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17 février 2025
Développement
Par Sidy DIOP
MOUSTAPHA NIASSE, LA DER D’UN POLITICIEN HABILE
Il a traversé les régimes comme d’autres traversent les décennies. Dans un pays où les carrières politiques s’éteignent parfois aussi vite qu’un feu de paille, l'homme a tout connu : les palais feutrés, les trahisons en douce, les alliances inattendues...
On ne fait pas plus inoxydable que Moustapha Niasse. L’homme a traversé les régimes comme d’autres traversent les décennies : sans jamais perdre l’équilibre. Il a été là sous Senghor, il a été là sous Diouf, il a été là sous Wade, il a été là sous Macky. Et aujourd’hui, après une carrière aussi longue qu’un discours de politique générale à l’Assemblée nationale, il s’apprête à passer la main.
Il y a quelque chose de fascinant chez ces hommes politiques capables de rester dans le jeu, quoi qu’il arrive. Niasse a tout connu : les palais feutrés, les salles de réunion enfumées, les trahisons en douce, les alliances inattendues. Il a été ministre, Premier ministre, président de l’Assemblée, chef de parti, faiseur de rois et éternel survivant. On le disait fini en 2000, et il est revenu. On le disait marginal en 2012, et il s’est retrouvé troisième homme de la présidentielle avant de rallier Macky Sall et de prendre la tête du Parlement. L’art de toujours retomber sur ses pieds.
Dans un pays où les carrières politiques s’éteignent parfois aussi vite qu’un feu de paille, Niasse a su durer. Pas en faisant du bruit, pas en jouant les tribuns enflammés, mais en restant là, solide, discret, patient. Il n’a jamais eu le panache d’un Wade, ni l’aura d’un Senghor, ni même la ruse d’un Macky Sall. Mais il a eu cette qualité rare : la constance. Il n’a jamais brûlé ses vaisseaux, jamais claqué la porte trop fort, jamais insulté l’avenir. Résultat : il a toujours trouvé une porte ouverte quelque part. Aujourd’hui, il dit vouloir tourner la page.
Quitter la vie politique, laisser l’AFP à d’autres. Peut-être. Mais après tant d’années à tirer les ficelles, peut-on vraiment s’arrêter ? Peut-on se contenter de regarder le jeu sans y participer ? Il y a fort à parier que Moustapha Niasse restera, d’une façon ou d’une autre, une voix qui compte. Un de ces sages que l’on consulte, que l’on écoute, qui glisse un conseil ici, une mise en garde là. Car quand on a passé une vie à faire de la politique, on ne raccroche jamais vraiment. On fait semblant, c’est tout.
Succéder à Niasse ? Bonne chance. Il avait « choisi l’espoir » le 16 juin 1999, combattu vigoureusement Abdou Diouf et Ousmane Tanor et fait chuter l’historique Parti socialiste. Son devoir accompli, Moustapha Niasse s’en va. Enfin, c’est ce qu’il dit. Après une carrière aussi longue qu’un embouteillage sur l’Autoroute de l’Avenir, le patron de l’Afp prépare donc sa sortie. Il l’assure, il passe la main. À qui ? Ça, c’est une autre histoire. Parce que prendre la relève d’un homme qui a fait de la longévité un art, ce n’est pas une mince affaire.
Niasse, c’était la boussole de l’AFP, le dernier des mohicans du socialisme à la sauce sénégalaise. Il a traversé les régimes, évité les tempêtes, toujours su quand s’accrocher et quand lâcher du lest. Le remplacer, c’est un peu comme vouloir rejouer «La Tragédie du roi Christophe» sans Douta Seck. Alors, qui ? Un fidèle lieutenant ? Un jeune loup ? Un ancien repêché des marées politiques ? Il faudrait quelqu’un d’assez habile pour maintenir l’AFP à flot, d’assez respecté pour ne pas la voir exploser en vol et d’assez patient pour attendre le prochain virage de l’histoire.
Et surtout, d’assez malin pour faire oublier qu’en dehors de Niasse, l’AFP, c’était surtout… Niasse. On nous dit qu’il y a des prétendants. Bien sûr. Il y en a toujours. Mais tenir le gouvernail après un capitaine aussi endurant, c’est une autre paire de manches. Parce qu’après le départ du sage, il reste souvent une question en suspens : à quoi sert un parti sans son pilier ?
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POUR UNE ÉCOLE À LA SÉNÉGALAISE
Abdourahmane Diouf dissèque les maux du système éducatif national. Selon lui, le Sénégal reste prisonnier d'un mimétisme colonial qui l'empêche de construire sa propre voie. Entre héritage culturel et modernité, plongée au cœur d'une révolution attendue
Dans un entretien accordé à l'émission Belles Lignes de Pape Alioune Sarr ce jeudi 6 février 2025, le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, Abdourahmane Diouf, livre une analyse approfondie des défis du système éducatif sénégalais et propose une vision de transformation.
Issu lui-même d'une famille traditionnelle où ses parents ne maîtrisaient pas le français, le ministre incarne la réussite de l'école publique sénégalaise d'antan. Il souligne cependant que le système actuel reste prisonnier de son héritage colonial. "Nous n'avons pas d'école sénégalaise comme nous n'avons pas d'université sénégalaise", déclare-t-il, pointant notamment le paradoxe de l'université Cheikh Anta Diop qui, malgré ses 100 000 étudiants, n'enseigne pas suffisamment l'œuvre de son illustre parrain.
Le ministre dénonce un mimétisme culturel qui affecte profondément la société sénégalaise. "Nous voulons être plus arabes que les Arabes, plus français que les Français, en oubliant d'être des Noirs", affirme-t-il, appelant à une reconnexion avec l'identité culturelle sénégalaise.
Sur le plan technologique, Abdourahmane Diouf prône une approche pragmatique. Il cite l'exemple des jeunes réparateurs de téléphones du marché HLM à Dakar qui, sans formation académique, maîtrisent les technologies les plus récentes. Pour lui, cette expertise pratique doit être valorisée et intégrée dans une stratégie nationale de développement technologique.
Le ministre plaide pour un "souverainisme ouvert", conjuguant préservation des intérêts nationaux et coopération internationale. "Nous allons conserver pour nous ce que nous savons faire de mieux, mais là où nous sommes faibles, nous irons chercher l'expertise à travers le monde", explique-t-il.
Concernant les réformes, il insiste sur l'urgence d'adapter le système aux réalités locales, notamment en matière linguistique. Face aux résistances sociétales, il appelle à une prise de conscience collective pour dépasser les préjugés hérités de la période coloniale et construire un modèle éducatif véritablement sénégalais.
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L'HÉRITAGE DE KADDU BEYKAT SE RÉINVENTE
La restitution de la résidence d'écriture Intersections Selebeyoon dévoilera le travail de huit créatrices africaines sous le parrainage de Ken Bugul. Cette soirée du 7 février à la place du souvenir marquera également le début d'un hommage à Safi Faye
(SenePlus) - Le Festival Africain du Film et de la Recherche Féministes (CINEFEMFEST) Gëstu Nataal i Jigeen s'apprête à présenter les résultats de sa résidence d'écriture 2024 lors d'une cérémonie qui se tiendra le 7 février à la place du souvenir africain de Dakar. Cet événement, qui débutera à 16h30, marquera l'aboutissement d'un projet créatif unique rassemblant huit femmes talentueuses du continent africain et de sa diaspora.
