disait qu’elle était la seule et unique image de Serigne Touba, avant que d’autres soient rapatriées de France.
Des photographies prises à quelques mètres de là, à l’emplacement actuel de la belle Grande mosquée de Diourbel, qui fait face à la résidence du cheikh.
Ces images immortalisent la pose de la première pierre de cet imposant lieu de culte, par le cheikh lui-même, le 11 mars 1918. « Elle fut inaugurée en 1924 par le cheikh, après 6 ans 5 mois et 6 jours de construction. Et c’est à l’emplacement du minbar que le cheikh aimait à se tenir pour prier », raconte Lèye.
Maintenant qu’il a construit « sa » mosquée, « reçut, quinze jours durant, la visite du prophète Mouhamed », comme l’indique l’écriteau à l’entrée de la pièce dénommée « Baytûl Rasûl », implanté solidement sa tarikha, le cheikh Ahmadou Bamba pouvait enfin rejoindre son créateur.
Le mardi 19 juillet 1927, il rend son dernier souffle dans une pièce de sa résidence, aujourd’hui passage obligé pour tout visiteur à Ndiarem. Il avait 74 ans, et sera inhumé à Touba.
KHOUROU MBACKÉ, AU ROYAUME D'ENFANCE DE BAMBA
Dans ce village, Mame Diarra Bousso, la mère modèle, a laissé les traces les plus indélébiles de l’histoire du Mouridisme, la doctrine soufie fondée par le fils devenu guide exceptionnel et serviteur de Dieu
Il y a le saint homme, l’érudit, l’endurant dont on devine que la dimension exceptionnelle est de tradition, relève d’un héritage. Il y a Cheikh Ahmadou Bamba, mais aussi ses parents, son père et sa mère, éducateurs exceptionnels.
A Khourou Mbacké, royaume d’enfance du fondateur du Mouridisme, Mame Diarra Bousso, la mère modèle, a laissé les traces les plus indélébiles de l’histoire du Mouridisme, la doctrine soufie fondée par le fils devenu guide exceptionnel et serviteur de Dieu.
C’est la rencontre entre deux éducateurs, enseignants coraniques et en sciences islamiques, qui a donné naissance au village de Khourou Mbacké : Mame Mor Anta Saly, père d’Ahmadou Bamba, celui qui deviendra le père du Mouridisme, et Cheikh Ahmadou Mbacké Kâne, poète par ailleurs.
Venu de Mbacké, en compagnie de son épouse, Sokhna Mame Diarra Bousso, le premier, Mouhamed Habiboulah Mbacké de son vrai nom, voulait d’un endroit calme, propice à l’apprentissage et la transmission des enseignements du Coran, et à la vénération de Dieu. A l’opposé de Mbacké, la bouillante.
Son hôte lui offrit l’hospitalité, le gîte et le couvert. Mieux, il lui octroie un vaste espace où il aménage. Nous sommes dans les années 1868. Le village de Khourou Mbacké, littéralement « trou de Mbacké », est né.
Plus tard, il s’agrandit peu à peu avec l’arrivée d’apprenants de plus en plus nombreux. En plus de l’enseignement, Mame Mor Anta Saly était très pris par sa fonction de cadi, allant de village en village dire le droit islamique. En ces temps de présence coloniale, l’islam se faisait adopter peu ou prou par ces populations aux pratiques ancrées dans l’animisme.
Il confie l’administration de Khourou Mbacké à Serigne Mbaye Diakhaté, qui en devient le premier calife.
Aujourd’hui encore, ses descendants sont les gardiens des lieux. Cheikh Abdou Diakhaté assure le califat, quatrième génération.
Entre-temps, Cheikh Ahmadou Bamba naquit à Mbacké-Baol, en 1953, mais « il a passé son enfance ici [Khourou Mbacké], de 1853 à 1861 », indique-t-il.
A l’époque, il était âgé de 7 ou 8 ans. Répondant à l’appel au Jihad de l’Almamy Maba Diakhou Ba, son père l’emmena avec lui à Nioro-du-Rip.
« Il reviendra 52 ans plus tard à Khourou Mbacké qui avait comme disparu de la carte, pour le faire renaître », dit Cheikh Abdou Diakhaté.
