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23 novembre 2024
Opinions
par Thierno Alassane Sall
TRANSHUMANCE ET REDDITION DES COMPTES
Le stratagème de Sonko pour récupérer les chefs de famille APR est à présent clair. D'abord, annoncer une grande battue des pilleurs de la République. Ensuite, interdire de sortie du territoire tous ceux qui parmi le gotha BBY se présentent aux frontières
Le stratagème mis en place par Ousmane Sonko pour récupérer les chefs de famille APR est à présent très clair.
D'abord, annoncer une grande battue des pilleurs de la République. Ensuite, interdire de sortie du territoire presque tous ceux qui parmi le gotha Bennoo se présentent aux frontières. Puis, faire savoir qu'il y a une liste rouge, en laissant le doute ronger les plus frileux (trois ou quatre ont pu passer avant que la nasse ne se referme avait dit Sonko). Enfin, attendre.
Et voici que se déclenche soudain une massive transhumance de politiciens pressés par la peur de la prison. Les moins courageux prennent la carte du Pastef sans condition. Les revirements les plus improbables se produisent aux grands jours. Les « démons » deviennent des « anges » dès qu'ils passent des herbes mortes marron-beige aux prairies vertes du Pastef
Pastef nous avait promis de restaurer l'éthique en politique et de ne jamais accepter la transhumance. Au grand jour, il l'a hissée à une échelle qui pourrait tuer pour longtemps la morale en politique.
PAR EL AMATH THIAM
LES LOIS D’AMNISTIE ENTRE FLEURS ET PLEURS
La révision de la loi d’amnistie pourrait être un tournant pour la justice transitionnelle au Sénégal, mais elle impose de prendre en compte des obstacles juridiques et pratiques majeurs
Une loi d'amnistie, par nature, est une mesure législative qui efface les infractions et leurs conséquences pénales pour les personnes visées, sans passer par un jugement ou une reconnaissance de non-culpabilité. Elle est juridiquement possible de modifier ou d’abroger une loi d’amnistie, car comme toute loi, elle peut être révoquée par un nouvel acte législatif. Elle diffère d’une décision de justice, car elle ne repose pas sur l’examen d’une affaire par un tribunal, mais plutôt sur une décision politique qui absout certains actes dans un but de réconciliation ou de pacification sociale.
La volonté exprimée par le candidat du parti Pastef, également Premier ministre, de réexaminer la loi d’amnistie controversée, afin de rouvrir les dossiers des faits délictuels et criminels liés à des événements politiques tragiques, traduit une démarche audacieuse en faveur de la vérité et de la justice. Cette initiative suscite une vague d’adhésion dans l’opinion publique, en particulier auprès des familles des victimes, qui nourrissent l’espoir d’une reconnaissance et d’un apaisement moral après de longues années de souffrance. Elle envoie également un message fort : la justice ne saurait être sacrifiée sur l’autel des impératifs politiques. Pourtant, ce projet divise : certains y voient une opportunité de construire un avenir apaisé, tandis que d’autres le perçoivent comme une menace pour les droits des bénéficiaires de l’amnistie.
La rétroactivité "in mitius" : principe humaniste et garantie des libertés :
Le principe de la rétroactivité "in mitius" – qui consiste à appliquer immédiatement une loi pénale plus douce – incarne une garantie fondamentale des libertés individuelles. Il repose sur l’idée qu’une disposition moins sévère, lorsqu’elle est édictée, doit bénéficier aux personnes concernées. Mais que signifie exactement "loi pénale plus douce" ? C’est, par exemple, une loi qui supprime purement et simplement une infraction, effaçant ainsi la responsabilité pénale attachée aux actes antérieurement qualifiés d’illégaux.
Cependant, l’abrogation d’une loi d’amnistie soulève des défis juridiques redoutables. Par leur essence, les lois d’amnistie effacent les infractions et exonèrent les individus concernés de toute poursuite pénale, hormis les réparations civiles. Leur remise en cause heurte les principes cardinaux de la non-rétroactivité des lois et de la sécurité juridique. Ces principes, enracinés dans les systèmes juridiques modernes, protègent les droits acquis et offrent aux citoyens une prévisibilité indispensable dans l’application de la loi.
1. Obstacles juridiques : la non-rétroactivité et la sécurité juridique :
Le principe de non-rétroactivité, inscrit dans le droit sénégalais comme dans le droit français, implique que nul ne peut être puni en vertu d’une loi postérieure plus sévère. Ainsi, une loi d’amnistie crée des droits acquis pour les bénéficiaires. Abroger cette loi pour rétablir des poursuites reviendrait à violer ce principe, et ce serait également contraire à la sécurité juridique. Ce principe garantit que les citoyens ne subissent pas des changements imprévisibles dans leur situation juridique en raison d'une modification rétroactive de la loi.
En France, l’abrogation d’une loi d’amnistie ne peut pas être appliquée rétroactivement aux infractions déjà couvertes. La Cour de Cassation, dans l’arrêt "Boudarel", a souligné que les effets d’une loi d’amnistie sont définitifs, empêchant ainsi toute reprise des poursuites pour des faits amnistiés.
Au Sénégal, bien que la jurisprudence ne se soit pas prononcée directement sur ce point, l’application de la "loi Ezzan" de 2005 a montré la difficulté de remettre en question des amnisties antérieures sans remettre en cause la stabilité juridique acquise.
2. Les précédents internationaux et leur impact sur le Sénégal :
Divers contextes internationaux offrent des perspectives intéressantes sur l’annulation des lois d’amnistie.
En Argentine, les lois d’amnistie de la "guerre sale" avaient d'abord protégé les responsables des crimes de la dictature militaire, avant d'être annulées dans les années 2000 sous la pression des familles des victimes. Ce retour en arrière a été possible grâce à un contexte juridique et politique unique, accompagné d'un large consensus national.
En Afrique du Sud, la Commission Vérité et Réconciliation a accordé des amnisties pour les crimes de l’apartheid sans qu’elles ne soient par la suite remises en cause. Ce modèle de justice transitionnelle repose sur une balance entre justice et réconciliation, soulignant la complexité de revenir sur une loi d’amnistie une fois ses effets produits.
