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22 novembre 2024
LEOPOLD SENGHOR
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L'ENGAGEMENT POLITIQUE SOUS SENGHOR
Eugénie Aw revient sur son parcours de militante maoïste, son immersion dans le monde ouvrier et le travail d'alphabétisation politique qu'elle menait auprès des masses au début des années 1970 au Sénégal
Eugénie Aw revient sur son parcours de militante maoïste, son immersion dans le monde ouvrier et le travail d'alphabétisation politique qu'elle menait auprès des masses au début des années 1970 au Sénégal. Son histoire familiale n'est pas pour rien dans cet engagement.
Elle décrit ce qu'est la clandestinité à l'époque, ce qu'elle implique pour les militants comme sacrifices, les risques encourus.
La vague d'arrestation de 1975 à la suite de la saisie du journal XAREBI (La lutte), les interrogatoires des prisonniers, le procès qui suit et ce qu'il dévoile, permettent de mettre au jour une réalité peu connue de la vie politique sénégalaise des années 1970.
par l'éditorialiste de seneplus, alymana bathily
DU BON USAGE DU PREMIER MINISTRE
EXCLUSIF SENEPLUS - Macky est un solitaire qui ne doit se sentir à l’aise avec aucun Premier ministre, pas même avec un homme aussi effacé que Dionne - Ce n’est certainement pas un bon augure pour ce quinquennat
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 29/04/2019
Comment comprendre la suppression du poste de Premier ministre annoncée par le président de la République après sa réélection avec 58% des suffrages alors qu’il n’en avait soufflé mot de toute la campagne électorale ?
En fait depuis l’indépendance, tous les présidents de la République, à l’exception notable du président Abdoulaye Wade, ont tour à tout supprimé et recréé ce poste. Pour différentes motivations et avec des objectifs politiques propres à chacun d’entre eux.
Remontons à la source, à la fondation même du poste tel que nous le connaissons aujourd’hui.
La Constitution adoptée à l’indépendance du Sénégal en 1960, établissait le partage du pouvoir exécutif entre un président de la République « gardien de la Constitution. (qui) assure la continuité de la République et le fonctionnement régulier de ses institutions... garant de l’indépendance nationale, (qui) préside le Conseil des Ministre » et un Premier ministre qui « détermine et conduit la politique de la Nation ; il dirige l’action du gouvernement. Il est responsable de la défense nationale. Il dispose de l’Administration et de la force armée … »
C’est cette dyarchie de l’Exécutif précisément qui est la source de ce qu’on a souvent présenté sous le terme de « conflit Dia/Senghor » pour en escamoter le véritable sens.
Il s’agit en réalité, on le sait maintenant, de témoins de première main[1], d’un coup d’état, perpétré le 12 Décembre 1962, non pas par M. Mamadou Dia, comme on a voulu nous le faire croire d’emblée, mais bien par le président de la République d’alors, M. Léopold Sédar Senghor contre le Premier ministre (ou plutôt le président du Conseil, selon l’appellation de l’époque).
Il faut s’arrêter sur cet événement. Non seulement parce qu’il est fondateur du régime qui est celui dont le président Macky Sall a hérité, mais aussi parce qu’il annonce l’instrumentalisation que les présidents de la République successifs feront de l’institution du Premier ministre.
Il est d’ailleurs révélateur que sous Senghor, on forgera le terme « Primature » qui n’existait ni en France ni ailleurs dans la monde. (inventé par le grammairien-poète-président lui même ?), comme pour désigner les mots ayant un sens, autre chose que l’institution du Premier ministre telle qu’on la connait partout dans le monde.
Toujours est-il qu’après avoir fait condamner le président du Conseil, Mamadou Dia à la prison à vie (et ses coaccusés à 20 ans d’emprisonnement), le président Senghor fera adopter une nouvelle Constitution par référendum le 3 mars 1963 par… 99.5% des voix.
Le Premier ministre ne figure plus au nombre des institutions de la République.
Le président de la République exerce seul le pouvoir exécutif.
L’hyper présidentialisme est dès lors installé.
Le président « Buur ak Bummi », comme disent les wolofs.
De fait, le président Senghor régnera seul, jusqu’en 1970.
Il faudra le soulèvement et les grèves des élèves, étudiants et travailleurs en 1968, faisant suite à la « crise de l’économie arachidière », à la « récession industrielle consécutive à la balkanisation de l’AOF » et aux revendications pour « la sénégalisation des entreprises et de la main d’œuvre [2]» pour que le président Senghor réinstaure le Premier ministre et y nomme Abdou Diouf.
Et quand il démissionne en 1980, c’est à son Premier ministre, M. Abdou Diouf qu’il laisse sa place, en vertu d’un article 35 introduit à cette fin dans la Constitution. Celui-ci conserve d’abord le poste en nommant son ami d’enfance, M. Habib Thiam. Après un règne de deux ans, s’étant légitimé en quelque sorte par le suffrage universel, en se faisant élire en 1983 avec 80% des suffrages, il nomme M. Moustapha Niasse au poste le 1er janvier 1983 avec pour unique mission de le supprimer. Une réforme constitutionnelle est adoptée à cet effet par l’Assemblée Nationale dès le 29 avril 1983. Le poste de Premier ministre est effectivement supprimé.
Il ne sera introduit qu’en 1991, sous la pression du FMI, de la Banque Mondiale et de la France dans un contexte de crise économique et sociale aggravée par les tensions politiques créées par les élections présidentielles et législatives de février 1988, puis par le conflit avec la Mauritanie de 1989 à 1991.
M. Habib Thiam sera nommé au poste une deuxième fois avant d’être remplacé par M. Mamadou Lamine Loum en 1998. Le président Abdoulaye Wade lui maintiendra le poste de Premier ministre pendant les douze années de sa présidence. Il en fera même un usage immodéré. Il en usera six : de Moustapha Niasse à Souleymane Ndéné Ndiaye. Sans laisser beaucoup de marge de manœuvre à quiconque d’entre eux. Le Premier Ministre ne devant être, selon l’expression de M. Idrissa Seck, que le « jardinier des rêves » du président.
Le président Macky Sall dans ce domaine comme dans d’autres se coulera d’abord dans les habits de son prédécesseur. Il se séparera rapidement de deux Premiers ministres, Abdoul Mbaye et Aminata Touré. Il semblera par contre avoir trouvé son homme lige en Boun Abdallah Dionne, personnage lisse et obséquieux, à la manière dont Abdou Diouf l’était avec le président Senghor. Qui s’est en outre investi plus que tout autre dans la campagne pour la réélection du président. Si bien que la question demeure : pourquoi donc le président Macky Sall supprime-t-il le poste de Premier ministre maintenant qu’il s’est fait élire pour son deuxième (et dernier ?) mandat ?
C’est que le régime fondé par Léopold Sédar Senghor relève du césarisme, c'est-à-dire d’une forme de monarchisme qui donne au président de la République un pouvoir absolu. Plus que dans le présidentialisme du type de la Vème République française que le constitutionaliste sénégalais a recopié en partie seulement. Ce régime-ci entretient à dessein la confusion des pouvoirs au profit du président, précisément pour assurer sa toute puissance.
Au Sénégal, depuis Senghor, le Premier ministre n’est qu’un accessoire institutionnel que le président de la République utilise à sa guise. Ou s’en passe. Selon le caractère et la psychologie du président.
Le président Senghor était véritablement hanté par le spectre de Mamadou Dia. Si bien qu’il ne voulait surtout pas d’un Premier ministre. Ce n’est que contraint et forcé (notamment par les Français) qu’il a dû en nommer un en la personne d’Abdou Diouf. Ce dernier l’a tellement rassuré par son effacement et son apparente docilité qu’il l’a maintenu au poste pendant sept ans avant d’en faire son successeur.
Quant au président Abdou Diouf, accédant au pouvoir, par un « coup d’état légal » en fait, il s’est senti longtemps vulnérable et comme illégitime. C’est pourquoi, il avait besoin au début d’un « alter ego » qui pourrait aussi éventuellement servir de fusible. Qui mieux que son meilleur ami comme Premier ministre pour cela ? Mais ayant perdu tout complexe après son élection au suffrage universel, s’étant constitué une garde rapprochée avec Jean Collin, il supprimera le poste. Il ne le rétablira lui aussi, comme nous l’avons vu, que sur la très forte pression des « institutions financières internationales » et de la France.
Abdoulaye Wade lui, n’avait aucun complexe de ce genre en arrivant au pouvoir. Animé au contraire d’une foi de prophète, avec un égo démesuré, il était persuadé qu’il allait tout seul régler les problèmes du Sénégal et de toute l’Afrique. Avec tout juste des commissionnaires et fondés de pouvoir. C’est pourquoi il ne fera pas de fixation particulière sur le poste de Premier ministre, sauf que celui-ci n’était jamais que délégué à son service politique particulier.
Quid de Macky Sall ?
Psychologiquement le quatrième président de la République du Sénégal arrive au pouvoir dans les mêmes dispositions qu’Abdou Diouf à ses débuts. Il a donc aussi besoin de Premiers Ministres au cours de son premier mandat. Mais une fois réélu, légitimé à ses propres yeux, il se révèle tel qu’en lui-même. Il éprouve le besoin de se libérer, de s’assumer tout seul.
L’homme est un grand timide, un solitaire qui ne doit se sentir à l’aise avec aucun Premier ministre, pas même certainement avec un homme aussi effacé que Boun Abdallah Dionne. D’où sa décision de supprimer le poste de Premier Ministre. A quelles fins ?
