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26 novembre 2024
Opinions
par Dialo Diop
MACKY SALL S’ACCROCHE DÉSESPÉRÉMENT AU PARTI-ÉTAT
Que le prochain scrutin présidentiel s’est transformé en un quasi-référendum opposant deux camps : celui des adeptes de la continuité néocoloniale, face à l’immense majorité du peuple, qui en souffre et le subit en victime non consentante (2/2)
Celui-ci, Macky Sall, né après les « indépendances africaines » des années 1960 et prétendant de ce fait être « mentalement décolonisé », va entamer son mandat en surfant sur la vague électoralement porteuse de la Charte de gouvernance démocratique issue des Assises Nationales. L’ayant signée a posteriori sans avoir pris part aux délibérations qui ont abouti au consensus politique le plus large jamais réalisé au Sénégal, le président fraîchement élu s’est empressé de confier au pilote desdites Assises, le patriarche Amadou Mahtar Mbow, la charge de conduire également les travaux d’une Commission Nationale de Réforme des Institutions (CNRI). Une mission dont ce nonagénaire et son équipe vont s’acquitter de façon magistrale. Tant et si bien qu’ils complèteront leur rapport final d’un avant-projet de Constitution, une manière élégante de souligner à la fois l’ampleur et l’urgence des réformes institutionnelles à opérer pour « refonder l’Etat et la société », selon les propres termes de la Charte des Assises Nationales.
Or, dès réception dudit rapport final et avant-même la cérémonie tardive de restitution, une levée de boucliers fut orchestrée dans les media par le conseiller juridique du président Sall, un certain Ismaïla Madior Fall, premier juriste local à occuper ce poste, réservé de tout temps à un maître de Requêtes au Conseil d’Etat français…, tout comme d’ailleurs celui de conseiller militaire revenait systématiquement (l’on n’ose pas dire de droit) à un Saint-Cyrien français. Il ira même jusqu’à reprocher publiquement au patriarche Mbow d’avoir outrepassé son mandat !
Quant au chef de l’Etat, il va se borner à faire le tri des recommandations de la CNRI, pour n’en retenir que celles qui convenaient à son nouveau « Plan Sénégal émergent » … Autant dire qu’il avait délibérément choisi de jeter à la poubelle l’essentiel du programme de refondation de la société et de l’Etat, proposé par les sages du pays. Précocement victime du syndrome de l’ivresse du pouvoir, il va alors renier un à un tous ses engagements antérieurs : de la réduction volontaire de la durée du septennat en cours à l’annonce d’une « gestion sobre et vertueuse » de la chose publique, ou encore le slogan « la patrie avant le parti », en passant par son pseudo-référendum
constitutionnel, frauduleux dans le fond comme dans la forme… La liste de ses manquements de tous ordres est interminable et va aller s’aggravant au cours de sa présidence pour culminer à l’approche de la fin de son second et dernier mandat.
Auparavant, il a eu à croiser sur sa route un jeune inspecteur des impôts et domaines du nom d’Ousmane Sonko. Ce dernier est non seulement un des initiateurs du premier syndicat professionnel de son corps d’origine, mais aussi et secondairement le co-fondateur d’un parti politique d’opposition du nom de Pastef (Patriotes du Sénégal pour le Travail, l’Éthique et la Fraternité). Fondé en 2014, ce parti se réclame ouvertement de l’héritage politique de Mamadou Dia, véritable père de l’indépendance formelle du Sénégal. Il n’y a point de hasard en histoire, dit-on. Il se trouve, en effet, qu’Ousmane Sonko a pris part aux travaux des Assises nationales (Commission Économie) et va signer par deux fois ladite Charte : d’abord dès 2008 en sa qualité de responsable syndical, puis à nouveau en 2018, en tant que président de Pastef et député non inscrit, unique élu de la Coalition Ndawi Askan Wi (NAW) en 2017. Un exemple sans précédent, à ma connaissance, de confirmation d’un engagement politique avec une décennie de recul. Mais surtout, un contraste éthique saisissant avec un autre signataire rendu fameux par le reniement public de sa signature !
Quoi qu’il en soit, l’adversité entre le chef du nouveau Parti-Etat, Alliance pour la République (APR) et celui qui va peu à peu s’imposer comme le leader de l’opposition patriotique et démocratique (Pastef), ira crescendo au fur et à mesure de l’amplification des succès électoraux de ce dernier, aux divers scrutins aussi bien nationaux que locaux. Depuis sa radiation arbitraire de la fonction publique (2016) jusqu’à l’invalidation arbitraire de la liste des candidats titulaires à la députation de la Coalition Yeewi Askan Wi (YAW) qu’il dirigeait (2022), en passant par la multiplication des procès en sorcellerie, sous divers prétextes aussi fallacieux les uns que les autres (viol avec armes à feu, diffamation, vol du téléphone portable d’une gendarme en civil, attentat à la sûreté de l’Etat lié à une entreprise terroriste, etc.), qui s’avèreront en fin de compte n’être qu’autant de pétards mouillés…
En effet, malgré sa séquestration prolongée à domicile, suivi de son kidnapping et de son emprisonnement, et en dépit de la dissolution autoritaire précédée de la fermeture illégale du siège national de Pastef, et surtout la campagne de terreur blanche prolongée, mais dirigée presqu’exclusivement contre les dirigeants, militants et sympathisants du Parti (plusieurs dizaines de morts par armes à feu, près de 1500 prisonniers d’opinion à travers le pays, nombreux exilés, etc.), en dépit donc de cette véritable guerre non déclarée visant à l’anéantir, le Pastef est parvenu à rester debout et à résister victorieusement aux violents assauts du pouvoir totalitaire du Président sortant. Aussi bien sur le plan politique, en le contraignant à renoncer publiquement à une troisième candidature, qu’au plan juridique en réussissant à présenter un candidat de substitution au président Sonko, illégalement écarté, en l’occurrence le Secrétaire général du Parti, Bassirou Jomaay Faye, qui l’a précédé à la prison du Cap Manuel !
C’est précisément la faillite de son perfide système de parrainage sur mesure, visant à choisir lui-même ses adversaires (et qui lui avait si bien réussi lors du scrutin présidentiel de 2019), avec une vingtaine de candidats au prochain scrutin, qui va le pousser à la faute fatale : la promulgation d’un décret illégal interrompant le processus électoral à la veille de l’ouverture de la campagne, couplée à une loi scélérate dérogatoire à la Constitution et votée nuitamment en procédure d’urgence par un parlement croupion, d’où les députés de l’opposition avaient été préalablement expulsés, suscitant stupeur, indignation et colère dans l’opinion tant intérieure qu’africaine et mondiale…
Une tentative désespérée de coup de force anticonstitutionnel, fort heureusement retoqué par un Conseil constitutionnel pour une fois compétent ! Du coup, il a recours aux manœuvres dilatoires, en appelant à un énième faux « dialogue », visant à prolonger aussi longuement que possible une soi-disant « transition » qui, conformément à la loi fondamentale en vigueur, ne l’autorise pas à présider aux cérémonies officielles de la prochaine « fête de l’indépendance », le 4 avril 2024.
