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1 décembre 2024
Femmes
FATOUMATA BÂ, LE NUMÉRIQUE AFRICAIN AU FÉMININ
Sénégalaise, vivant en France, ayant installé le siège de Janngo en Côte d’Ivoire, elle a créé une structure financière qui veut aider au développement des jeunes pousses africaines
Comme tous les mois, RFI et Jeune Afrique reçoivent sur les antennes de RFI un grand invité de l’économie. Ce mois-ci, il s’agit d’une grande invitée en la personne de Fatoumata Bâ, fondatrice du fonds d’investissement Janngo.
Sénégalaise, vivant en France, ayant installé le siège de Janngo en Côte d’Ivoire, Fatoumata Bâ a créé une structure financière qui veut aider au développement des jeunes pousses africaines. Et des jeunes pousses africaines dirigées par des femmes pour des femmes. Faciliter l’essor économique d’entreprises dirigées par des femmes serait, selon Fatoumata Bâ, un formidable instrument de développement économique pour le continent africain.
LE DROIT A L’INFORMATION, GAGE DE LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE
Au Sénégal, il y a un problème d’accès à l’information des femmes, et à l’information sur des femmes, souligne Gilles Fausto, représentant de l’Institut Pano
L’institut Panos dans le cadre de son projet «Femmes: occupez les médias !», a tenu une réunion nationale hier, jeudi 1 octobre 2020 sur «L’accès à l’information des femmes et sur les femmes au Sénégal». Il ressort des débats que le droit à l’information est un gage de la démocratie participative et un moyen pour les femmes de demander des comptes aux gouvernants. Et c’est aux femmes qui sont dans les médias de faire des efforts sur ce plan.
Au Sénégal, il y a un problème d’accès à l’information des femmes, et à l’information sur des femmes, souligne Gilles Fausto, représentant de l’Institut Panos qui se prononçait lors de la réunion nationale sur «L’accès à l’information des femmes et sur les femmes au Sénégal», organisée hier, jeudi 1er octobre 2020. Le Sénégal fait partis de presque toutes les Conventions internationales relatives à l’accès à l’information et membre de plusieurs mécanismes promouvant l’accès à l’information en général, fait remarquer. Mais, l’accès à l’information des femmes et sur les femmes pose problème, regrettera-t-il.
Poursuivant son propos, il relève que dans la «législation sénégalaise, même si la Constitution consacre l’accès à l’information, la loi sur l’accès à l’information universelle reste bloquée à l’Assemblée nationale depuis 2018. Et l’absence d’une législation nationale sur l’accès à l’information peut, à notre niveau, empêcher aux femmes d’exercer le droit à l’information et à la communication. Le droit à l’information et à la communication est un gage de la démocratie participative et un moyen pour les femmes de demander des comptes au gouvernement», expliquera le représentant de l’institut Panos. C’est un moyen également pour elles de participer à l’action gouvernemental et de prendre des décisions en toute connaissance de cause avance-t-il.
Pour lui, si cette loi n’est pas protégée, il est évident que les femmes sont celles-là qui sont les plus lésées. «Ce débat public est posé pour sonner l’alerte aux gouvernants ; si on parle de gouvernance ouverte et de gouvernance participative, il y a des éléments déterminants qu’il faut établir : des règles claires d’abord et avoir une universalité de l’accès à l’information». Il souhaite que les recommandations qui seront formulées à l’issue de la rencontre amènent les décideurs politiques à se rappeler du projet de loi et de procéder à une seconde lecture pour insérer des dispositions qui sont consacrées à l’accès des femmes à l’information et l’accès à l’information par les femmes. Babacar Diagne, le président du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) qui prenait part à cette journée de travail pense qu’au Sénégal, l’accès à l’information des femmes et l’accès à l’information sur les femmes pose problème. «C’est un problème d’égo que nous devrons pulvériser pour avancer», dit-il. «D’abord parce que nous avons dans tous les domaines des expertises de femmes extrêmement importantes et variées».
