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25 novembre 2024
Culture
CE QUE PRÉPARE LA REINE DU DJOLOF BAND
Viviane Chidid fête ses 22 ans de carrière avec le Djolof band pour ravir, une nouvelle fois, son public. Prévu pour deux jours, l’événement va commencer par livrer ses couleurs par un spectacle prévu le 29 septembre au Magic Land
Viviane Chidid fête ses 22 ans de carrière avec le Djolof band pour ravir, une nouvelle fois, son public. Prévu pour deux jours, l’événement va commencer par livrer ses couleurs par un spectacle prévu le 29 septembre au Magic Land avec un bal que l’artiste consacrera aux enfants. Puis, ce sera au tour de l’hôtel King Fahd Palace d’accueillir un dîner de Gala en sons et lumières, le 1er octobre 2022.
En partenariat avec le Groupe Emedia Invest, Viviane enchaîne pour le moment promos et séances de répétitions. Sur ce, l’animateur vedette de iradio/iTv, Boubacar Diallo alias Dj Boubs a mis les petits plats dans les grands. Il a déroulé le tapis rouge à l’artiste qui est revenue sur sa carrière, ses hauts et ses bas. Le sourire étincelant, pimpante, dans un ensemble jupe en cuir de couleur orange, Viviane Chidid, perchée sur de hauts talons aiguilles, a annoncé qu’elle compte offrir « un spectacle inédit, un véritable show ». L’intégralité de l’entretien qu’elle a accordé au groupe Emedia sera diffusée ce soir sur iTv à partir de 21h. Et aussi sur tous les autres supports du Groupe.
ABDOULAYE ELIMANE KANE RACONTE SA RENCONTRE AVEC LA COVID
L'ancien ministre de la Culture a présenté, mercredi 14 septembre 2022, son livre : SAARABAA, La Covid-19 existe, je l'ai rencontrée. Témoigner c’est contribuer à lutter contre cette maladie en soulignant certains aspects de sa complexité, indique-t-il
SenePlus publie ci-dessous, le texte de présentation du nouveau livre SAARABAA, La Covid-19 existe, je l'ai rencontrée d’Abdoulaye Elimane Kane paru aux Éditions L’Harmattan. L’auteur y revient notamment sur les implications de cette maladie dont il a été victime, à travers des réflexions sociétales, philosophiques et culturelles. La cérémonie de dédicace a eu lieu mercredi 14 septembre 2022 dans l’enceinte de L’Harmattan à Dakar.
« Mesdames, messieurs,
Chers amis, parents et collègues et illustres panélistes,
merci d’ être venus , par ces temps difficiles et encombrés , une actualité dominée par le Magal de Touba , la mise en place de la 14e législature , l’ attente de la formation du gouvernement , les inondations , le coût de la vie et la guerre en Ukraine et sans doute d’ autres urgences.
Mes remerciements vont également au Docteur Abdoulaye Diallo directeur des éditions L’Harmattan Sénégal qui, sans répit, accepte de publier mes ouvrages et d’assister à leur présentation avec une égale courtoisie et marque d’attention.
Mes pensées vont également vers mon ami Charles Becker : depuis bientôt une décennie, il s’est montré d’une disponibilité sans faille pour relire mes manuscrits et effectuer la configuration technique des ouvrages qui en sont issus.
Il m’est également agréable de saluer et remercier deux grands artistes à qui je dois l’illustration qui figure sur la couverture de Saarabaa, illustration intitulée ANDARY, pour rendre hommage à Ndary Lo, célèbre sculpteur sénégalais qui crée des personnages grands et filiformes à l’image de ceux de Giacometti, L’Homme qui marche, sculpture en bronze, étant l’un des plus célèbres qu’on trouve au siège de l’Unesco à Paris.
Je veux nommer Viye Diba, artiste plasticien sénégalais bien connu, mainte fois primé pour ses œuvres, notamment ses installations.
C’est sur son idée et en s’inspirent d’un bas-relief figurant des dents de chien à l’entrée de son atelier, que Pape Ba, photographe et éditeur d’ouvrages, a réalisé cette illustration.
Il s’agit d’un photomontage représentant un funambule jouant d’une guitare traditionnelle et essayant de traverser un précipice, sur un fil tendu entre deux pics géants figurant des dents de carnassier sur fond de ciel bleu mais nuageux.
Le professeur Djibril Samb brillant préfacier de cet ouvrage, a donné dans son texte une contribution substantielle et éclairante sur les questions soulevées par ce témoignage.
Autour de cette table, pour contribuer à la présentation de SAARABBA, le professeur Issa Wone vous a présenté des personnalités du monde universitaire et médical connues pour leurs états de services élogieux en raison de leur expérience et de leurs travaux qui font autorité dans leurs domaines respectifs.
Le professeur Moussa Seydi, chef du service des maladies infectieuses au CHU – Fann de Dakar que l’irruption du nouveau coronavirus, après celle d’Ebola dans le monde et au Sénégal, a propulsé au-devant de la scène.
Je le remercie encore d’avoir fait l’effort de caller dans son agenda très chargé, cette échappée pour prendre part à nos échanges de cet après- midi.
Le professeur Abdoul Almamy Hane, ancien chef du service de pneumologie du CHU- Fann de Dakar, qui a pris sa retraite dans la fonction publique mais qui n’en continue pas moins de mettre son expérience au service de ceux qui souffrent ou ont besoin de conseils.
C’est lui qui a fait dire un jour à un médecin parisien qui s’adressait à moi : « N’abandonnez ni votre médecin ni le traitement qu’il vous a prescrit. »
Je termine cette galerie prestigieuse de portraits par le professeur Issa Wone.
Il fait partie de ceux qui, avec les éditions L’Harmattan, m’ont décidé à faire cette présentation/ dédicace.
Et c’est lui qui m’a présenté au professeur Seydi pour les besoins de cette rencontre. Le professeur Seydi, en plus de son accord a pris, discrètement comme à son habitude, une part non négligeable à la préparation de cette cérémonie.
Je me réjouis de constater qu’Issa, fils de mon regretté cousin, le professeur Ibrahima Wone, a suivi les pas de son illustre père en choisissant lui aussi une carrière de médecin/enseignant et en manifestant un intérêt particulier pour la santé publique.
Ils sont tous très sollicités et leurs responsabilités leur laissent peu de loisir : j’apprécie qu’ils aient fait preuve d’amitié et de générosité pour lire et commenter ce témoignage que je verse dans la corbeille de l’abondante littérature consacrée à l’apparition et à la pandémie due au nouveau Coronavirus.
La pandémie n’est plus l’épicentre de l’actualité mais il ne me semble pas décalé de discuter d’un témoignage sur la Covid-19, même dans un petit livre dont le motif principal est de soutenir qu’il ne faut, sous aucun prétexte, placer la santé au-dessous d’aucune autre priorité.
Mais je dois confesser que ce texte m’a donné bien du fil à retordre.
La volonté de le produire a été présente dans mon esprit dès que certains contours de l’épidémie et ses nombreuses conséquences ont été expliqués.
Mais je concevais autrement le contenu d’une telle contribution, avant d’être contaminé par le virus sans pour autant avoir commencé à l’écrire.
L’infection et l’hospitalisation ont complétement changé la donne : écrire sur cette expérience pouvait prendre différentes formes : un roman, une nouvelle, un entretien organisé ou un petit essai.
La forme de journal intime a vite pris le dessus pour deux raisons : le besoin de fixer, pour mémoire, les étapes, événements et faits significatifs de cette expérience, pour ma gouverne personnelle essentiellement.
Du fait de la singularité de cette affection, je me suis trouvé en dialogue avec moi-même, pour comprendre ce qui m’est arrivé et donner un sens aux rapports que j’ai eus avec différents protagonistes de cette affaire, notamment le personnel médical.
Pour ces deux raisons, j’ai été confronté au dilemme suivant : faut-il le publier ou le garder simplement comme journal personnel ?
Au moment de trancher, les avis de quelques personnes dont j’ai mentionné les noms dans la page des remerciements, m’ont aidé à prendre cette décision.
Le désir de partager mes réflexions, impressions et sentiments avec les hommes et femmes du monde médical et ceux et celles qui ont été malades de la Covid-19 a été décisif.
Je voudrais à présent m’arrêter un moment sur les composantes de ce récit de vie qui n’est pas le premier genre dont je me sois servi puisque, on s’en souvient sans doute, j’ai déjà publié une chronique portant sur l’asthme dans mon autobiographie intitulée : « Philosophie sauvage. La vie a de longues jambes. »
Ce cas-ci comporte plusieurs aspects qu’on ne trouve pas dans le premier.
