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30 novembre 2024
Femmes
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AU NOM DES FEMMES D'ICI ET D'AILLEURS
Alors que le monde entier venait de célébrer le 8 mars la journée internationale des droits des femmes, journée commémorative des combats pour l'égalité et l'émancipation des femmes, la Télévision Futur Média a rendu hommage la gente féminine de partout.
Alors que le monde entier venait de célébrer le 8 mars la journée internationale des droits des femmes, journée commémorative des combats pour l'égalité et l'émancipation des femmes, la Télévision Futur Média a rendu hommage la gente féminine de partout. Suivez dans cette vidéo, la chronique d'Abdoulaye Cissé qui a porté la plume de la rédaction.
JUSTINE MANGA, PREMIÈRE FEMME MAIRE DE NYASSIA
Son élection alimente toujours des débats à Ziguinchor où leadership politique féminin peine encore à s’affirmer. Mais cela ne surprend guère tous ceux qui ont suivi la trajectoire de cette battante
Jean Diatta Correspondant permanent à Ziguinchor |
Publication 09/03/2022
Justine Manga est une femme pas comme les autres. Elle est l’une des deux femmes, avec la Secrétaire d’Etat Victorine Ndèye, qui ont remporté les élections municipales de leurs localités, dans le département de Ziguinchor, lors des dernières consultations. Ce qui a fait d’elle maire de la commune de Nyassia, située à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Ziguinchor.
Abordant l’élection sous la bannière de la coalition UCS-mboolo, dirigée par Abdoulaye Baldé, cette dame, née dans le petit village de Katouré qui a longtemps subi les affres du conflit casamançais, a ainsi mis fin au règne sans partage des hommes à la tête de cette commune en devenant la première mairesse. Son élection alimente toujours des débats à Ziguinchor où leadership politique féminin peine encore à s’affirmer. Mais son élection ne surprend guère tous ceux qui ont suivi la trajectoire de cette battante qui s’est battue énormément pour l’émancipation et l’autonomisation de la femme casamançaise particulièrement et sénégalaise en général. Elle a fait très tôt de choisir de s’investir en zone rurale pour émerger ensemble avec ses sœurs villageoises, malgré un BTS en commerce international qu’elle a acquis à Dakar.
Cette quadragénaire, qui occupait déjà le poste de deuxième adjointe au maire de l’équipe municipale sortante, a cru en son destin et a visé visant plus haut lors des dernières locales et elle a eu gain de cause en s’imposant devant tous ses adversaires et notamment face au maire sortant Mamadou Diallo qui était le candidat de la mouvance présidentielle et non moins protégé de Benoît Sambou, le président du CNDT. Mais se hisser là où elle est aujourd’hui, la collaboratrice de Abdoulaye Baldé, qui est originaire d’une région (la Casamance) où les femmes sont souvent reléguées au second plan dans les instances de décision politique à cause peut-être des traditions, a dû parcourir un chemin souvent semé d’embûches en se forgeant dans les organisations féminines qui ont beaucoup pesé dans la balance pour son élection. Après l’obtention de son Brevet de Technicien Supérieur (BTS) en commerce international au lycée technique Maurice Delafosse de Dakar, elle a pris le risque de revenir au bercail au lieu de tenter sa chance à Dakar où il est plus facile de s’insérer. Elle s’engage à servir les femmes de sa localité.
Un retour à succès au bercail :
‘’J’avais décidé de revenir dans ma région et particulièrement dans ma commune rurale de Nyassia, pour servir les femmes de mon terroir, de mon département et de ma région. Abandonner tout à Dakar et rentrer au bercail, pour une fille qui a un certain niveau d’études à l’époque, ça n’a pas du tout été facile. Au moment où les autres filles qui avaient le même cursus rêvaient de travailler dans la capitale ou d’émigrer, moi, mon ambition était de venir servir et je ne l’ai jamais regretté. Beaucoup de gens n’ont pas compris mon choix. Certains dont des membres de ma famille s’étaient même fâchés contre moi. Mais moi je savais déjà ce que je faisais’’, a -t-elle confiée à la presse, après son sacre, précisant que c’est à la fin des années 2 000 qu’elle est retournée au bercail et a commencé de s’investir dans les organisations de promotion féminine en apportant son expertise à ses mamans et sœurs du Bayotte (une contrée de l’arrondissement de Nyassia). Elle souligne que son ambition, c’est permettre à ces femmes d’atteindre l’autonomisation et surtout de sonner pour l’éveil des consciences pour un leadership féminin fort, dans cette zone où les orientations sont exclusivement décidées par les hommes. Elle commence, alors, par gérer l’épargne commune des femmes afin que ces dernières puissent obtenir des prêts pour développer de petites activités génératrices de revenus. Chemin faisant, elle est élue après secrétaire générale de la Fédération des femmes de la commune de Nyassia avant d’être cooptée par l’Organisation non gouvernementale Usoforal, dirigée par une autre battante en l’occurrence Seynabou Male Cissé qui œuvre beaucoup pour le retour de la paix en Casamance pour diriger un projet d’autonomisation des femmes dans sa zone de Nyassia. Une mission qu’elle a remplie avec une totale satisfaction, relève Fatou Diallo Guèye, responsable genre de cette organisation, ‘’Je me disais qu’il était hors de question que j’échoue. J’avais les compétences requises et j’y ai mis toutes mes forces pour arriver à ce résultat’’, se réjouit aujourd’hui la nouvelle mairesse de Nyassia qui révèle que parallèlement à ce challenge, elle poursuivait sa carrière politique qu’elle avait commencée au sein de l’UJT, lorsqu’elle était étudiante à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Et la domination de l’arène politique de sa contrée par les hommes ne la décourage pas poussée qu’elle est par son envie débordante de faire germer un leadership féminin politiquement inexistant dans le Bayotte. Et les prouesses qu’elle n’a cessé d’accumuler dans ce rude combat pour l’autonomisation des femmes du Bayotte et, audelà, de toute la région de Ziguinchor, ont fini par lui donner un leadership et une légitimité qui l’ont poussée à revoir ses ambitions à la hausse. Autrement, elle s’est dit du poste d’adjointe elle peut devenir maire titulaire. Ayant bénéficié d’un fort soutien des femmes de la contrée et des autres communautés de la contrée qui croyaient en ses capacités managériales, elle a été portée à la tête de la mairie de Nyassia le 23 janvier dernier, devenant ainsi la première femme mairesse de la commune de Nyassia. Elle peut aujourd’hui se glorifier d’être aujourd’hui d’être la première femme de la commune de Nyassia et aussi l’une des premières femmes élues à la tête d’une collectivité territoriale de la Casamance naturelle.
À rappeler qu’elle a émigré, entre temps, du Pds à l’UCS de Abdoulaye Baldé avec qui elle compte poursuivre le compagnonnage. Visera -t-elle quelque chose lors des législatives de juillet prochain ? Si telle est son ambition, elle va falloir en découdre encore avec les hommes qui sûrement chercheront toujours à se tailler la part du lion. Mais l’ardeur des hommes ne fait pas peur apparemment à Justine Manga qui s’est donnée pour mission de se battre toujours se battre pour franchir tous les obstacles afin d’émanciper la femme.
