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29 novembre 2024
Femmes
LE SEXE EST-IL UNE CUISINE ?
Afin de retenir leurs hommes, les femmes, astucieuses à souhait, sont prêtes à tous les subterfuges. Même à introduire des produits nocifs dans leur intimité. Un nouveau concept «jongué» qui risque de créer à long terme, un réel problème de santé public
AICHA FALL & NDEYE FATOU SECK |
Publication 24/07/2019
Un soir de dispute derrière la porte de la chambre conjuguale, à portée de voix de la «awo», il lui avait crié : «J’ai l’impression de coucher avec un homme. Je n’ai plus aucune sensation. Ton vagin est trop large.» Maty en avait pleuré les larmes de son corps, meurtrie en seulement un an de mariage. Depuis, elle est entrée dans une colère froide et folle. De celle qui prend le temps de mariner au fond de l’âme. Et qu’on apaise que par une vengeance. Elle avait d’abord commencé par en parler avec quelques amies pour diagnostiquer le problème, puis avait frénétiquement cherché dans l’Internet le remède à la béance vaginale. «Vous serez surpris par le nombre de recettes qui existent pour resserer le vagin», chuchote-t-elle, en jetant un œil avide sur un gros citron jaune disposé sur un étal de produits pour femmes «jongué» au marché Hlm de Dakar, un lieu grouillant de vies et d’affaires. Ça et là de la table, du miel, du karité, de l’oseille de Guinée, du gingembre, des cristaux de menthe, des mixtures et des poudres de toutes les couleurs que la vendeuse, une femme de forte corpulence au teint incertain et au maquillage ocre, manipule en faisant des gestes discrets vers le bas-ventre. D’abord, ces produits sont faits pour la gastronomie. Mais pour les initiées comme Maty, il y a là tout un arsenal pour rendre «saf» (épicé) le sexe. Emmitoufflée dans un large voile aubergine, elle essaie de se fondre dans le décor de la rue. Vingt-cinq ans, visage harmonieux éclairé par deux grands yeux en amande, elle aurait pu être d’une grande beauté si elle s’était laissée aller à quelques coquetteries. Mais, les traits encore durcis par l’insulte de son mari, la jeune épousée est toute à son désir de prendre sa revanche sexuelle, quitte à transformer son vagin en cuisine. Au menu ce soir, une toilette intime d’eau citronnée suivie d’un suppositoire à base de karité et de miel, devrait permettre à son homme de déguster et d’en redemander. Et à son mariage de se stabiliser. C’est l’assurance de nombreuses Sénégalaises qui ont fini de transformer le vagin en cuisine, selon la nouvelle conception de l’art du «jongué».
Un plateau de condiments pour l’excitation, le bon goût ou le rafermissement vaginal
Une après-midi calme, dans une ruelle calme de la périphérie de Grand-Dakar, dans une maison calme. Assises au milieu d’un salon au style baroque, quatre jeunes dames discutent autour d’un plateau de produits. De temps en temps, des rires coquins troublent l’atmosphère privée de la rencontre. «J’entends souvent les femmes dire qu’elles ont un problème de sécheresse vaginale, mais moi, c’est le contraire. Mon problème est surtout comment donner un goût sucré à mon fluide», rigole Mame Marie en soupesant un pot de poudre blanc crème. C’est le produit numéro 3 du plateau, un mélange de sucre glace et de plantes naturelles censé faire mouiller et conférer une bonne odeur au vagin. C’est ce que dit la vendeuse, une jeune femme volubile, à la locution parfaite et à l’art de la persuasion consommé. Sa manière de placer sans l’air d’y toucher son métier dans l’agro-business, ses mises en garde répétitives contre la destruction de la flore vaginale, la mise en évidence de sa propre personne comme cobaye pour chaque produit, concourrent à rassurer les clientes et endormir leurs méfiances sur les composants et les dosages distillés. D’ailleurs, celles qui arrivent jusqu’ici n’en sont plus à ces détails. Pour l’essentiel, la clientèle est composée d’épouses désespérées par le manque d’appétit sexuel de l’époux. Dans un sursaut, elles viennent là pour sauver leur mariage. Et sont, pour la plupart, prêtes à tout essayer. À tout incorporer dans la chaleur de leur intimité pour le plaisir de leur partenaire. De la canelle, du sucre glace, du sel fin, de l’ail, de la menthe, du nep-nep, du gingembre, du miel, de la poudre de gowé, de la poudre de « ndir »… Au départ, Mame Marie, mariée depuis 5 ans, ne s’intéressait pas vraiment à cette cuisine d’un autre genre, mais depuis son accouchement l’année dernière, elle a senti un changement dans la manière dont son mari fuit les relations sexuelles. Sujette à de multiples infections, elle apprend, sur les groupes de femmes sur Facebook, à utiliser l’ail comme antifongique en l’insérant, le temps d’une nuit, au fond du vagin. «L’odeur était encore pire et mon mari n’a pas voulu m’approcher», se rappelle-t-elle avec dégoût au milieu de la conversation des «pour ou contre» dans le salon. Les ovules à base de karité et de nep-nep ont marché pour un temps, mais elles étaient trop salissantes pour les draps. En désespoir de cause, elle a atterri dans cette vente privée avec l’idée d’en repartir avec le produit numéro 3. Mais la vendeuse a tant et si bien vanté la qualité de ses condiments qu’elle s’est retrouvée avec toute une panoplie à tester pour l’excitation, le bon goût ou le rafermissement vaginal. Le secret de l’hôtesse est aussi simple que sournois. Elle insiste sur le côté bio de ses produits alors qu’aucune étiquette n’est visible sur les pots. Elle déconseille vivement toute incorporation dans le vagin alors que le produit numéro 10, fait dans une étrange mixture indéfinissable, est à cet effet. Et enfin, elle distille avec détermination et assurance des dosages qui sortent de nulle part. Elle dit sur le produit 5 : «Ce sont des écorces à faire en bain de siège avec 3 cuillérées de karité et de miel purs. Je vous conseille d’avoir un téléphone bien chargé pour faire passer les 45 minutes. Ça enlève les infections, les impuretés et ça adoucit l’intérieur du vagin.» Elle compterait même des Toubabs dans sa clientèle. Ce qui explique peut-être les prix exhorbitants. Alors qu’un sachet de poudre de «nep-nep» est vendu 200 FCfa dans les commerces habituels, le petit pot s’échange ici à 2 000 FCfa. Pareil pour le miel vendu à 1 000 FCfa pour un sachet de 20g ou encore le sachet de feuilles de «djeka» qui passe de 500 FCfa sur le marché, à 2 000 FCfa chez cette vendeuse. Des prix qui peuvent friser la folie lorsqu’ils sortent du cadre privé pour se retrouver exposer en boutique.
Des prix exorbitants
Posée sur une grande artère de la Patte d’Oie, cette boutique d’articles coquins est assez connue des femmes de Dakar. Exposés sur des étagères, des nuisettes affriolantes, des strings en bonbons, des sextoys, des tenues de policière, d’infirmière, des menottes et tout produit censé agrémenter le lit conjugual. Ici, les articles pour le vagin, telles les boules brésiliennes, les huiles chauffantes, le resserre-vaginal, sont soigneusement emballés et la vendeuse veille au grain. Contrairement aux ventes particulières et à leur origine inconnue, cette boutique surfe sur la vague du fournisseur officiel pour garantir à ses clientes des résultats sans conséquences. Même si là encore, les composants affichés sous forme de formules mathématiques, sont difficilement identifiables. Le moindre article ici se négocie à plus de 10 000 FCfa pour une utilsation à court terme. Des prix qui ne découragent apparemment pas la clientèle. «La plupart des produits pour le vagin sont en rupture, mais on en recevra la semaine prochaine», confie la commerciale. De manière générale, les femmes qui s’adonnent à la cuisine du vagin sont aussi peu regardantes sur les prix que les effets secondaires sur leur santé dans le long terme.