« Plusieurs enfants du cheikh sont morts très jeunes », précise l’homme préposé à la visite du sanctuaire.
Son fils Habiboulah et dix autres de ses frères et sœurs y ont rejoint le Seigneur. A l’exception du premier qui dispose d’un sépulcre individuel, le reste des enfants de Serigne Touba repose dans une pièce faisant office de mausolée.
Avec le Magal qui arrive à grands pas, les journées sont chaudes à Khourou Mbacké. Mais pas de quoi altérer l’ardeur d’un groupe de femmes trouvées sur les lieux.
Elles se démènent avec ferveur, balayant et tamisant le sable fin sur la place du village. Certaines d’entre elles se dirigent ensuite vers une construction en dur. « C’est la chambre de Mame Diarra. C’est là qu’elle a logé », lance Mbayang, coiffée de ce bonnet à longue queue typique des Baay-Fall. Voilà plus de vingt ans qu’elle vient nettoyer la chambre où a vécu celle qui inspire sa vie de femme.
A voir l’enthousiasme avec lequel elle et ses congénères, malgré leur âge avancé, frottent le sol de leurs balais, enlèvent la poussière, nettoient les murs, on se rend compte que la foi peut bien soulever les montagnes…
La rencontre avec El Haj Omar au « puits de la grâce »
C’est dans ce village de Khourou Mbacké que se déroule l’histoire de Mame Diarra Bousso, la mère du cheikh, aidant son époux à réparer une palissade et qui fut surprise par la pluie. Elle resta longtemps à attendre alors qu’il avait même oublié qu’il lui avait confié cette tâche.
Revenu de son oubli et trouvant son épouse encore debout à l’endroit où il l’avait laissée, toute trempée, Mame Mor Anta Saly formula à son endroit la prière suivante : « Dieu te gratifie d’un enfant qui supplantera tous les hommes comme le soleil surplombe tout ce qui se trouve sur terre. » Pour les adeptes du mouridisme, la prière est exaucée en la personne de son fils Cheikh Ahmadou Bamba.
Présentée comme un modèle de femme dévouée à Dieu et à son mari, une sainte, Mame Diarra Bousso mourut à Porokhane, à l’âge 33 ans.
« A Khourou Mbacké, elle a creusé un puits de 33 mètres de profondeur, ente 1851 et 1852 », relate le conservateur qui guide le visiteur à son emplacement. Situé à un kilomètre du cœur du village, on attribue au « Puits de la grâce », comme on l’appelle, plusieurs vertus miraculeuses.
Non loin de là, un arbre mort, « un tamarinier à l’ombre duquel la sainte femme reposait le cheikh, enfant, le temps de puiser l’eau », ajoute-il.
On raconte qu’un jour de 1852, El Haj Omar et ses hommes l’y trouvèrent. Elle les aida à se désaltérer, à remplir leurs outres et à abreuver leurs montures. Le grand soufi et guerrier musulman lui aurait alors prédit qu’elle donnerait naissance à un prodige, un homme d’une dimension exceptionnelle.
C’est cet homme que la communauté mouride et musulmane dans son ensemble, célèbre chaque année, depuis 1928, un an après sa disparition, commémorant ainsi son départ en exil au Gabon, en 1895.
MBACKÉ KADIOR, LE TEMPS DES PREMIÈRES ALLÉGEANCES
La tradition dit que les premiers disciples mourides ont fait allégeance à Serigne Touba (1853-1927), à Mbacké Kadior, village fondé par Mame Mor Anta Saly, son père, dans la région de Louga
La tradition dit que les premiers disciples mourides ont fait allégeance à Serigne Touba (1853-1927), à Mbacké Kadior, village fondé par Mame Mor Anta Saly, son père, dans la région de Louga (nord-ouest). Il va donc de soi que cette cité puisse occuper une place privilégiée dans l’histoire du Mouridisme et dans le cœur des fidèles.
Il se dit précisément que les 40 premiers disciples mourides ont fait allégeance au cheikh dans cette localité située dans l’arrondissement de Darou Mousty (département de Kébémer).
Dans le lot de ces nouveaux fidèles, on cite Mame Cheikh Ibra Fall, le plus célèbre, Serigne Ndame Abdourahmane Lô, Serigne Massamba Diop Sam et Serigne Ibrahima Sarr Ndiagne.
