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30 novembre 2024
Opinions
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AES - DESORMAIS UN MILITAIRE, UNE DECENNIE ?
Constamment pressés de tenir des élections, Goïta,Traoré et Tiani sont aussi encouragés par d’autres à marcher sur les pas de Jerry Rawlings. Désormais sans la pression de la CEDEAO y a-t-il risque ? Voici ce que disent des jeunes des pays de l'AES
Le retrait collectif de leur pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest le dimanche 28 janvier, ouvre la possibilité au capitaine Ibrahim Traore, le colonel Assimi Goita et le General Abdourahmane Tiani, de prolonger les transition a la tête de leur pays sans avoir à devoir se justifier devant qui que ce soit. Dans ce numéro d’OPINIONS SUR RUE, nous avons posé la questions a des jeunes ressortissants de ces pays sur ce risque. Suivez leurs réponses dans la vidéo tournée dans les rues de la capitale sénégalaises.
Depuis la survenue des coup d'État au Mali, au Burkina, en Guinée, puis au Niger, la Communauté économique n'a de cesse d'appeler les militaires à définir un calendrier clair et d'organiser des élections pour transmettre le pouvoir aux civils.
Même si certaines juntes au pouvoir s'étaient donne des calendriers, elles n'ont pas semblé en mesure de les respecter étant donné que les militaires sont engagés dans des chantiers colossaux d'autodétermination et de lutte contre le terrorisme, la grande gangrène.
Dans leur mission de restauration de la dignité de leurs pays respectifs, Assimi Goita, Ibrahim Traore et Abdourahmane Tiani sont fortement encourages par des activistes panafricanistes engages pour l'indépendance totale et la décolonisation des États africains. Ces militants de la cause noire invitent expressément les militaires à ne pas se préoccuper d'élections ou pas de sitôt, qu'ils poursuivent les réformes engagées vers l'indépendance et l'affranchissement de l'impérialisme occidental de leurs pays et de lutte contre le terrorisme.
Partant, ils peuvent attendre 10 ans avant de tenir les élections. Mais puisque depuis dimanche, ces pays regroupes au sein de l'Alliance des États du Sahel se sont officiellement retires et de manière fracassante de la CEDEAO, dimanche dernier, de départ pourrait être l'occasion s'ils le désirent de s'incruster au pouvoir sans avoir à subir la pression ni de la CEDEAO ni de la communauté dite internationale.
Que pensent les jeunes maliens, nigériens et burkinabés de cette perspective? Est-ce que le retrait des pays de l'AES de la CEDEAO est un risque de voir les militaires rester plus longtemps au pouvoir sans transmettre le pouvoir aux civils a l'issu d'élections ? Nous avons recueilli leurs avis dans les rues de la capitale sénégalaise. C'est dans OPINIONS SUR RUE. (AfricaGlobe Tv).
Par Fadel DIA
A QUAND UN SOMMET AFRIQUE-MONACO ?
C ’est devenu une mode, ou une épidémie : des dirigeants, des pays du Nord majoritairement, convoquent à titre individuel, l’ensemble des chefs d’Etats africains à un sommet au cours duquel ceux-ci font face à un unique interlocuteur
C ’est devenu une mode, ou une épidémie : des dirigeants, des pays du Nord majoritairement, convoquent à titre individuel, l’ensemble des chefs d’Etats africains à un sommet au cours duquel ceux-ci font face à un unique interlocuteur, ce qui ne les empêche pas de se précipiter toutes affaires cessantes au lieu choisi pour abriter la rencontre, sans même savoir quelquefois quel est l’ordre du jour !