Ces exemples montrent que si certaines lois d’amnistie ont pu être révoquées, cela dépendait largement du contexte et du consensus national. Le Sénégal pourrait s’inspirer de ces modèles, mais rouvrir des dossiers nécessiterait un consensus sociopolitique fort, voire des adaptations constitutionnelles.
3. Obstacles factuels et institutionnels :
Le temps et la preuve Rouvrir des enquêtes sur des faits anciens pose également des défis probants. Avec le temps, les preuves s’effacent, les témoins disparaissent ou voient leur mémoire altérée, compromettant ainsi l’efficacité des investigations et la solidité des poursuites. En l’absence de preuves nouvelles, les enquêtes pourraient apparaître comme des actions politiquement motivées, minant la confiance publique dans la justice.
4. Vers une réconciliation entre justice et pardon :
La révision de la loi d’amnistie pourrait être un tournant pour la justice transitionnelle au Sénégal, mais elle impose de prendre en compte des obstacles juridiques et pratiques majeurs. Les principes de non-rétroactivité et de sécurité juridique, ainsi que les défis liés à la preuve, ne sauraient être ignorés. La solution pourrait passer par des mécanismes comme des commissions Vérité et Réconciliation, qui associent justice restaurative et transparence, permettant aux "fleurs" de la réconciliation de s’épanouir sans faire taire les "pleurs" des victimes.
KHADY GADIAGA
POUR UNE CAMPAGNE DES IDEES
La campagne des élections législatives du 17 novembre 2024 bat son plein depuis une semaine. Quarante et une listes concurrentes dont quatre à cinq attelages de bêtes politiques qui recueillent l'attention de l'électorat.
La campagne des élections législatives du 17 novembre 2024 bat son plein depuis une semaine. Quarante et une listes concurrentes dont quatre à cinq attelages de bêtes politiques qui recueillent l'attention de l'électorat.
Le reste du lot est composé de candidats presque inconnus au bataillon, et qui semble t-il ont adopté la politique de leurs modestes moyens loin de l'armada logistique des caravanes et meetings budgétivores et de leur tintamarre en privilégiant l'approche de proximité ou le porte à porte.
Le numérique fait son effet dans la sphère libérale avec des têtes de liste battant campagne via WhatsApp pendant que le PROS, héros des temps modernes, ennemi juré de la nouvelle opposition et objet de ses rengaines mutualisées déroule son rouleau compresseur sans merci.
Les états-majors se sont mis en branle, la substance et le chiffrage des programmes sont à peine évoqués, les polémiques et les invectives font florès. C’est le jeu normal de la démocratie, nous dirait-on. Ce qui n’a pas encore commencé, en revanche, c’est la campagne des idées. Les candidats peinent à présenter leurs projets à terme pour le pays qui a soif de renouveau...
De nombreuses questions restent en suspens, des débats cruciaux sont tus ou oubliés.
Pour nourrir le débat, le seul sujet de la jeunesse et par-delà, la capture de la dividende démographique aurait largement suffit à abonder dans les sens des aspirations des 3/4 de la population.
Une jeunesse malade de sa relégation
Qui peut oublier qu'on est face à une jeunesse désenchantée mais riche de son pouvoir instituant? On déchante, comme on dit, et on ne peut déchanter qu’après avoir chanté. Paradoxalement notre jeune relève est revenue de tout sans avoir été nulle part...
Des décennies qu'on s’interrogeait sur les modalités d’insertion professionnelle d’une jeunesse qui grinçait fortement des dents sur sa non reconnaissance dans l’espace public, dans le champ politique et économique, et qui dénonçait déjà les réalités et la violence de sa relégation.
Déshéritée par des gouvernants cupides, dépourvus de vision et par excellence briseurs de rêves et d'espoir juvéniles.
Éliminons l’hypothèse naïve que seuls les bancs de l’école construisent une jeunesse.
Il y a, pour le meilleur et pour le pire, d’autres canaux et lieux qui participent à cette construction ou castration d’un désir d'accomplissement.
Il y a la rue qui constitue l’étape temporaire à l’issue incertaine d’un processus social d’apprentissage qui déconstruit les rapports entre espace privé et espace public.
Il y a les médias : aux mains tantôt des garants de la démocratisation de bêtises sur fond de «temps de cerveau disponible », tantôt à celles de la fabrique d’une politique-spectacle, pâle mise en scène d’égos aussi boursouflés qu’impuissants à proposer le réenchantement d’un avenir pour les plus jeunes, enkysté dans le calendrier électoral.
Il y a la magie des réseaux sociaux qui entretiennent la douce illusion d’une communauté de connivences générationnelles malheureusement pénétrées par les vautours conspirationnistes fournissant gracieusement la juste dose de paranoïa.
Et il y a désormais la peur, le carburant le plus néfaste de l’inscription au monde.
Le pire, c'est qu'il n’y a pas de révolte dans cette désillusion, même s'indigner est au-dessus des forces de cette jeunesse oubliée. Quand on ne trouve plus un sens à sa vie, chez soi, l'ailleurs quoi qu'incertain devient un horizon de survie. Il résulte de cette tragédie une tristesse infinie, et bien souvent une amertume. On est morose dans la façon dont on accepte une situation qu’on sent sans issue.
Si on devait évaluer l'indice du bonheur national sous nos cieux, il friserait le ras de pâquerettes... La faute à qui?
Pour un référentiel de compétences et d'idées neuves...
Un référentiel de transformation structurelle vient de voir le jour, sous la houlette du nouveau régime souverainiste dirigé par le tandem Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye et qui espérons le, guidant l’élaboration de l’action envers la jeunesse, est lisible, vulgarisable et appropriable par tous. Autrement dit, qui nous indiquera clairement ce qu’affiche une ville, une région où une collectivité locale, comme ambitions et moyens chiffrés et planifiés pour sa jeunesse en général, et pour celle de ses quartiers populaires en particulier...
Comment s’organise l’offre en direction des jeunes et comment est-elle perçue par les professionnels d’une part et les jeunes, d’autre part ? Quels peuvent être les freins à une politique de jeunesse et comment les juguler ?
Ce qui pose la question du pilotage et de la coordination, de même que de la construction et de la mise en débat de cette politique avec ses différents enjeux.
D'autres sujets ne sont pas moins brûlants, toujours est-il que la démocratie vit de débats, d’idées, de confrontations intellectuelles, de propositions concurrentes. Il serait regrettable que ces joutes délibératives se réduisent à des querelles de personnes et des jeux d’appareils.