A son avis, «c’est aux femmes qui sont dans les rédactions de faire des efforts importants sur ce plan». Le deuxième aspect c’est l’information sur les femmes. Selon lui, «on doit faire l’inventaire des expertises de femmes sinon on aura sur des questions importantes toujours des plateaux à 99% hommes et cela n’aide pas à avancer les choses. Tant que les femmes des médias vont véhiculer les mêmes stéréotypes que les hommes, on ne s’en sortira pas».
par l'éditorialiste de seneplus, serigne saliou guèye
TROIS DECENNIES POUR PRENDRE LE POUVOIR
En 30 ans, le Sénégal a enregistré des progrès importants dans la scolarisation des filles. Résultat : aujourd’hui dans tous les examens au niveau des ordres d’enseignement du primaire, du moyen et du secondaire, les filles dament le pion aux garçons
Serigne Saliou Guèye de SenePlus |
Publication 29/09/2020
La conférence mondiale sur l’Éducation Pour Tous (EPT) réunie à Jomtien, en Thaïlande, et la 4e Conférence mondiale sur les femmes, qui s’est tenue à Pékin en septembre 1995 ont été un tournant décisif dans l’inscription massive des filles à l’école avec un projet comme la Scofi et aussi l’appui de la coopération bilatérale et de certaines institutions internationales. En 30 ans, le Sénégal a enregistré des progrès importants dans la scolarisation des filles. Résultat : aujourd’hui dans tous les examens au niveau des ordres d’enseignement du primaire, du moyen et du secondaire, les filles dament le pion aux garçons de par le nombre d’inscrits et, souvent, le taux de réussites
Les droits des filles et des femmes sont garantis par la Convention relative aux droits de l’enfant, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement et le Programme d’Action élaboré lors de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, qui a eu lieu à Pékin en septembre 1995. Ledit programme, adopté à l’unanimité par les 189 Etats présents, définit douze domaines prioritaires d’intervention qui se déclinent en un ensemble d’objectifs stratégiques ; l’objectif 2 étant de favoriser l’égal accès à l’éducation et à la formation. Les gouvernements y reconnaissent que « l’égalité des droits, des chances et de l’accès aux ressources, le partage égal des responsabilités familiales et un partenariat harmonieux entre les femmes et les hommes sont essentiels à leur bien-être et à celui de leurs familles ainsi qu’à l’affermissement de la démocratie ».
La Conférence de Pékin proclame que l’égalité entre les femmes et les hommes est une condition essentielle du développement durable, de la paix et de la démocratie. Douze objectifs stratégiques sont identifiés, que les Etats s’engagent à traduire dans des politiques nationales. Cinq ans avant la plateforme de Pékin, la conférence mondiale sur l’Éducation Pour Tous (EPT) s’est réunie à Jomtien, en Thaïlande. Les représentants de 155 pays et 150 organisations se sont engagés à garantir la scolarisation de base pour tous à l’orée 2000.
Ainsi plusieurs institutions internationales se sont engagées à promouvoir le développement de la scolarisation des filles. Ainsi, entre 1999 et 2007, des progrès considérables ont été effectués au niveau mondial : environ 22 millions de filles de plus ont été inscrites dans les écoles primaires. De ce fait, les écarts entre les sexes au niveau des inscriptions à l’école primaire ont diminué dans beaucoup de pays.
Et vint le SCOFI !
Au niveau national, des initiatives n’ont pas manqué. C’est ainsi que le Sénégal, bien que plongé dans une crise économique sans précédent, s’est engagé à mettre en œuvre les décisions de Pékin et de Jomtien. Au niveau du ministère de l’Éducation nationale, le projet gouvernemental de scolarisation des filles appelé Scofi a été mis en place en 1994. Il a essentiellement pour vocation et mission de mener des actions de plaidoyer, d’information, de communication visant à promouvoir massivement l’inscription des filles à l’école. Dans un pays où les traditions et religions confinent la femme à un statut de soumission, où l’on pense dans certains milieux conservateurs que l’éducation d’une fille n’est pas à pousser comme le dit Nabou dans Une si longue lettre de Mariama Ba, les résistances à un tel projet n’ont pas manqué.
