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25 novembre 2024
International
par Youssoupha Mbargane Guissé
LE RÔLE DES SCIENCES SOCIALES DANS LE COMBAT POUR LA SOUVERAINETÉ
EXCLUSIF SENEPLUS - Pour un véritable développement de l'Afrique, sa gouvernance doit s'approprier la sociologie et mieux comprendre les dynamiques sociales en jeu, afin de répondre aux aspirations des populations
Le modèle de développement économique extraverti et dépendant en œuvre dans la plupart des Etats-nations en Afrique dont le Sénégal, se fonde sur la loi de l’exploitation et du surprofit capitaliste et protège dans l’absolu les gros intérêts économiques, financiers et commerciaux étrangers internationaux. Un tel système ne profite qu’aux élites compradores au pouvoir et à leurs alliés des réseaux affairistes et s’est renforcé avec l’application drastique des Programmes d’Ajustement Structurel de la Banque mondiale et le FMI au début des années 80. La privation imposée de l’économie a démantelé les filières de production et les acquis sociaux, accentuant l’appauvrissement des populations. Ce modèle économique se focalise en priorité sur la productivité et les surprofits et écarte dans ses choix, options et programmes d’investissement, la qualité de vie des populations ainsi que les facteurs culturels constitutifs de leur personnalité et de leur dignité. Il en découle un mode de production des connaissances et des savoirs sur nos sociétés qui accorde une suprématie aux données quantitatives et statistiques au détriment des recherches sociales profitables aux aspirations des populations et aux intérêts stratégiques des Etats africains. Les données sociologiques, anthropologiques et culturelles ne sont pas pris en compte en réalité, alors qu’ils devraient approfondir et compléter les analyses des données fournies par les enquêtes quantitatives.
L’on assiste plutôt à une tyrannie des chiffres et à la promesse d’un hypothétique « développement durable » qui ne trompe plus personne. Ainsi, dans le modèle ce développement capitaliste dit parfois aussi « développement humain », disparaissent de la scène les véritables producteurs, les bénéficiaires légitimes et les ayant droits souverains de la production des richesses, c’est à dire le peuple travailleur. Ce système hégémonique de production de connaissances se perpétue par le rapport de force imposé par la domination politique et financière. En effet les fonds d’investissement de plusieurs milliards de FCA des prêts consentis sont décaissés par l’Etat au bénéfice en retour de commande aux sociétés et multinationales, aux investisseurs et des cabinets de consultance étrangers. Tel est le système, fermé sur lui-même autour des surprofits de groupes privés étrangers. L’argent retourne à ceux qui l’ont donné avec bénéfices et intérêts. Tel un serpent qui mord sa propre queue.
Le financement national de la recherche s’impose alors comme un instrument de souveraineté absolu à laquelle l’Etat souverain ne peut déroger au risque certain de perpétuer la dépendance structurelle. Il doit marquer la rupture nécessaire dans la production des sciences en dotant les instituts et centres de recherche de moyens financiers et matériels accrus pour former la masse critique indispensable à un développement scientifique d’envergure. En effet, les résultats scientifiques doivent servir à l’élaboration de politiques publiques pertinentes et vigoureuses dont la réussite bénéficie à toute la communauté nationale et consolide le renouveau collectif.
Les défis conceptuels de la transition
Les grands défis conceptuels de la transition historique de nos sociétés se heurte à l’emprise de l’universalisme occidental faisant subir à nos universités africaines et académies les méthodes et approches de l’eurocentrisme selon Boubacar Ly. (1989). [1] Il est indispensable dès lors de relever ces défis pour analyser les dynamiques et élaborer des stratégies d’anticipation sur les évolutions et les changements. Face au monopole et l’hégémonie de production, de diffusion et d’évaluation des savoirs par le monde occidental, l’urgence de l’autonomie conceptuelle des Africains et de la reconstruction identitaire exige en effet de « problématiser le choix de représentation du passé qui est celui de la sélection des futurs » souligne avec pertinence Mamadou Diouf (2000 :337).[2] Cela présuppose l’approche pluridisciplinaire, « la conjonction de méthodes d’inspirations théoriques et de sources documentaires d’origines disciplinaires variées » (Copans 1990 : 143 )[3]permettant de comprendre les transformations sociales et culturelles en termes de dynamique de la totalité et non de fragments. Ainsi le cloisonnement étanche entre les sciences sociales et les sciences de la nature doit être revu dans la problématique d’une approche holistique et totalisante des objets, réalités et processus. Les technologies numériques, et certaines possibilités ouvertes par les nouveaux progrès dans le domaine de l’intelligence, doivent affiner les analyses prospectives et la prévision stratégique.
La construction de la modernité africaine est notre destin inexorable ; elle passe nécessairement par l’autonomie conceptuelle et la souveraineté politique du continent. Cette modernité exige le renforcement des communautés scientifiques africaines dans tous les domaines et disciplines. Celles-ci doivent avoir la capacité d’élaborer les outils conceptuels nécessaires à l’analyse et à la compréhension renouvelées des situations complexes de transition. La sécurisation de la souveraineté acquise contre l’impérialisme qui ne laissera jamais tomber, le maintien vigilant de l’unité et de la cohésion sociale dans chaque pays, la construction d’une armature politique panafricaine de solidarité, le relèvement sensible du niveau de vie des masses, sont les premiers défis de la transition.
Comprendre la complexité
Les sciences sociales sont en effet un enjeu de taille car elles permettent de comprendre la complexité du monde actuel et les transformations en cours sur le continent africain. Elles donnent un éclairage indispensable sur l’environnement, les rapports sociaux, les pratiques sociales et culturelles, l’état des besoins Elles renseignent également sur les paramètres des tensions qui se développent dans la formation sociale à diverses échelles et ouvrent les voies politiques consensuelles de les résorber. C’est pourquoi les sciences sociales doivent dans leur unité globale et critique et leur renouvellement constant, constituer le noyau de connaissance politique de l’État et non la dépendance conceptuelle structurelle à l’égard des idéologues et stratèges de l’Occident.
