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1 avril 2025
Femmes
LA FÉCONDITÉ PASSE SOUS LA BARRE DE CINQ ENFANTS PAR FEMME AU SÉNÉGAL
La fécondité a enregistré une nette baisse en une trentaine d'années au Sénégal, où le nombre moyen d'enfants par femme est désormais inférieur à cinq, selon un rapport de l'ANSD
La fécondité a enregistré une nette baisse en une trentaine d'années au Sénégal, où le nombre moyen d'enfants par femme est désormais inférieur à cinq, selon un rapport de l'Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD).
L'indice synthétique de fécondité est passé de "6,4 à 4,7 entre 1988 et 2019", selon ce rapport consulté lundi sur le site de l'ANSD. La population, qui était de 13,5 millions en 2013, lors du dernier recensement, a été estimée par l'ANSD à plus de 17 millions d'habitants en 2021 dont 50,2% de femmes et 49,7% d'hommes. "La moitié de la population du Sénégal en 2021 est âgée de moins de 18 ans", preuve "du caractère jeune de la population", ajoute le rapport.
Les statistiques indiquent par ailleurs qu'en dépit d'une hausse continue de la population urbaine sur le temps long, celle-ci reste minoritaire: 52,7% des habitants du pays vivaient hors des villes en 2021.
LES FILLES TITILLENT LES GARÇONS EN MATHEMATIQUES
Rapport annuel sur l’égalité des genres de l’Unesco, Les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons en lecture et en sciences et sont en train de rattraper leur retard en mathématiques
Les filles ont désormais des résultats équivalents à ceux des garçons en mathématiques. C’est ce que révèle le Rapport annuel sur l’égalité des genres de l’UNESCO qui s’est appuyé sur les données de 120 pays dans l’enseignement primaire et secondaire. Ce, à travers des études du Laboratoire latino-américain pour l’évaluation de la qualité de l’éducation (LLECE), du Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN, du PASEC et les enquêtes Southeast Asia Primary Learning Metrics (SEA-PLM) et Trends in International Mathematics and Science Study (TIMSS).
«Les résultats montrent qu’au cours des premières années, les garçons obtiennent de meilleurs résultats que les filles en mathématiques, mais que ces inégalités de genre disparaissent par la suite », apprend-t-on dans un communiqué de presse qui nous est parvenu hier, mardi 26 avril. Mieux, ajoute la même source : « Ces recherches confirment que les inégalités de genre en matière d’apprentissage se sont réduites, même dans les pays les plus pauvres. Et dans certains pays, l’écart s’est désormais inversé. Par exemple, en quatrième, l’écart en mathématiques est de 7 points de pourcentage en Malaisie, de 3 points au Cambodge, de 1,7 point au Congo et de 1,4 point aux Philippines en faveur des filles ».
Toutefois, des inégalités et des obstacles empêchent encore les filles de réaliser leur potentiel. Selon l’UNESCO, «les préjugés et les stéréotypes sont toujours susceptibles d’affecter les résultats d’apprentissage». «Dans les pays à revenu intermédiaire et élevé, dans le secondaire, les filles obtiennent des résultats nettement supérieurs en sciences. Malgré cet avantage, les filles restent moins nombreuses à opter pour des carrières scientifiques, ce qui indique que les préjugés sexistes pourraient encore constituer des obstacles à la poursuite d’études dans le domaine des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM)», rapporte le document. «Les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons en lecture et en sciences et sont en train de rattraper leur retard en mathématiques.
En revanche, elles ont nettement moins de probabilité d’être parmi les plus performantes en mathématiques, en raison de préjugés et de stéréotypes persistants. Nous devons assurer l’égalité des genres dans l’apprentissage et veiller à ce que chaque apprenant réalise son potentiel», déclare Manos Antoninis, directeur du Rapport mondial de suivi sur l’éducation de l’UNESCO.
En effet, en ce qui concerne la lecture, les filles donc sont meilleures que les garçons. «Si les filles obtiennent de bons résultats en mathématiques et en sciences, elles obtiennent des résultats encore meilleurs en lecture. Les filles sont plus nombreuses que les garçons à atteindre le niveau d’aptitude minimal en lecture.
On constate l’écart le plus important dans l’enseignement primaire en Arabie Saoudite, où, en CM1, 77% des filles mais seulement 51% des garçons atteignent le niveau d’aptitude minimal en lecture», renseigne l’UNESCO. «Les filles démontrent à quel point elles peuvent réussir à l’école lorsqu’elles ont accès à l’éducation. Mais beaucoup, et notamment les plus défavorisées, n’ont pas la moindre possibilité de recevoir un enseignement. Nous ne devons pas craindre ce potentiel. Nous devons le soutenir et veiller à ce qu’il se développe. Par exemple, il est déchirant de constater que la plupart des filles en Afghanistan n’ont pas la possibilité de révéler leurs talents au monde entier», déclare Malala Yousafzai, co-fondatrice du Fonds Malala.
Cependant, il faut noter que la plupart de ces données ont été publiées au cours des 18 derniers mois mais se rapportent à la situation qui prévalait juste avant la pandémie. «On sait que les résultats d’apprentissage ont été gravement affectés dans les pays qui ont fermé les écoles pendant de longues périodes et qui n’ont pas été en mesure d’offrir des possibilités d’apprentissage à distance à la majorité des élèves. Les évaluations comparables de l’apprentissage reflétant la situation post-COVID ne commenceront à être publiées que dans un an et, même alors, principalement pour les pays relativement riches qui ont assuré la continuité de l’apprentissage. Il faudra un certain temps avant que l’on dispose d’un panorama complet à l’échelle mondiale de l’impact à long terme de la pandémie, et notamment de son impact sur les inégalités de genre», a précisé l’UNESCO.