Une explosion de cancers gynécologiques d’ici 20 ans
A la clinique Nest, sise sur la Vdn, où le docteur Abdoulaye Diop, gynécologue, reçoit ce mercredi, l’ambiance est sereine. Dans la salle d’attente, un couple patiente, tandis que la secrétaire pianote sur le clavier de son ordinateur. Le calme ambiant est interrompu par l’irruption de Abdoulaye Diop. L’homme déboule comme un feu follet. Il est speed et a un emploi du temps millimétré. «C’est vous les journalistes ? Faites vite, mesdames. Je dois démarrer mes consultations de l’après-midi», embraie-t-il dès qu’il nous voit. Boule d’énergie, le gynécologue, fourré dans une chemise bleue sur un pantalon kaki marron, accueille dans son cabinet de consultation. Habitué à faire des lives sur les réseaux sociaux, Abdoulaye Diop, gynécologue, a toujours délivré des messages d’alerte pour prévenir et donner des conseils aux femmes afin qu’elles puissent lutter et prévenir efficacement les infections vaginales. D’ailleurs, il est le concepteur du hashtag #le vagin n’est pas une cuisine#. Un coup de gueule énoncé alors qu’il échangeait en direct avec ses patientes. «Ce jour-là, la conférence live portait sur les pertes blanches et beaucoup de femmes m’ont interpellé pour savoir ce qu’étaient les pertes blanches normales et celles pathologiques. Des questions revenaient en boucle comme : est-ce qu’il était bon, pour lutter contre les pertes blanches et les mauvaises odeurs vaginales de même que pour avoir un vagin ferme, d’utiliser des produits naturels comme de l’ail, du persil, des ovules de karité avec du miel et du sel, du gingembre, des feuilles de menthe et du ‘’nep-nep’’ (acacia nilotica). C’est hallucinant. Et là, j’ai explosé pour leur dire d’arrêter ! Le vagin n’est pas une cuisine !» Le mot est lâché et le hashtag lancé. Car, pour Dr Diop, les condiments de la cuisine ne sont pas destinés à être insérés dans les parties intimes. Des pratiques de la pharmacopée traditionnelle aux conséquences désastreuses comme les infections à répétition et les cancers qui ont connu une évolution fulgurante ces dernières années. A ce titre, le Fonds mondial, lors du lancement de la campagne de vaccin contre le Virus du papillome humain (Hpv), en 2018, a classé le Sénégal parmi les 20 pays au monde où le taux de cancer du col de l’utérus est le plus élevé. Chaque année, quelque 1 482 cas sont recensés et 858 n’en réchappent pas. Une situation alarmante qui pousse Dr Diop à multiplier les campagnes de sensibilisation, mais surtout à réitérer son alerte : «Stop, le vagin n’est pas une cuisine !» Surtout que ces produits dits naturels ne font d’effet que pour un temps donné. Sur le long terme, les femmes qui l’utilisent s’exposent à un déséquilibre de la flore vaginale et à des infections aggravées. Abdoulaye Diop : «Si on veut avoir une sensation de resserrement du vagin en utilisant de la menthe ou du gingembre, la physiologie de ces produits va créer une concentration des vaisseaux sanguins et forcément une sensation d’étroitesse du vagin. Mais l’effet est passager et entraîne une destruction de la flore vaginale. Cette destruction associée à une infection à Hpv est la porte ouverte au cancer.» Poursuivant, il enchaîne : «Sur 10 femmes qui viennent en consultation pour pertes blanches, au moins deux d’entre elles ont mis quelque chose qu’elle n’aurait pas dû mettre dans le vagin. Chaque semaine, j’en reçois 4 ou 5. Cela devient un problème de santé publique et cela devient même alarmant. Il y a une augmentation drastique du nombre d’infections vaginales.» Aussi, le docteur alerte sur les conséquences sanitaires d’ici 20 ans. «Cette génération de femmes qui utilisent ces produits dits naturels s’exposent, d’ici 20 ans, à plein de cancers gynécologiques. On aura beau faire des campagnes de sensibilisation et de vaccination, si elles continuent à agresser le vagin, les capacités de récupération et de cicatrisation du vagin seront dépassées. Et là, ce sera la porte ouverte à la dysplasie (malformation ou déformation résultant d’une anomalie du développement d’un tissu ou d’un organe, qui survient au cours de la période embryonnaire ou après la naissance).» Une femme avertie…
L’avis des hommes : Sans artifice, le plaisir dure plus longtemps !
«Vous aurez beau mettre tous les condiments de la cuisine dans le vagin, si votre homme veut aller voir ailleurs, il le fera. Ces astuces ne retiennent personne et causent plus de problèmes qu’elles n’en règlent. C’est une sorte de naïveté que certaines femmes ont.» L’argumentaire fait office de profession de foi. Il émane d’un homme averti et renseigne sur l’appréciation que la gent masculine se fait des astuces sexuelles utilisées par les femmes pour pimenter leur vie de couple et, par la même, fidéliser leur homme. Boubacar Hanne est marié depuis trois ans. Mais l’homme, qui savoure encore les délices de la vie de couple, ignore tout des produits utilisés par les femmes pour pimenter leur vie de couple. Avec ce jeune marié, le langage est de connivence. «Franchement de ma nuit de noce à aujourd’hui, je n’ai jamais prêté attention à ces astuces. Je ne saurais vous dire si mon épouse les utilise ou pas, parce que je ne sens aucune différence. Je ne m’attarde même pas sur ça. Mon but est autre», lance-t-il, dans un sourire entendu. Moustapha Sarr est d’un autre avis. Ce trentenaire, cadre dans une entreprise de la place, lui, l’a senti passer cette nuit où sa femme a testé des artifices de nuit. «C’était au bout de 2 ans de mariage. Cette nuit-là, madame a utilisé des feuilles de menthe et j’ai senti une petite différence, mais de moindre importance. Franchement, s’il s’agissait de choisir, moi je préfère sans ces produits. Parce que sans artifices, le plaisir dure plus longtemps.» Avis d’expert ?
"ATLANTIQUE" DE MATI DIOP AU GRAND THÉÂTRE DE DAKAR, LE 2 AOÛT
Le Grand Théâtre de Dakar va accueillir le 2 août prochain, à 19 h 30, une projection en "avant-première nationale" du film "Atlantique" de la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop, lauréate du Grand Prix du Festival de Canne
Dakar, 22 juil (APS) – Le Grand Théâtre de Dakar va accueillir le 2 août prochain, à 19 h 30, une projection en "avant-première nationale" du film "Atlantique" de la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop, lauréate du Grand Prix du Festival de Cannes (France), selon un communiqué parvenu à l’APS.
Le texte reçu de la maison de production sénégalaise "Cinékap" annonce aussi le séjour au Sénégal de la cinéaste franco-sénégalaise, de ce 22 juillet au 19 août prochain.
Mati Diop et d’autres lauréats du Festival de Cannes 2019 seront reçus par le ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop, mardi à 12 h 30, selon un communiqué de la Direction de la cinématographie du Sénégal.
Une projection du film "Atlantique" aura lieu à l’Université Cheikh-Anta-Diop de Dakar, le 5 août. La séance de projection sera suivie d’un débat dirigé par l’économiste et écrivain Felwine Sarr et le professeur Bada Ndoye, en présence des étudiants.
Des projections en plein air du même film sont prévues à Thiaroye (banlieue de Dakar), le 6 août, à La Médina, à Dakar, le 7 août, puis aux Parcelles Assainies et à Yoff (banlieue de Dakar), le 8 août.
"Atlantique", le premier long métrage de Mati Diop, revient sur la migration irrégulière et ses nombreuses morts causées par des naufrages en mer Méditerranée, empruntée par les migrants africains pour atteindre l’Europe.
Entre fiction et fantastique, "Atlantique" donne la voix aux femmes dirigées par l’héroïne Ada, amante de Souleimane, qui est mort en traversant l’océan Atlantique.
"J’ai voulu dédier ce film à une certaine jeunesse, d’abord celle disparue en mer dans l’Atlantique en voulant rejoindre l’Espagne. Et j’ai voulu aussi rendre hommage à cette jeunesse d’aujourd’hui vivante, pleine de vie", avait dit Mati Diop, le 16 mai dernier, à la fin de la projection du film à la 72e édition du Festival de Cannes.
De son court métrage "Atlantiques" (2010) au long métrage "Atlantique" (2019) en passant par son documentaire "Mille Soleils" (2013), Mati Diop évoque "un même mouvement" par lequel elle essaie d’investir et d’apprendre, de découvrir, d’interroger son pays, le Sénégal, qui la "fascine" et la "déçoit" tout à la fois.
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ET SI DIARRY SOW, LA MEILLEURE ÉLÈVE DU SÉNÉGAL VOUS ÉTAIT CONTÉE !
