Dakar, 16 août (APS) - Le chef de l'Etat, Macky Sall, fera une déclaration à 19h, à l’aéroport Léopold Sédar Senghor, a appris l’APS auprès de la cellule de communication de la Présidence de la République.
Cette déclaration annoncée du président de la République survient dans un contexte marqué par le décès de l’étudiant Bassirou Faye, lors d’une manifestation d’étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD).
Le chef de l’Etat revient d’un voyage aux Etats-Unis et en France.
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L'AVION DE WADE A-T-IL ÉTÉ BLOQUÉ À CASA PAR MACKY ?
Poète et écrivain, il est connu à travers toute la Péninsule où ses critiques acerbes contre les politiques discriminatoires en Italie l’ont propulsé sur le devant de la scène. Membre du Pen Club International de Lugano, en Suisse, il est auteur de plusieurs ouvrages publiés en français et italien. Il alterne prose et poésie, ses œuvres font aussi l’objet de thèses universitaires. Son dernier roman préfacé par le maire de Milan vient d’être primé au concours "Il Golfo 2014". Notre compatriote Cheikh Tidiane Gaye, c’est son nom, a reçu ce prix dimanche dernier 6 avril à La Spezia, ville faisant partie de la région de Ligurie. Nous l’avons rencontré pour échanger avec lui.
Le Témoin - On vous présente enItalie comme étant un poète de la Négritude ? Acceptez-vous cette qualification ?
Cheikh Tidiane GAYE -De par mes textes, je défends mes origines, la culture africaine en général et celle sénégalaise en particulier. Le mot Négritude n’appartient point au passé, je crois que nous devrons continuer à mieux le contextualiser et à lui redonner une cadence plus effervescente.
Je n’aime pas l’homologation et aujourd’hui plusieurs mouvements ont tendance à confondre l’intégration à l’interaction des immigrés. Je refuse d’être un "intégré". Mes valeurs ne sont point négociables. Je suis fier d’être noir, d’être africain et sénégalais et je me bats pour me faire respecter. Il faut qu’on s’impose.
La mondialisation est sûrement importante mais n’oublions pas notre identité, élément fondamental qui fera la différence au concert des peuples. La Négritude nous enseigne l’ouverture vers d’autres horizons culturels et nous met en garde de bien préserver ce que nous avons, ce que nous sommes, notre sang, notre essence. Le racisme que bon nombre de nos compatriotes africains vivent en Occident est une raison concrète pour parler de notre identité.
Alors, peut-on dire que vous êtes senghorien ?
Nous sommes tous des fils et petits-fils de Senghor, qu’on le veuille ou non. Il nous a indiqué le chemin, tracé le juste sentier qui nous a mené vers des horizons culturels multiples, riches et diversifiés. Senghor est pour moi le prophète de la mondialisation culturelle. Son projet qui s’est hissé au plus haut sommet des idéologies universalistes est à défendre. L’homme constitue ma lumière, son nom m’encourage et me protège, son parcours m’insuffle courage et force.
Etre senghorien, à mon avis, c’est défendre l’œuvre de ce grand homme, propager ce qu’il a remis et offert au monde comme patrimoine culturel. J’ai eu l’occasion de parler de mon écriture durant les journées d’études organisées l’année dernière à l’université de Montpellier et je ne cesserai de continuer de plaider la cause défendue par nos illustres maîtres de la parole: Césaire, Senghor … Notre cher Sénégal est respecté partout dans le monde grâce à l’image de son fils et premier président de la République. Senghorien, oui je le suis.
Pouvez-vous nous confirmer que vous êtes le premier noir à avoir traduit Senghor en italien ?
J’ai traduit récemment le grand et émérite poète Léopold Sédar Senghor. Je réitère le concept: notre rôle est de divulguer son patrimoine culturel. J’ai publié l’anthologie, donc traduit les poèmes les plus connus. C’est en fait un grand plaisir d’être le premier Africain à traduire ses poèmes en italien. C’est aussi un plaisir de pouvoir traduire d’autres poètes comme Tanella Boni, Nimrod, Marouba Fall, Nafissatou Dia Diouf, poèmes publiés dans l’annuaire mondial de la poésie édité par l’université de Pise en Italie.
Votre dernier roman, préfacé par le maire de Milan, vient d’être primé récemment en Italie du Prix "Il Golfo 2014". Comment avez-vous vécu cette consécration ?