La résidence d'écriture Intersections : Selebeyoon, qui s'est déroulée à Toubab Dialaw en octobre-novembre 2024, a réuni un groupe diversifié d'écrivaines, de chercheuses, de commissaires d'exposition, de photographes et de cinéastes. Sous le parrainage de l'écrivaine Ken Bugul, cette initiative a donné naissance à une publication collective qui sera présentée lors de la cérémonie.
L'événement mettra également à l'honneur le cinéma pionnier de Safi Faye avec la projection de son film emblématique "Kaddu Beykat" (Lettre Paysanne). Tourné à Fadial, en pays Sereer, ce film célébrera son cinquantième anniversaire en 2025. Sa pertinence reste intacte alors que le Sénégal s'engage dans un processus de réforme foncière et agraire.
Le festival prévoit une tournée de projection de "Kaddu Beykat" dans les établissements scolaires, les universités publiques et les espaces culturels de Dakar et sa région. Cette initiative vise à faire découvrir l'œuvre de Safi Faye aux nouvelles générations et au grand public. La cinéaste, première Africaine dont les films ont connu une distribution commerciale, a réalisé treize films au total, explorant des thématiques cruciales telles que l'émancipation féminine, l'indépendance économique, la souveraineté et les traditions en pays sérère.
Sa filmographie impressionnante comprend des œuvres marquantes comme "La Passante" (1972), "Revanche" (1973), "Fad'jal Goob na nu" (1979), "Man Sa Yay" (1980), "Les Âmes au soleil" (1981), "Selbé et tant d'autres" (1982), jusqu'à son dernier film "Mossane" (1996).
Le CINEFEMFEST avait déjà rendu hommage à Safi Faye lors de son édition 2023, soulignant son rôle de pionnière dans le cinéma africain. Pour plus d'informations sur le festival et ses activités, les organisateurs invitent le public à consulter le site web cinefemfest.com ou à les contacter directement à l'adresse cinefemfest@cinefemfest.com.
Cette initiative s'inscrit dans une démarche plus large de valorisation et de préservation du patrimoine cinématographique féministe africain, tout en encourageant l'émergence de nouvelles voix créatives sur le continent.
LEVÉE DE BOUCLIERS CONTRE LE PATRIARCAT
Le combat pour l'égalité parentale s'intensifie au Sénégal, où un simple refus de signature paternelle peut briser l'avenir d'un enfant. En 2025, le Code de la famille continue de reléguer les femmes en citoyennes de seconde zone
Au Sénégal, seul un homme est reconnu comme chef de famille, selon le code de la famille. Cette prérogative lui donne le pouvoir de contrôler presque tous les aspects de la vie familiale, à savoir le lieu de résidence, l'autorisation de délivrance de documents administratifs pour leurs enfants. Ainsi, l'autorité parentale revient uniquement au père pendant le mariage. Ce cadre juridique laisse les femmes, en particulier les mères divorcées et célibataires, dans une situation de vulnérabilité et d'impuissance, car elles sont incapables de prendre les décisions les plus élémentaires pour leurs enfants sans l'accord du père.
Nafi, une mère divorcée, incarne les difficultés auxquelles sont confrontées de nombreuses femmes sénégalaises à cause d'un code de la famille obsolète. Après son divorce, elle s'est retrouvée seule responsable de l'éducation de son enfant. Lorsqu'elle a voulu renouveler le passeport de son fils, son ex-mari a refusé de lui accorder l'autorisation parentale nécessaire. «Il n'a jamais respecté les décisions du tribunal : pas de pension alimentaire, pas de visites, rien. J'ai tout fait pour mon enfant, mais lorsque son passeport a expiré, j'ai dû courir après mon ex-mari pendant six mois pour obtenir l'autorisation d'en faire un nouveau», se souvient Nafi, la voix teintée de frustrations. Cette épreuve n'est que trop fréquente pour les femmes divorcées au Sénégal qui se retrouvent souvent impuissantes face à un système juridique qui favorise les hommes. Le système juridique, qui est censé protéger les enfants, est souvent utilisé comme une arme contre leurs mères.
Aminata partage une histoire similaire, qui fait écho à l'expérience de nombreuses femmes divorcées au Sénégal. Frustrée par le refus de son ex-mari de coopérer, elle a demandé conseil à l'association des juristes sénégalaises (AJS) et a pu obtenir une délégation de l'autorité parentale. «Je ne pouvais pas obtenir des documents de base pour mon enfant sans le consentement du père. J'ai finalement demandé de l'aide à l'AJS (Association des Juristes Sénégalaises), qui m'a guidée pour obtenir la délégation de l'autorité parentale. Maintenant, je peux prendre des décisions pour mon enfant sans être à la merci de mon ex-mari», explique-t-elle. Ces batailles mettent en lumière les obstacles systémiques auxquels les femmes sont confrontées dans le cadre du code de la famille actuel.
Les femmes divorcées, les véritables victimes de l’article 277 duCode de la famille
Aissatou, comme beaucoup d'autres femmes, se demande pourquoi la loi dit qu'une mère qui porte son enfant pendant neuf mois et l'allaite pendant près de deux ans doit avoir l'autorisation du père pour l'emmener dans les procédures administratives. En effet, l'article 277 du code de la famille sénégalais est au cœur du problème. Il accorde au père l'autorité parentale exclusive pendant le mariage, exigeant sa signature sur toute autorisation parentale, écartant de fait les mères de la participation aux décisions cruciales concernant la vie de leurs enfants. La loi permet non seulement aux pères de refuser la reconnaissance de paternité, mais elle interdit également les tests de paternité, ce qui renforce encore la domination masculine dans les affaires familiales. Cette structure juridique perpétue un système dans lequel les hommes détiennent tout le pouvoir de décision, laissant aux femmes des droits et des recours limités. Cette disposition persiste malgré l'évolution du rôle des femmes dans la société sénégalaise, où elles occupent désormais des postes de responsabilité professionnelle importants. Les activistes et les organisations féministes appellent à une révision de cette loi pour refléter les réalités de la vie familiale moderne où les femmes sont souvent les principales pourvoyeuses de soins.
Le poids émotionnel du pouvoir patriarcal
L'impact de ce cadre juridique patriarcal va au-delà des obstacles administratifs. Des femmes comme Nafi éprouvent une grande détresse émotionnelle en raison de leur manque d'autonomie. «J'ai évité de parler de la situation à mon fils pour qu'il n'ait pas une mauvaise image de son père. Personnellement, j'étais furieuse d'être aussi impuissante. J'étais furieuse. Comment pouvais-je m'occuper de tout et me faire dire que j'avais besoin d'un papier d'un père qui nous avait abandonnés pour voyager ?» explique-t-elle de sa profonde frustration et sa colère face à l'injustice imposée par la loi. Ce sentiment d'impuissance s'étend à d'autres aspects de leur vie, qu'il s'agisse des rendez-vous manqués ou de l'anxiété constante de naviguer dans un système qui leur est défavorable.
Comment les obstacles juridiques affectent la vie des enfants
Les effets de ces obstacles juridiques ne se limitent pas aux mères. Ils ont également un impact profond sur les enfants. Dans des cas comme celui de Nafi, où le père est absent, les enfants peuvent passer des années sans voir leur parent, ce qui entraîne des relations tendues et une détresse émotionnelle. Le fils de Nafi n'a pas vu son père depuis huit ans, celui-ci vivant à l'étranger et ne le contactant que sporadiquement via WhatsApp. Cette absence a laissé de profondes cicatrices émotionnelles. «Le refus de son père de coopérer a affecté nos vies : rendez-vous manqués, projets gâchés et troubles émotionnels. Il ne s'agit pas seulement de paperasse ; il s'agit du lien entre un père et son enfant, qui est en train d'être érodé par une loi qui donne la priorité à l'autorité paternelle sur la responsabilité parentale», se désole Nafi.
