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2 avril 2025
LEOPOLD SENGHOR
MICHAËLLE JEAN SE SOUVIENT
À Niamey la SG de la Francophie revient aux sources institutionnelles de la Francophonie et se rappelle de Dior, Senghor et Bourguiba - L'INTÉGRALITÉ DE SON DISCOURS
SenePlus vous propose le discours complet de Michaëlle Jean à Niamey lors de l'ouverture du Forum Sahel Innov :
Excellences,
Monsieur le Président de la République du Niger,
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Madame et Messieurs les chefs d’institutions,
Monsieur le gouverneur de la Région de Niamey,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Directeur général du CIPMEN,
Mesdames, Messieurs,
Chers jeunes entrepreneurs,
Monsieur le Président de la République,
Ma visite dans votre pays touche à sa fin. Je repartirai ce soir avec le sentiment fort et poignant d’être revenue aux sources institutionnelles de la Francophonie.
Dans ce pays où a été signé, en 1970, le Traité de Niamey, fondateur de la Francophonie. C’était tout près d’ici dans l’Hémicycle de l’Assemblée nationale.
Dans ce pays qui a donné à l’Agence de coopération culturelle et technique, ancêtre de l’Organisation internationale de la Francophonie, l’un de ses éminents hauts responsables : le Professeur Dan Dicko Dan Koulodo.
Je repartirai aussi avec le sentiment d’être revenue aux sources philosophiques de la Francophonie.
Dans ce pays qui a donné à la Francophonie l’un de ses pères spirituels, Diori Hamani qui, aux côtés de Léopold Sédar Senghor et Habib Bourguiba insuffla à ce projet son humanisme intégral et toute sa modernité.
Le Niger est en train de renouer avec cet esprit avant-gardiste.
Celui du pionnier de l’énergie solaire, le Professeur Abdou Moumouni, cet homme vrai, ignorant l’égoïsme, cet homme lié, ligoté au peuple, cet intellectuel organique comme le qualifiait l’historien Ki Zerbo.
L’esprit avant-gardiste, aussi, du Sommet de Maradi, en 1984, sur la lutte contre la désertification, 8 ans avant le Sommet de la Terre de Rio.
L’esprit avant-gardiste qui a conduit le Niger à accueillir les deux premières éditions, mais pas les dernières, du Forum International Jeunes Emplois verts.
Alors je repars remplie de confiance parce que j’ai ressenti ,à chaque instant de cette visite, combien le Niger est en train de renaître au Monde, à l’Afrique, au Sahel.
Je ne pense pas seulement à cette renaissance culturelle qui vous est si chère, Monsieur le Président, mais aussi à cette renaissance économique, agricole, sociale, technologique, pour plus d’Etat de droit, plus d’infrastructures, plus d’éducation et de formation, notamment pour les filles - je sais combien vous y tenez Monsieur le Président - plus plus de santé, plus de numérique, plus de développement, plus de sécurité dans cette région de tous les dangers, menacée et convoitée par des prédateurs, des criminels sans foi ni loi, plus de jeunesse. Une jeunesse à laquelle il faut donner des raisons d’espérer et les moyens d’entreprendre et de s’épanouir.
La encore, le Niger fait figure de pionnier. Il est le seul pays que je connaisse à s’être doté , en plus d’un ministère de la Jeunesse, d’un ministère de l’entreprenariat jeunesse. Alors je souhaite que vous soyez imité dans tous les pays de la Francophonie comme dans le reste du monde car donner toutes ses chances à la jeunesse , c’est donner au monde toutes les chances d’être plus inventif, plus solidaire, plus démocratique, plus équitable et plus stable.
Cette jeunesse de moins de 25 ans qui représente 70% de la population au Niger, cette jeunesse qui perpétue l’âme et le génie du peuple nigérien, son courage et sa capacité de résistance, sa combattivité et sa créativité face à une nature qui exprime, ici, toute sa délicatesse et sa rudesse, toute sa générosité et son hostilité.
Alors je ne saurais vous dire combien je suis honorée de vivre à vos côtés ces moments formidables de partage avec cette jeunesse qui nous donne toutes les raisons de porter un regard confiant sur l’avenir du Niger, du Sahel et du continent africain tout en entier.
Monsieur le Président,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Ce que j’ai vu, ce que je j’ai entendu en échangeant dimanche avec les jeunes entrepreneurs du CIPMEN, en me rendant à Zinder pour découvrir le projet Mon champ, à Goubé pour découvrir le projet Tech-Innov, vaut mieux que tous les discours parce que j’ai vu des femmes, des hommes et des jeunes, la tête et le cœur remplis d’idées, de projets, d’initiatives ingénieuses, innovantes, audacieuses dans une grande diversité de secteurs et de filières, des projets et des initiatives qui ne demandent qu’à être révélés, valorisés, amplifiés et qui nous démontrent que la vraie richesse d’un pays se mesure aux ressources de son capital humain.
Alors je ne saurais vous dire combien je suis émue d’être la marraine de la première édition de Sahel Innov, combien aussi je me sens investie d’une responsabilité que je ferai tout pour honorer.
Croyez-moi ce ne sera pas un défi insurmontable parce que ce Forum
me donne raison, donne raison à la Francophonie de vouloir être un révélateur, un catalyseur, un facilitateur de réussites.