Il fait l’objet d’une publication à part alors que la chronique sur l’asthme est insérée dans des textes ayant d’autres objets de réflexion que la maladie.
Comme l’a si brillamment montré le professeur Djibril Samb dans sa préface, Saarabaa a toutes les caractéristiques d’un récit : chronologie, descriptions de personnages et de lieux péripéties et dénouement.
Sur ce point je n’ai pas manqué de noter pour moi-même une question qui pourrait venir à l’esprit du lecteur et qui est la suivante : était-il nécessaire de produire ce foisonnement de détails, de portraits d’hommes et de femmes, d’événements et de circonstances, de références à ma famille, mon épouse, mes enfants, des parents et des amis quand, ce qui est attendu de l’auteur, est de parler du virus, de ses manifestations et de l’issue de cette affection sur la personne qui fait ce récit ?
Aucun détail n’est ici, superflus, tous les éléments de la trame de ce récit, même les plus apparemment anodins, anecdotiques ou subjectifs, sont justifiés et ordonnés à une fin principale : faire comprendre comment cette maladie a été vécue par l’auteur de ce récit et expliquer le type de rapports institués entre protagonistes de ce récit de vie, notamment entre le patient et les médecins.
Prenons un exemple : j’ai longuement décrit la cabine 21 où j’ai séjourné un mois, le personnel médical qui y venait, la périodicité des visites, et mon voisin de chambre auquel j’ai consacré des paragraphes conséquents.
Sans ces maillons on ne comprendrait pas l’articulation de certains éléments de l’énigme constituée par les positions opposées des deux médecins chargés de mon dossier sur la question de savoir si tel jour je devais sortir de l’hôpital.
Sans la présence et les propos innocents de mon voisin de chambre cette contradiction n’apparaitrait pas et une part significative de mes interrogations sur la prise en charge médicale disparaitrait.
En science et dans le domaine médical des divergences d’appréciations ne constituent pas forcément un scandale, ni ne mettent en cause la connaissance scientifique et ses mérites. Souvent ce sont des faits de cette nature qui font progresser la science.
Mais du point de vue du patient qui en est informé cela peut constituer une source d’angoisse.
J’ai donc dès le départ voulu donner à ce livre, Saarabaa, laCovid-19 existeje l’ai rencontré, une valeur de témoignage à partager.
Devant la maladie différentes conduites sont possibles et l’on ne peut que respecter et comprendre celle des infectés de la Covid-19 qui n’estiment pas nécessaire de partager cette expérience sous une forme éditoriale ou publique.
Le plus important, en effet, est de recouvrer la santé et de travailler à la préserver.
Dans nos sociétés africaines, sénégalaise en particulier, contrairement à une longue tradition du monde occidental depuis la Renaissance et l’invention de l’imprimerie et du concept d’individu, la publicité d’actes de vie personnelle va souvent à contre-courant d’une certaine éthique de la retenue, de la pudeur, du secret, de l’ésotérisme et de la confidentialité.
Ce type d’interrogation a effleuré l’esprit de tout auteur d’une autobiographie.
La volonté de témoigner peut absoudre l’auteur en ce que cette pandémie semble être, de toutes celles qui sont connues, la plus dévastatrice et la plus menaçante non seulement pour la vie de chacun mais aussi pour la collectivité, voire la civilisation et même l’humanité.
Témoigner c’est donc contribuer à lutter contre cette maladie en soulignant certains aspects de sa complexité, la diversité des modalités de sa manifestation et pour donner aux autorités sanitaires l’avis des infectés rescapés sur les problèmes de prise en charge médicale.
Voici à présent un autre argument pour justifier cette forme de témoignage.
Il s’agit d’un argument philosophique spécifique.
Ce qu’on appelle en philosophie leproblèmeduMal constitue un des objets usuels de la pensée philosophique : pourquoi le Mal sur Terre, est-ce le fait des hommes ou celui d’une puissance qui les dépasse ?
De manière plus prosaïque la violence, la souffrance, la maladie, la mort constituent différentes figues du Mal diversement vécues et interprétées.
La maladie et la mort, deux visages du Mal sur Terre, sont perçues à la fois comme logiques dans l’ordre du vivant (notre vulnérabilité et notre finitude) et indésirables dans l’ordre de l’existence.
L’intérêt de ce rappel est d’en arriver à cette idée fondamentale en philosophie : la question du sens : quel sens donnons-nous à ce qui est vécu. Et, ici, quel sens donnons-nous à la maladie ?
La maladie fait partie de la vie. Être malade c’est encore être en vie et espérer vivre plus longtemps.
À condition que les moyens soient ordonnés à cette fin et qu’une communication appropriée permette au malade de contribuer à sa propre guérison.
Au titre des questions implicites qui se trouvent au cœur de ce témoignage en voici une qui est révélatrice de l’effet Covid sur la psychologie des populations en général, des patients en particulier.
Avec cette hospitalisation, ma perception de l’hôpital a brutalement changé.
J’ai été, à plusieurs reprises, hospitalisé pour cause de mal asthmatique. Et l’hôpital m’était jusque-là apparu dans son sens originel d’hospice – lieu où l’on offre l’hospitalité et le réconfort.
Pour la première fois je me suis montré rétif à cette hospitalisation, suite à cette infection par le nouveau coronavirus.
J’ai exprimé dans ce texte, sous des formes différentes, mon souci et ma volonté d’abord d’éviter d’y entrer, ensuite d’en sortir, en me fondant sur ce que je ressentais à différentes étapes et qui me semblait justifier ce souhait et cette volonté.
Pourtant je sais par expérience que, c’est pour leur bien et par nécessité qu’on admet et retient des patients à l’hôpital.
Malgré les chiffres qui assurent un nombre plus élevé de guérisons que de morts cette nouvelle perception est très certainement due au sentiment d’enferment et d’incertitude qu’au cours de cette période la notion d’hospitalisation a engendré.
Ce changement de regard peut expliquer en partie les rapports médecin/patient qui ont caractérisé mes relations avec les deux principaux soignants ayant eu en charge mon dossier.
Mais d’autres facteurs s’y sont sans aucun doute, également greffés : le manque de personnel qui ne leur a pas permis d’être souvent disponibles, la complexité de cette maladie, leurs propres soucis de membres du corps médical exposés et vulnérables comme tout le monde.
Ils me pardonneront d’ajouter qu’ils me sont apparus comme ayant une certaine propension à se fier presque exclusivement aux instruments de mesure qui leur permettaient de connaitre l’évolution de mon état de santé.
La technologie a rendu d’immenses services à la médecine et à l’humanité et il en sera certainement ainsi et de plus en plus.
Mais la santé relève plus du qualitatif que du quantitatif et s’apprécie en termes de ressenti du patient.
Pourtant, je ne doute pas un instant de ce que leur vocation et leur formation les aient préparés à savoir que ce ne sont pas des chiffres qu’ils ont à soigner mais des êtres de chair et de sang et qui plus est, des êtres humains.
Au titre d’autres questions plus explicites j’ai abondamment brodé sur trois sujets qui reviennent dans mes méditations d’individu aux prises avec une maladie chronique.
En m’inspirant d’un adage de la langue Pulaar j’ai insisté, dans ce livre, sur la primauté de la santé par rapport à toutes les raisons d’ordre économique et tous les arguments de décision et d’orientation des politiques publiques qui ont eu, à un moment ou à un autre, à ne pas prendre un compte suffisant de la santé.
Celal woni afo ngalu : « La santé est l’article premier de la prospérité », dit cet adage.
Je me suis employé à montrer que les traductions littérales et non littérales de cette expression renvoient à deux visions opposées des questions de priorité :
d’un côté celle d’ une conception de type techno- économique, principalement soucieuse de rentabilité et de profits, conception qui a conduit aux difficultés et aux traumatismes révélées par cette pandémie ;
de l’autre celle qui correspond à l’ esprit de cette parole de sagesse à savoir que la santé est cette forme de prospérité garante de toutes les autres.
En lisant récemment Jacques Attali, j’ai vu que ce qu’il appelle « économie de la vie » correspond bien à la leçon qu’il demande de tirer des erreurs des sociétés occidentales les plus développées économiquement et qui sont celles qui ont le plus souffert de cette pandémie. Il élève une nouvelle vision du monde et un changement de politiques publiques au rang de nécessité pour passer de la simple survie de l’humanité à une véritable assurance de vie et de prospérité, avec la santé et l’éducation comme piliers de cette nouvelle orientation.