Aïssatou : « Mon fils a perdu une bourse d’étude à cause du refus de son père de signer l’autorité parentale»
L'histoire de Nafi n'est qu'une des nombreuses illustrations de l'impact psychologique du code familial patriarcal sénégalais sur les femmes et les enfants. Le fils d’Aïssatou a voulu étudier à l’étranger mais son papa n’a pas signé l’autorité parentale. «Nous avions des problèmes et pour me coincer, lorsque je lui ai demandé de signer l’autorité parentale pour notre fils, il a refusé. Et ce dernier a perdu sa bourse d’étude depuis lors, il s’isole et cela me fend le cœur de le voir ainsi. Tout cela à cause d’un père aigri et égoïste», se désole Aissatou. En effet, l'obligation légale d'obtenir l'autorisation du père pour des tâches administratives de base perturbe la vie quotidienne et empêche l'enfant de voyager, d'accéder à l'éducation et de recevoir des soins médicaux. Cette situation est exacerbée par la capacité du père à refuser son consentement par dépit ou par négligence, ce qui complique encore l'éducation de l'enfant.
Les réformes du Maroc peuvent inspirer le Sénégal
La structure patriarcale du Sénégal n'est pas unique sur le continent africain. Alors que le Sénégal est confronté à ces défis, d'autres pays africains, comme le Maroc, ont réalisé des progrès significatifs dans la réforme de leur droit de la famille. Le Maroc, par exemple, a réformé son code de la famille, la Moudawana, en 2004 afin d'accorder l'autorité parentale partagée et d'améliorer les droits de garde pour les femmes. Ces réformes ont été motivées par un mouvement croissant en faveur des droits des femmes et visaient à aligner le cadre juridique sur les normes internationales en matière de droits de l'homme. Avant 2004, les pères marocains avaient l'autorité parentale exclusive, comme c'est le cas au Sénégal. Toutefois, les réformes reconnaissent désormais le rôle des deux parents dans l'éducation des enfants et la prise de décision. Cette évolution a permis aux mères marocaines d'avoir davantage leur mot à dire dans la vie de leurs enfants, même en cas de divorce. Contrairement au Sénégal, où les femmes ont toujours besoin de l'autorisation de leur père pour ouvrir un compte bancaire pour leur enfant ou pour voyager à l'étranger, les textes marocains donnent autant de pouvoir aux mères qu'aux pères. Ce contraste souligne l'urgence de réformes juridiques similaires au Sénégal pour promouvoir l'égalité des sexes et protéger les droits des femmes.
Montee d’un mouvement en faveur du partage des droits parentaux
Au Sénégal, le mouvement en faveur de réformes similaires prend de l'ampleur. En mars dernier, une coalition de féministes, d'activistes, d'organisations de la société civile et de groupes de défense des droits de l'Homme a lancé une campagne en faveur de l'autorisation parentale partagée. L’objectif de la campagne est de plaider pour une révision de la loi sur le partage des droits et des responsabilités parentales. Il s’agit de permettre aux femmes d'effectuer des démarches administratives au nom de leurs enfants sans avoir besoin de l'autorisation du père. Cependant, malgré ces efforts, la situation reste inchangée, ce qui souligne la nécessité de poursuivre les actions de plaidoyer et de sensibilisation du public.
La militante féministe, Jaly Badiane, souligne l'importance de l'éducation du public parallèlement à la réforme juridique. « Nous devons d'abord demander aux autorités de réviser la loi, mais aussi à la population de comprendre l'importance de cette révision et les raisons pour lesquelles ces changements sont nécessaires. Le partage de l'autorité parentale ne signifie pas que l'on supprime les droits des pères ; il s'agit de faire en sorte que les deux parents puissent prendre des décisions dans l'intérêt supérieur de leurs enfants», explique-t-elle. Elle souligne la nécessité d'adopter des lois qui reflètent les expériences vécues par les familles sénégalaises et protègent les droits des femmes et des enfants. Ses efforts sont essentiels pour combler le fossé entre les réformes juridiques et l'acceptation par la société, en veillant à ce que les changements soient durables et largement soutenus. «Nous devons réviser le code de la famille pour qu'il reflète la réalité des familles sénégalaises modernes. La loi devrait reconnaître que les deux parents, quel que soit leur statut matrimonial, ont le droit et la responsabilité de s'occuper de leurs enfants», affirme Mme Sarr.
Entre 2021 et 2023, les boutiques de l’AJS ont reçu 665 demandes de garde d'enfants
Madjiguène Bakhoum Sarr, responsable de la communication à l'association des juristes sénégalaises (AJS) et membre fondateur de la campagne pour le partage de l'autorité parentale, joue un rôle central dans ce combat. Elle décrit les difficultés quotidiennes des femmes qui s'adressent à l'AJS pour obtenir de l'aide en matière de garde d'enfants et d'administration juridique. Grâce à leurs boutiques juridiques réparties dans tout le pays, elles aident les femmes à naviguer dans le système juridique, qu'il s'agisse d'obtenir la garde des enfants, de garantir la pension alimentaire ou de se battre pour obtenir l'autorisation parentale. «Entre 2021 et 2023, nous avons reçu 665 demandes de garde d'enfants dans l'ensemble de nos boutiques juridiques.
Il ne s'agit pas de cas isolés : ces femmes se battent pour obtenir le droit fondamental de prendre des décisions pour leurs enfants sans avoir besoin du consentement du père», explique Mme Sarr. Les efforts d'AJS sont essentiels dans la lutte plus large pour l'égalité des sexes au Sénégal, car ils fournissent un soutien juridique et un plaidoyer pour les femmes qui luttent contre les dispositions discriminatoires et servent de plateforme pour que les voix des femmes soient entendues.
Les histoires personnelles de femmes comme Nafi et Aminata sont le moteur de la réforme juridique au Sénégal, car elles mettent en évidence les implications réelles des dispositions discriminatoires du code de la famille. Ces récits personnels mettent en lumière les conséquences concrètes de lois obsolètes et le besoin urgent de changement. Ils humanisent les questions juridiques mais démontrent également la résilience des femmes sénégalaises, qui continuent à se battre pour leurs droits en dépit d'obstacles importants.
L'urgence d’un changement juridique auSénégal
Le code de la famille sénégalais a désespérément besoin d'être réformé pour refléter les réalités de la vie moderne. Le cadre juridique actuel, ancré dans les traditions patriarcales, ne protège pas les droits des femmes et des enfants, ce qui les rend vulnérables et les prive de leurs droits. Pour aller de l'avant, le Sénégal doit donner la priorité à la révision des lois discriminatoires telles que l'article 277, afin de garantir à tous les citoyens, quels que soient leur sexe, l'égalité des droits et des chances. Les femmes sénégalaises revendiquent le droit de prendre des décisions pour leurs enfants indépendamment des caprices du père. Cet effort collectif souligne la nécessité absolue de faire évoluer le code de la famille pour l'aligner sur les normes contemporaines en matière d'égalité des sexes.