Merci d’abord au jury qui a reconnu mes efforts, je constate avec plaisir que le livre est bien lu. Par ailleurs, j’ai eu l’occasion de le présenter au mois de juillet de l’année passée au département d’italien à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Je pense que le titre en tant que tel est un signe d’encouragement. Le livre est considéré comme un outil pour comprendre les difficultés des immigrés; il aide aussi l’administration, conscientise tout le monde contre ce phénomène qui échappe aux grandes nations coloniales.
Je continue mon travail, je continuerai de chanter ma peau noire, mon pays, ma terre rouge et ensevelie, je continuerai de parler des femmes noires, braves et belles… Je ne cesserai de défendre ma culture. Cette reconnaissance m’insuffle encore du courage, j’espère de nouveau et dans un futur proche publier mon neuvième livre. J’aime le grand poète Gibran qui nous enseigne la persévérance : "C’est quand vous aurez atteint le sommet de la montagne, que vous commencez enfin à monter".
Qu’est-ce qui vous a vraiment poussé à publier ce roman épistolaire et provocateur ?
Le titre est provocateur, certes, mais je tiens à souligner que le poète et / ou l’écrivain a comme mission de prendre position et de défendre ceux qui n’ont pas la possibilité de se faire entendre. L’engagement est fondamental chez l’écrivain. Traduit en français, le titre du livre primé est "Prends ce que tu veux mais laisse - moi ma peau noire". J’ai voulu à travers l’ouvrage traduire ma pensée et définir ma vraie position.
L’immigration est la conséquence de la politique néo- colonialiste imposée par l’Occident. Rien n’a changé : le mépris, le fait de se sentir supérieur envers les Africains, la discrimination sur le lieu de travail, la montée de l’extrême droite dans un bon nombre de pays occidentaux etc. Ce sont toutes ces raisons qui m’ont conduit à publier ce livre. Il s’agissait en somme pour moi de parler des siècles nébuleux de notre cher continent.
Quelles sont les maisons d’édition qui vous ont publié?
J’ai publié "L’étreinte des rimes" avec l’Harmattan Paris en 2012, mon dernier livre avec Jaca Book, une grande maison d’édition italienne, en 2013, quatre ouvrages avec les éditions dell’arco etc… J’ai publié avec deux autres éditeurs.
Vos projets pour le Sénégal ?
Je suis entrain d’étudier la possibilité de mettre sur pied un concours international de poésie (Italie – Sénégal) qui permettra aux poètes de publier leurs ouvrages. Notre pays a du potentiel dans le domaine poétique, il suffit de bien investir pour faire émerger la crème. C’est le rôle de l’Etat mais aussi des privés.
Votre dernier mot ?
Je voudrais féliciter le président de l’Association des écrivains du Sénégal, M. Alioune Badara Bèye, qui fait honneur à notre pays et à tous les écrivains qui ont représenté dignement le Sénégal. Vive la littérature! Vive la poésie!
L'ÉGYPTOLOGUE, DES MISÈRES DE SENGHOR À LA GLOIRE POSTHUME
Près de trois décennies après sa mort, Cheikh Anta Diop est plus que jamais une figure du trésor politique et scientifique du Sénégal. Mais la prise en charge de son héritage multidimensionnel est l'objet de conflits entre ceux qui s'identifient à une “spiritualité” que Senghor a fortement combattue.
Natif de Thieytou, dans la région de Louga, Cheikh Anta Diop a disparu le 7 février 1987. À la fois homme de science doublé d'un homme politique, il a laissé derrière lui un héritage qualifié de multidimensionnel.
Sur le plan scientifique, ''son héritage a connu un sort meilleur parce que toutes ses grandes idées et ses théories sont reprises partout à travers le monde'', estime le Pr Aboubacry Moussa Lam, égyptologue à l'Université de Dakar, rencontré par EnQuête. ''Ce qui reste à faire, c'est de mettre en pratique ses idéaux en allant vers son vœu le plus cher : l'intégration fédérale des pays d'Afrique''.
Héritiers dispersés
Toutefois, si son héritage scientifique a été ''bien géré'', son legs politique semble aujourd'hui être en lambeaux. Le dernier parti qu'il a créé, le Rassemblement national démocratique (RND) en l'occurrence, est aujourd'hui scindé en deux tendances : celle pilotée par le Pr Madior Diouf, et celle animée par le Dr Dialo Diop.