L’hôpital, la santé publique et l’éducation appellent un changement de regard, un autre paradigme si l’on ne veut pas faire sombrer l’économie elle-même et l’humanité avec elle.
La question souvent débattue dans la presse du monde occidental, au sein des instances sanitaires internationales ou régionales, l’idée d’ une « exception africaine » face à cette pandémie, en termes de nombre d’infectés, d’hospitalisés et de morts, a été abordée dans Saarabaa.
N’ayant aucune expertise dans aucun domaine, encore moins dans celui- ci, en attendant de connaitre l’explication scientifique de ce phénomène, je me suis jeté à l’eau en hasardant une hypothèse tirée d’une sorte d’empirisme naïf : à savoir que, pour le cas du Sénégal, contre toute logique et toute exigence de discipline, c’est la vie sociale, culturelle et religieuse qui pourrait avoir fabriqué une certaine immunité collective.
Mais je n’ai pas oublié que toute l’histoire de la philosophie est un tissu de ruses avec le sens commun, usant de procédés ambivalents pour faire de ce mode de connaissance un marchepied, l’élevant dans un premier temps à la dignité de bon juge pour, l’instant d’après, le récuser comme aveugle à des réalités plus profondes.
Bachelard nous a averti de longue date « Les intuitions sont bonnes, elles servent à être détruites. »
Je suis donc un homme doublement averti pour ce qui est de la valeur de cet argument.
Mais c’est pour le moment la seule explication qu’il me semble pouvoir tirer de l’observation. Seule la science nous édifiera sur la question.
À cet argument à l’emporte-pièce j’ai ajouté celui que je tiens d’un de mes maitres à l’université de Paris, Georges Canguilhem, philosophe et médecin de son état, connu dans l’histoire contemporaine de l’épistémologie historique pour l’importance qu’il accorde au concept de normativité et par extension à celui d’auto-normativité.
Ce concept signifie en gros que la santé n’est pas un état de nature déjà donné dont les écarts par excès ou par défaut sont cause la maladie.
Entre la pathologie et la santé il y a une différence de nature et non de degré. Il n’y a pas en matière de santé une norme statique, universelle et pérenne, valable pour tous les individus et tous les patients face à la maladie.
La spontanéité de la vie et la créativité de l’organisme offrent à ce dernier, face aux pathologies, de tolérer des infractions à la norme habituelle et de créer des normes nouvelles.
« La santé, écrit- il, c’est le luxe de tomber malade et de s’en relever ».
Et pour preuve qu’on ne peut pas la fixer dans des normes immuables, notre philosophe a cet autre aphorisme particulièrement instructif : « Aucune guérison n’est retour à l’innocence biologique. »
En extrapolant et en appliquant ce concept d’auto normativité à ce qu’on appelle « exception africaine », face à la pandémie et en y voyant une explication de son immunité collective relative, j’ai trouvé une caution intellectuelle à cette hypothèse.
Mais ma conviction demeure que c’est la science qui nous donnera la bonne réponse et que sa réponse ne récusera pas forcément l’idée d’exception africaine.
Enfin, dernière question d’intérêt philosophique abordée dans ce livre : le statut épistémologique de la médecine.
C’est un biais par lequel on peut faire l’éloge de la médecine.
Car d’un bout à l’autre de ce témoignage, m’appuyant sur mon expérience de néo-hospitalisé et observant ce qui se passe dans le monde depuis l’irruption du nouveau coronavirus, je n’ai eu cesse de faire l’éloge des médecins et de la médecine.
Partons encore d’une formule de Canguilhem : « La médecine est un art au carrefour de plusieurs sciences ».
Chaque terme de cet aphorisme renvoie à la singularité de cette discipline.
Expliciter cela est un exercice délicat qui consiste à tenir ensemble deux exigences : la médecine appartient au monde des sciences mais en tant que technique il y a dans sa pratique une part d’opacité que la loi scientifique ne peut rendre entièrement transparente et qui ne relève de rien d’irrationnel ou d’une quelconque sympathie envers l’obscurantisme.
C’est la part d’humanisme qui consiste à traiter le patient en ne se contentant pas de le réduire à un ensemble de chiffres - si utiles et pertinents soient – ils, personne n’en disconvient - mais comme un être humain ainsi que Hippocrate l’a très tôt et constamment recommandé dans sa conception holistique de la médecine.
En guise d’illustration, mon collègue, le professeur Djibril Samb, qui a eu la bonté de préfacer ce petit livre, rappelle fort opportunément à la fin de son texte cette recommandation de Hippocrate au médecin : « veiller jusqu’au parfum qu’il porte, lequel doit être agréable et n’avoir rien de suspect » .
Hippocrate avait à l’avance anticipé sur des cas comme le mien, moi qui suis allergique à certains parfums, pas à tous fort heureusement.
Je voudrais terminer cette présentation sur trois notes.
La première est relative au vaccin et à la vaccination et à la nécessité de promouvoir une culture scientifique pour tous.
Les audaces d’interprétation sur l’immunité collective et « l’exception africaine » ne m’ont pas fait perdre de vue le caractère impératif d’une politique et d’une action résolue pour la vaccination universelle.
Cette précision relève de ce que nous devons, en même temps que l’humanisme, faire de la culture scientifique et de la croyance en la valeur de la science un des piliers de l’éducation et de l’émancipation.
La culture scientifique n’est pas l’affaire d’un jour ou des scientifiques seulement.
Elle a besoin de volonté politique, de pédagogies appropriées et de persévérance. Notamment souligner et prouver que cette culture scientifique n’est pas antinomique d’une croyance et d’une pratique religieuses intelligentes et tout à fait conforme à certaines prescriptions des écritures saintes.
Et à propos de vaccination, pour qu’elle soit universelle, une des conditions à satisfaire est bien évidemment que le vaccin soit à la portée de tous.
La deuxième note porte sur SAARABAA, titre de l’ouvrage, concept et facteur psychologique d’accompagnement de ma rencontre avec la Covid-19.
Œuvre musicale à la fois célèbre et somptueuse, le fait d’avoir écouté différentes interprétations de cet air , à commencer par celle de Samba Diabaré Samb, au moment le plus critique de mon infection, à une heure tardive d’une nuit d’insomnie, a eu pour conséquence de faire naitre dans mon esprit l’ambiguïté de sa signification alors qu’en dehors de son refrain je ne savais rien du contenu de cet air, ni son origine ni sa destination.
J’ai dit dans le texte que son refrain, Nanu dem saarabaa, nanu ni bi saarabaa, a eu pour moi l’effet d’un mantra au cours de mon hospitalisation avec des sentiments oscillant entre angoisse et confiance.
C’est quoi un mantra ?
Un mantra, c’est un élément verbal, un mot par exemple, répété mentalement et volontairement, soit dans des exercices à caractère mnémotechnique soit dans d’autres à caractère mystique comme par exemple le zikre.
Par ailleurs, chacun a fait l’expérience, après une longue écoute d’un air ou d’une partition musicale, d’avoir continué à percevoir des lambeaux de flonflons, des bribes de sons, longtemps après la cessation des conditions qui en étaient à l’origine. Voire de les fredonner plus ou moins machinalement. Donc involontairement.
Sa persistance et son surgissement à différentes étapes de mon traitement m’ont fait considérer le refrain de Saarabaa comme un mantra. Mais dont la répétition n’est pas volontaire.
Et j’ai consacré la dernière partie de l’ouvrage aux investigations que j’ai menées, après ma sortie d’hôpital et pour les besoins de ce témoignage, afin d’en savoir plus.
Le résultat auquel je suis arrivé, avec l’aide des professeurs Lamane Mbaye et Massamba Guèye me donne tout à fait satisfaction.
Saarabaa symbolisant un lieu mythique, un lieu qui n’existe nulle part mais ayant valeur d’horizon désirable, j’ai interprété le mantra qu’a constitué pour moi ce refrain comme une métaphore de la santé.
A savoir, une sorte de paradis perdu quand domine la maladie et la douleur.
Ou bien alors l’espoir du retour d’un « âge d’or », celui d’avant la maladie et dont on ne s’aperçoit de la valeur de « paradis » relatif qu’après l’avoir perdu.