Une nouvelle vision des droits parentaux au Sénégal
La campagne pour le partage de l'autorité parentale est plus qu'une simple bataille juridique ; c'est un mouvement vers une société plus juste et plus équitable. Il s'agit de faire en sorte que les femmes et les enfants du Sénégal puissent vivre dans la dignité, la sécurité et l'égalité. Le plaidoyer et l'activisme continus de l’AJS et d'autres organisations offrent l'espoir que les structures juridiques patriarcales peuvent être transformées, ouvrant la voie à un avenir plus équitable pour tous les Sénégalais. En révisant le code de la famille et en reconnaissant les rôles égaux des mères et des pères dans l'éducation de leurs enfants, le Sénégal peut faire un pas important vers l'égalité des sexes.
Par Ibou FALL
MÊME PAS MAL
Quand Trump coupe les vivres de l'aide américaine, notre Premier ministre y voit une victoire du souverainisme. Sa recette de l'autonomie nationale ? Envoyer la main-d'œuvre sénégalaise en Espagne et au Qatar
Décidément, on n’a pas fini de s’ennuyer avec les porteurs du «Projet». D’abord, au chapitre du carnet rose, la bonne nouvelle que le Sénégal attend depuis soixante-cinq ans : enfin, le Palais présidentiel accueille un nourrisson dont les cris ramèneront un peu d’humanité derrière les tentures solennelles du pied-à-terre de l’Avenue Senghor.
Son actuel locataire, qui a désormais mieux à faire que de nettoyer les avenues repoussantes, vient de poser son balai en mettant fin à la campagne de propreté lancée dès le début de son mandat.
La République peut au moins se rassurer : les couacs au sommet de l’Etat sont repoussés aux calendes grecques… Le président de la République, dans sa suprême sagesse et un surcroît de reconnaissance éperdue envers son ex-mentor devenu son employé, aurait fait de la mère du Premier ministre la marraine de sa fille.
Sortez les mouchoirs…
Quant à ceux qui se féliciteraient d’avance d’une guéguerre sans merci entre les deux palais de la République, j’imagine d’ici leur déception… C’est dans ce genre de conflit sous les lambris de la République, que l’économie de la zizanie bat des records de prospérité.
Imaginez un peu, avec les «fonds politiques» des deux camps, les fortunes qui passent sous le nez des charlatans, intrigants, conseillers occultes et médiateurs en tous genres… Les missions grassement payées dans les recoins du pays, où la civilisation n’ose toujours pas s’aventurer et où règne la fruste superstition, les troupeaux de bêtes à cornes à immoler, les bassines de bouillie de mil, les tonneaux de lait caillé, les conteneurs de colas striées…
Rien que le budget de la bataille mystique pourrait forcer les Douanes et les Impôts à réviser à la hausse les objectifs pour 2025. On n’en arrivera pas à ces extrémités : une nouvelle naissance vient de sauver le pays.
Passons aux nouvelles qui fâchent : Farba Ngom, le tonitruant «griot de Macky Sall», est dans le viseur des nouveaux maîtres du pays. Il serait trop riche pour être honnête manifestement. On aurait pisté pas moins de cent vingt-cinq milliards de nos misérables Cfa qui auraient transité par chez lui. Problème : on ne sait pas encore d’où ça vient, ni où ça va, encore moins à quoi ça a servi. Mais les «indices concordants» suffisent largement pour lever son immunité parlementaire et le conduire à l’abattoir…
Il sera toujours temps, en cas d’erreur judiciaire, d’exprimer des regrets sincères, faire voter des amnisties et prêcher le pardon dans les cœurs musulmans.
Farba Ngom ne risque pas de s’ennuyer sur la paille humide de son cachot : Amadou Ba, l’ancien prof de Sonko, devenu par la suite ministre des Finances, des Affaires étrangères, Premier ministre et présidentiable, risque de l’y rejoindre incessamment, en compagnie de Birima Mangara, qui fut dans une autre vie, ministre du Budget.
Ce qu’on leur reproche ?
Apparemment, pour Amadou Ba, s’il n’a pas eu la mauvaise idée de coller des mauvaises notes à son ancien étudiant de l’Ena, le délit pourrait être constitué par une peau trop lisse et une silhouette un peu grassouillette dans un pays où majoritairement ça crève la dalle. C’est éminemment suspect…
On ne peut en dire autant de Birima Mangara, mais ça ne doit pas être loin de sa bonne mine qui afficherait un air trop rassasié pour être irréprochable.
En attendant que Sa Bonhomie Macky Sall, en villégiature prolongée au Maroc, auquel l’on tente de coller désespérément près de quatre-vingts homicides, ait la bonne idée de ramener sa frimousse épanouie pour prendre le pouls de l’électorat. C’est à la coupée de l’avion que des policiers harnachés le cueilleraient pour le conduire vers une destination inconnue.
Les icônes du régime sanguinaire précédent n’y retrouveront pas le sourcilleux Moustapha Diakhaté qui vient de purger sa peine et se remet aussitôt au taquet : moins d’une semaine après son élargissement, il est face à la presse pour remettre ça…
Tout ça ne ressuscitera pas l’ancien ministre des Finances, Amadou Moustapha Bâ, mort dans des circonstances que ses proches n’ont pas envie d’évoquer. Les chiffres «falsifiés» de notre économie, selon l’actuel Premier ministre, n’y seraient pas étrangers. Ben, ceux de l’Agence nationale des statistiques, s’ils étaient sortis plus tôt, auraient épargné à notre pays bien des émotions inutiles.
Le pire est que ça ne fait même plus mal.
De l’autre côté de l’Atlantique, c’est devenu «la loi à l’ouest du Pecos». Donald Trump, qui ne semble pas blaguer avec l’argent du contribuable américain, décide donc de suspendre l’aide au développement quelque temps. Il va prendre le temps de farfouiller dans la comptabilité de la négraille, tout comme dans leurs certificats de bonne vie et mœurs. Il annonce déjà la couleur à propos de nos voisins de l’Aes : il ne fréquente pas des «voyous» qui ont braqué des républiques comme on braquerait une banque dans le Far-West.
Grand bien lui fasse !
Notre «meilleur Premier ministre de tous les temps» qui prêche le souverainisme, applaudit pratiquement des deux mains à cette mesure qui confirme ce qu’il nous répète depuis dix ans : il ne faut compter que sur nos propres forces. La preuve, son gouvernement exporte les muscles locaux en Espagne et au Qatar…
C’est dans ce même esprit qu’il prend sur lui il y a quelque temps, de porter la réplique à Emmanuel Macron, le président français, sur la question du retrait des troupes françaises du Sénégal. C’est vrai, il empiète sur les domaines réservés du président de la République, la diplomatie et les questions militaires. Mais puisque le président est un taiseux qui ne sort que rarement de sa réserve, et que tout le monde prie pour que le gros calibre qui nous sert de chef de la diplomatie l’ouvre le moins possible, notre omniprésent Premier ministre prend sur lui pour aller au charbon. Son sens patriotique du sacrifice est touchant.
Et puis, comme le disent les 54 % des électeurs, «Diomaye môy Sonko»…
DAKAR CÉLÈBRE FANON EN DÉCEMBRE PROCHAIN
Durant trois jours (du 18 et 20), les plus grands spécialistes de la pensée fanonienne se pencheront sur ses contributions à la philosophie, à la psychiatrie et aux luttes politiques, Musée des Civilisations noires
(SenePlus) - Le Musée des Civilisations noires organisera un colloque international majeur dédié à Frantz Fanon les 18 et 20 décembre 2025, selon un communiqué de presse publié le 5 février par son directeur général.