Une fille de 17 ans qui déjoue depuis 2 ans les statistiques aux examens et concours et impose son leadership dans le milieu scolaire Sénégalais - Rencontre avec ses parents pour comprendre son histoire et son amour pour les études
Le nom de Diarry Sow renvoie forcément à l’excellence. Une fille de 17 ans qui déjoue depuis 2 ans les statistiques aux examens et concours et impose son leadership dans le milieu scolaire Sénégalais. Du cycle primaire au lycée scientifique d’excellence de Diourbel, elle a toujours survolé les classements aux examens et concours auxquels elle participe, impossible de lui arriver à la cheville.
En plus du culte de l’excellence qu’elle a choisi comme cheval de bataille, la jeune fille a du compter sur le soutien inconditionnel de ses parents qui ont su, dès le bas âge, lui inculquer le courage, l’espoir et la confiance en soi, autant de valeurs qui sont les prémices puissantes de la réussite.
igfm.sn a rencontré les parents de Diarry pour comprendre l’histoire de cette dernière et son amour pour les études.
POPENGUINE, LÀ OÙ DES AMAZONES DÉFENDENT L'ÉCOLOGIE
Connue pour sa Vierge noire, auprès de laquelle les fidèles catholiques se rendent en pèlerinage, la ville est aussi le lieu d'une réserve naturelle reboisée et préservée depuis 1986 par des femmes pas comme les autres
Le Point Afrique |
Jane Roussel |
Publication 17/07/2019
Au cœur de Popenguine trône la plus vieille église chrétienne du Sénégal. Sa renommée s'est construite tout particulièrement autour de la Vierge noire, que le pape en personne est venu bénir et auprès de laquelle, depuis cent trente ans, les pèlerins se pressent le lundi de Pentecôte. En dehors de cela, le petit village, situé sur la Petite Côte, au sud de Dakar, semble tout à fait ordinaire. Avec ses échoppes en bord de la route, ses vendeurs à la sauvette, ses rues en terre battue, Popenguine ne se distingue pas des autres bourgades autour.
C'est en s'approchant de l'océan Atlantique qui la borde avec ses vagues roulantes que l'on découvre une de ses particularités : une falaise dans les tons ocre, unique en son genre dans la région. C'est là, perchée au-dessus, que s'étend sa réserve naturelle, un espace unique tiré de la déshérence par une initiative de femmes. C'est là un véritable trésor pour Popenguine, un trésor qui s'est bâti petit à petit contre la logique de décennies de déforestation provoquée par des habitants à la recherche de bois de chauffe. De quoi se rappeler cet épisode de la fin des années 1980, quand des femmes du village se sont levées pour initier une autre dynamique.
Quand Popenguine renoue avec son histoire marquée par des femmes
Toute l'histoire de Popenguine s'est construite autour de ses figures féminines. Sa Vierge noire, d'abord, sa figure protectrice surnommée « génie » Coumba Cupaam, qui aurait même donné son nom au village : Popenguine viendrait de « bopp » et « jinn » en wolof, qui signifie tête et, par extension, visage de génie. Aujourd'hui, c'est autour de sa réserve naturelle prise en charge en 1986 que les femmes marquent le village de leur empreinte.
Katy Ndione, actuelle cheffe de la zone protégée, se souvient : « Un jour de 1986, en allant chercher de l'eau avec un groupe de femmes, nous sommes tombées sur des agents des parcs nationaux dans la forêt de Popenguine. On leur a demandé ce qu'ils faisaient. Ils nous ont répondu On plante des arbres. Alors, nous leur avons dit : Pourquoi pas nous ? »
Et de reprendre en expliquant le contexte, et ce triste constat : « On s'était déjà rendu compte qu'il y avait un problème avec notre brousse. On savait que c'était de notre faute si les réserves venaient à manquer, mais on ne savait pas quoi faire. Quand on a rencontré les agents de parcs nationaux, on a tout de suite été partantes. » Après une réunion au village pour proposer aux autres personnes de les aider à retrouver leur forêt d'origine, un regroupement d'une centaine de femmes s'est formé. À l'origine, le projet est mené par Woulimata Thiaw, suivie de 128 femmes, et un seul homme. À la question de savoir pourquoi les hommes ne participent pas à l'initiative, Katy Ndione sourit et raconte les nombreux obstacles qui se sont dressés sur leur chemin.
Se prendre en main malgré le scepticisme des hommes
Comme elles n'ont à l'époque aucun savoir en la matière, elles passent de nombreux mois à suivre l'enseignement des rangers. Techniques de pépinière, assainissement, aménagement et protection… « Nous avons tout appris au fur et à mesure », explique Katy.
Par chance, le site est volcanique, et très fertile. Sur les 1 900 hectares, les femmes plantent des arbres fruitiers, des acacias, des cocotiers… Des espèces d'arbres autochtones et utiles à la vie du village. Petit à petit, les espèces qui avaient disparu de l'environnement reviennent. « On voit de plus en plus de hyènes, de gazelles ou d'oiseaux qui avaient déserté », explique-t-elle.
Mais, au départ, un problème se pose. Cette association ne plaît pas aux hommes du village, pas du tout convaincus de l'utilité du reboisement, et persuadés que les rangers sont là pour prendre leurs femmes. Katy reprend : « Nos maris ne voulaient pas qu'on travaille avec eux, ils disaient : Ils veulent vous mettre dans leur lit. » Avant d'ajouter : « On nous appelait les femmes singes. »
Le projet s'est progressivement consolidé...
Katy précise, avec beaucoup de fierté, qu'être mal vues ne les a pas empêchées de mener à bien leur projet ! Petit à petit, l'ambition de reboisement s'est étendue à 8 villages aux alentours pour bientôt réunir 1 555 femmes. Une guide de la réserve raconte : « Elles quittaient Popenguine avec des seaux d'eau sur la tête, grimpaient la falaise et allaient jusqu'à Guéréo et La Somone (des villages voisins) pour reboiser », plusieurs heures de marche au cœur de la brousse, sous un soleil de plomb. Derrière l'aspect climatique, il y a quelque chose de sacré dans la nature pour Katy : « Cette terre, on l'a empruntée, et on doit la sauver pour nos petits-enfants. » À Popenguine, « on dit souvent que la nature est dans nos sangs », continue-t-elle. Le travail est bénévole et éprouvant, mais, avec le temps, les hommes du village ont compris que les femmes disaient « la vérité » et se sont mis à participer.
... et s'est mué en un outil de prévention...
À travers les huit villages concernés, les habitants font de la prévention pour le développement durable dans les écoles, avant d'emmener les enfants aider à replanter, à ramasser le plastique qui s'échoue le long des plages. La prochaine plantation en date ? Dix mille cocotiers, avec pour objectif d'avoir terminé sous dix jours. En 1994, la Fondation Nicolas Hulot se rend à Popenguine et demande aux habitants de quoi le village a besoin pour continuer le reboisement. « On a dit qu'on manquait d'hébergements pour les gens qui voulaient venir nous voir. » Alors, la fondation a financé un campement touristique au sein même de la réserve. Les petites cases blanches circulaires ont un peu mal vieilli, mais l'accueil est exemplaire.
... et une source de revenus pour la communauté
Chaque sou des bénéfices permet de renforcer les structures, de développer le campement, d'ajouter un restaurant, par exemple, ou d'autres infrastructures. il permet aussi de financer tout un système économique et social. L'argent récolté sert aussi à financer l'éducation et la santé dans la réserve, via une mutuelle que les femmes ont créée. Un magasin de bonbonnes de gaz a ouvert pour offrir une alternative solide au bois de chauffe : « Si on dit aux gens de ne pas couper le bois, ils se demandent comment on va faire ? » explique la guide. Une association locale a été mise en place sous la forme d'une tontine. Les femmes donnent une somme d'argent régulièrement pour créer une cagnotte, celle-ci est distribuée à tour de rôle à une famille du village.
Dernièrement, de nouvelles préoccupations saisissent les Amazones. La terre est aride, beaucoup trop pour la saison. « C'est une catastrophe, on manque de pluies », explique la guide. Le point d'eau, censé contenir une réserve maintenue à flot jusqu'en mai, était déjà vide en janvier dernier. À l'approche de l'hivernage, les habitants s'inquiètent de ne pas voir arriver la pluie. En parallèle, la terre est trop salée, et la mer avance vite, provoquant l'érosion de la falaise sur laquelle est posée la réserve. Pour conserver les animaux, des abreuvoirs ont été mis en place, mais, si la situation s'aggrave, il faudra trouver de nouvelles options plus durables car, si une première partie du défi a été relevée, d'autres challenges se font jour. Or puisqu'il faut laisser un espace vivable pour les futures générations...