Ce Forum donne raison à la Francophonie de penser que la solution au défi d’un développement humain et économique responsable, d’une croissance partagée, de l’adaptation au réchauffement climatique, de la création d’emplois, au Niger, au Sahel, comme dans d’autres régions, est indissociable de la montée en puissance de l’entrepreneuriat des femmes et des jeunes, de la constitution et de la structuration d’un tissu vigoureux de très petites, petites et moyennes entreprises et industries car ce sont elles qui, partout, on le sait, tirent la croissance, créent de la richesse et de l’emploi.
La Francophonie s’est donnée les moyens de ses convictions pour que les femmes et les jeunes deviennent, pour que vous, chers jeunes entrepreneurs, deveniez, sur le terrain, ces acteurs de développement et ces vecteurs de paix, comme les chefs d’Etat et de gouvernement s’y sont engagés lors des Sommets de Dakar et de Madagascar, -vous y étiez Monsieur le Président - car ce qui est en jeu, c’est aussi la stabilité et la sécurité de l’espace francophone et du monde.
Notre objectif n’est donc pas d’agir pour les femmes et les jeunes, mais d’agir pour eux, avec eux. La nuance est essentielle.
C’est bien dans cet état d’esprit que nous déployons notre stratégie jeunesse, notre stratégie numérique, notre stratégie économique. Et dans le cadre de cette stratégie économique nous avons lancé, voilà deux ans, un programme de promotion de l’emploi par l’entrepreneuriat chez les femmes et les jeunes en créant ou en renforçant des incubateurs et des accélérateurs d’entreprises dans des filières stratégiques et innovantes comme, par exemple, l’ économie numérique, l’économie verte ou bleue, l’économie sociale et solidaire, l’économie de la culture, ou encore l’économie du savoir.
12 pays partenaires ont été identifiés : le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée, Madagascar, le Mali, le Niger, la République démocratique du Congo, le Sénégal, le Togo, et votre pays, le Niger.
Nous signerons, tout à l’heure, l’Accord-cadre qui formalisera la mise en œuvre de ce programme.
Une équipe de l’Organisation internationale de la Francophonie est d’ailleurs actuellement présente à Niamey pour préciser, avec tous les partenaires impliqués, notre stratégie d’intervention et les actions concrètes à mettre en place. Elle le fait bien sûr en étroite collaboration avec le Centre Incubateur des Petites et Moyennes Entreprises, le CIPMEN, premier incubateur d’entreprises du Niger, qui a déjà à son actif une centaine d’emplois créés et une soixantaine de porteurs de projets accompagnés, et qui, en association avec le CTIC, au Sénégal, premier incubateur lancé en Afrique de l’Ouest, exporte le modèle au Mali, en Guinée et au Burkina Faso, pays également partenaires de notre Programme de promotion de l’entrepreneuriat. Vous voyez la connection !
Certains pensent que nous pourrions aller plus vite. Nous pourrions certes aller plus vite en imposant à tous le même schéma de fonctionnement, un modèle tout fait, conçu ailleurs au mépris du contexte. Il est si facile d’imposer ! Mais ce que nous voulons, nous de la Francophonie, c’est co-construire, c’est prendre le temps de la rencontre et du dialogue, de l’analyse et de la réflexion pour répondre au plus juste, aux attentes, aux spécificités de chacun, aux ressources aussi du terrain qui ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre.
Nous voulons prendre en compte les réalités locales, à travers une approche par filières, des filières qui ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre.
Nous voulons, chers entrepreneurs, prendre en compte vos besoins, pour mieux vous aider à surmonter les difficultés auxquelles vous êtes quotidiennement confrontés.
Vous êtes les mieux placés pour savoir qu’il ne suffit d’avoir de l’énergie et de la créativité à revendre pour qu’un projet se concrétise, se pérennise et se développe.
Vous nous disiez dimanche, Cher Almoktar ALLAHOURY, que 80% des entreprises qui se créent au Niger meurent au bout de trois ans. Croyez-moi, ce n’est pas propre au Niger et c’est là que les incubateurs prennent tout leur sens. C’est là qu’intervient la Francophonie pour appuyer le renforcement de l’environnement entrepreneurial, sur le plan réglementaire, administratif, financier, normatif, stratégique.
Pour vous aider à amener vos initiatives à une autre échelle, pour les sortir de l’informel, pour déboucher de manière plus compétitive sur des marchés existants à l’échelle régionale, continentale, et intercontinentale.
Pour vous aider à renforcer vos capacités avec l’appui de son réseau d’experts, son réseau d’universités, de chercheurs, car il est important que les incubateurs, dans un partenariat public, privé, soient adossés aux universités.
La Francophonie est là aussi pour faciliter votre accès aux financements. Au Sommet des Chefs d’État et de gouvernement de la Francophonie qui s’est tenu fin novembre à Antananarivo, la capitale de Madagascar, où nous avons installé notre premier incubateur d’entreprises, nous avons lancé un Prix substantiel de l’entrepreneuriat pour la jeunesse francophone, en partenariat avec le secteur privé. Une contribution canadienne du gouvernement du Nouveau-Brunswick, l’une des provinces canadiennes dont le dynamisme et les politiques en faveur de la jeunesse sont reconnus. Le Nouveau-Brunswick s’associe d’ailleurs au Niger pour pérenniser le Forum international Jeunes et emplois verts, dont il a reçu la troisième édition.
Nous venons de lancer aussi un programme de financement participatif, toujours pour vous, jeunes entrepreneurs, intitulé « Finance ensemble » dans le cadre du mouvement « Libres ensemble ». Je vous invite vivement à fréquenter la plateforme www.libresensemble.com pour y présenter vos initiatives entrepreneuriales.