Intitulé "Fanon et l'Afrique", cet événement scientifique vient clôturer le cycle de manifestations internationales commémorant le centenaire de cette figure emblématique de la pensée anticoloniale du XXe siècle.
Organisé en partenariat avec la Fondation Frantz Fanon, ce colloque réunira la communauté universitaire et les milieux militants pour explorer l'héritage intellectuel de Fanon, dont les idées ont profondément marqué les luttes politiques ainsi que plusieurs champs académiques, notamment la philosophie, la psychiatrie et la pensée décoloniale.
Cette rencontre internationale s'annonce comme un moment fort de réflexion sur l'œuvre et la pensée de cet intellectuel majeur du XXe siècle.
PAR Djibril Ndiogou Mbaye
SORRY DONALD, ON NE VOUS LAISSERA PAS DÉPORTER LE PEUPLE DE PALESTINE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le monde n’est pas le dernier niveau de la Trump tower. Le souverainisme à outrance n’est pas la panacéee, c’est de l’intégrisme appliquée à la gestion de l’État. Il vous laisse à l’entrée du concert des nations « civilisées »
Le président américain, vient d’annoncer vouloir faire de Gaza « la Côte d’Azur du moyen Orient ». Depuis quelques semaines, le président américain nouvellement élu, son slogan « America first » en fusil d’épaule, son hyperactivité et son arrogance économique en bandoulière, avec une tête grosse comme ça, et avant même sa prestation de serment, a commencé à tirer sur tout ce qui bougeait et même ce qui ne bougeait pas .
Trump-tout-puissant se prend pour le « deus ex machina* » à l’échelle planétaire, capable de gouverner le monde, d’influer sur la destinée de tous les peuples, d’éteindre tous les foyers de conflits, quoi qu’il en coûte.
Gesticulant à tout-va, il veut le Canada comme 51e État, annexer le Groenland et le canal de Panama, agresser économiquement ses partenaires commerciaux les plus importants, avant d’annoncer se concerter avec le roi Abdallah II de Jordanie et le général Al Sissi d’Égypte dans le but de déporter sur leur territoire la population de Gaza. En terme plus simple, il veut déporter la civilisation multi-séculaire palestinienne dans des camps de fortune. Des camps qui rappellent d’autres camps où furent déportés et concentrés les ancêtres de leurs bourreaux actuels et dont nous condamnons l’ignominie encore aujourd’hui. Mais cette fois-ci, il serait inadmissible de laisser l’histoire bégayer. Monsieur Trump ignore que tout n’est pas à vendre et que le monde n’est pas le dernier niveau de la « Trump tower ».
Il est notoire que Trump et ses électeurs n’ont que faire du reste du monde et de leur culture. Aussi, sont-ils imperméables à l’histoire, l’identité culturelle, le lien entre la nation palestinienne et le territoire sur lequel elle vit depuis des siècles, avant même l’existence des États-Unis d’Amérique.
Ils ne comprennent pas que la dignité, la fierté de ce peuple qui préfère rester sur la terre de ses aïeux que les bombes ont presque totalement détruite, est hors du commerce juridique. Gaza ne sera jamais « la Côte d’Azur du moyen Orient », comme vient de le suggérer M. Trump !
Ce peuple meurtri, quotidiennement torturé, qui vient de perdre plus de 45 000 de ses enfants non-combattants, illustres innocents, qui n’ont comme seul tort que d’être nés sur un lopin de terre, objet de la convoitise de son voisin. Son voisin Israël dont le peuple fut autrefois recherché, déporté et massacré dans des camps de concentration comme Auchswitz. Israël qui est aujourd’hui sujet à une amnésie sélective mais qui semble avoir bien assimilé le chant et la danse lugubre de son bourreau.
Décidément, le ridicule ne tue pas celui qui veut rajouter de la détresse à la détresse d’un peuple déjà à genoux. Quelqu’un devrait-il faire un dessin à Trump afin qu’il comprenne qu’il fonce tout droit sur le mur du crime contre l’humanité ?
Ce qu’il vient de déclarer sur la déportation de la population pour faire de Gaza une station balnéaire n’est rien d’autre qu’une apologie d’un crime.
Car au delà d’autres droits inaliénables comme le droit des peuples a l’autodétermination, ou à disposer d’eux-mêmes, le droit international et les conventions dont certains ont été inspirés par le massacre injuste et révoltant des juifs, condamnent sans équivoque ce que préconise Monsieur Trump.
En effet, « la déportation de population ou d’individus est interdite quel qu’en soit le motif par la quatrième Convention de Genève (art. 49 et règle 130 de l’étude sur les règles du DIH coutumier publiée par le CICR en 2005).
• La puissance occupante ne pourra pas procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile dans les territoires occupés par elle.
• Ces pratiques constituent des crimes de guerre (GIV art. 147). Elles participent aussi de crimes tels que la purification ethnique ou le génocide.
• La déportation et le transfert sont également qualifiés de crime de guerre et de crime contre l’humanité par le statut de la Cour pénale internationale, adopté à Rome en juillet 1998 (art. 8.2.a.vii , 8.2.b.viii , et art. 7.1.d). Le transfert par la puissance occupante de sa propre population civile dans le territoire occupé est aussi considéré comme un crime de guerre (art. 8.2.b.viii). Les auteurs de ces crimes peuvent donc être jugés, sous certaines conditions par la Cour pénale internationale.
Il faut dire que même B. Netanyahu, malgré son impertinence légendaire a toujours pris la précaution de ne déplacer les populations palestiniennes qu’à l’intérieur de leur propre territoire, même si c’est à chaque fois pour permettre à Tsahal de procéder à sa basse besogne sur des civils innocents restés sur place.
Donald candidat ne craignait déjà pas la justice des États-Unis. Il a pourtant été définitivement condamné par cette même justice à payer 5 millions de dollars (4,8 millions d’euros) à une autrice qu’il avait agressée sexuellement dans les années 1990.
Donald devenu président ne craint pas la Cour pénale internationale. Il se croit au-dessus de la justice internationale, n’écoute personne, mais personne n’est dupe. C’est un stratège politique qui applique une ruse déjà décodée.
Les politiques sont comme des joueurs de poker, ils usent et abusent de l’art du bluff pour déstabiliser et décontenancer leurs adversaires.
Personne ne le laissera déporter « le petit million et demi » de palestiniens dont il parle. D’ailleurs à ce propos, il n’a pas les bons chiffres car il faut dégrever les dizaines de milliers de morts depuis le 7 octobre, à cette population palestinienne qui diminue progressivement au fil des raids de son « coalisé ».
Si Trump prônait la déportation de la population israélienne, le monde se serait dressé contre lui de la même vigueur.
"L'héritage dont je serai le plus fier sera celui d'avoir été un faiseur de paix et un rassembleur", a promis ce lundi 20 janvier Donald Trump, investi 47e président américain, dans son discours d'investiture.
Si pour l’Ukraine, le président Donald Trump préconise des négociations avec la Russie, même sans le président Zelinski (ce qui est injuste), pour Gaza, il prétend vouloir user de la force en déplaçant les populations.
Mais peut-on vraiment construire une paix juste et durable par la guerre l’oppression ou l’injustice ? La réponse est évidemment non !
C’est la raison pour laquelle, il faut cesser de le prendre par les sentiments en lui faisant miroiter le Nobel de la paix. Cette distinction doit se mériter. Déjà que l’erreur avait été faite en le décernant à Barack Obama par anticipation, sans que le compte y soit à l’arrivée. Il n’est pas question de récidiver en violant une fois de plus, avec un autre président américain, les principes fondateurs, de ce prestigieux prix, si chers à Alfred Nobel.