Les sciences sociales, qui contribuent à produire des idées neuves, doivent nécessairement entrer en campagne !
Par Hamidou ANNE
MON GENERAL, JE VOUS SALUE
Gouverner, c’est tâcher d’être en toutes circonstances à la hauteur des responsabilités qui s’imposent à nous. C’est se méfier du reflet de sa propre image pour ne sacraliser que l’intérêt général et le culte de l’Etat.
Gouverner, c’est tâcher d’être en toutes circonstances à la hauteur des responsabilités qui s’imposent à nous. C’est se méfier du reflet de sa propre image pour ne sacraliser que l’intérêt général et le culte de l’Etat. La menace, l’outrance et l’intimidation constituent non seulement une perte de temps dans une société ouverte comme le Sénégal, mais elles révèlent surtout une absence de tenue pour ceux-là que le destin a conduits aux responsabilités. Le miracle de notre démocratie, c’est qu’elle peut élever n’importe qui aux stations les plus élevées de l’Etat. C’est charmant, car ainsi s’exprime ce principe sacré de l’égalité devant les opportunités de la République. Mais ce charme, quand les incompétents, en plus d’être incapables, exercent le pouvoir, peut vite devenir une tache, voire une gangrène sur le corps d’un pays. La percée populiste constitue une tache hideuse sur un grand pays comme le nôtre.
Nous sommes en temps de campagne électorale en vue des Législatives anticipées du 17 novembre, les états-majors politiques rivalisent d’ardeur pour convaincre les citoyens. Les candidats investis des 41 listes en compétition sont invités à s’armer non pas de couteaux ou de machettes, mais de programmes et de propositions concrètes pour s’attirer les votes des électeurs. L’animation politique et les propos dits de campagne conduisent à certains excès pardonnables. Ce qui, en revanche, relève d’une pure mesquinerie, et donc est impardonnable, est l’acharnement à salir ses honorables concitoyens devant les foules. Surtout quand on n’a pas le millième de ces personnalités en termes d’éthique, de talent, de tenue, de parcours et de respectabilité. En plus de la lâcheté qui pousse un homme à formuler des propos graveleux vis-à-vis d’un officier militaire, donc astreint au devoir de réserve. Aucune personne sensée ne croira aux allusions répugnantes à l’encontre du Général Souleymane Kandé, car les citoyens, par leur sagacité et par habitude, ont certifié l’autre comme un diseur de contrevérités.
J’ai lu récemment une phrase de Kamala Harris, rappelant qu’elle venait en campagne avec une liste de choses à faire une fois élue, pendant que son adversaire populiste arrivait avec sa liste d’ennemis à abattre. Cette phrase m’a fait automatiquement penser au contexte sénégalais : aucune proposition sérieuse de la tête de liste de Pastef autre que les habituels excès dont nos oreilles sont rebattues. Sur les 41 têtes de liste, il s’agit du seul qui s’acharne à salir les gens, à s’inventer des ennemis et à sortir des énormités quotidiennes comme le compte bancaire à 1000 milliards. «Donnez-nous la majorité pour mettre des citoyens en prison.» «Donnez-nous la majorité pour qu’on aille récupérer les milliards pillés.» Ces gens dirigent le pays depuis sept mois et n’ont formulé aucune proposition sérieuse, ne faisant que persister dans les anathèmes, les vanités et la pollution sonore permanente. Ils agissent comme des enfants, mais s’amusent avec, non pas un ballon de baudruche, mais avec les instruments d’un Etat que des générations de Sénégalais ont bâti, des décennies durant. Pour illustrer mon propos ainsi que le personnage burlesque auquel nous avons à faire, je renvoie au délicieux texte du brillant Serigne Saliou Diagne intitulé «L’enfant gâté de la République et son univers dystopique», publié il y a un an dans ces colonnes.
Je ne développerai pas outre mesure sur la chose militaire, car il faut que nous, citoyens, soyons plus responsables que le Premier ministre. L’Armée doit être enlevée du débat politicien, il s’agit d’un pan essentiel de l’Etat et d’un symbole du prestige de l’Etat. Ce n’est guère un hasard si la tradition de la pratique parlementaire consiste à voter le budget des Armées sans débat. La responsabilité et la précaution obligent à rester muet sur les choses relevant de la Grande Muette. Pour rappel, le Président Sall a remercié dare-dare le directeur de l’Administration générale et de l’équipement de la présidence de la République quand ce dernier avait émis publiquement un curieux avis sur le devoir de réserve des soldats en matière politique. Un homme d’Etat était à l’époque chef de l’Etat et avait ainsi agi en responsabilité et conformément à l’exigence de rester fidèle à nos usages républicains.
Souleymane Kandé, en bon soldat, est réservé et discret. Avant de porter ses étoiles de Général acquises sur les théâtres d’opération, au milieu des coups de feu, il a risqué sa vie en Centrafrique, au Congo, en Côte d’Ivoire, comme il a risqué sa vie au nom de l’intégrité territoriale du Sénégal, à Bamoune-Bilass, à Boussoloum, à Badiong ou à Sikoune. Ce sont ses états de service qui ont fait sa notoriété. Les allusions nauséabondes de certaines personnes ne sont qu’une nouvelle médaille sur une poitrine déjà garnie de distinctions. Souleymane Kandé est un officier digne, un homme d’honneur, un patriote et un républicain. Ceux qui s’en prennent au Général Kandé, avec la lâcheté qui les caractérise et le dégoût qu’ils inspirent, ne renvoient aux Sénégalais que l’expression de leur propre vulgarité. Mais le penseur chrétien Georges Bernanos avait averti : «Les ratés ne vous rateront pas.»
par Thierno Alassane Sall
SOMMES-NOUS ENCORE LE SÉNÉGAL ?
Un discours anti-étrangers prend racine de façon inquiétante au pays, il est attisé par des marchands de la haine. Ce discours est dangereux, et notre devoir est de le stopper avant qu’il ne s’ancre davantage
Un discours anti-étrangers prend racine de façon inquiétante au Sénégal, il est attisé par des marchands de la haine. Ce discours est dangereux, et notre devoir est de le stopper avant qu’il ne s’ancre davantage.