Parce qu’un autre objectif de notre programme est de développer des réseaux, des espaces et des occasions d’échange de bonnes pratiques sur l’emploi et l’entrepreneuriat.
J’aime parler de Francophonie des solutions. Il y a tant de réussites qui méritent d’être connues, partagées et croyez-moi, le succès est contagieux.
Et puis il y a chez tous les jeunes de l’espace francophone, un désir fort de rejoindre des réseaux, de bonifier, de faire connaître et de pousser plus loin les initiatives.
cette plateforme "Libres ensemble" en est une de plus pour créer du lien entre vous et vous permettre d’exposer ce que vous accomplissez.
Notre but c’est de créer un réseau dynamique des jeunes et des femmes entrepreneurs.
Car pour vous, entrepreneur(e)s, le pire, c’est l’isolement.
Et croyez-moi les possibilités sont infinies. Parce que la Francophonie, aujourd’hui, c’est officiellement 84 Etats et gouvernements répartis sur les 5 continents. Je dis « officiellement », car les frontières de la Francophonie bougent sans cesse du fait de la vitalité de la langue française. Prenez-en conscience, elle est la troisième langue des affaires avec l’Anglais et le mandarin.
La Francophonie, aujourd’hui, c’est aussi un fabuleux espace d’accomplissements, de modèles de développement, de capacités de faire, de produire, de créer, d’innover et d’inventer. Et vous en faites partie. Il faut que vous en soyez convaincus.
C’est aussi un extraordinaire arc en ciel de traits de civilisation, une mosaïque de centaines de millions de forces vives, d’hommes, de femmes, et surtout de jeunes, animés, comme vous, de ce talent, de ce courage de cette volonté de faire bouger les lignes, de s’engager solidairement .
Alors je veux remercier, pour terminer, les organisateurs de cette première édition de Sahel Innov, que nous avons soutenue financièrement, je veux féliciter aussi le CIPMEN, et dire à tous les jeunes entrepreneurs présents ici : vous pouvez et vous devez être fiers de ce que vous êtes et de ce que vous faites.
Je vous remercie.
LE "TRIOMPHE DE LA SOLUTION NON-VIOLENTE" EN GAMBIE SALUÉ
Ziguinchor, 22 jan (APS) – Des associations féminines leaders de la Gambie, du Sénégal et de la Guinée Bissau ont salué dimanche à Ziguinchor (sud), le dénouement de la crise postélectorale gambienne et le "triomphe de la solution non-violente".
"Le Forum des femmes de l’espace Sénégal-Gambie-Guinée Bissau exprime toute sa satisfaction suite au triomphe de la solution non-violente dans le dénouement de la crise politique en Gambie", indique cette structure.
Dans une déclaration transmise dimanche à l’APS, le Forum des femmes de l’espace Sénégal-Gambie-Guinée Bissau pour la paix et la sécurité salue "la fermeté, mais surtout l’ouverture au dialogue de la CEDEAO pour la restauration de la démocratie’’ en Gambie.
De même, cette fédération d’organisations féminines de la Sénégambie méridionale souhaite un "retour à la normale dans une démocratie stable et une paix durable".
Le Forum qui fédère plusieurs organisations dont la Plateforme des femmes pour la paix en Casamance (PFPC) adresse des "encouragements et félicitations à l’armée gambienne qui a su écouter son peuple, les médiateurs et toutes les personnes éprises de paix au profit d’une solution pacifique".
Les femmes de la Sénégambie méridionale disent partager le "désarroi et l’inquiétude des populations et surtout les femmes et enfants qui se sont déplacés et réfugiés massivement vers des abris plus sûrs tout en espérant que chacun pourra retourner chez soi sain et sauf".
Paris, 21 déc (APS) – Le chef de l’Etat a rendu hommage à Léopold Sédar Senghor, mercredi, lors de son admission en tant que membre associé de l’Académie des sciences d’outre-mer.
"Hier (mardi), 20 décembre 2016, il y a quinze ans, jour pour jour, nous quittait Léopold Sédar Senghor, poète et Homme d’Etat émérite, premier président de la République du Sénégal", a rappelé Macky Sall dans son discours prononcé devant Abdou Diouf et François Hollande.
"Chantre infatigable de la négritude, Senghor s’est éteint dans le Calvados, en terre normande, celle de son épouse, Colette. Né et enterré au Sénégal, Senghor, l’agrégé de grammaire, membre de l’Académie Française et de l’Académie des Sciences d’Outre-Mer, aimait profondément la France, dont il fit rayonner passionnément la langue", a-t-il souligné.
Selon lui, la figure emblématique de Senghor "est l’expression la plus achevée de ce qui nous unit et nous rassemble ici, enracinés dans nos valeurs de culture et de civilisation, et ouverts aux souffles fécondants de l’extérieur".
"C’est ce que Senghor l’humaniste appelait le +rendez-vous du donner et du recevoir+ qui préfigure la +Civilisation de l’Universel+, dont il était un ardent défenseur", a dit Macky Sall qui a invité l’assistance à observer une minute de silence à la mémoire de Senghor.
Il a rappelé que le président Abdou Diouf, lui aussi membre de l’Académie, est "un des plus fidèles disciples" du premier président de la République du Sénégal.