Faut-il rappeler qu’en 1993, la première tentative de mise œuvre du consensus issu des travaux de la Commission Nationale de Réforme du Code électoral, présidée par feu le juge Kéba Mbaye, a entraîné sa démission fracassante de la présidence du Conseil constitutionnel au cours du scrutin présidentiel de février, tandis que l’élection des députés du mois de mai suivant s’est soldée par l’assassinat du vice-président de la même juridiction, Me Babacar Sèye, « juge des élections » ? Il importe de préciser que, dans l’intervalle séparant les deux scrutins, la majorité parlementaire mécanique du Parti-Etat PS avait unilatéralement brisé le consensus du « Code Kéba Mbaye », en retirant le droit de vote aux représentants des candidats au sein de la Commission Nationale de Recensement des Votes, désormais réduits au statut de simples observateurs, pour le réserver exclusivement aux magistrats de la Cour d’Appel de Dakar ! L’on voit que le changement unilatéral et partisan des règles du jeu en cours de partie, par l’héritier de Me Wade n’est que la perpétuation d’une vieille tradition de fraude politicienne typiquement senghorienne, même si elle est en réalité héritée de la tradition jacobine française…
Il n’en demeure pas moins que le prochain scrutin présidentiel s’est transformé en un quasi-référendum opposant deux camps : celui des partisans et bénéficiaires du vieux et calamiteux système du parti-Etat, adeptes de la continuité néocoloniale, face à l’immense majorité du peuple, qui en souffre et le subit en victime non consentante. Nos concitoyens sont dans l’attente d’une véritable alternative et non pas d’une troisième alternance trahie par des politiciens professionnels, qui ne sont ni patriotes, ni démocrates ! Tant et si bien que l’on peut prédire sans risque de se tromper que, si et seulement si le scrutin est calme et paisible, régulier et sincère, qu’un second tour est plus qu’improbable, tant le raz de marée « pastefien » en faveur de la Coalition Jomaay Président semble inéluctable…
Toutefois, il apparaît que partout en Afrique, les échéances électorales, loin d’être des moments forts de débats constructifs, de respiration et de régulation de la vie démocratique, se réduisent à des luttes pour le pouvoir personnel et s’avèrent être les principaux facteurs de crise sociale et d’instabilité institutionnelle, sinon de violence sanglante généralisée. Aussi, n’est-il pas exclu que le président sortant tente un ultime coup fourré pour sauver sa mise, en divisant les rangs du mouvement patriotique et démocratique. Une conspiration assurément vouée à l’échec, étant donné le niveau de prise de conscience des masses et surtout de la jeunesse, auxquelles l’on s’adresse désormais dans les langues africaines, (via media et réseaux sociaux) et le degré de détermination qui en résulte chez les gens.
Quoiqu’il en soit, le minuscule arbre du Sénégal ne saurait nous cacher l’immense forêt africaine… La multiplication des crises structurelles autant dans la sous-région ouest-africaine qu’à travers l’ensemble de notre continent, dans un contexte global de faillite politique, économique et morale de l’Occident impérial, dominé par des génocidaires non repentis, (esclavagistes, colonialistes anciens et nouveaux, ségrégationnistes, racistes incorrigibles et prédateurs impénitents), devraient nous convaincre de l’urgente nécessité de changer radicalement de cap.
D’autant qu’il est aujourd’hui manifeste que ceux qui craignent, depuis toujours, l’avènement de la libre expression d’un authentique suffrage universel, régulier et sincère en Afrique, forment une sainte alliance de prédateurs étrangers, désormais associés à des Africains traîtres à leur patrie et esclaves de leurs intérêts égoïstes. Cette association de malfaiteurs incorrigibles n’est guidée que par la volonté de puissance et de domination, le culte du profit et l’esprit de lucre.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, pourquoi s’étonner que la gestion dépendante et incompétente, autoritaire et corrompue, autrement dit le pouvoir personnel à la solde de l’étranger, qui a caractérisé l’évolution de la quasi-totalité des États africains, des indépendances avortées à nos jours, aient abouti à une impasse, sinon au chaos plus ou moins généralisé partout ou presque ?
Il s’agit donc à présent de savoir tirer les bonnes leçons de la riche expérience de luttes pour la survie collective, accumulée par les peuples africains du continent et de la Diaspora d’ascendance africaine directe, afin de nous donner les moyens de recouvrer la maîtrise de nos propres destinées dans des délais non prohibitifs, de concert avec les autres peuples opprimés du monde, dont il y a également beaucoup à apprendre.
Ainsi, au-delà des principes généraux de l’égale dignité de tous les êtres humains et du caractère inviolable de la vie sur terre, affirmés dès 1212 dans le Serment des Chasseurs, plus connu sous le nom de Charte du Mandé, le premier et le plus concis des « textes sacrés de la liberté », (il ne compte que sept articles, à ne pas confondre avec le faux apocryphe dit du « Kurukan Fugan » qui en compte quarante-quatre…) la leçon principale à tirer de notre expérience historique dans les Temps modernes devrait être que même si tout africain possède un terroir de naissance, forcément situé sur un territoire donné, au sein d’un quelconque pays à travers le continent-mère, il doit être évident, pour chacun et pour tous, que la nation à construire ou la patrie à défendre ne saurait être autre qu’une Afrique véritablement libre parce que, réunifiée, souveraine et démocratique sur la base du principe égalitaire absolu : non ethnique, non racial, non sexiste et non confessionnel ; et, par voie de conséquence, une Afrique non violente.
Dialo Diop est membre de la Coalition Jomaay Président.
par Amadou Tidiane Wone
DIALOGUE POLITIQUE OU CONCERTATION SUR LA DATE DE L’ÉLECTION ?
Poursuivre le processus électoral, à partir de là où il a été interrompu, est la seule conduite raisonnable à tenir face aux urgences qui assaillent notre pays. La situation du pays exige plus de sérieux et de rigueur
Nous attendions le président de la République sortant sur un point essentiel : la fixation d'une date de l’élection présidentielle qu'il a, de son propre chef, reporté sans en avoir le droit. Ce qu'en substance le Conseil constitutionnel lui a rappelé. Il s'agit donc d’une anomalie à corriger. Tout simplement.
En conséquence, poursuivre le processus électoral, à partir de là où il a été interrompu, est la seule conduite raisonnable à tenir face aux urgences qui assaillent notre pays. Un pays qui a un besoin pressant de se relever et de se remettre sérieusement au travail.
L’élection présidentielle, et ses multiples péripéties, qui occupent notre quotidien depuis pratiquement le début du second et dernier mandat du président Macky Sall, doit se tenir « dans les meilleurs délais » selon le Conseil constitutionnel.
Le dialogue politique, nécessaire pour panser les plaies béantes de notre système démocratique se tiendra, impérativement, après l’élection d’un nouveau président de la République. Il ne doit en aucune façon être bâclé et, surtout pas, servir de cénacle pour valider le principe d’une amnistie générale. Non...Non…Non ! Comme en 2012, des enquêtes et audits rigoureux devront être menés pour tout ce qui concerne les actes de mal gouvernance. Tant économiques que judiciaires. Les responsabilités situées et les sanctions idoines prises.
Mais revenons à notre sujet : Pour fixer une date pour le jour du vote, seul chaînon manquant au processus électoral, point n’est besoin de remplir la salle des banquets (Tiens… tiens…) de la présidence de « toutes les forces vives » sic. Nous avons déjà vu ce qu’il en a été avec les « dialogues » antérieurs : des dizaines d’illustres inconnus remplissent la salle et même prennent la parole pour noyer le poisson… On se demande au nom de qui !
La situation du pays exige plus de sérieux et de rigueur. Nous ne pouvons pas continuer à subir les caprices des politiciens. Les tentatives multiples d’éliminer certains de ses rivaux, par le Président sortant, nous ont coûté trop cher en vies humaines et en dégâts économiques et matériels.
Il faut absolument siffler la fin de la récréation !
Le Conseil constitutionnel, la CENA, Le ministère de l’Intérieur et tous les services de l’État concernés, en plus des 19 candidats déjà validés ou leurs mandataires, peuvent valablement délibérer sur une date. Celle-ci doit, tout simplement, correspondre au rattrapage des jours perdus en raison de l’annulation du décret convoquant le corps électoral. Illégalement. Il ne s’agit de rien de plus !