Les sciences sociales doivent animer le changement social en Afrique en indiquant les tendances, les contours et leur opérationnalité. Toute l’histoire du développement économique et social, toute l’expérience de la construction de la modernité dans les sociétés avancées du monde, montrent le rôle capital joué par les sciences sociales dans toutes les innovations, dans la lutte idéologique pour l’éveil intellectuel des groupes dominés, dans les progrès politiques et les acquis sociaux pour les masses. Elles ont contribué de manière décisive à produire des savoirs pertinents sur lesquels les États, les industriels, les institutions, les communautés, les personnalités et leaders ont fondé leurs politiques, leurs programmes et leurs stratégies d’action et d’intervention ainsi que l’évaluation de celles-ci.
Les dynamiques de changement
L’expansion du capitalisme libéral produit partout dans le monde actuel de multiples déséquilibres et transformations des sociétés. Ainsi des mutations économiques, sociales et culturelles subséquentes, souvent rapides ou brutales, ont cours touchant les rapports entre l’État et la société, les rapports de classe, les relations de genre, de génération, d’ethnies et de régions, les questions écologiques, éthiques et morales. L’environnement de la pauvreté, la précarité existentielle et l’insécurité travaillent les individus et les communautés qui s’engagent alors dans la recherche de solutions échappatoires inédites et multiformes de résistance et de survie. La migration clandestine massive des jeunes en constitue une actualité bouleversante.
Tous ces processus sont rendus d’autant plus complexes et enchevêtrés qu’ils s’accomplissent à l’intérieur de mouvements incessants de décompositions et de recompositions sociologiques, démographiques et culturelles, à l’échelle urbaine et rurale. Une diversité d’acteurs émerge à la recherche d’identités plurielles, parfois contradictoires, développant des stratégies multiformes, réactivant formes sociales et survivances anciennes afin de s’approprier les nouvelles opportunités.
Des reclassements sociaux s’opèrent, se développent aussi des phénomènes de déclassement et de marginalisation sociale, lit de la violence dans ses formes réelles ou symboliques et expiatoires. L’ensemble de ces phénomènes liés les uns les autres montrent, si on en fait la projection sur les décennies à venir, une tendance lourde porteuse de crise et de bouleversements, si les révolutions en cours n’anticipent leur résorption. Au niveau politique central, dirigeants au pouvoir, élites, catégories dominantes et clientèles s’activent pour se repositionner dans le système et pérenniser le statut quo à leur profit. C’est ainsi d’ailleurs que le bloc hégémonique d’Etat au pouvoir, avec le soutien de ses segments et réseaux clientélistes, instaure la violence comme mode de gestion politique, face aux luttes démocratiques, citoyennes et à la résistance populaire.
Il est établi que la tendance de culminer à un régime de dictature est caractéristique du capitalisme impérialiste, lorsque la crise économique et la perte de légitimité atteignent le seuil critique de rupture. Ce phénomène de mutation politique a été douloureusement vécu par le peuple sénégalais sous le régime défait du président Macky Sall au sein duquel une mafia politique ethniciste a pris en otage la République, instaurant une culture de la corruption massive et de manipulations, généralisant à grande échelle la spoliation des ressources nationales, pratiquant maltraitance, tortures et tueries sur l’opposition et les masses. L’exercice de la violence d’Etat, de la répression policière et des crimes de sang, ont entrainé des troubles psychologiques et des pathologies auprès des victimes et des familles. Face au pouvoir répressif, les jeunes, les femmes et les masses ont cependant organisé la résistance en créant sur tous les terrains de la confrontation, des formes inédites de luttes profondément inspirées de la culture et des traditions. L’incroyable richesse des créations dans la communication déployée dans les réseaux sociaux au rythme des luttes, mais surtout l’immense phénomène de la « Sonkorisation » en sont des illustrations exemplaires.
Tous ces changements et inédits de la lutte populaire de résistance pour la souveraineté du pays et une voie endogène du développement, sont un champ d’études à approfondir pour connaitre la structure et les transformations du néocolonialisme, confronté à sa remise en cause radicale. Il faut dans ce sens des études à faire, prendre en considération une reconfiguration de l’espace politico-intellectuel du pays avec la montée en puissance des élites intellectuelles traditionnelles et religieux dont les analyses dans les débats de portée stratégique, ont été des contributions de grande valeur. Le plus remarquable est le phénoménal leadership du président du Pastef, Ousmane Sonko. Il constitue sans doute un sujet d’étude pour comprendre les racines socio-anthropologiques, les sources culturelles et spirituelles inspiratrices de cette révolution, de même les formes politiques tactiques inédites déployées pour triompher du régime du président Macky Sall. Il restera des études comparatives de toutes ces expériences de subversion de l’ordre néocolonial dans la région commune du Sahel et dans toutes les autres régions du continent. Il est nécessaire en effet pour tous les avant-gardes révolutionnaires et patriotiques sur le continent, d’accumuler une somme de connaissances relativement complètes sur le basculement historique en cours de l’Afrique vers son destin libre. C’est la condition pour établir les fondements de programmes stratégiques communs, soutenus par une puissante coordination politique des luttes sur le continent et dans la Diaspora.
S’appuyer sur les données des recherches
La gouvernance pour la souveraineté politique et le développement économique endogène de l’Afrique, doit s’approprier l’imagination sociologique,[4] s’appuyer sur la recherche sociale et s’imprégner des connaissances produites sur les hommes, les cultures, les milieux, les relations, les vécus et aspirations afin d’avoir une meilleure compréhension des dynamiques et tendances qui s’affirment. Les sciences sociales prises ainsi dans une approche pluridisciplinaire, ont un rôle de régulation et d’orientation dans l’application et l’évaluation des politiques sociales de l’État souverain, des pouvoirs municipaux, des organisations et institutions de la société civile. L’État souverain et tous les secteurs de production et d’échanges doivent ainsi accroitre leurs propres capacités d’anticipation, de suivi et de traitement articulé des problèmes à l’échelle locale et nationale, régionale et continentale.