J’en ai fait une deuxième interprétation en extrapolant l’idée de lieu mythique pour souhaiter qu’à la lumière de cette pandémie, et après avoir tiré les leçons de nos errements, imprévoyances, négligences, détournements coupables d’objectifs, une nouvelle utopie permette à l’humanité d’aller vers un nouvel « âge d’or « où la santé serait la reine des priorités.
Voici enfin, dernière note ne figurant pas dans l’ouvrage mais est induite par les observations faites sur le nombre de cas d’infectés, d’hospitalisés et de décès, ici et dans le monde.
Il s’agit de considérations relatives à la perception que nous avons de la maladie d’abord (ce virus existe-t-il et si oui pourquoi est-il resté inconnu) ; ensuite la qualité et le nombre des victimes à travers les informations données par les médias et les autorités sanitaires.
En termes d’exigence démocratique et de besoin d’information le rôle de pouvoirs et la portée de leur influence n’est plus à démontrer.
Il s’agit plutôt de notre psychologie collective face à l’actualité en général, aux évènements dramatiques en particulier, notamment les accidents, les maladies et la mort dont les médias et les avis circonstanciés des autorités étatiques et/ou médicales se font l’expression et le relai.
Face aux conséquences désastreuses de cette pandémie qui dure encore et dont on ne connait pas tous les ressorts nos pensées vont vers ceux que nous avons connus et aimés et qui n’ont pas eu la chance que d’autres ont eue.
Parmi eux d’illustres personnalités du monde de arts, des Lettes, de la politique, de la science et d’autres domaines de la vie publique.
Mais il y a également ces milliers d’autres victimes de la Covid-19 qui ne sont ni des stars, ni des hommes et des femmes connus, ces milliers d’anonymes pour le grand public mais dont, évidemment, la perte est connue et a été ressentie par leurs proches endeuillés et confrontés aux conséquences d’un tel traumatisme.
La raison en est simple : les médias s’adressent aux masses et les masses ont besoin de mythes : événements choc, personnalités en vue et qui les ont fait rêver, notamment.
Mais ce fait laisse en creux des réalités plus profondes.
« Être, c’est être perçu » : voilà une formule du philosophe idéaliste du 17e siècle Berkeley, qui pourrait interprétée pour les besoins de cette problématique, éclairer la signification de cette différence de perception et les conséquences qui en découlent.
Formule fausse en première instance car n’être pas vu n’empêche pas d’exister, le philosophe l’ayant lui- même souligné dans un premier temps.
Par exemple la Tour Effel quand on n’est pas à Paris et en face de cette œuvre monumentale.
Par exemple, ce virus dévastateur qu’est le Covid-19 avant le déclenchement de la pandémie à Wuhan en Chine.
Mais formule vraie, en deuxième instance : si personne ne regarde la Tour Effel que reste-t-il de sa valeur : l’image de la ville, les retombées du tourisme et la qualité de la vie culturelle ?
De même le virus du Covid-19 existait bel et bien, d’abord non perçu, puis, dans le même élan s’est révélé à l’humanité tout en causant les dégâts qu’on n’a pas encore fini de dénombre.
Est-on à l’abri d’autres virus inconnus et inaperçus et dont on risquerait de subir les méfaits en même temps qu’ils apparaitraient en pleine lumière ?
Question qui permet de revenir à la formule complète du philosophe anglais : « être c’est être perçu ou percevoir »
D’où l’importance de la recherche scientifique et la nécessité de la doter de moyens conséquents privilégiant ces questions vitales.
Formule valable donc par rapport à la question suivante : le nombre de cas positifs aux tests et le nombre de morts recensés dans le monde et dans chaque pays correspond-il au nombre réel de victimes ?
Du point de vue statistique, les cas non perçus, par exemple faute d’instruments de mesure ou d’équipes qualifiées pour en connaitre, sont-ils marginaux ou, au contraire, de nature à montrer que cette pandémie a été plus dévastatrice qu’on ne l’a pensé.
Ces oublis, omissions et méconnaissances liées à différents facteurs sont- ils de nature à remettre en cause jusqu’ à l’idée « d’exception africaine » ou bien demeurent elles marginales bien que déplorables comme toute perte de vie humaine ?
Mesdames, messieurs, chers amis, parents et collègues merci infiniment d’être venus et d’avoir pris part, chacun à sa manière, à ces échanges où nos trois invités de marque, les professeurs de médecine Seydi, Hane et Wone, nous ont aidé à prendre la mesure exacte des questions qu’inspirent l’expérience d’une rencontre avec le Covid-19. »
par l'éditorialiste de seneplus, jean-claude djéréké
ALIOUNE DIOP, GRAND DÉFENSEUR DE LA CULTURE AFRICAINE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le fondateur de Présence Africaine était d’abord un accoucheur d’idées. C’est à juste titre que Césaire le présenta comme “un des guides de notre époque”. Il restera selon Mongo Beti, "celui qui a permis aux Noirs de s’exprimer"
Jean-Claude Djéréké de SenePlus |
Publication 19/09/2022
Alioune Diop n’était pas aussi célèbre qu’eux mais n’en fit pas moins qu’eux pour l’émancipation de l’homme noir car c’est grâce à lui que plusieurs générations d’Africains purent lire et aimer Hampaté Bâ (Mali), Aimé Césaire (Martinique), Kwame Nkrumah (Ghana), Bernard Dadié (Côte d’Ivoire), Léon Gontran-Damas (Guyane), Alexis Kagame (Rwanda), Wole Soyinka (Nigeria), Sembène Ousmane (Sénégal), Eza Boto (Cameroun) et d’autres auteurs publiés par Présence Africaine, la maison d’édition qu’il créa en 1949. Diop était d’abord cela : un accoucheur d’idées, celui qui révèle les talents cachés. C’est à juste titre que son compatriote Léopold Sédar Senghor le compara à Socrate, le père de la maïeutique et que Césaire le présenta comme “un des guides de notre époque”. Cet homme né en 1910 à Saint-Louis (Sénégal) fut aussi un jeteur de ponts entre les continents, entre les cultures, entre les religions, parce qu’il désirait ardemment que les hommes se débarrassent de leurs préjugés pour se rencontrer et se parler.
Enfant, il fréquente l'école coranique mais, en 1944, c’est la foi catholique qu’il embrasse en recevant le baptême des mains d’un prêtre dominicain, Jean-Augustin Maydieu, et en prenant le nom de Jean. Guy Tirolien, poète antillais, explique que “c’est, avant tout, par soif d’une spiritualité neuve et par besoin d’élargir, non sans déchirement, sa quête passionnée de l’homme” (cf. ‘Hommage à Alioune Diop’, Paris, Présence Africaine, 1978).
Ses études primaires et secondaires, il les fait à Dagana, puis à Saint-Louis où il décroche le baccalauréat classique (Latin-Grec) en 1931. Deux ans plus tard, il débarque à l’Université d’Alger pour étudier les Lettres classiques. Il y aura pour condisciple Albert Camus. C’est en 1937 qu’il arrive à Paris pour poursuivre sa formation. En 1939, du fait de la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé comme soldat. Démobilisé en 1940, il est tour à tour enseignant au Prytanée militaire de La Flèche, professeur au lycée Louis-le-Grand, chargé de cours à l'École nationale de la France d'outre-mer.
Entre décembre 1946 et novembre 1948, il siège au Sénat de la IVe République sous les couleurs de la SFIO (Section Française de l'Internationale Socialiste). C’est Mamadou Dia du BDS (Bloc Démocratique Sénégalais) qui lui succédera. Ayant vite compris que ce n’est pas en politique qu’il sera plus utile, Alioune Diop fonde en 1947 la revue littéraire ‘Présence Africaine’. Michel Leiris, Jean-Paul Sartre, Albert Camus, André Gide, Théodore Monod, Richard Wright, le Père Maydieu, Merleau-Ponty et Aimé Césaire feront partie du comité de patronage de la revue. Le numéro consacré aux Antilles et à la Guyane est saisi en 1962 par le parquet de la Seine pour “atteinte à la sûreté de l’État”. Senghor écrit régulièrement dans la revue entre 1947 et 1960. En 1949, Alioune Diop lance les éditions Présence Africaine. En 1956, il organise à la Sorbonne le premier congrès des écrivains et artistes noirs. Des intellectuels, écrivains et artistes du monde entier militant pour la décolonisation participent à ce congrès. La même année, est créée la Société africaine de culture (SAC). Alioune Diop en sera le secrétaire général et l’Haïtien Jean Price-Mars, le premier président. On doit à la SAC le deuxième congrès des écrivains et artistes noirs (Rome, 26 mars-1er avril 1959), le premier Festival mondial des arts nègres (Dakar, 1966), le Festival d'Alger (1969) et celui de Lagos (1977). Alioune Diop contribue à la préparation du Concile Vatican II (1962-1965) en organisant le colloque de Rome (26-27 mai 1962). Il s’agissait pour les prêtres et laïcs africains de réfléchir sur la personnalité africaine et le catholicisme.