L’objectif de la Scofi n’est pas seulement de scolariser mais aussi de pousser les filles à rester aussi longtemps à l’école que les garçons. Depuis les années 90, on a noté une baisse des inégalités sexuées dans la population scolaire. Si les inscriptions des garçons semblent connaitre un ralenti, celles des filles se sont nettement améliorées. Mais les statistiques ont montré que les garçons sont encore plus aptes à poursuivre les longues études. En 2000, les filles représentent 48,5 % des effectifs du primaire, mais 45,3 % des effectifs de l’enseignement secondaire, et seulement 25 % des effectifs de l’université de Dakar. Cette sous-représentation aux niveaux supérieurs est liée à des motifs économiques, familiaux, personnels, scolaires, à la violence physique, psychique voire sexuelle en milieu scolaire.
En 2018, il y a eu plus de filles inscrites au CI que de garçons
234584 contre 214842. Et il faut souligner que dans toutes les régions du Sénégal excepté Kédougou, Sédhiou, Rufisque et Ziguinchor, le taux d’inscription des filles est supérieur à celui des garçons. Et Diourbel, où les résistances ont été les plus vives contre la scolarisation des filles, a été pendant cette année 2018 la région où l’on a enregistré un fort taux d’inscription des filles au CI avec 20 996 contre 16 964 garçons. Et ce même si la région n’a pas enregistré un TBA (Taux Brut d’Admission) supérieur à 100 % chez les filles. L’analyse du taux global des inscriptions au CI selon le genre montre que le TBA au CI des filles est supérieur à celui des garçons. Cette situation traduit un indice de parité en faveur des filles.
En 2018, les effectifs scolarisés dans l’enseignement moyen général s’élevaient à 722 356 élèves dont 52,8 % de filles. Au niveau des académies, il apparaît selon un rapport de l’ANSD que celles de Thiès (120 610), de Pikine-Guédiawaye (88 920) et de Dakar (67 846) ont les plus gros effectifs tandis que celles de Kédougou (8 189), de Kaffrine (13 944) et de Matam (23 337) ont les plus faibles effectifs. En 2018, l’effectif total des élèves du secondaire général était de 339 225, dont 170 418 filles, soit 50,2 %. Donc la majorité des élèves du secondaire général étaient de sexe féminin cette année-là. Une tendance qui s’est poursuivie.
En effet entre 2000 et 2020, des pays de géants semblent avoir été franchis. Ainsi l’on remarqué qu’au niveau des résultats, que les filles, qui représentaient 54 % des candidats ayant subi les épreuves, ont réalisé une meilleure performance que les garçons à l’examen du Baccalauréat 2020 au Sénégal. Leur taux d’admission est de 52 %, toutes séries confondues, faisant mieux que les garçons.
Pour le BFEM, l’on a enregistré 177 434 candidats dont 54 % de filles. Les résultats détaillés ne sont pas encore disponibles mais les filles sont parties pour prendre le dessus sur les garçons.
Pour le CFEE et l’entrée en 6e de cette année-ci, les filles représentent 53 % des 285 812 candidats. Là aussi, la supériorité côté résultats est plutôt féminine. Pendant ces trois décennies, c’est-à-dire depuis Jomtien, le Sénégal est parvenu est combler le gap existant entre les garçons et les filles en matière de scolarisation. Mais toutefois le décrochage ou le maintien des filles aux niveaux moyen, secondaire et supérieur demeure encore un problème. Les facteurs culturels, les pesanteurs sociales, la pauvreté, les difficultés sociales demeurent encore des goulots d’étranglement pour atteindre l’objectif de les maintenir à l’école le plus longtemps possible.