Partenariat, cohésion et synergie
La politique doit être le renforcement des institutions et réseaux de recherche régionaux et panafricains, la mobilité des chercheurs-enseignants, des systèmes d’évaluation de très haut niveau, les publications scientifiques et de vulgarisation, mais aussi de promotion et de distinction honorifique de nos scientifiques et savants. Une attention particulière doit être accordée aux jeunes générations de chercheurs et enseignants pour la constitution d’une masse critique capable de prendre en charge les nouveaux paradigmes et de traiter les défis méthodologiques et thématiques. La génération précédente encore disponible pour l’enseignement et la formation à la recherche ne devrait pas être écartée par une mise à la retraite pour des raisons budgétaires, compte tenu des énormes besoins d’encadrement des étudiants. Une telle conception bureaucratique de tradition administrative coloniale étroite, nous semble désastreuse pour la continuité, le renouvellement et la performance dans nos universités et centres de recherche. Elle rompt d’ailleurs avec nos traditions africaines selon lesquels les jeunes apprennent des anciens qui eux, ont cheminé le plus longtemps avec Dieu. Les grandes universités les plus prestigieuses des pays développés du monde gardent toujours quant à elles, leurs vieux savants en activité pour encadrer des jeunes équipes hyper-inventives et performantes, assurant ainsi leur suprématie scientifique et d’innovation sur le reste du monde, dont précisément l’Afrique.
L’exploitation des résultats de la recherche sociale et leur valorisation servent à renforcer la vision politique stratégique de l’Etat souverain, appuyer les politiques publiques et la performance des entreprises privées nationales. La protection des inventions en brevets et du droit de propriété doit être assurée pour les intérêts des chercheurs, de l’État souverain et des institutions. L’objectif est de fonder les bases solides d’une culture scientifique partagée en mettant en place des infrastructures de publication, de traduction pour la vulgarisation dans les langues africaines les connaissances scientifiques au profit de la jeunesse, des femmes, des travailleurs, des associations et communautés de base. Les retombées en seront la rénovation certaine de la pensée sociale, le développement intellectuel supérieur et l’éveil de conscience des masses africaines. Une telle synergie par la mise en commun des moyens et le partage des résultats dans tous les secteurs, doit s’adosser sur une intégration des recherches aux niveaux régional et continental. Nkrumah[5] soulignait : « l’unité politique du continent est la condition du développement rapide non seulement de chaque pays, mais de tous les pays ». L’Afrique doit donc redevenir un foyer continental de rayonnement scientifique et d’innovation technologique digne de son héritage pharaonique. C’est l’une des grandes taches fécondes de la révolution africaine en marche.
[1] Boubacar Ly. (1989). Problèmes épistémologiques et méthodologiques des Sciences sociales en Afrique. Dakar : éd. UNESCO/CODESRIA.
[2] Mamadou Diouf (2000). Des historiens et des histoires, pourquoi faire ? L’histoire africaine entre l’État et les communautés. Canada : ICAS/RCA 34 :2.200, p.337.
[4] Charles W. Mills. (1959). L’imagination sociologique. Londres: Oxford University Press.
[5] Kwame Nkrumah (1964). L’Afrique doit s’unir. Paris, Présence Africaine.
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KANAKY, L'ÉTINCELLE DE LA RÉVOLTE
Deux siècles de domination n'ont pas éteint la flamme de la révolte en Nouvelle-Calédonie. Barrages, affrontements... La situation s'enlise dans une spirale de violence. Jusqu'où ira la France pour conserver ce dernier fleuron de son empire ?
La Nouvelle-Calédonie, ce confetti de l'empire colonial français dans le Pacifique, est une véritable poudrière prête à exploser à tout moment. Après plus de deux siècles de domination, les velléités d'indépendance du peuple kanak autochtone butent contre les intérêts de la puissance coloniale et des calédoches, descendants des colons français.
Ce qui aurait dû être un processus de décolonisation apaisé suite aux accords de Matignon en 1988 et de Nouméa en 1998 a viré au bras de fer. Les trois référendums sur l'indépendance prévus ont accouché d'une souris : deux "non" serrés en 2018 et 2020, puis le boycott massif des indépendantistes en 2021, rendant le scrutin caduc.
Désormais, la France joue son va-tout colonial en tentant d'imposer par la force le statu quo. Le projet de loi du gouvernement visant à "dégeler" le corps électoral figé depuis 1998 fait fi des équilibres précaires. En ouvrant les urnes aux derniers arrivants métropolitains, il vise à garantir une majorité loyaliste définitive au sein de la population.
Une provocation qui fait immanquablement resurgir les vieux démons chez les Kanaks. Leurs ancêtres ont payé un lourd tribut à la colonisation, subissant spoliations, cantonnement, Code de l'indigénat. L'espoir d'émancipation attisé par les accords de paix vole en éclats.
Résultat, la situation est redevenue explosive sur le Caillou, franchissant un cap avec les récentes violences meurtrières. Barrages, affrontements avec les milices caldoches et l'armée française... Le passé semble se rejouer dans une sinistre répétition.
CAMEROUN, UN ATTENTAT DANS UN BAR A BAMENDA
Au Cameroun, un attentat a fait environ 2 morts et 39 blessés à Bamenda, capitale de la région anglophone du Nord-ouest. Deux bombes se sont déclenchées samedi soir dans un bar prisé de la population.
Au Cameroun, un attentat a fait environ 2 morts et 39 blessés à Bamenda, capitale de la région anglophone du Nord-ouest. Deux bombes se sont déclenchées samedi soir dans un bar prisé de la population. L’attaque n’a pour l’instant pas été revendiquée.
Il était environ 20h et de nombreux clients étaient attablés lorsque deux engins ont explosé dans un bar situé en face d’une maternité et à 100 mètres à peine d’une base de la gendarmerie.
Parmi les blessés, un homme a pu s’en sortir. Il témoigne. « On était en train de boire un verre. Soudain, on a entendu une explosion. Un grand boum ! À ce moment-là, c'était le chaos. Ça a explosé derrière moi donc je ne sais pas ce qui s'est passé. C'est seulement après coup que j'ai réalisé qu'il y avait eu une bombe », raconte-t-il.