Entre ces deux entités, existent/ont existé d'autres organisations politiques issues de la pensée de Cheikh Anta Diop. Ce sont l'Union pour la démocratie et le fédéralisme (UDF/ Mboolo-mi) du Pr Pape Demba Sy, le Parti pour la libération du peuple (PLP) du défunt Me Babacar Niang, l'ex-Convention démocratique et sociale de Abdou Fall, ex-ministre d'Abdoulaye Wade.
Selon l'égyptologue Aboubacry Moussa Lam, cet éparpillement “reflète la mentalité du Sénégalais qui, (lorsqu'il n'est pas) chef ou n'est pas content, crée sa propre chapelle”.
Pourtant, cette formation politique qu'est le Rnd est le fruit d'âpres combats politiques que Cheikh Anta Diop a menés contre Senghor pour l'instauration du multipartisme au Sénégal. “Il s'est battu jusqu'à ce que son parti qui était dans la clandestinité soit reconnu par le tout puissant Senghor”, rappelle le scientifique.
Un frein nommé Senghor
Des misères, le premier chef d'Etat sénégalais en a beaucoup infligées à Cheikh Anta Diop, affirme le Pr Lam. “Senghor, en passant par les Français, a toujours refusé à Cheikh Anta d'enseigner à l'Université de Dakar''. C'était particulièrement vrai “quand il est revenu au Sénégal en 1960 de la France, du fait de la France mais avec la complicité de Senghor'', confie l'égyptologue.
Rebelote. “Quand Cheikh Anta, après avoir refusé d'aller enseigner les mathématiques et les sciences physiques dans le secondaire, comme le lui avait suggéré l'administration de l'époque, a préféré aller à l'Ifan grâce à l'aide du directeur d'alors, le Pr Théodore Monod (...), il était payé comme licencié ès Lettres alors qu'il avait sa thèse de doctorat d'État”, explique le Pr Lam.
Une tentative de mise au placard qui ne prendra fin que des années plus tard. “Quand l'Université de Dakar est devenue sénégalaise en 1971, Léopold Sédar Senghor, ne pouvant plus prétexter de son appartenance à la France, s'est enfin décidé à reconnaître la thèse de doctorat de Cheikh Anta et à reconstituer sa carrière.” Mais “c'était contraint et forcé” qu'il est devenu “raisonnable”, précise-t-il.
Bataille d'idées
Le bras de fer entre le grammairien et l'égyptologue s'est étendu sur d'autres terrains, intellectuels notamment. “Senghor a toujours essayé de mettre la négritude à la place de ce que Cheikh Anta faisait. Mais il a un peu échoué dans sa tentative de le brimer”, déclare le Pr Lam.
Une vie politique assez mouvementée et une vie scientifique plutôt chargé, Cheikh Anta Diop en a connu. Toute sa vie durant, outre le combat qu'il a toujours mené pour “l'émancipation de la race noire” et la “démocratisation” des pays africains dont le Sénégal dominé à l'époque par le monopartisme, il a toujours lutté pour l'intégration fédérale des pays africains.
“Il a été le premier avec les Nkrumah et autres panafricanistes à théoriser l'Union africaine et l'Etat fédéral d'Afrique noire. Il disait que si on ne le faisait pas, on en pâtirait. L'histoire lui a donné raison aujourd'hui”, croit savoir Aboubacry Lam.
Rageusement fidèle à ses idéaux, dit-il, Cheikh Anta Diop n'a jamais voulu du pouvoir pour le pouvoir. “Son seul tort, c'est de s''être réveillé le premier alors que tout le monde dormait encore.”
DIALO DIOP (SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU RND) : MALGRÉ NOS DISSENSIONS, IL N'Y A JAMAIS EU DE RUPTURE DÉFINITIVE
Les hommes passent mais les idéaux restent. En ce jour anniversaire de la disparition de Cheikh Anta Diop, ses idées panafricanistes sont plus que d’actualité dans un continent meurtri par les conflits et la pauvreté, selon le Dr Dialo Diop, l'un de ses plus fidèles disciples.
Pouvez-vous nous présenter Cheikh Anta Diop?
Il serait un peu difficile de le résumer en quelques mots. C’est un homme à multiples facettes puisque Cheikh Anta est un des derniers grands esprits encyclopédiques du 20e siècle. Il fut forgé par une solide éducation religieuse, intellectuelle et humaniste. Ce savant, chercheur non moins militant au sein de son parti, le Rassemblement national démocratique (RND) dont il était le fondateur en 1976, œuvrait pour l’intégration de l’Afrique. Comme leader politique, il a toujours refusé d’endosser une étiquette politique ou de se définir comme adhérent à tel ou tel courant idéologique importé de l’Occident qui ne corresponde pas à nos réalités socio-économiques.