Mieux encore, il nous faut légiférer pour bannir la xénophobie ainsi que toutes les formes de racisme de notre société. La singularité du Sénégal, c’est la Teraanga, cet esprit d’accueil chaleureux et unique qui fait de notre pays une terre chère aux « hôtes et étrangers » qui vivent parmi nous et bien au-delà de nos frontières.
C'est le serment de notre hymne national qui veut rassembler l'Afrique. Le Sénégal a aussi une diaspora dispersée aux quatre coins du monde, qui a tissé des liens forts entre les continents.
Nos « frères et sœurs africains » sont chez eux au Sénégal, tout comme nous le sommes à Treichville, Kinshasa, Labé ou Maputo.
PAR SEYDINA OUMAR SEYE
ALTERNATIVES FACE À DES MESURES D'AUSTÉRITÉ
Les inquiétudes concernant la gestion budgétaire influencent directement les décisions d'investissement (OCDE, 2023). Les bailleurs tels que la Banque africaine de développement (BAD) ont déjà exprimé des préoccupations sur la durabilité de la dette du Sé
Le Sénégal, pays de l'Afrique de l'Ouest, se trouve à un carrefour critique de son développement économique. Récemment, des allégations de manipulation des chiffres concernant le déficit public et la dette ont ébranlé momentanément ( incertitute du moment: internaliser l'information) la confiance dans les institutions économiques du pays. Ce contexte soulève des questions cruciales sur la manière de rassurer les marchés, maintenir un climat d'affaires favorable et renforcer les liens avec les bailleurs de fonds, tout en évaluant le potentiel du pays sous le nouveau régime en place.
Contexte Économique et Manipulation des Chiffres
Situation Actuelle
Selon la BCEAO (Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest), le déficit budgétaire du Sénégal s'élevait à 4,9% du PIB en 2022, alors que les estimations révisées de certains analystes indiquent un taux effectif pouvant atteindre 6,5%. De plus, la dette publique aurait été sous-estimée, atteignant environ 70% du PIB, alors que les données officielles suggèrent un taux de 60%. Ces manipulations soulèvent des préoccupations majeures pour les investisseurs et les partenaires techniques et financiers. Par ailleurs, une situation similaire a été soulignée par les services du nouveau ministre de l'économie.
Exemples Empiriques
La situation s'inspire de cas similaires dans d'autres pays africains ayant subi des ajustements structurels, comme le Ghana, dont la manipulation des chiffres a conduit à des doutes sur la capacité du gouvernement à rembourser sa dette, entraînant une crise de la confiance sur le marché obligataire, in fine, la dégradation de leurs signatures-pays par certaines agences de notations.
Rassurer le Marché et Maintenir le Climat d'Affaires
Pour restaurer la confiance des investisseurs et maintenir un climat d'affaires positif, plusieurs mesures peuvent être envisagées :
1. Transparence et Communication : Il est crucial d'améliorer la transparence des données économiques ( harmonisation entre DPEE et ANSD). Le gouvernement devrait établir un cadre pour la publication régulière de rapports financiers, en collaboration avec des organismes externes comme le FMI ou la Banque mondiale.
2. Engagement avec les Bailleurs de Fonds : Renforcer les dialogues avec les partenaires techniques et financiers, en s'engageant à respecter les recommandations sociales et économiques en phase avec l'approche économie endogène du PROJET. Cela pourrait inclure des réformes structurelles dans la gestion de la dette et des finances publiques.
3. Instauration d’un Cadre Légal : Adopter des lois pour renforcer l'indépendance des institutions financières, garantissant que les chiffres économiques ne peuvent pas être manipulés.
Impact des Inquiétudes sur les Investissements
Les inquiétudes concernant la gestion budgétaire influencent directement les décisions d'investissement (OCDE, 2023). Les bailleurs tels que la Banque africaine de développement (BAD) ont déjà exprimé des préoccupations sur la durabilité de la dette du Sénégal. Une perte de confiance peut conduire à des taux d'intérêt plus élevés, rendant l'emprunt coûteux pour le gouvernement.
Alternatives aux Mesures d'Austérité
Face à la nécessité de stabiliser l'économie, le gouvernement pourrait explorer des alternatives aux mesures d'austérité, qui peuvent souvent plonger l'économie davantage dans une récession :
1. Investissement dans les Secteurs Stratégiques : Le Sénégal dispose d'importantes ressources naturelles, notamment dans les secteurs minier, gazier et pétrolier. Sous le nouveau régime et la direction du Président Diomaye et de son Premier ministre Sonko, un accent pourrait être mis sur l'attraction d'investissements étrangers directs dans ces secteurs.
2. Partenariats Public-Privé (PPP) et la mise en place d'un consortium économique sur secteur privénational : Encourager les PPP pourrait apporter des financements nécessaires pour construire des infrastructures tout en évitant une charge supplémentaire sur le budget public. Au demeurant, inciter à la naissance d'un consortium.
3. Diversification de l'Économie : Augmenter les investissements dans des secteurs comme l'agriculture, le tourisme et la technologie pourrait réduire la dépendance aux ressources naturelles et accroître la résilience de l'économie.
Le PROJET et le Potentiel Économique
Le nouveau référentiel de politique économique appelé *PROJET* vise à moderniser l'économie sénégalaise, en capitalisant sur ses ressources naturelles. Le gouvernement devrait envisager :
- Mise en place de Régulations Adequates : Créer un cadre réglementaire qui encourage la transparence et réduit les risques liés à l'exploitation des ressources.
- Développement Durable : Assurer que les projets dans les domaines minier, gazier et pétrolier répondent à des normes durables pour protéger l'environnement et les communautés locales.
Le Sénégal, bien que confronté à des défis de transparence et de confiance, possède des opportunités considérables à travers son programme PROJET et ses ressources naturelles. En adoptant des pratiques transparentes et en engageant un dialogue ouvert avec les bailleurs de fonds, le pays peut renforcer la confiance des investisseurs et assurer un avenir économique durable. L'enjeu pour le nouveau régime sera de naviguer ces défis tout en maintenant une stabilité politique et économique, créant un environnement propice à la croissance et à l'investissement: la croissance pro pauvre est atteignable.