Il y a aussi Serigne Adama Guèye, présenté comme le premier disciple du cheikh, soit autant de références morales et spirituelles solides qui confortent la renommée de Mbacké Kadior dans le cœur des mourides.
L’électrification du village et des zones environnantes apporte une certaine modernité au site dénommé « Guiguiss Bamba ». Devenu un lieu de pèlerinage, Cheikh Ahmadou Bamba, appelé également Cheikhoul Khadim ou Serigne Touba, y avait édifié son premier centre d’éducation spirituelle.
Il s’agit précisément du lieu où Cheikh Ibrahima Fall lui avait prêté allégeance, selon Mame Mor Sylla, maire de Mbacké Kadior.
Les Sylla, habitants originels de Mbacké Kadior
Ce lieu symbolique, situé à environ un kilomètre de la commune de Mbacké Kadior, devrait être bientôt doté d’une résidence, d’une mosquée et d’autres édifices. Comme on pouvait s’y attendre, les Baye Fall, qui se rattachent justement au cheikh par l’entremise de Cheikh Ibra Fall, sont les maîtres d’œuvre de ce chantier.
A l’origine les Sylla étaient les premiers occupants de ce site. Cette famille avait cédé une partie de ses terres à Mame Mor Anta Saly lorsque le père de Serigne Touba décida de fonder son propre village.
Selon l’imam El Hadj Cheikh Kajor Mbacké, Serigne Touba vécut quatre ans à Mbacké Kadior dont la création relève, dit-il, d’une certaine cohérence familiale, faite de quête spirituelle.
Après Mbacké Baol, village fondé par Mame Maharam, dans le Baol, Mbacké Kadior a été fondé par Mame Mor Anta Saly.
Aussi, après sa conversion à l’islam, lorsque Lat Dior Ngoné Latyr Diop (1842-1886) a voulu en connaître davantage sur cette religion qu’il venait d’embrasser, le choix de ce résistant à la colonisation française s’était porté sur Mame Mor Anta Saly.
Serigne Touba, dont la quête de spiritualité était à son apogée, était resté au total quatre ans à Mbacké Kadior, où son père n’a vécu que trois ans, de 1880 à 1883, date de sa disparition.
Le fils continua à s’occuper des écoles coraniques créées par son père après son rappel à Dieu, jusqu’à ce qu’il reçût la révélation du prophète Mohamad (PSL) l’enjoignant, selon la tradition, de faire le « djihad pacifique » pour trouver la voie du salut.
Naissance du « Diébelou » ou acte d’allégeance
La voie de la « Mouridiyya » semblait toute tracée. Le cheikh informa les disciples de la recommandation du prophète Mohamad (PSL) portant sur une nouvelle méthode d’éducation, de formation et d’élévation spirituelle à partir de l’allégeance, explique Cheikh Mbacké Kadior. Une démarche dont l’ambition est de contribuer à revivifier la voie tracée par le prophète Mohamad (PSL).
Les premiers disciples, parmi lesquelles Serigne Adama Guèye, Serigne Massamba Diop Sam, Serigne Abdourahmane Lô et Serigne Ibrahima Sarr, firent immédiatement allégeance.
Cheikh Ibrahima Fall, le 40e disciple selon la tradition, arriva alors à la rencontre du cheikh à Mbacké Kadior, où il lui fait allégeance. Un jour symbolique correspondant au 20e du mois de ramadan, date encore fêtée par les Baye Fall, communauté regroupant tous ceux qui se réclament de ce disciple exceptionnel de Serigne Touba.
Il est prévu de construire une mosquée à l’emplacement des deux arbres sous lesquels Cheikh Ibra Fall a prêté allégeance à Serigne Touba. Le chantier est presque achevé.
Mbacké Kadior est un « symbole du Mouridisme » dans la mesure où c’est dans cette localité que « tous les grands hommes qui ont marqué le Mouridisme ont été formés », d’après l’édile de la localité, Mame Mor Sylla.
« Tous les interdits observés à Touba sont également respectés ici. Il peut y avoir des résistances mais ils demeurent néanmoins des interdits », ajoute-t-il.