AUX SUBALTERNES TELLES QUE ADJI SARR, L'ON REFUSE LE DROIT DE PARLER
Des schèmes inégalitaires perdure dans notre société. L’organisation sociale et juridique accroît la position de subalternité des femmes. Adji Sarr est doublement discriminée - ENTRETIEN AVEC NDÈYE FATOU KANE
Doctorante en Sciences Humaines & Sociales, romancière et essayiste, Ndèye Fatou Kane est une intellectuelle engagée notamment sur les questions relatives aux droits des femmes. Dans cet entretien accordé à Seneweb l'autrice de “Vous avez dit féministe ?”, analyse la situation des femmes au Sénégal et nous offre un regard éclairé et lucide sur les récentes affaires qui défraient la chronique.
En 2018, vous avez écrit un essai intitulé, “Vous avez dit féministe ?” C’est quoi être féministe en 2022 ? Et quels sont les combats urgents de l’heure en Afrique et notamment au Sénégal ?
La publication de Vous avez dit féministe? en 2018 fait suite à un contexte mondial chargé de revendications, mais c’est aussi le fruit d’un cheminement personnel. En effet, entre 2016 et 2018, la sphère hollywoodienne a été secouée par la déferlante #MeToo, qui est la résultante de l’enquête menée par le New-York Times, et accusant le producteur américain Harvey Weinstein d’agressions sexuelles sur plusieurs actrices. L’affaire Weinstein, point de départ du e-militantisme féministe, se propage en Europe, et particulièrement en France, avec l’émergence de #BalanceTonPorc; qui, comme son nom l’indique, a aussi permis à des femmes, allant de l’actrice hyper bankable et privilégiée, à la femme anonyme, de confronter leurs agresseurs.
“Ce qui réunit les femmes aujourd’hui en Afrique et particulièrement au Sénégal, c’est la lutte contre le patriarcat”
Observant tout cela, j’ai eu envie de contextualiser, décentrer le regard, et faire le chemin inverse du centre à la marge, en posant le débat dans mon pays le Sénégal : #BalanceTonSaïSaï est né. Plusieurs tribunes et prises de paroles publiques plus tard, l’idée d’écrire Vous avez dit féministe? a germé dans mon esprit, pour aussi montrer qu’un renouvellement des générations féministes devait avoir lieu et que nous autres jeunes femmes, devrions être les actrices de ce nouvel élan féministe, en nous plaçant comme sujets et objets de cette idéologie qu’est le féminisme. Je suis heureuse de voir qu’après la parution de Vous avez dit féministe?, plusieurs ouvrages ont suivi et ceci prouve encore une fois que le train est en marche.
Etymologiquement, être féministe revient à prôner une idéologie qui traverse les époques et qui vise à améliorer les conditions de vie, de traitement et de liberté accordées aux femmes. C’est la raison pour laquelle l’on distingue plusieurs courants de pensée féministes, suivant les zones géographiques et les sensibilités.
Mais, ce qui réunit les femmes aujourd’hui en Afrique et particulièrement au Sénégal, c’est la lutte contre le patriarcat. Et par patriarcat, j’entends tout le système sociétal niant aux femmes des droits; et par extension, les essentialisant, les privant de libertés et les considérant comme des êtres corvéables qui sont astreints à une rhétorique de devoirs.
Au Sénégal, une nouvelle génération de féministes a émergé très militante, parfois radicale, qui était d’ailleurs au coeur de la mobilisation pour la criminalisation du viol. Pourtant sur bien des sujets, on reproche à ces féministes de vouloir détruire les “valeurs” sénégalaises et d’être “déconnectées” de nos réalités. Le combat est-il perdu d’avance ?
Peut-on être militante sans une certaine dose de radicalité? Je me le demande. Avant de donner mon avis sur la nouvelle génération de féministes, permettez-moi de revenir sur le vote pour la criminalisation du viol au Sénégal. Le 30 Décembre 2019 est à jamais un jour historique au Sénégal. L’Assemblée Nationale a voté ce jour à l’unanimité la loi criminalisant le viol, jusque-là considéré comme un simple délit. Ce vote est le travail conjugué d’associations telles que l’AJS (Association des Juristes Sénégalaises) qui se bat depuis des décennies pour la prise en charge juridique des femmes.
“Il est rafraîchissant de voir que cette génération de féministes est a contrario très au fait de ce qui se passe dans notre pays, et utilise les moyens dont elle dispose pour se faire entendre”
Pour en revenir à cette jeune génération de féministes (dont je fais partie bien entendu), il est intéressant de savoir de quelle société l’on parle et à quels modèles l’on fait référence. La société sénégalaise de 1830 est-elle la même que celle de 2022? Vous avez la réponse…
Je parlais du patriarcat plus haut. Ce même patriarcat s'illustre par une distribution intangible des devoirs féminins par les représentants du patriarcat, à savoir les hommes. Une femme, une vraie, doit se conformer aux normes édictées, et l’on s’interroge sur la féminité d’une femme lorsqu’une distance apparaît entre son comportement et le comportement qui lui est socialement prescrit. Les femmes peuvent être autonomes, mais sous une forme d’autonomie paternaliste. En étant connectée sur une pluralité de réseaux sociaux dont Twitter, il est rafraîchissant de voir que cette génération de féministes est a contrario très au fait de ce qui se passe dans notre pays, et utilise les moyens dont elle dispose pour se faire entendre.
Comment peut-on parler d’un combat perdu d’avance alors que ce combat a lieu? Comme nous jugeons les progrès de nos aînées féministes aujourd’hui, nos successeuses seront les meilleures juges à l’aune de la société dont elles hériteront.
“La situation des femmes reste encore critique au Sénégal”
Il y a eu récemment à l’université Gaston Berger le viol et le meurtre d’une étudiante, Seynabou Ka Diallo. Est-il pertinent d’après vous d’utiliser le terme féminicide pour qualifier ce genre de meurtres ?