L'émouvant témoignage de Tanor sur Senghor : "Il n'est ni du passé, ni un homme dépassé…"
PAR NOS REPORTERS FRÉDÉRIC ATAYODI, FODÉ MANGA ET BOUBACAR BADJI
VIDEO
SENGHOR, NIASSE, MAKHTAR MBOW ET MOI
EXCLUSIF SENEPLUS : Comment Senghor m'a dégoté dans mon lycée à Banjul ? - Pourquoi Amadou Makhtar Mbow m'a choisi pour diriger les oeuvres représentatives mondiales à l'Unesco - Sedat Jobe parle de ses connexions au Sénégal
Frederic Atayodi, Fodé Manga et Boubacar Badji de SenePlus |
Publication 12/12/2016
Jeune lycéen à Banjul, c’est un jour des années 1960 que le président Senghor, au détour d’un voyage dans un lycée gambien, identifia le jeune Momodou Lamin Sedat Jobe. C’est lors de l’échange de quelques civilités exprimées à la classe que, la réponse du jeune Sedat avait vraisemblablement marqué feu le président Senghor.
C’est ainsi qu’il instruit son chef de protocole de prendre contact avec le jeune Sedat qui, plus tard rejoindra Dakar sur la demande de Senghor.
Par l’entremise donc du président Senghor, le futur cadre francophile Sedat , se lira d’amitié avec les proches de Senghor tel Moustapha Niasse, Djibo Kâ, Amadou Makhtar Mbow, etc.
La suite de l’histoire dans la vidéo. Regarder.
PAR FRÉDÉRIC ATAYODI ET BOUBACAR BADJI DE SENEPLUS
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SÉDAR SENGHOR VS. CHEIKH ANTA
Les péchés mignons du poète et les paradigmes éternels du scientifique : intellectuels de haut niveau, le 1er président du Sénégal et le fondateur de la 1ère école africaine d'égyptologie ne boxaient pas dans la même catégorie, selon Dialo Diop du RND
FRÉDÉRIC ATAYODI ET BOUBACAR BADJI DE SENEPLUS |
Publication 31/10/2016
Feu Léopold Sédar Senghor et Cheikh Anta Diop, deux fils d'Afrique et du Sénégal, comptent parmi les plus grands ambassadeurs du continent à travers le monde, à des niveaux différents, assurément. Leur rayonnement intellectuel faisant, leur carrure et leur personnalité aidant, les noms de ces deux intellectuels restent à jamais gravés dans les annales de l'histoire.
Seulement, un disciple de Cheikh Anta Diop, le Dr. Dialo Diop, secrétaire général du Rassemblement nationale démocratique (RND) fondé par le parrain de l'université de Dakar, tient à préciser que les deux personnalités ne boxaient pas dans la même catégorie. Étant entendu que leurs héritages respectifs ne s'équivalent pas. Le legs du poète président, c'est de la poésie tandis que le scientifique et égyptologue lui, laisse pour la postérité des paradigmes dont la mise en oeuvre devrait permettre le décollage effectif de l'Afrique. C'est la position exprimée par le chef de file du RND.
FRÉDÉRIC ATAYODI, FODÉ MANGA ET BOUBACAR BADJI DE SENEPLUS
VIDEO
MULTIPLE PHOTOS
NIASSE, TANOR, DJIBO KÂ ET SENGHOR
Qui porte le mieux l'héritage de Léopold ? Comment Tanor a résisté à la phagocytose de Wade ? Pourquoi tant de suspicion sur la transparence des élections en Afrique ? Pourquoi la politique occupe tant nos médias ? Réponse du Pr. Ousmane Sène
FRÉDÉRIC ATAYODI ET FODÉ MANGA |
Publication 25/10/2016
Le Pr. Ousmane Sène, directeur du Centre ouest-africaine de recherche (CROA), communément appelé WARC, -West African Research Center- , est l'invité de SenePlus.
Dans cet entretien, le chercheur nous dévoile la face cachée de Senghor. Face la moins connue et laquelle traduit, pourtant, le niveau d'encrage du poète président dans sa culture Sérère et africaine et qui mériterait d'être connue par tous.
Par ailleurs, le chercheur analyse le jeu politique dans les pays africains, au Sénégal en particulier. Un jeu politique que les acteurs ont manifestement transformé en "Je" politique, selon que les situations les arrangent ou non.
Jetant une pierre dans le jardin des médias, les chaines de TV, en l'occurrence. l'universitaire critique les acteurs de saturer les téléspectateurs de débats politiques au détriment d'autres sujets plus intéressants et de surtout tout centrer sur Dakar.
Où est l'autre Sénégal dans nos médias ? - Celui de la campagne agricole - celui des pêcheurs de Saint-Louis - celui de la Casamance naturelle - celui des activités touristiques…
Dakar, 22 sept (APS) - Le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, le professeur Mary Teuw Niane a estimé, jeudi à Dakar, que le Sénégal n'a pas assez de bacheliers et d'étudiants, contrairement à une opinion couramment répandue.
"J'entends dire qu'il y a trop de bacheliers. Ce n'est pas vrai. Nous n'avons pas assez de bacheliers. Nous n'avons pas assez d'étudiants", a-t-il dit.
Invité de la rédaction de l'APS, Mary Teuw Niane a indiqué qu'en en 2015, le Sénégal avait 45.000 bacheliers et 54.700 bacheliers cette année compte non tenu des admis attendus en octobre.
"Si nous voulons être émergent, nous sommes sur la voie, il nous faut entre 2022-2025 doubler voire tripler le nombre d'étudiants particulièrement le nombre d'étudiants dans les filières scientifiques, techniques et de métiers", a-t-il fait savoir.
Selon lui, "c'est un défi pour le système d'enseignement supérieur et le système éducatif en général".