En 1969 (31 juillet-2 août), pour la première fois, un pape catholique foule le sol africain. Lors de son voyage à Kampala (Ouganda), Paul VI déclare que les Africains peuvent et doivent avoir un christianisme africain. En réponse, la SAC confie à Alioune Diop et au Camerounais Georges Ngango la mission d'obtenir du pape l'autorisation d'organiser les états généraux du christianisme africain. La SAC réunira à Abidjan (12-17 septembre 1977) plusieurs penseurs africains autour du thème “Civilisation noire et Église catholique”. En 1968, Alioune Diop réussit à régler le différend opposant Senghor au Centre Louis-Joseph Lebret fondé et dirigé par les prêtres dominicains de Dakar. Le 26 juin 1968, en effet, le président sénégalais avait envoyé une lettre au nonce apostolique de Dakar. Cette lettre regrettait le fait que “les pères dominicains, qui ont la direction morale des étudiants catholiques, se laissent diriger par eux dans des entreprises de subversion, téléguidées de Pékin”. Senghor souhaitait donc que les frères prêcheurs quittent le Sénégal avant le 31 juillet 1968 pour ne pas avoir à les expulser. C’est la médiation de Diop, début 1969, qui permit aux Dominicains de continuer leur apostolat dans la capitale sénégalaise.
Marié en 1945 à la Camerounaise Christiane Yandé Diop et père de quatre enfants, Alioune Diop s’éteint, le 2 mai 1980 à Paris. 15 ans après, l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) crée un prix d’édition africaine pour lui rendre hommage. Le prix est décerné tous les deux ans à la Foire internationale du livre et du matériel didactique de Dakar (FILDAK). Sa famille et ses amis célèbrent le centenaire de sa naissance en 2010. Une plaque est apposée sur la maison familiale à Saint-Louis le 10 janvier de la même année. Le 12 janvier, une conférence est organisée par l'Université Gaston Berger de Saint-Louis sur sa vie et son œuvre. Djibril Tamsir Niane, historien guinéen et auteur de ‘Soundjata ou l’épopée mandingue’, est présent à cette conférence. Un colloque, qui devait examiner l’œuvre d’Alioune Diop face aux défis contemporains, rassembla en mai 2010 de nombreuses personnalités parmi lesquelles le président sénégalais Abdoulaye Wade, Wole Soyinka, Cheikh Hamidou Kane, l'ancien directeur général de l'Unesco Amadou-Mahtar M'Bow, la veuve et les filles d'Alioune Diop. Le 17 août 2011, l’Université de Bambey est devenue Université Alioune Diop de Bambey. Cette reconnaissance est d’autant plus méritée que Diop a beaucoup fait pour la culture africaine et le respect de l’homme noir dans le monde. Ce panafricaniste dans l’âme était capable de mettre ensemble intellectuels européens, américains et africains, croyait à la force du dialogue. Si son influence était discrète, elle n’en était pas moins réelle sur les intellectuels africains nés dans les années 1930. C’est le cas de Jean-Marc Ela qui confesse que c’est en lisant Alioune Diop qu’il comprit que le fait d’opposer la tradition à la modernité est peu pertinent dans la mesure où il y a du rationnel et de l’irrationnel en tout être humain, dans toute société, qu’elle soit moderne ou traditionnelle. Ela ajoute que c’est de cette vision qu’il s’est inspiré pour écrire ‘L’Afrique à l’ère du savoir : science, société et pouvoir’ (Paris, L’Harmattan, 2006), ouvrage où il appelle les nouvelles générations de chercheurs africains à relever le défi de “réinventer la science pour participer à la construction des sociétés où l’être humain peut s’épanouir dans toutes les dimensions de son existence”.
Grâce à l’ouverture d’esprit d’Alioune Diop, une qualité que lui reconnaissent ceux qui l’ont côtoyé, le premier numéro de la revue Présence africaine bénéficia de la contribution de Jean-Paul Sartre, Albert Camus, Georges Balandier, Théodore Monod…
Au total, le fondateur de “Présence Africaine” (revue et maison d’édition) fut un grand défenseur de la culture africaine à une époque où, en Occident, des esprits racistes et intellectuellement limités soutenaient sans preuves que les Noirs n’avaient rien inventé, qu’ils n’avaient ni histoire, ni culture, ni philosophie. Pour déconstruire ces mensonges et réhabiliter le continent noir, Diop a eu la bonne idée et l’audace de créer un espace pour que ceux qui pensaient comme lui puissent raconter la vraie histoire des Noirs. S’il a fait un grand bien à l’Afrique, c’est avant tout celui-là. J’ai même envie de dire que c’est avec lui et par lui que tout a commencé. Comme le dit joliment Mongo Beti, il “restera celui qui a permis aux Noirs de s’exprimer. Sans cet outil qu’il a forgé, nous serions demeurés ce que nous avons toujours été : des muets”.
LES ATTENTES DES ACTEURS CULTURELS VIS-À-VIS DU NOUVEAU MINISTRE DE LA CULTURE
Avec Abdoulaye Diop, la gestion des fonds culturels et d’appui à la presse, est plus que catastrophique, malsaine, gabégique et pratiquement non profitable aux artistes, acteurs de la culture et de la presse
Le ministère de la Culture et du patrimoine historique est désormais dirigé par Dr Aliou Sow nommé récemment suite au remaniement ministériel avec un nouveau gouvernement coordonné par le Premier ministre Amadou Ba. La réaction de la plupart des artistes, écrivains et acteurs culturels, conforte le choix du Président Macky Sall de relever le ministre Abdoulaye Diop du département de la Culture et de la Communication.
Pour certains, il n’avait pas le niveau intellectuel, pour d’autres, Abdoulaye Diop était pratiquement absent dans le paysage culturel. Et aussi, avec Abdoulaye Diop, la gestion des fonds culturels et d’appui à la presse, est plus que catastrophique, malsaine, gabégique et pratiquement non profitable aux artistes, acteurs de la culture et de la presse. Ce que des artistes et acteurs attendent du nouveau ministre de la Culture et du Patrimoine historique, c’est la bonne gestion des fonds culturels au profit des bénéficiaires du secteur de la culture.
Et non au profit d’un groupuscule spécialiste en lobbying et trafic d’influence et aussi au cabinet ministériel pour d’autres objectifs politiciens parce que administré par un agent du Département de la culture qui s’éternise à ce poste. Plus de 5 milliards d’appui direct sont consacrés, chaque année, aux artistes et opérateurs culturels.
Il s’agit du Fonds de promotion de l’industrie cinématographique et audiovisuelle (Fopica), du Fonds d’appui aux manifestations artistiques et du développement culturel, du Fonds d’aide à l’édition, du Fonds des cultures urbaines, d’appui à la Sodav (Société de droit d’auteur et de droits voisins) de ce que le président a décidé. Malheureusement, ce pactole ne jaillit pas sur le secteur culturel. «Pour le Fonds de promotion de l’industrie cinématographique et audiovisuelle -Fopica- , il y a un comité de gestion du Fonds, malheureusement des décisions de sortie d’argent se prennent sans que le comité de gestion ne se réunisse.
Pis, ce sont de fortes sommes qui sont décaissées pour appuyer deux ou trois entreprises de production-cinéma au détriment de l’ensemble des projets de cinéastes, de réalisateurs de séries-télé. Les jeunes réalisateurs et organisateurs de festival de cinéma ou d’importantes sessions de formation ou d’activités autour de l’audiovisuel sont royalement ignorées» s’indigne M. Sy, acteur de cinéma avant d’ajouter : «nous demandons une gestion saine du Fopica pour développer davantage le secteur du cinéma et de l’audiovisuel».
Le collectif des rappeurs de Guédiawaye souhaite la démocratisation et la décentralisation du Fonds des cultures urbaines au lieu de le laisser aux mains des ténors-dinosaures du mouvement hip hop. Des écrivains s’indignent également de la manière dont le Fonds d’aide à l’édition est gérée pour le compte exclusif de certaines structures et des besoins du cabinet ministériel. Pour leur part, artistes danseurs et acteurs du théâtre réclament depuis longtemps leurs fonds.