Pourtant les idéaux et orientations du Rnd sont proches des mouvements de gauche. N’est-ce pas là équivoque ?
Ce n’est qu’un paradoxe de surface. Le Rnd est le concentré de trois courants de nationalistes africains panafricains, de socialistes auto-gestionnaires de Mamadou Dia et d’anciens marxistes dissidents du Pai qui se sont réunis pour réaliser la vision panafricaine du groupe de Casablanca. Il a comme vision politique d’oeuvrer à la libération du peuple de la domination impérialiste néo-coloniale, mais aussi à la reconstruction nationale au profit du peuple africain et l’unité politique du continent sous l’autorité d’un gouvernement fédéral africain.
Mais il a toujours refusé la grande pensée progressiste (communisme) et la lutte des classes, qui est l’essence même des organisations de Gauche. Il a toujours voulu l’émancipation des masses avec la promotion d’une politique de développement nationale et populaire.
28 ans après son décès, qu’est-il advenu de son héritage politique ?
Trois décennies après, nous pouvons dire qu’après des divisions, des séparations et des retrouvailles, différentes familles politiques nées des différentes scissions du Rnd dans les années 80 sont en passe de se retrouver autour des grands idéaux de Cheikh Anta Diop.
Ainsi, la grande famille “cheikhantaiste”, après plusieurs péripéties comme l’exclusion de Mbaye Niang en 1982 pour cause d’activités fractionnistes qui s’en est allé créer le Parti pour la libération du Peuple (PLP), un parti qui va réintégrer le Rnd en 1998, la scission d’UDF∕Mboolo bi de Pape Demba Sy qui a eu lieu lors de la présidence du Pr Ely Madiodio Fall au poste de secrétaire général, après la mort de Cheikh Anta Diop, a été affaiblie.
Malgré ses dissensions qui ne sont que des malentendus, il n'y a jamais eu de rupture définitive sauf pour le cas de Madior Diouf exclu du parti, lors du dernier congrès en 2008, après 16 ans à la présidence du parti...
Au vu de la situation du Rnd, n’avez-vous pas l’impression d’avoir bafoué l’héritage du maître ?
(Il coupe) C’est vrai, des personnes se demandent souvent comment des gens qui réclament l’unité africaine n’arrivent-ils pas à s’entendre. Mais nous avons la conviction que tous les “cheikhantaistes” sincères vont se retrouver dans un grand ensemble panafricain. Il n’y pas de scission par rapport à la pensée qui demeure toujours fidèle aux idéaux du maître.
L’échec des expériences économiques et politiques de Sékou Touré et Kwamé Nkrumah, deux chantres du panafricanisme, n’ont-ils pas brisé l'élan de ce mouvement ?
(Il se rassoit) il ne faut pas oublier que Sékou Touré et Nkrumah ont été combattus par des forces impérialistes qui ont saboté leurs politiques économiques. Dans le cas de la Guinée, la révolution guinéenne a dû faire face à une véritable opération de désorganisation économique avec l’introduction dans le pays de la fausse monnaie à partir des pays frontaliers.
Par ailleurs, si aujourd’hui le Ghana est salué pour son miracle économique, c’est grâce aux réformes de Nkrumah réalisées entre 1959 et 1966. Mais ces échecs sont le symbole de l’impossibilité de construire des espaces économiques viables issus des petits territoires coloniaux, d’où la nécessité d’établir les bases d’une unité sous régionale ouest africaine puis africaine. Et au vu de la situation du continent, je pense que le Panafricanisme est plus que d’actualité.
Pensez-vous que la volonté d’intégration politique et économique de l’Union africaine est une avancée dans la bonne direction ?
(Il acquiesce) Mais ce n’est pas suffisant. Elle doit aller beaucoup plus loin dans l’intégration politique et se départir de l’asservissement intellectuel et politique par rapport à l’Occident. Cette soumission a fait jusqu'ici la promotion de dirigeants peu vertueux qui ont poussé l’Afrique à sa perte. L’Union africaine doit trouver sa propre voie vers l’unité de l’Afrique tout de suite car on tergiverse depuis plus d’une soixantaine d’années.
L’HÉRITAGE EN QUESTIONS...
Sa disparition subite un certain 7 février 1986 avait plongé toute l’intelligentsia africaine dans le désarroi. Mais comme les pyramides qu’il n’a cessé d’étudier, son œuvre et sa pensée défient le temps et les âges.