CAROLINE FAYE, LA PREMIÈRE DÉPUTÉE DU SÉNÉGAL
Née à Foundiougne, elle a consacré sa vie à l’éducation et à la formation de ses concitoyens sur tout ce qui touche à la promotion sociale de la femme sénégalaise
Si depuis le tournant de l’an 2000, les différentes législatures comptent presque autant d’hommes que de femmes, parité oblige, l’histoire retient que Caroline Faye est la toute première femme à siéger à l’Assemblée nationale sénégalaise. C’était entre 1963 et 1968 lors de la deuxième législature. Née à Foundiougne, Caroline Faye a consacré sa vie à l’éducation et à la formation de ses concitoyens sur tout ce qui touche à la promotion sociale de la femme sénégalaise. Institutrice de formation, elle est sortie de l’Ecole normale des jeunes filles de Rufisque en 1945. Mais elle attendra dix ans pour obtenir son diplôme d’institutrice parce qu’elle avait refusé de se faire examiner par des «inspecteurs coloniaux arrogants». Son diplôme en poche, elle enseigne à Louga, Thiès, Mbour, avant de diriger l’Ecole des jeunes filles de cette localité jusqu’en 1962.
C’est en 1952 que Caroline Faye fait son entrée en politique. Son objectif, amener les femmes des campagnes à s’intéresser à la politique. Ainsi, dès 1951, Caroline Faye crée des associations féminines. Elle sillonne le pays en allant de village en village pour lancer un appel aux paysans analphabètes. Elle les incite à s’organiser et à s’employer activement en vue d’une amélioration de leurs conditions de vie. En 1963 donc, Caroline Faye est élue députée. Elle y occupera les fonctions de présidente de la Commission des affaires sociales, de la fonction publique et du travail. Fort de ses dix mandats, elle a été, en 1973, la seule femme à avoir siégé dans la Commission pour l’étude du projet de loi portant Code de la famille. Elle a été également la première femme ministre sous Senghor. Elle a été vice-présidente du Conseil national des femmes de l’Union progressiste sénégalaise (Ups) en 1964. Caroline Faye est la veuve de l’ancien maire de Mbour, Demba Diop, assassiné en 1973. En hommage à son parcours politique, son nom a été donné au grand stade de la ville de Mbour.
(Source : ‘’Cahiers de l’Alternance’’ du Cesti, édition 2011)
NGABOU FERME SES PORTES À SOKHNA AÏDA
La veuve de Cheikh Béthio Thioune, défunt Khalif des Thiantacones, est déclarée persona non grata à Touba pour la célébration du Magal de Touba. En cause son refus de se ranger derrière Serigne Saliou Thioune, l’héritier du défunt.
La veuve de Cheikh Béthio Thioune, défunt Khalif des Thiantacones, est déclarée persona non grata à Touba pour la célébration du Magal de Touba. En cause son refus de se ranger derrière Serigne Saliou Thioune, l’héritier du défunt.
"Depuis plusieurs mois, une grande partie de la communauté mouride du Sénégal et d’ailleurs nous interrogent au sujet de cette dame Sokhna Aïda Diallo qui est l’une des veuves du regretté Serigne Cheikh Béthio Thioune. Des interpellations qui nous ont poussés nous aussi à nous en ouvrir au Khalife général des mourides, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, qui est et reste le seul habilité à nous orienter. Avec Serigne Cheikh Bassirou Abdou Khadre, le porte-parole du Khalif général des mourides, nous sommes allés voir Serigne Cheikh Saliou qui est le Khalif de la famille de Serigne Saliou Mbacké. Mais celui-ci nous a clairement fait comprendre que lui-même se plierait à toute décision prise par le Khalif général des mourides, concernant Sokhna Aïda Diallo, tout comme toute autre affaire", a précisé Modou Lô Ngabou, le responsable moral du Dahira Safinatoul Amane, dans une déclaration lue à la presse, hier jeudi.