Toute autre option reviendrait à reprendre tout le processus électoral. Ce qui serait une hérésie et surtout un pied de nez au Conseil constitutionnel qui a argumenté et motivé, au plan du droit, toutes ses décisions. On peut être du même avis ou pas. Mais ces décisions ne sont susceptibles d’aucun recours. Duralex sed lex !
Au demeurant, nous sommes dans une situation disons kafkaïenne !
Jugez-en : le Premier ministre, chef du gouvernement de la République, se fait traiter de tous les noms par des ministres de son gouvernement ! Sans suites. Voyant cela, des hauts fonctionnaires deviennent téméraires et expriment, publiquement, leur défiance au chef du gouvernement. Sans conséquences ! Et pourtant, ce Premier ministre accusé, sans preuves, de corruption sur des juges du Conseil constitutionnel, a vu le président de la République lui renouveler sa confiance…Pour le remplacer ! Vite un doliprane !
Vous ne pensez pas qu’il est temps de mettre de l’ordre dans ce pays ?
Il ne sera plus président de la République au soir du 2 avril. Macky Sall succombe à la pression planétaire mais tente de tordre le cou à une Assemblée nationale serpillière pour se faire voter une loi d’amnistie sur ses graves crimes...
Il ne sera plus président de la République au soir du 2 avril. Macky Sall succombe à la pression planétaire mais tente de tordre le cou à une Assemblée nationale serpillière pour se faire voter une loi d’amnistie sur ses graves crimes, en se servant d’opposants immoraux. Son échec est patent. Il laissera un pays exsangue.
C’est l’épisode improbable d’un paradis africain en...feu.
Enrobé d’une culture irénique au point d’être considéré comme un cas à part dans une Afrique, terre de violences, le Sénégal se posait comme l’espoir solitaire mais persistant dans une géographie qui avait fini par désespérer les plus optimistes.
Il voguait telle une douce nacelle jusqu’à se croire inoxydable face aux nombreux et divers chocs subis par le continent. Tout a soudain changé, suite à une série de mauvaises manœuvres de son capitaine.
Piqué par on ne sait quelle envie suicidaire, c’est lui qui l’a imprudemment plongé dans des eaux incertaines, gorgées de récifs invisibles, alors que le pays a depuis toujours navigué dans un milieu stable, baigné par un écosystème démocratique qui, longtemps, en a fait une référence africaine.
Dans la langue locale, le Wolof, le Sénégal signifie «notre pirogue» et il se distinguait par le dynamisme de sa vie publique alors que partout ailleurs sur le continent le déchaînement des éléments, entre coups d’Etats militaires et malédiction des ressources, mal gouvernance, s’imposait comme la norme.
C’était avant. Avant ces dernières années où il trône sur le hit-parade des chroniques de la honte. Quand, pris ou projeté dans une folle tourmente politique, il ne cesse de s’affirmer comme le dernier ersatz des États faillis qu’on ne compte plus en Afrique.
Soixante quatre ans après une indépendance nationale qu’il célébrera le 4 avril, gorge nouée et tête surplombée par des nuages dans son ciel de plus en plus sombre, ce pays, situé à la pointe occidentale de l’Afrique, n’en finit plus de donner l’air d’être un navire ivre, à la dérive. Au milieu des tensions politiques, du recul, voire de l’agonie, de sa démocratie, des trafics en tous genres, dont celui devenu exorbitant de la drogue et de l’argent sale, pendant qu’un climat de terreur grippe le débat pluriel qui a toujours été le facteur discriminant d’un peuple joyeux et bavard, dont on a pu dire qu’il croyait avoir agi dès lors que sa faconde s’était libérée.
Désigné en terre de la Téranga, l’hospitalité selon son autre nom local, le Sénégal est désormais méconnaissable. On y a même vu des escadrons de la mort, lourdement armés, tirer à balles réelles, aux côtés des forces de défense et sécurité, ayant elles aussi perdu le Nord, sur des foules, surtout jeunes, qui cherchent à se sauver d’un quotidien repoussant tout en rêvant de redonner des couleurs à la démocratie nationale. Des tueries extra-judiciaires y sont devenues banales sous l’action débridée des forces de sécurité. Les arrestations ne sont plus encadrées par la loi. Les marchés politiques, constitutionnellement protégées, ne sont plus permises qu’aux proches d’un pouvoir ayant fini de vider une démocratie de façade de ce qui en était la substantifique moelle. Les institutions n’en sont pas sorties indemnes. La Constitution, plusieurs fois violée, n’est, elle, plus qu’un torchon.
Si le Sénégal intéresse encore hors de ses frontières, c’est qu’il y est encore vu comme une...bouée de sauvetage dans une Afrique loin de réaliser ses promesses se décollage. Sinistrée !
Seul pays, en dehors de l’insulaire Cap Vert, sur une bande qui s’étend de la Côte Atlantique à l’Océan Indien, à avoir jusqu’ici échappé aux cliquetis des armes des grandes guerres civiles, en excluant les menées séparatistes dans sa partie méridionale de Casamance, et n’ayant pas encore entendu les bruits de bottes des auteurs de ‘pronunciamentos’, le Sénégal pouvait encore se gausser, voici peu, d’être une exception africaine.
Qui ose encore douter qu’il ne l’est plus depuis que, le 3 février dernier, son capitaine de bord, qui n’est autre que son Chef de l’Etat sortant, Macky Sall, y a fait ce qui s’apparente à un coup d’Etat institutionnel en arrêtant brutalement le processus électoral dont le point culminant devait être la tenue d’un scrutin présidentiel le 25 février pour lui trouver un successeur parmi une vingtaine de candidatures que le Conseil constitutionnel du pays avait validées.
Ce coup de barre n’a pas que fracassé le mat de la pirogue sur des récifs qui l’ont profondément voire définitivement endommagé mais la laisse navigant vers nul ne sait où...
Le Sénégal vit les heures les plus sombres de son histoire. Si la classe politique, pouvoir comme opposition, mue par des intérêts grégaires et entretenant des relations adultérines qui la rendent difficile à déchiffrer, ou départager sur des lignes ou valeurs claires, personne ne saurait cependant se tromper sur le vrai coupable de cet imbroglio : Macky Sall !
En prenant le pouvoir en 2012, avec l’aide tacite de son mentor et prédécesseur, Maître Abdoulaye Wade, dans une alliance impie, que peu avaient flairée, Macky Sall incarnait, à tort, l’espoir d’un renouvellement du jeu politique sénégalais. Que nenni ! Dès qu’il s’est installé sur un fauteuil présidentiel aux pouvoirs excessifs, celui dont la douteuse et débordante fortune financière suscitait des moues dubitatives n’a eu de cesse de vouloir gouverner de façon autocratique un peuple frappé au coin de la liberté dans son ADN.
Peu à peu les prisons du pays, où l’on ne relevait plus de traces de détenus politiques, commencèrent à s’en remplir jusqu’à en compter plus d’un millier. Les libertés publiques s’étiolèrent au fil de la gouvernance d’un régime progressivement intolérant. Les voix dissidentes furent contraintes au silence et à l’exil. Et, au même moment, des forces sociales ténébreuses prirent en otage le pays. Ses ressources naturelles, y compris ses découvertes d’hydrocarbures, capturées par la fratrie et le parti d’un homme qui s’était pourtant fait élire avec la promesse ferme d’une gestion sobre et vertueuse du pays. Des trafiquants plus audacieux que jamais comprendront vite que ce n’était là que propos de campagne électorale. Qui s’étonne qu’ils aient transformé le Sénégal, sous l’œil tendre et compréhensif autant de son dirigeant numéro un que de ses instances de veille ou régulation, en passoire de la drogue et de l’argent sale ?
Tant que l’illusion démocratique perdurait, le reste du monde pouvait être bluffé. Jusqu’à faire de Macky Sall un...chouchou de la communauté internationale. À tel point que du groupe le plus industrialisé au monde, le G7, à celui le plus représentatif, le G20, il n’y avait presque plus de grandes rencontres sans que sa voix y soit convoquée. Au nom de l’Afrique !