Les pyramides égyptiennes avaient pour mission de conserver la sépulture des pharaons pour l’éternité! Cheikh Anta Diop, du haut de sa pyramide intellectuelle formée d’une dizaine de livres et de centaines de publications, s’était donné pour mission de combattre l’aliénation des peuples africains longtemps bafoués par la colonisation.
Si ses ‘’reliques intellectuelles’’ et ‘’scientifiques’’ défient le temps et font l’unanimité au sein de la communauté scientifique, son édifice politique s’est effrité au gré des dissensions et intérêts personnels en de nombreuses formations politiques. Toutes se réclament de la pensée panafricaine du ‘’dernier pharaon’’, déclare Dame Babou, journaliste et ancien membre du bureau politique du Plp,.
Si son héritage intellectuel, consacré par la diffusion de ses travaux sur l’Égypte nègre et l’Unité culturelle de l’Afrique comme base du Panafricanisme, lui a survécu, son parti, le Rassemblement national démocratique fondé en 1976, n’a pas résisté aux ambitions personnelles après sa mort en 1986. Et ce, même si les dissensions sont apparues bien avant sa mort avec la scission du Parti pour la libération du peuple dont la plupart sont des anciens du très historique Parti africain de l’indépendance (PAI).
“Malentendu”
''Sur cette affaire, il y a un véritable malentendu, explique Dame Babou. Mbaye Niang n’a jamais mené d’activités fractionnistes. Il s’était seulement opposé à la volonté du Rnd d’entamer la conciliation avec Abdou Diouf qui, pour nous, était la continuation du régime senghorien.'' La pyramide politique de Cheikh Anta Diop était une sorte d’enchevêtrement de groupes d’origines politiques divers qui s’étaient réunis sur une plate-forme minimale.
Cette unité organique avait pour objectif la reconquête de la souveraineté nationale aux mains des néo-colonialistes, la rupture d'avec les modèles occidentaux et le développement national démocratique et populaire, affirme Abdou Fall, aujourd'hui leader du mouvement Alternatives citoyennes, ex-membre du Rnd et de la Convention démocratique et sociale (CDS), dissidente du Plp puis dissoute dans le PDS de Me Wade.
‘’L’addition de diverses opinions et trajectoires a fait la force du Rnd qui, pendant longtemps, a symbolisé l’opposition au parti unique et qui, par ses divisions, a manqué d’être l’une des plus grandes forces politiques au Sénégal‘’, ajoute l'ex-ministre de la Santé.
Quelles sont les origines de cette implosion du Rnd en 6 partis politiques ? L’absence de débats internes propres à tous les partis sénégalais où toute contestation est assimilée à de l’opposition face à la direction du parti, renchérit Abdou Fall. Mais “en vrai visionnaire politique”, Cheikh Anta Diop est l’un des pionniers en ce qui concerne la mise en place de la première coalition de partis politiques au Sénégal, indique-t-il.
A cela, il faut ajouter “la pertinence” de son positionnement qui a toujours refusé les différentes couleurs de la réforme du multipartisme contrôlé que voulait imposer Senghor en 1974, indique Dialo Diop. “Cheikh Anta a toujours prôné une réflexion sur le développement avec des programmes adaptés à nos réalités”, ajoute-t-il.
“Une vision économique”
Sur le ‘’Nil’’ de l’intégration continentale, le bateau Rnd fera face à des avaries qui laisseront quelques débris, mais les éléments primordiaux que sont la proue et le moteur vogueront sans problème vers le destin unitaire, avait confié l'égyptologue à son cousin Moustapha Diop, consultant en Langues nationales. En véritable ‘’scribe’’ de la pensée panafricanisme, il s’était donné pour mission de promouvoir une nouvelle forme d’économie.
‘’L’exploitation capitaliste est la cause de toutes les misères qui ne peuvent cesser qu’avec la suppression totale du colonialisme et du néo-colonialisme‘’, dit-il dans “Alerte sous les tropiques”, un recueil d'articles publiés entre 1946 et 1960 et dans lequel il expose ses thèses sur l’unité économique de l'Afrique. La vision économique du savant était d’œuvrer à la coopération entre les peuples, et non la compétition, afin d’exploiter les réels potentiels de l’Afrique comme le barrage d’Inga (voir photo) pour résoudre les problèmes énergétiques du continent.