UNE CHEFFE DE CHANTIER PAS COMME LES AUTRES
À 52 ans, Léna Keïta est à la tête des travaux de rénovation de la gare de Dakar. Elle est surtout la première Sénégalaise à avoir autant de responsabilités sur un tel chantier
Le Point Afrique |
Jane Roussel |
Publication 17/07/2019
« Mademoiselle, attendez. Nous n'avons pas de femmes sur nos chantiers. Mais on va essayer. » L'histoire de la première femme cheffe de chantier du Sénégal a commencé avec cette phrase. Elle s'appelle Léna Keïta, elle a 26 ans, nous sommes en 1993. Elle vient de passer un entretien pour un stage avec Gérard Sénac, directeur de la filiale Eiffage à Dakar. Peu de temps avant, elle a décidé qu'il était hors de question pour elle d'être la femme au foyer que certains avaient déjà imaginé qu'elle serait.
Un parcours pas évident...
Léna est née à Dakar, elle vient d'une famille traditionnelle. Ses parents sont illettrés, mais ils aimeraient la voir faire des études. Après son bac, elle est sélectionnée pour une bourse d'études dans le cadre de la coopération sénégalo-algérienne. Le sujet de la bourse ? Le BTP. « Quand j'ai reçu ça, je me suis dit : mais pourquoi ils me mettent là-dedans ? » Malgré tout, elle part à Alger suivre la licence en bâtiment. Elle s'y plaît véritablement, les chantiers deviennent petit à petit sa « passion ».
Une fois la licence terminée, de retour sur sa terre natale, il est temps d'enfiler le casque de chantier et de se confronter à la réalité du terrain. Pas facile de trouver du boulot quand on est une femme dans ce milieu, surtout en Afrique, il y a 26 ans... Elle rigole, sa voix grave détonne, mais ses yeux se plissent à peine, elle n'a pas la moindre ride.
Son travail est très mal vu. Elle se souvient des trajets en bus en tenue de chantier, avec ses chaussures de sécurité, et les regards de travers qui se posaient sur elle. Même à la maison, « mes parents disaient : elle est partie étudier et maintenant elle rentre avec un jean sale ? » Sa réponse est nette : rien à faire du qu'en-dira-t-on. Elle est la seule de sa famille à avoir fait des études et à avoir des responsabilités aujourd'hui. Elle sourit, « je suis un pilier de la famille. Je suis très fière de ça ».
... malgré la chance du début
Elle reconnaît en être là (en partie) grâce à un coup de chance. Le 7 juillet 1993, le siège d'Eiffage Sénégal reçoit une lettre dans laquelle Léna a rédigé toutes ses motivations. Elle demande un stage. Le facteur croise Gérard Sénac par hasard devant la porte du bâtiment. Il lui remet l'enveloppe en mains propres. Intrigué par sa candidature, le directeur la convie à un rendez-vous dès le lendemain.
Elle commence peu de temps après en tant que stagiaire topographe dans les chantiers de l'armée française, pour trois mois. « On ne m'a pas choisie parce que j'étais une femme, au contraire ! » rebondit-elle. Il n'y a pas particulièrement de volonté de changer l'image de la femme africaine derrière cette embauche, il s'agit surtout d'un bon feeling. « C'est un truc de vieux, plaisante le patron d'Eiffage Sénégal, j'ai senti qu'il y avait du potentiel chez cette femme. » Cela dit, il se lance dans l'aventure avec beaucoup d'inquiétude pour celle qui devient vite sa protégée.
Elle s'impose comme femme sur les chantiers...
Gérard Sénac a les cheveux blancs et un costume impeccable. À bientôt 70 ans, il a toujours bien des heures de travail hebdomadaires à son compteur. Il vit et travaille en Afrique depuis 1973, il connaît les coutumes, d'où son appréhension pour Léna à ses débuts. « Ici, les femmes on les voit plus à la maison qu'à commander des hommes sur les chantiers », plaisante-t-il avec une pointe d'amertume. « Je ne m'inquiétais pas pour ses compétences, j'avais peur des autres hommes », insiste-t-il.
Léna ne décrit pas Gérard Sénac comme son patron, mais plutôt comme un membre de sa famille, après avoir été son mentor. Elle raconte qu'il l'a détectée, « il s'est dit : celle-là si on la pousse, elle ira loin ». L'homme de 17 ans son aîné la présente aux hommes du chantier : « Elle, c'est ma fille. Vous, c'est votre cheffe. Compris ? »
Les deux premières années ont été difficiles pour Léna. Elle se souvient de son premier affrontement avec un coffreur, sur le marché Kermel, dont elle gère la rénovation. Alors qu'elle lui demande de réaliser une tâche urgente, il l'ignore. Une fois, deux fois, trois fois. Jusqu'à lui lancer : « Arrêtes de nous faire chier, ta place n'est pas ici, mais au foyer, va préparer à manger. » Elle en informe immédiatement la direction qui renvoie le coffreur, pour donner l'exemple.
... malgré une lutte permanente
Être une femme sur un chantier est une lutte permanente. « À force de râler sur les chantiers, ma voix est devenue grave », ironise-t-elle. « Il n'y avait aucun signe de féminité chez moi. J'étais habillée comme les hommes avec qui je travaillais. Je me suis forgé un caractère. Un caractère d'homme », reprend-elle. « Si je n'avais pas eu ce caractère, j'aurais été écrasée, humiliée. » Elle a finalement réussi à prendre sa place, avec fermeté. Un de ses ouvriers, Mohammed, confie discrètement : « Entre nous, on l'appelle la dame de fer. Elle est juste, mais si on ne fait pas ce qu'elle demande, elle sort le fouet. »
« Un métier n'a pas de sexe »
Pour travailler avec Léna, il y a certaines règles à respecter. « Avec ceux ou celles qui sont sous mes ordres, je ne badine pas », commence-t-elle. La seconde règle ? Pas de retard accepté. « Je veux que mon équipe soit en place 30 minutes avant de commencer, pour boire le café ensemble », argumente-t-elle. Troisième règle : ne jamais laisser un travail mal fini, elle inspecte tous les travaux. Ses horaires ? De 6 h 30 à 22 heures en moyenne. Être une femme dans un monde aussi masculin nécessite d'en faire plus. « Parfois, un peu trop, j'ai dû la calmer ! » plaisante Gérard Sénac. « Les chantiers que l'on me confie sont mes bébés », explique-t-elle. Avec un travail aussi prenant, sa vie familiale a débuté tard. « Je me suis mariée en 2004 à 38 ans, j'ai eu mon enfant à 39 ans, j'étais très absorbée par mon métier. »
Aujourd'hui, Léna n'est plus la seule femme sur le terrain du bâtiment à Dakar. « Elle a été la première à vouloir recruter d'autres femmes. Aujourd'hui, j'ai des femmes qui conduisent des engins, des camions, plusieurs cheffes de chantier, des ingénieures, des collectrices de travaux… Les femmes sont sur le terrain », confie Gérard Sénac. Les mentalités évoluent, mais il reste du travail : Léna apprend aux femmes sous ses ordres à se forger leur caractère, à « montrer aux hommes qu'elles sont plus fortes qu'eux ». Elles sont essentielles sur les chantiers, « plus sereines, plus calmes pour gérer les problèmes quotidiens des travaux », selon Léna. Entre deux visites de présentation de la gare de Dakar, elle s'interrompt : « Oui, je suis féministe ! »
Si Léna a choisi de persévérer dans cette voie, c'est « parce qu'un métier n'a pas de sexe ». Elle insiste : « il n'y a pas de métier d'homme. Être conducteur de travaux, c'est possible pour tout le monde. » Vingt-six ans plus tard, elle est directrice de projets, appelée partout à travers le pays pour mener à bien des projets de constructions et de rénovations. Entre 2008 et 2013, elle a interrompu son travail pour Eiffage, au grand dam de son directeur. Elle est partie au Canada pour permettre à son fils d'obtenir la double nationalité. « Là-bas, j'ai vu des femmes peintres, ferrailleurs, maçons… elles sont partout. Alors pourquoi pas nous ? » Une bonne question qui illustre sa détermination à en faire plus.