PAR MOUSTAPHA DIAKHATÉ
LES MARCHÉS FINANCIERS ‘DOUCHENT’ MOODY’S
« Les marchés financiers semblent faire fi des notes, analyses et notations de Moody’s, tout laisse croire que les institutionnels ont été plutôt séduits par le nouveau discours du nouveau pouvoir sur l’état réel des finances publiques. »
Moins d’un mois après que l’agence de notation Moody’s abaisse la note du Sénégal de « Ba3 », la catégorie spéculative, à B1, très spéculative, le trésor public a réussi hier un emprunt obligataire de 300 millions de dollars sur le marché financier international, avec JP Morgan comme chef de fil. De la trésorerie immédiatement disponible pour couvrir les besoins de financement dans le cadre de l'exécution budgétaire de l'année 2024 selon le communiqué de PEYTAVIN.
Toute chose étant égale par ailleurs, c’est exactement au taux nominal de 6,33% que cette nouvelle obligation libellée en Euro avec couverture risque de change a été négociée alors qu’il y’a moins de 5 mois le trésor public sénégalais levait 750 millions de dollars en euro-obligations aux taux d’intérêt de 7,75 % sur sept ans.
Les marchés financiers semblent faire fi des notes, analyses et notations de Moody’s, tout laisse croire que les institutionnels – avec JP Morgan Chase – ont été plutôt séduits par le nouveau discours du nouveau pouvoir sur l’état réel des finances publiques. Et bien sûr les perspectives intéressantes du pays au regard des 100 000 barils – jour atteints par Sangomar et l’imminence du premier gaz de Grand Tortue. Dakar semble avoir misé sur la franchise dans ses relations avec les bailleurs et c’est le marché financier qui émet le premier signe d’approbation sur le nouvel état d’esprit des nouvelles autorités sur les grandes orientations économiques et financières du Sénégal.
En pondérant les maturités, l’abaissement de la notation du Sénégal auprès de Moody’s n’as eu aucun effet déconsolidant sur la qualité de signature du Sénégal au contraire l’image du pays semble même se raffermir avec le choc de vérité émis par l’actuel Premier Ministre dans son diagnostic sur l’état réel des finances publiques.
Le trésor public sénégalais engrange déjà 100 points de base en différentiel de taux nominal entre Juin et Octobre 2024, après les FMI c’est le marché’ financier international qui s’aligne sur les nouvelles autorités et cela se reflète sur le coût des emprunts, alors que les analystes financiers prévoyaient 8% voire même 10% de taux nominal en moyenne - catégorie spéculative - sur toutes maturités d’obligation souveraine comme c’est le cas du Ghana et du Kenya.
C’est un signe très encourageant pour les besoins de financement de 18 000 milliards pour la mise en œuvre du plan quinquennal du référentiel 2050 et JP Morgan nous fait déjà un clin d’œil.
Par Bachir FOFANA
MILLE MILLIARDS DE BOBARDS DE LA BANQUE DU MENSONGE
Au Sénégal, un homme politique s’est permis de regarder ses concitoyens droit dans les yeux pour leur annoncer que «sur un des comptes d’un ex-dignitaire du régime sortant, (on y a) trouvé 1000 milliards de francs Cfa».
Le capitaine Haddock, le fidèle compagnon de Tintin, jurait souvent par «mille milliards de mille sabords». Cette expression provient du domaine maritime. En effet, entre les XVIIe et XIXe siècles, les navires de guerre étaient pourvus de sabords, c’est-à-dire d’ouvertures carrées ou rectangulaires situées sur les flancs, fermées par des volets et par lesquelles passent les tubes des canons. Les navires de guerre pouvaient alors aligner plusieurs rangées de canons. Lors des combats en mer, des dizaines de vaisseaux s’affrontaient en ligne de bataille, présentant à l’ennemi leurs flancs. Ouvrant leurs sabords, un déluge de feu s’abattait alors sur les vaisseaux adverses.
Bien des siècles plus tard, au Sénégal, un homme politique s’est permis de regarder ses concitoyens droit dans les yeux pour leur annoncer que «sur un des comptes d’un ex-dignitaire du régime sortant, (on y a) trouvé 1000 milliards de francs Cfa». Face à la stupéfaction généralisée, El Malick Ndiaye et Aminata Touré montent au créneau pour assurer le service après-vente. Quand les spécialistes (Abdoul Mbaye y compris qui a quand même travaillé pour la Bceao et a dirigé une bonne demi-douzaine de banques dans ce pays) ont démontré l’absurdité d’une telle déclaration, le ministre des Transports fait le charretier qui discute aéronautique avec l’ingénieur. Et c’est pour faire ce que savent faire les populistes et démagos, utiliser des raccourcis faciles : «Les 1000 milliards existent. Si vous votez pour nous, nous irons les chercher.»
Chez Sonko, un carré est un cercle
Si El Malick est habitué à faire l’essuie-glace après son leader, Aminata Touré par contre, en se voulant plus royaliste que le roi, s’est enfoncée toute seule. «A ceux qui demandent si 1000 milliards peuvent être dans un compte bancaire dans les paradis fiscaux, bien sûr il suffit d’y mettre 83 milliards par an pendant les 12 ans de Macky Sall. Si on prend 3 milliards par an sur les 35 ministres et plus du régime, ce sont 105 milliards par an dans chaque ministère. Et les 12 ans, ce sont plus de 1200 milliards. 1000 milliards dans un compte pour ces paradis fiscaux, ça n’a rien d’extraordinaire.» Pour un pilier du régime sortant jusqu’à sa disgrâce née de sa non-désignation comme présidente de l’Assemblée nationale en 2022, Mimi Touré avoue avoir participé à la spoliation des ressources publiques. En tant qu’actrice principale ou en tant que complice ou spectatrice consentante. N’oublions pas qu’elle a été ministre de la Justice pendant 16 mois, Première ministre pendant 10 mois, présidente du Conseil économique pendant 17 mois, Envoyée spéciale du président de la République entre 2015 et 2019. Mais comme Ousmane Sonko raconte des bobards…
En effet, Ousmane Sonko a un sérieux problème avec la vérité. Un de mes amis dit souvent que «ay wakham diaroul door sa doom», pendant qu’un autre aime dire que «ay wakham dou noor bay nawett». C’est le parfait disciple de Goebbels qui nous disait : «Plus le mensonge est gros, mieux il passe.» L’idéologue nazi nous a en effet dit qu’«à force de répétitions, et à l’aide d’une bonne connaissance du psychisme des personnes concernées, il devrait être tout à fait possible de prouver qu’un carré est en fait un cercle. Car après tout, que sont «cercle» et «carré» ? De simples mots. Et les mots peuvent êtres façonnés jusqu’à rendre méconnaissables les idées qu’ils véhiculent». Oui, chez Sonko effectivement, un carré est un cercle.