Trump a le choix entre une reconnaissance américano-américaine et le Nobel avec une entrée mémorable dans la grande Histoire de l’humanité toute entière, en réalisant les conditions de sont succès : réussir « l’exploit » de faire accepter à son poulain sioniste les trames d’une solution à deux États, seule solution acceptable et viable et dans la foulée la reconnaissance de l’Etat de Palestine.
Le président Trump gagnerait à profiter des trois ans et 11 mois qui lui restent pour redorer son blason et celui de son pays et se faire une stature de grand homme d’État à l’international, en plongeant dans les flots de l’Hudson, la flamme de l’injustice qu’il a remplacé avec la belle flamme de l’indépendance et de la liberté, que la miss liberty brandit, à l’embouchure de ce fleuve, depuis 1876 , le centenaire de l’indépendance des USA .
La statue de la Liberté est empreinte de symbolisme. Offerte par la France son nom initial était « La liberté éclairant le monde ». La torche qu'elle tient dans la main droite représente la lumière de la liberté qui, malheureusement n’a jamais éclairé la Palestine. Elle s’est arrêtée juste à sa frontière avec Israel. Quel dommage.
Ces symboles devraient inspirer le locataire de la Maison Blanche en lui rappelant ce qui fait la grandeur de l’Amerique. Une Amérique qui n’est pas reconnue par ses pairs n’est pas une grande Amérique. Seule la reconnaissance consacre la grandeur.
On ne respectera les USA que par son comportement de modèle, de référence. Or une référence doit être juste et ce que le monde entend en ce moment, par la voix de son premier représentant, n’est pas juste.
Personne ne laissera le président Trump déporter les palestiniens.
Il est heureux de constater le refus, même timide de la Jordanie et de l’Égypte et le front que semble enfin constituer le monde arabe, avec cette fois si une intransigeance affichée par l’Arabie Saoudite, le géant de la région. Ce monde arabe si puissant lorsqu’il est uni, qu’il aurait pu imposer un Etat palestinien depuis longtemps.
La France vient également de condamner ce projet funeste de déportation qui prône la négation du peuple et de la souveraineté palestinienne et aussi l’incontournable solution à deux États.
Mais la paix n’arrange pas tout le monde et parfois, même pas ceux qui prétendent travailler exclusivement pour sa réalisation.
« America first » ? Ok ! Car le souverainisme est dans l’air du temps. Mais le souverainisme à outrance n’est pas la panacéee, car c’est de l’intégrisme appliquée à la gestion de l’État.
Le souverainisme avec arrogance et mépris ne paie pas non plus, il vous laisse à l’entrée du concert des nations « civilisées », au ban de la société économique. Si Monsieur Donald Trump, pense tenir entre ses mains le destin du peuple palestinien et d’un monde qui existe depuis cinq milliards d’années sans lui, il se trompe. Aujourd’hui, il ne maîtrise que son propre destin et celui des USA et encore …
La meilleure façon de régler le conflit, d’assurer la sécurité d’Israël, est moins la déportation des Palestiniens que l’émergence d’un État palestinien voisin et frère d’un État légitime d’Israël. C’est bien le moment car le Hamas est fatigué et ses chefs exterminés, Israël est épuisé et ses opérations militaires inefficaces. Tuer n’est pas une solution.
MACRON ET L'AFRIQUE, L'ILLUSION D'UN RENOUVEAU
Décisions unilatérales, communication perçue comme arrogante, absence de concertation... Malgré sa volonté de séduire la jeunesse africaine, le président français n'a fait qu'accélérer le déclin de son pays sur le continent, d'après un nouveau rapport
(SenePlus) - Un rapport sénatorial adopté le mercredi 29 janvier par la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées dresse un constat sans concession de la politique africaine d'Emmanuel Macron. Selon les informations obtenues par La Croix, trois sénateurs - Ronan Le Gleut (LR), Marie-Arlette Carlotti (groupe Socialiste, Écologiste et Républicain) et François Bonneau (Union Centriste) - mettent en lumière l'échec manifeste de la stratégie de rénovation des relations franco-africaines initiée depuis 2017.
Paradoxalement, Emmanuel Macron semblait disposer d'atouts considérables pour renouveler cette relation. Premier président né après la décolonisation, il bénéficiait initialement d'une image favorable sur le continent. Pourtant, sept ans plus tard, le bilan s'avère désastreux, avec un recul spectaculaire de l'influence française en Afrique.
Le rapport pointe notamment les revers diplomatiques récents au Sénégal et au Tchad, où les forces françaises, présentes depuis des décennies, ont été sommées de partir. Ces échecs s'ajoutent au retrait forcé du Sahel, après l'échec de l'opération Barkhane qui, malgré son coût élevé, n'a pas su contenir l'expansion djihadiste. Comme le soulignent les sénateurs : "Finalement, rien ne s'est passé comme prévu."
Les auteurs critiquent particulièrement la méthode employée : "Cette déflation anticipée semble avoir été décidée dans un premier temps sans concertation avec les pays concernés, à qui il était affirmé en même temps, de manière contradictoire, que la France répondrait désormais mieux à leurs demandes en matière de coopération militaire." Le rapport va plus loin en dénonçant "plusieurs décisions et déclarations officielles considérées comme arrogantes et condescendantes envers les dirigeants ou les peuples africains."
Malgré les efforts présidentiels pour séduire la jeunesse africaine et diversifier les partenariats vers les pays non francophones, les résultats tardent à se manifester. Les sénateurs mettent en garde contre l'illusion d'un "nouvel eldorado" hors de l'espace francophone traditionnel, soulignant les niveaux préoccupants de corruption et d'endettement dans ces pays.
Le rapport identifie également un décalage générationnel crucial : "La dégradation de l'image de la France en Afrique traduit avant tout un éloignement par rapport aux sociétés civiles et aux populations : le tournant générationnel n'a pas été suffisamment perçu par notre pays, qui a continué à s'adresser principalement à des élites aujourd'hui très minoritaires ou écartées du pouvoir."
Pour redresser la situation, les sénateurs formulent plusieurs recommandations concrètes, notamment le renforcement de la diplomatie française face à la prééminence de l'Élysée et du ministère des Armées, ainsi qu'un assouplissement de la politique des visas, qualifiée d'"irritant majeur."
Le rapport conclut sur un défi majeur : la montée en puissance sur le continent de "valeurs se voulant opposées à celles de l'Occident (patriarcat, valeurs viriles, autoritarisme)." Face à ce constat, les auteurs plaident pour une approche renouvelée : plus cohérente, moins arrogante, et plus proche des sociétés civiles africaines en mutation.
par Mody Niang
ENCORE NON BACHIR, LE SÉNÉGAL N’EST PAS NÉ LE 24 MARS 2024
On nous rebat les oreilles avec les supposés écarts du nouveau pouvoir. Mais que dire des dérapages présidentiels depuis mars 1963 ? Que dire surtout de ces vingt-trois dernières années ?