PAR IBRAHIMA FALL DE SENEPLUS
CHRISTIAN VALANTIN
PORTRAIT SENEPLUS – Ancien responsable du Parti socialiste, chef puis directeur de cabinet de Senghor, député pendant 32 ans… Et il parle de Macky
IBRAHIMA FALL DE SENEPLUS |
Publication 01/05/2016
Christian Valantin avait disparu de la scène publique sénégalaise en 2001, un an après l’Alternance. Et au bout de 32 ans à l’Assemblée nationale. SenePlus l’a retrouvé en pleine promotion de son livreTrente ans de vie politique avec Léopold Sédar Senghor. La verve intacte.
Retrouvailles
L'histoire commence par une erreur d'aiguillage. Une matinée ensoleillée, mais frisquette. Au cœur de rues animées, mais muettes. L'homme voûté que l'on aperçoit au loin en train de scruter la vitrine d'une boutique d'œuvres d'art, a l'air d'un senior qui ploie sous l'âge. Mais observé de plus près, il semble trop jeune pour être celui avec qui nous avons rendez-vous ce jour du mois de février dernier, sur l'Île de Saint-Louis. Il fait à peine 60 ans. Christian Valantin, lui, en a 87.
Malgré tout, le doute subsiste. L'on s'avance vers l'inconnu. Le dévisage secrètement et, afin d'être définitivement fixé, compose le numéro de notre hôte. Une voix raillée répond, demande notre position et indique la sienne. Au même moment, l'inconnu discute à l'intérieur du magasin. On rebrousse chemin. Slalome entre deux-trois rues et tombe sur la silhouette familière d'un monsieur longeant le trottoir d'un pas lent. Échine droite, visage paré de lunettes à montures fines, sourcils fournis, Christian Valantin se dresse devant nous. Élégant sous son costume marron foncé, ses mocassins assortis, et sa chemise ciel à "col Mao".
Il avait disparu de la scène publique sénégalaise en 2001. À la suite des législatives qui parachevèrent l'Alternance survenue un an plus tôt, point final de 40 ans de règne PS. On le retrouve en pleine promotion de son livre Trente ans de vie politique avec Léopold Sédar Senghor. "Un texte unique sur Senghor, l'homme politique", avertit sa maison d'édition, Belin. En dehors des mèches blanches qui recouvrent complètement sa tête, sa démarche hésitante et son visage couturé de rides, il n'a pas vraiment changé.
Avec agilité, il s'installe à l'avant de la voiture. Et, après les salutations, indique au collègue au volant la destination : hôtel "Résidence". "Je voulais vous recevoir chez moi, mais il y a des travaux, se désole-t-il. On sera plus tranquilles là où on va." Lorsque l'on emprunte un sens interdit, il s'empresse de relever la contravention. Mais au lieu de pester contre le conducteur indélicat, il lui accorde des circonstances atténuantes en s'en prenant aux autorités municipales locales : "Il n'y a aucun panneau de signalisation. Je ne sais pas ce que font les maires ici."
De Barthélémy à Christian
Ce genre de coup de gueule est souvent le propre des "anciens combattants" pour qui tout était mieux avant. Mais chez Valantin il traduit un attachement viscéral à l'ordre et à la discipline. Le professeur Abdoulaye Élimane Kane, ancien ministre et membre du bureau politique du PS, témoigne : "Christian avait une bonne connaissance des textes du parti et bien que très conciliant sur beaucoup de questions il ne manquait jamais, de rappeler l'orthodoxie et les dispositions pertinentes lorsque, cela s'imposait." Dans son livre sur Senghor, le concerné rappelle que ses "arrière-grands-parents et grands-parents faisaient partie de cette société politique qui exposait ses idées avec clarté, franchise et courtoisie. Parvenus à de hautes fonctions politiques, ils n'hésitaient pas à dénoncer les injustices du système colonial". Une affaire de famille, donc.
Christian Valantin est né le 13 avril 1929 à Saint-Louis. Deux siècles auparavant, son arrière-grand-père, Barthélémy Valantin, ouvrait la voie à la fratrie en arrivant le premier dans l'ancienne capitale de l'ex-AOF. Son grand-père, Barthélémy-Durand était député du Sénégal en 1948 et en même temps "faisait office, à l'époque, de maire de Saint-Louis", sa ville natale. Celui qui se définit comme un "métis culturel", "sénégalais en même temps que français", a longtemps essayé de retracer ses origines du côté de son père, Marc-Édouard, également né à Saint-Louis, en remontant le chemin de son bisaïeul. Mais ses recherches dans le Sud-Ouest de la France n'ont rien donné. Ni à La Rochelle, où "des contacts" l'avaient orienté, ni à Rochefort où il a certes retrouvé un Valentin, "mais avec un 'e'". "Je n'en sais pas plus, abdique-t-il. Par contre, j'en sais davantage du côté de ma mère."
Et pour cause. Suite au décès en 1940 de leur maman, Madeleine Valantin née Guillabert (à Saint-Louis également), quatre ans après celui de leur père, lui (11 ans) et son frère cadet, Henri-Louis (8 ans), seront élevés par leur grand-mère maternelle, Suzanne Guillabert. Un nom très réputé à Saint-Louis. Qu'il n'est plus besoin de présenter. Les frères Valantin ont donc passé leur enfance au 10 de la rue Blanchot. Là où, bien plus tard, l'ainé fera une rencontre décisive, qui allait bouleverser sa vie.