Pour ce qui est de la Sodav, plusieurs sociétaires exigent depuis longtemps la mise en place et l’opérationnalité de la Commission permanente de contrôle pour la gestion saine des dus des ayant-droits, des redevances et des subventions de l’Etat. Cette commission est composée de représentants de la Cour des comptes, de la Cour suprême, du ministère en charge des Finances et de la Culture et du Patrimoine historique. Les artistes réclament cette commission permanente de contrôle et non un cabinet de complaisance. « Cette commission est un préalable pour la mise en œuvre de la copie privée. Sinon des milliards issus de la copie privée peuvent entrer à la Sodav, mais les artistes et ayants droit ne verront rien. Ce sera pour un groupuscule » assène un membre de l’association des cinéastes sénégalais.
Ce dernier réclame d’ailleurs le siège pour la culture au CESE qui revient de droit au secteur du cinéma. « Après la mort de Cheikh Ngaïdo Ba, ancien président des cinéastes sénégalais, il devait être remplacé par l’actuel président des cinéastes du Sénégal au Conseil Economique, Social et Environnemental - CESE-, mais quelqu’un d’autre a usurpé ce poste avec la complicité du Ministère de la Culture. Il faut réparer ce tort », peste-t-il.
Par ailleurs, la gestion des fonds du Mémorial Bateau Le Joola érigé à Ziguinchor est décriée par les associations des familles victimes du Joola. « Nous sommes outrés de la manière dont le processus et le budget du Mémorial sont gérés car on a voulu faire de nous des faire-valoir, mais nous n’accepterons jamais des forfaitures avec une dame d’une incompétence criarde du Ministère de la Culture qui gère ce projet », rajoutent-elles. Si le nouveau Ministre de la Culture et du patrimoine historique veille à la gestion rigoureuse des fonds culturels, cela fait partie de nos attentes les plus souhaitées.
par Damien Glez
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QUAND AÏCHA KONÉ SE FAIT LA GRIOTTE D'ASSIMI GOÏTA
Alors que les tensions entre Abidjan et Bamako s’aggravent, la chanteuse ivoirienne dédie une chanson au chef de la junte malienne. Les réseaux sociaux sont divisés
Jeune Afrique |
Damien Glez |
Publication 18/09/2022
Zèle et mauvais timing ? Si l’on sait que la musique d’inspiration mandingue est volontiers saupoudrée d’un zeste de griotisme, les artistes doivent-il franchir le pas qui sépare le simple name-dropping du culte de la personnalité, voire du « mabanga » à la congolaise ?
Alors que le directeur de cabinet d’Alassane Ouattara accusait, mercredi, la junte malienne d’avoir pris en « otages » 46 soldats ivoiriens détenus depuis le 10 juillet, Aïcha Koné faisait déjà la promotion d’une chanson dédiée au chef de ladite junte. En malinké, sur une introduction militaire puis un rythme dansant, la diva ivoirienne déroule ses éloges envers Assimi Goïta qu’elle qualifie de « vrai homme » et d’« enfant prodige ». Pendant ce temps, ses compatriotes Yodé & Siro, stars de la musique zouglou, réservent leurs notes aux militaires détenus et non à leur « geôlier ». Et la chanteuse de se justifier en exhumant son arbre généalogique : « le père de ma mère vient de Sikasso au Mali. »
« Super Goïta »
Défaut de patriotisme ou mauvais hasard de calendrier ? Sur le continent où les productions musicales semblent naître instantanément, Aïcha Koné aurait eu tout le loisir de reporter le lancement de son titre « Digne fils d’Afrique ». Tandis que les Maliens boivent du petit lait, les Ivoiriens se déchirent dans les forums de discussion de la presse en ligne. Un internaute s’étonne qu’on glorifie un « Super Goïta caché sur le mont Koulouba » et dénonce une « provocation » de la part d’une chanteuse qui « est en sécurité, contrairement à de nombreux Maliens ». À ceux qui accusent le chef de la junte malienne d’avoir piétiné la démocratie, un twitto établit la liste de putschistes qu’il admire, comme Thomas Sankara et John Jerry Rawlings. Et de conclure : « Entre Alassane Dramane Ouattara et Assimi Goïta, y a pas photo ! »
LE PREMIER SAMOURAÏ NOIR DU JAPON BIENTÔT À L'ÉCRAN AVEC OMAR SY
L’acteur français d’origine sénégalo-mauritanienne sera à l’affiche du prochain biopic consacré par Netflix à Yasuke, premier guerrier étranger de l’histoire nipponne. Une nouvelle consécration pour cet acteur qui ne cesse de crever l’écran
À en croire le magazine cinématographique américain The Hollywood Reporter, Netflix a choisi Omar Sy pour incarner Yasuke, le personnage principal de sa prochaine biographie dédiée au premier samouraï noir et étranger du Japon.
La même source indique que l’acteur français de père sénégalais et de mère mauritanienne sera à la coproduction de cette série de cinq épisodes en compagnie de Nick Jones Jr, un des scénaristes de la version animée disponible sur la plateforme de streaming américain depuis avril 2021.
Une légende célébrée
Mais contrairement à la série d’animation de genre fantastique, Netflix entend reproduire aussi fidèlement que possible, avec Omar Sy, la vie du personnage à la fois mystérieux, légendaire et fascinant que fut Yasuke.
Il s’agit, en effet, d’un homme passé de la condition d’esclave à celle d’honorable guerrier au pays du Soleil-Levant, loin de sa terre natale de Makua, dans la région Est de l’Afrique. Plus précisément au Mozambique, affirme le journaliste franco-ivoirien Serge Bilé qui lui a notamment consacré « Yasuke, le samouraï noir » aux éditions Owen Publishing en 2018.
La trajectoire singulière de Yasuke est celle d’un personnage qui aura su se faire un nom grâce à la bravoure, dans le contexte peu favorable du Japon féodal. Des siècles plus tard, son histoire suscite, de ce point de vue, bien des fantasmes.
Notoriété croissante
Le film représente une nouvelle occasion pour Omar Sy de démontrer ses talents d’acteur, lui qui a débuté à la télévision française en qualité d’humoriste au début des années 2000. Sa notoriété a, par la suite, traversé les frontières françaises pour s’installer sur les rives américaines. Aujourd’hui, de nombreuses firmes de production cinématographique semblent se l’arracher.
Depuis octobre 2021, Omar Sy est en collaboration avec Netflix pour « la production de contenus exclusifs », fort de sa performance dans Lupin, une adaptation du célèbre roman éponyme de Maurice Leblanc. La série, qui prépare sa troisième saison, compte parmi les plus regardées de l’histoire du géant du streaming.
L’acteur Sy s’est également allié à HBO Max, concurrent de Netflix, en mai dernier. « Il faut du cran pour raconter l’histoire du samouraï noir. Je suis extrêmement chanceux d’être de ce voyage avec Omar Sy », a notamment réagi le scénariste Nick Jones Jr, le 8 septembre 2022 à propos de Yasuke.
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DES ARTISTES, LES PONTS DE L'UNITÉ DU CONTINENT
Parce qu'ils voient loin et sont vraisemblablement plus sensibles à leur environnement, parce qu'ils expriment des réalités pas toujours intelligibles au commun des mortels, les artistes peuvent aussi être le socle sur lequel on peut bâtir l'Afrique.
Dans cet entretien accordé à AfricaGlobe Tv, l'artiste plasticien, Mor Faye présente les œuvres de ses collègues nigérians avec qui il expose depuis quelques semaines à la Galeries Les arts du soleil à Dakar ( Yoff).
Le comptable qui a troqué les machines à calculer contre les pinceaux dit toute son admiration pour la création de ses collègues du Nigeria. En marge de cette exposition, nous l’avons interrogé sur le but visé par cette collaboration.
Convaincu que les artistes devraient être les conseillers pour les dirigeants de nos États, Mor Faye (MURF) explique que cette collaboration entre artistes africains est une manière de montrer aux politiciens la voie royale vers l’unité entre les différents peuples du continent. Seule gage pour faire avancer le continent.
Des projets partagés entre les artistes du continent, va permettre de construire des ponts entre les différents pays et favoriser une interpénétration entre les peuples pour rendre ce continent fort.
C'est cette conviction qui motive ce plasticien à envisager des collaborations avec d'autres artistes africains. De plus en plus présents dans les événements culturels internationaux, Mor Faye a aussi des connexions avec des artistes africains comme des Nigérians, des Kenyans etc.