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MBATHIO SE DÉVOILE
L’artiste, profitant du lancement de sa nouvelle mixtape intitulée « Da ma la nob si pet », revient sur son amour pour le foot, sa force, ses voyages, entre autres…
La chanteuse sénégalaise Mbathio Ndiaye vient de lancer dans les bacs le titre de sa nouvelle mixtape intitulée « Da ma la nob si pet ». Selon elle, c’est un sujet assez fréquent dans la discographie sénégalaise.
Ainsi, la chanteuse Mbathio nous fait savoir qu’elle n’a pas vécu l’amour en cachette. « La plupart des femmes vivent cela, en plus il faut que les sénégalais arrêtent d’être méchants pour déstabiliser les gens. On fait tout pour réussir. Légui dara frégué wouma parce que dagno sokor» (rien ne m’ébranle).
Dans cet entretien, l’artiste revient sur son amour pour le foot, sa force tranquille, ses voyages, entre autres…
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SEPT CHOSES À VOIR, LIRE OU ÉCOUTER SUR LES RÈGLES
Parler du cycle menstruel reste tabou. Mais de plus en plus de femmes et d’hommes s’emparent du sujet, font de la pédagogie et donnent la parole aux premières concernées
Le Monde Afrique |
Elvire Camus et Marie Slavicek |
Publication 09/07/2019
Parler du cycle menstruel reste tabou. Mais de plus en plus de femmes et d’hommes s’emparent du sujet, font de la pédagogie et donnent la parole aux premières concernées. Ci-dessous, une liste non exhaustive de choses à écouter, lire et voir sur les règles.
Ecouter. «Rouge comme les règles »
Le sang menstruel reste un impensé collectif. En quatre épisodes d’une heure, « LSD, La Série documentaire » de France Culture, retrace la grande histoire de ce tabou. Grâce aux témoignages intimes de nombreuses femmes, et à travers les analyses d’historiennes, de sociologues, d’artistes et de militantes, la réalisatrice Nathalie Battus et la productrice Juliette Boutillier lèvent le voile sur ce phénomène naturel, et interrogent sa place et sa perception toujours problématiques dans nos sociétés.
Voir. « 28 jours »
En trente minutes, le documentaire réalisé par trois jeunes journalistes (Angèle Marrey, Justine Courtot et Myriam Attia) et disponible sur YouTube, revient sur le fonctionnement des règles et la façon dont elles sont perçues. Trente (trop) petites minutes pour aborder de nombreux thèmes : les mécanismes du cycle féminin, la diabolisation du sang menstruel par les religions, les relations sexuelles pendant les règles, les douleurs et l’endométriose, la composition des protections hygiéniques, etc. Un film très pédagogue qui contribue à dédramatiser et démythifier le cycle menstruel.
Lire. « Ceci est mon sang »
Dans son livre Ceci est mon sang, petite histoire des règles, de celles qui les ont et de ceux qui les font (La Découverte, 2017), la journaliste Elise Thiébaut alterne entre anecdotes personnelles, faits scientifiques, éléments historiques, sociologiques et religieux pour constater, avec humour, à quel point les règles sont utilisées pour exclure les femmes de la société. En démontrant l’absurdité des tabous et des interdits liés aux menstruations, l’autrice tente de réconcilier les femmes avec leurs règles, et les invite à porter un regard bienveillant sur cet écoulement mensuel.
Ecouter. « Sang tabou »
Tout est parti d’une conversation entre copines. Un jour, Nina Almberg entend sa cousine et une amie parler du flux instinctif libre (FIL), une technique qui consiste à bloquer l’écoulement des règles avec le périnée, puis d’expulser le sang aux toilettes. Les tampons ? A risque. Les serviettes ? Trop incommodes. La coupe menstruelle ? Guère plus pratique. Alors, au final, pourquoi ne pas essayer le « FIL » ? Dans Sang tabou, un documentaire d’une vingtaine de minutes à écouter sur Arte radio, plusieurs jeunes femmes témoignent de la libération que représente, pour elles, cette méthode. Elles racontent comment, après quelques mois d’ajustage, il est possible de « prendre le pouvoir sur ses règles ».
Voir. «Period. End of Sentence »
« J’arrive pas à croire qu’un film sur les menstruations vient de remporter un Oscar ! » S’il fallait une preuve que les réticences à parler du sujet collectivement s’effritent, la voici : Period. End of the Sentence (« Point. Fin de la phrase », un jeu de mot en anglais entre period, qui signifie à la fois « point final » et « les règles ») a reçu cette année la statuette du meilleur court documentaire. Le film, réalisé par I’Irano-Américaine Rayka Zehtabchi, raconte le quotidien d’Indiennes qui vivent à Hapur et ont acquis une machine à fabriquer des serviettes hygiéniques. En vingt-cinq minutes, le documentaire parvient à saisir à quel point le prisme des règles permet d’aborder tous les sujets liés aux inégalités entre les femmes et les hommes dans nos sociétés. Fabriquer leurs propres protections hygiéniques permet non seulement aux femmes d’avoir une bonne hygiène intime pendant leurs règles, mais aussi de continuer à aller à l’école et même de parvenir à être indépendantes financièrement grâce à l’argent récolté de la vente de leurs produits. Cerise sur le gâteau, le film n’oublie pas les hommes – dont le regard est subtilement présent tout au long du documentaire – et montre à quel point il est primordial de ne pas faire des règles « une histoire de filles » pour parvenir à briser un tabou aux conséquences potentiellement dévastatrices.
Consulter. #Paietesrègles, Cyclique…
En octobre 2018, Axelle de Sousa, une jeune femme SDF brutalement confrontée à la précarité menstruelle, lance la pétition #Paietesrègles pour demander « que les protections hygiéniques soient prises en charge à 100 % par la Sécurité sociale, au moins pour les femmes les plus précaires ». « Il est urgent que les personnes précaires qui ont leurs règles n’aient plus à choisir entre manger ou s’acheter des protections », insiste-t-elle. « Nous avons tou·t·e·s le droit à l’hygiène et ce droit ne doit pas dépendre de la charité. » A ce jour, sa pétition a recueilli près de 50 000 signatures, et le hashtag #Paietesrègles s’est rapidement propagé sur les réseaux sociaux. Dès 2015, au moment des débats autour de la « taxe tampon », l’association Règles élémentaires s’était saisie de cette problématique en organisant des collectes de protections périodiques, redistribuées ensuite aux femmes sans abri et précaires. De son côté, Fanny Godebarge, a créé Cyclique, une nouvelle plate-forme collaborative entièrement consacée au cycle menstruel. On y trouve des articles scientifiques, des témoignages, ou encore des portraits de gynécologues et de sages-femmes.
Bonus. The Museum of Menstruation
Jadis installé au sous-sol de la maison d’un employé du gouvernement fédéral américain, Harry Finley, à Washington, le Musée des menstruations est aujourd’hui 100 % virtuel. Kitch, étrange et plein de recoins, le site Internet est, entre autres, une collection d’archives sur tout ce qui touche au cycle menstruel. Au hasard, cette page consacrée à des témoignages sur un sujet ô combien complexe : et vous, si vous aviez le choix, est-ce que vous voudriez avoir vos règles ?
Espace-Culture, par Serigne Saliou Guèye
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JULIANA CRÈVE L’ABCÈS DES TABOUS SOCIÉTAUX
EXCLUSIF SENEPLUS - Avec « Un choix impossible. Entre Chic, Chèque et Choc », l’écrivaine casamançaise met le doigt sur les drames que vivent certaines jeunes filles et qui malheureusement sont ensevelis dans le cimetière des secrets de la famille
Nouvellement arrivée dans le paysage de la littérature féminine sénégalaise, Juliana Diédhiou, diplômée en Tourisme et en Relations internationales, a écrit un ouvrage qui bouscule les codes et crève l’abcès de certains tabous familiaux voire sociétaux. Ainsi, elle met le doigt sur la plaie des drames cruels que vivent certaines jeunes filles et qui, malheureusement, sont ensevelis dans le cimetière des secrets de la famille au nom de la préservation d’une fausse stabilité familiale et d’un simulacre d’entente parentale.
« Un choix impossible. Entre Chic, Chèque et Choc », c’est le titre de l’ouvrage. Exit l’ère où l’homme pouvait collectionner les femmes, maintenant c’est la femme qui se préoccupe de collectionner les hommes à défaut d’en avoir un qui regroupe idéalement tous les 3 C !