Et d’ajouter : « J'ai alors réalisé que je saignais de la jambe, de la hanche et du ventre. Je suis allé à l'hôpital. Ils m'ont pris en charge dans la nuit et je suis rentré chez moi. Je suis revenu ce matin faire un contrôle. Mais j'ai des problèmes d'oreilles à cause de l'explosion ».
L’hôpital régional de Bamenda a pris en charge les victimes. « Aussitôt informé, le directeur de l’hôpital a donné les instructions pour que les blessés soient pris en charge. On a utilisé notre groupe WhatsApp de travail pour mobiliser médecins et infirmiers. Sinon, la situation aurait été plus grave », raconte le Dr Samuel Anye, neurologue.
Les groupes séparatistes anglophones sont soupçonnés. Ils ont interdit la vente de bières produites par les Boissons du Cameroun, entreprise vue comme un symbole francophone et une ressource économique du pouvoir central. Or, ce bar continuait à vendre ces bières. Il avait d’ailleurs déjà été visé par une tentative d'attentat dans le passé. Les forces de sécurité étaient parvenues à faire détonner, sans faire de victime, un engin explosif déposé sur place.
Onze personnes blessées étaient encore hospitalisées dimanche. Capo Daniel, l’ex-leader indépendantiste en exil, qui désormais appelle à déposer les armes et demande des négociations avec le gouvernement, a condamné cette attaque.
par Edgard Gnansounou
REPENSER L’INTÉGRATION RÉGIONALE EN AFRIQUE DE L’OUEST
Nous nous sommes appropriés une identité nationale qui pourtant nous vient de la colonisation. Nous en jouons avec excès en convoquant un nationalisme étroit, prisonniers d’un conditionnement contraire à nos véritables aspirations
La situation économique et politique en Afrique de l’Ouest appelle à un renouvellement de l’idée de l’intégration régionale. Les tentatives volontaristes visant à fédérer certains de nos pays à la veille et au lendemain des indépendances se sont soldées par des échecs. Le Sénégal était au centre de deux de ces initiatives infructueuses : la fédération du Mali et la Sénégambie. La première était circonscrite à la sphère des anciennes colonies françaises et n’avait pas l’assentiment de la France. La deuxième cherchait à concrétiser une réalité historique entre deux peuples que tout devrait unir : le Sénégal et la Gambie. Les historiens ont beaucoup écrit sur les causes de ces échecs et des enseignements constructifs auraient pu être tirés pour poursuivre la voie vers la fédéralisation. Nos pays sont passés à une autre approche. Mais ont-ils eu raison ?
Houphouët-Boigny et le Groupe de Monrovia ont pris le pas sur Kwame Nkrumah, le groupe de Casablanca, Cheikh Anta Diop, et d’autres panafricanistes de première heure.
Aujourd’hui, nous nous sommes appropriés une identité nationale qui pourtant nous vient de la colonisation. Parfois, nous en jouons avec excès en convoquant un nationalisme étroit et en feignant d’ignorer que nous sommes alors prisonniers d’un conditionnement contraire à nos véritables aspirations.
Plus de 60 ans après ces fameuses indépendances, nous savons maintenant que Houphouët et le Groupe de Monrovia avaient eu tort de nous pousser à la fragmentation. Mais les autres, aussi vénérables soient-ils, avaient-ils pour autant raison ? Une fédération africaine centralisée était-elle, est-elle la bonne solution ? Tout semble démontrer qu’aujourd’hui, cette perspective nourrit davantage un activisme sympathique mais impossible à opérationnaliser à moyen terme.
Nous avons besoin de solutions durables à nos problèmes
Alors que nos nationalismes empruntés nous condamnent à l’impuissance de nos micro-états, la fuite en avant vers l’idéal d’un fédéralisme continental ressemble davantage à la politique de l’autruche. Nous devons donc être innovants et développer une approche graduelle mais effective, une approche qui intègre les réalités historiques inscrites dans les entités que sont nos pays et l’Afrique de l’Ouest.
Pour répondre aux besoins socio-économiques d’une population jeune et dont le taux de croissance est l’un des plus élevés au monde, nous devons nous industrialiser. Certes, ceci peut se faire avec nos très petites entreprises, nos petites et moyennes entreprises, l’import-export en nous insérant dans les chaînes de valeurs globales. Mais c’est bien ce à quoi nous nous essayons depuis des décennies avec des résultats mitigés, tant nos besoins sociaux sont prégnants et les termes de l’échange inégaux.
La croissance économique insuffisante et mal répartie, ne permet pas de valoriser un potentiel humain riche et foisonnant. Par ailleurs, la dépendance aux marchés globaux et la perpétuation d’un modèle multiséculaire qui fait de nos économies des exportateurs de biens à faibles valeurs ajoutées nous appauvrissent continuellement au profit des économies avancées. L’aide au développement censée combler nos balances commerciales structurellement déficitaires a fait long feu et participe d’une indignité que nous sommes de plus en plus nombreux à réprouver.
Nos organisations d’intégration économique régionale malgré quelques acquis, n’ont pas atteint leurs objectifs. Les échanges économiques intra-communautaires restent très loin des attentes. Dans notre région, la CEDEAO connait une cerise importante avec le départ en cours du Burkina Faso, du Mali et du Niger qui se dirigent vers la création de la confédération des Etats du Sahel. Mais en réalité, cette crise va bien au-delà de la scission en cours et il serait vain de chercher à faire revenir ces trois pays dans la CEDEAO telle qu’elle nous est servie, une organisation régionale à vocation économique mais à fonctionnement fortement dépendant de facteurs géopolitiques liés aux intérêts de ses donateurs.
Alors que faire ?
Une nouvelle vision de notre intégration régionale
Nous devons construire des économies industrielles robustes, comprenant certes des TPE et PME, mais aussi de grandes entreprises à dimension régionale, des économies bénéficiant de vrais tissus industriels, des économies résilientes aux chocs des chaines de valeurs globales, donc des économies associant de fortes chaines de valeurs régionales nous permettant de réduire nos vulnérabilités. Ceci ne peut se faire sans une intégration politique car les accords de partenariat économique existant entre nos micro-états et les économies avancées font bénéficier ces dernières des avantages prévus dans nos projets d’unions économiques continentales et en limitent les effets.