KERU QACIDA YI, LA BIBLIOTHÈQUE DÉDIÉE AUX ÉCRITS DE CHEIKH AHMADOU BAMBA
Ce projet cher du patriarche de Darou Minane, le khalife général des mourides, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, a été matérialisé par le bras technique de la confrérie mouride, le Hizbut-Tarqqiyah
Këru Qaçida Yi, la Bibliothèque dédiée aux écrits de Cheikh Ahmadou Bamba, implantée au cœur du Complexe Cheikh Ahmadoul Khadim pour l’éducation et la formation (CCAK/EF) de Touba, se veut un bâtiment intelligent doté d’une technologie de dernière génération.
Entièrement bâtie sur une assiette foncière de 2 000m2 avec un sous-sol, cette bibliothèque se reconnait à son architecture majestueuse voire gigantesque, rapporte ‘’APS Hebdo’’, le nouveau hebdomadaire de l’Agence de presse sénégalaise, dans son premier numéro paru samedi.
Ce projet cher du patriarche de Darou Minane, le khalife général des mourides, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, a été matérialisé par le bras technique de la confrérie mouride, le Hizbut-Tarqqiyah. L’infrastructure se veut une architecture répondant aux normes standards.
Les mots du responsable moral de l’association [Dahira] Hizbut-Tarqqiyah, Serigne Youssouph Diop, pour expliquer le sens du projet, sont forts et très significatifs: »On a tout prévu pour accueillir les écrits de Cheikhoul Khadim. Un système de rayonnage qui respecte toutes les normes en termes de bibliothéconomie, en termes de livres et en termes de conservation », explique le responsable moral de l’association [Dahira] Hizbut-Tarqqiyah, Serigne Youssouph Diop.
Un bâtiment intelligent doté d’une technologie de dernière génération, la bibliothèque Këru Qaçida Yi est en réalité une infrastructure intelligente, au sens technologique du terme. « En ce qui concerne l’intelligence du bâtiment notamment l’isolation phonique et sonore à l’intérieur, la climatisation pour ne pas avoir un échange de chaleur par rapport à Touba, tout est pris en compte », détaille l’ingénieur en génie-civil Ass Malick Kane, par ailleurs conducteur des travaux de Këru Qaçida Yi.
Membre clé de la direction générale de l’association [Dahira] Hizbut-Tarqqiyah, Amadou Sidy Samb, très à l’aise avec son »Baye Lahad » [traditionnel code vestimentaire des membres de Hizbut-Tarqqiyah] abonde dans le même sens. »C’est un bâtiment intelligent doté de toutes les technologies. Tout est pris en compte notamment la conservation de façon pérenne des écrits du Cheikh », confirme-t-il.
Comme tout établissement recevant du public, la Bibliothèque Këru Qaçida Yi dispose d’un grand espace réservé pour l’esplanade mais également des ouvertures. Une manière de respecter les normes de la protection civile dudit bâtiment.
Pour le système de climatisation de cette bibliothèque, il faut nécessairement une humidité relative. »Vous savez le papier ne colle pas avec une certaine humidité, c’est pourquoi on va régler l’humidité relative dont on a besoin et la contrôler pour ne pas affecter les papiers [manuscrits] qui seront conservés ici », expliqué l’ingénieur Ass Malick Kane.
Sur le plan sécurité incendie, les caméras de surveillance, le réseau Internet, la climatisation, l’audiovisuel (sonorisation), tout est pris en compte dans le système qui, selon Amadou Sidy Samba, membre de la direction générale Hizbut-Tarqqiyah, est capable de rivaliser avec n’importe quel autre système. Il précise que toutes ces caractéristiques relèvent de l’expertise locale.
Une suite luxueuse réservée au khalife général des mourides
Dans un wolof très subtil, Amadou Sidy Samb affirme que les mourides sont capables de réaliser des merveilles. Sur instruction du khalife général des mourides, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, la Bibliothèque Këru Qaçida Yi va devoir abriter un musée pour la conservation du patrimoine historique du fondateur du mouridisme.
Ce musée va aussi accueillir les récentes photographies originales du cheikh acquises en France par un collectif composé de disciples mourides. Lesquelles photographies ont été restituées au khalife général des mourides cette année, à l’occasion d’une cérémonie.