Dans cet ouvrage, l’auteur Juliana Diédhiou, relate l’histoire d’une fille, Vimdie, orpheline de père et de mère depuis l'adolescence. Suite à un voyage chez sa grand-mère, Vimdie rencontre celui qu'elle va épouser, contre l'avis de toute sa famille. Après de nombreux déboires, leur mariage s'achèvera violemment, et Vimdie va, au fil des années, faire la rencontre de trois hommes, trois belles histoires. Entre l'homme bien éduqué, le puissant gentleman et l'artiste passionné, le cœur de Vimdie est en bien mauvaise posture. Qui choisira-t-elle ? Le chic, le chèque ou le choc ? Le dilemme est ainsi posé. Juliana indique des pistes de réponse à travers l’entretien qu’elle a bien voulu nous accorder dans « Espace-Culture », nouvelle émission culturelle de SenePlus en partenariat avec la télévision Africa7.
Espace-Culture est ouvert aux écrivains, artistes ou autres acteurs culturels qui veulent promouvoir leurs produits culturels.
ZOOM SUR LES PREMIÈRES DAMES DE LA CEDEAO
Si certaines sont discrètes et d’autres plus exubérantes, toutes exercent, à divers niveaux, le pouvoir qu’elles partagent parfois ostentatoirement avec leurs époux de présidents - Décryptage !
Si le Togo ne sera pas représenté à ce rendez-vous, Faure Gnassingbé à qui la presse locale attribue une multitude de conquêtes ne devrait pas se soucier de la chaise vide qu’il laissera à Niamey. Mahamadou Issoufou la fera occuper par l’une de ses deux officielles épouses. Ou Adama Barrow qui a fait de Fatoumata Bah la first lady gambienne au détriment de Sarjo Mballow. Alors qu’en prélude à la présidence tournante de la Cedeao par le Niger, une rencontre des premières dames de l’espace régionale est prévue les 6 et 7 juillet, nous consacrons un dossier à ces femmes qui, dans l’ombre, ont parfois plus d’influence sur nos dirigeants que la voix des peuples. Si certaines sont discrètes et d’autres plus exubérantes, toutes exercent, à divers niveaux, le pouvoir qu’elles partagent parfois ostentatoirement avec leurs époux de présidents. L’ordre est alphabétique, à la « patronymie » de leurs maris. Décryptage !
A Niamey, la tâche sera moins facile pour Lalla Malika Issoufou. C’est elle qui, coupant l’herbe sous le pied à sa coépouse, Aissatou, à pris l’initiative alors que la première « première dame » est seule, au nom du Niger, membre de l’Organisation des premières dames d’Afrique pour le développement (Opdad). Mais l’entourage de la seconde épouse de Mahamadou Issoufou prévient, « ici,c’est la Cedeao et non l’Afrique« . Le mari qui a voulu que les deux président conjointement la rencontre a été devancé là encore, par Lalla qui a déjà fait des milliers d’affiches pour l’événement, se mettant en vedette et ce, au prix du contribuable. A la veille du sommet de l’Union africaine (Ua) qui se tient dans le pays, le cabinet du chef de l’Etat a reçu la facture, bien salée. Mais cet événement est aussi un grand rendez-vous de mode, allant des styles simples aux plus truculents avec cette concurrence qui ne dit pas son nom, entre des femmes majoritairement sexagénaires. Certaines voyagent avec des dizaines de valises pour un court séjour et d’autres se déplaçant avec leurs stylistes ou habilleurs. Niamey que le Festival international de la mode africaine (Fima) a déjà érigé en capitale continentale de la mode ne peut que savourer l’occasion. Mais encore faudrait-il que nos « mamans » prévoient des tenues adaptées aux 45 degrés qui règnent dans la capitale nigérienne. A cette occasion, Afrika Stratégies France balancent un pan de lumière dans la vie de ces femmes qui, au sens propre comme figuré, tiennent nos dirigeants par… les couilles !
Rebecca Akufo-Addo, la complice (Ghana)
Très populaire auprès des Ghanéens, elle s’est illustrée par son naturel et sa propension à esquiver des pas de danse en public avec son mari. A 68 ans, elle parle comme son mari le français. Juriste et fille de juge, elle travaillera auprès de grandes firmes britanniques puis dans le secteur bancaire de son pays. C’est après sa retraite que son mari sera élu président. Elle n’apparaît nulle part dans les affaires publiques et ne dispose que d’un secrétaire, un assistant et deux conseillers en guise de cabinet. Bien que son père, Jacob Hackenburg Griffiths-Randolph ait été entre 1979 et 1981 président du parlement ghanéen, elle a su garder une certaine distance de la politique. Seule première dame africaine proche de Mélania Trump qu’elle a accueillie en 2018 à Accra, elle échange régulièrement avec l’épouse du président américain et passe une partie de son temps libre à trier les courriers de son mari. Un passe-temps pour celle qui aura été greffière et secrétaire juridique dans une vie passée. Elle est mère de quatre enfants dont Gyankroma qui lui ressemble trait pour trait est aussi celle qui se bat le plus, politiquement, aux côtés de son père.
Fatou Bah et Sarjo Mballow Barrow, la people et la glamour (Gambie)
Deux épouses pour Adama Barrow qui, dès le début de son mandat, a titré la première dame. Fulbée, une autre appellation de peulh, cette fille d’homme d’affaires épousera Adama, avec qui elle aura deux enfants, en 1997. Si le président a pris une seconde épouse, il a tout de même voulu que la première assume le rôle de first lady. Quoi de plus normal dans un pays où, son prédécesseur, Yayah Jammeh avait, en bon polygame, procédé de la ma même façon. Sa journée, elle la passe au service de la Fondation Fatoumata Bah Barrow qui lutte contre la stérilité des femmes dans le pays et ses activités de représentation. Avant d’être première dame, Fatoumata qui a fait l’essentiel de ses études en Gambie avait travaillé chez Elton Oil et Africell, une compagnie multinationale de téléphonie basée à Banjul et présente dans pas moins de quatre pays africains.
Quant à Sarjo Mballow, elle s’est vite rendue discrète et n’est visible qu’au cours de la compétition de football qui porte son nom et se tient annuellement. Tellement discrète que la presse locale se pose des questions, animant toutes les rumeurs à son sujet. Pourtant, cette femme qui a fait peu d’études tient un appartement à la résidence présidentielle et s’occupe, pendant que sa coépouse multiplie des rendez-vous mondains, de la cuisine présidentielle. Le mari s’efforce de passer autant de temps avec chacune des deux épouses, même si la presse lui attribue une préférence pour la première, très active dans les réseaux politiques et surtout, appréciée de Macky Sall, président du Sénégal qui a tout mis en œuvre pour installer le président élu pendant que son prédécesseur, Yayah Jammeh résistait.
Aisha Buhari, l’indomptable et l’insoumise (Nigeria)
Mariée à Mahammadu Buhari depuis 1989 alors qu’elle n’avait que 18 ans, c’est une femme de caractère qui afficha, dès le début, son indépendance de ton. En 2016, elle n’a pas hésité à menacer de ne « pas soutenir son mari à la prochaine présidentielle s’il ne change pas de politique« . Elle déteste les principaux collaborateurs de son mari et a tenté vainement d’imposer des hommes et femmes de son réseau. Petite fille de Ribadu, Premier ministre nigérian de la défense, cette esthéticienne originaire du nord-est a créé plusieurs salons de beauté dans le pays. Avec Aisha, le président de la première puissance économique africaine aura cinq enfants. Contrairement à Patience Jonathan qui l’a précédé au poste de First lady, elle n’a pas voulu disposer de coach ni de conseiller en communication et a accepté que son cabinet de First lady soit fermé. Parfois, son autoritaire président de mari se voit obligé de lui rappeler que sa place est à la cuisine. A 48 ans, cette cosmétologiste formée à Dubaï et à Londres est très proche de la famille de son mari et entretient de bonnes relations avec les autres enfants du président, nés d’un premier mariage. Elle a vainement cherché à imposer dans l’entourage présidentiel son frère Musa Halilu Ahmed, puissant chef traditionnel de l’état d’Adamawa. Si elle voue de l’indifférence à l’égard de Claudine, épouse du président du Bénin voisin qu’elle évite de rencontrer, elle trouve Patrice Talon « stylé » et le lui a fait savoir.