Que des dirigeants autoritaires, notamment ceux de la Chine, de la Turquie ou de la Russie, lui aient trouvé des accointances, toutes douteuses qu’elles soient, passe encore. Mais la cécité de ce qui reste de l’Occident et de ses valeurs droits-de-l’hommistes, démocratiques, est une énigme proche de la quadrature du cercle. Entre une complicité injustifiable dans ses relations avec le locataire de l’Elysée, Emmanuel Macron, sa place primordiale à un Sommet Europe-Afrique, voici deux ans jour pour jour, et lors d’une réunion similaire à la Maison Blanche, en décembre 2022, quel observateur attentif n’a pas pu penser que les pays qui portaient le flambeau de la liberté et de la démocratie y ont perdu leur âme ?
Est-ce pour se rattraper qu’ils ont, autant que les organisations régionales africaines, dont l’Union africaine et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), réagi avec une vigueur inespérée pour flétrir ce qu’ils découvrent sur le tard ? Par une stratégie de l’appeasement, hélas suffisamment testée depuis l’année d’avant le déclenchement de la 2ème guerre mondiale pour cajoler Adolf Hitler, ils ont conforté un monstre. Le peuple sénégalais en paie les dérives. Pendant qu’une vieille démocratie, à bout de souffle, agonise. Sous les genoux d’un homme dont l’odieux visage n’échappe plus à qui que ce soit...
La question est de savoir si la communauté dite internationale se contentera de pétitions de principes concernant son coup de Jarnac. Autrement dit, s’il le laissera s’échapper, au-delà de récriminations usuelles du bout des lèvres, avec ce qui est, de toute évidence, la version civile de ces intrusions militaires dans la gouvernance des États qui font l’unanimité contre elles.
Une lueur d’espoir pointe à l’horizon avec la prise de conscience, exprimée en réprimandes verbales de Paris à Bruxelles, Washington et dans les milieux africains de tous bords, des balafres que Sall a posées sur la désormais dégradée vitrine démocratique la plus ancienne du continent.
Le peuple sénégalais, sans illusion, attend d’y voir plus clair. Il reste l’arme au pied, prêt à restaurer son narratif national aujourd’hui écorné par celui qui disait vouloir l’embellir — c’était avant qu’il ne transforme la pirogue Sénégal en Titanic en puissance.
Adama Gaye, ex-détenu politique au Sénégal, en exil, est auteur d’Otage d’un État et de Demain, la nouvelle Afrique (Éditions l’Harmattan, Paris).
Par Me Malick SALL
SOYEZ SANS CRAINTE, EXCELLENCES DIOUF ET WADE
Report de l’élection présidentielle 2024, tractations politiques, coulisse : Contre vents et marées, Amadou Ba est, reste et sera le seul candidat de Benno !
Report de l’élection présidentielle 2024, tractations politiques, coulisse : Contre vents et marées, Amadou Ba est, reste et sera le seul candidat de Benno ! Depuis le 3 février et l’adresse solennelle du chef de l’État à la Nation, le Sénégal bruit de rumeurs, de prophéties, de projections, de conjectures et de prédictions de devins improvisés et de spécialistes en tout genre, sans doute, tous, passionnés par la politique. Sans parler des coups bas, des combinaisons et combines, des lobbyistes en froc ou en costards, des coursiers nocturnes et des courtiers matinaux, des judas, des mégères et leurs commérages... Avec un seul objectif : barrer la route et l’ascension calme, sereine et inéluctable de celui qui a la confiance du chef et de ses pairs de Benno et de la Grande famille digne et respectable de la majorité présidentielle.
C’est peine perdue : qu’il vente ou qu’il pleuve, même dans ce brouillard ambiant, Amadou Ba est, reste et sera le seul et unique candidat de Benno Bokk Yaakar (Bby). Comme le Président de l’APR, notre leader historique, incontesté et incontournable, Macky Sall, l’a dit et répété, urbi et orbi, fermement et clairement de Dakar à Washington, de Nouakchott à Paris et à travers tout ce que le monde compte comme médias et moyens de communication.
Maintenant, s’il y a une smala gâtée, égarée et inconsciente des enjeux du moment et de l’avenir : tant pis pour elle !
Pendant qu’on y est, qu’attendent-ils et elles pour faire tomber définitivement leur masque et prendre leurs responsabilités (s’ils et/ou elles en ont), en prenant leur distance et congé à durée indéterminée et incertaine.
Pour nous autres, fidèles, loyaux, responsables et respectueux de la ligne tracée par le Chef, les choses sont beaucoup plus simples : il n’y aura pas d’élection le 25 Février et une nouvelle date reste à déterminer par le Président de la République, qui a décidé de se concerter avec les acteurs politiques et d’autres, concernés par le scrutin.
Nous sommes prêts à élire notre candidat Amadou Ba
Concernant Benno Bokk Yaakaar, nous sommes sereins, prêts, déterminés et engagés à faire élire notre candidat Amadou Ba, dès le 1er tour. Amadou Ba est donc, reste et sera notre seul et unique candidat, comme entériné par les leaders de Benno avant l’onction du Sen, transformé en congrès extraordinaire, pour la circonstance, à l’hôtel King Fahd Palace. Il est vrai que çà et là, et de temps en temps, s’élèvent quelques voix discordantes et isolées qui cherchent à remettre en cause une telle décision, mûrement réfléchie et scrupuleusement appliquée dans toutes les instances de l’Apr, de Benno et de la Grande Majorité, Présidentielle. À tous ces sujets égarés, nous disons : attention, on ne scie pas la branche sur laquelle on est assis.
Il nous faut savoir dépasser nos égos personnels et nos périssables personnes pour nous engager dans la même direction, vers les mêmes objectifs et le même but : faire gagner notre candidat, poursuivre l’excellent élan de développement engagé par le Président Macky Sall, en portant plus largement, plus haut, plus loin et plus vite les Projets du Plan Sénégal Émergent (Pse) dans l’intérêt supérieur et qui vaille, du peuple sénégalais. Après quoi, il nous sera loisible de régler nos différences et contradictions entre gentlemen et dames de bonne famille. Sans jamais verser dans des règlements de comptes.
Pour le reste, d’autres sons de cloche sont également émis par au moins, trois groupes ou sensibilités.
D’abord, ce sont les candidats qui se disent « lésés et injustement écartés du processus par le Conseil constitutionnel». Ils exigent la remise des compteurs à zéro et la reprise du processus de manière « inclusive », pour pouvoir espérer une nouvelle chance de candidater.
Ils exigent aussi l’érection d’une Cour Constitutionnelle avec des prérogatives plus étendues et des compétences renforcées. Avec, surtout, last but not least : une possibilité de recours portant sur les éventuelles décisions, émanant de ladite Cour. Sécurité juridique oblige, plaident-ils ! Pour le second groupe, il s’agit plutôt des candidats « recalés » pour divers motifs dont le parrainage, particulièrement. Eux, aussi, voudraient se voir offrir une nouvelle chance de postuler et pouvoir, ainsi, briguer les suffrages des Sénégalais.