Dans cette Bibliothèque Këru Qaçida Yi, une suite luxueuse est exclusivement réservée au khalife général des mourides avec toutes ces commodités lui garantissant un excellent séjour.
‘La Bibliothèque est dotée d’une suite dédiée au khalife général des mourides, composée entre autres d’une chambre, d’un salon, d’un espace pour les ablutions mais également quelque chose indispensable dans la conception mouride, c’est-à-dire un lieu de prière qu’est une mosquée », a décrit l’ingénieur Ass Malick Kane.
Entamés en avril 2020, les travaux de construction de Këru Qaçida Yi ont duré un peu plus de trois ans pour un coût d’exécution d’environ trois milliards de francs CFA. La remise des clés de ce joyau au khalife général des mourides, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, a eu lieu le 19 août dernier, en présence de plusieurs personnalités.
Une belle occasion pour le responsable moral de Hizbut-Tarqqiyah, Serigne Youssouph Diop, de remettre au patriarche de Darou Minane une clé en or avec des pépites de diamant. Comme pour dire que la succession du défunt responsable moral de Hizbut-Tarqqiyah, Serigne Atou Diagne qui avait entamé ce vaste chantier, est bien assurée.
ÎLE DE SIPO : LA REINE EST MORTE, VIVE LE ROI
Tandis que des habitants de Toubacouta et des piroguiers perdent relativement la passion qui les menait à l’île, déçus de n’y plus y trouver la « merveilleuse » reine-mère, son fils et successeur tente d’insuffler à Sippo de nouvelles énergies
Mamadou Oumar Kamara, Assane Fall et Ndèye Seyni Samb |
Publication 02/09/2023
La célèbre Reine de Sippo, Fatou Mané, est morte en avril 2022. Avec son décès, à plus de cent ans, elle a emporté une bonne part du supplément d’âme qui distinguait l’île de Sippo. Tandis que des habitants de Toubacouta et même des piroguiers perdent relativement la passion qui les menait systématiquement à l’île, déçus de n’y plus y trouver la « merveilleuse » reine-mère, son fils et successeur tente d’insuffler à Sippo de nouvelles énergies. Avec un esprit décalé et une approche différente, il veut remodeler la couronne avec des attentions plus ambitieuses.
On navigue moins d’une trentaine de minutes avant que le bateau ne fasse une embardée à tribord. Elle se dirige vers une île qui ressemble, de loin, à un tas de buis. Les monticules de sable près de la plage et l’abondante flore noyant les cases sont une nuance à la série quasi interminable de mangroves. Sippo (ou Sippo Moussa, moins de 100 habitants) se découvre sous un tableau pittoresque. Des barques stationnées sur la berge servent d’aire de jeux à des gamins bouillants qui s’éclipsent quand notre pirogue approche la plage. Pieds à terre, nous remarquons un village calme. Même les ânes, attachés derrière la clôture des premières habitations de l’île, broutent en silence. Dans le périmètre, on aperçoit le toit vert d’une bâtisse.
Il se distingue parce qu’il est le bâtiment le plus imposant de cette position. Il s’impose aussi dans la concession majoritairement composée de cases en paille et claies de bambou. Il s’impose surtout simplement parce que c’est quelque peu le palais royal. Sous son ombre, le nouveau roi de Sippo tente une posture majestueuse. Deux seuls symboles apparents dévoilent la royauté de Issa Touré. Le trône en osier gondolé avec un coussin cuir, et un fusil enfilé d’un tissu rouge défraîchi accroché en décor mural au-dessus de sa tête. Il s’y installe dans une aise dégagée, roulant avec panache une feuille de tabac. Sa cour royale n’est à cet instant constituée que d’un tout jeune enfant. Il nous reçoit tout de même avec honneur et une grande bonhomie.
Ce « palais » a été inauguré en 2021 et dénommé « Espace d’accueil de la reine de Sippo » par l’Association Pensées d’ailleurs, le Collectif des acteurs du tourisme et l’Agence sénégalaise de la promotion touristique (Aspt). Comme ce bâtiment, presque tout ici rappelle la mémoire d’une figure. Même cette douce quiétude dans l’île manque d’être totalement belle à cause de sa tristesse. En effet, la berge, cette concession et l’île s’animaient mieux qu’avec nos salutations, les gazouillis des oiseaux, des coups de pilons et le papotage de deux femmes dans la cour commune. L’énergie des lieux a changé depuis le 12 avril 2022. Cette date marque la mort de celle qui a pourvu ce village insulaire d’une identité et d’une notoriété : la Reine de Sippo. Fatou Mané (de son vrai nom) était une véritable attraction.