«LES FEMMES SE DEMANDENT CE QU’ELLES GAGNENT À FORMALISER LEUR BUSINESS»
Yacine Dia Ndiaye, fondatrice de la plateforme «Ma Féminité», promeut l’entrepreneurial des femmes en Afrique francophone, revient sur les écueils qui freinent l’ascension de ces dernières dans les affaires
Dans cet entretien, la fondatrice de la plateforme «Ma féminité», qui promeut l’entrepreneurial des femmes en Afrique francophone, revient sur les écueils qui freinent l’ascension de ces dernières dans les affaires. Regrettant le fait qu’elles soient beaucoup plus présentes dans le secteur informel, Yacine Dia Ndiaye a soutenu que de nombreuses femmes pensent qu’elles n’ont aucun intérêt à formaliser leurs activités.
«L’AS» : Les femmes sont en général très dynamiques et travailleuses au Sénégal. Mais vivent-elles dignement de leur travail ?
YACINE DIA NDIAYE : C’est vrai qu’il y a un réel dynamisme à saluer à ce niveau; mais cela ne suffit pas pour vivre décemment. Il faut être dans la pérennité et savoir que quand on met en place un business, il faudrait qu’il soit à forte valeur ajoutée et qu’il réponde vraiment aux besoins du marché. Il faut aussi et surtout être dans l’optique de créer une entreprise viable et génératrice d’emplois.
Comment évaluez-vous aujourd’hui l’entrepreneuriat féminin dans le pays ?
Les femmes sénégalaises ont toujours été entreprenantes et actuellement on voit de très belles avancées, de l’innovation et de la valeur ajoutée dans ce qu’elles font. Mais, il y a encore beaucoup de défis à relever notamment l’accès à l’information, les mécanismes de création d’entreprise et autres opportunités. L’accès à la terre notamment dans les zones rurales est également une vraie préoccupation. Sans compter les difficultés d’accéder aux crédits. A vrai dire, les femmes se rabattent le plus souvent dans les microcrédits dont les taux d’intérêts sont assez élevés. Elles ont également des problèmes de compétences techniques et managériales afin de pouvoir continuer à innover et à répondre aux besoins du marché. Il faut ajouter dans la foulée les barrières socioculturelles. Donc, il y a pas mal de freins qui sont liés à l’entrepreneuriat féminin.
Les femmes investissent plus le secteur informel. Qu’est-ce qu’il faudrait pour inverser cette tendance ?
En effet, dès qu’on parle d’entrepreneuriat féminin, on pense directement au secteur informel. Les femmes sont beaucoup plus présentes dans ce secteur-là. Et c’est dommage. Notre combat au quotidien, c’est de pousser les femmes à formaliser leurs activités entrepreneuriales pour pouvoir bénéficier des avantages que cela procure. Mais, il y a pas mal de barrières qui nous empêchent d’y arriver. Les femmes se demandent souvent ce qu’elles gagnent vraiment à formaliser leur business. Elles sont aussi très réticentes dans tout ce qui est fiscalité. Ces entrepreneures éprouvent énormément de difficultés en ce qui concerne les paperasses administratives. Par exemple, pour qu’une femme qui est dans une zone rurale, il faut qu’elle parte au niveau départemental ou régional pour créer juste son entreprise. Donc, il faudrait encore décentraliser pour faciliter l’obtention de papiers administratifs. Et on voit que l’Etat commence à faire beaucoup d’efforts dans ce sens.
Quel plaidoyer faites-vous pour une meilleure prise en compte des femmes dans le domaine des politiques publiques dédiées l’entrepreneuriat ?
Nous voudrions qu’en termes de politiques publiques que l’Etat renforce les capacités entrepreneuriales des femmes à travers des formations et des mentorats en prenant en compte les barrières linguistiques. C’est aussi faciliter l’accès au financement en développant les compétences financières et les instruments financiers qui seront mis en place. Il faut promouvoir également l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée et l’accès à la protection sociale.
QUAND LES FEMMES PRENNENT LE POUVOIR DANS LA PRESSE
Certaines ont souvent dénoncé la domination masculine dans les médias. Mais depuis quelques années, on voit un assaut des femmes sur le journalisme, certaines occupant même de hautes responsabilités dans les rédactions de grands groupes de presse
Souvent certaines activistes des medias dénoncent la domination masculine dans le secteur des medias. Mais depuis quelques années on voit un assaut des femmes dans le journalisme, certaines occupant même de hautes responsabilités dans les rédactions de grands groupes de presse ou sont tout simplement des patronnes de presse.
De l’époque des premières journalistes de la presse comme Annette Mbaye D’Erneville, Sokhna Dieng, Elisabeth Ndiaye en passant par Diatou Cissé, Jacqueline Fatima Boucoum, Ggnagna Sidibé ou encore Minielle Barro à aujourd’hui, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Des batailles aussi manifestement gagnées.
Et le métier de journalisme attire davantage les femmes qui jouent un rôle prépondérant dans la diffusion de l’information et restent aussi de grandes vigies de la démocratie sénégalaise. Ces 20 dernières années, le pays a traversé plusieurs secousses dans la marche de sa démocratie avec des crises politiques d’envergure qui ont fait trembler la nation. La plus récente est celle de mars 2021. Mais si le pays entier était assis sur une poudrière, les femmes journalistes étaient comme les hommes en premières lignes pour donner des informations fiables, en risquant de leur vie. Par ailleurs force est de constater aussi qu’elles sont dépositaires désormais de grandes responsabilités dans les medias.
Rédactrice en chef, chef de desk, Dirpub …
Les femmes sont au cœur du dispositif dans la presse à commencer par votre canard préféré. En effet la rédaction de l’AS est dirigée par Hawa Boussou. Capitalisant plus d’une quinzaine d’années dans la presse, Hawa a été formée à Sud quotidien par Feu Babacar Touré, Demba Ndiaye, Latif Coulibaly et les autres grandes plumes de Sud qui ont fait les beaux jours de cette profession mais aussi par l’ancien directeur de publication de l’AS Mamadou Talla.
Ancienne du journal l’Observateur, Hawa Bousso est aussi effacée que talentueuse. Au journal Enquête aussi, une femme a pris les rênes de la rédaction en la personne de Bigué Bop. Longtemps sous l’aile du regretté Jean Meissa Diop à Walf Grand place , elle a fait notamment ses preuves dans la presse culturelle. Aujourdui, c’est elle qui coordonne la ‘’team ‘’ du journal Enquête.
La radio Sud Fm est chapeautée par une dame en l’occurrence Ndeye Marieme Ndiaye. Réputée être quelqu’une de très compétente et professionnelle, les reportages de la première radio privée qui a vu passer tant de brillants journalistes du Sénégal doivent avoir en amont son aval. Idem pour Awa Diop Ndiaye de Walfadjri ou encore Evelyne Mandiouba de la SNTV qui occupent des postes de responsabilités dans leurs groupes respectif.