Croit-il vraiment pouvoir réaliser ainsi les grandes réformes indispensables à son PSE, en mode « fast track », selon son nouveau slogan ?
Veut-il seulement réaliser quelques initiatives phares et à « haute valeur politique ajoutée » comme le « désencombrement de Dakar », la mendicité des enfants ? Histoire de solder son contentieux avec le peuple sénégalais et éviter que son successeur ne lui réserve le sort qu’il a lui fait à Karim Wade et à Khalifa Sall ? A moins qu’il ne pense ainsi se faire une seconde virginité politique qui crédibilisera une pétition pour un troisième mandat !
Ou s’agit il seulement de « l’égo trip » d’un homme complexé, malgré sa carrière politique fulgurante, qui a longtemps avalé des couleuvres et qui maintenant qu’il a tout gagné et n’a plus rien à perdre, veut se la jouer en homme fort ?
Le président Macky Sall aggrave ainsi en tous cas l’hyper présidentialisme qui caractérise le système politique sénégalais et qui constitue l’une des raisons des graves difficultés de développement auxquelles le Sénégal est encore confronté.
Ce n’est certainement pas un bon augure pour ce quinquennat !
[1] [1]Ousmane Camara, Mémoires d'un juge africain. Itinéraire d'un homme libre, Paris, Karthala, 2010, 312 p. (ISBN9782811103897), p. 122r
Il y’a aussi le témoignage du Général Jean Alfred Diallo ; « Mamadou Dia n’a jamais fait un coup d’état contre Senghor … l’histoire du coup d’état, c’est de la pure fabulation ».Ref : Wikipedia.
[2] Abdoulaye Bathily : Mai 68 à Dakar, éditions Chaka, Paris, 1992
PAR MOHAMED DIA
MAMADOU DIA, L’HOMME AU GRAND CŒUR
Si Sankara et Lumumba parmi tant d’autres panafricanistes ont été assassinés avec l’aide des colonisateurs, le président Dia lui a été liquidé par ses propres frères et sœurs
Anti-impérialiste, le président Dia était contre l’ordre qui était établi par d’autres dans le but de nous dominer. Sénateur puis Député avant de devenir président du Conseil de 1957 à 1962. Il sera emprisonné de 1962 à 1974 pour tentative de coup d’Etat que le Général Alfred Diallo niera trois décennies plus tard. Si Sankara et Lumumba parmi tant d’autres panafricanistes ont été assassinés avec l’aide de leurs pays colonisateurs, le président Dia lui a été liquidé par ses propres frères et sœurs sénégalais.
Président Dia
Durant ses premiers pas en tant que fonctionnaire, le président Dia fut sanctionné pour ne pas se conformer à l’habillement à l’Européenne qui leur était imposé. Il jeta le casque colonial dont le port était obligatoire pour tout fonctionnaire, au large du fleuve Sénégal. Dauphin du président Senghor, le président Dia disait qu’il se considérait comme baye fall du président Senghor prêt à tout pour lui. En voulant développer le Sénégal, il était conscient qu’il fallait des transformations structurelles et le président Dia était prêt pour les mettre en œuvre pour le décollage de l’économie sénégalaise. Il avait un plan, un modèle économique, qui n’arrangeait pas les Français pour leurs intérêts ni les politiciens qui ne remboursaient pas leurs dettes ni les marabouts qui ne voulaient pas être de simples citoyens. Le plan n’arrangeait que le Sénégal. L’égoïsme et les intérêts personnels primeront et le Sénégal perdra un de ses plus illustres fils. Ils ont sacrifié le président Dia. Le président Senghor fut convaincu par les malfrats que le président Dia, son ami de longue date préparait un coup d’état. Le président Dia sera illégalement destitué avant d’être condamné à perpétuité avec d’autres ministres. La prison de Kédougou sera leur nouvelle résidence pendant douze années. Les conditions de détention feront perdre au président Dia la vue, n’étant pas autorisé à se soigner.
Président Senghor
Le président Senghor arrangeait la France, car étant très francophone et soumis à la France et il l’a fait savoir durant son fameux discours de 1957 quand il disait que « quand les enfants ont grandi, du moins en Afrique noire, ils quittent la case des parents et construisent à côté une case, leur case, mais dans le même carré. Le carré France, croyez-nous, nous ne voulons pas le quitter. Nous y avons grandi et il y fait bon vivre. Nous voulons simplement, Monsieur le Ministre, mes chers collègues, y bâtir nos propres cases, qui élargiront et fortifieront en même temps le carré familial, ou plutôt l’hexagone France ». Le président Senghor était peu sûr de soi et cela s’est fait sentir avant l’arrestation du président Dia. Le PAI de Majemout Diop disparaitra en 1960, car il était accusé d’être à l’origine des troubles lors des élections municipales de la même année. Le parti de Cheikh Anta Diop est aussi interdit de toute activité en 1962. La même année, le président Dia est arrêté. Ne faisant plus confiance à son entourage, le président Senghor fait voter une nouvelle constitution le 3 mars 1963 qui fait de lui chef de l’Etat et du gouvernement. Il va plus loin et fait voter une autre loi constitutionnelle le 20 juin 1967 lui donnant le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale quand il veut. De quoi le président Senghor avait peur ? Son conseiller Michel Aurillac, l’un des plus grands défenseurs des intérêts français, a joué un grand rôle dans la destitution du président Dia. Il fera savoir au président Senghor que l’armée française viendra à sa rescousse si jamais l’armée sénégalaise s’inclinait du côté du président Dia.
La consolidation de l’indépendance
Une fois l’indépendance acquise, le président Dia savait qu’il fallait devenir une nation souveraine. C’est ainsi qu’il entamera les négociations pour une monnaie régionale. Il savait qu’il était impossible de développer le Sénégal avec le FCFA. D’ailleurs, c’est l’une des principales raisons de notre pauvreté malgré les milliards de notre budget, de l’aide publique au développement et des milliards du FMI et de la Banque mondiale. La monnaie est signe de souveraineté nationale selon le président Dia et elle permet d’avoir une autonomie économique totale. Pour être une nation indépendante, il faut être en mesure d’assurer son auto-suffisance alimentaire et sa sécurité nationale. C’est ainsi que le président Dia commence à négocier avec la France pour une décolonisation achevée, concernant entre autres à une indépendance économique, politique et militaire.
Quel pays indépendant ne choisit pas ses partenaires économiques ? Le Sénégal n’était pas libre de choisir ses partenaires économiques, la France était tout le temps impliquée dans notre politique économique. Le président Dia a voulu opter pour une liberté totale. Étant séduit par la politique de non-alignement, le président Dia nouera des partenariats avec les pays de l’Est et les pays arabes. La France fera tout son possible pour que le partenariat avec les pays arabes ne se développe pas en détournant les étudiants sénégalais dans d’autres pays autres que les pays arabes. Le président Dia avait en tête de son programme de développement le privé national. Sans un privé national en bonne santé, il est impossible de créer une croissance inclusive. C’est ainsi qu’il présentera un projet de loi à l’Assemblée nationale pour la création de chambres de commerce pour les différents secteurs de notre économie nationale. Il favorisera nos artisans pour les équipements des bureaux du gouvernement…
Le pouvoir de pardonner
Le président Dia, en tant que fervent musulman avait compris le verset descendu à cause d’Abu Bakr : Surate 24 Verset 22 : (..) Qu’ils pardonnent et absolvent. N’aimez-vous pas qu’Allah vous pardonne ? Le président Senghor se sentait un peu coupable de l’incarcération du président Dia. On dit souvent que la prise de conscience est le premier pas de la sagesse. Certes, Senghor demanda à plusieurs reprises au président Dia de renoncer à la politique contre sa libération, mais ce dernier lui fit savoir que la politique était un devoir et que nul ne pouvait renoncer à son devoir. Quand le président Senghor apprit que le président Dia était quasiment aveugle, sa libération devint imminente. Après douze ans de détentions dans de conditions très difficiles et la perte de sa vue, le président Dia a su pardonner au président Senghor et demanda même une audience pour le rencontrer. Senghor restait figer devant le président Dia et ce dernier lui demanda : « Tu ne m’embrasses plus Senghor » ?
Et si c'était vous, seriez-vous capable de pardonner ?
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LA NÉGRITUDE SELON SENGHOR
L’ancien président de la République évoque à travers une interview au journaliste français Jean Antoine, sa vision de la Négritude, après 16 ans d’errance en France
Dans cette vidéo, l’ancien président de la République du Sénégal, Léopold Sedar Senghor, accorde une interview au journaliste français Jean Antoine pour évoquer sa vision de la Négritude, après 16 ans d’errance en France. Extraits.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, SERIGNE SALIOU GUÈYE
AMADOU CLEDOR SALL, UN HOMME DE FORTES CONVICTIONS
EXCLUSIF SENEPLUS - Il aura marqué la vie politique par les différents postes qu’il a eu à occuper dans la sphère de l’Etat - Retour sur les grands moments de sa vie
Personnalité emblématique ayant marqué la vie politique sénégalaise pendant les années 60, Amadou Clédor Sall, l’un des derniers congénères de Léopold Sédar Senghor, s’est éteint dans la nuit du 29 au 30 mars 2015. Il aura marqué les esprits en laissant l’empreinte d’un homme pétri de convictions humanistes. Retour sur les grands moments de la vie d’Amadou Clédor Sall.