Au-delà de ses dons de guérisseuse et de prêtresse, elle pétillait de son humour singulier et de sa bienveillance qui rendait grâce à l’emblématique Téranga sénégalaise. Avec son décès, nombreux sont ceux qui pensent à Toubacouta « que ce n’est plus trop intéressant d’aller à Sippo ». Ces mots sont de Pa Bathie Ndiaye, un antiquaire établi pas bien loin de l’embarcadère et qui avait ses habitudes et des profits conséquents du vivant de la reine de Sippo. Pour lui, cela n’avait rien à voir avec ses dons ou consultations mystiques, « mais sa magnanimité et les formidables ondes qu’elle partageait rien qu’avec son sourire ». Aujourd’hui, le nouveau roi Issa Touré, fils de la défunte reine-mère, travaille à donner une nouvelle étoile et une nouvelle dynamique à Sippo. À sa manière.
Le nouveau roi et son parcours d’homme doué
Le nouveau Roi de Sippo a, on dirait, le malin plaisir de se jouer de son monde. C’est la veille que nous le rencontrons, une première fois, sur l’embarcadère de Toubacouta. Issa Touré se montre très taquin et paternel. Le souverain parle paraboliquement de la vie et pas du tout de sa couronne. Il honore même pendant un bon moment la mémoire de sa mère, la défunte reine de Sippo, à qui il attribue tous les nobles comportements.
Le lendemain, tout en gardant sa gentille courtoisie, nous trouvons le mastodonte de 69 ans dans une tenue toute dépenaillée et une décontraction étonnante. Sa corpulence et son air malicieux trahissent une époque où il était, selon son propre témoignage, « un garçon méchamment turbulent ». Il raconte qu’il avait une fois incendié la case d’une famille contre laquelle il s’était disputé. « Mais avec l’âge et les responsabilités, je me suis assagi », s’amende le roi.
Issa Touré jouit de deux héritages royaux, nobles et de secrets occultes. Ce qui lui confère un pouvoir et un statut rares. C’est dans la forêt de Sippo qu’il a premièrement été initié aux sciences occultes et aux secrets de la nature par son oncle paternel, animiste reconnu venu du Mali. « Après un moment d’exercice, mon père, Moussa, a eu peur que je devienne mécréant. Il a dit à son petit frère de rentrer et m’a fait apprendre le Coran », se souvient le roi de Sippo, prompt à réciter des versets coraniques dans ses conversations. Un de ses oncles maternels, Bakar Mané, l’initiait également aux sciences mystiques. Issa Touré nous raconte qu’il était adolescent quand cet oncle lui ordonna d’attraper un gros python qu’ils avaient croisé en pleine forêt. « Quand j’ai refusé, il m’a braqué son fusil et m’a demandé de choisir entre ma mort ou celle du serpent. J’ai finalement saisi le serpent qui s’est montré très docile entre mes mains », relate Issa Touré dans un wolof très laborieux et son parler chantonnant. Il a aussi totalement guéri un de ses neveux, Ousmane, qui était devenu aveugle. Pour cette prouesse, il était allé puiser dans les connaissances des mânes de Guinée Bissau.
Parmi les légendes qui font la notoriété de la défunte reine de Sippo, il y a son enlèvement par les djinns durant sept années. « L’année même de son retour, ces mêmes esprits m’ont possédé en vue de me kidnapper. Mais mon père a dit qu’il ne pouvait tolérer cela car j’étais son seul garçon. Il est parti au Mali et à son retour j’étais guéri tout en gardant certaines choses », sourit Issa Touré. Ce dernier assure aussi qu’il est autant nourri à la mamelle de certaines sciences ésotériques de l’islam. Malgré toutes ces aptitudes mystiques, en plus d’être le fils unique de sa mère, le nouveau roi ne s’était pas aussitôt proposé à la succession de la royauté de sa mère. Le parcours au trône a été d’aventure.