Pour sa part Maimouna Ndour Faye a hissé la barre plus haute. Après était présentatrice de plusieurs émissions politiques, la journaliste a créé son groupe de presse. Et sa télé la 7tv qui prend de plus en plus de place dans le paysage médiatique trace son sillon. Sans oublier toutes ces femmes journalistes qui sont cheffes de Desk dans les rédactions ou qui ont des chaines YouTube très suivies sur les réseaux sociaux.
CES PORTEFEUILLES ET PERCHOIRS QUI RÉSISTENT ENCORE AUX FEMMES
Dans les différents gouvernements du Sénégal indépendant, elles peinent à occuper certains ministère de souverainetécomme ceux de l’Intérieur, des Finances et de la Coopération, de la Défense...
La Femme, socle de la société ! Une source de vie qui mérite d’être fêtée tous les jours. Un seul jour ne suffisant pas, la date du 08 mars a été choisie à titre symbolique. Officialisée en 1975 par les Nations Unies, la Journée internationale de la femme est l’occasion de rappeler le combat pour l’effectivité des droits des femmes. C’est une journée de manifestation mais aussi de bilan sur la situation actuelle des femmes.
C’est en Russie que la Journée des femmes connaît son regain : en 1913 et en 1914, la Journée internationale des ouvrières y est célébrée. Et quelques années plus tard, le 8 mars 1917 ont lieu, à Petrograd (aujourd’hui Saint-Pétersbourg), des manifestations d’ouvrières que les bolcheviques désignent comme le premier jour de la révolution russe. Dès lors, une nouvelle tradition venait d’être instaurée : le 8 Mars sera l’occasion pour les partis communistes de mobiliser les femmes. Après 1945, la Journée des femmes est officiellement célébrée dans tous les pays socialistes (où elle s’apparente à la fête des mères !). Cependant, c’est Clara Zetkin, une enseignante, journaliste et femme politique allemande, qui est la réelle instigatrice de la Journée internationale des femmes. Ainsi, à la suite de l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark et la Suisse…, la journée s’est généralisée surtout avec son officialisation, en 1975, par les Nations Unies. Depuis, elle est célébrée partout dans le monde et de nombreuses femmes sont montrées en exemples à l’occasion de cette date dans leurs pays et à l’échelle internationale.
Au Sénégal, alors que la tradition leur a toujours accordé une place de choix, les femmes ont été obligés de se battre pour le respect de leurs droits, après les indépendances et les lois nationales (Code de la famille…) qui les ont reléguées au second plan. Résultats, les conquêtes et acquis sont nombreux. Il en est ainsi, entre autres, notamment de la loi sur la parité qui même si elle ne règle pas tous les problèmes est une avancée non négligeable, la puissance paternelle qui cède la place à l’autorité parentale, le droit de la femme à donner la nationalité à ses enfants et son conjoint de nationalité étrangère...
Auparavant, au Sénégal les femmes ont marqué de leur empreinte l’histoire du pays et on les retrouve désormais dans toutes les instances de décisions ou presque, aussi bien niveau national et qu’international, où elles ne cessent de faire leurs preuves. De la santé à l’économie, en passant par le sport, le social, la politique, la culture, elles sont souvent des exemples partout où le devoir les appelle. Au plan politique et de la gouvernance, elles sont élues locales, maires, présidentes de Conseil départemental, parlementaires, ministres, Premier ministre (Mame Madior Boye et Aminata Touré dit Mimi). Aussi les retrouve-t-on à la tête de différentes Hautes institutions étatiques comme le Conseil constitutionnel (avec Mme Mireille Ndiaye) le HCCT, le CESE, le HCDS, etc. Quid du secteur de la défense et de la sécurité où elles sont désormais dans tous les corps habillées du Sénégal ?
Mieux, dans le domaine sécuritaire, madame le Commissaire Anna Sémou Faye, ancienne directrice de la Police de l’Air et des Frontières au ministère de l’Intérieur, deviendra la première à diriger la Police nationale. En 2013, alors âgée de 55 ans et mère, la commissaire Anna Sémou Faye a été choisie pour son expérience, sa rigueur et son intégrité Directrice générale de la Police nationale. La dignité et la bravoure de ces femmes sénégalaises nous rappelle les femmes de Nder. Ces vaillantes dames qui, par souci de préserver leur dignité de femmes libres, ont combattu l’envahisseur maure allant jusqu’au sacrifice ultime, en cette date mémorable du «Talatay Nder».
Symboles de la résistance féminine, elles ont préféré mourir en martyre plutôt que d’être réduite en esclaves. Ce fut également le combat d’Aline Sitoé Diatta, “la Reine de Kabrousse” qui a incarné, en Casamance, la résistance contre la colonisation française, ‘’une vraie jigene jou meun goor’’. Il est cependant à noter qu’en dépit de la qualité de la ressource humaine dont regorge la gente féminine et des acquis significatifs, certains postes importants résistent encore aux. C’est ainsi que, dans les différents gouvernements du Sénégal indépendant, elles peinent à occuper certains ministère de souverainetécomme ceux de l’Intérieur, des Finances et de la Coopération, de la Défense...
Même si avec les l’expériences de Mimi Touré alors nommée Garde des Sceaux ministre de la Justice, et actuellement Aïssata Tall, première femmes ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, l’espoir est permis. Et pourquoi pas avoir une femme présidente de l’Assemblée nationale ou présidente de la République ?
LES FEMMES DE NGOYE PRÔNENT LA CRÉATION D’UN CENTRE COMMERCIAL
Assemawo Diaw, adjointe au maire a reçu les doléances des femmes pour freiner l’exode rural
Les femmes de la commune de Ngoye ont célébré hier, mardi 8 mars 2022, la Journée mondiale de la femme. Une occasion pour Mme Assemawo Diaw, adjointe au maire de Ngoye de poser leurs doléances.
«Nous voulons plus de considération pour les femmes. Les femmes peuvent faire toutes les tâches que les hommes exécutent. Nous avons exposés des produits de transformation de céréales locales. Tous ce que nous devons importer existe dans notre terroir. Nous remercions la première dame, Mme Mareme Faye Sall qui nous a accompagné dans la formation sur les produits locaux». Et elle poursuit : «nous voulons d’autres formations sur le maraîchage, même si on sait que la qualité de l’eau pose problème».
Et Mme Fatou Tarte, la secrétaire du mouvement Emergence de Ngoye de renchérir : «nous lançons un appel au ministre de la Femme pour qu’elle accompagne les femmes de Ngoye car nous sommes confrontés à un problème de financement et de formation. Nous voulons également être formés sur la gestion financière et administrative mais également la création d’un Centre commercial parce que les femmes, après la récolte, rencontrent beaucoup de difficultés pour écouler leurs produits. Elles sont obligés d’aller à Dakar pour écouler leurs produits».
FAIS DES ENFANTS ET TAIS-TOI
implants, Contraceptifs injectables, pilules, préservatif... Les méthodes de contraception restent assez diversifiées, mais beaucoup de femmes n’osent pas aborder le sujet avec leur conjoint, de peur de faire voler en éclats le foyer
Au Sénégal, comme partout ailleurs dans le monde, les femmes mariées ont le droit de faire leurs propres choix et de décider de faire des enfants ou non, à quel moment et leur nombre. Cependant, la réalité est tout autre. Elles sont confrontées à des obstacles d’ordre financier et structurel pour avoir accès à des produits contraceptifs et notamment à la contraception d’urgence.