Dans ma contribution publiée le 30 janvier dernier, j’annonçais qu’elle serait suivie d’une seconde, peut-être d’une troisième, pour administrer la preuve à Bachir Fofana, à Papa Malick Ndour comme à de nombreux autres du même acabit qui pensent comme eux que nous sommes loin, très loin d’être amnésiques et que personne ne peut nous faire croire, une seule seconde, que le Sénégal est né le 24 mars 2024. « Un président ne doit pas dire ça », « Un président ne doit pas faire ça », répétait-il souvent dans son « lundi » publié après la Conférence des Administrateurs et des Managers publics (CAMP) du 20 janvier 2025. Même si Bachir Fofana ne le sait pas, ou feint de ne pas le savoir, fermant hermétiquement les yeux et se bouchant les oreilles sur tout ce qui s’est passé depuis le 7 mars 1963 et, en particulier, depuis ce fameux 1er avril 2000, nous connaissons des présidents, en tout cas au moins deux présidents qui ont dit plus, qui ont dit pire ; qui ont fait plus, qui ont fait pire.
En conclusion de ma première contribution, je promettais aux lecteurs qui en avaient déjà une idée, avec les déclarations sur les Perrons de l’Élysée du vieux président-politicien, lors de son premier voyage en France, après le 1er avril 2000, qu’ils en auront bien d’autres après avoir lu la seconde contribution, c’est-à-dire celle-ci. Je commencerai par l’ancien président-politicien avant de revenir sur son prédécesseur et sosie. Combien de fois, pendant douze ans, a-t-il dit ce qu’un président de la République ne doit pas dire, et fait ce qu’il ne doit pas faire. Premier ministre déjà, il votait sans carte d’identité à Fatick.
Je pourrais me contenter d’une seule de ses déclarations, que pratiquement tout le monde se rappelle d’ailleurs et qu’aucun président d’un pays sérieux n’ose faire, celle-ci : « Si je n’avais pas mis mon coude sur les dossiers que j’ai sur mon bureau, beaucoup de gens iraient en prison ». Naturellement, dès le lendemain, les commentaires sont allés bon train et dont bon nombre ne le ménageaient pas. Il comprenait alors qu’il avait commis une bévue et a voulu se corriger mais en en commettant une plus grosse encore. « Je ne parlais pas de tous les dossiers mais de celui Sindiély Wade seulement car, je ne peux pas envoyer en prison en même temps le frère et la sœur ». Donc, c’est lui qui décide de l’envoi ou non des gens en prison. Comme Bachir Fofana nous prend pour ce que nous ne sommes, je rappelle qu’il s’agissait du lourd dossier du FESMAN où Sindiély était gravement mise en cause. Le lendemain d’ailleurs ou le surlendemain, j’ai publié une contribution qui avait pour titre « Et s’il est établi que le frère et la sœur sont tous les deux des voleurs ! », Sud quotidien du 12 février 2014.
Bachir, un président peut-il dire ça, un président vraiment digne de la fonction ? Où étiez-vous, vous et les autres qui pensent comme vous ? Le président Bassirou Diomaye Faye a vraiment bon dos. Des bêtises – je ne peux les appeler qu’ainsi –, l’ancien président-politicien en a dit bien d’autres ? Je rappelle seulement, en campagne électorale pour le référendum de mars 2016, au grand Théâtre Doudou Ndiaye Coumba Rose, il a dit, en direction de la pauvre opposition : « Que cela vous plaise ou non, vous supporterez ma politique ! ». Un président de la République peut-il se permettre de dire ça, et sans état d’âme ? Oubliait-il qu’il tirait son pouvoir de gouverner de la constitution, comme l’opposition celui de s’opposer ? Vous a-t-on entendu ou lu à l’époque, vous comme les autres qui prennent plaisir à tirer à boulets rouges sur le président Diomaye et son Premier ministre ?
Dans son même « lundi », Bachir Fofana répète qu’« un président ne doit pas faire ça », mettant naturellement en cause le président Diomaye Faye dans son introduction de la CAMP. Bachir n’a d’yeux et d’oreilles que pour lui et son Premier ministre. Pourtant, des présidents, plus exactement l’ancien président-politicien et son prédécesseur et sosie ont fait pire, si toutefois Diomaye a fait
Des « hauts faits d’armes » du premier, je retiendrai seulement quelques-uns. On se rappelle le comportement inacceptable de l’ancien ministre Moustapha Diop envers les magistrats de la Cour des Comptes. Le président de la Commission des Comptes et de Contrôle des Entreprises et ses collègues se sont rendus au siège du Fonds de Promotion d’Entreprenariat féminin « pour rencontrer le staff et lui présenter le programme de travail de la vérification conformément à leur mission ». Informé de la présence des enquêteurs, Moustapha Diop, alors Ministre délégué auprès du ministre de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, chargé de la Microfinance et de l’Économie solidaire, s’invite à la réunion. Le Président de la commission lui fait alors remarquer que sa présence ne s’imposait pas du fait que ce n’était qu’une réunion de prise de contact.
Le ministre délégué, qui n’a certainement pas apprécié les mots du président de la Commission, entre dans une colère noire et s’adresse alors à ses « invités » en ces termes vigoureux : « Vous êtes de petits magistrats de rien du tout, payés pour me déstabiliser ». Et il ne s’arrête pas en si bon chemin, selon le journal Léral net du mardi 15 juin 2015 qui rend compte de l’événement. « Vous ne faites pas partie des magistrats de la Cour des comptes, mais de la Cour de règlement de comptes », leur lança-t-il, avant de les mettre dehors sans autre forme de procès.
Le président de la Commission et ses collègues naturellement très en colère, s’en ouvrent au président de la République et exigent une sanction sévère contre le ministre délégué ? Pour toute réponse, l’ancien Président-politicien leur présente publiquement les excuses de son ministre. Monsieur Bachir Fofana, un président de la République digne de la fonction doit-il vraiment faire ça ? Où étiez-vous à l’époque, vous et les autres qui pensent comme vous ? Vous a-t-on alors entendus ou lus ?
Ce n’est pas tout Monsieur Fofana. Pendant qu’il était le Directeur général du COUD, Cheikh Oumar Hane a fait l’objet d’une enquête par l’Ofnac, vérification qui a abouti à un lourd dossier. Le 31 décembre 2018, si mes souvenirs sont exacts, après son message à la Nation, l’ancien président-politicien répondant à des journalistes, a pris publiquement sa défense alors que son dossier était entre les mains du Procureur de la République. Il est allé plus loin en reprochant à l’OFNAC d’avoir outrepassé ses prérogatives. Ce n’est pas tout. L’OFNAC fait en général des recommandations dans ses rapports d’activités. Dans celui de l’année 2014-2015, sa première recommandation était celle-ci ; « Relever de ses fonctions le Directeur du Coud pour entrave à l’exécution normale d’une mission de vérification et prendre toutes les mesures utiles pour qu’il ne lui soit plus confié la responsabilité de diriger un organisme public. »
Que s’était-il passé ? Les enquêteurs, après avoir bouclé leur mission, se sont rendu compte que ce qui se passait au Coud en matière de gestion scandaleuse, était encore bien plus grave que ce que dénonçait la plainte qui justifiait cette première mission. Un second ordre de mission chargea alors de nouveaux enquêteurs de poursuivre le travail. Cheikh Oumar sachant que ce qui l’attendait était plus grave encore, s’opposa catégoriquement à l’exécution de cette nouvelle vérification, en allant jusqu’à menacer le premier responsable des enquêteurs et à accabler la présidente de l’OFNAC d’alors de tous les péchés d’Israël.