Mais au-delà de la pertinence économique, nous avons aussi le devoir de dépasser les frontières héritées de la colonisation afin de permettre aux nouvelles générations de recouvrer la plénitude de leur épanouissement, dans un espace géographique et géopolitique qui sera véritablement le leur et qui permettra de réunifier des groupes socioculturels séparés par des frontières artificielles.
La nouvelle vision de notre intégration régionale cherche à créer à terme une Confédération des Etats de l’Afrique de l’Ouest incluant les 15 Etats actuels de la CEDEAO et ceci, de manière progressive, en trois étapes.
Etape 1
Favoriser une plus grande décentralisation de la fédération nigériane, une fédération de 36 Etats mais dont le gouvernement fédéral détient la souveraineté sur l’ensemble des ressources naturelles du pays.
Créer une deuxième fédération, la Fédération Sahélo-Guinéenne (FSG), avec les 14 autres Etats de la CEDEAO, une fédération décentralisée dans laquelle, chaque Etat gardera la souveraineté sur ses propres ressources naturelles mais où l’espace territorial, la défense, la sécurité collective, la diplomatie seront mutualisés et l’économie sera coordonnée avec le souci d’une meilleure complémentarité et d’une valorisation rationnelle des ressources naturelles dans un marché intérieur de taille critique.
Etape 2
Réformer profondément la CEDEAO en la transformant en une organisation de coopération entre les 50 Etats de l’Afrique de l’Ouest (36 Etats du Nigéria et 14 de la FSG) avec une chambre pour chaque fédération et une délibération consensuelle entre les deux chambres.
Etape 3
Transformer la CEDEAO réformée en une confédération entre les deux fédérations, la Confédération des Etats de l’Afrique de l’Ouest avec un parlement et une présidence élus par les peuples selon des modalités à définir.
Le rôle potentiel du Sénégal
Le Sénégal peut jouer un rôle d’avant-garde dans la promotion de cette nouvelle vision et en faveur de sa concrétisation graduelle. Le pays est ressorti potentiellement plus fort des péripéties politiques qui ont conduit au dénouement du 24 mars 2024. Mais il a besoin d’une vision régionale innovante et mobilisatrice qui donne une plus grande portée à la volonté politique actuelle et une espérance à la jeunesse.
Un préalable au rôle de locomotive que pourraient saisir les nouveaux dirigeants du Sénégal, est une clarification de concepts tels que « patriotes, patriotisme économique », « le Sénégal d’abord » qui structurent les discours politiques et semblent heurter leurs engagements panafricanistes pourtant sincères. L’extrême droite française s’est appropriée les premiers termes, depuis des décennies et en fait son chou gras électoral, contre le fédéralisme européen. Il y a donc le risque d’une confusion politique à se prévaloir de ces concepts même s’ils sont énoncés dans un contexte différent de celui de la France.
Le patriotisme économique au Sénégal est sans doute dirigé contre ceux qui profitent des richesses économiques du pays au détriment du peuple sénégalais. Le patriotisme économique de l’extrême droite française est xénophobe et très protectionniste. Mais hélas, malgré cette différence importante, la sémantique alerte gravement surtout dans la perspective d’une fédéralisation innovante et décentralisée en Afrique de l’Ouest.
En proposant une nouvelle vision d’intégration politique et économique en Afrique de l’Ouest, nous sommes conscients des difficultés de sa réalisation. C’est à une véritable révolution pacifique que nous appelons pour nous sortir de la zone de confort stérile dans laquelle nous nous sommes installés et qui silencieusement nous consume.
Edgard Gnansounou est Professeur honoraire de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPPFL), président du Mouvement des Fédéralistes Sahélo-Guinéens (MFSG).
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DES DÉBATS SOUS INFLUENCE
La récente polémique sur "l'homosexualité" cache en réalité de lourds enjeux politiques. Tandis que l'opposition tente de fragiliser le pouvoir par des manœuvres de détournement, les experts alertent sur les véritables défis de gouvernance à relever
Dérapages nuisibles et manœuvres politiques obscurcissent les réels enjeux de gouvernance au Sénégal. C'est l'analyse des experts de "Décrypter l'Afrique" sur Le Média à propos de la récente polémique sur "l'homosexualité" visant à fragiliser le pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye.
L'arrestation d'un activiste pro-Macky Sall pour propos qualifiés d'orduriers envers le Premier ministre Sonko n'est qu'un "prétexte" pour l'opposition décriée, souligne le spécialiste Félix Atchadé. Une manœuvre de détournement visant à « cacher les enjeux » comme les nombreux rapports véritablement accablants sur la gestion controversée des fonds publics sous l'ère Macky Sall.
"L'opposition est en train de s'engouffrer dans cette brêche pour éviter de parler des vrais problèmes, du bilan de la période Sall en terme de détournements", renchérit l'analyste Fabrice Wuimo. Une opposition "au tapis", minée par les dissensions et incapable d'autocritique après 12 ans de pouvoir.
Face à ce défi, le président Diomaye et sa majorité devront tenir leurs promesses de rupture et d'alternance réelle. "Leur échec créerait une nouvelle opposition", prévient Bernard Houdin. Une mise en garde partagée par Jean-François Akandji Kombé : "Le vrai enjeu, c'est de criminaliser les crimes économiques énormes sous Macky Sall."
Signe d'espoir cependant, l'émergence dans l'opposition d'une "jeune garde" plus progressiste, qui pourrait "renouveler le débat démocratique" avec le pouvoir. Une évolution que le professeur Kombé juge "intéressante pour l'avenir du Sénégal et de l'Afrique".
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LE SÉNÉGAL FACE À SES FONDAMENTAUX
À en croire Cheikh Gueye et Dame Babou, seule une refondation constitutionnelle permettant une véritable indépendance de la justice et des changements économiques favorisant la production nationale seront à même de résoudre les maux du pays
Dans une intervention remarquée sur iRadio ce dimanche 26 mai 2024, le docteur Cheikh Guèye, chercheur à l'IPAR et secrétaire général du réseau sénégalais des think tanks, et Dame Babou, journaliste sénégalais basé à New York, ont sonné la charge pour une refonte en profondeur des institutions judiciaires et économiques du Sénégal.