Un féminicide est le meurtre d’une ou plusieurs femmes en raison de leur sexe. Les définitions selon les aires culturelles peuvent différer, mais en parcourant les détails scabreux de la mort de Seynabou Kâ Diallo, nous assistons bel et bien à un féminicide.
Ce genre de crimes - car c’en est un - à chaque fois qu’ils surviennent, montrent que la situation des femmes reste encore critique au Sénégal. Il faudrait que les pouvoirs publics soient plus à l’écoute des complaintes des femmes et déploient plus de moyens pour assurer leur sécurité. Grande a été la mobilisation sur le campus de l’Université Gaston Berger (et même au-delà) pour condamner avec la dernière énergie ce crime odieux.
Ce qui montre que la sororité n’est pas un vain mot.
“L’organisation sociale et juridique, en mettant les clés du pouvoir de décision entre les mains des hommes, accroît la position de subalternité des femmes. Aux subalternes telles que Adji Sarr, l’on refuse le droit de parler et de soulever toute velléité de contestation.”
Une femme cristallise les passions au Sénégal : Adji Sarr, qui accuse de viol l’opposant Ousmane Sonko. Laissons de côté l’aspect purement judiciaire. Qu’est ce que les débats médiatique, intellectuel, et même sociologique, autour cette femme disent de notre société ?
J'espère de tout coeur que la justice fera son travail. Si je devais donner une lecture sociologique de l’affaire opposant Adji Sarr à Ousmane Sonko, je dirais que nous sommes face à une affaire qui est au carrefour du classicisme et du sexisme. Adji Sarr, à travers sa vulnérabilité dûe à sa condition sociale et son genre, est doublement discriminée. Elle a devant elle un homme jouissant de tous les avantages liés à son capital social élevé, acquis notamment grâce à sa position d’homme politique.
Des faits de viol - élucidés ou non - ont eu lieu ces dernières années au Sénégal, mais l’affaire Adji Sarr-Ousmane Sonko cristallise les passions. Il suffit, pour s’en rendre compte, de parcourir les réseaux sociaux lorsqu’un nouvel élément est mis en lumière. L’objectification du corps de cette jeune femme est un élément central de cette affaire. Et ceci, à mon sens, vient en renforcement des schèmes inégalitaires qui perduraient déjà dans notre société. Parole mise en doute, double condamnation sociétale et médiatique, tels sont les mécanismes dont peuvent abuser les hommes dans notre pays pour pouvoir affirmer leur place de sujets en transformant les femmes en objets.
L’organisation sociale et juridique, en mettant les clés du pouvoir de décision entre les mains des hommes, accroît la position de subalternité des femmes. Aux subalternes telles que Adji Sarr, l’on refuse le droit de parler et de soulever toute velléité de contestation.
Elle a reproché dans un entretien accordé au journal Le Monde le manque de solidarité des femmes et des mouvements féministes en particulier. Qu’en pensez-vous?
Elle est tout à fait dans son droit d’exprimer son ressenti face au manque de solidarité dont elle pense avoir bénéficié. Ne lui dénions pas cela. Mais comme tout ressenti est le fruit d’une perception, je pense que si elle avait fait un tour sur les réseaux sociaux, elle aurait vu la vague de soutiens qui lui a été apportée et continue de lui être apportée. Le hashtag #AdjiSarrOnTeCroit en est une parfaite illustration. A mon niveau personnel, j’ai écrit un texte dans la revue Riveneuve Continents des Éditions Riveneuve Sénégal (La jeunesse des lettres, L’être de la jeunesse, Editions Riveneuve Continents, Paris, 2022 : Masculinités médiatiques et rapports inégaux de genre, le cas de Adji Sarr et Ousmane Sonko) qui est parue en Février 2022.
“Le manque de moyens ne devrait en aucun cas être une raison pour violenter physiquement ou verbalement des parturientes”
Un mot pour finir sur Astou Sokhna, femme décédée cette semaine à Louga après des négligences médicales avérées. Qu’avez vous pensé de ce drame et de tous les débats autour de l’État des hôpitaux sénégalais ?
La mort de Astou Sokhna en couches est un événement malheureux et choquant. Aucune femme ne devrait avoir à vivre des moments aussi atroces au moment de donner la vie. La vague d’indignation et de témoignages qui s’en est suivie relève de l’inhumanité dont fait preuve parfois le personnel de santé. Le manque de moyens que celui-ci a invoqué pour expliquer les manquements ne devrait en aucun cas être une raison pour violenter physiquement ou verbalement des parturientes. Quiconque prend le parti de travailler à sauver des vies devrait avoir un certain niveau d’éthique et de morale. Que l’Etat et le ministère de tutelle veillent à ce que des manquements pareils ne se reproduisent plus et surtout que les responsabilités soient situées au-delà des indignations éphémères.
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OMBRES ET LUMIÈRE DES CRISES HUMANITAIRES
Les 25 ans de photographie humanitaire de Medicos del Mundo célébrés du 21 avril au 21 mail pour mettre des images sur des maux : les crises sanitaire, environnementale, migratoire ou la crise des réfugiés sont toutes mises en exergue
Diverses crises humanitaires secouent notre monde et la situation des humanitaires dans le monde n'est nullement enviable en raison des risques auxquels ils s'exposent pour porter assistance aux autres, pour rendre de la dignité à ceux qui en ont besoin. C’est pour honorer la mémoire de ses anciens membres assassinés que Medicos del Mundo a institué depuis 25 ans un Prix en photographie à travers une exposition photo en Espagne : le Prix Luis Valtueña dont les images receuillies exposent toutes les atrocités commises en situation de crise partout dans le monde.
Pour la responsable Afrique de Medicos del Mundo, Angela Sevillano interrogé dans cette entrevue, il s’agit de garder la mémoire vive sur ce drame des membres de Médicos del mundo et en même temps alerter toujours l’opinion sur le drame de crises humanitaire. Angela Sevillano s'est spécialement déplacée de Madrid pour le vernissage de cette expo à Dakar.