Le responsable de souligner : "depuis l’année dernière, Mountakha Bassirou Mbacké avait effectué une sortie pour donner un ’’ndigël’’ à Sokhna Aïda Diallo de rentrer dans les rangs. Il lui avait été très explicitement demandé de se ranger derrière Serigne Saliou Thioune qui est aujourd’hui, le Khalif de son défunt père. Puisque jusque-là Serigne Mountakha n’a pas encore fait une autre déclaration en ce sens, nous retenons alors que ce ’’ndigël’’ reste toujours d’actualité. Cela dit, tout le monde a constaté que Sokhna Aïda n’a rien changé de ses comportements et continue aujourd’hui encore de désobéir au ’’ndigël’’ du Khalif général des mourides. Contrairement à Serigne Saliou Thioune, qui, lui, en bon disciple de Serigne Touba, a respecté à la lettre les consignes du Khalif. Quiconque ne respecte pas le ’’ndigël’’ n’est pas un véritable talibé mouride".
Texte Collectif
L’IMMUNITÉ MÉDIATIQUE, UN PRIVILÈGE MASCULIN ?
Les médias se font de plus en plus le relais de discours violents et misogynes sur nos corps, nos attitudes, nos comportements et les valeurs que nous sommes supposées incarner et transmettre à notre progéniture
Qui a droit à une immunité médiatique ? L’information est-elle exclusivement masculine ? Comment les représentations des femmes dans les médias contribuent-elles à accroître les inégalités entre les sexes et à imprimer dans les imaginaires féminins et masculins, une image dévalorisante des femmes.
La libéralisation du secteur audiovisuel et la recherche de buzz de la presse en règle générale, accentuent les divisions entre hommes et femmes. Les médias se font de plus en plus le relais de discours violents et misogynes sur nos corps, nos attitudes, nos comportements et les valeurs que nous sommes supposées incarner et transmettre à notre progéniture. Cela se traduit par une essentialisation de la femme sénégalaise respectueuse d’un certain conformisme à l’image de femmes vertueuses dont la qualité est avant tout d’être mère, fille, sœur de personnages illustres de notre histoire. L’on subit l’instrumentalisation exaltée de leur abnégation, de leur soumission, de leur patience, de leur générosité, de leur dévouement qui n’aurait d’autre fonction que de rappeler les « déviantes » à l’ordre et légitimer la domination masculine, en perpétuant une identité féminine figée dans laquelle nous ne nous reconnaissons guère.
La plupart des médias, faits par et pour les hommes, offrent une représentation biaisée des femmes et passent sous silence les oppressions qu’elles subissent. On pense notamment à tous ces articles et émissions télévisées qui, lorsqu’ils décident d’aborder la question des violences faites aux femmes, reproduisent une analyse stéréotypée des situations, sans tenir compte de l’asymétrie du pouvoir entre hommes et femmes et en affichant clairement un parti pris qui perpétue le privilège masculin. Il faut également dénoncer toutes les émissions religieuses qui produisent, à foison, des discours réactionnaires sur les femmes ; celles dans lesquelles des animatrices interrogent des hommes et quelquefois d’autres femmes supposé-e-s savoir ce que les textes religieux prescrivent aux femmes, en matière de soumission à l’ordre moral masculin. Cet angle de traitement de l’information protège les hommes, avec en arrière-plan, l’idée de comprendre leur vécu, sans jamais porter attention aux conséquences de la violence sur les femmes qui la vivent. Il leur est accordé d’office une sorte d’immunité médiatique permettant de les blanchir de tout péché. Rappelons-nous il y a sept ans, une affaire de viol avait défrayé la chronique. Un célèbre journaliste avait été confronté à une jeune femme qui l’avait accusé de viol. Cette affaire renforce ce dont nous parlons aujourd’hui. La quasi-totalité des journaux, radios et sites web avaient participé à blâmer la victime par une sorte de chasse aux sorcières mettant l’emphase sur la victime, en lui reprochant ses comportements jugés non conventionnels. Quant au coupable, après qu’il ait purgé une partie de sa peine de prison, il s’est refait une virginité médiatique. En effet, les médias à sensation mettent souvent davantage la focale sur la victime, en n’hésitant pas à détailler la vie et/ou les agressions subies, le tout accompagné de propos disqualifiants, voire diffamants. A cela s'ajoute une omission des mêmes détails sur les auteurs, leur offrant presque une anonymisation ou transformant certains auteurs de violences en victimes de l’hystérie féminine subséquente. Pour les victimes, le traitement par le buzz, la peopolisation ou la légèreté des termes employés pour parler de ces crimes et situations extrêmement graves par lesquelles elles sont passées ainsi que le sexisme systémique rajouté au sordide, constituent un traumatisme cumulatif. Traumatisme en chaîne, dans un contexte social qui, encore aujourd'hui, impute, aux victimes femmes, la faute de ce qu’elles ont subi. Tout ceci restreint les possibilités pour ces femmes de se relever de telles atrocités. Ce traitement médiatique est aussi désastreux et entravant pour les professionnels de santé, qui faute de pouvoir compter sur un système de prévention et des relais psychosociaux structurés et efficaces, se retrouvent à jouer les pompiers de situations fortement compromises du fait de ces traumatismes cumulatifs auxquels participent bien largement les organes de presse.