Pour Dame Babou, membre du cabinet du Premier ministre Aminata Touré, le développement de l’Afrique passe nécessairement par l’utilisation des langues nationales. ‘’Nous dépensons des milliards de francs pour l’apprentissage d’une langue étrangère alors que les études de Cheikh Anta Diop ont montré que toutes les langues africaines ont une racine commune qu’est la langue égyptienne. Ainsi des voies de convergences peuvent être facilement trouvées autour de grandes langues africaines comme le Swahili ou le Haoussa ’’, se convainc le journaliste.
81 MILLIARDS DE FCFA NECESSAIRES POUR PRODUIRE 900 000 TONNES DE RIZ
PROGRAMME DE RELANCE ET D’ACCELERATION DE LA CADENCE DE L’AGRICULTURE AU SENEGAL (PRACAS)
Si le Sénégal veut atteindre l’autosuffisance en riz, il devra nécessairement dégager 81 milliards de FCfa pour permettre au Programme de relance et d’accélération de la cadence de l’agriculture au Sénégal (Pracas) de produire 900.000 tonnes de riz.
Le Programme de relance et d’accélération de la cadence de l’agriculture au Sénégal (Pracas) a un besoin de 81 milliards de FCfa pour pouvoir assurer l’autosuffisance en riz par une production de 900.000 tonnes de paddy bord-champ pour 2014-2015. Au cours d’un atelier de validation de la stratégie de mise en œuvre de la première année du Pracas, tenu, hier, au Centre de formation aux métiers de l’agriculture (Cifa), situé à Ndiaye (37 km de Saint-Louis), les acteurs du développement rural ont planché sur les voies et moyens de booster la production agricole.
Le delta et la vallée du fleuve Sénégal auront besoin d’une enveloppe de plus de 45 milliards de FCfa pour atteindre les objectifs de production rizicole du Pracas, un nouveau programme de l’Etat qui englobe également le Programme national d’autosuffisance en riz (Pnar), a révélé Amadou Thiam de la Société d’aménagement et d’exploitation des terres du delta (Saed). En présence du représentant du ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural et du directeur général de la Saed, les experts ont passé en revue les enjeux du Pracas. Selon le document présenté par Amadou Thiam, il est prévu d’aménager 90.000 ha dans la vallée pour les besoins de la riziculture (38.000 ha pour la contre saison chaude, 50.000 ha pour l’hivernage, etc.) et dans l’Anambé 3.900 ha et 120.000 ha à la saison des pluies.
Parlant des contraintes notées dans les différentes zones rizicoles du Séné- gal, M. Thiam a cité la dégradation des aménagements et des infrastructures hydrauliques, la vétusté des équipements d’irrigation, l’insuffisance du matériel agricole, des infrastructures de stockage et de conditionnement.
Les préoccupations de la région Nord, relatives au coût exorbitant de l’électricité, à l’insuffisance des aménagements hydro-agricoles, aux difficultés récurrentes à rembourser correctement et entièrement le crédit agricole, à la forte pression aviaire qui annihile les efforts constants déployés par les cultivateurs pour améliorer la production, ont figuré en bonne place dans les doléances formulées au cours de cet atelier national sur le démarrage du Pracas.
Samba Kanté, le directeur général de la Saed, a proposé, pour l’année 2014, le démarrage sans délai, en zone irriguée et dans la vallée du fleuve Sénégal, des travaux de réfection et d’entretien des aménagements, le financement des activités des producteurs éligibles au crédit et l’application de moratoires pour les cultivateurs capables de rembourser le crédit (au cas par cas).
Il a plaidé aussi pour une gestion communautaire des semences en zone pluviale (accès facile des semences au moment opportun), un financement complémentaire des marchés en cours d’exécution, une gestion communautaire des équipements agricoles et une intervention plus marquée de la recherche agricole. M. Kanté a également insisté sur l’arrêt immédiat des importations de riz.
Pour sa part, le conseiller technique du ministre de l’Agriculture, Waly Diouf, s’est réjoui de la tenue de cet atelier national qui a permis à l’ensemble des acteurs du monde rural de faire des propositions consensuelles pour une exécution correcte du Pracas. Lesquelles seront entérinées dans les plus brefs délais par le département de l’Agriculture, a-t-il promis.
LE PEUL QUI DÉFIA SENGHOR POUR RESTER FIDÈLE À DIA
Disparu en fin de semaine dernière, Aboubacry Kane est dépeint comme appartenant à une race d'hommes politiques quasiment en voie de disparition au Sénégal.