Durant des années en effet, le leader de Pastef s’est construit une réputation basée sur la stratégie du mensonge et de la manipulation au moyen de discours populistes, d’accusations infondées, de déclarations grotesques et non factuelles, et de promesses souvent déconnectées des réalités du pouvoir. Désormais aux affaires, ses déclarations d’hier, qui ont parsemé sa carrière d’opposant, le rattrapent maintenant. Des perles, il nous en a beaucoup servi. N’avait-il pas dit en 2016 que des «pipelines ont (déjà) été installés» pour pomper notre pétrole et notre gaz qui étaient en phase d’exploration, à l’insu des Sénégalais ? C’est seulement en 2024 que le Sénégal verra le premier baril de pétrole sortir de ses eaux profondes. Sur l’affaire des 94 milliards, le 19 janvier 2019 à la Place de l’Obélisque, le même Sonko affirmera que «Mamour Diallo et ses complices se sont partagé 46 milliards», qu’il connaît la banque qui a réceptionné les fonds, ainsi que le numéro du compte. «Si le procureur ne veut pas instruire ce dossier, nous allons, avec la Société civile, mettre en place un jury populaire», avait-il ajouté. Nous sommes en 2024, pas de traces de cette somme, pas de jury populaire. Ne nous avait-il pas dit ici qu’en cas d’attaques d’une maison des gens au pouvoir (il était bien sûr dans l’opposition), on trouverait chez eux «des milliards dans leurs coffres».
Chaque jour, il faut s’attendre à un nouveau canular
Et que dire du détournement des 29 milliards du Prodac, pour lesquels il a été condamné à payer 200 millions de dommages et intérêts pour diffamation ? Il nous a dit que ce rapport est sur sa table, mais jusqu’à présent aucune poursuite. Mame Mbaye Niang est, en effet, l’une des nombreuses figures du pouvoir sortant que Sonko, durant ses monologues, n’a jamais cessé de pointer du doigt, les accusant de toutes sortes de malversations, jurant de les traduire en Justice une fois au pouvoir. Pourtant, depuis mars 2024, aucune enquête sérieuse, ni poursuite judiciaire, n’a été engagée sur la base de ses accusations tapageuses et manifestement fausses. Les grandes promesses de traquer les supposés détournements restent donc lettre morte, laissant planer le doute sur la véracité des accusations passées et sur la probité morale de celui qui les profère. Il a la primeur sans doute d’avoir les dossiers en main, mais il est préférable de les publier puis de les commenter, et tout le monde pourra prendre au préalable information dans lesdits rapports. Mais venir faire de la délation à longueur de journée sur des rapports non publics, c’est bien pire que faire du populisme.
D’ici à la fin de la campagne électorale, chaque jour, il faut s’attendre à un nouveau canular, au moment où les citoyens espèrent qu’on leur présente des projets et programmes à même d’améliorer leurs conditions de vie. Même si beaucoup sont dans le déni, aujourd’hui, les Sénégalais savent que ce pouvoir est incapable et ne saurait assurer 5 années de gouvernance basées sur la ruse, la fourberie, la manipulation. Ils n’ont ni projet ni programme.
Ousmane Sonko est d’une constance déconcertante dans la contrevérité. Ne pas le critiquer est un droit, l’aimer aussi. Mais en vouloir à ceux qui le critiquent malgré tout ce qu’il a fait et dit, malgré les grosses contrevérités qu’il dit, c’est fermer les yeux sur l’évidence et être inapte à la délibération qui fait l’essence de la société ouverte. On n’a pas besoin de rappeler qu’il ne doit son salut politique qu’à la délation, à la diffamation, à la manipulation et à la violence que cela a suscitée. S’étonner de voir des gens libres de naissance et de citoyenneté le critiquer, c’est avouer soimême qu’on ne mérite aucune considération. Il a critiqué tout le monde, y compris ses alliés actuels, qu’il débauche à tour de bras, après avoir vomi la transhumance. Il en a même beaucoup insulté. Les gens qui hier critiquaient les autorités et qui continuent à le faire ne sont pas des rapaces, des charognards de l’histoire, ils disent ce qu’ils pensent des hommes qui les gouvernent. Et ça, ce n’est pas seulement un droit, c’est un devoir.
Mais au fond, le problème est-ce Pastef et Sonko ? Ou est-ce l’électeur sénégalais ? Si ce dernier choisit encore de supporter Pastef malgré leurs mensonges flagrants, reniements sur toute la ligne, alors on pourrait s’interroger : sommes-nous un pays de vicieux ? La banque du mensonge de Pastef n’a jamais cessé de fonctionner car son objectif final est la «banalisation du mal» dont nous prévenait Hannah Arendt. «Ce mensonge constant n’a pas pour but de faire croire au peuple un mensonge, mais de s’assurer que plus personne ne croit en rien. Un peuple qui ne peut plus distinguer la vérité du mensonge ne peut pas distinguer le bien du mal. Et un tel peuple, privé de pouvoir de penser et de juger, est, sans le savoir, et sans le vouloir, complètement soumis à la règle de mensonge. Avec un tel peuple, tu peux faire ce que tu veux.»
Ps : Cette semaine de campagne s’est ouverte par une déclaration du président de la République qui sonne comme la fin de la récréation dans son parti. Cette sortie de Bassirou Diomaye Faye, notamment sur la nomination de Samba Ndiaye comme Pca, a eu le mérite de nous démontrer que chez Pastef, nous sommes passés du «don de soi pour la Patrie» à «le parti est au-dessus de la Patrie» et d’un président de la République à l’autorité très contestée. En effet, comment comprendre la discourtoisie avec laquelle ce pouvoir discrétionnaire du chef de l’Etat a été violemment attaqué par des personnes qui ont elles-mêmes bénéficié de la même mansuétude. Et la réponse du Président n’est pas emprunte de fermeté.