Même s’il reste peu connu dans ces pays, son ambition est de continuer à collaborer avec les artistes d'autres pays, espérant que les dirigeants suivent les pays des artistes pour une Afrique unie et forte.
BIBLIOTHEQUE DAARAY KAAMIL, UN AMAS DE TRESOR AU COEUR DE TOUBA
La bibliothèque centrale de Touba, appelée « Daaray Kamil », (La maison du Coran), est un haut lieu de savoir et de mémoire. La production littéraire de Cheikh Ahmadou Bamba, des archives de grande importance, des exemplaires du Coran...
La bibliothèque centrale de Touba, appelée « Daaray Kamil », (La maison du Coran), est un haut lieu de savoir et de mémoire. La production littéraire de Cheikh Ahmadou Bamba, des archives de grande importance, des exemplaires du Coran et une documentation fournie et variée y pullulent, au grand bonheur des chercheurs et des disciples.
« Mon trésor est le saint Coran, la tradition du prophète et les règles de bonne conduite, nullement l’accumulation d’argent ou d’or ». Cette prose tirée des écrits de Cheikh Ahamadou Bamba, traduite en français et en anglais puis accrochée sous forme de banderole dans la salle de lecture de « Daaray Kaamil » suffit à montrer ce que représentent, ici, les « xasaïd » et les exemplaires du saint Coran gardés dans la bibliothèque pour Cheikh Ahamadou Bamba et la communauté mouride. Une autre prose sous forme de tableau d’art qui orne une autre partie de la salle.
Serigne Touba y indique la voie aux chercheurs : « Toi qui veux acquérir le savoir, révise à chaque fois, à chaque instant ». Beaucoup de disciples dans cette bibliothèque en ont une règle de conduite. Sac à dos contenant ses habits sous la table, Mbaye Guèye est très concentré sur le livre qu’il recopie. « Je suis à l’école coranique, dans un daara qui se trouve à Thiarène, une localité de la commune de Keur Madiabel dans le département de Nioro du Rip. Chaque année, à l’approche du Magal, qui consacre notre période de vacances, je viens ici à la quête du savoir et aussi pour mieux connaître Serigne Touba, mon guide religieux », confie-t-il. Mbaye Guèye n’est pas le seul à suivre cette recommandation du fondateur du mouridisme.
Assis à la même table que Mbaye Guèye, Cheikh Niang lie un livre écrit par un fils de l’actuel Khalife général des Mourides, Ahamadou Bamba Al-khadim Mountakha. Il est originaire de Touba et enseigne la philosophie au lycée de Sédhiou. Durant ses vacances, c’est à « Daaray Kamil » qu’il passe l’essentiel de son temps. Au même titre que ces disciples et chercheurs, des fidèles mourides, désireux de visiter le patrimoine littéraire légué par Cheikh Ahamadou Bamba, occupent les différentes salles de la bibliothèque.
Visiblement émerveillée par le nombre de documents qu’elle vient de voir dans la salle dédiée aux « xasaïd », Sokhna Asta Guèye s’exclame : « C’est énorme » ! Il fallait une visite dans cette bibliothèque pour croire qu’un être, fût-il un élu de Dieu, peut à lui seul écrire tout cela. Selon Ousseynou Diattara, un agent en service à la médiathèque, en plus des visiteurs et disciples, presque toutes les délégations de diplomates qui viennent à Touba font un tour pour découvrir la bibliothèque.
Une œuvre de Serigne Abdoul Ahad Mbacké
Le nom de la bibliothèque Cheikhoul Khadim écrit en arabe et qui défile en boucle à la devanture attire les visiteurs. « Daaray Kamil », de son nom populaire, se situe entre la grande mosquée et le cimetière. Construit en 1977, cet édifice est composé de quatre salles qui encerclent le mausolée du troisième Khalife général des Mourides, Cheikh Abdoul Ahad Mbacké. D’ailleurs, c’est ce fils du fondateur du mouridisme qui l’a fait construire durant son khalifat (1968-1988). À droite de la porte principale, se trouvent l’administration et la salle d’exposition dans laquelle sont accrochées des photos de l’inauguration, mettant en exergue le premier Président de la République du Sénégal, Léopold Sédar Senhor, et Cheikh Abdoul Ahad Mbacké. À une encablure, se dresse la salle de lecture. C’est une médiathèque avec des tables, des chaises, un studio de télévision numérique, Cheikhoul Khadim Tv, et des écrans qui diffusent en boucle des « xasaïd ».
Elle fait face à la salle 2 dédiée à l’œuvre littéraire de Cheikh Ahamadou Bamba. Ces ouvrages, une collection de « xasaïd », sont classés par thème sur une trentaine de rayons de quatre étagères de couleur grise qui mesurent au moins 20 mètres chacun. Il s’y ajoute une vingtaine de petits rayons adossés au mur tout le long de la salle. Ce même système prévaut dans la salle 1 située derrière le mausolée. Elle est dédiée aux exemplaires du Coran et aux matériels personnels du fondateur du mouridisme. Dans d’autres espaces dédiés sont conservés des documents divers, les archives administratives… La salle d’exposition rend également ce bâtiment majestueux.
PAR Farid Bathily
HOUSE OF THE DRAGON, LE PRÉQUEL QUI VEUT DÉTRÔNER GAME OF THRONES
La série télévisée américaine diffusée depuis le 21 août 2022 suscite un grand engouement. Et les records d’audience de ses débuts rappellent à bien des égards l’œuvre à succès dont elle est dérivée
Depuis bientôt deux semaines, la série télévisée House of the Dragon (La Maison du dragon) mobilise plusieurs millions de téléspectateurs à travers le monde. L’œuvre diffusée de façon hebdomadaire à raison d’un épisode d’une heure environ tous les dimanches sur la chaîne de télévision américaine HBO, n’a pas seulement conquis le public des États-Unis.
Tout le monde ou presque en parle sur les réseaux sociaux et au-delà. Et l’heure tardive de la diffusion pour les personnes se trouvant hors du continent américain notamment (21 heures sur la côte Est, soit en pleine nuit en Afrique et en Europe) ne semble pas être un obstacle pour son audience.
Magnifique saga
Les deux premiers épisodes ont cumulé 20 millions de téléspectateurs aux États-Unis, selon l’annonce de HBO quelques heures seulement après la diffusion du second. Ce dernier vu par 10,2 millions de personnes réalise même une progression d’audience de 2% par rapport à l’épisode inaugural dont les chiffres représentaient déjà le record de lancement dans l’histoire de la chaîne de télévision cryptée. À cela s’ajoutent les téléchargements illégaux dont l’ampleur reste insoupçonnée.
Un tel engouement fait penser à Game of Thrones (GOT) ou Le Trône de fer en français dont la série est le spin-off. Adaptation du livre mythique "Feu et Sang" de George R. R. Martin, House of the Dragon raconte en effet les coulisses de la perte d’influence des Targaryens, une dynastie qui a longtemps régné sur le trône de fer grâce à ses dragons entre autres, avant d’en être dépossédé sur fond de rivalité familiale. La succession du roi Viserys Targaryen (Paddy Considine) étant l’objet d’une lutte d’influence entre son frère Daemon (Matt Smith) et sa fille Rhaenyra (Emma D'Arcy) disqualifiée de fait dès la naissance à cause de son sexe.
Sur les traces de GoT
"Voici la vérité que personne n’a jamais eu le courage de vous dire : ils aimeraient mieux mettre le royaume à feu et à sang que de voir une femme s’asseoir sur le trône de fer", lance notamment Rhaenys Targaryen (Eve Best), appelée "reine qui ne l’a jamais été", à la princesse dans l’épisode 2.
House of the Dragon est une magnifique saga, à l’image de Game of Thrones. D’un réalisme bluffant au plan visuel, la fiction lève le voile sur le patriarcat autour de la royauté. La réalisation y a par ailleurs mis les moyens, à raison de 200 millions de dollars prévus pour les dix épisodes de cette première saison.
Il reste à voir si cet emballement du début se traduira à terme en un succès comparable à celui de GOT. Cette dernière diffusée entre avril 2011 et mai 2019 – soit huit en saisons au total –, est en effet auréolée de plusieurs récompenses dont des Emmy Awards dans la catégorie série dramatique. Elle figure également dans le top 100 des séries les mieux écrites de l’histoire de la télévision, selon le syndicat des scénaristes américains.