L'histoire remonte à 1974. Libéré après 10 ans de prison suite aux événements de 1962, Aboubacry Kane est invité au Palais par le Président Léopold Sédar Senghor. Pour "récupérer le Fouta" et "mieux isoler" son adversaire politique, Mamadou Dia, le président poète, en présence de son directeur de cabinet, Moustapha Niasse, lui dit : "Vous savez, Aboubacry, si Mamadou Dia n'avait pas fait ce coup d'État, on n'en serait pas là…"
Son hôte le coupe net et réplique : "C'est inexact ! Mamadou Dia n'a jamais voulu fomenter un coup d'État. Ce n'était pas son intention. Il en avait pourtant les moyens pour le faire puisqu'il détenait le pouvoir." Piqué par une colère bleue, il se permet d'ajouter ceci : "Si je savais que vous m'avez appelé pour ça, je ne serais pas pas venu." Aboubacry Kane décide alors de quitter la salle.
Mais il est interpellé par un Niasse qui, "surpris", le ramène à de meilleurs sentiments en usant du cousinage à plaisanterie. "Yaw peul nga rek (toi Aboubacry, tu es un Peul !). Pourquoi, tu t'emportes comme ça ?" lui lance l'actuel président de l'Assemblée nationale.
"Loyal et fidèle"
Cette histoire, rapportée par un proche d'Aboubacry Kane, résume la personnalité de cet homme fraîchement disparu. "Loyal" et "fidèle", ce militant du Parti socialiste l'aura été jusqu'à son dernier souffle. Sa proximité avec l'ancien président du Conseil, Mamadou Dia, dont il fut le directeur de cabinet, lui a donc valu une décennie de bagne car il était convaincu de l'innocence de celui que son "ami" Senghor avait accusé de "tentative de coup d'État", puis fait condamner avant de le gracier. Une situation que sa famille a vécue avec stoïcisme. Ibou Kane, son fils : "C'était difficile pour nous, mais nous l'avons supporté parce qu'il a toujours préparé ses enfants à faire face à l'épreuve."
Décédé à 89 ans, Aboubacry Kane a toujours refusé toute compromission durant sa vie, rappellent ses proches. Plus qu'un slogan, l'éthique était, pour lui "une attitude", et l'idéologie "une valeur", souligne Doudou Issa Niasse, député-maire et responsable du Ps. "Il a été un fidèle de Mamadou Dia, mais lorsque ce dernier a créé son propre parti (Ndlr : MSU), il ne l'a pas suivi. Il est resté au Parti socialiste car il croyait aux valeurs du socialisme." Une fidélité qui en fera un homme influent.
Nommé en 1955 conseiller territorial, il devient député de l'Assemblée territoriale deux ans plus tard, passant de secrétaire élu à vice-président. Un poste qu'il occupe jusqu'en 1988, date à laquelle il demande au Président Abdou Diouf de le "décharger" de ses fonctions pour "convenance personnelle". Explication de son fils : "Après plusieurs années passées à l'Assemblée nationale, il s'était lassé. Il avait senti l'usure du pouvoir. Il voulait laisser la place aux plus jeunes." Diouf le nomme président du Conseil d'administration de la Banque sénégalo-tunisienne (BST). En 1999, bis repetita, Kane veut encore se décharger de ses fonctions bancaires à cause du "poids de l'âge". A-t-il alors senti pousser le vent de l'alternance de 2000 ?
En tout cas, Aboubacry Kane, retraité frais, se voit confier les reines du conseil consultatif des sages du Ps. "Quand il y a eu l'alternance, raconte Doudou Issa Niasse, il a tout fait pour relancer le parti en nous encourageant. A l'époque, ce n'était pas évident puisque beaucoup de nos responsables avaient rejoint les prairies bleues. Malgré son âge, il a investi le terrain avec Aïssata Tall Sall à Podor." Pour Aboubacry Kane, la politique, loin d'être un jeu d'intérêt, est un sacerdoce. A ce propos, le maire de la Biscuiterie retiendra de lui cette maxime : "En politique, on ne doit rien attendre de notre parti, mais ce qu'on est prêt à faire pour lui."
Un sachant partir à temps
Même au plus fort de la crise au sein du parti socialiste en 1996, le vieux Kane fait figure de sage. Une crise marquée par la dissidence de Djibo Leyti Kâ qui, en désaccord avec l'élection de Ousmane Tanor Dieng à l'issue du fameux congrès "sans débat", crée un courant de pensée dénommé "Renouveau démocratique". Un acte politique qui oblige la direction du PS, "prise de court", à trancher le débat. Trois positions se dégagent à l'époque. "Ceux qui étaient dans la ligne du parti, ceux qui étaient contre, c'est-à-dire moi et mes camarades, et Aboubacry Kane s'est singularisé en adoptant une position médiane. Alors que ce n'était pas évident de faire face au pouvoir", révèle aujourd'hui le fondateur de l'Union pour le renouveau démocratique (URD). "Malgré tout, il reste mon grand frère, mon ami. C'est un homme digne."