Le troisième groupe beaucoup plus hétéroclite, composé de personnalités de la Société Civile, au sens large, avec même des journalistes, animateurs, syndicalistes, universitaires, organisations faîtières, politiques et autres. Pour eux, ce qui importe c’est la tenue de l’élection avant le 02 Avril, qui devrait coïncider avec la fin de l’actuel mandat du Chef de l’État. Partisans du statu quo ante et du « fait accompli », ils plaident tous pour l’acceptation de la liste contestée et la tenue du scrutin, ici et maintenant. Sans quoi, ils ne reconnaîtraient plus l’autorité du Président de la République, au-delà du 02 Avril. Oubliant ainsi (ignorant ?) que notre charte fondamentale dispose que le Président sortant quitte ses fonctions après une passation avec son successeur et non pas le jour supposé de la fin de son mandat. Bref, l’excellent et brillantissime confrère, Me Doudou Ndoye, a réglé cette question par son art et sa science, incontestablement, en administrant à tous une bonne piqure de rappel, bien sentie... Tout compte fait, la voix de la sagesse indique qu’il faut se parler, discuter, échanger, se concerter pour trouver un consensus fort et vaste afin d’aboutir à une élection incontestée et incontestable ! C’est tout le sens des concertations engagées par le président Macky Sall, qui cherche à réunir tout ce beau monde autour de la table de discussion. Nous adhérons totalement, pleinement et entièrement à cette démarche présidentielle de quête de consensus et d’accords autour de l’essentiel : l’avenir de notre cher pays, le Sénégal.
Me Malick SALL
SP COS-PETROGAZ,
ancien Garde des Sceaux, ministre de la Justice
membre de SEN de l’APR
par Issa Sall
L’INTERPRÉTATION GROSSIÈREMENT FAUSSE DE L’ARTICLE 36
Si l’élection présidentielle ne se tient pas avant la fin du mandat, le 2 avril 2024, il y aura vacance du pouvoir. Et c’est incontestable
L’entretien accordé par le président de la République à la presse pour expliquer ce qu’il compte faire pour les prochaines semaines ou les prochains mois, n’a pas permis au chef de l’Etat de convaincre sur les bien-fondés de cette crise qu’il évoque pour plaider son devoir de protéger les institutions ou tout au moins, à les faire bien fonctionner.
Que retenir de cet entretien ? Que le 2 avril 2024, son prend fin n’est vraiment pas une information à laquelle les Sénégalais attendaient du président de la République. Tous, sans exception, le savent dès lors que son mandant ayant débuté le 2 avril 2019, il prend fin cinq ans plus tard jour pour jour.
A quelle date sera organisée l’élection présidentielle ? Son silence sur ce point précis est forcément intrigant. Le président de la République a l’obligation d’organiser sa succession. La Constitution l’y oblige. Cette élection doit se tenir dans une période que la Constitution précise au jour près.
Alors pourquoi, après la décision du Conseil constitutionnel, il a eu la hardiesse d’annuler le décret convoquant le corps électoral ? Son plaidoyer pro domo porté sur un conflit des institutions n’a jamais existé. Il le sait. Tout le monde le sait. Arguties politiciennes, certainement ! Mais le conseil le lui a rappelé de manière on ne peut plus claire en déclarant inconstitutionnelle la proposition de loi votée à l’Assemblée et, suprême camouflet, en annulant le décret qui arrêtait de force la campagne électorale.
Le président de la République a l’obligation, en sa qualité de « gardien de la Constitution », de savoir que celle-ci l’oblige à organise une élection présidentielle pour élire son successeur. En ne le faisant pas il commet un acte gravissime. On devra bien qualifier ce refus d’agir, d’organiser sa succession. Et il le faudra bien parce que c’est un cas que la Constitution n’a pas prévu. En prenant acte de la décision du Conseil constitutionnel et à attendre plusieurs jours pour annoncer à la télévision qu’il compte organiser un dialogue ou une concertation sur la date de l’élection, le président poursuit ce que les administrations du ministère de l’Intérieur, certainement malgré elles, avaient fait en refusant de donner suite à deux décisions de justice. Mais là, c’est autrement plus grave parce que la décision concernée par cette défiance vient du juge constitutionnel. Et c’est lui-même, président de la République qui commet cet acte gravissime de remise en cause d’une décision du Conseil constitutionnel.
Sur l’autre annonce tout aussi surprenante venant du président la République qui agite l’article 36 pour « rassurer » qu’il n’y aura pas de vacance de pouvoir, que comprendre ? Très simplement que le président Sall veut obtenir ce que le Conseil constitutionnel lui a refusé avec sa décision du 15 février 2024, c’est-à-dire jouir d’une prolongation de son mandat par le biais de l’article 36 de la Constitution ?
Ce qui est sidérant, le Conseil constitutionnel le lui ayant déjà signifié vertement dans une décision claire et précise pourquoi vouloir passer par un trou de souris ? L’article 36 agité par lui-même n’est pas destiné pour une quelconque transition ou une prolongation de mandat ou pour éviter une vacance de pouvoir. Cette disposition régit une période très courte qui dura en général quelques jours entre l’élection du président de la République acté par le Conseil constitutionnel qui proclame les résultats définitifs et annonce « Monsieur (ou Madame) untel(le) est élu(e)(e) président(e) de la République » et l’installation de celui-ci (serment passation et port des insignes auquel procède le Conseil de l’Ordre. Ainsi, durant cette période, le pays a deux présidents de la République : le sortant et l’entrant. Quand Wade avait été élu le 19 mars 2000, Diouf est resté en fonction jusqu’à l’installation de Wade. Il en fut de même entre Wade et Sall. Aussi faire accroire que l’article 36 peut permettre au président d’allonger son mandat est une interprétation grossièrement fausse de cette disposition. Si l’élection présidentielle ne se tient pas avant la fin du mandat, le 2 avril 2024, il y aura vacance du pouvoir. Et c’est incontestable.
Dans ce cas, le président de l’Assemblée aura l’obligation de le faire constater par le Conseil constitutionnel qui décidera de ce qu’il convient de faire : installer le président de l’Assemblée nationale et faire applique sa décision du 15 février et du 20 janvier qui demeurent dans l’ordonnancement juridique.
Issa Sall est journaliste
par Thierno Alassane Sall
MACKY MAQUILLE SON PUTSCH AVEC UN DEALOGUE
L'amnistie concerne au premier titre lui-même et ses soutiens. Je m'apprête à saisir le Conseil constitutionnel d'une requête afin de constater et de remédier à la carence du président, qui refuse de fixer la date de l'élection
Alors que le Conseil constitutionnel lui demande de fixer, dans les meilleurs délais, la date de l'élection présidentielle, Macky Sall refuse et convoque un « dealogue » dont l’objectif principal est d’organiser la mésentente. Y sont conviés des individus soigneusement sélectionnés pour leurs positions divergentes.
Prétextant de cette absence prévisible de consensus, Macky Sall va imposer ses desiderata, à savoir :
- Reprendre la liste des candidats pour réintroduire et exclure qui bon lui semble ;
- Prolonger son mandat, par une interprétation abusive de l'article 36-2 de la Constitution, et rester jusqu’à la passation de pouvoir.
Pour faire passer la pilule, Macky Sall nous offre une amnistie. Mais l'amnistie concerne au premier titre lui-même et ses soutiens. Il est aujourd'hui évident que Macky Sall et ses complices, confisquent le droit de s'exprimer des Sénégalais pour assurer leurs arrières.
Macky Sall, qui a incarcéré sans états d'âme des centaines de personnes, prétend un désir de réconciliation, pleinement conscient des dossiers sensibles qui l'attendent, notamment ceux liés au pétrole et au fonds Covid. Dealer avec lui pour reporter les élections et amnistier à grande échelle serait trahir le sacrifice des jeunes morts pour s'être opposés au report de l'élection.
Je ne peux en aucun cas cautionner un dialogue orchestré pour parachever le coup d'État constitutionnel qui se déroule depuis le 3 février 2024.
Je m'apprête à saisir le Conseil constitutionnel d'une requête afin de constater et de remédier à la carence du président de la République, qui refuse de fixer la date de l'élection, en violation de sa décision n°1/C/2024 du 15 février 2024.
PAR Oumar Cheikh LY
QUE RESTE-T-IL DE LA LETTRE DE LA CONSTITUTION ?