Sept ans après cette première affaire, où en est-on ? Le constat est amer. Entre un professeur de philosophie qui fait l’apologie du viol pendant une émission dédiée à la journée internationale des droits des femmes et une femme traitée de folle, car elle a osé parler d’une grossesse contractée hors des liens du mariage, l’on voit que la situation est toujours la même.
Les mobilisations autour des hashtags #Nopiwuma #Doyna #TontonSaïSaï #BalanceTonSaïSaï et plus récemment les sorties sur les réseaux sociaux de Ndella Madior Diouf étaient une belle occasion pour les médias de soutenir les droits des femmes en amplifiant, par une enquête sérieuse, sa voix et celles de centaines d’autres qui vivent une situation similaire ou auraient subi des agressions sexuelles et qui l’ont appelée pour partager leur vécu.
Force est de constater que, depuis l’éclatement de cette affaire, l’angle de traitement des médias demeure sensiblement le même. Les gros titres des journaux dépeignent ces “mauvaises” femmes comme des êtres aux mœurs légères, sans scrupules, de sorte que toute la faute est rejetée sur elles, encore une fois. Le refus de paternité, thème majoritairement traité, donc de responsabilité de l’homme de ses actes, l’est en jetant l’opprobre sur les femmes, et pis même, en faisant intervenir des experts masculins pour la plupart qui viendront expliquer soit d’un point de vue juridique ou religieux une situation qui concerne aussi bien les hommes que les femmes.
Cette démarche n’est nullement cohérente avec le devoir d’informer dans le respect des règles d’éthique et de déontologie. Un travail journalistique sérieux et engagé doit « centrer » les voix des premières concernées. La presse contribue à la socialisation des garçons et des filles, tout en fabriquant et reproduisant des modèles et rôles sociaux. Il serait donc important d’avoir des perspectives journalistiques qui contribuent à démarginaliser les groupes exclus et réduire les inégalités entre les femmes et les hommes à travers des représentations anti-oppressives.
Pour sensibiliser, il faudrait que les médias utilisent des mots plus justes dans la façon de représenter les femmes et qu’ils évitent de minimiser la souffrance des premières concernées par le silence, le sensationnalisme ou encore la banalisation de l’expérience. Un féminicide n’est pas un “drame conjugal”.
Nous proposons que les groupes de presse fassent un travail de fond sur la suppression des stéréotypes, qu’on se questionne sur les choix des invité.e.s, que l’on déconstruise le climat sexiste qui autorise l’expression de propos discriminants sur les plateaux. Une telle démarche ne saurait se faire sans une formation approfondie sur les représentations sexuées des rôles et statuts sociaux et une réflexion sur les préjugés des médias en lien notamment avec la classe, l’origine, les opinions, les choix politiques, l’appartenance religieuse et de réelles stratégies de prise en compte des voix de toutes.