Il aura marqué la vie politique par les différents postes de responsabilité qu’il a eu à occuper dans la sphère de l’Etat. Il était l’un des plus fidèles compagnons du président Léopold Sédar Senghor qui se distinguait par sa capacité d’écoute, son sens du dialogue et son courage dans l’exécution de sa mission. Ces qualités et vertus ont beaucoup contribué à sa responsabilisation aux postes de gouverneur, de ministre, de député et de maire qu’il a eu à occuper en 22 ans.
1952 à 1957 : Conseiller à l’Assemblée territoriale de Mauritanie et au Grand Conseil de l’AOF
Amadou Clédor Sall est né le 21 octobre 1915 à Rufisque. Sorti de la prestigieuse école William Ponty, il devient tour à tour instituteur, inspecteur de l’enseignement et administrateur civil. Sa trajectoire politique a commencé lorsqu’il a été élu conseiller et vice-président de l’Assemblée territoriale de Mauritanie de 1952 à 1957 avec ses camarades de parti (l’Union progressiste mauritanienne) en l’occurrence Sidi El Mokhtar Ndiaye, Ahmed Saloum Ould Haïba, Maurice Compagnet et Amadou Diadié Samba Diom. Au sein du Grand conseil de l’Afrique occidentale française (AOF), Amadou Clédor Sall occupa alors le poste de Secrétaire et Rapporteur de la Commission des affaires sociales et fut par ailleurs désigné de siéger à la Commission fédérale des bourses. Ainsi en 1955-1956, 825 bourses ont été accordées pour l’enseignement supérieur aux étudiants ressortissants des huit territoires de l’AOF. La même année, Clédor dirigea un petit groupe d’élus qui alla en France visiter les étudiants africains et prendre contact avec les autorités académiques métropolitaines. Sur place, il constatait une inadaptation quantitative de la répartition des diplômés à celle des emplois, déplorait que le nombre des étudiants en droit aille croissant au détriment des sciences et de la médecine. 55 ans après les indépendances, cette constatation de Clédor relative à la désarticulation formation/emploi reste d’actualité dans nos universités et écoles de formation.
C’est au sein de ce Grand Conseil dirigé par Boissier-Palun que Léopold Sédar Senghor, membre de ladite entité, apprécia le travail remarquable que son compatriote Clédor abattait au sein de sa commission. Il décida de rentrer au Sénégal en 1957 nonobstant le poste de ministre qui lui fut proposé dans le premier Conseil de gouvernement mauritanien de huit membres formé par le vice-président Mokhtar Ould Dada. Il fut l’un des premiers administrateurs avec Alioune Diagne Mbor, Diarga Cissé à être envoyé en France pour effectuer un stage de perfectionnement. En 1962, il remplaça Abdou Diouf au poste de Gouverneur de la région de Sine Saloum. Comme un coup du hasard, Clédor Sall a terminé ses études en septembre 1935, période pendant laquelle le président Abdou Diouf est venu au monde. Il a partagé aussi avec Abdou Diouf le même immeuble à Fass (non loin de l’actuelle demeure d’Ahmed Khalifa Niass) avant de se retrouver avec lui en 1968 dans un même gouvernement.
Homme de consensus et de dialogue
En fin d’année 1963, il est nommé gouverneur de Dakar. Mais il était en quelque sorte gouverneur-maire puisque dès 1964, c’est le gouverneur de région qui exerce, par un statut spécial, sous l’autorité du président de la République et du ministre de l’Intérieur, l’ensemble des attributions confiées auparavant au maire. Mais si on en est arrivé à ce statut du gouverneur étendu aux autres régions du Sénégal, c’est parce que Clédor a été l’un des premiers à avoir eu le courage de dénoncer le mode de gestion du personnel municipal par les « maires-administrateurs » et les effets du clientélisme. « Le personnel de la mairie comme dans nombre de communes et notamment les manœuvres de la voirie sont recrutés sur des bases politiques », dénonçait-il. En outre, il a fustigé les pratiques des « maires-administrateurs » contradictoires aux règles de gestions telles que la réembauche d’agents municipaux licenciés pour faute lourde.
Tout le temps qu’il était resté gouverneur, il était confronté à nombreuses opérations de déguerpissement puisqu’il fallait donner un visage nouveau à la capitale défiguré par des occupations illégales. Mais en tant que bâtisseur du lien social, pétri d’humanité, il n’utilisait jamais la force publique pour mener à bien ces opérations car il privilégiait toujours la concertation avec les populations autochtones concernées.
Quand il s’est agi, sur instruction de la hiérarchie étatique, de déménager les habitants des quartiers Gibraltar et Al Minkou pour construire les allées Centenaires, il a su négocier et trouver des solutions avec les occupants autochtones. Et certains ont acquis des habitations décentes à Guédiawaye grâce à son entregent et cela avec un accompagnement financier consistant. Concernant le déguerpissement de la Médina envisagé par le président Senghor, Clédor y joua un rôle de premier plan lorsque les occupants réticents lébous s’opposèrent audit projet.
A l’approche du festival mondial des Arts nègres de Dakar de 1966, le Président Senghor avait voulu raser les cantines de Sandaga pour embellir la capitale. Mais puisqu’une telle initiative s’avérait difficile et grosse de dangers, il fallait beaucoup de diplomatie pour réussir une mission aussi délicate. Sur ce, l’alors gouverneur de Dakar fit appel à Ameth Diène, responsable socialiste lébou, pour trouver les solutions idoines. Ce dernier lui recommanda de s’en référer au khalife général des mourides Serigne Fallou Mbacké. En compagnie d’El Hadji Ndiaga Guèye de Touba Sandaga, ils se rendirent à la capitale du mouridisme pour rencontrer le khalife qui, mis au parfum, intercéda en conseillant au président Senghor de renoncer à un tel projet. Et c’est cette intervention califale qui sauva les cantines de Sandaga de disparition.
La capacité d’écoute de Clédor Sall, son sens de la négociation, son ouverture, son humanisme lui ont toujours permis de venir à bout de situations complexes et difficiles à résoudre. Cela n’est point une faiblesse mais une qualité puisque quand il fallait sévir pour les intérêts de la République, il ne tergiversait point.
Un ministre de l’Intérieur intrépide
En 1968, année de turbulences en France avec la grève des étudiants et des ouvriers en mai-juin qui eut des ramifications à Dakar, le gouverneur Amadou Clédor Sall joua un rôle prépondérant pour le rétablissement de l’ordre et la pacification du climat social en ébullition. Le monde des travailleurs et des étudiants sénégalais plongèrent le pays dans un cycle de perturbations difficilement maîtrisables. Et c’est là qu’il étala tout son savoir-faire en matière de sécurité. Il prit langue avec les grévistes, entama des négociations et adopta des mesures strictes et nécessaires pour le rétablissement de l’ordre dans la capitale. Et son travail fut récompensé au léger remaniement du 6 juin 1968 avec une nomination au poste du ministre de l’Intérieur en remplacement d’Amadou Cissé Dia qui fit les frais de ses relations exécrables avec le colonel Jean Alfred Diallo, l’alors chef d’Etat-major des armées.
Il faut préciser que le ministre de l’Intérieur était très proche de Senghor, lequel sollicitait constamment son opinion sur la marche de la République. C’est pourquoi, il était reçu quotidiennement en audience au palais de la République à 18 heures. Et le fait que le président le raccompagnait systématiquement et ostensiblement aux portes du palais laissait croire à un certain moment qu’il était le futur Premier ministre dont Senghor avait besoin après les événements de mai-juin 68. Abdou Diouf relate dans ses mémoires que même la préférence du chef d’état-major des armées Jean Alfred Diallo pour le poste de Premier ministre qui aiguisait plusieurs appétits allait à Clédor Sall.
Un jalonneur important du code de la famille
Le 10 avril 1971, il fut nommé ministre de la Justice et Garde des Sceaux dans le troisième gouvernement du Premier ministre Abdou Diouf jusqu’en février 1974. Et là, il joua un rôle capital consensualiste pour le vote du code de la famille qui était combattu par certaines forces coutumières et religieuses. Pour lui, la famille, qui est considérée comme la cellule de base de la société, doit être placée au cœur de l’édification de la nation avec pour socle, le principe de laïcité. Donc il fallait concilier le respect des principes proclamés par la Constitution, celui des règles religieuses considérées comme intangibles pour les croyants et celui de certaines valeurs traditionnelles pour asseoir un code consensuel. Et c’est ainsi que le 12 juin 1972, le code de la famille fut adopté par l’Assemblée nationale au terme du vote de la loi n°72-61.
A partir du 16 février 1974, il occupa le ministère des Forces armées jusqu’au 1er janvier 1981, date du départ volontaire de Léopold Sédar Senghor du pouvoir. Et là aussi, à sa demande, le nouveau président Abdou Diouf ne l’a pas reconduit dans le gouvernement du Premier ministre Habib Thiam. Il prenait de l’âge et ensuite il ne voulait pas gêner Abdou Diouf qui avait pris l’option de rajeunir son gouvernement.
Un responsable politique pétri de convictions
Quand, ministre de l’Intérieur, on lui a demandé de militer à la base pour intégrer l’Union progressiste sénégalaise, il a refusé parce que le contexte post-mai/juin 68 ne s’y prêtait pas. C’est après avoir quitté l’Intérieur pour la Justice qu’il a commencé à militer à la base. Devant les tendances qui minaient la coordination de Grand-Dakar, il a déployé ses talents de rassembleur et pacificateur. Et c’est ce qui lui permit plus tard d’occuper ladite instance. Il a aussi pesé de tout son poids pour qu’Adja Arame Diène accéde à la présidente de l’Union régionale de Dakar en remplacement d’Adja Ndoumbé Ndiaye atteinte par l’âge.