HBO a en tout cas d’ores et déjà annoncé le renouvellement de House of the Dragon pour une deuxième saison. Et cela pourrait bien ne pas être la dernière.
APPRENTISSAGE DU CORAN À TOUBA, LE LEGS DE BAMBA RÉSISTE AU TEMPS
Depuis quelques années, les apprenants sortis des écoles coraniques de Touba s’illustrent dans les concours nationaux et internationaux de récitation du Coran. La cité religieuse semble récolter les fruits de l’attachement de son fondateur au livre saint
Le temps de la consécration ! Depuis quelques années, les apprenants sortis des écoles coraniques de Touba s’illustrent de fort belle manière dans les concours nationaux et internationaux de récitation du Coran. Au-delà d’un modèle bien huilé, la cité religieuse semble récolter les fruits de l’attachement de son fondateur au livre saint.
Barbe soigneusement peignée, voix basse, marche lente au milieu de centaines d’apprenants, Serigne Amdy Moustapha Diop a ouvert l’école coranique Daroul Habi. Elle compte 330 pensionnaires. M. Diop ne vit que par le Coran. Ses enfants et ses épouses consacrent leur temps à l’apprentissage et à l’enseignement des saintes Écritures. Mais, pour lui, c’est le même modèle qui est répercuté partout à Touba : « C’est une histoire d’amour entre le fondateur du mouridisme et le Coran qui se perpétue ». On y répertorie 1500 daaras pour un total de près 157.000 apprenants. Si l’on en croit le représentant de la Ligue des écoles coraniques du Sénégal, section Touba, Khaly Diakhaté.
Malgré une urbanisation galopante, une modernisation à plusieurs niveaux, Touba est restée très attachée au Livre saint. Mais pour Serigne Ahmadou Bamba Al-Khadim Mountakha Mbacké, c’est le fruit de l’amour particulier que Cheikh Ahmadou Bamba accordait au livre saint. « Il s’est beaucoup sacrifié quand il devait apprendre le Coran. À l’époque, il lui arrivait d’écrire des exemplaires pour les revendre et acheter d’autres ouvrages. C’était sa vie, son passe-temps… C’était sa plus grande richesse. Il n’avait d’yeux que pour le Coran. À Touba, l’accent a toujours été mis sur le Coran avant l’insertion professionnelle. C’est ce qui explique le succès. Malgré les nombreuses évolutions, l’enseignement est resté traditionnel », soutient-il, fier de ce lien de ferveur.
1500 daaras
Au Sénégal, en Afrique ou dans le monde, plusieurs distinctions sont revenues à des apprenants venant de Touba. Pour Serigne Khalil Mbacké, petit-fils de Serigne Saliou Mbacké, il y a une part de baraka. Selon lui, il arrive très souvent que les maîtres coraniques rencontrent des apprenants qui sont dotés d’une capacité de mémorisation hors norme. Les récompenses ne se comptent plus. Les représentants de Touba raflent tout. Lors de l’édition 2022 du concours Senico, du premier au quatrième, le neuvième et le dixième sont tous issus de Touba. En Côte d’Ivoire, Abo Niasse est sorti premier, à Dubaï, le représentant de Touba est sorti deuxième sur 63 pays, d’après Serigne Khaly Diakhaté. D’après le représentant de la Ligue des maîtres coraniques de la section Touba, c’est une tradition dans la ville sainte, même s’il reconnaît une plus grande médiatisation des concours ces dernières années.
« C’est comme la mousse, elle ne vient jamais seule. La mission du Prophète, par exemple, s’est terminée après la descente du Coran. Mais avant son rappel à Dieu, il a tenu à rappeler l’importance du Coran et la nécessité de dupliquer le modèle partout à travers des écoles coraniques. C’est devenu une tradition dans notre religion », soutient-il.
D’après lui, en serviteur proclamé du Prophète, Serigne Touba a fait de ce legs le sien. Il en a fait l’essence de son existence. « Au-delà des recommandations obligatoires, toute sa vie tournait autour du Coran. C’était sa vie. Il a dit que son rapport avec le Coran, c’est comme le non-voyant et son guide. Il a non seulement appris, mais il l’a enseigné. Il avait des personnes qui ne s’occupaient que de l’écriture, d’autres que de la lecture, avec des exigences très fortes. Pendant plus de 50 ans, il a vécu ainsi. Tout était Coran. Lui-même le disait, le Coran était devenu mélangé à tout ce que je faisais. C’est devenu presque une affaire de sang », a-t-il révélé.
Selon Khaly Diakhaté, Serigne Modou Diop Dagana, un des plus grands narrateurs de la vie de Serigne Touba, a raconté une anecdote qui en dit long sur cet amour entre le Cheikh et le Livre saint. Un jour, dit-il, un Maure, doté d’une grande habileté dans l’écriture du Coran, informé des montants que Serigne Touba était prêt à mettre pour un livre bien écrit, a tout simplement décidé d’en faire son gagne-pain. « Il écrivait et vendait à Serigne Touba au prix fort. Il était un amoureux inconditionnel du Coran. Tous ceux qu’il a formés ont ouvert des écoles coraniques partout pour promouvoir l’apprentissage des saintes Écritures », souligne-t-il. Le lancement, cette année, du Grand prix international Cheikh Ahmadou Bamba pour le Saint Coran, qui réunit diverses nationalités, illustre parfaitement cet amour pour le Livre saint dans la cité religieuse.
La « parole » aux sourds-muets
Dans un modeste daara situé à Jannatul Mahwa (Touba), des sourds-muets sont initiés à l’apprentissage du Coran. Le précurseur est Serigne Amdy Moustapha Diop dont le fils souffre de ce handicap.
Au troisième étage d’un bâtiment quelconque dans le quartier Jannatul, le calme est plat. L’endroit semble inoccupé tant le silence est profond. Chose rare dans une école coranique. Ici, les apprenants sont assez particuliers. Ils sont des sourds-muets. Un handicap qui ne les empêche guère d’exceller dans l’apprentissage du Livre saint. Ils forment de petits cercles autour de leur maître. Ce matin, ils font trois groupes. Un pour les filles, un pour les débutants, un autre pour les plus anciens. Ce dernier groupe est sans doute le plus impressionnant. Même l’enseignant est sourd-muet. Alors, comment initier des sourds-muets à l’apprentissage du Coran ? Comment savoir s’ils ont maîtrisé les choses ou pas ?
C’est le précurseur lui-même qui explique la méthode. « Au début, on les aide à identifier les lettres, ensuite les syllabes. Puis, on leur fait écrire sur un grand plat couvert de sable. Ils te montrent qu’ils ont maîtrisé quand ils réussissent à écrire correctement, en respectant l’accentuation », explique Serigne Amdy Moustapha Diop. Depuis un certain temps, les ardoises numériques sont en train de suppléer les plats remplis de sable. Elles permettent un apprentissage plus rapide.
Mourtalla, le déclic
Marié à un proche parent, Serigne Amdy Moustapha Diop savoure la naissance de son premier fils. Le jeune Mourtalla grandit. Mais au moment d’apprendre à prononcer ses premiers mots, son père se rend compte que son fils est un sourd-muet. « On m’a dit que c’est la conséquence de la consanguinité. Sa mère est un parent très proche », explique le pater. Fervent croyant, il accepte la Volonté divine. Mais pour lui, il était hors de question de ne pas initier son fils à l’apprentissage du Coran, même s’il ignore encore par quel moyen : « Je savais qu’il fallait qu’il apprenne ».
Il décide alors d’expérimenter la méthode du plat avec du sable. Le résultat l’impressionne, selon ses propres mots. « C’est grâce à cette méthode qu’il a écrit trois exemplaires du Coran à main levée », révèle-t-il. La méthode commence à faire le tour de la ville sainte. Ses collègues maîtres coraniques le supplient d’amener son fils à un célèbre concours de récital. « Au début, j’étais réticent, mais j’ai par la suite compris que c’était une bonne idée. Les gens ont compris qu’il était possible d’initier un sourd-muet à l’apprentissage du Coran, comme cela se fait avec l’enseignement moderne. Je me suis rendu compte que personne ne connaissait l’existence de cette méthode », confie-t-il.
Aujourd’hui, Mourtalla est en train de perpétuer le modèle de fort belle manière, beaucoup mieux que son père. Selon ce dernier, la transmission est beaucoup plus simple entre sourds-muets. Il encadre dans l’école coranique de son père beaucoup de jeunes sourds-muets.