Selon Guèye, il est impératif de "refonder complètement la justice" au lieu de se contenter de réformes superficielles. Il préconise une nouvelle Constitution qui décoloniserait le système judiciaire en l'adaptant aux réalités culturelles sénégalaises. "Nous avons besoin d'une justice qui fasse sens pour toutes les composantes de la nation", insiste-t-il, appelant à la représentation des traditions musulmanes et coutumières.
L'indépendance réelle des magistrats est aussi une priorité pour couper le cordon avec le pouvoir politique. "Tant que la carrière d'un juge dépendra de la signature de quelqu'un, on n'aura pas une vraie justice indépendante", renchérit Babou.
Baisse du coût de la vie : produire local
Sur la très attendue baisse du coût de la vie promise, les deux intervenants restent dubitatifs quant aux leviers d'action du gouvernement. Selon eux, seules des réformes en profondeur pour augmenter la production locale et la richesse nationale permettront une baisse durable des prix. "Arrêtons les promesses politiques de baisses conjoncturelles, plaide Babou. Il faut des réformes profondes de la production de richesses adaptées à notre pays."
Nouvelle diplomatie : Le leadership panafricain
Concernant la nouvelle stratégie diplomatique axée sur le voisinage et le leadership panafricain, les avis divergent quelque peu. Guèye la voit comme "une vraie rupture" et "une très bonne nouvelle" pour asseoir l'influence du Sénégal. Babou nuance en appelant à ne pas donner de leçons de démocratie, mais à privilégier la sécurité nationale face aux risques régionaux.
En somme, un plaidoyer vigoureux pour des réformes de fond afin de refonder une justice crédible et de doper l'économie nationale. Le nouveau pouvoir est appelé à appliquer réellement les conclusions du dialogue national sur la justice. Le Sénégal de l'après 2024 se jouera sur ces chantiers cruciaux, selon les deux invités d'Alassane Samba Diop.
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POUR UNE GESTION OPTIMALE DE L'OR BLEU
Accès difficile, pénuries récurrentes, iniquité criante... La situation hydraulique sénégalaise n'a de "liquide" que le nom. Face à ce constat alarmant, Mouhamadou Moustapha Ndiaye évoque l'impérieuse nécessité d'un changement de cap radical
Mouhamadou Moustapha Ndiaye, figure de proue dans l'expertise en gestion des ressources hydriques, a secoué le landernau lors de son passage musclé dans l'émission "Objection" de Sud FM ce dimanche 26 mai 2024. Le docteur en sciences politiques de l'Université Gaston Berger de Saint-Louis a dressé un constat inquiétant sur la situation hydraulique au Sénégal.
Bien que reconnaissant les efforts déployés par l'État à travers diverses réformes et l'implication progressive du secteur privé, l'expert en gestion de l'eau a pointé du doigt les nombreuses failles qui persistent. L'accès à l'eau potable pour tous reste un défi de taille, notamment en milieu rural où les délégataires privés peinent à assurer un service optimal, se heurtant bien souvent au rejet des populations.
Dans les zones urbaines, la donne n'est guère plus reluisante avec une multitude de récriminations liées aux ruptures d'approvisionnement et aux difficultés d'accès dans certains quartiers. Une criante iniquité frappe de plein fouet les franges les plus vulnérables, avec les femmes et les jeunes filles comme premières victimes.
Face à ce sombre tableau, Mouhamadou Moustapha Ndiaye a lancé un vibrant appel à une profonde remise en question de la gouvernance de l'eau. Lui qui milite pour une vision futuriste conviant cette ressource vitale à se muer en véritable levier économique, préconise une réforme en profondeur.
Parmi les pistes avancées, l'impératif recherche de fonds propres pour gager la souveraineté nationale tout en ouvrant la voie à des partenariats public-privé judicieux. Une autorité de régulation musclée, promesse d'un rééquilibrage gagnant-gagnant, ainsi qu'un vaste chantier de mobilisation citoyenne pour une prise de conscience collective compétente parmi ses préceptes phares.
L'expert n'a également pas manqué de saluer la pertinence du dessalement comme piste de solutions alternatives, tout en martelant l'urgence de réinventer une nouvelle approche holistique. Une démarche qui, selon ses termes, devra inéluctablement passer par un transfert de technologies issue des meilleures pratiques à même d'être adaptées au cas spécifique du Sénégal.
par l'éditorialiste de seneplus, tidiane sow
VIVEMENT LA RUPTURE
EXCLUSIF SENEPLUS - Les petits fauves sortent du bois, déjà irrités de l’exil, loin du pouvoir. Le clan des ex-noceurs, ceux qui s’étaient installés dans le confort « mackysard », las de se tourner les pouces, s’est trouvé une nouvelle activité
Les petits fauves sortent du bois, déjà irrités de l’exil, loin du pouvoir et de ses bénéfices. Ils flairent aussi les hésitations du nouveau pouvoir à frapper vite et fort contre eux. Ils sont surpris par le calme de l’exécutif, qui semble prendre son temps pour mettre à plat tous les défis qui se posent. Alors les carnassiers s’enhardissent et prennent la parole publiquement. Ils ont la mémoire courte, ils oublient que c’est juste le mépris des citoyens qui les mettait encore à l’abri de leur courroux. Comment un Moustapha Diakhaté peut-il critiquer un Diomaye ou un Sonko quand on sait les méfaits commis par son camp dans le pays ? Comment un Yoro Dia peut-il reprocher à un Sonko de recevoir Jean-Luc Mélenchon, quand son mentor avait reçu le président putschiste gabonais dont la lame était encore sanglante ?
Mais pourquoi Mélenchon, homme politique français, ayant combattu aux côtés des Patriotes contre la dictature rampante de Macky Sall et défenseur des droits des immigrés en France, ne serait-il pas reçu par le président du Pastef ?
Est-ce à eux de battre la mesure et d’indiquer la voie ? Assurément non !