En 1979, il remplaça à la tête de mairie de Dakar Lamine Diack relevé par Senghor sur décret. Le jour de son sacre à la tête de la municipalité de Dakar, le tout nouveau maire de Dakar chanta les mérites de Lamine Diack qui, malgré la situation qui lui était défavorable, était présent dans la salle. Et c’est au congrès de 1984, avec les renouvellements des instances du parti socialiste, sous l’influence de Jean Collin, théoricien de la désenghorisation, qu’Abdou Diouf décida d’expurger tous les amis de Senghor dont Amadou Clédor Sall, Alioune Badara Mbengue, Amadou Cissé Dia, Magatte Lô, Assane Seck pour ne citer que ceux-là. Mais, ces derniers auréolés de gloire sortirent par la grande porte en cessant volontairement toute activité au sein du PS. L’édile Clédor fut alors remplacé par Mamadou Diop à la tête de la mairie de Dakar.
C’est cet homme d’une dimension exceptionnelle et au parcours exemplaire, pour reprendre les mots de son ami Baro Diène, cet homme droit et juste, cet homme debout pétri de tolérance, d’humanité et de fortes convictions qui entretenait des rapports saints avec tous les politiques, les guides religieux et la société civile, qui nous a quittés il y a quatre ans.
Amadou Clédor Sall en sept dates
1952 : Conseiller à l’Assemblée territoriale de Mauritanie et au Grand Conseil de l’AOF
A la proposition du président Senghor de le libérer s’il renonçait à la politique, Mamadou Dia répondait « Je préfère vivre libre en prison plutôt que d’être prisonnier dehors ». Au son de nos archives exclusives, écoutez la voix de Mamadou Dia, premier président du Conseil du Sénégal, de 1957 à 1962, dont l’idéal nationaliste ne souffrait aucun compromis avec la France.
Avec la participation de Roland Colin, ancien directeur de cabinet de Mamadou Dia, Mamadou Diouf, historien de la vie politique et intellectuelle sénégalaise, Professeur à l’Université de Colombia et le politiste Etienne Smith.
MAMADOU DIA, HISTOIRE D'UNE ARCHIVE INÉDITE
Dix ans après la mort de l'ancien président du Conseil (1957 à 1962), son ancien directeur de cabinet, Roland Colin, choisit de confier l’intégralité de ses douze heures d’entretiens enregistrés à Dakar entre 1975 et 1978, à RFI
RFI |
Valérie Nivelon Maxime Grember |
Publication 25/01/2019
C’est une archive sonore inédite où le premier président du Conseil du Sénégal revient sans aucune concession ni amertume sur la crise de 1962 et ses années de prison, suite à son arrestation ordonnée par son mentor Léopold Sédar Senghor, premier président de la République sénégalaise. Mais le témoignage de Mamadou Dia ne se résume pas à l’événement de 1962, aussi tragique soit-il. Sa dimension autobiographique revisite toute l’histoire de la lutte anticoloniale depuis les années 1930. Celle d’un instituteur africain et musulman, dont l’idéal nationaliste ne souffrait aucun compromis avec la France. À la proposition de Senghor de le libérer contre son engagement à renoncer à la politique, Dia a répondu qu’il préférait « vivre libre en prison plutôt que d’être prisonnier dehors ».
Avant de découvrir La voix Mamadou Dia, la série documentaire en trois épisodes diffusée en exclusivité dans La marche du monde sur RFIà partir du dimanche 17 mars à 11h10 TU, Roland Colin revient sur l’histoire de cette archive sonore et sur la dimension biographique du récit de Dia.
RFI : Dans quelles circonstances avez-vous réalisé ces entretiens ?
Roland Colin : J’ai retrouvé Mamadou Dia à Dakar en 1974, juste après sa sortie de prison et je lui ai dit que son témoignage était fondamental, que son histoire devait désormais être intégrée à la grande Histoire et qu’il devait reprendre la parole pour que tout le monde puisse entendre ce qu’il avait à dire.
Il a été très heureux de cette proposition, mais comme il était devenu presque aveugle et qu’il ne pouvait plus écrire, il a accepté de témoigner oralement et de revenir sur son parcours, de son enfance jusqu’à son emprisonnement en 1962.
C’est dans ce contexte que son récit autobiographique a été enregistré. Le travail de mémorisation a été fait par étape. Nous nous sommes vus une quinzaine de fois chez lui à Dakar entre 1975 et 1978. Ce travail lui a permis d’écrire son livre autobiographique : Afrique, le prix de la liberté (aux éditions L’Harmattan).
J’ai soigneusement gardé ces enregistrements et j’ai décidé aujourd’hui, à 90 ans, d’en faire don à RFI pour l’émission de Valérie Nivelon, La marche du monde. Il est important que ces archives puissent être connues de tous, car elles nous donnent à entendre la voix de Mamadou Dia, acteur de l’indépendance du Sénégal, mais aussi figure incontournable de la décolonisation en AOF (Afrique-Occidentale française) et en Algérie.
Quand entrez-vous au cabinet de et Mamadou Dia et quelle fonction occupez-vous ?
La loi-cadre Deffere du 23 janvier 1956 permet de créer pour la première fois un gouvernement sénégalais, et c’est le parti de Léopold Sédar Senghor qui occupe la position de responsabilité. Léopold Sédar Senghor nomme Mamadou Dia à la tête du gouvernement.
A la demande de Léopold Sédar Senghor, j’entre au cabinet de Mamadou Dia en juillet 1957, que je connaissais et pour qui j’avais de l’estime. Mamadou Dia me confie plusieurs missions importantes ; travailler à la fédération des Etats d’Afrique occidentale, suivre le transfert de la capitale de Saint-Louis à Dakar et l’accompagner dans la mise en place de sa politique de développement économique ; l’animation rurale.
Peut-on établir des comparaisons dans les parcours et les origines de Senghor et Dia ?
Mamadou Dia vient d’une classe pauvre. Il n’appartient pas au milieu de la bourgeoisie urbaine, à l’inverse de Léopold Sédar Senghor, dont le père était bien ancré dans le milieu des affaires.
Léopold Sédar Senghor a été extrait de son milieu dès l’âge de 7 ans. Il a été envoyé à l’école où on lui a appris le français et le wolof, alors que sa langue maternelle était le sérère. Il a découvert la religion et la culture française, tout en étant travaillé par l’aiguillon de la culture première perdue et qu’il appelait son royaume d’enfance. Dès lors, il va être obsédé par le retour à cette culture perdue ; la négritude, selon lui, qui sera vue comme une reconquête de soi. Il arrive à Paris en 1928 et il y restera jusqu’en 1945.
Quand il revient au Sénégal, il entend parler de Mamadou Dia, qui était un jeune instituteur et qui faisait un travail formidable avec les paysans sénégalais. Il rencontre un garçon en pleine possession de sa négritude première et sera dès lors fasciné par la négritude de Dia, qui venait de créer, avec un groupe d’amis, le cercle de l’authenticité, véritable creuset de la négritude accomplie.
De son côté, Dia considérait que la religion ne pouvait être un facteur discriminant pour s’intéresser aux autres, ce qui explique pourquoi il a accueilli Senghor (chrétien) avec beaucoup d’ouverture.
Dans quelle mesure la religion apparaît comme une clé de compréhension de la personnalité et de l’éthique politique de Mamadou Dia ?
Son témoignage nous permet de comprendre l’importance qu’a joué son père dans sa vie. Cet « homme digne et extraordinaire », comme il le qualifiait, était agent de police rurale et il incarnait à ses yeux la rectitude et la loi. Sa mort accidentelle va profondément le marquer et renforcer sa foi.
Par la voie d’un islam soufi que lui a transmis son père, la religion était de l’ordre du personnel et il était révulsé de voir l’utilisation de l’islam par les marabouts. Il voulait faire une grande assise nationale sur l’islam et le développement, mais cela n’a pas pu se faire à cause des événements de 1962.
D’où vient son intérêt pour les questions économiques ?
Il devient instituteur, puis comme directeur de l’école régionale de Fatick, il écrit pour des journaux dans lesquels il décrit la misère du monde paysan qu’il connaît bien. Ses articles portent essentiellement sur les questions économiques. Il préconise le regroupement des paysans en coopératives, voie idéale pour leur émancipation. Cette idée marquera par la suite sa pensée politique.
Comment Mamadou Dia est-il entré en politique et a-t-il créé le Bloc démocratique sénégalais (BDS) avec son mentor Léopold Sédar Senghor ?
D’abord réticent à l’action politique, il accepte de se présenter à la demande des habitants de Fatick qui souhaitent le voir candidat au conseil général. Parrainé par Senghor, il se présente sous l’étiquette SFIO.
Ses relations avec Lamine Gueye, leader de la SFIO, se détériorent et avec un groupe de camarades contestataires, dont Léopold Sédar Senghor, il décide de s’impliquer dans la création du BDS.
Pour quelles raisons Mamadou Dia entretient-il des relations privilégiées avec les religieux et avec les syndicalistes pour créer le BDS ?
Le contact avec les religieux et les syndicalistes a permis au BDS de se structurer et de s’étendre, là où la SFIO n’avait pas d’influence.