Cela s’appelle pourtant un Sommet. Il y eut donc un Sommet Etats-UnisAfrique, un Sommet Russie-Afrique, un Sommet France-Afrique, un Sommet Chine-Afrique …Il y aura peut-être un Sommet Luxembourg-Afrique ou, pourquoi pas, un Sommet Monaco-Afrique. Le dernier en date de ces sommets déséquilibrés s’est tenu à Rome et l’hôtesse de la rencontre n’est autre que la présidente du parti d’extrême droite et nationaliste conservateur Frères d’Italie ! L’Italie de Giorgia Meloni au secours de l’Afrique, qui l’eut cru ? Il y a en effet une certaine indécence, pour des chefs d’Etats africains, à aller répondre à l’invitation de celle qui est la tête de proue du populisme triomphant en Europe, une sorte d’Éric Zemmour en jupes et en moins fripé, dont le parti a pour devise « Dieu, Famille et Patrie » et qui reconnait avoir « un rapport serein avec le fascisme ». Mme Meloni se proclame « italienne et chrétienne » et ses thèmes favoris pendant la campagne électorale qui l’a portée au pouvoir étaient l’arrêt « du remplacement ethnique qui est en cours en Italie », le blocus naval des bateaux d’immigrés venus d’Afrique et, bien sûr, la lutte contre l’invasion islamique. Du Zemmour pur sucre ! Les chefs d’états africains peuvent-ils dès lors répondre à sa convocation sans, au préalable, exiger quelques explications ? Peuvent-ils, raisonnablement, espérer obtenir une aide généreuse et désintéressée auprès d’un gouvernement qui proclame l’état d’urgence parce que quelques milliers de leurs concitoyens, paumés, sans armes et sans bagages, ont débarqué sur ses cotes après avoir parcouru la route migratoire la plus meurtrière du monde ? Le tapis rouge déroulé à leur honneur n’aurait-il pas d’autre but que de permettre à l’Italie de s’assurer une meilleure place dans l’exploitation des énergies fossiles de leurs pays et de favoriser l’implantation de ses entreprises en Afrique ? Ne s’agit-il pas tout simplement d’une vaste opération de manipulation et d’escroquerie ? Comment, de manière générale, comprendre que les chefs d’Etats africains qui traînent souvent les pieds pour participer aux grandes réunions organisées sur le continent, par l’Union Africaine ou les organisations régionales, obéissent au doigt et à l’œil aux injonctions de leurs homologues occidentaux pour participer à des marches de soutien à un journal, à des manifestations mondaines ou à des conférences qui ne sont souvent que des parlottes infructueuses?
Mais, me dira-t-on, foin de suspicions et un peu de réalisme que diable ! Alors, mettons de côté les sentiments et parlons affaires : l’Italie, c’est combien de divisions ? La plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a et il en est de même de l’Italie, malheureusement, comme dirait un de mes ainés qui aimait se jouer de la langue française, l’Italie peut peu. Son PIB représente à peine plus de quatre fois celui de l’Afrique du Sud et le « Plan Mattei »- (le nom n’a pas été choisi au hasard puisque c’est celui du fondateur de la plus grande entreprise pétrolière d’Italie)- concocté par Mme Meloni et encore nébuleux, promet aux 1.400.000.000 Africains une aide de 5,5 milliards d’euros…sur cinq ans, soit environ 3500 milliards de francs CFA, soit approximativement la moitié du budget du Sénégal pour 2024, soit 2,5 francs CFA pour chaque Africain…sur 3 ans ! Si l’on considère que la plupart des chefs d’Etats africains se sont rendus à Rome à bord de leurs avions particuliers et si l’on tient compte du prix de l’heure de vol d’un jet (7000 euros /heure pour un modèle ordinaire) on peut dire que le coût de la participation de certains d’entre eux pourrait dépasser la quote part qu’ils peuvent espérer tirer de la dotation italienne, ce qui serait un comble !
Pour avoir une meilleure idée des 5,5 milliards promis par l’Italie il suffit de les comparer à l’assistance dont bénéficie l’Ukraine. Pour la seule année 2023, l’Union Européenne, dont l’Italie est la troisième puissance, a fourni à ce pays, deux fois moins peuplé que la R.D. du Congo, une aide financière et humanitaire de plus de 20 milliards d’euros, non comprise l’aide apportée aux réfugiés ukrainiens, non comprises les aides ponctuelles ciblées ainsi que celles des institutions financières européennes, non comprises les contributions bilatérales et, bien évidemment, non comprise l’aide militaire : plus de 20 milliards d’euros qui s’ajoutent aux 100 milliards versés par les Etats-Unis depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine. Au moment où l’Italie promettait au continent africain 5,5 milliards d’euros sur cinq ans l’Union Européenne en promettait dix fois plus à Kiev pour quatre ans. L’aide PROMISE (car l’histoire nous a appris que les pays du Nord tiennent rarement leurs engagements dans ce domaine), par Mme Meloni n’est pas seulement insignifiante par rapport aux besoins de l’Afrique, elle a été conçue pour servir les intérêts du donateur. C’est ce dernier qui en a défini les priorités, sans tenir compte des vœux des bénéficiaires, et plus de la moitié de ses moyens vient du Fonds italien pour le climat et pourrait servir à financer de nouvelles explorations pétrolières et gazières en Afrique. Enfin, et c’est sans doute ce qui rend dérisoire ce sommet, les observateurs italiens les mieux placés estiment que l’Italie, vieillie, endettée et bureaucratique, est tout simplement incapable d’exécuter ses engagements.
Pourquoi donc faisons-nous si peu cas de la sagesse de nos Anciens ? Un proverbe africain nous enseigne que nous ne devons éprouver aucune honte lorsque notre hôte nous sert un repas dans l’écuelle de son chien. Ce qui serait humiliant en revanche c’est que, le sachant, nous consommions ce repas ! Nous ne pouvons pas contraindre les pays occidentaux à nous apporter leur aide, en signe de solidarité humanitaire et en reconnaissance de la part que nous avons prise dans leur développement, mais nous avons au moins la capacité de refuser les restes de leurs repas. Il nous manque seulement la volonté et c’est là que le bât blesse !