Dispositifs intra-utérins, implants, contraceptifs injectables, pilules, préservatif masculin, spermicides et préservatif féminin, méthodes permanentes comme la stérilisation féminine et masculine… Les méthodes de contraception restent assez diversifiées, mais beaucoup de femmes n’osent pas aborder le sujet avec leur conjoint, de peur de faire voler en éclats le foyer. Entre pesanteurs sociales, manque d’autonomie financière, puissance paternelle, les femmes sont souvent obligées de faire des enfants. Bon gré, mal gré !
‘’Vous avez vu mes enfants, on dirait que je les ai tous eus le même jour. Je suis fatiguée d’accoucher sans espacer les naissances. Mon époux ne cesse de m’insulter quand je lui parle de contraception. Pis, il en parle à sa mère qui m’insulte elle aussi. Alors, j’ai ma stratégie pour échapper aux grossesses’’, témoigne Salimata Niane, 16 ans de mariage, six enfants, toutes des filles. Pour éviter d’être une machine de fabrique d’enfants, n’osant plus demander de l’argent pour la contraception, elle avait pris l’option de refuser tout rapport sexuel pendant ses périodes fécondes. ‘’Cela le mettait en colère et il passait la nuit dehors. Mais je devais résister, parce qu’il y va de la santé de nos enfants’’, ajoute la jeune femme.
Compte tenu des limites de cette stratégie, hantée par la possibilité de nouveaux accouchements, Salimata a finalement décidé de prendre de l’argent sur la dépense quotidienne pour se procurer une méthode contraceptive en cachette. Pendant ce temps, son mari, lui, continue de rêver d’un septième enfant, un garçon. ‘’Il me dit de consulter un médecin. Il pense que je n’arrive plus à concevoir. Mais je lui ai dit qu’il faut tout laisser entre les mains de Dieu’’, explique Mme Niane, un brin espiègle.
Rosalie Ndour vit presque la même situation que Salimata. Après le mariage, elle a été contrainte de démissionner de son travail, à cause d’une première grossesse difficile. Pour cette jeune dame qui ne veut pas vivre aux dépens d’un homme, le choix n’a pas été facile. Mais elle n’avait pas le choix, tout en espérant retrouver son poste après l’accouchement. Hélas ! Sept mois seulement après ce premier accouchement, la voilà une nouvelle fois enceinte. Elle décide alors d’abandonner son rêve de travailler pour s’occuper de ses deux bouts de chou. Mais afin de se prémunir et d’assurer un bien-être à sa progéniture, Rosalie a opté pour une méthode contraceptive sans en parler à son mari. Elle se défend : ‘’Je ne suis pas obligée de lui en parler. Il l’a mal pris au début, mais a fini par comprendre. Il faut que les hommes comprennent qu’on n’est pas obligées tout le temps de les consulter sur des choses nous concernant. J’ai le droit de consulter un médecin, quand je veux, car il s’agit de ma santé. C’est la même chose en matière de santé de reproduction. Il y a énormément de femmes qui meurent dans les salles d’accouchement. Il faut que les hommes sachent qu’en refusant aux femmes ce droit d’espacer les grossesses, ils les mettent en danger sans le savoir.’’
A l’instar de Rosalie, Diana Diatta a décidé de faire un break, après deux accouchements acquis coup sur coup. En effet, alors qu’elle était en congé pour la première fois après sept ans de travail, elle a eu son premier bébé. Avant de reprendre le boulot, elle est encore retombée enceinte. Une grossesse très difficile, qui a failli non seulement lui coûter son emploi, mais aussi la vie. Dans la salle d’accouchement, Diana a, en effet, eu des complications. Les médecins lui ont fait une césarienne d’urgence pour récupérer l’enfant. Cela fait maintenant huit ans. Depuis, elle utilise une contraception pour gérer sa carrière. ‘’Les gens doivent savoir que le taux de mortalité maternelle est très élevé. Il est inadmissible que des femmes continuent à perdre la vie en donnant la vie. Il est temps que nous les femmes pensions à nous, à nos carrières professionnelles, entre autres. Aujourd’hui, pour recruter une femme, les sociétés hésitent, parce que tout le monde pense que les hommes sont plus productifs. Pendant que nous donnons naissance tous les ans, les hommes, eux, travaillent. C’est injuste. Nous avons les mêmes droits’’, conseille-t-elle.
‘’Parfois, on oublie que nous avons les mêmes droits que nos époux’’
S’il y a des femmes qui mettent en avant leur propre santé pour justifier leur besoin d’espacer les grossesses, d’autres invoquent leur travail pour se défendre. Aïcha Diop est hôtesse de l’air. Elle a un garçon âgé de 5 ans. Pour le moment, elle ne veut pas entendre parler d’un autre enfant. D’ailleurs, confie-t-elle, son travail ne le lui permet même pas. Et c’est la priorité. ‘’Je ne peux pas associer ce travail avec la maternité. Un enfant suffit. C’est pourquoi j’ai fait une contraception. D’ailleurs, je peux rester des mois sans le voir. Dans la vie, tout est question de choix. On ne doit pas limiter notre avenir au mariage ou à la conception. La femme est libre de ses choix. J’ai des ambitions, une carrière à gérer. A quoi ça sert aussi de faire des enfants si on ne les voit pas ou on les voit rarement ? Tant que mon mari me comprend, le reste je ne gère pas’’, explique Aïsha Diop qui travaille dans une compagnie aérienne arabe.
Et jusque-là, cela semble être le cas. Le mari la comprend, même si lui aurait souhaité avoir plus d’enfants, après neuf ans de mariage. Mais les règles du jeu ont été fixées dès le début de la relation. Ayant rencontré celui qui devait être son mari dans les avions, elle lui a dès le départ fait part de l’importance qu’elle accorde à son emploi. Ce dernier de témoigner : ‘’C’est après notre lune de miel que ma femme m’a informé de son désir d’utiliser des contraceptions. Elle venait de changer de compagnie. Du coup, elle ne voulait pas tomber enceinte et ça se comprend. Aujourd’hui, nous avons un fils de 5 ans. J’en veux d’autres, mais c’est elle qui conçoit et elle est en mesure de savoir ce qui est bien pour sa santé. Moi, je la soutiens’’, précise Abdou Fall, non sans relever que l’accès à la santé de la reproduction est un droit pour la femme et qu’il faut le respecter.
L’argent, le nerf de la guerre
Si Diana a eu le choix, d’autres n’ont pas eu cette chance. N’ayant pas une certaine autonomie financière, elles sont obligées de discuter avec leur conjoint, afin d’obtenir l’argent nécessaire à l’achat des produits contraceptifs. Oureye Lô témoigne : ‘’Juste avant de tomber enceinte de mon dernier enfant, j’étais allée dans un centre de santé pour profiter de la semaine de gratuité de la contraception. Mais je suis arrivée trop tard ; la semaine de gratuité était terminée. J’avais demandé à mon mari de l’argent. Déjà, en temps normal, quand on demande de l’argent pour certaines dépenses, c’est tout un problème. Vous imaginez alors quand c’est pour des produits contraceptifs.’’