Mamadou Dia était proche du militant syndicaliste Ibrahima Sar, qui était l’animateur de la grande grève des chemins de fer de 1947. Ibrahima Sar a été ministre du Travail et de la Fonction publique dans le gouvernement de Dia. Il restera fidèle et solidaire à Dia lors des événements de 1962. Il sera emprisonné au même titre que Dia pendant douze ans. Il est mort peu de temps après, suite à une maladie mal soignée pendant son emprisonnement.
En quoi l’année 1958 est-elle un tournant dans la politique sénégalaise ?
L’année 1958 est celle de l’effondrement de la IVe République française. Le général de Gaulle arrive au pouvoir et accepte de faire un pas supplémentaire vers l’autonomie des territoires de l’AOF en proposant un grand référendum sur l’ensemble de l’espace d’influence française, où les pays doivent choisir entre deux options : prendre l’indépendance immédiatement ou se fédérer au sein de la communauté française…
Gros débat, car choisir l’indépendance, c’est émerger sur le plan international sous la forme d’un petit Etat et compromettre les chances réelles d’émancipation sur le plan économique et géopolitique. Le Sénégal, avec d’autres, choisit le statut d’Etat membre de la communauté, en annonçant qu’il transforme son système intérieur de telle sorte à être apte à assumer les responsabilités de l’indépendance. Le Sénégal se donne quatre ans pour transférer son économie.
Comment Mamadou Dia s’y prend-il pour transformer l’économie de son pays ?
Dia avait une formation économique, ce qui était précieux et rare pour un responsable africain de cette époque. Et comme le Sénégal vivait encore dans l’économie de traite colonialiste, il va choisir la voie de l’économie sociale pour transformer l’économie de l’arachide et créer les coopératives paysannes, qui seront de véritables lieux d’apprentissage de la démocratie. Il se fixe comme objectif de réaliser ce travail de formation et de transformation sur quatre ans.
Il lui faut un outil d’éducation paysanne pour permettre à la population de gérer ce qu’il lui est proposé ; ce sera l’animation rurale. Dia va parler d’une économie démocratiquement contractuelle et d’un socialisme humaniste - et non bureaucratique - selon les références culturelles du peuple. A partir de là, son gouvernement va proposer aux paysans de s’organiser en coopératives paysannes, puis il va choisir de réformer l’administration pour que celle-ci soit une administration de partenariat. Dia va appeler ce système de cogestion et d’autogestion le « socialisme africain humaniste ».
C’est à cette période que vous débutez votre collaboration avec Mamadou Dia ?
Oui. Accordé à cette idée, Mamadou Dia me demande de prendre la tête de son cabinet. Ce seront quatre années passionnantes de mise en place du développement de l’animation rurale. Une étape nécessaire pour passer de l’autonomie à l’indépendance.
Comment se met en place l’animation rurale ?
L’Etat met en place un plan de développement sur quatre ans pour chacune des régions : 750 coopératives sont créées la première année. L’Etat crée une banque de développement et un office de commercialisation, ce qui permet de sortir de l’économie de traite. Sur les 600 000 tonnes d’arachide produites chaque année, 150 000 tonnes le sont par le biais de l’économie sociale. Les protagonistes extérieurs n’y croient pas et pensent que les Noirs sont incapables de se gérer eux-mêmes… Au bout de la première année, tout marche au cordeau.
Lors de la deuxième année, 1 500 coopératives sont créées et 300 000 tonnes d’arachide sont produites. Tout marche normalement et les protagonistes extérieures hostiles au régime commencent à avoir peur et pensent que si l’on passe à 75%, ce sera irréversible… Dès lors, il faut « abattre » Dia avant la troisième année.
Comment les opposants de Mamadou Dia vont-ils s’y prendre pour faire tomber son gouvernement ?
Les opposants forment une coalition comprenant trois composantes : « les firmes de commerces internationaux », « les grands marabouts sénégalais » et « le personnel des administrations ». L’objectif est de faire renverser le gouvernement avant la troisième année en déposant une motion de censure par les députés qui s’opposent à la politique de Dia.
Entre-temps, Senghor avait pris les fonctions de président de la République. Dia était toujours chef de gouvernement et pouvait orienter le gouvernement avec la confiance de Senghor, qui pouvait arbitrer en cas de crise. La gestion de Dia est critiquée. Il reprend contact avec certains dirigeants venant des pays de l’Est, notamment la Yougoslavie dont le principe d’autogestion l’intéresse. Les ennemis de Dia intoxiquent Senghor, car le socialisme de Dia mènera au communisme qu’on lui présente comme une destruction pour l’Afrique. On fait croire à Senghor que Dia est en train de monter un complot contre lui pour transformer le Sénégal en République islamique. Progressivement, Senghor va se laisser envahir par cette idée.
Comment Mamadou Dia décrit les événements de 1962 dans vos entretiens ?
Senghor s’était installé dans un protocole « élyséen », si bien que Dia n’avait plus le même accès à Senghor qu’auparavant pour discuter simplement.
Les députés frondeurs déposent une motion de censure alors qu’ils sont issus du même parti que Dia et Senghor. Ils programment le vote de la motion de censure avant que le Conseil national ne se réunisse. Dia se trouve face à un dilemme politique et moral ; s’il laisse faire, c’est toute la politique menée depuis des années qui s’écroule. Il faut donc convaincre les parlementaires avant que le parti ne se réunisse, ce qu’il ne réussit pas à faire. La motion de censure est votée. En parallèle, la Constitution change et on passe au régime présidentiel. Dia est embarqué par l’armée. La nouvelle est répandue : Dia a tenté un coup d’Etat, la presse est sous contrôle, et on dit que Senghor a sauvé la démocratie d’un coup d’Etat.
Ou étiez-vous à ce moment précis ?
Un mois avant les événements de 1962, j’étais au cabinet de Dia et j’avais encore accès à Senghor avec qui je pouvais discuter, car il avait confiance en moi, mais une tuberculose m’oblige à être évacué en France. J’apprends la nouvelle de l’emprisonnement de Dia à la radio depuis la France.
A quel moment revenez-vous au Sénégal ?
Senghor m’envoie un message et me dit que ma place est au Sénégal, et qu’il me confiera des responsabilités importantes quand je sortirai du sanatorium. Je lui réponds que je ne peux pas remettre les pieds au Sénégal tant que Dia est en prison. Senghor se fâche et interrompt ses relations avec moi. Je retrouve Paris en juin 1963 après huit mois au sanatorium et j’entre à la direction de l’Iram, l’Institut de recherche et d’applications des méthodes de développement. Madagascar et le Niger s’intéressaient aux méthodes de Dia et je leur servais d’interlocuteur.
Entre-temps, Dia est condamné pour coup d’Etat par une cour de justice constituée de parlementaires qui avaient voté la motion de censure, et est envoyé dans un centre de détention proche de la frontière du Mali.
En 1967, je reviens à Dakar pour un congrès international et je rencontre Senghor le lendemain de mon arrivée. Je lui rappelle l’estime que j’ai pour lui et que le tandem qu’il formait avec Dia était fondamental, que c’était une chance pour l’Afrique d’avoir un homme de culture et un économiste à la tête du gouvernement du Sénégal, et qu’ensemble ils doivent faire front commun pour mener le destin du Sénégal. Senghor veut bien envisager des mesures permettant la libération de Dia, mais il veut des garanties et me propose de faire l’intermédiaire pour mettre en œuvre sa libération.
Quel est votre rôle pendant les douze années de prison de Dia ?
Je continue d’écrire régulièrement à Senghor sans réussir à faire avancer les choses et un jour Senghor me fait venir à Dakar. Il me demande de porter le message suivant : « J’ai décidé d’envisager la libération de Dia à condition qu’il fasse l’engagement par écrit de renoncer à faire de la politique ». Je me charge de faire l’intermédiaire et Senghor me permet de rencontrer secrètement Dia en prison.
Je revois Dia en 1972 et lui expose les exigences de Senghor et il me dit qu’il considère la politique non pas comme un droit mais aussi comme un devoir. Il me dicte un texte que je remets à Senghor dans lequel il lui dit préférer « vivre libre en prison plutôt que d’être prisonnier dehors ». La lettre est transmise au cabinet de Senghor, qui estime que Dia fait sa mauvaise tête.
Entre-temps, Dia souhaite que son message soit connu et me demande que sa lettre soit envoyée à Houphouët-Boigny, alors président de Côte d’Ivoire. La réconciliation entre le Sénégal et la Côte d’Ivoire bat son plein ; Senghor fait son voyage de réconciliation à Abidjan et invite Houphouët à Dakar. Houphouët-Boigny appelle l’ambassade du Sénégal et dit qu’il accepte à condition que Dia sorte de prison. Senghor reçoit le message et les négociations se rouvrent pour faire sortir Dia de prison. Un compromis est trouvé. Nous sommes en 1974.
Comment Dia a-t-il supporté ses douze années de détention ?
Ses conditions de vie étaient très dures. Il a tenu le choc moralement et spirituellement en le prenant comme une épreuve humaine et métaphysique. Une mission vis-à-vis de son peuple. Il a beaucoup médité, réfléchi, lu et écrit. Il en est sorti encore grandi.
J’ai beaucoup admiré sa force morale et sa sérénité. Dia a été séparé de ses cinq compagnons avec qui il n’a eu aucun contact pendant ces douze ans. Chacun dans son pavillon. Il a vécu dans une grande solitude et il ne pouvait recevoir de visite qu’une fois par trimestre. Il est sorti de ces longues années d’incarcération avec une volonté de liberté totale.