Cette année, la 25è édition cette exposition a quitté l'Espagne pour et a été délocalisée à Dakar avec l'appui de l'Ambassade d'Espagne à Dakar. L’exposition a été officiellement ouverte à l'Instituto Cervantes de Dakar ce jeudi 21 avril et se poursuivra au 12 mai 2022. Des images montrent différentes thématiques de crise humanitaire sont mise en exergue : de la guerre, la crise migratoire, de la crise environnementale au drame sanitaire, la tragédie des réfugiés.
LES FEMMES DE BBY LANCENT L’INITIATIVE "AND JEGGO AM NDAM"
La 7ème édition de la conférence nationale des femmes de Benno et de la grande majorité présidentielle orientée sur le thème « Femmes et politique en islam » a eu lieu, ce samedi, à Dakar.
La 7ème édition de la conférence nationale des femmes de Benno et de la grande majorité présidentielle orientée sur le thème « Femmes et politique en islam » a eu lieu, ce samedi, à Dakar. Cette rencontre religieuse a été une occasion pour les femmes de lancer l’initiative « And Jeggo Am Ndam ». Selon la présidente nationale des femmes de BBY et de la grande majorité présidentielle, cette initiative vise à assurer une majorité confortable au Président de la coalition BBY aux élections législatives du 31 juillet 2022. Ndèye Marième Badiane a renseigné qu’un séminaire sera organisé à cet effet dans les meilleurs délais. Il a été également prévu une tournée nationale pour une remobilisation des femmes afin d’assurer une majorité qualifiée au soir de ces échéances électorales. Pour finir, les femmes renouvelé leur confiance et leur engagement aux côtés du Président de la République. Lors de cette conférence, les femmes ont rappelé les réalisations du chef de l’Etat, Macky SALL.
Venu pour animer la conférence religieuse, Oustaz Pape Anne est revenu sur la place et le rôle de la femme dans la politique. A l’en croire, la politique si elle est faite normalement n’entrave en rien sur la croyance et la pratique de l’islam. Il a donné comme exemple Sokhna Aïcha qui, pour lui, doit être une référence pour toute femme.
PLAIDOYER POUR UNE PLUS GRANDE PARTICIPATION DES FEMMES DANS LES MÉTIERS DU TRANSPORT
L’approche genre a été conceptualisée sous différentes formes, mais son intérêt réside dans son applicabilité à tous les contextes, et à toutes les situations. C’est une approche transversale qui vise à éliminer toutes les formes d’inégalité
L’approche genre a été conceptualisée sous différentes formes, mais son intérêt réside dans son applicabilité à tous les contextes, et à toutes les situations. C’est une approche transversale qui vise à éliminer toutes les formes d’inégalité et de discrimination. Ce qui est visé, à terme, c’est un développement équitable, harmonieux et construit par tous les hommes et toutes les femmes et qui, en retour, doivent jouir des bénéfices de cette croissance de façon égale.
Le Sénégal a ratifié toutes les conventions internationales relatives aux droits des femmes et des personnes vivant dans des situations de vulnérabilité et a pris des mesures législatives et règlementaires pour l’intégrer dans le dispositif national. En outre, des stratégies ont été élaborées pour intégrer le genre au cœur des politiques et programmes de développement.
Des avancées notoires ont été obtenues en termes de prise en charge des inégalités de genre, mais des contraintes subsistent notamment dans le cadre de l’intégration des femmes et des personnes en situation de handicap dans certains secteurs.
Le secteur des transports fait partie de ce lot. En effet, les études ont révélé que ce secteur reste quasiment un domaine réservé des hommes. Les femmes y occupent encore une position marginale ; à la limite, elles y sont discriminées. Pour pallier cela, l’Etat du Sénégal, avec l’appui de l’Union européenne a, à travers le PAGOTRANS, prévu des actions visant à prendre en charge la problématique de genre. Il s’agit d’activités de sensibilisation visant à faire évoluer les attitudes et comportements d’exclusion de la femme pour une plus grande participation de celles-ci dans les métiers du transport. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’atelier de sensibilisation et de renforcement des capacités des membres et points focaux de la cellule genre du Ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement qui s’est tenu le 23 février 2022.
Cette activité a été l’occasion de revisiter l’historique du concept genre et à passer en revue les autres concepts clés qui vont avec. En outre, l’intérêt de l’intégration des femmes dans les métiers du transport a été mis en exergue, mais également les contraintes qui plombent leur évolution dans le secteur. Pour finir, des recommandations ont été formulées pour une meilleure intégration des femmes dans les métiers du transport.
Dans le cadre toujours de ses actions de promotion de l’emploi des femmes dans le secteur du transport, le PAGOTRANS a réalisé un publireportage à l’occasion du 8 mars 2022.
Ce film documentaire a permis de mettre au-devant de la scène des femmes modèles, telles que des conductrices de bus de transport urbain et interurbain, une technicienne responsable dans une société de transport public et de jeunes techniciennes et électromécaniciennes employées par une structure privée. Ces femmes leaders dans les métiers du transport ont, à travers leurs discours, démontré que ceux-ci ne sont pas un domaine réservé uniquement aux hommes et que les femmes peuvent y exceller également. Elles ont, par ailleurs, lancé un appel à l’Etat, afin qu’il mette en place des structures de formation techniques sur les métiers des transports dédiées aux femmes et un cadre d’insertion et d’accompagnement de celles qui sont déjà dans le métier et qui sont intéressées par des formations.