Signataires :
Pr Mame-Penda Ba, UFR Sciences Juridiques et Politiques, Université Gaston Berger Directrice du LASPAD (Laboratoire d'Analyse des Sociétés et Pouvoirs/Afrique-Diaspora)
Dr Selly Ba, Sociologue
Dr Oumoul Khaïry Coulibaly, sociologue et spécialiste genre
Dr Halima Diallo, psychologue sociale et chargée de cours
Dr. Rama Salla Dieng, Lecturer in African Studies and International Development, University of Edinburgh
Ndèye Yacine Faye, Réseau des jeunes femmes leaders d'Afrique de l'Ouest et chargée de communication de Dafa Doy
Mariama Faye, spécialiste en Sciences Sociales, militante des droits des femmes et membre d'Organisations de la Société Civile
Diakhoumba Gassama, juriste, membre des Forum Féministe Sénégalais et Africain et du conseil d'administration de l'Association pour les Droits des Femmes dans le Développement (AWID)
Marame Guèye, Ph.D., Associate Professor of African and African Diaspora Literatures and Gender, Department of English, East Carolina University
Marina Kabou, juriste, doctorante, membre de l’AJS, Coordinatrice du collectif DafaDoy
Ndèye Fatou Kane, études sur le genre, EHESS Paris
Laïty Fary Ndiaye, sociologue, organisatrice communautaire, chercheure associée à l'Institut Simone de Beauvoir (Concordia University) et membre fondatrice du collectif Jàma
Daba Ndione, sociologue
Fatou Warkha Sambe, militante pour le respect des droits de femmes et fondatrice de WarkhaTv
Dr Fatou Sow, sociologue, ancienne chercheuse CNRS/UCAD
Khaïra Thiam, psychologue clinicienne, spécialisée en pathologies psychiatriques et criminologie clinique
Maïmouna Eliane Thior, doctorante en sociologie
MARIAMA BÂ, UNE FEMME ATYPIQUE
Marraine de la Maison d’éducation de Gorée, elle était une romancière dont le mérite est d’avoir exhibé les maux profonds des femmes sénégalaises qui, enfermées dans les coutumes et les exigences socioreligieuses, ont souffert en silence
Un style d’écriture particulièrement fin, une technique de description ahurissante… Toutes les qualités d’une bonne romancière se retrouvent chez Mariama Bâ. Le politiquement correct contraint bien à l’utilisation de l’expression «bête de littérature», mais elle lui va bien. La sensibilité fait des femmes les meilleures descriptrices, dit-on, Mariama Bâ confirme cette considération loin d’être sexiste.
En 52 ans de vie, la lauréate du premier prix Noma (1980) a su marquer la littérature africaine et surtout celle sénégalaise. Elle est née en 1929 et s’est éteinte en 1981. Ses expériences conjugales n’ont pas été un long fleuve tranquille avec trois mariages soldés par des divorces. Ses écrits abordent certains sujets auxquels elle a été confrontée. «Une si longue lettre», publiée en 1979, reste l’œuvre phare de Mariama Ba. Les thématiques liées à la cause des femmes abordées dans ce roman pointent, avec une méticulosité aiguisée, les embarras des épouses dans les foyers sénégalais. Le livre a été traduit en plusieurs langues à travers le monde. De même, «Un chant écarlate» publié, quelques années plus tard, à titre posthume, confirme sa trajectoire prodigieuse.
En effet, la dénonciation de la polygamie et l’injustice subie par les femmes mariées évoquées dans ses romans font croire qu’elle était une féministe sans doute engagée à travers la littérature… En tout cas, elle s’était enrôlée dans bon nombre d’associations féminines en prônant l’éducation et les droits des femmes.
Diplômée en enseignement à l’Ecole normale des jeunes filles de Rufisque, la marraine du lycée de jeunes filles de Gorée a pratiqué le métier d’enseignant près d’une dizaine d’années avant d’être mutée à l’inspection générale d’enseignement.
Mère de neuf enfants, Mariama Ba était fille d’un fonctionnaire d’Etat devenu ministre dans le premier gouvernement sénégalais.
VIDEO
LE CALVAIRE DES JEUNES FEMMES CÉLIBATAIRES AU SÉNÉGAL
La pression sociale se ressent beaucoup plus chez les jeunes filles qui ont tendance à se « jeter » sur le premier venu et sans y avoir mûrement réfléchi du fait de ne plus vouloir entendre : « Pourquoi tu ne te maries pas ? »
Harcelées pour qu'elles se marient, des jeunes Sénégalaises parlent de leur célibat et de la pression qu’elles subissent de leur entourage pour le mariage.