Dans quel état d’esprit retrouvez-vous Mamadou Dia à sa sortie de prison ? Une réconciliation était-elle envisageable avec Senghor ?
Dia était évidemment heureux de retrouver les siens et la liberté mais il n’était pas habité par un esprit de revanche. Il avait la conviction qu’il avait encore un devoir à accomplir dans la ligne de la démocratie participative.
Avec Senghor, on peut parler de reprise de contact et non d’une réconciliation. Dès que Dia est sorti de prison, il a demandé à être reçu par Senghor. Une fois dans son bureau, il s’est avancé vers lui, a ouvert les bras et lui a dit : « Alors, tu ne m’embrasses pas Léopold ? » S’en est suivi une conversation politique dans laquelle Dia lui a dit qu’il fallait impliquer davantage la société civile pour qu’elle puisse avancer vers la démocratie participative et qu’il souhaitait fonder une internationale africaine pour le développement. Senghor était interloqué par la demande de Dia.
Dia créée cette fondation en 1975 et commence à faire des voyages. Le gouvernement sénégalais lui a mis des bâtons dans les roues. Le projet a fonctionné deux ans. Dia a ensuite repris sa militance politique.
Né en 1928, Roland Colin entre à l'Ecole nationale de la France d'outre-mer en 1948 où il a Léopold Sédar Senghor comme professeur et avec qui il se lie d’amitié. Diplômé de l'Ecole des langues orientales, il commence sa carrière comme administrateur au Soudan français (actuel Mali) en 1952, puis au Sénégal en 1955.
En juillet 1957, à la demande du président Senghor, il est nommé conseiller technique dans le cabinet de Mamadou Dia, président du Conseil de gouvernement du Sénégal, puis chef du gouvernement de la République du Sénégal en 1958.
Suite à l’arrestation de Mamadou Dia en décembre 1962, Roland Colin abandonne toute fonctionne officielle et rentre en France pour entamer une carrière d’anthropologue et d’universitaire, spécialiste du développement des pays africains.
PAR AMADOU LAMINE SALL
17 ANS QUE SENGHOR DORT SANS FIN
Monsieur le président, vous assistez de là où désormais votre regard déshabille toutes choses, aux tribulations du pays dans ce qui devait être un moment apaisé de responsabilité et qui, sous nos yeux, se révèle comme un tragique théâtre politique
C’est le 20 décembre 2001 que vous nous avez quittés : pourquoi ceux que nous aimons meurent-ils ? Que restent-ils de ceux qui voyagent si loin, si près, si ce n’est la mémoire de ceux qui sont encore restés et qui se préparent, eux aussi, pour l’éternelle couette de terre ? Alors, que reste t-il vraiment qui surmonte le temps, si ce n’est les livres d’histoire ? En écrivant ces mots, mon cher poète, je pense à vous, je pense aussi à un autre homme disparu le 4 décembre 2018 dernier, à 16 jours du 17ème anniversaire de votre grand sommeil. Le Sénégal a pleuré Sidy Lamine Niasse, d’une année mon aîné, enfant de Kaolack comme moi. J’évoque sa mémoire ici, car ma maman l’aimait et elle a beaucoup, beaucoup pleuré quand je suis allé dans sa chambre lui annoncer notre deuil. Je n’aime pas voir ma mère pleurer. Que l’on ait de l’estime pour lui ou non, Sidy Lamine était Sidy Lamine. « Amadou, je viendrais embrasser notre maman, bientôt », m’avait-il lancé à la fin du dîner en la résidence de notre ami, l’Ambassadeur de Palestine, Safwat Ibraghith. La Palestine belle et rebelle, se souvient toujours de Léopold Sédar Senghor ! Tous vos successeurs lui ont gardé ce que tu lui avais donné, le premier ! Un héritage qui honore notre pays au sein de la communauté internationale.
Si cher poète, comme le temps est long depuis votre grand sommeil ! Et pourtant, vous êtes si présent en nous, avec nous. Pas une année où aux plus reculés des hémisphères, l’on ne vous fête ! Nous rentrons de Paris le 9 novembre 2018 où l’Académie des Sciences d’Outre-mer célébrait, autour de la thématique de la trilogie de la paix, trois grands noms : Léopold Sédar Senghor, Martin Luther King, Alfred Manessier le peintre. Monsieur Moustapha Niasse, votre ami si fidèle, disciple invincible, en sa qualité de président du Conseil d’Administration de la Fondation L.S.Senghor en était l’invité d’honneur. Maître Boucounta Diallo, Raphaël Ndiaye, directeur général de la Fondation et votre peul qui a migré dans les bras des Sérères, étaient présents au pays de Victor Hugo. C’est comme si vous y étiez et vous y étiez ! Monsieur Gérard Bosio, le fils inconsolé et qui fut votre conseiller, nous y a accueillis. Il s’échine, avec grand mal, à ouvrir un musée en votre nom où seraient enfin exposées toutes les œuvres du patrimoine que vous lui avez laissées et qu’il garde comme le dernier grenier de mil ! Au même moment, Emmanuel Macron le jeune Président français qui tisse sa légende mais à qui un mouvement populaire sorti de l’exaspération et de la pauvreté, dénommé les « Gilets jaunes », lui ôte ses aiguilles et ses étoffes, pourrit le quinquennat, met la France à nu, face au monde. Le Président français recevait près de 70 Chefs d’État, pour la commémoration du 11 novembre, cent ans après la 1ère guerre mondiale de 14-18.
J’ai pensé alors au soldat Senghor, combattant de la seconde guerre mondiale ! Je me souviendrais toujours de mon voyage à Saint Médard en Jalles, non loin de Bordeaux, cette localité où vous aviez été interné comme prisonnier de guerre et dont la médiathèque porte désormais votre nom. Vous imaginant dans ce camp près de 82 ans plus tard, j’ai mesuré en foulant ce sol, combien la grâce divine vous avait préservé de la mort. Plus fascinant encore : jamais en vous regardant gouverner, dire des poèmes, prononcer des discours, manger, dormir, l’on ne pouvait distinguer en vous que vous aviez été un seul jour de votre vie au cœur de cette boue glaciale et sanglante que fut le théâtre de la guerre, en ce temps-là ! Je n’ai jamais vu et entrevu en vous que la lumière ! Ou cachiez-vous donc cette vie antérieure, me suis-je toujours demandé à vos côtés ? Est-ce donc la poésie qui avait tout embelli en vous ?
Tiens, le 25 novembre, en entrant dans les locaux de la nouvelle radio « imedia », où j’étais venu prendre part à un débat animé par le teigneux journaliste Alassane Samba Diop, je vous ai trouvé à l’accueil avec Nelson Mandela. Oui, une belle photo de vous et du grand zoulou décorent les locaux de cette naissante station radio ! Bel hommage d’une solide compagnie d’invincibles journalistes, dont Mamoudou Ibra Kane, Antoine Diouf, Khalifa Diakhaté, entre autres. Vous êtes ainsi dans le cœur d’une nouvelle génération médiatique qui triomphe par sa rigueur et sa qualité.
Si cher poète, Monsieur le Président -dans l’ordre alphabétique-, vous assistez de là où désormais votre regard déshabille toutes choses, aux tribulations du Sénégal dans ce qui devait être un moment apaisé de haute responsabilité et qui, sous nos yeux, se révèle comme un tragique théâtre politique de fous et d’hallucinés. La politique et des ambitions démesurées ont rendu méconnaissables notre pays. Notre chance, cependant, est que le plus grand nombre du peuple Sénégalais reste grand et lucide. Seule l’arène politique est atteinte d’un cancer généralisé. Nous espérons que le suffrage universel, au lendemain des élections présidentielles de février 2019, guérira très vite, au réveil, les plus atteints. Le système fort contesté dit du parrainage a déjà sorti de la chimiothérapie quelques chanceux. Un vent de folie et d’ambition que rien ne semble arrêter, pollue jusqu’à l’eau de nos robinets. Le peuple se tait. La horde des politiciens déferle sur nos vies. Sans respect. Avec une poignante honte. Ce visage là ne ressemble pas à votre pays. Tant pis si nous acceptons cette fatalité. Peut-être mènera t-elle à un jour nouveau, une autre manière de faire de la politique, une autre manière d’être digne.
Votre 4 ème successeur bâtit, bâtit, bâtit ! Quelque soit l’adversité, il sera difficile de dire de cet homme qu’il fut un flâneur tenant en laisse une tortue pour installer son pays au cœur de la modernité. Nous lui souhaitons que l’histoire de son héritage ne soit pas d’argile ! Mais nous n’oublions pas que des Chefs d’État africains paient cher pour offrir la pauvreté à leur peuple ! Ce qu’il nous faudrait accélérer serait plutôt l’émergence d’industries productives, génératrices d’emplois et de richesses, exportatrices, sans lesquelles il ne saurait y avoir de véritable pays avancé. Là, se logent nos faiblesses. Il faudra bien résorber ce gap ! L’État seul ne saurait y réussir, mais il doit pousser dans ce sens le secteur privé national et international, dans un partenariat dynamique, qui relaie et complète les actions de l’État.