À LOUGA, LES LANGUES SE DÉLIENT SUR LES VIOLENCES GYNÉCOLOGIQUES ET OBSTÉTRICALES
Badiane Diop a perdu son bébé le mois dernier après avoir attendu plus de 5 heures que des sages-femmes se préoccupent de sa situation critique. « Comme toutes les autres, au moment de porter plainte, la famille s’est opposée donc j’ai laissé tomber…»
Au Sénégal, l’émotion est encore vive suite au décès d’Astou Sokhna. La femme enceinte de 9 mois est décédée après 20 longues heures de souffrance à l’Hôpital régional de Louga - à 200 kilomètres au nord du Sénégal. Sa famille a porté plainte pour « négligence » et « non assistance à personne en danger ». Une affaire révélatrice des violences faites aux femmes dans les établissements de santé.
Assise au milieu de ses sœurs et voisines, Maimouna Ba tient entre ses mains un album rempli de photos de sa fille Astou Sokhna, décédée la semaine passée. C’est elle qui accompagnait la jeune femme enceinte de neuf mois à l’hôpital alors que celle-ci appelait en vain le personnel de santé pour soulager ses fortes douleurs au ventre.
« Ma colère est adressée au personnel soignant de l’hôpital, car ils ont été négligents. Ils n’ont aucune considération envers l’être humain », dit Maimouna. « Astou les avait même menacés : “vous me négligez, quand je vous appelle vous ne me répondez pas. Quand je serai rétablie, j’irai vous dénoncer à la direction”. Les sages-femmes lui ont répondu : “c’est parce que tu souffres que tu es en train de délirer”. Astou ne savait pas qu’elle allait mourir là… » Le personnel de l’hôpital rejette la thèse de la négligence et pointe plutôt du doigt leurs conditions précaires de travail.
Mais à Louga, les langues se délient et d’autres femmes commencent à témoigner. Badiane Diop, 26 ans, vient de perdre son bébé le mois dernier après avoir attendu plus de cinq heures que des sages-femmes se préoccupent de sa situation critique. « Comme toutes les autres, au moment de porter plainte, la famille s’est opposée donc j’ai laissé tomber… mais au fond de moi je ne leur pardonnerai jamais ce qu’ils m’ont fait et ce qu’ils ont fait à mon bébé », affirme Badiane.
Socio-anthropologue, Cheikh Ibrahima Niang a participé à plusieurs études sur la maternité et la santé néo-natale au Sénégal et en Afrique. Il plaide, dans cet entretien, pour repenser la gestion de la grossesse en tenant compte du patrimoine culturel
Socio-anthropologue, Dr Cheikh Ibrahima Niang a participé à plusieurs études sur la maternité et la santé néo-natale au Sénégal et en Afrique. Il plaide, dans cet entretien, pour repenser l’accouchement et la gestion de la grossesse en tenant compte de notre patrimoine historique et culturel.
Beaucoup de plaintes et de complaintes sont notées à chaque fois venant des femmes qui accouchent sur les sages-femmes. En tant que socio-anthropologue, comment analysez-vous ces faits ?
L’accouchement, la gestion de la grossesse, le fait de donner naissance, tout cela s’intègre dans des cultures, des valeurs, des sociétés. Cela a une dimension sociale et culturelle très importante qu’il faut prendre en considération. Nous avons hérité d’un système colonial de gestion de la maternité avec des rapports de pouvoir au profit du monde médical avec l’utilisation de la force, l’intimidation, les attitudes autoritaires. Tout cela est hérité de la colonisation. Si nous regardons bien comment cela se fait dans le système traditionnel d’accouchement, la femme est accompagnée et suivie. Il y a surtout un partage d’empathie entre la femme et sa belle-mère, ou sa mère et les femmes les plus âgées. Si nous regardons comment cela marche avec des moments où la femme récite les « Ya Latif », ce sont des moments d’empathie, de solidarité très forts qui sont culturellement enracinés avec des valeurs spirituelles extrêmement importantes. Donc il faut tenir compte de ce patrimoine historique et culturel pour repenser l’accouchement, la gestion de la grossesse.
Comment faire pour en arriver là ?
Apparemment là, il y a un déficit d’empathie, d’humanisme, de relations humaines, du sens humain à partir desquels il faut reconstruire et analyser. Il faudrait introduire ces dimensions de manière très forte dans le système de santé. Cela va supposer qu’il y ait des formations continues sur ces questions-là et les recherches en sciences sociales alimentent la production de cette empathie, de la transformation de nos structures de santé en des structures amicales avec la disparation de la confidentialité et de la solidarité. C’est cette révolution, tant dans les approches et des connaissances au plan de la manière de voir des choses, c’est à niveau qu’il faut sécréter le débat pour éviter la répétition de ce phénomène, parce que cela fait longtemps qu’on le dénonce et assez de fois. On revient sur les mêmes dénonciations alors des solutions et approches ont été proposées par les sciences sociales. Améliorer les plateaux techniques, équiper les structures de santé, c’est bien, mais nous avons vu avec ce cas que c’est un facteur humain qui est important. C’est donc peut-être le déficit de ressources humaines techniquement disponibles. C’est aussi le stress du personnel de santé. C’est aussi les problèmes que les sages-femmes rencontrent dans leurs maisons et qu’elles transposent souvent dans les espaces professionnels. C’est aussi les situations de stress qu’elles vivent à l’intérieur du système et elles n’ont pas d’espace cathartique où elles puissent parler, libérer ce qu’elles ont dans le cœur. Il n’y a pas d’espaces pour les amener à se réconcilier avec les exigences sociales, culturelles, empathiques de notre société. Il n’y a pas de discussions, de forums où elles peuvent se lamenter. Dans la population aussi, les femmes qui sont confrontées à ces problèmes n’ont pas d’espaces d’expression et de revendications de leurs droits. Être bien accueilli, avoir une bonne prise en charge dans une maternité, c’est un droit. Si ce droit est violé, il n’y a pas d’espaces pour se plaindre et anticiper. Ce n’est pas à partir des évènements malheureux qu’il faut se plaindre, mais dès le départ quand il y a des manquements. Mais on ne trouve pas à qui s’adresser. C’est l’ensemble de ces questions qui nous amènent à imaginer d’autres systèmes de prise en charge et d’accompagnement de la grossesse à la naissance.