Déjeuner décisif
1955. Ministre du gouvernement français, Senghor déjeune chez les Guillabert. À l'étudiant en droit qui rêve de devenir avocat (il le deviendra plus tard), il propose de faire "Colo". Plus qu'un conseil, c'était une prescription. Senghor : "Nous aurons besoin des cadres qui sont actuellement en fin d'études ; deviens administrateur et dans dix ans tu seras gouverneur du Sénégal." Objection de Valantin : "Avant dix ans, le Sénégal sera indépendant." Réplique du poète-président : "Avant d'être indépendant, il nous faudra quelques années d'apprentissage par l'autonomie interne."
La prédiction du jeune homme de 26 ans se réalise, le Sénégal devient indépendant en 1960. Mais en fin de compte, les craintes de l'ancien ministre français s'avéreront fondées. Christian Valantin l'admet en arborant un sourire malicieux : "L'histoire lui a donné raison. La situation actuelle des pays africains montre que nous n'étions pas prêts pour l'indépendance." Il suivit quand même la direction indiquée par le premier Président du Sénégal. Reçu au concours d'entrée à l'ENFOM (École nationale de la France d'outre-Mer), ses camarades de promo avaient pour noms Babacar Bâ, Cheikh Hamidou Kane, Amady Aly Dieng, Kane Diallo Modibo, Henri Senghor… et des ressortissants d'autres colonies, bref ces cadres dont parlait Senghor. Lesquels devaient permettre aux jeunes États africains d'assumer pleinement leur accession à la souveraineté internationale.
Comme pour le récompenser de l'avoir écouté, Senghor fit de lui son chef de cabinet après son élection à la présidence de la Fédération du Mali, le 4 avril 1959. Le nouveau breveté de l'ENFOM avait juste 30 ans. C'était son premier poste administratif. Le point de départ d'une riche carrière au cœur de l'État : il devient, à l'éclatement du Mali, directeur de cabinet du ministre du Plan et du Développement, Karim Gaye (septembre 1960), puis gouverneur de la région de Thiès (1961), directeur général de l'OCA (Office de commercialisation agricole, 1963) et directeur de cabinet de Senghor (1965), en remplacement d'Abdou Diouf, qui cumulait cette fonction avec celle de secrétaire général de la présidence.
Virage politique
Avril 1967. Senghor, qui le jugeait "particulièrement préparé à faire de la politique", lui propose d'être candidat aux législatives du 25 février 1968. Il accepte le challenge en se présentant à Thiénaba, dans le département de Thiès. Un choix loin d'être fortuit. Il confesse : "Mes fonctions de gouverneur (de Thiès) m'avaient permis de nouer des relations d'amitié avec nombre de personnes qui pouvaient m'aider à m'implanter politiquement, notamment Serigne Ibrahima Seck dit Serigne Thiénaba, qui m'apporta un soutien indéfectible. Il en fut de même avec Serigne Cheikh Tidiane Sy, aujourd'hui khalife général des Tidianes, qui ne manquait jamais de parler à des auditoires importants du cousin que j'étais pour lui." Il sera élu en 1968 et régulièrement réélu jusqu'en 2000. Trente-deux ans à l'Assemblée nationale où il a régulièrement siégé aux commissions des Finances et des Lois.
Cette longévité, Christian Valantin la doit certes à ses qualités intellectuelles, mais aussi à ses qualités humaines, son attachement à sa base politique. Un jour, raconte un ancien responsable socialiste, pour faire revenir à de meilleurs sentiments un vieux militant socialiste de Ngoundiane (un village de la région de Thiès) fâché contre lui, Valantin n'hésita pas à bouder pendant plusieurs heures une plénière à l'Assemblée nationale. C'était en 1997. Le téléphone du député socialiste sonne, on lui apprend qu'un de ses électeurs lui a tourné le dos. Il quitte ses collègues illico pour aller éteindre l'incendie. Arrivé à Ngoundiane vers midi, il pique directement aux champs où le militant en colère vaquait à ses occupations. Il passe la journée avec lui, le raccompagne à la fin de la journée installé avec lui sur sa charrette tirée par un âne, déjeune avec lui dans sa concession autour d'un bol de lakh avant de prendre congé peu après 18 heures, certain que le rabibochage est réussi. Rentré à Dakar dans la soirée, il retrouve ses collègues à l'Assemblée nationale et la plénière qui tirait en longueur.
"Désenghorisation" ?
Malgré ce riche pedigree l'ancien directeur de cabinet de Senghor n'a jamais occupé de fonction ministérielle sous Abdou Diouf. Dommage collatéral de la "désenghorisation" dont on accusait, à tort ou à raison, l'ancien chef de l'État de se livrer après son accession au pouvoir en 1981 ? L'air fort irrité par cette question, Valantin proteste. "Ce n'est pas cela. J'ai toujours préféré être parlementaire. Abdou Diouf, on entretient les meilleurs rapports." Il est l'auteur de nombre de ses discours. L'avait alerté, en 1999, sur une possible défaite à la présidentielle de 2000. L'avait applaudi lorsqu'il coupait l'herbe sous les pieds à ses proches qui, sentant souffler le vent de l'Alternance, envisageaient de "voler la victoire d'Abdoulaye Wade". Et, à son élection à la tête de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), en 2003, il travaillera à ses côtés jusqu'à sa retraite en 2008.