On nous tue mais on ne tripatouille pas notre Constitution !
La Constitution est la charte fondamentale de notre pays, un texte qui régit notre vie en société. La locomotive qui définit nos droits et nos devoirs, qui assure l’équilibre entre les pouvoirs et garantit la liberté de chacun. Ce document, c’est notre raison d’être. De la relation tumultueuse entre les élus eux-mêmes et les dépositaires des mandats électifs, que devient la Constitution, charte suprême de l’ossature juridictionnelle et administrative ? Pour un bref rappel historique, la première Constitution de la République du Sénégal, qui est restée en vigueur jusqu’à l’accession à l’indépendance en 1960, a été adoptée le 24 janvier 1959. Ainsi, depuis sa première rédaction, notre Constitution a évolué et s’est enrichie pour devenir aujourd’hui le socle de notre République. Elle est le symbole de notre unité et de notre volonté commune de vivre ensemble dans le respect des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité. Mais au-delà de ces principes, la Constitution est avant tout un cadre juridique qui permet de garantir la stabilité et la pérennité de notre système politique. En effet, elle établit les règles du jeu pour les différentes institutions de l’État, définissant ainsi leurs compétences et leurs relations. Elle assure de ce fait l’équilibre des pouvoirs entre le pouvoir législatif, exécutif et judiciaire, garantissant dès lors la séparation des pouvoirs et la protection de nos libertés.
La Constitution est donc nécessaire pour garantir les droits fondamentaux des citoyens. Elle pose, par exemple, le principe de l’égalité des citoyens devant la loi, fait du suffrage universel la source de la légitimité politique et accorde à chacun le droit de faire entendre sa cause devant un tribunal indépendant. La Constitution est surtout un rempart contre l’arbitraire et les abus de pouvoir. En établissant les droits et les libertés fondamentales de chaque citoyen, elle garantit leur protection face aux décisions arbitraires. Elle assure également la primauté du droit en fixant un cadre juridique pour l’ensemble de la société. Enfin, la Constitution est un symbole de notre identité nationale. Elle reflète les valeurs qui nous sont chères et qui font la fierté de notre pays. Et elle est le témoignage de notre histoire et de notre lutte pour les droits et les libertés. Cependant, la Constitution n’est pas figée. Elle doit être régulièrement adaptée aux évolutions de notre société, de nos réalisés et de la marche du monde. C’est pourquoi elle peut être modifiée par les représentants du peuple, dans le respect des normes et procédures prévues par la loi, dans ce sens.
Rappelons-nous donc l’importance de ce document et engageons-nous à le défendre et à le faire vivre dans notre quotidien. Car c’est ensemble, en respectant nos droits et nos devoirs, que nous pourrons construire un avenir meilleur pour notre pays et pour les générations à venir. Du Président de la République qui est le gardien de la Constitution, le premier Protecteur des Arts et des Lettres du Sénégal au Sénégalais lambda veillons au respect de la raison d’être de tout État organisé et viable. Oui il y’a effectivement ces gardiens non-juridictionnels. En effet, certaines institutions politiques à l’instar du chef de l’État (qui «veille au respect de la Constitution ou autorités administratives indépendantes comme le Défenseur des droits — «dont l’indépendance trouve son fondement dans la Constitution, participent au respect de la Constitution.»
Oui le respect de la Constitution et l’État de droit est une manifestation du respect du droit par les autorités publiques elles-mêmes parmi lesquelles le Conseil constitutionnel qui se place au sommet des gardiens juridictionnels dans son rôle de contrôle notamment de constitutionnalité des lois (à priori ou à postériori) et des engagements internationaux (voir leurs conformités avec la charte suprême de l’Etat). Tel est également le cas des juges administratif (par exemple, en l’absence d’«écran-législatif», le Conseil d’État contrôle la constitutionnalité d’un acte réglementaire et/ou judiciaire statuant en pénal et compétent pour apprécier la constitutionalité des actes administratifs. Tant que la règle de droit n’a pas été modifiée dans les formes prescrites, elle doit être respectée par tous, et même par son auteur.
Que dire donc des parlementaires, notamment les députés ?
Bien qu’élu dans le cadre d’une circonscription, chaque député, compte tenu de la mission de vote de la loi et de contrôle de l’action du Gouvernement dévolue à l’Assemblée nationale, représente la Nation tout entière et exerce à ce titre un mandat national. «La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum» (Constitution de 2001). La Constitution interdit le mandat impératif (constitution de 2001). En conséquence, les députés se déterminent librement dans l’exercice de leur mandat. Actuellement ils sont régis par une loi, votée en avril 2022 qui fait passer le nombre de députés élus au scrutin de liste majoritaire de 105 à 112 et le nombre de députés élus au scrutin proportionnel de 60 à 53. A ce titre, un député est élu au suffrage universel direct pour une durée de cinq ans pour siéger à l’Assemblée nationale. Représentant de la Nation, il participe à l’exercice de la souveraineté nationale.
Même si dans leurs attributions tout député a le droit de poser des questions au Gouvernement. Il évalue les politiques publiques et peut publier des recommandations à leur sujet, même si les députés peuvent déposer une motion de censure contre le Gouvernement, ils ont pour rôle principal de création ou d’acceptation de la création des lois en se basant sur les attributs de la constitution et sur ses exigences dont ils sont les premiers responsables. Ainsi, la première raison d’être du député est qu’il vote la loi et contrôle l’action du gouvernement. Il peut donc déposer des propositions de loi ; en commission, puis en séance publique ;
Enfin, en récapitulatif, la Constitution est un bien précieux. Elle est le garant de notre démocratie et de notre vivre-ensemble. C’est pourquoi il est essentiel de la respecter, de l’obéir et de la défendre, quel que soit le statut qu’on occupe car en protégeant notre Constitution, nous protégeons nos valeurs et notre avenir.
Une Constitution est un ensemble de textes juridiques qui définit les institutions de l’État et organise leurs relations.
Et le peuple dans tout ça ?
Et en l’absence de cette sacralité dans l’organisation des relations, dans le respect de la responsabilité de chacun de ces acteurs, la déferlante populaire risque de s’imposer. Le peuple, dépositaire de tous les mandats électifs pour l’exercice de sa souveraineté, tentera inévitablement de rompre ce sacré contrat social qui le liait aux élus. Ainsi, de statut de population (marquée par passivité), on revient au stade de peuple (actif, impulsif et vigoureux). Cet état de fait est à éviter par respect à la souveraineté nationale, au sacerdoce «gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple». Dans les moments d’interrogations, tous les leviers sociaux doivent être activés pour ne pas sombrer dans l’éternel recommencement.
On nous tue mais on ne tripatouille pas notre Constitution !
LE PRESIDENT MACKY SALL SE REND AUX «SEPT SAGES»
Face à la presse, le président de la République Macky Sall a tenu, hier, un discours de fin de règne. Un discours d’adieu, de pardon, de regrets et d’apaisement d’un président de la République qui avait du mal à comprendre que toute chose a une fin !
Face à la presse, le président de la République Macky Sall a tenu, hier, un discours de fin de règne. Un discours d’adieu, de pardon, de regrets et d’apaisement d’un président de la République qui avait du mal à comprendre que toute chose a une fin !