Djéné Kaba Condé, la méprisée (Guinée Conakry)
Kany Diallo et Mina Kone l’ont précédée dans les grâces du président dont elle est la 3eépouse. Alpha Condé l’a épousé le 21 décembre 2010, jour de son investiture. Cette sociologue orginaire de Kankan a exigé le mariage avant d’accéder au Palais avec ses deux filles et son garçon issus d’un premier mariage. La franco-guinéenne, de 20 ans plus jeune que le chef de l’Etat, est plutôt discrète et n’a pas voulu s’embarrasser de fondation ou autres structures. Spécialiste de l’information et de la communication formée à Paris VII, elle n’a jamais réussi à maitriser la com de son incontrôlable et impulsif époux. En épousant pour la troisième fois une peulh, ethnie qui lui est hostile, Alpha Condé vise aussi à travers le mariage une retombée électoraliste. Il ne permettra jamais à la première dame de la Guinée d’avoir la moindre influence au Palais. Et quand Mama Kanny Diallo, l’ancien épouse du président deviendra ministre, Djéné Kaba n’a pas droit au chapitre de la jalousie. « Tu la fermes ! » a rétorqué l’irascible président d’époux.
Ligia Fonseca, l’intransigeante (Cap-Vert)
Né en 1963, cette Mozambicaine naturalisée portugaise est l’une des meilleures avocates de son pays. Belle et soignée, elle aime les couleurs vives. C’est à l’Université de Lisbonne qu’elle rencontrera en 1987son futur mari qui sera élu président de son pays, le Cap-Vert en 2011. Depuis, rien ne les sépare. Et le rôle de première dame que son mari lui souhaite, elle n’en veut point. Elle continue de faire des consultations pour des entreprises internationales et a boudé le cabinet mis à sa disposition. Première femme à diriger l’association des avocats du Cap-Vert en 2001, soit 10 ans après son retour au pays, cette mère de trois filles passe ses soirées à écrire. Elégante, méticuleuse, ferme et rigoureuse, la bourgeoise de 55 ans tient aux bonnes manières et veut scinder sa carrière d’avocate de celle de son président de mari. Elle ne cède à rien, s’accroche à ses idées et refuse de se soumettre au protocole. Si elle n’aime guère les rencontres futiles de premières dames, la première dame nigérienne a insisté pour qu’elle soit à Niamey pour le sommet des First ladies qui s’ouvre ce 6 juillet.
Aissatou et Lalla Malika Issoufou, la géologue prudente et la « doctoresse » yoyo (Niger)
Octobre 2011 sera le mois le plus embarrassant pour Mahamadou Issoufou. Invité aux lancements de deux fondations différentes, son cœur aura balancé longtemps. Finalement, il ne sera à aucune des deux cérémonies. Alors que sous les conseils de son homonyme la princesse Lalla Selma du Maroc dont elle est proche, Lalla Makika décide de lancer Tattali Iyali, sa fondation, Aissatou, sa coépouse devrait inaugurer, quelques jours plus tard, les activités de Guri-La Vie meilleure. Le président du Niger est le seul chef d’Etat du continent, avec Adama Barrow de la Gambie, à avoir officiellement deux épouses. Qui ont des parcours similaires. La plus jeune, Lalla Malika qui parraine le Fima (Festival international de la mode africaine) au Niger, se met plus en avant tout en jouant la discrète. Sa carrure l’y a préparée. Médecin et spécialiste de la médecine tropicale formée entre Niamey et Paris, elle est aussi très politique. Tout comme elle, Aissatou a été formée au bercail et en France. Respectée géologue et diplômée de l’université de Nancy, elle se consacre à la lutte contre le paludisme et le Vih sida depuis l’accession au pouvoir de son mari. Par droit d’ainesse dans le mariage, elle sera seule membre de l’Organisation des Premières dames d’Afrique pour le Développement (OPDAD). Mais au-delà de leur coup de cœur commun, Mahamadou Issoufou, les deux premières dames sont toutes passionnées pour la politique. Actives militantes du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (pnds), chacune crée son réseau interne de femmes. Si Lalla dispose d’un puissant réseau de communication qui assiste discrètement son mari, entre le Niger et la France, Aissatou fait venir régulièrement des éminences grises au palais présidentiel. Si elle partage, avec son mari, spécialiste des mines, la passion de la géologie, cette femme de famille royale n’a jamais supporté l’arrivée d’une seconde épouse et ne manque pas, chaque fois qu’elle le peut, de prendre sa revanche sur Lalla, plutôt pudique et secrète. Pour le président, « avec les deux, il forme la trinité », car il insiste pour convaincre de ce qu’aucune ne vaut plus que l’autre.
A 59 ans, cette juriste originaire du Togo est aussi le lien entre Faure Gnassingbé dont Marc Christian Kaboré s’est toujours méfié et le président du Burkina Faso. Quand elle épouse en 1982 celui qui sera élu à la tête du Faso, elle venait d’achever son 3e cycle avec un Certificat en Administration des Entreprises à Dijon. Intellectuelle et grande lectrice, cette fille de professeur de médecine adore les séries de comédie burkinabé et entretient avec Sabine Mensah, la mère du président togolais des relations presque filiales. Les deux femmes sont originaires de la même localité. Dans la crise qui a secoué le Togo en 2017, elle a tenté d’obtenir pour son pays d’origine, le soutien de son président de mari sans y parvenir. Mère de trois enfants, celle qui a créé depuis 2006 l’association Kimi (parapluie) multiplie des initiatives pour l’assainissement du cadre de vie et la protection de l’enfance. Elle a poussé son mari à quitter le Congrès pour la démocratie et le progrès (Cdp) en 2014, en l’encourageant, dès 2012 à s’opposer à la modification de la Constitution par le président Compaoré. Quoi de plus normal pour une juriste anticonformiste qui, aujourd’hui encore, fait office de conseillère juridique pour son mari.
Aminata Maïga Keita, la maisonière (Mali)
Plus que discrète, elle ne s’ingère en rien dans les affaires de l’Etat et ne demande jamais aucune faveur à son mari. Très attachée aux appartements privés de la résidence présidentielle du palais de Koulouba, elle consacre du temps à la décoration et supervise elle-même la cuisine d’Ibrahim Boubacar Keïta. Fille d’Attaher Maïga, ancien ministre, elle a fait de brèves études à l’université de Nantes. Présidente de l’association Agir qu’elle a créée depuis 1994, cette femme pragmatique et très sensible déteste la politique. Passionnée de sport, elle est membre du Comité national olympique et sportif du Mali depuis deux décennies. Traditionnelle, elle prend chaque jour les nouvelles de ses quatre enfants, bien qu’ils soient majeurs et contraint, quand elle le peut, son mari à consacrer quelques weekends à la famille. Sa seule obsession, que son mari finisse au plus vite son second mandat pour qu’elle puisse passer davantage de temps à Bourem, sa ville d’origine dans la région de Gao, au nord du pays.
Fatima Jabbe Maada Bio, miss et cinéaste (Sierra-Léone)
Madingue née en Sierra-Léone, cette extravagante femme qui fit des études de cinéma à Londres est plus britannique qu’africaine. 2013 aura été la meilleure année de sa vie. Elle remporte le prix de la meilleure actrice aux Oscars africains de Washington ainsi que le Gathering of Africa Best (Gab). La même année, Julius Maada Bio l’épouse, lors d’un fastueux et privé festin à Londres alors qu’il ne savait pas qu’il serait, cinq ans plus tard, élu président de la République. C’est une femme de réseau qui a connu une immense prospérité dans le cinéma et le show biz après avoir été, en 2000, Miss Africa. Normal pour une femme qui, à plus de 40 ans, fait dix ans de moins. Mère d’une fille, elle tient sur elle, tout le temps, la photo de son fils, né en 2014 et décédé trois jours plus tard. Elle passe presqu’autant de temps dans son pays que dans la capitale britannique où elle tient une agence de production. Ses origines gambiennes (par son père) ont rapproché les deux pays. Son diplôme de journalisme décroché à l’université de l’art de London College en 2017 lui donne le plein droit d’avoir un œil sur la communication de la présidence qu’elle a toujours voulu contrôler.