Bachir, et vous tous et vous toutes qui pensez comme lui, imaginez-vous ce qui allait se passer malgré son lourd dossier qui dormait d’un sommeil profond sur la table du Procureur de la République et cette recommandation de l’OFNAC qui l’accablait ? Trois à quatre mois plus tard, Cheikh Oumar Hane est nommé, contre toute attente, Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Bachir, un président sérieux doit-il faire ça ? Vous êtes-vous fait entendre à l’époque, vous comme les autres ? Bachir, nous n’accepterons jamais qu’on fasse table rase de tout ce qui s’est passé pendant vingt-quatre longues années de nauséabonde gouvernance et nous enfermer dans les neuf mois des nouveaux gouvernants.
Et ces quelques exemples que j’ai pris sur l’ancien président-politicien ne sont que des peccadilles, comparés aux mille scandales qui ont jalonné sa nébuleuse gouvernance. Il en sera ainsi des exemples que je prendrai sur son prédécesseur et sosie, dans la prochaine contribution, celle-ci étant déjà longue ? En attendant, je rassure Bachir Fofana : ce n’est point sa personne qui m’intéresse, mais ce qu’il dit et écrit sur la gouvernance en cours depuis le 2 avril 2000. Des amis m’ont fait cas d’injures dont je serais la cible depuis la parution de ma première contribution. Heureusement que je ne lis pas de tels commentaires. Mais l’un de mes amis m’a fait parvenir par WhatsApp une vidéo où Bachir Fofana s’en prend sévèrement à ma personne. J’ai fait quand même les efforts nécessaires pour l’écouter. Voici ce qu’il dit de moi en walaf « Boo nekke ci deukk, te yaw xamoó sa bopp, tekki woó dara, Senegaal lifiy problèmes lepp, Senegaal lifiy problèmes lepp, mu man cee waxtaan, loola lepp mu teg kofa, ne ci bachir Fofana mu amul solo mii rek, lay wax. » Traduit en français, son discours donne : « Si tu vis dans un pays, en ignorant qui tu es vraiment, un pays où tu ne signifies rien, au lieu de te préoccuper du Sénégal qui en a tant besoin, tu fais de Bachir Fofana ta cible ». Il me remercie pour avoir publié une longue contribution avec pour titre : « Qui est ce Bachir Fofana ? » Il devait vraiment être hors de lui ; il ne retient même pas le titre de ma contribution qui est celui-ci : « Pour qui nous prend-il vraiment, ce Bachir Fofana ? » Deux titres totalement différents. Encore une fois, ce n’est pas sa personne qui m’intéresse.
L’animatrice de l’émission entre en jeu et dit : « Mody yaw la ame temps yi de ». Depuis ces temps derniers, tu es la cible de Mody, dit-elle. Certainement, elle n’a même pas lu la contribution. Un autre, un de ces « chroniqueurs » d’une télévision que je ne nomme pas, se fait entendre en posant une question : « C’est Mody qui a été condamné avec Papa Alé ? Oui, s’empresse de répondre Bachir : pour diffamation. Ils parlaient effectivement de la plainte de Cheikh Oumar contre Papa Alé et moi, Pape pour avoir publié un livre basé sur son lourd dossier de l’Ofnac moi, pour avoir préfacé le livre et y avoir qualifié sa gestion de scandaleuse ? Nous avons été effectivement condamnés en première instance et nos avocats avaient naturellement interjeté appel. L’audience s’est tenue il y a moins de deux mois et nous attendons la délibération. Comme Bachir Fofana et ses co-animateurs ignorent presque tout de la plainte, je leur apprends qu’elle date de février 2020 ?
Je précise bien en février 2020. Le 16 mars 2018, donc deux ans avant la plainte, j’ai publié une contribution à deux quotidiens : Walfadjri et La Cloche. Elle avait pour titre : « Communiqué de presse du Directeur général du Coud : un tissu de contrevérités ». C’était pour démentir catégoriquement la totalité d’un communiqué qu’il avait publié deux jours auparavant. La contribution est longue de cinq (5) pages où je mets en évidence tous les scandales qui ont jalonné sa gestion du Coud. Je supplie Bachir de faire l’effort de lire la contribution. Il comprendra, s’il est honnête, que je n’ai diffamé personne et devrait se poser aussi la question de savoir pourquoi ce M. Hane a attendu deux longues années pour porter plaine contre moi, parce que simplement j’avais préfacé un livre et traité sa gestion de scandaleuse ? Enfin je rappelle à Bachir que j’ai travaillé sur le dossier M. Hane, en ma qualité de Conseiller spécial de la présidente de l’Ofnac d’alors, Mme Nafy Ngom Kéïta, chargé de la lutte contre la corruption dans le système éducatif sénégalais. Je n’avais pas encore démissionné.
Bachir, j’arrête cette contribution ici. La troisième vous causera sûrement plus de soucis mais, dans tout ce que j’écrirai, vous ne lirez pas un seul mot qui fera penser à une injure. Moi, j’ai horreur des injures et préfère de loin les arguments.
L'ODYSSÉE NOIRE DE JOSEPH GAÏ RAMAKA
Son court-métrage "Wamè", tourné en noir et blanc, fait résonner les corps et les voix pour raconter l'indicible. Un voyage intense où la danse et le chant deviennent les vecteurs d'une histoire universelle
(SenePlus) - Dans un entretien accordé à RFI, le réalisateur Joseph Gaï Ramaka, Lion d'argent à la Mostra de Venise 1997, dévoile les contours de son nouveau court-métrage « Wamè », présenté au Festival de Clermont-Ferrand. Une œuvre en noir et blanc qui plonge dans les profondeurs de la mémoire collective africaine, entre tragédie et espoir.
Le titre du film, comme l'explique le cinéaste de 72 ans, puise ses racines dans la culture des Lébous, peuple de pêcheurs sénégalais : « Wamè est la force qui donne sa force à la tempête, ce qui fait mouvoir et bouleverser l'océan, ce qui provoque les grandes tempêtes », confie-t-il à RFI.
Le réalisateur construit son récit comme une véritable odyssée africaine, partant de la plage symbolique de Gorée. Les premières images sont saisissantes : des hommes au sol, torses nus, ramant jusqu'à l'épuisement, incarnent cette mémoire douloureuse. « Ces hommes-là sont le travail que je tente de faire sur les mémoires. Elles viennent du profond de l'océan, comme le wamè », explique Ramaka.
L'inspiration du film trouve son origine dans un classique du cinéma : « Cette histoire est née dans les cales d'un bateau, en 1914, dans les cales de E la nave va de Fellini », révèle le réalisateur. Un point de départ qui résonne tragiquement avec l'actualité : « Paradoxalement, les choses n'ont pas tellement changé. Aujourd'hui encore, des hommes meurent en mer, très souvent pas très loin des côtes. »
Le film traverse le temps et l'espace, évoquant aussi bien la Côte d'Ivoire et la Libye contemporaines que le massacre des tirailleurs de Thiaroye en 1944. Les témoignages rapportés sont bruts, sans artifices : « Ce ne sont pas des histoires que j'ai inventées. Ce sont des choses qui se sont réellement passées. Je n'ai pas changé un mot », insiste le cinéaste.
Pour porter cette histoire, Ramaka a fait appel au chanteur Mamadou Goo Ba, figure du Front culturel sénégalais. Le réalisateur voit dans la culture une force salvatrice : « Nous sommes convaincus que si l'humanité a des chances d'être sauvée, ça sera grâce à la culture partagée », conclut-il dans son entretien avec RFI.
À travers le chant et la danse, véritables « cris du corps » selon les mots du réalisateur, « Wamè » transcende le simple récit pour devenir une œuvre universelle sur la mémoire, l'espoir et la nécessité de la paix.