DES MILLIARDS POURRAIENT ETRE MIS A DISPOSITION PAR LE BIAIS DES DROITS DE TIRAGE SPECIAUX
Lors du sommet des Nations unies sur le climat en 2021, le Premier ministre de la Barbade, Mia Mottley, avait appelé à une utilisation plus importante et plus efficace des droits de tirage spéciaux (DTS), l'avoir de réserve du Fonds monétaire international (FMI).
L e droit de tirage spécial est un actif de réserve international créé par le FMI. Il ne s'agit pas d'une monnaie : sa valeur est basée sur un panier de cinq monnaies, dont la plus importante est le dollar américain, suivi de l'euro. Il s'agit d'une créance potentielle sur les monnaies librement utilisables des membres du FMI. Les droits de tirage spéciaux peuvent fournir des liquidités à un pays.
Les pays peuvent utiliser leurs droits de tirage spéciaux pour rembourser les prêts du FMI ou les échanger contre des devises étrangères.
L'appel de Mme Mottley serait directement bénéfique pour les pays africains. Elle est en effet la toute nouvelle présidente de Climate Vulnerable Forum et du Groupe des 20 ministres des Finances vulnérables (V20). Ce forum qui représente 68 pays vulnérables au climat parmi ceux qui ont le plus grand besoin de liquidités, dont 32 pays africains.
En août 2021, alors que le choc de la pandémie COVID19 frappait leurs économies, les pays africains ont reçu une bouée de sauvetage de 33 milliards de dollars de droits de tirage spéciaux. Cette somme représente plus que la totalité du financement climatique que l'Afrique reçoit chaque année et plus de la moitié de l'ensemble de l'aide publique au développement annuelle accordée à l'Afrique. Ces 33 milliards de dollars n'ont pas alourdi le fardeau de la dette des pays africains, n'ont pas été assortis de conditions et n'ont pas coûté un centime aux donateurs.
Les membres du FMI peuvent voter pour créer de nouvelles émissions de droits de tirage spéciaux. Ces droits sont ensuite distribués aux pays au prorata de leurs quotes-parts, au FMI. Les quote-parts sont libellées en droits de tirage spéciaux, l'unité de compte du FMI.
Les quotes-parts sont les éléments constitutifs de la structure financière et de gouvernance du FMI. La quote-part d'un pays membre individuel reflète largement sa position relative dans l'économie mondiale. Par conséquent, les pays les plus pauvres et les plus vulnérables sont ceux qui reçoivent le moins de quotes-parts et de droits de vote.
Les droits de tirage spéciaux ne peuvent pas résoudre tous les problèmes économiques de l'Afrique. De plus, leur nature très technique fait qu'ils ne sont pas toujours bien compris. Mais à un moment où les pays africains sont confrontés à des problèmes chroniques de liquidités - la plupart des pays de la région dépensent plus pour le service de la dette que pour la santé, l'éducation ou le changement climatique - notre nouvelle recherche montre que les droits de tirage spéciaux peuvent jouer un rôle important dans l'établissement de la stabilité financière et dans la réalisation d'investissements pour le développement.
La stabilité financière comprend la stabilité macroéconomique (faible inflation, balance des paiements saine, réserves de change suffisantes), un système financier solide et la résistance aux chocs.
Les dirigeants africains s'apprêtent à entrer dans une année cruciale : en novembre, le premier sommet du Groupe des 20 (G20) se réunira (l'Union africaine y participera pour la première fois en tant que membre). Puis, en décembre, l'Afrique du Sud assumera la présidence du G20. Alors que les dirigeants africains plaident pour des réformes de l'architecture financière internationale, l'optimisation du potentiel des droits de tirage spéciaux devrait être un élément central de leur programme.
LE PROBLEME
Les finances des pays africains traversent une période difficile. La dette extérieure de l'Afrique subsaharienne a triplé depuis 2008. L'État moyen consacre désormais 12 % de ses recettes au service de la dette extérieure. La pandémie de COVID-19, la guerre de la Russie en Ukraine, la hausse des taux d'intérêt et des prix des produits de base, comme les denrées alimentaires et les engrais, ont contribué à cette tendance.
Les mécanismes de restructuration de la dette se sont également révélés inadéquats. Des pays comme la Zambie et le Ghana ont été pris dans des processus de restructurations interminables. La faiblesse des capacités institutionnelles et la mauvaise gouvernance empêchent également une utilisation efficace des ressources publiques.
Dans le même temps, les économies africaines doivent accroître les investissements pour faire favoriser le développement, soutenir une population jeune et croissante, développer la résilience climatique et saisir l'opportunité offerte par la transition énergétique.
Pour mobiliser les ressources nécessaires à une transition énergétique juste et à la réalisation des Objectifs de développement durable de l'ONU à l'horizon 2030, les investissements dans le climat et le développement devront augmenter d'environ 24 % du PIB (la moyenne pour l'Afrique en 2022) à 37 %.
Les droits de tirage spéciaux se sont avérés un outil important pour relever ces défis. Des recherches menées par le FMI et d'autres organismes montrent que les pays africains ont largement bénéficié des droits de tirage spéciaux qu'ils ont reçus en 2021 pour stabiliser leurs économies. Et cela s'est fait sans aggraver le fardeau de la dette ni coûter beaucoup d'argent aux économies avancées, notamment parce qu'elles ont réduit l'aide au développement.
Cependant, les économies avancées exercent un contrôle important sur la disponibilité des droits de tirage spéciaux. Le système des quotes-parts du FMI détermine à la fois les droits de vote et leur répartition. Les économies avancées contrôlent la plupart de ces quotes-parts du FMI. Les économies avancées ont pris la bonne décision en 2021 et en 2009 d'émettre de nouveaux droits de tirage spéciaux et il est de nouveau temps de le refaire.
LA SOLUTION
Les dirigeants africains et d'autres pays du Sud doivent plaider vigoureusement en faveur d'une nouvelle émission de droits de tirage spéciaux lors des réunions du FMI et de la Banque mondiale à Washington.
En plus d'une nouvelle émission de droits de tirage spéciaux, les économies avancées doivent encore être poussées à réorienter les centaines de milliards de droits de tirage spéciaux qui dorment dans leurs bilans vers des objectifs productifs.