Que faut-il de plus pour que ces problèmes ne reviennent plus ?
Si énormément d’argent est investi pour améliorer les plateaux techniques, rendre les césariennes disponibles, il faudrait améliorer les ressources humaines en qualité et en disponibilité. Ensuite, améliorer la communication et accompagner les processus d’appropriation de tout cela par les femmes. Il faut que les femmes sachent que la maternité, c’est pour elles. Donc elles ont le droit d’exiger un accompagnement et des soins de qualité qui soient concertés. Il faut que les femmes soient intégrées dans les discussions du début de la constitution de la maternité. Quelques fois, les maternités sont conçues dans des espaces qui font peur aux femmes. Elles n’y vont pas parce qu’il n’y a pas de « sutura » (discrétion). Cela pose problème. Il y a des moments où les femmes attendent jusqu’au dernier moment pour aller dans la maternité. Ce n’est pas le cas de la défunte Astou Sokhna. Apparemment, elle est venue très tôt. Il faut qu’on se rende compte que le facteur humain et la perception sont extrêmement importants dans la résolution de ce problème. Le même phénomène se retrouve aussi dans plusieurs pays africains où il y a les mêmes types de comportements. Il faut réactualiser les travaux de l’Organisation mondiale de la Santé, les études sur les santé néonatale et maternelle réalisées, il y a une dizaine années, avec le Professeur Anta Tal Dia et une équipe d’anthropologues. On ne tient pas compte des recommandations, des réponses qui ont été suggérées par les sciences sociales, les sociologues, les psychologues, les anthropologues. Cette dimension n’est pas prise en compte et on ne voit que les aspects techniques, matériels, institutionnels dans le sens de comment fonctionne l’institution et tout cela est élaboré en dehors des femmes. Quand on vous dit que celui qui doit faire l’opération n’est pas venue, etc., vous n’y pouvez rien. On n’adapte pas l’offre au temps des femmes et à leur propre disponibilité. Les femmes sont déjà surchargées à la maison et elles viennent à des heures qui ne correspondent pas. Il y a des améliorations qui ont été faites, mais cela reste encore. C’est ce travail-là qui est, à mon sens, aussi important que le fait de chercher un équipement technique pour faire le suivi de la grossesse ou réaliser des césariennes. C’est aussi important que les réponses techniques.
MEMORIALES, PAR ELGAS
L’ÊTRE FÉMININ, LETTRES FÉMINISTES
EXCLUSIF SENEPLUS - Chez beaucoup d’écrivaines sénégalaises, existe un malaise tenace quant au bon dosage du discours féministe. On assiste ainsi à une forme de cohabitation entre les exigences morales et les exigences libertaires
Il a été déjà dit d’Aminata Sow Fall qu’elle était la gardienne du temple des lettres sénégalaises. Et on ne peut pas dire qu’elle ne s’y soit pas employée, et même avec brio. Il y a même fort à parier que cette idée de matrone primale, ne perdra pas de sitôt valeur même si des plaisantins s’y essayent. Avec sa maîtrise du memento doucereux et son talent de tempérance, la grande royale, foulard et boubou majestueux, est devenue l’auréole maternelle qui veille sur les lettres nationales. Une irradiation si précieuse qu’elle s’est aussi faite continentale, tant l’icône s’est muée en totem sacré chez qui on fait pèlerinage, que l’on accable presque d’honneurs, et que le grand âge dans lequel elle se meut, la présente en fossile muséal, qui séduit et rassure avec la déférence requise. Amadou Hampâté Ba doit bien souvent maudire dans sa tombe son impuissance à refréner ce besoin de sanctuariser les personnes âgées, assimilées assez indistinctement à des bibliothèques qui brûlent. Hymne à la gérontocratie continentale, il casse les ailes de toutes critiques priées de se laisser attendrir par l’âge et fatalement de renoncer à la nécessaire évaluation des œuvres, sans laquelle la littérature emprunte à la caste maraboutique son confort et son privilège de mandarin.
Garder la morale et écrire, l’équation impossible ?
J’ai lu La grève des bàttu (1979)avec spasmes, pour la beauté et la justesse de ce livre si évocateur, si séminal dans les lettres sénégalaises. Pour son objet, pour la finesse de son point de vue. Sans y penser, je suis devenu aussi un enfant de la maman généreuse, mère première des aspirants littérateurs. Pourtant, L’empire du mensonge (2017), ce dernier opus de la gardienne du temple consume la bibliothèque et jette une poussière cendrée sur les belles antiquités qui ont fait sa réputation. Le retour de l’œuvre de la doyenne ne se fait pas sans un pincement au cœur, tant le contentement, la suffisance, ont dépouillé le texte. Regret d’autant plus amer, que la gardienne n’est pas seulement une écrivaine. Elle a été un gouvernail et un baromètre dont le legs reste encore fondateur d’un déchirement sans fin.
Elle a coloré grandement et inconsciemment les lettres nationales dans une logique de genre et de statut qui a conforté tous les clichés sur le devoir maternel, la préservation des mœurs, la vertu, une idée de la retenue littéraire, une vision morale conciliatrice et diplomatique que les gardiens du temple, bien mâles, possiblement religieux, n’avaient plus qu’à célébrer pour gagner en sursis. La littérature peut-elle évoluer dans un corset étroit et étouffant, doit-elle comme dans une logique épicière ménager la chèvre et le chou, donner des gages de sa bonne conduite aux inquisitions ? Sans mérites ni affres, ni rejets, Aminata Sow Fall a donné cette licence, tout compte fait, toute bourgeoise, d’un regard pondéré et neutre, probablement dépolitisé, qui au bout du compte, conforte toute la structure de domination. L’injonction au respect, le refus d’agiter la mer des idées, pour préserver la paix sociale et sa légendaire stabilité, sont proprement l’argument par excellence pour étouffer le débat, miner la création, dont on délimite d’avance le périmètre du « permis ». Si la vitalité se trouve dans la saine et sainte controverse, gageons que dans le moule des convenances, elle devient le bras armé du conservatisme.