A l’instar d’Oureye, Astou Ndiaye, vendeuse de jus de fruits, est elle aussi confrontée aux mêmes difficultés. Si elle avait les moyens de se payer des produits contraceptifs, confie-t-elle, elle n’aurait pas eu autant d’enfants. A 25 ans, mariée à un homme polygame, elle compte déjà six enfants. Elle déclare : ‘’J’ai eu mon premier enfant à 21 ans. Il y a moins d’un an de différence entre les enfants. Ce n’est qu’au quatrième que j’ai connu la contraception. Au début, mon mari s’est opposé en soutenant qu’il me répudierait, si je fais la contraception. Par la suite, quand il s’est rendu compte qu’il devenait de plus en plus difficile de les prendre en charge, il a accepté. Mais il a dit que si je tombais malade à cause de la contraception, j’assumerais toute seule.’’
Ainsi, Astou supporte toute seule les coûts de sa contraception. Avec l’argent qu’elle obtient de la vente de jus de fruits, elle nourrit aussi ses enfants. ‘’La contraception, soutient-elle, coûte cher. Il y a des moments où j’ai des difficultés pour renouveler ma contraception, car je n’ai pas d’argent. Si j’avais eu l’information plus tôt sur la contraception, je n’aurais jamais eu six enfants. Les maris, ici, prennent toutes les décisions de la famille, même sur la contraception. Je souhaite que la contraception soit rendue gratuite.’’
Alors que la question divise la société, que certains hommes rechignent à permettre la contraception à leurs épouses, d’autres estiment que la femme devrait pouvoir prendre ses propres décisions. ‘’Moi, j’ai laissé le choix libre à ma femme. C’est elle qui n’a pas voulu faire la contraception, mais nous avons des naissances espacées. Il faut que les gens comprennent que c’est un droit. La femme, si elle le désire, peut faire le planning familial, même sans l’aval de son mari. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. J’ai vu un couple se séparer à cause des méthodes contraceptives’’.
Le coût de la contraception
Fatou Fall est sage-femme d’Etat. Elle soutient être témoin d’atteinte aux droits humains ou de violences infligées par les maris aux femmes, parce qu’elles avaient recours à la contraception. ‘’Les hommes, dit-elle, sont souvent en colère lorsqu’ils s’aperçoivent que leur épouse ou des membres de la famille de sexe féminin ont recours à un moyen de contraception… Un d’entre eux est venu me dire une fois : ‘C’est moi qui l’ai épousée. Il faut donc mon autorisation avant qu’elle ne puisse utiliser la contraception.’ Les hommes pensent que la contraception peut être un subterfuge pour l’infidélité’’, renseigne-t-elle.
Selon sa collègue Binta Dème, outre le facteur argent, il y a les normes sociales qui posent aussi problème. ‘’Même dans le cas où elles ont de l’argent, l’autorisation du mari est nécessaire et ce dernier a du mal à donner son accord. Il y a une mère qui utilisait [l’implant] Norplant. Elle est venue au centre pour que l’implant soit enlevé, en disant que son mari s’est opposé à la contraception. Les infirmiers ont discuté avec elle pour lui dire que c’était son choix d’insérer le Norplant. Le lendemain, elle est revenue pour insister afin qu’on le lui enlève. Les infirmiers ont finalement accepté. Après une discussion, elle explique que la situation était houleuse à la maison’’, rapporte Binta.
Embouchant la même trompette, la comptable Jeanine Mendes, 30 ans, trois enfants, raconte une mésaventure qu’elle a failli avoir à cause d’une histoire de contraception. Elle revenait d’une causerie organisée par les femmes de son quartier sur la question, aux Parcelles-Assainies. ‘’Lorsque mon mari a lu les fiches (sur la contraception), il m’a accusée d’avoir utilisé ces méthodes sans son avis. J’ai essayé de lui expliquer comment je les avais obtenues. Il a failli me battre devant les enfants. Il a brûlé toutes les fiches. Pourtant, je travaille, mais comme mon mari n’en veut pas, j’ai laissé tomber. Je préfère utiliser la méthode de comptage de mes menstrues. Je maitrise bien cette méthode. Je suis très soumise’’, confirme Mme Mendes.
Pour leur part, Sylvain Sambou et Abdoulaye Faye imputent certaines réticences à la pauvreté. ‘’La plupart des hommes, précise M. Sambou, sont durs de nature et la pauvreté les rend amers. Quand une femme aborde la question de la contraception, les hommes estiment qu’il s’agit d’une dépense supplémentaire qui s’ajoute à la liste déjà longue des dépenses du ménage’’.
DES ACTRICES DE L'ÉCONOMIE NOCTURNE
Elles commencent leurs journées quand beaucoup reviennent du travail. Elles sont vendeuses de couscous, de sandwichs, de bouillie de mil… Ces dames ont choisi de faire vivre l’économie nocturne, en bravant l’insécurité, les rigueurs du climat
Elles commencent leurs journées quand beaucoup reviennent du travail. Elles sont vendeuses de couscous, de sandwichs, de bouillie de mil… Ces dames ont choisi de faire vivre l’économie nocturne, en bravant l’insécurité, les rigueurs du climat, le confort au prix de faibles revenus.
18 h passées de quelques minutes aux alentours de l’église Saint-Paul de Grand-Yoff. Un pousse-pousse décharge des bagages dans un coin de la rue. Dans les colis, se distinguent des ustensiles de cuisine et des provisions, sous le regard vigilant de Yaye Awa. La dame est vendeuse de sandwichs et vit cette routine depuis 27 ans. Seulement, en cette période finissante du mois de février où Dakar affiche les 18 degrés, les choses ne semblent pas simples pour cette veuve. Emmitouflée dans une tenue traditionnelle avec un pullover noire en dessous, elle tente tant bien que mal de tenir, face à la rigueur du climat.
Ses charges familiales ne lui en laissent pas le choix. ‘’J’ai des enfants à qui je dois gérer la scolarité. Ils ont perdu très tôt leur père et je ne peux me reposer sur personne pour leur prise en charge’’, indique Yaye Awa. Elle commence tous les jours son activité à cette heure avant de regagner tard son domicile. ’’Je suis là à partir de 18 h et il arrive que je travaille jusqu’à 3 h ou 4 h du matin. Et au cours de la journée, je prépare les mets à vendre le soir. Je commence à fonctionner à partir de 11 h, tous les matins’’, explique-t-elle.
Comme Yaye Awa, beaucoup de femmes ont choisi la nuit pour exercer leurs activités et faire tourner la petite économie. Loin des bureaux climatisés ou des grands magasins luxueux, elles participent, à leur manière, au développement de la société et à l’épanouissement de leurs familles respectives. En ces moments de conjoncture où beaucoup peinent à assurer les trois repas quotidiens, ces dames ont eu l’intelligence d’exploiter cela en offrant des dîners chauds à moindre coût.