Une succession phénoménale
Quelques jours après le décès de la reine de Sippo, sa famille a organisé une réunion pour la succession. Selon Issa Touré, même les esprits « dialang » en Guinée Bissau opèrent de là-bas pour désigner l’héritier du trône et sacrifier tout usurpateur. Durant cette fameuse réunion, tous les sept enfants de Fatou Mané (Issa et ses six sœurs) se sont mis devant une calebasse remplie d’eau, dans la chambre mortuaire. En face du récipient, il y avait du cola rouge. « On a proposé aux prétendants de plonger la main droite dans la calebasse et de croquer ensuite la noix de cola », relate Issa Touré, qui lâche un vigoureux soupir et se mordille la lèvre en s’en rappelant. Une de ses sœurs, Aminata, pleine d’aplomb, a plongé sa main. Leur aînée Mariama lui a demandé devant toute l’assistance si elle était vraiment sûre d’adosser cette charge. « Oui », avait-elle assuré. Seulement, trois mois plus tard, elle se plaignait de trop souffrir et ne plus dormir. « L’aînée a convoqué une autre réunion et sans trop de formalités elles se sont toutes mises d’accord que j’étais l’héritier légitime du trône. Ça s’est d’ailleurs décidé sans ma présence. Puis les autorités administratives, dans leur bonne volonté, ont dit qu’elles voulaient me faire subir une formation pour mieux assurer la charge royale à laquelle elles voulaient un cachet plus institutionnel. J’ai dit à ces gens que je serais d’accord s’ils acceptent de former également les djinns qui vont m’accompagner dans ma tâche. Ils se sont rétractés », raconte-t-il dans une singulière ironie. Il nous apprend aussi que le Ministère du Tourisme a envoyé aussi à deux reprises des missions pour proposer des orientations. « Ils estiment que ma manière de faire diffère grandement d’avec celle de ma défunte mère. J’ai dit que c’est effectivement le cas parce que je dirige autant l’héritage maternel que celui paternel, en plus de convictions que j’entends servir », assume le roi.
Roi, et prophétie
« Elle était une guérisseuse et une prêtresse. Moi, je peux initier, donner des bains purificateurs et utiliser le Coran pour des prières bienfaisantes. Ma mère ignorait ces trois choses. Pour certains cas que je reçois, j’entre dans la forêt et fais appel à ma connaissance de la nature. J’indique ensuite des aumônes à faire, une conduite à tenir ou produis des décoctions. L’un dans l’autre, dès que je finis, ces esprits quittent le corps malade ou meurent un par un. C’est une guerre, retenez bien. Avant de les attaquer, il faut être très doué de connaissances », avertit Issa Touré. Il dit avoir hérité beaucoup de sciences de son père, Moussa. « De lui, j’ai appris et me débrouille plutôt bien dans la guérison de l’impuissance sexuelle. J’ai pris aussi de ma mère la science pour guérir les fausses couches et la stérilité. Nous sommes croyants avant tout. Nous sommes bien conscients que c’est Dieu que nous prions qui exauce nos oraisons », confesse le souverain.
De sa maman, il a aussi pris l’humanisme. Issa Touré considère que s’enrichir ne doit aucunement être une ambition. « Nos ancêtres prêtres échangeaient leur service contre un gibier que les parents du patient ou le solliciteur lui-même allaient chasser. Cependant, les temps ont beaucoup changé, les méthodes avec. Maintenant, on réclame une chèvre ou son équivalent en argent. Il arrive que nous ayons des patients vraiment démunis. Dans ces situations, on fait œuvre humanitaire. D’ailleurs si tu demandes plus qu’il n’en faut, les esprits se retournent contre toi le guérisseur », explique le gardien du temple.
Cependant, Issa Touré confesse que son véritable objectif est de contribuer à une nouvelle « négritude ». À l’en croire, c’est à 23 ans déjà qu’il avait prédit la découverte du pétrole dans nos sous-sols. Le roi Issa avoue que sa vie a bien changé depuis son accession au trône. Mais il dit quand même n’en rien regretter en pensant au rôle qu’il peut avoir dans l’éducation du peuple. Une mission dont il parle abondamment sans toutefois dire avec précision comment la mener.