Un Président qui, poussé par des faucons auxquels il tendait une oreille attentive et plus qu’intéressée, a tout fait pour obtenir un troisième mandat avant de capituler à la fois devant la détermination de son peuple et la réprobation de la communauté internationale. Car le président Macky Sall s’était donné tous les voies et moyens répressifs pour mettre en œuvre ce mandat de trop ! Avec la complicité de ses différents ministres de l’Intérieur et de la Justice qui l’ont aidé à nettoyer tout ce qui aurait pu constituer un obstacle entre lui et le pouvoir à l’horizon 2024. Ainsi commença une véritable traque aux activistes, opposants radicaux, youtubeurs-insulteurs, journalistes de « mauvais augure » et membres de la société civile. Et surtout les leaders de l’opposition radicale ayant à sa tête Ousmane Sonko , une encombrante bête politique qu’il fallait absolument conduire à l’abattoir. D’où le « complot » Adji Sarr suivie d’une condamnation…à vie. Bref, des vagues d’arrestations, une répression policière sans précédent qui a fait des dizaines de morts. Peine perdue puisque toute cette terreur d’Etat n’a pas produit les effets escomptés. La tentative d’arracher un troisième mandat voulu et souhaité par Macky Sall et ses faucons a échoué lamentablement. C’était d’autant plus grave pour eux qu’ils n’avaient préparé aucun dauphin. Justement c’est cette fin de règne non préparée qui a finalement installé le Sénégal dans l’incertitude.
Conseil constitutionnel, unique maitre du jeu électoral
Dans un régime démocratique comme celui du Sénégal, on distingue classiquement trois pouvoirs: les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Cette année électorale en cours offre à chacun de ces trois pouvoirs l’occasion de jouer pleinement son rôle. En ce qui concerne le président de la République Macky Sall, en sa qualité de chef de l’Exécutif, il a joué son rôle en reportant l’élection présidentielle initialement prévue après demain 25 février. Avant cela, il avait déclaré avoir abrogé le décret portant convocation du corps électoral après la mise en place d’une commission parlementaire d’enquête chargée de faire la lumière sur les accusations de corruption portées contre deux juges du Conseil constitutionnel. Une décision d’abrogation surprenante car intervenant à quelques heures seulement de l’ouverture de la campagne électorale.
Une semaine après, le pouvoir législatif qu’est l’Assemblée nationale avait saisi la balle de l’exécutif au rebond pour adopter, sans débat, le projet de loi repoussant l’élection présidentielle au 15 décembre prochain. Un vote qui avait « déchiré » de fait la liste définitive de vingt candidats autorisés à participer à l’élection présidentielle par le Conseil constitutionnel. Hélas, ce même Conseil constitutionnel est revenu à la charge pour arrêter une nouvelle liste de dix neufs (19) candidats suite au retrait de Mme Rose Wardini, histoire de taper sur la table pour se faire entendre de cette façon « Je suis le seul et unique arbitre, maitre du terrain électoral ! »
Malheureusement ces deux pouvoirs (Exécutif et Législatif) avaient dû oublier que l’ultime mot revient au Judiciaire qui reste et demeure le dernier rempart de l’Etat de droit. Et surtout quand il s’agit de contrôler ou se prononcer sur la constitutionnalité des lois, des règlements intérieurs des assemblées, des lois organiques et des engagements internationaux du Sénégal. La preuve par l’annulation du report du scrutin du 24 février que le président Macky Sall avait décrété in extremis. Donc en annulant l’abrogation du décret portant convocation du corps électoral et la loi reportant l’élection présidentielle, le pouvoir judiciaire a arrêté et « menotté » les deux pouvoirs (Exécutif et Législatif) pour montrer sa suprématie. Une suprématie que le président Macky Sall a finalement reconnue hier lors de sa conférence de presse en décidant de se mettre à la disposition du Conseil constitutionnel au soir du 2 avril prochain si son successeur n’est pas élu à cette date.
Avec cette déclaration, le Président Macky Sall abdique en reconnaissant que la justice est le dernier rempart dans une république. Une justice qui, toutefois, ne saurait se placer au-dessus du peuple au nom duquel elle est rendue !
PAR El Hadji Abdoulaye Seck
2017 POUR SAUVER 2024
Lors des élections législatives de 2017, le président Macky Sall avait saisi le CC (24 juillet 2017) pour évoquer « des lenteurs notées dans le retrait des cartes d'électeurs, il y a lieu d'éviter que les citoyens soient privés de leur droit de vote »
Notre article du 16 février 2024 intitulé « pour un scrutin du 3 mars 2024 » proposait aux autorités compétentes une batterie de solutions pour faciliter la tenue de l'élection présidentielle dans le respect de la constitution.
Entre-temps, nous relevons que le Conseil constitutionnel (CC) a sorti la décision 4/E/2024 du 20 février 2024 pour établir la liste des candidats à 19 suite au retrait de madame Rose Wardini. Ainsi, les sages ont stoppé les débats insensés sur l'interprétation de l'Article 34 de la constitution. En effet, le CC balaie toute éventualité de reprise du processus électoral.
Aussi, la diligence dans le traitement de ce dossier (traitement le même jour) montre que les sages prennent la pleine mesure de contexte d'urgence et lance par ricochet un message aux autorités compétentes.
Pour rendre possible la date du 3 mars 2024 conformément à l'article 31 de la constitution, nous rajoutons à notre dernier article une proposition supplémentaire.
Lors des élections législatives de 2017, le président Macky Sall avait saisi le CC (24 juillet 2017) pour évoquer « des lenteurs notées dans le retrait des cartes d'électeurs, il y a lieu d'éviter que les citoyens soient privés de leur droit de vote ».
Les problèmes notés à l'époque devraient être normalement réglés à l'assemblée par la modification des articles L.53 et L.78 du Code électoral. Constatant le caractère exceptionnel de la situation, le président de la République avait donc choisi de contourner la voie législative pour demander, conformément aux dispositions de l'article 92 de la constitution et l'article 2 de la loi organique n2016-23 du 14 juillet 2016, l'avis du CC. Ce dernier avait sorti la décision n8-2017 du 26 juillet 2017 affaire n5-2017 pour dire « à titre exceptionnel, pour les élections législatives prévues le 30 juillet 2017, l'électeur n'ayant pas pu retirer sa carte d'identité CEDEAO faisant office de carte d'électeur, mais dont l'inscription sur les listes électorales est vérifiée, peut voter sur présentation de son récépissé d'inscription [...] ».
Nous pensons que les circonstances actuelles sont plus exceptionnelles que celles de 2017 et le droit de vote, tel évoqué par le président dans sa lettre, ne doit pas être privé aux citoyens. Dès lors, nous invitions le président de la République à saisir le plus rapidement possible les sages du CC pour des dérogations au Code électoral. Une telle approche
permettra d'éviter la lourdeur de la voie législative et de se conformer toujours à l'article 31 de la constitution.
Nous appelons les sénégalaises et sénégalais à parer à toute tentative de confiscation de la volonté populaire. C'est le moment de montrer à une certaine classe politique que la constitution est au-dessus de tout et de tous. Vigilance !
El Hadji Abdoulaye Seck est Chercheur à l'Université du Québec
Le récit quasi identique des prisonniers politiques libérés par vague depuis le 15 février 2024 de la prison dakaroise de Reubeuss, décrivant les conditions de détentions contraires à la dignité humaine, illégales, presque irréelles, rappelle cette maxime disant que le niveau de démocrate d’une société se mesure dans l’état de ses prisons et de ses prisonniers.
Dans ce type de situation, ce n’est certainement pas une commission d’enquête parlementaire qu’il faut, mais une ouverture d’information, même si ce terme est galvaudé pour avoir été utilisé à tort et à travers.
Une particularité : ces prisonniers politiques sont, pour une grande majorité, des militants du parti de l’opposant Ousmane Sonko.
Une autre particularité : la gestion des dossiers judiciaires de l’opposant Ousmane Sonko et les conditions dans lesquelles son parti politique le Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité) a été dissout illustrent la dégradation des libertés publiques au Sénégal.
Ces libertés publiques ont connu, au Sénégal et ce depuis l’alternance de 2000, avec le président Abdoulaye Wade, un affaissement incontestable se matérialisant par l’absence de toute sécurité juridique, c’est-à-dire l’inexistence de toute prévisibilité des décisions de justice, gage de confiance dans la justice, par les citoyens et par les investisseurs.