Le plafond de verre féministe ?
Elle l’a d’ailleurs compris en reprenant le flambeau, Mariama Bâ. Elle l’étoffe certes, le revivifie, se borne à déchirer le corset. Elle déchire le bâillon des consensus dans sa Si Longue lettre (1979). Sa complainte est pourtant toujours marquée par cette docilité de l’attente qui subit. Les évènements et leur cours la percutent et si les lettres chez elle sont un facteur d’émancipation, c’est bien souvent dans une proportion timide, tant l’héritière dans sa rébellion même, pave la voie à cette idée de soumission à l’ordre patriarcal, qu’elle gifle, mais qu’elle renonce à déboulonner. On est troublé par ce roman puissant, si bien écrit, mais qui dans son huis-clos, dit encore l’extrême fragilité d’une condition qui essaie de grignoter sa survie, pactisant avec son bourreau. Si le livre résonne, et que son écho paraît fort, c’est que Mariama Bâ, encore plus verte et vive dans Un chant écarlate (1981), semble combattre après avoir déjà renoncé. Cette troublante impression tend à montrer qu’au cœur même des classiques féministes sénégalais, les doléances restent timides.
Contexte sans doute, cette littérature féminine naissante se débat dans ses contradictions éthiques, bourgeoises, transpercée elle aussi par des logiques de classes. Entre un désir de desserrer l’étreinte des pesanteurs et la nécessité d’honorer ce cœur féminin, l’idée sacrée de la « mère », arbitre des élégances dont le cœur doit être arrimé à la raison nationale. Tâche qui requiert en conséquence modération, acte premier, notons-le, dans ce cas précis, de la renonciation car céder sur l’horizon final, c’est se contacter de victoires mineures. Malgré la violence de la peine, le beau lamento de l’épouse éplorée et trahie, le discours féministe, Mariama Bâ ne renverse pas la table, elle pleure juste son sort. Comment concilier la notabilité maternelle par laquelle la société vous donne des galons de respectabilité avec ce cri littéraire libérateur qui vibre dans le cœur ? Défi générationnel avec infortunes et fortunes, elle dit la déchirure originelle de l’être féminin, et des lettres féministes sénégalaises. Argument déjà visité et pourtant fondateur, l’extraction bourgeoise de nombre d’autrices en fait des continuatrices inconscientes d’un ordre, telle Madame de La Fayette et sa Princesse de Clèves dont les tourments paraissent finalement si anecdotiques face à l’étendue du malheur féminin de l’époque.
Les problèmes de la société comme voix de la raison ?
Si l’idée de dénoncer la société et ses problèmes forment le canevas de l’essentiel la production littéraire nationale – toutes les autrices en cochent les cases - elle semble plafonner à ce devoir de pondération que d’autres héritières, quoique brillantes, dans le même esprit que Mariama Bâ, n’ont pas su déplafonner. Il se trouve ainsi sur le plateau des lettres, en fonction des auteurs, à la fois du talent, du panache, de l’inventivité, du punch et un courage à révéler les coutures, hideurs, arrière-cuisine, de la société. Et en même temps, tout cet élan semble parfois tourner autour de lui-même. On retrouve cette filiation à la fois dans la génération des années 80 et bien au-delà. Héritières à leur corps défendant, par dessein aussi probablement, de cette littérature qui module son cri pour ne pas effrayer la morale nationale.
« La Beat génération sénégalaise » ?
D’autres pousseront le hurlement bien plus loin, et il n’est pas de hasard qu’elles forment un club d’amies. Elles forment une génération littéraire au courant des mêmes années 80-90-2000, avec Ken Bugul (Le baobab fou, 84), Khady Sylla (Le jeu de la mer, 1992), Aminata Sophie Dieye (La nuit est tombée sur Dakar, 2004). Triptyque refondateur d’une idée du roman, de la chronique, et d’une littérature du dévoilement, de l’audace, du charnel et des bas-fonds, elles ont jeté une fraicheur littéraire à leurs risques et périls. En gagnant à l’extérieur une notoriété, et en perdant parfois sur le territoire national la figure de l’exemplarité si précieuse pour les mondanités littéraires locales. Même chez elles, où le gage de liberté semble plus prononcé, l’être féminin se débat contre des lettres féministes, tant leur combat pour le droit des femmes sera intermittent, parfois contradictoire, dans une logique qui ne permet pas forcément de les situer sur l’échiquier féministe. Exemple notoire, Ken Bugul – probablement la plus connue du trio – fraye avec un discours féministe à la fois ambigu et troublant, parfois à rebours de son œuvre, parfois à l’avant-garde de ce combat. On note, avec le développement fulgurant de la question féministe récemment, l’émergence d’une vision plus radicale, portée par de jeunes autrices, qui essaient de puiser dans cet héritage tout en traçant des chemins de rupture plus francs.
L’exil et le contournement ?
Dans ce paysage, il apparait parfois des profils singuliers, qui mènent leur carrière en contournant les écueils, et dont le souffle international déjoue les enfermements et les assignations. Fatou Diome semble appartenir à cette classe, il n’y a pas besoin de redire combien son œuvre est féministe, il suffit de la lire. Elle a empoigné les questions identitaires, les angoisses personnelles, l’attachement au pays Sérère, l’endurance des femmes. On pourrait citer, avec la même vista, une Khadi Hane aussi, entre autres. Au total, autant de sujets que l’on retrouve chez toutes ses devancières et ses consœurs, mais avec un regard et une maestria qui lui sont propres. Avec aussi un détachement qui peut la précipiter dans la désaffection et l’exil littéraire au sens premier du terme.