Macky Sall, c’est son nom, cher poète, brigue un second mandat en février 2019. Le temps de vos 20 ans au pouvoir est bien sûr révolu. Je vous vois d’ailleurs en rire ! Vous nous avez toujours confié que vous étiez arrivé au pouvoir par accident et que vous ne comptiez pas y rester longtemps, jusqu’à cette fameuse et si contestée tentative de coup d’État qui changea le temps de votre mandat. Votre 4ème et jeune successeur a fixé la norme à deux mandats de cinq ans. Après lui, nous souhaitons que les Sénégalais approuvent un mandat unique dont la durée restera con sensuellement à être fixée, afin d’avancer et d’éviter à notre pays de détestables échéances trop proches les unes des autres qui nous installent dans des campagnes électorales permanentes, sans compter les inévitables compromissions de renouvellement de mandat avec de grosses coalitions politiques qui ne viennent pas que pour boire du thé !
Tiens, le Musée des Civilisations Noires dont vous rêviez vient d’être enfin inauguré, 11H, le jeudi 6 décembre 2018, par l’heureux Président Macky Sall ! Près de 93 ans d’attente, décompte fait ! En effet, que de temps parcouru depuis 1925, date d’évocation de ce projet par un certain Lamine Senghor, puis 1957 avec les assises de Rome autour d’intellectuels et d’artistes, 1966 avec le totémique Festival mondial des arts nègres, 1974 avec le Conseil des ministres spécial de Dakar sur le musée. Quatre dates marquantes révélées par l’actuel ministre de la Culture Abdou Latif Coulibaly devant le Parlement, le 4 décembre 2018 ! L’inauguration du tant souhaité projet du Mémorial de Gorée attendra combien d’hivernages ? Le Président Sall a dit oui à ce projet dans son discours d’inauguration du Musée et l’a réitéré en lettres d’or au Conseil des ministres du mercredi 12 décembre 2018. Enfin, le symbole de toutes les mémoires souffrantes serait érigé pour l’histoire et dans l’histoire des Noirs de toutes les couleurs!
Que te rapporter d’autre, cher poète, en ces temps incertains du monde. Les États Unis d’Amérique scalpent les États libres et son invraisemblable et fatidique Président a ouvert des boutiques de linceul le long de ses frontières. La Grande Bretagne lutte contre elle-même et aiguise ses couteaux avec ses propres dents en sortant de l’Union Européenne par le « Brexit ». La Chine continue sa marche jaune devenue jaune-arc-en-ciel, pour dire que ses conquêtes sont devenues grandes. L’Afrique s’organise. Juste le temps encore d’enterrer le reste des Chefs d’État qui l’humilient et la déshonorent ! Mais nulle part dans le monde, la démocratie ne porte des habits de grande lumière. La justice, non plus. Le combat des écologistes s’intensifie, conséquence de l’accélération du réchauffement climatique face à des gouvernants aveugles et suicidaires. La 3ème guerre mondiale est déclenchée : nature contre homme. La fin n’est plus loin ! Au Sénégal nous luttons contre un projet de port monstrueux, une pieuvre géante et puante qui étend ses tentacules de Ndayane à Toubab Dialaw, sur un des plus beaux littoral sénégalais ! Un génocide écologique qui s’annonce si le Président Sall n’y apporte pas la plus précieuse et la plus patriotique des attentions ! Déjà, les catastrophes du port de Bargny-Sendou sont désormais ressenties jusque chez toi, cher poète, à Joal la Portugaise ! Tes vertes vérandas sont menacées par la suie noire des vents noirs de la pollution. La poésie résiste, mais jusqu’à quand ? Mais le temps des poètes n’est pas fini ! Dans l’actualité des réflexions du monde, j’apprends ceci du chercheur américain André Tanenbaum : « Dans le futur, chacun possédera chez soi un terminal connecté à un réseau d’ordinateurs. On pourra faire des référendums spontanés sur des questions législatives importantes. Plus tard, on pourra supprimer les représentants du peuple au bénéfice de l’expression populaire directe. » Par ailleurs, sur un autre sujet de langue et de religion, je partage avec vous ces éclairantes leçons de Fawzia Zouari : « Des élus français confondent l’enseignement de l’arabe avec l’enseignement du Coran. Ils se trompent. L’arabe existait avant le Coran et était une langue de poésie avant tout. De même que bien des musulmans prient sans savoir lire ni écrire. Donc, il n’est point besoin d’apprendre l’arabe à l’école pour connaître et pratiquer la religion (…) le plus grand pays adepte de cette foi, l’Indonésie, ne parle pas l’arabe (…) le musulman peut naître chinois (…) l’arabe est aussi la langue des juifs et des chrétiens d’Orient ».
Mon cher poète bien-aimé, dans mes lectures qui m’éloignent de l’environnement médisant et nauséabond de nos politiques, de l’angoisse de nos peuples, j’ai appris que Dieu nous parlait et nous écrivait tous les jours avec des consonnes et que c’était à nous d’y introduire les voyelles, pour tracer et assurer notre propre verticalité vers Lui.
Votre pensée nous manque. Elle nous donnait à boire quand nous avions grand soif !
En ce 20 décembre 2018, 17 ans après votre grand sommeil, sur votre tombe poussent des poèmes que des pèlerins sont venus écrire pour vous et qu’ils n’ont pas voulu signer. Quand arrive le vent, il les essaime dans tout le cimetière de Bel air et les morts les lisent à haute voix la nuit avec Julien Jouga.
Vous ne nous avez jamais quittés !
Rokhaya Diallo-Hamidou Anne-Penda Mbow-Alymana Bathily-René Lake
SÉNÉGAL, ENJEUX 2019
EXCLUSIF SENEPLUS - Jusqu'à l'élection présidentielle de février, publication d'une série d'articles d'analyse de fond des défis qui se posent au développement du pays - La conversation est dès à présent ouverte et tout le monde peut y prendre part
#Enjeux2019 - A partir de cette semaine, SenePlus.com lance un projet de publication d'une série d'articles d'analyse de fond des principaux défis qui se posent au développement du Sénégal.
"Enjeux 2019", titre de cette série de publications que vous retrouverez sur SenePlus.com et dans les colonnes de quelques uns de ses partenaires de la presse écrite, a pour objectif de susciter, de mener, d'entretenir et de prolonger dans le fond et dans la durée des débats nationaux d'ici au 24 février 2019, date de la prochaine élection présidentielle.
Avec le soutien de la fondation Open Society Initiative for Africa (OSIWA), SenePlus a sollicité plusieurs contributions écrites auprès d'experts, d'activistes, et de leaders d'opinion représentants un groupe de citoyens divers en tous points : âge, genre, ethnie, religion, opinion ou engagement politique, école de pensée philosophique ou idéologique, et spécialité professionnelle notamment.
Les discussions, les conversations et les débats autour des "Enjeux 2019" seront menés sous un angle non-partisan. L'intention est sous-tendue par l'idée selon laquelle, quelle que soit l'administration qui sera aux affaires après la prochaine présidentielle, nous devrons tous ensemble, malgré nos approches différentes, voire divergentes, sinon trouver des solutions, au moins faire des progrès significatifs dans certains domaines. Car, cela relève d'une exigence populaire et bien souvent également, une exigence de bon sens.
Tous les sujets de fond seront abordés. Ensemble, nous réfléchirons aux questions de gouvernance, d'éducation, de formation, de la place de nos langues nationales, de celle des femmes dans toutes les sphères de la société, du rôle des médias, des défis d'Internet et des réseaux sociaux, de la santé publique, de la monnaie, de la gestion des ressources naturelles, de la politique africaine et internationale, de la défense et de la sécurité, de l'environnement, du sport, etc.
Les points de vue des femmes et des jeunes seront transversaux à toutes ces questions.
Il s'agira de rendre compte des défis qui se posent de manière spécifique aux femmes qui représentent la majorité de la population du Sénégal. Où en sommes-nous par rapport à l'égalité en droit entre hommes et femmes ? Quelles mesures et quelles réformes pour faire face à la violence sur les femmes dans la sphère domestique ? Comment discuter et agir face à la mendicité infantile ? Les questions sont bien nombreuses.
Quant aux jeunes, les textes de SenePlus et ses partenaires refléteront la maturité politique d'une partie de cette jeunesse et son appropriation des enjeux immenses qui se posent à un pays à bâtir ensemble. Les contributions des jeunes femmes et des jeunes hommes auront ce sens profond qu'elles proviennent du cœur social d'un pays jeune. Elles constitueront le propos de celles et de ceux sur qui le pouvoir à venir en février 2019 s'exercera.
Pour prolonger, étendre et diversifier les conversations, SenePlus.com interpellera régulièrement, sur des plateformes multimédia, des citoyens dans les rues du pays et ailleurs pour avoir en diola, en pulaar, en wolof et en français, leurs perspectives sur les "Enjeux 2019".
Après l'élection, plusieurs formules pour poursuivre les discussions sur les "Enjeux 2019 - 2024" seront proposées à tous les acteurs sociaux. D'un ouvrage aux conférences et autres espaces de discussion, il s'agira de poursuivre cette réflexion endogène sur le développement du Sénégal.
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PAR MAMADOU DIALLO
SENGHOR, UNE PENSÉE AU PRÉSENT
Le président-poète avait l’intuition de l’avenir - L’inauguration récente du Musée des Civilisations Noires au Sénégal, projet qu’il a évoqué lors du 1er Festival Mondial des Arts Nègres en 1966, témoigne encore de sa vivacité d’esprit
Si la grandeur d’une pensée se mesure assurément à ce que nul ne peut éviter de la croiser, d’y séjourner un jour ou une vie entière, de l’habiter en apprenti, d’en ressortir la splendeur, Senghor est bien installé dans l’histoire de la pensée contemporaine.