Depuis, Christian Valantin partage sa vie entre la France et le Sénégal. Passant quatre mois ici et huit mois là. L'hôtel "Résidence" est pour lui un passage obligé lorsqu'il séjourne à Saint-Louis. L'endroit est posé à l'angle de la rue Blaise Diagne au quartier Nord. Il est propre, sobrement décoré avec goût et généreusement offert à la lumière du jour. Le calme qui y règne n'est troublé que par des notes de musique en sourdine venant du bar et par un monsieur posté au premier étage du bâtiment qui, à deux reprises, fait des grands signes d'impatience à notre interlocuteur. Nous discutons depuis plus d'une heure. Finalement, Christian Valantin s'excuse : "Pourrait-on se revoir à Dakar ? J'y serai à partir de lundi. Je devais rencontrer ce monsieur depuis 11 heures et là, il fait presque midi."
Rendez-vous est alors pris le vendredi suivant à l'hôtel Farid de la rue Vincens. On le redécouvre plus détendu. Normal, pourrait-on dire. Son "livre se comporte très bien en librairie". "Nous avons écoulé plus de 200 exemplaires en quelques jours", jubile-t-il en commandant à boire et en me proposant "quelque chose". Un café pour moi et un jus d'orange pour lui. "J'ai soif", se plaint-il en s'emparant de son verre qu'il vide au tiers d'une traite avant de replonger dans les souvenirs compilés dans son livre : comment et pourquoi Senghor est entré en politique. L'impact de sa pensée philosophique sur sa pratique politique. Comment, malgré l'humiliation ayant précipité sa démission de la SFIO, il a réussi à manœuvrer pour remporter les législatives de 1951, sous la bannière de son propre parti, le BDS, et au nez et à la barbe de Lamine Guèye. La marche vers l'indépendance. L'éclatement de la Fédération du Mali. Les prémices de la crise de 1962. Sa gestion et son dénouement. L'ascension d'Abdou Diouf. Le départ de Senghor du pouvoir…
"Qui suis-je pour oser ?"
Ces pans importants de l'histoire du Sénégal sont étalés sur près de 200 pages pour rafraîchir les mémoires de ceux qui auraient "tendance ces temps-ci à oublier un peu Senghor". "Il était nécessaire de le rappeler à l'attention de ses concitoyens et du monde entier", insiste l'auteur. Mais Trente ans de vie politique avec Léopold Sédar Senghor a failli ne jamais voir jour. Valantin a beaucoup hésité avant de décider de le mettre au monde. "Qui suis-je pour oser ?" s'est-il longtemps interrogé avant de se lancer.
Auteur de la préface du livre, le philosophe Souleymane Bachir Diagne réussit à chasser ses doutes. Avec un argument-massue : "Ceux qui, comme moi, ont le bonheur d'avoir souvent entendu Christian Valantin parler de celui qui fut son mentor pendant des décennies, lui répondront simplement que la sienne, parmi toutes ces voix de biographes, est celle de quelqu'un qui fut de l'équipe Senghor, qui le connut au point où, ainsi qu'il le rapporte, il pouvait 'lire sa pensée' dans les situations qu'ils vivaient ensemble, déchiffrer sur le visage de son 'patron' quels sentiments l'habitaient. Je fais partie des amis de Christian Valantin qui ont souvent fait valoir devant son hésitation qu'il avait, en vérité, le devoir d'ajouter à ce qui s'est écrit sur Senghor, ce qu'il pouvait en dire depuis sa position unique de témoin privilégié." Imparable !
D'autant que l'ouvrage se veut un viatique pour la jeunesse : "J'ai écrit ce livre pour les jeunes. Parce que j'ai constaté, je constate- et je ne suis pas le seul d'ailleurs- que les jeunes Sénégalais ne connaissent pas leur histoire."
"Belle plume"
Le livre sur Senghor est un document d'histoire et en même temps un récit autobiographique. L'auteur "témoigne non seulement des événements qui ont secoué la jeune République mais aussi, et peut-être surtout, du poids des engagements philosophiques de Senghor dans sa pratique politique". Et par intermittence, sans jamais s'écarter de son sujet principal, Senghor, il dévoile des séquences entières de sa propre vie et de son parcours de haut fonctionnaire de l'administration sénégalaise. Au plan de la forme, il allie rigueur factuelle, profondeur d'analyse et style dépouillé, preuve qu'il n'a pas contribué pour rien à l'élaboration de certains discours de l'un des théoriciens de la Négritude et été par hasard l'un des "nègres" du Président Abdou Diouf.
En effet, Christian Valantin est un esthète de la langue. Ndioro Ndiaye, ancienne ministre socialiste, rapporte que le discours d'Abdou Diouf lors de la venue du pape Jean-Paul 2 à Dakar, en 1992, une visite qui avait suscité beaucoup de réticences de la part de certains chefs religieux musulmans, fait partie de ses chefs d'œuvres. Abdoulaye Élimane Kane ajoute : "Belle plume et maitrise parfaite du Français, il est souvent volontaire pour présenter un texte, ou bien lorsqu'on le sollicite, s'en acquitte à la satisfaction générale. Très sollicité, il arrive souvent à nos rencontres hebdomadaires épuisé mais souriant. Je l'ai vu, à plusieurs reprises, vaincu par la fatigue, tomber dans les bras de Morphée, en réunion de Bureau politique. Mais personne ne lui en tient rigueur, personne ne lui dit rien : ça dure quelques minutes et il se réveille tout seul. Et parfois il recommence. Mais une fois remis d'aplomb il nous gratifie souvent de l'une de ses belles interventions toujours respectueuses des bonnes liaisons entre la consonne terminale d'un mot et la voyelle initiale du mot suivant. Un régal !"