Texte Collectif
AU NOM DE L’IDÉAL RÉPUBLICAIN ET DÉMOCRATIQUE, LE SÉNÉGAL DOIT ALLER À L’ÉLECTION
La confiscation du droit de suffrage des Sénégalais pourrait faire peser des périls irréversibles sur les institutions de la République, garantes de notre contrat social, mais aussi sur la concorde nationale et la paix civile
Dans une République démocratique, l’élection présidentielle est une échéance cruciale car le gardien de la Constitution, clef de voûte des Institutions et chef suprême des armées tire toute sa légitimité du suffrage de ses concitoyens.
C’est pourquoi, les délais d’organisation de l’élection sont gravés dans le marbre de la Constitution. Et c’est pourquoi, nous intellectuels, universitaires et membres de la société civile, profondément attachés à la préservation des acquis démocratiques du Sénégal, nous opposons à toute idée de report de l’élection présidentielle prévue le 25 février 2024 et par là-même à tout décalage de la campagne électorale du premier tour qui doit débuter le 4 février 2024.
Nous exigeons de monsieur Macky Sall, président de la République du Sénégal jusqu’au 3 avril 2024, de placer « la patrie avant le parti », de « veiller au respect scrupuleux du calendrier républicain en rejetant catégoriquement, tout projet ou tentative de report de l’élection présidentielle » et enfin de prémunir notre pays du chemin de « l’anarchie et du chaos ».
La confiscation du droit de suffrage des Sénégalais pourrait faire peser des périls irréversibles sur les institutions de la République, garantes de notre contrat social, mais aussi sur la concorde nationale et la paix civile.
Nous exhortons par conséquent l’Administration électorale, la Justice et les forces de défense et de sécurité à faire passer l’intérêt supérieur du Sénégal avant toute autre considération. Il leur revient de garantir sans faiblesse la loyauté, la régularité et la sincérité du scrutin sur toute l’étendue du territoire national ainsi que dans toutes les représentations diplomatiques et autres lieux où votera la diaspora.
Nous convions tous nos compatriotes à s’ériger contre une haute trahison qui achèverait, in fine, un coup d’état contre la République et la démocratie.
Prof. Souleymane Gomis, FLSH, UCAD
Prof. Mbissane Ngom, USF SJP, UGB
Prof. Abdou Aziz Diouf, FSJP, UCAD
Prof. Diouma Kobor, UFR ST, UASZ
Prof. Amadou Fall, FASTEF, UCAD
Prof. Babou Diène, UGB,
Prof. Massamba Diouf, FMPO, UCAD
Prof. Cheikh Thiam, Amherst college, USA
Prof. El Hadji Samba Ndiaye, FSJP, UCAD
Prof. Sidy Alpha Ndiaye, FSJP, UCAD
Prof. Daouda Ngom, FST, UCAD
Prof. Aliou Thiongane, FMPO, UCAD
Prof. Abdoulaye Keita, IFAN, UCAD
Prof. Mouhamed Abdallah Ly, IFAN, UCAD
Prof. Cheikh Omar Thiam, FLSH, UCAD
Prof. Mbaye Diagne Mbaye, UASZ
Prof. El Hadji Alioune Fall, FST, UCAD
Prof. El Hadji Babacar Ly, UFR SAT, UGB
Prof. Bakary Manga, FST, UCAD
Prof. Mouhamadou Thiam, EPT, UCAD
Dr. Ndèye Astou Ndiaye, FSJP, UCAD
Dr. El Hadji Malick Sy Camara, FLSH, UCAD
Dr. Salif Baldé, ESEA, UCAD
Dr. Abdoulaye Mbaye, EPT, UCAD
Dr. Jean Domingo, FST, UCAD
Dr. Mamadou Seydou Ba, UFR ST, UASZ
Dr. Arfang Ousmane Kémo Goudiaby, UFR ST, UASZ
Dr. Lamine Badji, UNCHK
Dr. Aliou Sène, FASTEF, UCAD
Dr. Lamine Diamé, FST, UCAD
Dr. Mohamed Badji, FASEG, ucad
Dr. Mamecor Faye, FST, UCAD
Dr. Boubacar Camara, UFR ST, UASZ
Dr. Seydi Mansour Sy Seck, FST, UCAD
Dr. Ndéné Mbodji, FLSH, UCAD
Dr. Ibrahima Niang, FLSH, UCAD
Dr. Mouhamed Lat Diop, EBAD, UCAD
Dr. Moda Dieng, Enseignant-chercheur, Montréal
Dr. Cheikh Tidiane Hanne, Géographe, Genève
Dr. Bocar Kane, Biologiste, Paris
Dr. Pape Chérif Bertrand Bassène, Akandijack, FLSH, UCAD
Dr. Mamadou Kabirou Gano, FASTEF, UCAD
Dr. Oumar Dia, FLSH, UCAD
Dr. Thierno Ly, IFE, UCAD
Dr. Mouhamadou Boye, UFR SJP, UGB
Dr. Gorgui Diouf, FST, UCAD
Dr. Joseph Sambasene Diatta, UFR ST, UASZ
Mme Oumy Diakhaté, DEMSG/IA de Rufisque
M. Youssouf Mansal, Ingénieur Génie civil
M. Souleymane Diop, Journaliste et consultant en communication
Dr. Ndiamé Diop, inspecteur d’éducation à la retraite
Dr. Mamadou Thior Maître de conférences assimilé FLSH/UCAD
parAmadou Tidiane Wone
QUI A INTÉRÊT À JOUER AVEC LE FEU ?