Il fait donc partie des intellectuels qui ont contribué à modifier profondément et durablement le paysage intellectuel et politique mondial. Théoricien et novateur, jamais coupé des enjeux de son époque mais jamais réductible à eux, son œuvre est devenue une clé de lecture du temps présent.
Elle démontre la nouveauté et la force de l’impact du Président-poète sur l’Histoire. Dix-sept ans après sa mort, sa voix n’a cessé de s’affermir. Elle porte aujourd’hui plus loin qu’il y a dix-sept ans. La cause est sans doute à chercher dans le fait que sa pensée était visionnaire comme sa villa futuriste de la corniche à Dakar.
L’inauguration récente du Musée des Civilisations Noires au Sénégal, projet qu’il a évoqué lors du 1er Festival Mondial des Arts Nègres en 1966 témoigne encore de sa vivacité d’esprit. Le poète à l’esprit créatif avait l’intuition de l’avenir. Il était capable d’anticipation. On l’appelait, on sollicitait son avis, ou lui confiait des missions. On lui décernait un diplôme honoris causa ou lui accordait une citoyenneté. On inscrit en France, sa réflexion aux pro- grammes de l’agrégation de lettres.
En 2006, pour fêter les 100 ans de Senghor, l’UNESCO publiait , sous la plume d’éminents intellectuels du monde,50 écrits en hommage au poète-président. Mais accuser Senghor de tel ou tel renoncement n’a aucun intérêt, pas plus que vouloir le rallier à l’intellectuel universel que représente Marx. Sans doute, il a eu des impasses : ses concepts contradictoires, négritude et francophonie, sénégalité et francité, dialogue et autorité( car il savait aussi mordre, réprimer).
En réalité, il était plus « l’homme des confluences» que des contradictions ou des compromissions. Il appréciait ce thème pascalien de l’accordement des contraires. Il maîtrisait l’art de la nuance.
Il y a bien plus passionnant. Retracer sa trajectoire, ses luttes dans son champ de spécificité et comprendre l’écho reçu par ses thèses, jusqu’à aujourd’hui inclus.Tout ce que nous pouvons dire a déjà été dit sur cet Homme d’Etat, homme de pensée et d’action. Un Président politique et culturel qui a redessiné à sa manière avec une érudition époustouflante, la carte du monde.
Nous tenterons d’analyser combien les idées senghoriennes forgées au 20ème siècle sont encore actuelles.
Comment Senghor a-t-il pu jeter sur le monde d’aujourd’hui les ailes de sa pensée ? Comment ses thèmes récurrents voire ses concepts contradictoires ont pu trouver leur traduction au sein de la communauté internationale ? Sans nous livrer à un ordre spécifique de tous les points, nous étudierons, pour avoir une li- gne générale, sûrement volontaire, le contexte réel dans lequel une œuvre d’exception née au siècle dernier traverse encore ce siècle nouveau.
- La Civilisation de l’Universel
Senghor en imaginant la Civilisation de demain, symbole vivante de tous les continents, de tous les peuples et toutes les races pressentait la Mondialisation (Globalisation). Roger DEHAYBE, écrivain belge, Commissaire de l’année de Senghor et Ancien Administrateur de la Francophonie affirme : « le père de l’alter-mondialisme, c’est Senghor.»
La Civilisation de l’Universel surgissant du rendez-vous du donner et du recevoir devait en effet donner naissance à la rencontre de toutes les civilisations particulières. Penser qu’on a des valeurs communes, des savoirs communs, on doit donc construire et partager ensemble. Dans cette mondialisation devenue irréversible, l’Afrique pourrait y apporter grandement son sens de la communauté, de solidarité et de partage et lui, l’humaniste, forcément une touche de fraternité pour la civiliser.
- La force du dialogue
Pour Senghor, la pensée se construit dans l’échange, dans l’altérité ou la contradiction, ce qui suppose un dialogue : dialogue des cultures et dialogue des religions. Sur le dialogue des cultures, le message ne variait jamais. Il avait une vision universaliste de la culture. La refondation du monde passerait fondamentalement par le métissage culturel.
La culture qui ne peut être conçue comme une dépendance de la politique doit rester un élément de premier plan dans toute approche de développement. D’autre part, il a théorisé le dialogue des religions plus particulièrement le dialogue islamo-chrétien. Il a vite compris que la religion est un sujet sensible, où on est confronté à une diversité de croyances.
Senghor a été élu sans discontinuité alors qu’il appartenait à une religion minoritaire au Sénégal.
Sans le dialogue, la religion risque d’être l’accélérateur de la violence, le ressort, le prétexte, l’inspiration des conflits.
Le 21ème siècle en tournant le dos à ses recommandations lucides porte malheureusement en lui les folies des nations et des peuples.
- La détérioration des termes de l’échange
Senghor fut le premier à dénoncer dans un célèbre discours à l’ONU en 1962 la détérioration des termes de l’échange appauvrissant les producteurs.
L’inégalité des pouvoirs de négociation entre les petits producteurs des pays en voie de développement et les filiales des grosses sociétés agricoles des pays développés était de nature vertigineuse. Les recettes à l’exportation des pays du Sud (l’arachide du Sénégal) en baissant considérarablement entrainaient des conséquences graves sur l’investissement, les dépenses publiques, l’emploi et le pouvoir d’achat des populations, d’où leur endettement.
Senghor n’a cessé de marteler tout le temps et partout , cette notion de détérioration des termes de l’échange.
Il était déterminé à créer des opportunités pour les producteurs économiques du Sud en situation de désavantage, à mener le combat contre la pauvreté et à instaurer de l’équité, de la transparence et de la solidarité dans ce système trop injuste.
Sa revendication permanente pour un système d’échange dont l’objectif était de parvenir à une grande égalité dans le commerce mondial, à utiliser le commerce comme levier de développement et de réduction des inégalités en veillant à la juste rétribution des producteurs a fini par donner naissance au commerce équitable. Le commerce équitable n’est-il-pas une forme de commerce ayant pour principe de rétribuer de façon juste les producteurs ? Mais le combat pour la détérioration des termes de l’échange a également abouti à la mise en place d’un Nouvel Ordre Economique International (NOEI) voté par consensus par l’As- semblée Générale des Nations Unies en décembre 1974. Le NOEI prônait dans sa philosophie d’établir un prix juste des matières premières en tenant compte de la loi de l’offre et de la demande
- Les cercles concentriques
Le monde qui se construit sera constitué de grands ensembles autour de l’Europe, des Etats Unis d’Amérique et de la Chine. C’était le constat senghorien. C’est pourquoi, il pensait aussi que l’Afrique devait être un grand rêve nourrissant espoirs et passions. Il ne cessait de rappeler que le continent maternel est condamné à se réaliser, que ce soit pas à pas, ou au moyen de marchandages diplomatiques. C’était sa théorie d’intégration régionale par cercles concentriques. Son sursaut d’audace pour éviter une Afrique balkanisée n’a pas eu un grand succès. Le Président Houphouet a manifesté une absence de générosité. Au final, l’Afrique n’a pas accompli cet esprit de dépassement.
- L’environnement
Contrairement à la plupart des responsables mondiaux, Senghor avait rapidement compris les grands défis environnementaux du moment. Dès son accession au pouvoir, il crée la Direction des Parcs et Espaces Verts rattachée à la Présidence de la République. A cette époque, où l’écologie était un fait marginal, il avait déjà la conscience civique du risque de la disparition de la faune et de la flore, de la finitude des ressources. Il était animé par le sentiment d’une responsabilité à l’égard des générations futures.
- Le marxisme
Senghor n’a jamais été marxiste. L’ancien séminariste n’y trouvait pas Dieu. L’idéologie marxiste excluant la spiritualité. Mais il a libéré la terre pour la confier aux paysans sénégalais( Loi sur le domaine national).
Au moment où les peuples se ruaient vers le marxisme, il a refusé de subir l’envoûtement, se cramponnant sur un système de pensée humaniste d’inspiration négro-africaine.
Il n’a pas rejeté tout du marxisme. Il a retenu la dialectique comme méthode.
L-Histoire n’a-t-elle pas donné raison à Senghor avec la chute du Mur de Berlin en 1989 ?
Quel pays se targue aujourd’hui d’être communiste ?
« Avoir raison très tôt, c’est avoir tort », disait Edgar Faure, son grand ami et Immortel comme lui.
- Le multipartisme
Senghor a été le précurseur de la démocratie pluraliste au Sénégal et en Afrique. Il a instauré le multipartisme limité avant qu’il ne soit intégral sous la présidence de son successeur. Sortir du parti unique à cette époque était une décision politique novatrice et courageuse dans le continent.
Lorsqu’on peut tirer sur les théories d’un tel homme si largement, on a la preuve expérimentale de sa dimension intellectuelle.
En définitive, le senghorisme n’est pas une mode ou une nostalgie. Il est une grille de lecture des problèmes du monde contemporain. Le nègre visionnaire a réussi à sortir l’opinion internationale de son lieu naturel , la faire aller en un point , où elle ne saurait jamais aller d’elle-même, lui retirer toute évidence pour la remplacer par d’autres évidences. Senghor a opéré ce déplacement à la fois historique et profond avec probité, séduction et conviction. Par sa vision globale et lucide, l’Humanité forte de ses valeurs impérissables, marchera longtemps dans le sillage de sa lumière.
Mamadou Diallo est Avocat au Barreau de Paris, Docteur en droit, responsable des Cadres AFP France