Toutefois, elles semblent être oubliées par les bailleurs et autres investisseurs. En effet, elles bénéficient rarement, pour ne pas dire jamais de financements ou de soutiens. N’ayant pas, pour la plupart, fait des études, elles ne savent pas par quels moyens contracter des crédits pour développer leurs activités. Celles qui sont informées ont parfois peur de contracter des prêts, à cause des taux d’intérêt jugés exorbitants. Yaye Awa explique, à cet effet, que les intérêts qui leur sont imposés sur ces financements sont insoutenables, ce qui fait qu’elle préfère se débrouiller avec ses propres moyens.
Problématique des financements
Une posture qu’elle partage avec Fatou Kiné, vendeuse de couscous à une intersection, non loin du marché de Grand-Yoff. Elle avoue aussi n’avoir jamais reçu de financement ou une quelconque proposition allant dans ce sens. À quelques minutes de 19 h, la dame, qui vient juste d’arriver sur son lieu de travail, défait ses bagages pour servir ses premiers clients. Son couscous est encore tout chaud. De la petite fumée se dégage de la grande bassine en plastique dans laquelle elle l’a stocké. Fatou Kiné est dans ce commerce depuis cinq ans. Elle tient en même temps un restaurant qui roule jusqu’à 17 h. ’’Nous sommes là tous les jours jusqu’à 00 h, en temps de fraîcheur, alors qu’en période de canicule, on peut aller jusqu’à 1 h du matin’’, informe la jeune mère de famille.
Durant ce dernier week-end qui précède le début du carême chrétien (NDLR : le reportage est réalisé quelques jours avant le début du carême) à Grand-Yoff, des parents se ruent vers les vendeurs de déguisements et autres accessoires pour la célébration de la fête du Mardi Gras. Les allées du marché sont fortement fréquentées ; plus denses que d’habitude. En plus de l’animation assurée par la sonorisation des baffles des commerçants, les moteurs et klaxons des véhicules y ajoutent une touche de charivari. Loin de ce vacarme, Maïmouna et Coumba sont tranquillement installées devant des seaux en plastique rempli de bouillie de mil. La soirée avance ; bientôt 21 h passées et les clients viennent à compte-gouttes, en cette soirée du samedi. Ce soir, la clientèle préfère peut-être les restaurants.
Maïmouna reconnait avoir bénéficié une fois d’un financement de 250 000 F CFA, en 15 ans d’activité. Une somme qu’elle a pu rembourser, mais n’est pas très sûre de vouloir renouveler l’expérience. ‘’Je rechigne à prendre un nouveau prêt, malgré les nombreuses relances du bailleur, parce que les choses ne marchent plus comme avant. Il faut dire qu’on a des promesses de financement qui peinent à être concrétisées’’, dit-elle, tout en se levant de son siège pour servir un client.
Maïmouna indique, en outre, que le prêt lui avait permis de fructifier son fonds et de faire avancer ses activités. ’’Mon financement m’avait permis d’acheter une quantité importante de mil dans mon village natal. Une partie a servi à faire de la bouille pour mon commerce, tandis que j’ai revendu l’autre partie. J’ai pu verser l’argent à temps, tous les deux mois, comme c’était prévu’’, renseigne-t-elle avec fierté.
Avec ces années passées dans ces différents secteurs, il serait judicieux de se demander si nos interlocutrices ont pensé à faire des économies ou des réalisations, afin d’agrandir leur commerce. A ce sujet, Fatou, vendeuse de friandises et autres fruits saisonniers, explique qu’elle n’a pas pu réaliser quelque chose depuis bientôt 20 ans qu’elle tient son commerce. La mère de cinq enfants fait savoir que ses recettes journalières sont divisées en trois parties. Une, dit-elle est réinvestie dans son commerce, l’autre dans les dépenses quotidiennes et le reste est réservé aux tontines et, à terme, cet argent va servir à prendre en charge la famille. ’’Grâce à mon activité, j’arrive à subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille. J’ai été trop tôt orpheline de mère et mon père, qui est finalement décédé aussi, était trop vieux ; le travail était ma voie de salut pour tenir. Je le fais depuis que je suis toute jeune. Je me dis que mon commerce n’est pas assez rentable pour me permettre d’épargner’’, se résigne-t-elle.
Pour Yaye Awa, sa plus grande réalisation avec son commerce est d’avoir assuré l’éducation de ses enfants. Elle a pu les soutenir jusqu’à l’université. ’’J’ai toujours payé leur scolarité. L’un a préféré malheureusement tout abandonner en classe de terminale pour travailler dans la maçonnerie. Il voulait à tout prix me venir en aide. J’ai également perdu mes parents. Donc, je devais aussi prendre en charge mes jeunes frères et tous se fait grâce à cette activité. Quand j’y pense, je n’éprouve aucun regret. Je me dis qu’un jour, les enfants réussiront et ce sera la fin de mon supplice’’, espère-t-elle tout en commençant à désosser son poulet rôti.
Maïmouna, debout, derrière sa table de fortune pour gérer le flux de clients, est d’avis qu’il est simplement impossible d’épargner, dans leur situation. Cela s’explique par les nombreuses obligations familiales et sociales qui font que ce qu’elles gagnent leur suffit à peine. ’’Quand on est marié, on a beaucoup d’obligations. Il faut soutenir le mari et s’occuper de son foyer. Notre argent rentre dans les dépenses familiales. Nous n’avons même pas la possibilité d’épargner. Il arrive que nos recettes ne nous servent qu’à acheter quelques kilogrammes de mil pour assurer la vente du lendemain. Il est très difficile de réaliser des bénéfices, dans ces conditions. Ce travail à lui seul ne nous permet pas de nous en sortir. L’idéal serait d’avoir d’autres activités à côté’’, pense-t-elle.
Ce que semble d’ailleurs bien comprendre Fatou Kiné. La vendeuse de couscous qui allie cette activité à la gestion d’un restaurant a fini par avoir une longueur d’avance sur les autres. En seulement cinq ans dans le milieu, cette veuve a aujourd’hui construit un toit pour ses enfants dans la commune de Yeumbeul (banlieue dakaroise).
’’Aujourd’hui, je peux rendre grâce à Dieu. Avec ce travail, j’ai construit une maison pour mes enfants et ils y logent. Je prends en charge leur scolarité et toutes les autres dépenses familiales qui incombent à un chef de famille. J’avoue que je n’ai pas de répit entre les journées au restaurant et le reste du temps ici. Je sors de chez moi le matin à 8 h pour ne revenir qu’aux environs de 1 h du matin. J’ai tout le temps mal à la tête et à l’hôpital, on m’a dit que c’est à cause du manque de sommeil’’, dit-elle.
En effet, les soucis de santé ne manquent pas chez ces femmes qui bravent quotidiennement le vent et ce climat froid de la nuit à la recherche de gains. Yaye Awa, elle, ressent des douleurs articulaires, car en plus du climat, les choses s’aggravent avec l’âge. ’’Il m’arrive de dormir sur mon commerce et ce sont les clients qui me tirent de mon sommeil. Vous voyez comment j’ai vieilli avec mes cheveux blancs, alors que mon âge n’est pas si avancé que ça’’, raille-t-elle.