"Une seule fois", concède le professeur Kane, sa plume a été publiquement contestée : "Chargés tous les deux de faire un projet de communiqué lors de la campagne présidentielle de 2000, nous y avons travaillé ensemble avec conscience et dévouement. À notre grande surprise dès la fin de la lecture du texte quelqu'un s'est écrié : 'ça manque de souffle'. Bien que peu convaincu de la pertinence de cette remarque j'ai aussitôt rétorqué : 'Dans ce cas ça ne peut être imputé qu'à moi car étant sujet à des crises d'asthme, j'ai le souffle court'. Les protestations de mon camarade d'infortune bien que très audibles furent noyées dans un gigantesque éclat de rire auquel il prit une part conséquente."
Cette aisance avec la langue, il le doit à sa grand-mère maternelle, Suzanne Guillabert. "Elle nous disait : 'Lorsque vous parlez le Français, parlez-le bien ; lorsque vous parlez le Wolof, parlez-le bien'", rapporte Christian Valantin qui, s'extasie un de ses parents saint-louisiens, "s'exprime parfaitement aussi dans la langue dite de Kocc Barma". "Il parle le Wolof mieux que la plupart des Sénégalais que je connais, renchérit un de ses anciens collègues à l'Assemblée nationale. Ce qui était un atout pour le responsable politique en zone rurale qu'il était."
"Discret", "secret"
Mais si ses qualités intellectuelles, sa loyauté envers ses supérieurs hiérarchiques, son engagement politique, son attachement à Saint-Louis et son humanisme sont connus, loués, Christian Valantin reste un personnage énigmatique. "Discret" pour les uns ; "secret" pour les autres. "Cette figure quasi historique du régime socialiste m'a toujours semblé fuyante, évanescente mais toujours là, confie un ancien directeur général du journal Le Soleil. Sans doute, sa trajectoire dans l'appareil d'État s'explique, au moins en partie, par le paradoxe d'une telle permanence politique."
Divorcé de la mère de son unique enfant, Marc-Antoine, un médecin, il ne s'est pas remarié. Il n'a pas souhaité s'épancher sur le sujet. Sur beaucoup d'autres questions ayant rythmé la marche du Sénégal, non plus. "Je ne souhaite pas réveiller de vieux démons", botte-t-il en touche à propos, notamment, de l'identité des responsables socialistes qui tentaient de "voler la victoire d'Abdoulaye Wade" en 2000, des commanditaires de l'assassinat de Me Babacar Sèye ("je ne sais pas grand-chose de cette affaire"), des chefs religieux qui étaient opposés à la venue du pape Jean-Paul 2 en 1992…
"Macky doit faire attention"
La rencontre avec Christian Valantin s'est déroulée moins de deux semaines après l'annonce par Macky Sall de sa décision de renoncer à réduire son mandat de 7 ans à 5 ans et de la tenue du référendum le 20 mars. Lorsque nous l'interpellons sur le rétropédalage du chef de l'État, il marque une pause. Nous fixe du regard et, comme pour éviter les oreilles indiscrètes, murmure qu'"il (Macky) n'était pas tenu de suivre l'avis du Conseil constitutionnel". Va-t-il pour autant, à l'instar de beaucoup de Sénégalais déçus de ce dénouement, rejeter le projet de réformes de la Constitution qui incluait la réduction du mandat présidentiel, sans effet rétroactif ? "Je vais voter, c'est sûr. Mais je suis pour le moment indécis", lance-t-il.
Toutefois il salue les initiatives du président de la République en matière de lutte contre la corruption. Il dit : "Il doit poursuivre dans ce registre et faire beaucoup attention à son entourage." Invité à être plus précis, il esquive avec un rire amusé et en croisant les jambes et les bras dans un mouvement coordonné de repli. Et pour annihiler toute velléité de relance, il change de sujet. Nous questionne sur SenePlus et nous souhaite "bon courage" en espérant nous revoir "bientôt, dans huit mois". Un laps de temps si court qu'on ne devrait pas le confondre à ce moment-là. Même de très loin.
(SenePlus.Com, Dakar) – Guide du mouridisme, l’une des plus grandes confréries musulmanes du Sénégal, Serigne Fallou Mbacké a toujours été un grand supporter de Léopold Senghor, premier président de la République du Sénégal, un chrétien.
Dans un pays composé à majorité de musulmans, cette alliance était "étrange" aux yeux d’un journaliste français qui voulait en savoir plus. Dans un entretien accordé à ce dernier, le Khalife de Touba (1945-1963), considérant que "la politique ne se mêle pas à la relighion", indique que Senghor lui semblait le plus à même de mener le Sénégal vers un futur radieux.
Venu inaugurer la grande mosquée de Touba, le 7 juin 1963, édifice à la réalisation de laquelle il avait grandement contribué, Senghor tint un discours dont le thème principal était la laïcité. Mais à Serigne Fallou, "il s’adressa d’abord en ami, ‘vous m’avez adopté comme votre fils’, et rendit ‘un hommage public à cette vieille amitié’. Senghor rappelait au Khalife que ‘voilà dix-huit ans, un jour de novembre’, il était venu lui dire ses intentions politiques et qu’il avait reçu son soutien. ‘Depuis, vous ne m’avez jamais abandonné.’ Ce soutien ajoutera à la légitimité électorale de Senghor".
Surtout, ce soutien pèsera d’un poids considérable dans la nette victoire (67,8%) de Senghor devant Lamine Guèye, un musulman, aux législatives de juin 1951. Les deux hommes ne seront séparés que par la mort. Serigne Fallou s’étant éteint le 6 août 1968.
Voir la vidéo de l'entretien avec le deuxième Khalife de Touba.