L'ancien chef de l'État Abdou Diouf ne dit pas autre chose. Dans un film documentaire, il estime que Aboubacry Kane a donné à sa génération "une leçon de courage, d'abnégation, de fidélité et de patriotisme". Avant d'ajouter : "Il a toujours été pour moi un aîné et un compagnon dont la fidélité à toutes épreuves fut une source d'inspiration et de motivation dans l'exercice de mes responsabilités politiques et plus particulièrement dans celui de mes charges de président de la République du Sénégal." Autant de vertus qu'il faut peut-être lier à l'enfance du disparu.
Natif de Saldé, département de Podor, Aboubacry Kane, polygame et père d'une "dizaine d'enfants", se fait remarquer en tant qu'étudiant. Très engagé politiquement, il subit alors les "brimades" du régime de Senghor en conflit ouvert avec ses opposants. Enseignant de profession à Podor, il est "affecté arbitrairement" dans plusieurs régions. Des épreuves qui ont pu façonner sa personnalité. L'anecdote qui suit en est une illustration. "Un jour, raconte Ibou Kane, un de ses adversaires résidant à Podor l'appelle et lui demande aide pour évacuer sur Dakar son épouse en grossesse à risque. Sans chercher à comprendre, il demande au Général Jean- Alfred Diallo de dépêcher un hélicoptère qui vient chercher la femme de son adversaire."
Pour la postérité, cet ancien baron socialiste a produit un livre intitulé "Aboubacry Kane, le dernier fils de la Grande royale", paru en juin dernier. Mais il n'aura pas eu le temps de procéder à la cérémonie de dédicace qui était prévue avant la fin de l'année 2013…
Dans la dernière partie de la série audio consacrée aux témoignages de Moustapha Niasse sur Léopold Senghor, l’héritage du premier président du Sénégal. Que devient-il ? Qui en sont les dépositaires légitimes ? La réponse du président de l’Assemblée nationale est un contrepied à ceux qui, nombreux, le considèrent comme le ‘’digne héritier’’ de Senghor. Nous vous laissons découvrir. Mais auparavant, Niasse conte la ‘’belle histoire’’ de la résidence des ‘’Dents de la mer’’, sur la Corniche ouest. Quand l’ancien chef de l’État l’a acquise ? Dans quelles conditions ? Pourquoi cette appellation poétique ?
Les deux hommes se sont rencontrés pour la première fois en 1957 à Saint-Louis. Les circonstances de la rencontre, les témoins, les sujets des échanges, la suite… : Moustapha Niasse raconte comment, jeune lycéen, il a connu personnellement Léopold Senghor. Il revient aussi sur la ‘’Désenghorisation’’ attribuée à l’ancien président Abdou Diouf, qui a succédé au premier président du Sénégal.
Malgré leur brouille, en 1962, Léopold Senghor et Mamadou Dia ont gardé chacun pour l’autre un respect et une affectation sincères. A la sortie de prison du second, les retrouvailles entre les deux hommes furent nimbées d’émotion. C’était au palais. Témoin de la scène, Moustapha Niasse raconte dans une des deux bandes que nous diffusons la profondeur des rapports entre Senghor et Dia. Dans l’autre bande, le président de l’Assemblée nationale rétablit la vérité sur les relations entre Senghor et Cheikh Anta Diop, que d’aucuns ont vite fait de classées ‘’conflictuelles’’.
Léopold Senghor voulait devenir pêtre. Il abandonnera cette voie, presque contraint, pour se consacrer à la culture, à l’enseignement et, plus tard, à la politique.
Devenu président de la République, il faisait venir chaque dimanche un prêtre au palais pour diriger la prière. Mais son attachement à sa religion ne l’empêchait d’entretenir les meilleurs rapports avec le clergé musulman et de promouvoir le caractère laïc de la République.
Dans la deuxième partie audio de l’entretien qu’il a accordé à SenePlus, Moustapha Niasse évoque le Senghor défenseur de la laïcité. Le président de l’Assemblée nationale raconte également, anecdotes à l’appui, le Senghor qui ‘’détestait’’ l’argent.