’’Il arrive que des gens se baladent avec des machettes ici’’
En plus des questions de santé, ces dames devront également faire face à l’aspect sécuritaire. Grand-Yoff, avec sa réputation, ne rassure guère. Alors, comment imaginer des femmes dans les rues de cette commune jusqu’à certaines heures de la nuit ? A ce sujet, Ya Awa, sur un ton de défiance, montre qu’elle n’a nullement peur de ces ’’délinquants’’.
’’On voit du tout dans la rue, mais moi, je suis née ici et je maîtrise le secteur. Donc, il y a des limites à ne pas franchir, car on se connaît bien. A chaque fois que je vois des choses qui ne sont pas rassurantes ou quand je sens que je suis en danger, j’interpelle la police’’, dit-elle. Il arrive souvent que des gens se baladent la nuit, d’après la vendeuse de sandwichs avec des machettes ou commettent régulièrement des agressions sous leurs yeux.
Fatou Kiné n’a pas la même chance. Elle a été à plusieurs reprises victime d’agression. ’’Mon portefeuille a souvent été arraché ici. Même s’ils n’ont jamais emporté une somme importante d’argent, mais j’y ai souvent perdu tous mes papiers’’. Ce qui meurtrit davantage cette dame résidant à Khar Yallah, c’est l’éloignement de ses quatre enfants. Elle peut, dit-elle, rester 15 jours sans voir sa famille établie à Yeumbeul. Fatou, la vendeuse de friandises, vit, elle, en famille, mais effectue de longues journées partagées entre son commerce et ses obligations domestiques. ’’Après la prière de l’aube, je prépare mes jeunes enfants pour l’école. Je me charge des travaux ménagers avant d’aller faire mes courses pour la préparation du repas. Je profite de ce moment pour préparer mes affaires à vendre. Avant 15 h, je termine et mon repas et mes friandises’’, partage-t-elle.
Nos différentes interlocutrices connaissent toutes l’existence de la journée du 8 Mars, mais n’ont jamais participé aux festivités à cause de leurs activités. Elles ne manquent pas cependant de doléances.
’’A vrai dire, je n’ai jamais participé à la fête, comme le font les femmes. Ce serait bien pour nous de bénéficier de soutiens pour fructifier nos activités. Il faut dire que ce sont les femmes qui gèrent actuellement les familles. Les hommes ont démissionné depuis belle lurette’’, soutient Fatou Kiné. Yaye Awa retient uniquement de cette journée les tissus distribués par les groupements de femmes à crédit. ’’A Grand-Yoff, je pense que nous sommes les grandes oubliées de cette journée. Aucune de nos revendications n’est prise en compte, à l’occasion de cette célébration’’, peste-t-elle. Ce, alors que les vendeuses de bouillie disent n’avoir même pas le temps de regarder la télévision, à plus forte raison d’apprécier la célébration de la Journée internationale de la femme.
par Oumou Wane
NE VOUS PRESSEZ PAS LES FILLES
Qu’on l’accepte, plus aucun métier au Sénégal n’est une chasse gardée pour les hommes. Alors pourquoi rester muselées, transparentes, réduites au silence ?
Chaque année le 8 mars, « Journée internationale des droits des femmes », je suis partagée entre deux sentiments : d’un côté la grande hypocrisie d’une fête agaçante et sans effet et de l’autre, la nécessité, même un seul jour sur 365, de mettre la lumière sur la condition féminine.
Disparités salariales, violences conjugales ou sociales, attitude machiste... Cette journée sert-elle vraiment à améliorer la situation des femmes dans le monde, j’en doute. Mais enfin, si cela me permet d’attirer l’attention des dirigeants africains sur l’un des aspects qui me révolte le plus dans notre culture régionale, je parlerais des mariages forcés et précoces qui maintiennent les jeunes filles dans des conditions de pauvreté et d’impuissance, de leurs droits à l’enfance et à l’éducation volés, de génération en génération… Au Sénégal aussi hélas.
Soyons réalistes et allons droit au but. Je pense qu'il ne faut plus se marier juste pour se marier et pour avoir le statut d’épouse. Combien de rêves de petites filles sont anéantis par des mariages précoces et arrangés. Les mariages précoces, une forme de détournement de mineures, sont des violences faites aux filles en pleine puberté. Selon certaines croyances populaires, les filles mariées ont atteint l’âge adulte et n’ont donc plus besoin d’aller à l’école, la première conséquence de leur mariage est généralement leur déscolarisation. Les mariages précoces cantonnent ainsi les filles dans leur statut inférieur à l’homme et ne leur permettent pas de sortir de la pauvreté. Il s’agit en fait d’un énorme potentiel perdu pour le développement du pays.
Le Code de la famille est donc à réviser à cet effet et les jeunes filles doivent être informées que nombre de femmes au Sénégal et dans toute l’Afrique sont de brillantes entrepreneuses avec des visions prospectives qui dépassent celles des hommes.
Qu’on se le dise, qu’elles soient chefs d’entreprises, médecins, pilotes, conductrices, mécaniciennes, ministres et que sais-je encore, elles ne sont nullement dépaysées dans les milieux dominés par les hommes. D’ailleurs, de plus en plus de femmes s’orientent vers les matières scientifiques et notamment le BAC scientifique.
Qu’on le sache, qu’elles soient agricultrices, infirmières, commerçantes ou qu’elles transforment les produits de la pêche, elles créent partout la surprise, l’admiration et le respect après quelques minutes de pratique au travail.
Qu’on l’accepte, plus aucun métier au Sénégal n’est une chasse gardée pour les hommes. Alors pourquoi rester muselées, transparentes, réduites au silence ?
Je tiens quand même à célébrer la Journée internationale des droits des femmes, car nous ne sommes pas ici dans le folklore de la Saint Valentin. C’est une journée dédiée aux réalisations sociales, économiques, culturelles et politiques des femmes. Et Dieu sait qu’au Sénégal, il y a de plus en plus de femmes leaders, entrepreneures et militantes, des influenceuses sénégalaises qui passent à l'acte et libèrent la parole des femmes.
En 2020, par exemple, elles ont pu obtenir la loi criminalisant le viol au Sénégal. Alors oui, célébrons le leadership féminin et disons bravo à toutes les femmes pour leur engagement. Elles appellent à la préservation de la paix et elles sont les piliers de nos sociétés, l’équilibre de la justice sociale.
Dans notre culture, l'homme a toujours symbolisé, depuis l'indépendance, le pouvoir et la domination. La preuve en est qu'il a toujours occupé majoritairement l'espace du pouvoir. On pourrait aller bien plus loin quant aux accusations susceptibles d’être portées aux hommes, à leur cruauté et aux conséquences de leur brutalité dans le monde entier.
C’est pourquoi je dis, ne vous pressez pas les filles, pensez à vous, à votre bien-être et au rôle social que vous voulez occuper dans ce monde et pas seulement dans votre foyer.