Si Awa Thiam, dans le registre de l’essai moins soumis aux contraintes esthétiques, a poussé un cri dans son Parole aux négresses (1978), elle semble bien seule hors du champ universitaire à avoir charpenté un travail d’exploration sur les féminismes et leurs liens avec la littérature. Son texte fondateur reste une Bible qui traverse les époques en ouvrant encore plus grand le champ. Bien sûr, il est impossible de prétendre à l’exhaustivité, tant les écrivaines sénégalaises sont nombreuses, différentes, entre la France, l’Afrique et le monde. Il serait imprudent de dresser une liste, les omissions seraient terribles, les exceptions nombreuses. Elles foisonnent. Avec des récits, des préoccupations, des intérêts différents. Mais le cœur du sujet reste commun.
Comment une littérature féministe peut-elle naitre, s’épanouir, porter la flamme du combat, sans trahir aucune des implications de l’écosystème littéraire ? Voilà bien une équation difficile à résoudre. Elle a été pendant longtemps la prison de la littérature féministe. Si les ainées comme Aminata Sow Fall ont décidé d’en épouser les murs et les contours à dessein ou à décharge, et que les héritières ont crié pour s’en échapper, la réalité semble bien complexe. Dans cette longue route féministe, chez beaucoup d’écrivaines sénégalaises, existe un malaise tenace quant au bon dosage du discours féministe, pour à la fois satisfaire la littérature comme esthétique, la société comme code moral et prescripteur, et les principes qui les meuvent comme devise et étendard.
On assiste ainsi à une forme de cohabitation entre les exigences morales et les exigences libertaires. Malgré la diversité des profils, le sujet demeure, et les nouvelles générations semblent toujours tiraillées par ces questions dans un contexte de regain religieux. Dans leurs productions, connues ou inconnues, la société devient le réceptacle anonyme et impersonnel où l’on projette le courage comme les renoncements, tant l’acte de dissidence, comme la révolution chez Camus, ne peut aller à son terme sans risquer de défaire le fragile fil de l’équilibre social et identitaire.
Combien d'Astou Sokhna ont dû vivre le calvaire dans des maternités, alors qu’elles doivent enfanter dans la douleur ? Les Astou Sokhna que des accoucheuses qui portent mal leur nom n’ont pas entouré de la bienveillance requise sont nombreuses
Astou Sokhna! Un nom que n’oublieront jamais, ou pas de sitôt, les populations de la commune de Louga, située à 200 km de Dakar. Même au-delà des frontières du Sénégal où l’affaire fait grand bruit, Astou Sokhna, ce sera toujours comme un mauvais rêve. Non pas parce que cette femme représente une grande figure de la lutte contre l’esclavage ou qu’elle a contribué à la dernière qualification historique des Lions de la Teranga pour la prochaine coupe du monde de football Qatar 2022.
Mais Astou Sokhna, devient une icône malgré elle, parce qu’elle est morte en voulant donner la vie! A raison, l’émotion demeure encore grande dans ce pays qui constitue un véritable vivier de médecins sur le continent et où dont des hôpitaux sont cités comme des références sous les tropiques. Sauf que le centre régional de santé de Louga, lui, s’est taillé, à en croire les dénonciations des habitants de cette localité, une réputation peu enviable de goulag pour les femmes.
Et c’est pour que plus jamais les femmes ne subissent dans cet hôpital «toutes les formes de violences», que plus de 65 000 signataires, juste dans l’après-midi de ce lundi, d’une pétition ont dénoncé, comme la famille de Astou Sokhna, les «négligences médicales» qui y ont cours. Certes, sur le continent noir où tout est encore priorité, certains centres de santé manquent encore de tout, mais la vie est si précieuse, que toute femme qui veut en donner, doit bénéficier des meilleures conditions de soins et de l’environnement le mieux pensé en la matière. Ce qui, malheureusement, n’a pas toujours été le cas.
Mais combien de Astou Sokhna ont dû vivre le calvaire dans des maternités, alors qu’elles étaient déjà condamnées à enfanter dans la douleur, châtiment originel qui colle à la femme depuis le jardin d’Eden, où Eve a fait manger à Adam, le fruit défendu, selon le Livre de la Genèse, cher aux Chrétiens? Elles sont nombreuses les Astou Sokhna que des accoucheuses qui portent mal leur nom de sages-femmes, n’ont pas entouré de la bienveillance que nécessitait leur état.
«Quand tu prenais du plaisir est-ce que nous on était là»? Ce serait le genre de propos que n’hésitent pas à balancer des sages-femmes à la figure de femmes en train de geindre de douleurs atroces sur la table d’accouchement. Cependant, elles ne sont pas toutes ainsi, car de nombreux témoignages, et des plus beaux, magnifient des sages-femmes qui savent trouver les mots pour réconforter leurs semblables en ces moments délicats de leur vie. Ce serait donc excessif, voir inadmissible et ingrat, de jeter le bébé avec l’eau du bain. Même si, selon le proverbe bien africain c’est un seul âne qui a mangé la farine et la bouche de tous les ânes est devenue blanche, on ne peut pas ne pas reconnaître le professionnalisme et la douceur de ce corps de métier dont l’exercice est loin d’être le plus facile.
Pourvu que la désormais affaire Astou Sokhna qui a, en toute logique, en attendant que toutes les responsabilités soient situées, suscité émoi et colère à Louga devienne vite un mauvais souvenir et que de belles histoires d’accouchement noient les cauchemars de toutes ces femmes qui meurent en voulant donner la vie. Car nous en sommes tous conscients, tant qu’ils en ont les moyens, les médecins sauvent plus de vies qu’ils n’en perdent.