Dominique Ouattara, l’alter égo (Côte d’Ivoire)
Cette française d’origine juive a presque autant d’influence que Alassane Ouattara qu’elle épousa en 1991 et ses protégés en ont conscience. Diplômée en administration de biens, elle est experte immobilière. Depuis 10 ans, elle est à la tête de la grande machine humanitaire qu’elle a créée, la Fondation Children of Africa qui l’occupe à plein temps. Son hobby, les grands diners de galas ou pompeux repas aux relents mondains. Si elle a vainement intercédé auprès de son mari pour que Guillaume Soro soit maintenu dans le système, elle a ses intouchables. Amadou Gon Coulibaly et Hamed Bakayoko. Avec Henriette Bédié, cette femme de 65 ans qui n’a aucun enfant pour le président ivoirien, a tenté un rapprochement entre leurs deux époux avant de se lasser. Elle insiste pour que son mari, presque octogénaire, ne se représente pas pour un 3emandat. C’est une véritable femme de pouvoir qui est au courant de tout. Et tient aux détails. A chaque remaniement, elle consulte la liste avant publication, donne son avis et il lui est déjà arrivé de ramener un ministre mis à la touche. Dans le social, elle aura été la première dame la plus impliquée dans divers domaines en Côte d’Ivoire avec un faible pour le groupe Magic system dont le leader, Asalfo avec qui elle échange régulièrement l’appelle « maman ». Et elle le lui rend bien, « mon fiston » réplique-t-elle. Elle passe rarement deux jours sans prendre des nouvelles du groupe musical.
Marième Faye Sall, la pouvoiriste (Sénégal)
La première dame sénégalaise est une véritable femme de pouvoir ou l’est devenue au fil des années. Car, quand elle épousait en 1992 Macky, elle n’était qu’une belle adolescente ludovicienne (habitante de Saint-Louis) qui n’avait pas encore le baccalauréat. Elle a insisté pour avoir un bureau au Palais présidentiel ainsi qu’un cabinet pléthorique. Depuis, cette ingénieur proche de Alioune, sulfureux frère du président accablé par des accusations de grandes corruptions, fait aussi dans le business où elle a imposé plusieurs membres de sa famille sur de juteuses affaires d’Etat. Méticuleuse, elle a insisté pour lire et corriger, à ses goûts, la biographie qui lui est consacrée sur le site internet de la présidence du Sénégal. Avec « Servir le Sénégal », sa fondation, elle mène sa lutte contre la pauvreté, notamment dans les domaines de la santé où l’accès à l’hémodialyse pour ceux qui en ont besoin la préoccupe. Pieuse, elle assiste des démunis pour réaliser leur pèlerinage à la Mecque, l’un des cinq piliers de l’Islam. Elle veille à ce que son mari fasse ses prières et s’informe, grâce à quelques proches qu’elle a installés dans le système, sur ceux qu’il voit entre deux rendez-vous officiels.
Claudine Talon, la superstitieuse (Bénin)
A la tête d’une fondation depuis l’élection de son mari, Claudine ne lâche pas non plus l’affaire. Si elle a fait construire écoles et dispensaires dans le pays, cette chrétienne très superstitieuse qui croit que le pouvoir de son mari « vient de Dieu » l’a soutenu contre vents et marées dans son chavirement autocratique. Proche de la secte dissidente de l’église catholique appelée Banamè, elle a financé pendant longtemps Parfaite, la gourelle autoproclamée Dieu avant de se rétracter. Depuis, l’église sainte de Jésus de Banamè connaît une traversée du désert et plusieurs de ses comptes sont bloqués. Mère des deux seuls enfants de Patrice Talon (Lionel et Karen), elle entretient une forte amitié avec Jeannette qui a épousé Paul Kagamé depuis 1989. Son confident, Olivier Boko est l’un des hommes les plus influents du système Talon et même si on ne la voit jamais au palais, ses demandes sont perçues par son mari comme des ordres. « Comme tu voudras.. » aime-t-il conclure avec elle les discussions.
Rosa Teixeira Vaz, la vice-présidente (Guinée Bissau)
Sa fondation, Rosa Vaz lui tient à cœur. Elle lui consacre tout son temps au point d’agacer son mari qui fait face à une crise politique qui n’en finit point. Ancienne hôtesse de l’air, elle ne lâche pas tout de même le président. Tout comme Dominique Ouattara de la Côte d’Ivoire, elle est la vice-présidente. Discrètement et dans l’ombre de son mari, elle décide de l’essentiel, suit de près la gestion de la crise par la Cedeao au sein de laquelle elle a de bons contacts. Femme de réseaux, elle est plus passionnée par le lobbying et la politique que par l’humanitaire. Très féministe, sa fondation lui permet néanmoins de multiplier des rencontres sur la jeune fille africaine, quoi de plus normal pour cette mère poule pour ses trois enfants.
Clar Weah, la pieuse (Libéra)
Américaine originaire de la Jamaïque, cette chrétienne évangélique, qui avait voulu entre temps devenir pasteure, est animée par une foi en Dieu sans pareil. Ancienne fonctionnaire de la Chase Bank où elle rencontrera son mari venu ouvrir un compte, elle se passionnera très vite pour l’Afrique ainsi que pour la politique. Mère de trois enfants (Georges avait un garçon avant de la rencontrer) dont Timothy, 18 ans, est déjà footballeur professionnel. La journée de Clar est rythmée par les messages codés qu’elle échange avec son mari et la prière. Elle insiste pour faire sa dernière prière de la journée avec Georges. Elle voyage régulièrement en Floride, où elle possède un restaurant haïtien et une épicerie exotérique au détriment de sa Jamaïque natale à laquelle son époux semble plus attaché qu’elle. Si l’afrodescendante déteste les diners mondains, elle tient en l’occurrence à préparer les repas pour le président et surtout, concocte des crêpes et gâteaux à longueur de journée.
"ON N'EST PAS AUSSI RESPECTÉES QUE LES HOMMES"
La superstar américaine Megan Rapinoe a regretté samedi que la FIFA ne se soucie pas suffisamment du football féminin. Les finales de la Copa America et de la Gold Cup se joueront dimanche, comme celle du Mondial, une idée « calamiteuse » selon elle
À la veille de la finale de la Coupe du monde féminine, dimanche, à Lyon (17 heures), Megan Rapinoe s'en est de nouveau prise à la FIFA, qu'elle accuse d'avoir eu l'idée « calamiteuse » de programmer deux autres finales le même jour, celle de la Copa America (21 heures) et celle de la Gold Cup entre les États-Unis et le Mexique (3 heures du matin, dans la nuit de dimanche à lundi).
« On ne sent pas aussi respectées que les hommes, a répété la cocapitaine des États-Unis. C'est la finale de la Coupe du monde, on devrait annuler tout le reste ! Je ne sais pas comment on a pu en arriver là, comment ils ont pu ne pas y penser. » Ce n'est pas la première fois que Rapinoe dénonce la politique de la FIFA, qui s'était défendue en arguant que la programmation de ces trois finales le même jour allait focaliser l'attention sur le football.
« Les gens sont prêts à travailler pour donner au foot féminin la place qu'il mérite. C'est juste une question de volonté » - Megan Rapinoe
Assaillie de questions samedi, la star américaine s'est aussi désolée que l'augmentation annoncée du prize-money de la Coupe du monde féminine (de 30 milliards cette année à 60 millions en 2023) ne fasse en fait que creuser le fossé avec les hommes, qui se partageront 440 millions de dollars au Qatar en 2022 (contre 400 millions en Russie l'été dernier)...
« C'est pour ça qu'on dit qu'on ne se sent pas suffisamment respectées, que la FIFA se fout du foot féminin, s'est emportée Rapinoe. Je comprends que le foot masculin soit bien plus avancé financièrement. Mais si elle se souciait vraiment de nous, elle ne laisserait pas le fossé se creuser. Elle ne programmerait pas trois finales le même jour. Les ressources sont là, les gens sont prêts à travailler pour donner au foot féminin la place qu'il mérite. C'est juste une question de volonté. »
À la question de savoir ce qu'il faudrait pour que le foot féminin ne tombe pas dans l'oubli après la Coupe du monde, Rapinoe a répondu « de l'argent, de l'argent, de l'argent ». « On a besoin d'argent de la FIFA, des Fédérations, des publicitaires, des sponsors, des détenteurs de droits, a-t-elle insisté. On a besoin que des investissements soient faits dans les infrastructures, dans la formation des jeunes filles et des entraîneures. Ce n'est pas en rehaussant les budgets alloués au football féminin de quelques dollars chaque année qu'on y arrivera. Il faut miser sur l'avenir. Je crois qu'on a prouvé, année après année, Coupe du monde après Coupe du monde, qu'on était dignes de cet investissement. »