Mais bien sûr si vous êtes certaine d’avoir trouver la bonne personne et que vous êtes en phase sur votre façon de concevoir l’avenir à deux, alors il n’est jamais trop tôt pour être heureux !
Bonne fête à toutes les femmes sur la planète !
Par Moussa SYLLA
FAIRE PROGRESSER LES DROITS DES FEMMES, C’EST FAIRE PROGRESSER LE MONDE
Tous les 8 mars, je lis de nombreuses publications d’hommes exprimant leur admiration envers les femmes. Ces publications disent, en résumé, que la vie de leurs auteurs serait beaucoup moins réussie sans l’apport d’une femme, ce qui est fort vrai.
Tous les 8 mars, je lis de nombreuses publications d’hommes exprimant leur admiration envers les femmes. Ces publications disent, en résumé, que la vie de leurs auteurs serait beaucoup moins réussie sans l’apport d’une femme, ce qui est fort vrai.
En même temps, elles dénaturent le vrai objectif du 8 mars qui est la Journée internationale du droit des femmes et non simplement la journée des femmes. Il ne s’agit pas de dire que quand ma femme était absente, j’avais éprouvé des difficultés en nettoyant mon appartement ou en m’occupant des enfants : tel n’est pas l’objectif. Ma mère est une analphabète ; elle ne sait ni lire ni écrire. Elle parle souvent, avec beaucoup de regret, qu’elle n’ait pas eu l’occasion de faire des études, car elle aurait été une excellente étudiante. Quand je lui parle des sujets de la vie, je suis toujours impressionné par la qualité de sa réflexion ; cela me pousse à dire qu’elle est plus intelligente que moi. Encourager les femmes à ne pas abandonner leurs études, à ne pas se croire inférieures aux hommes du point de vue des capacités intellectuelles, permettrait de faire avancer grandement la cause féminine. Pour les parents, c’est donner les mêmes chances à leurs filles qu’à leurs garçons, comme les inscrire dans les mêmes écoles, soutenir et encourager de façon égale leurs ambitions. Quand les femmes étudient mieux, un pays en profite grandement.
Les Nations les plus avancées sont celles où les droits des femmes sont les mieux respectés parce qu’un Etat ne peut se développer en brimant la moitié de sa population. En faisant cela, il se prive de créativité, d’une manière autre de voir les choses et de talents tout simplement. Cela est une transition pour parler de l’importance pour une entreprise d’intégrer les femmes dans son comité de direction. Aujourd’hui, une entreprise dessert plusieurs marchés. Comment réussira-t-elle à faire croître ses parts de marché si elle n’a dans sa direction que des hommes ? Elle perdra en capacité de réflexion originale et de sortir de sa zone de confort. J’ai lu des études affirmant que lors des crises, les entreprises les plus diverses du point de vue du sexe s’en sortent mieux. Pourquoi ? Tout simplement, il y a une diversité de points de vue, les femmes apportent leur sensibilité et leur manière de voir les choses.
Aussi les entreprises créatives intègrent-elles des femmes dans leurs comités de direction, écoutent et prennent-elles en compte leurs points de vue. Il ne s’agit juste pas d’intégrer une ou deux femmes dans son comité de direction pour donner l’impression que nous respectons la diversité, mais de donner la chance à toutes les femmes compétentes d’exprimer leurs talents. Il y a quelques jours, je rentrais du travail. Coincé dans les embouteillages, j’allumai la radio et tombai sur une chanson d’un artiste célèbre. J’étais choqué d’entendre ces propos : «Si tu as réussi, c’est parce que ta mère a travaillé. Si tu as échoué, c’est parce que ta mère n’a pas travaillé.» On impute à la mère l’échec ou la réussite de son enfant, surtout l’échec. Quid du père absent, négligent ? N’est-il pas coupable ?
Il y a parfois dans les propos des Sénégalais un fond de machisme qui impute tous les mauvais comportements d’un enfant à sa mère. J’ai remarqué que le père a une grande part de responsabilité dans l’échec ou la réussite d’un enfant. .
En Amérique du Nord, on dit que les familles noires sont dans un cercle vicieux à cause de l’absence de père, due au taux d’emprisonnement élevé des hommes noirs. Un papa absent ne veut pas dire simplement un papa qui a abandonné ses enfants. C’est aussi un papa qui ne s’occupe pas d’eux, qui néglige leurs besoins. Quand des enfants ont un tel papa, la probabilité de réussite est moindre que celle d’enfants avec un papa aimant, qui leur offre un modèle solide. Je parlais plus haut de l’importance que les filles continuent leurs études.
En parlant à des femmes, j’ai découvert une chose : elles s’absentaient à l’école lors de leurs périodes menstruelles parce que ne pouvant acheter des serviettes hygiéniques. Récemment, je lisais qu’en France, le gouvernement a décidé d’allouer 5 millions d’euros à la lutte contre la précarité menstruelle. C’est un exemple que doit suivre le Sénégal : rendre gratuite la distribution de protection hygiénique.
La conjoncture est difficile au Sénégal. Beaucoup de familles n’arrivent pas à se nourrir convenablement, à plus forte raison acheter à leurs filles des protections hygiéniques. L’Etat a un rôle important à jouer pour résoudre ce problème : en rendant gratuite la distribution de serviettes hygiéniques, il permettra à ces femmes qui s’absentent à l’école lors de leurs périodes menstruelles d’être présentes. Cela contribuera à diminuer l’absentéisme à l’école et l’abandon des études.
En tant qu’hommes, nous devons comprendre qu’il est dans notre intérêt l’autonomisation des femmes. C’est aussi l’intérêt de la société et du monde. Les femmes apporteront leurs points de vue uniques et permettront une meilleure qualité de décision. Certains Etats l’ont compris et avancent beaucoup plus rapidement. D’autres sont encore dans un machisme rétrograde et se privent de l’apport de la moitié de leur population. Le Sénégal doit faire partie du premier lot. Il doit être un pionnier dans la lutte pour les droits des femmes, afin de leur permettre de s’épanouir, d’exprimer leurs talents et potentiels. Il doit, pour cela, faire tout pour les garder à l’école, inciter les entreprises à leur donner leur chance.
Pour nous, hommes sénégalais, nous devons arrêter d’accuser les femmes de tous les maux de la société, de l’échec de nos enfants, les aider à se développer. Cela est dans notre intérêt : les enfants auront tellement plus de chance de réussite si leurs père et mère sont épanouis et leur donnent des exemples inspirants. Faire progresser les droits des femmes dans le monde, c’est faire progresser le monde. Un certain nombre de mesures institutionnelles peuvent et doivent être prises : garder les filles à l’école, leur donner leur chance dans le monde du travail, combattre les plafonds de verre à leur égard. Pour nous, hommes, nous devons arrêter avec ce vieux fond de machisme qui fait des femmes la cause des échecs des enfants.
PS. : Il y a quelques jours, je relisais le roman Une si longue lettre, écrit par Mariama Ba. Je tombai sur le passage suivant : «Quand la société éduquée arrivera-t-elle à se déterminer non en fonction du sexe, mais des critères de valeur ?» Vivement un tel monde !