Cette dégradation continue des libertés publiques entre dans sa phase ultime, sédimentant quasiment tout le système juridique et administratif, ajouter à cela une démystification de la corruption, une vassalisation des pans entiers de la société.
Chose surprenante dans cette dégradation des libertés publiques, le Sénégal avait la particularité d’être signataire de l’ensemble des instruments internationaux protecteurs des droits de l’homme, ayant par conséquent un corpus législatif théoriquement protecteur.
Malheureusement, il faut constater le délitement de l’État de droit, que Léon Duguit, juriste français spécialiste de droit public définissait ainsi : « L’État est subordonné à une règle de droit supérieure à lui-même qu'il ne crée pas et qu'il ne peut pas violer ». L’illustration de ce délitement se constate quand une administration peut refuser d’appliquer une décision de justice pourtant assortie de l’exécution provisoire, sans aucune conséquence.
Ainsi, on constate de manière tout à fait surprenante, la prééminence du politique sur le droit.
Désormais un homme, comme l’opposant Ousmane Sonko, peut être retenu à son domicile par un bataillon de policiers, empêché de rencontrer ses avocats, de sortir et de recevoir y compris de s’entretenir avec ses avocats, sans qu’aucun acte juridique ne lui soit présenté à l’appui de cette limitation de ses libertés de mouvement. Dans un État de droit, ou qui prétend l’être, cet acte aurait été précédé d’une décision juridique ou administrative quand bien même cette dernière serait infondée. Le pire est que des juristes parfois même des agrégés de droit viennent soutenir sur les plateaux de télévision, ou dans les journaux la légalité d’un acte de limitation des libertés d’un individu sans aucune base juridique connue.
La particularité est qu’ici il n’est plus nécessaire de chercher à sauver les apparences, une autorité politique pouvant suppléer l’État dans sa fonction de distribution de la justice.
Cela est inquiétant, tel est d’ailleurs l’illustration du Lawfare, procédé défini comme une « guerre juridique, guerre du droit ou les usages stratégiques du droit est l’utilisation du système judiciaire pour combattre un ennemi… »
Le même opposant Ousmane Sonko, contumax s’est vu opposer le caractère définitif de ladite condamnation motif pris de ce qu’il aurait été arrêté dans une affaire distincte de celle pour laquelle il a été condamné par contumace. Ce moyen juridiquement faux est également défendu et réitéré par des hommes de loi, ce qui inquiète également.
Qu’importe d’ailleurs l’innocence ou non de l’opposant, c’est le procédé, la méthode, le fait de soutenir une telle manière de procéder qui devrait inquiéter.
Il faut donc constater une dégradation continue des libertés publiques et l’absence d’une réelle sédimentation du respect de la règle de droit, puisque l’on ne constate plus la hauteur et la clarté dans les décisions de justice. La doctrine qui est la matière par excellence de l’examen et de l’étude des règles de droit n’a plus aucune valeur dès lors qu’il n’existe plus de ligne directrice, puisque les décisions et l’interprétation de la règle de droit dépendent du justiciable et des relations que celui-ci peut avoir au sein de l’appareil politique.
Quant au législateur, il a certainement des sujets autrement plus importants que la prorogation du mandat du président de la république, ces sujets sont dans le désordre concernent des chantiers en lien avec ses domaines de compétence comme la spoliation des anciens combattants, la restitution de œuvres d’arts pillés, la mise en place d’une législation permettant d’éclairer le massacre de Thiaroye.
Sur la spoliation des anciens combattants sénégalais
Dans un arrêt du Conseil d’état français en date du 30 novembre 2001, il est indiqué clairement la discrimination quant à la cristallisation des pensions militaires des anciens combattants sénégalais en ces termes :
« Considérant que les pensions de retraite constituent, pour les agents publics, une rémunération différée destinée à leur assurer des conditions matérielles de vie en rapport avec la dignité de leurs fonctions passées ; que la différence de situation existant entre d'anciens agents publics de la France, selon qu'ils ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet des pensions de retraite, une différence de traitement….. »
L’ancien combattant ne pouvait donc voir réduire sa pension sur le seul critère qu’il n’est pas français ou ne vit pas en France.
La restitution des œuvresd’art pillées en Afrique
Une grande partie des œuvres d’art pillées en Afrique se trouvent dans les musées et leurs réserves européennes.
Lorsque l’on évoque cette question d’aucuns pensent aux musée et œuvres exposées, rarement à la composition de ces œuvres d’art, c’est-à-dire des restes humains conservés.
Il existe une discrimination dans la recherche et la restitution des œuvres d’art pillés pendant une guerre et celles pillés en Afrique.
Après la seconde guerre mondiale une législation spécifique a été créée en France pour la récupération des biens spoliés, c’est la Commission Mattéoli.
Cette commission a été instituée par arrêté du Premier ministre le 25 mars 1997pour étudier la spoliation des Juifs de France. Les biens sont recherchés et restitués ou exposés publiquement aux fins d’obtenir une plus grande efficience dans ladite restitution, il n’existe aucune loi ou disposition tendant à discuter ou empêcher leur restitution, même les objets acquis pendant une période suspecte font l’objet de recherche toujours aux fins de les rendre à leurs légitimes propriétaires.
Un enseignement est également dispensé pour reconnaitre les périodes ou les œuvres d’art ne pouvaient être ni achetées ni obtenues de quelque manière que ce soit puisque leurs propriétaires n’étaient pas dans un état leur permettant soit de vendre soit de transmettre leurs biens sans aucune influence.
C’est ainsi qu’au sein des beaux-arts les étudiants doivent apprendre à reconnaitre ces biens qui ne pouvaient circuler légalement.
Concernant les biens spoliés en Afrique l’approche est différente
Pour les œuvres d’art spoliés pendant la colonisation, c’est une autre approche intellectuelle.
Les autorités françaises indiquent qu’elles auraient souhaité restituer les œuvres pillées, mais malheureusement des Lois empêchent cette restitution. Autrement dit il existe en France des lois qui font que tous les objets volés, pillés et obtenus en Afrique francophone ne peuvent être rendus à leurs légitimes propriétaires puisque d’une part eu égard à leur valeur se pose la question de leur conservation et si ces objets restitués dans leur lieu d’origine n’étaient pas conservés correctement ?
D’autre part, se pose la question de leur inaliénabilité, au motif que les lois sur la conservation des œuvres d’art et la législation sur les musées ne permettent pas de les restituer quel qu’en soit le mode d’acquisition.
Ainsi, en France il faut une loi pour la restitution des objets volés et pillés pendant la période coloniale, de même qu’il faut également une loi pour la restitution des restes humaines.
Le massacre de Thiaroye
Le massacre de Thiaroye a eu lieu sous le commandement du Général Marcel DAGNAN, né en 1885, décédé en 1978, à l'âge de 93ans.
Les associations de défense des familles des tirailleurs attendent de la France l’autorisation de procéder aux fouilles du site à la recherche de trace de ce massacre sans que des dispositions juridiques locales n’encadrent cette affaire.
L’appareil judiciaire et législatif sénégalais ; pays abritant le lieu de déportation des esclaves : la ville de Gorée, le lieu du massacre des tirailleurs africains : la ville de Thiaroye, aurait pu avoir d’autres préoccupations en lieu et place de la surveillance des opposants politiques, à la place de veiller à l’application de la jurisprudence du conseil d’état français sur le paiement des pensions des anciens combattants ou encore le respect des conventions bilatérales comme celle relative à la circulation et au séjour des personnes signée à Dakar le 1er août 1995, publiée en France par le décret n°2002-337 du 5 mars 2002, et entrée en vigueur le 1er avril 2002 qui ne trouve aucune application en droit interne français.