Au Sénégal, le Mariage constitue une vraie pression sociale pour les jeunes célibataires.
Ceci se ressent beaucoup plus chez les jeunes filles qui ont tendance à se « jeter » sur le premier venu et sans y avoir mûrement réfléchi du fait de ne plus vouloir entendre : « Pourquoi tu ne te maries pas ? », « Qu’est-ce que tu attends ? », « il est temps de choisir ? ».
Un reportage de Alassane Dia
LA POLÉMIQUE ENFLE AUTOUR DU FILM "MIGNONNES"
Le long-métrage de la franco-sénégalaise Maïmouna Doucouré qui dénonce l’hypersexualisation des petites filles est au centre d’une violente controverse. Ses détracteurs, qui se radicalisent, l’accusent de « pornographie » et d’« islamophobie »
Jeune Afrique |
Léo Pajon |
Publication 19/09/2020
Sur change.org, une plateforme permettant de lancer des pétitions en ligne, plus de 733 000 personnes ont déjà signé. Leur objectif : retirer le film Mignonnes de Netflix, et poursuivre en justice la réalisatrice, l’équipe du film, les parents des actrices, ainsi que le géant du site de streaming pour avoir diffusé du contenu « inapproprié » impliquant des mineurs.
« Film pédo-pornographique », « dégueulasse », « encourageant la pédophilie »… les commentaires accompagnant la pétition sont particulièrement violents. Des comptes Facebook d’homonymes de la réalisatrice fleurissent d’insultes en anglais : « Prostituée ! (…) Tu vas allez en enfer ! » Plus grave encore, selon nos sources, la réalisatrice et ses jeunes actrices auraient subi des menaces personnelles depuis plusieurs semaines.
Hypersexualisation
En Turquie, le film jugé « islamophobe et pédophile » a été purement et simplement interdit de diffusion. En cause, des images et un sujet jugés tendancieux. L’histoire de Mignonnes est celle d’une fillette de 11 ans qui se lance dans le twerk pour intégrer un groupe de danse dans son collège.
Maïmouna Doucouré expliquait lors de l’avant-première de son long métrage, mi-août, vouloir « dénoncer à travers (son) œuvre l’hypersexualisation des petites filles. » Des spectateurs s’étaient déjà sentis gênés, car le film montre ce qu’il dénonce : des gamines dans des poses lascives. Mais aucun ne remettait en cause les intentions de la cinéaste, ou ne percevait une dimension érotique dans le film qui a reçu en janvier le prix de la meilleure réalisation au Festival de Sundance.
Alors qu’en France la sortie de Mignonnes n’a pas vraiment fait de vagues, une communication particulièrement maladroite de Netflix a mis le feu aux poudres sur les réseaux sociaux fin août. Pour présenter le film rebaptisé Cuties, la plateforme avait utilisé une image racoleuse et écrit un résumé évoquant une petite fille qui « décide d’explorer sa féminité en défiant les traditions familiales. »
Pro-Trump et afroféministes
La polémique est aujourd’hui récupérée politiquement Outre-Atlantique par les ultraconservateurs proches de Donald Trump… La manipulation est d’autant plus profitable que Netflix, qui diffuse les documentaires du couple Obama, est perçu comme pro-Démocrates.
Selon le code de la Famille, les hommes ne font l'objet d'aucune poursuite judiciaire en cas de refus de paternité. Toute recherche de paternité est même interdite. Plusieurs associations appellent donc à une réforme de la loi
Au Sénégal, des femmes relancent le débat sur le refus de paternité, une pratique très courante dans le pays. Selon le code de la Famille, les hommes ne font l'objet d'aucune poursuite judiciaire en cas de refus de paternité. Toute recherche de paternité est même interdite. Plusieurs associations appellent donc à une réforme de la loi.