L’allocation en 2021 des droits de tirage spéciaux s'est élevée à 650 milliards de dollars au total. Mais seuls 33 milliards de dollars sont allés aux pays africains en raison de la répartition inégale des quotes-parts du FMI. Pendant ce temps, les économies avancées dotées de devises puissantes et n'ayant pas besoin de droits de tirage spéciaux ont reçu la part du lion. La Banque africaine de développement a été le fer de lance d'une telle proposition aux côtés de la Banque interaméricaine de développement. Dans le cadre de ce plan, les pays dont les droits de tirage spéciaux ne sont pas utilisés pourraient les réacheminer vers la Banque africaine de développement sous forme de capital hybride, ce qui permettrait à la banque de prêter environ 4 dollars pour chaque dollar de droits de tirage spéciaux qu'elle reçoit.
Le FMI a approuvé l'utilisation des droits de tirage spéciaux comme capital hybride pour les banques multilatérales de développement en mai. Mais il a fixé une limite excessivement basse de 15 milliards de droits de tirage spéciaux pour l'ensemble des banques multilatérales de développement. Malgré cela, les économies avancées ont été lentes à réorienter les droits de tirage spéciaux. Les quelque 100 milliards de dollars qui ont été réacheminés - principalement vers les fonds fiduciaires du FMI - sont significatifs.
Mais cela reste en deçà de ce qui aurait dû être réacheminé. À long terme, des réformes de la gouvernance du FMI sont nécessaires pour éviter que la distribution inefficace des droits de tirage spéciaux ne se reproduise.
Alors que les pays africains s'efforcent à juste titre de modifier les lacunes de l'architecture financière internationale, les nouvelles émissions de droits de tirage spéciaux devraient être au centre d'une telle stratégie. L'émission de droits de tirage spéciaux du FMI en 2021 a montré l'ampleur et l'importance de cet outil. La réorientation des droits de tirage spéciaux a eu des effets positifs en allégeant le fardeau de la dette et en libérant des financements pour se remettre de la pandémie de COVID-19.
À l'approche de 2030, alors que la fenêtre d'action pour le climat se rétrécit, les dirigeants mondiaux devraient utiliser tous les outils à leur disposition, y compris les droits de tirage spéciaux, pour construire un avenir plus résilient.
THECONVERSATION.COM
par l'éditorialiste de seneplus, tidiane sow
LA THÉORIE DES « PASSAGERS CLANDESTINS », DU BALLON D’OR AU PASTEF
EXCLUSIF SENEPLUS - Plein de « Rodri » ayant profité des indicateurs collectifs positifs du parti présidentiel se sont grassement installés comme maires et députés. La peur de l’indicateur individuel les pousse dans des coalitions contre nature
Dans les trophées remportés par l’Espagne, était-il meilleur que Carvajal* ? Certains diront que oui, arguant qu’il a été désigné meilleur joueur de l’Euro, sa seule distinction individuelle. Dans les trophées remportés pas Manchester City, était-il meilleur que Foden* ? Sûrement pas. Tout se passe comme si on ramenait alors l’exploit collectif de l’équipe d’Espagne et du club Manchester City à un exploit individuel de Rodri. L’exploit dit individuel serait dès lors une conséquence de la réussite collective. Rodri n’est pas meilleur joueur de Premier League, le championnat où il évolue. Pire, il n’est même pas le meilleur joueur de Manchester City, club dans lequel il joue.
Rodri est donc élu sur la base d’indicateurs collectifs qui ne sont pas, comme bien souvent, la solution aux divers problèmes que l’on se pose, notamment celui de l’octroi du Ballon d’or.
La fragilité des indicateurs collectifs repose sur le phénomène « du passager clandestin » bien connu des économistes et des politiques. Il consiste à ne rien faire et profiter de l’effort d’autrui. Sans aller jusqu’à dire que Rodri n’a rien fait, on dira qu’il a largement profité des bonnes performances de l’équipe d’Espagne et de celles de son club Manchester City. D’où la controverse de sa nomination.
Évidemment, si tout le monde tenait ce raisonnement fort rationnel au demeurant, (je fais le minimum, je profite des efforts des autres), la conséquence collective pourrait être désastreuse. Par exemple, j’étais frappé de voir les quartiers huppés de Sandton à Johannesburg dans le noir complet, faute d’éclairage public. Personne ne voulant « cotiser » pour des lampadaires publics, chacun se contentait d’éclairer sa maison et de poser des barbelés électrifiés pour se prémunir de toute intrusion. Chacun jouait en quelque sorte au « passager clandestin », ce qui expliquait l’absence de l’éclairage public. On observe le même phénomène en ce qui concerne les ordures publiques dans nos cités. Ce n’est le problème de personne. Chacun pense que c’est quelqu’un d’autre qui doit en prendre soin. Les solutions préconisées par la théorie économique pour résoudre ce problème de « passager clandestin » seraient alors, de faire intervenir l’État, ou des sociétés privées pour prendre en charge l’éclairage public ou pour mettre des camions de ramassage d’ordures à la disposition des ménages. En contrepartie, ils obligeraient les citoyens à en payer le prix sous forme de taxes.
Prenons notre environnement politique. Le Pastef refuse les « passagers clandestins » dans cette élection législative. Il a décidé de ne pas s’embarquer dans une coalition souvent encombrante où il jouerait tout seul le rôle de la locomotive et les autres, de wagons. De son expérience avec la coalition « Yeewi Askaan Wi », le Pastef a tiré la leçon des « passagers clandestins » ayant profité de sa notoriété, de son envergure et de l’aura de son chef. Cette fois, il livrera la bataille sous sa bannière. Cela est nouveau dans le paysage politique sénégalais. Plein de « Rodri » ayant profité des indicateurs collectifs positifs du Pastef se sont grassement installés comme maires et députés. C’est le cas notamment du plus turbulent d’entre eux, le maire de Dakar.
La peur de l’indicateur individuel les hante, au point de les pousser à s’allier dans des coalitions contre nature, dans le seul but de se réfugier dans des indicateurs collectifs. Le peuple sénégalais n’est toutefois pas dupe, il a tôt fait de repérer ces partis « yobalé ma » *, car leurs jeux répétés de se mettre tout le temps en coalition et de ne jamais « se peser », c’est-à-dire profiter de l’éclairage public sans payer sa contribution, finit par les perdre.