Il faudra qu’ils apprennent à se taire. Pas pour écouter, car cela ils en sont incapables, mais se taire, pour laisser le temps à leurs funestes pensées, de s’auto-détruire, de se recréer, pour renaitre sous forme de critiques positives qui profiteront à tous.
Avec ces rapports maintenus sous son coude, Macky Sall a appliqué la politique des GAFAM consistant à racheter toute start-up qui pourrait devenir son concurrent. Il a usé de la menace, pire que la sanction, sur toute tête citée dans des affaires. Pour d’autres, il a commandité mille rapports pour leur trouver une faiblesse par laquelle les tenir à sa merci. Ses hommes sont habitués à sa menace ; jusque-là, lui seul savait. En décidant de rendre publics les rapports, c’est tout le peuple qui sait et qui devient une menace pour ces brigands.
Aucun secteur n’aura échappé à leurs pratiques scandaleuses de pomper dans des finances publiques. Les rapports des corps de contrôle sont terrifiants : tel politicien se retrouve détenteur de plusieurs maisons, en quelques mois à peine de fonction, tel autre Directeur Général n’hésitait pas à s’octroyer, avec l’ensemble de son comité de direction, des maisons à priori réservés aux classes moyennes, à des prix préférentiels, et tandis que d’autres accaparaient des hectares de terres. Que sais-je encore ?
Comment des directeurs généraux, des gestionnaires d’entreprises publiques peuvent-ils être pris autant à défaut de bonne gouvernance ? Comment surtout l’ex-président, au courant de ces dérives, a-t-il pu ainsi laisser faire ?
L’intérêt de quelques brigands – on ne peut pas les appeler autrement – ne doit pas l’emporter sur l’intérêt national. Il faudra sévir. « Battre le cadavre pour corriger le vivant », comme dit si bien le proverbe.
Cet acte salutaire est à poser et nul doute qu’il le sera, car c’est lui qui annoncera la rupture tant préconisée et signera l’aggiornamento des classes politiques que nous avons tant souhaité jusque-là. Il mettra définitivement au banc ceux qui, sous le couvert de servir, ne faisaient que se servir.
Ceux qui tancent Sonko d’avoir attaqué bille en tête, sans précautions oratoires, Emmanuel Macron, en présence de Mélenchon dans une salle d’UCAD bourrée comme un œuf, ont tort. Macron ne respecte pas les Sénégalais, on ne lui doit donc en retour aucune convenance. Les lignes sont claires. Après avoir perdu le Mali, le Niger et le Burkina, il perdra le Sénégal.
Jamais un officiel sénégalais, de surcroit Premier ministre, ne s’était adressé en ces termes peu amènes à un président français et ce devant un officiel français, fût- il un leader de l’opposition française. Macron a dû trembler d’entendre Sonko lui reprocher ses postures ambiguës et peu amicales au demeurant, vis-à-vis des Sénégalais. Il avait pris l’habitude de les humilier sans en payer le moindre prix. Visiblement, Il n’aura pas retenu la leçon malienne lorsque le ministre des Affaires étrangères de ce pays, du haut de la tribune des Nations Unies, avait fustigé l’arrogance française. À l’époque, il avait déjà très mal pris, ce qu’il considérait en définitive, comme une incartade de mauvais aloi. Cette fois, c’est Ousmane Sonko qui lui reproche, par médias interposés, en pleine figure et sans gants, son silence coupable devant les agissements scélérats d’un Macky Sall, qu’il louait en public et soutenait sans retenue. Comme le prédisait Fanon, Macron paiera le prix fort de ne toujours pas comprendre la nouvelle dynamique politique qui se joue en Afrique. Sonko l’a dit sans ambages, les bases militaires françaises, du moins ce qu’il en reste, seront démantelées et le Sénégal, à terme, sortira du franc CFA. Après la « révolution citoyenne » qui a eu lieu en mars 2024, ces symboles du néocolonialisme ne peuvent plus perdurer quelque soixante ans après les indépendances. L’empire africain de la France s’effondre petit à petit. La faute à Macron de n’avoir pas vu venir les changements et de réinventer un modèle de coopération plus inclusif, plutôt que se reposer sur de vieux schémas de la françafrique, animés par des présidents pions honnis par leur peuple.
Proposer un poste d’envoyé spécial - autant dire de garçon de course - à notre ex-chef d’État délaissé par les Sénégalais, fut perçu comme un profond signe de mépris vis-à-vis de notre peuple. Que l’ex-chef d’État l’eut accepté fut encore plus avilissant pour nous autres, même si on sait qu’il excelle dans l’infiniment rien. Aucune éthique, aucun sens de l’honneur ne jalonnent son parcours politique. On n’est pas surpris de ses postures plus indignes les unes plus que les autres. Contrairement aux règles de bonne élégance et de convenance, le voilà, à peine chassé du palais et hors du Sénégal, qui essaye de réactiver ses réseaux locaux, distillant sa voix et ses ordres dans des réunions publiques organisées par ses hommes de main. Aucune trace de classe dans ses actes. Il faudra rendre son retour impossible comme il a rendu l’élection d’Ousmane Sonko impossible en l’emprisonnant lui et tout ce qui gravitait autour du Pastef, allant jusqu’à la perfidie ultime de dissoudre le parti.
Pour le vaincre définitivement, il faudra élever la dureté de la réaction. Que les alter noceurs de son camp sachent qu’une fin infame sera réservée à ceux qui ont abusé des biens sociaux.
Que tous ceux épinglés dans les différents rapports se défendent devant une Cour de justice et que justice soit rendue au nom du peuple sénégalais !
Comme ces footballeurs qui refuseraient carrément de faire la passe parce qu’une passe à l’adversaire serait soumise à l’amende financière par le club, on risquerait de tomber dans ces travers dignes des « stratégies absurdes » de Maya Bacache en voulant criminaliser l’homosexualité. Des juges pourraient refuser de condamner à de lourdes peines de prison pour des faits pas toujours faciles à établir. Certes Sonko a prononcé le mot qui lui aurait arraché la bouche : « l’homosexualité est tolérée », dira-t-il mais la politique consiste à être dans les nuances. Être homosexuel n’est pas puni, mais les actes contre nature le sont ; Telle est la nuance. « Seul l’homme absurde ne change pas », disait Clémenceau. Les accusations de trahison relèvent toujours de la mauvaise querelle. « Trahir » dans l’intérêt général, pour un mieux vivre-ensemble peut s’avérer nécessaire. La politique ne consiste pas à appliquer les programmes dans les détails, à la virgule près. Bien naïfs ceux qui croient le contraire.
« Sonko avait promis de criminaliser l’homosexualité, il n’a qu’à tenir parole », entend-on çà et là. Macky avait promis qu’il vivrait au Sénégal après son magistère. Après sa passation de pouvoir, il n’aura pas passé une nuit de plus dans sa résidence de Mermoz.
Les Sénégalais aiment s’occuper de l’accessoire, et cela les détourne des vrais problèmes. En réalité, c’est leur peur de faire face aux véritables challenges qui les pousserait vers la parlote, vers les choses de seconde portée qui ne nécessitent aucune action. Sinon comment expliquer que, parmi tous les sujets d’importance abordés par les leaders des partis LFI et Pastef, seul celui de l’homosexualité ait fait les choux gras de la presse locale et entretenu les débats du café de commerce le lendemain ? De la conférence sur « l’avenir dans les relations entre l’Afrique et la France », l’opposition sénégalaise, partisane de l’ancien régime, n’aura voulu retenir en définitive, qu’une vulgaire histoire de …fesses ! Quand Mélenchon convoquait le déterminisme imparfait de Bergson et évoquait « l’espoir qui se mesurait au degré de combativité » de Fatou Diome, leurs esprits étaient déjà ailleurs, se délectant à l’avance de la brèche sur les mœurs, ainsi ouverte.
Entre une possibilité de volte-face et une certitude de détournements de fonds publics, on préfère jacasser sur la possibilité !
Ces temps-ci, le clan des ex-noceurs, ceux qui s’étaient installés dans le confort « mackysard », du jouir sans être inquiétés, las de se tourner les pouces, s’est donc trouvé une nouvelle activité : occuper les pavés de la DIC pour manifester contre des auditions de leurs anciens sous-fifres, accusateurs et insulteurs toujours actifs.
Il leur faudra s’armer de courage pour tenir, car ils en auront sûrement pour la prochaine décennie. Les temps changent.
Dr Tidiane Sow est Coach en communication politique.
AU BURKINA, LA TRANSITION PROLONGÉE DE CINQ ANS
Le capitaine Ibrahim Traoré, qui a renversé le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba et assuré la présidence de la transition, pourra se présenter aux futures élections présidentielle, législatives et municipales
(SenePlus) - Les Assises nationales sur la transition au Burkina Faso, qui se sont tenues samedi 26 novembre à Ouagadougou, ont abouti à la prolongation de la période de transition pour une durée de 60 mois supplémentaires, selon un compte rendu de la radio RFI.
Ces assises, qui devaient initialement durer deux jours, se sont achevées de manière anticipée cet après-midi avec la signature d'une nouvelle charte de la transition fixant la période transitoire à cinq ans à compter du 2 juillet 2023. La mouture antérieure du texte proposait trois ans et demi (42 mois).
Ont participé à ces discussions les représentants des différentes composantes de la société burkinabè dont les chefs coutumiers et religieux, la société civile, les partis politiques et les forces armées. L'objectif était de faire le bilan de la transition en cours depuis le coup d'État d'octobre 2022 et de définir les prochaines étapes.
Selon des sources proches des débats citées par RFI, le capitaine Ibrahim Traoré, qui a renversé le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba et assuré la présidence de la transition, pourra se présenter aux futures élections présidentielle, législatives et municipales. Le texte indique par ailleurs que des élections pourraient être anticipées "si la situation sécuritaire le permet".
Pendant ce temps, des centaines de partisans du régime se sont rassemblés aux abords du lieu des assises, réclamant un mandat d'au moins 10 ans pour le président Traoré. Ils ont dû être repoussés par les forces de sécurité, alors qu'ils tentaient de pénétrer dans l'enceinte.
Pour Emile Zerbo, ministre de la Réconciliation nationale et de la Cohésion sociale, les Burkinabè sont entrés dans "un tournant décisif de leur histoire", nécessitant un "sursaut patriotique" pour reconquérir le territoire national, en proie à une grave crise sécuritaire.
BURKINA FASO, DÉBUT DES ASSISES NATIONALES SUR LA SUITE DE LA TRANSITION
Cette rencontre, prévue pour durer deux jours, vise à dresser un bilan de la Transition menée par le capitaine Ibrahim Traoré depuis son coup d’État de septembre 2022 et à décider de sa possible prolongation.
Les assises nationales qui débutent ce samedi matin à Ouagadougou rassemblent les Forces vives de la Nation pour décider de l’avenir du régime de transition, dont la fin est prévue en début juillet 2024.
La salle de conférences de Ouaga 2000 où se tient l’activité est placée sous haute surveillance militaire, avec un pickup rempli de soldats stationné devant l’entrée principale. Des éléments des sapeurs-pompiers sont également présents pour veiller à la sécurité.
Plusieurs banderoles affichées dans la salle appellent à prendre en main le destin du pays : « Assises nationales sur la suite de la transition : Assumer par nous-mêmes notre destin et notre souveraineté » et « Fils et filles du Burkina Faso, unis pour une gouvernance porteuse d’espérance pour notre peuple ».
Cette rencontre, prévue pour durer deux jours, vise à dresser un bilan de la Transition menée par le capitaine Ibrahim Traoré depuis son coup d’État de septembre 2022 et à décider de sa possible prolongation.
Les partisans du capitaine Traoré, connus sous le nom de « Wayignans », manifestent ce samedi pour demander la prolongation de la Transition. En revanche, l’universitaire Pr Abdoulaye Soma a appelé à « sauvegarder le sort de la Nation » plutôt qu’à « rechercher le sort d’une personne ».
Plusieurs acteurs sociaux et politiques avaient conditionné leur participation à la levée de l’interdiction des activités des partis politiques et de la société civile.