Une pétition circule au Sénégal visant à stigmatiser les étrangers sur le territoire. Alors que la jeunesse aspire à une Afrique sans frontières, certains cherchent à ressusciter les clivages du passé colonial
J’ai vu circuler une pétition que je considère comme une insulte à l’histoire africaine, mais aussi un défi à l’avenir du continent.
Le texte de la pétition commence comme suit :
« Nous, citoyens sénégalais, souhaitons attirer votre attention sur une préoccupation croissante : la présence d’étrangers, notamment les Guinéens, sur notre sol sans carte de séjour. Cette situation a des conséquences néfastes sur notre économie et notre vivre-ensemble. »
Dans la forme, il eut été plus judicieux de dire : « Nous, les signataires… ». Par respect pour tous les sénégalais qui ne se retrouveraient pas dans une telle cabale. Ensuite, le « notamment guinéens » éclaire sur les intentions inavouables de stigmatisation d’une communauté à laquelle nous lient l’histoire, la géographie et des liens de sang inextricables.
Tant que se susurraient des allusions perfides et machiavéliques qui cherchent a sèmer la discorde entre des populations que tout rassemble, on pouvait se boucher les oreilles et … le nez, pour se protéger des odeurs pestilentielles du chauvinisme, du racisme et du régionalisme étriqué.
Mais, au fil du temps, force est de constater une montée pernicieuse des périls. Il est temps, de prendre les responsabilités que nous impose l’Histoire, notre mémoire, mais surtout notre ardent désir d’avenir.
Pour rappel, le poète David Diop qui a chanté l’Afrique de manière impérissable, est décédé le 29 août 1960 des suites du crash du vol qui le ramenait en Afrique. Il a trouvé la mort en allant répondre à l’appel du Premier chef de l’État de la jeune République de Guinée, aux prises avec l’ancienne puissance coloniale pour avoir eu l’outrecuidance de voter NON au référendum de 1958. Son exemple avait été suivi par plusieurs sénégalais et d’autres ouest-africains. A la suite, la Guinée sera mise sur embargo. Une guerre économique sans pitié lui sera livrée pour avoir aspiré à la liberté et exercé son droit de vote pour dire OUI ou NON.
Le Président Sékou Touré, cerné de toutes parts, avait lancé un appel à toute la Diaspora africaine et invité les cadres « techniquement compétents et politiquement conscients » selon ses termes, à venir se mettre au service de la Révolution guinéenne. Son appel fut entendu par plusieurs cadres d’origine sénégalaise dont les descendants sont aujourd’hui des guinéens de chair et de sang. David Mandessy Diop était de ceux-là…
Au moment où la jeunesse africaine exprime son rêve pressant d’une Afrique libre, décomplexée et conquérante, il est pour le moins fâcheux d’entendre des voix diviser les africains sur la base des frontières dessinées à Berlin en 1885 ! Ces frontières qui ont séparé des frères et sœurs de lait. Ces frontières dont le tracé défie le bon sens et qui contribuent, pour ne pas dire suscitent l’insécurité en Afrique. Ces frontières qui paralysent les voies du développement de notre Continent !
Que de vies sacrifiées depuis, que d’espoirs ruinés à l’autel d’ambitions contrariées par un leadership indigent, myope et désespérant…
C’est pourquoi, je suis triste de constater avec quelle légèreté, et au mépris des sacrifices consentis par plusieurs générations d’hommes et de femmes pour allumer la flamme du panafricanisme, des individus piétinent le rêve d’un Continent sans frontières intérieures et où vivent et circulent, en paix, des hommes et des femmes que leur race distingue et désigne du doigt.
Les chantiers au quotidien de l’Afrique, malmenée par une surexploitation outrancière de ses ressources naturelles, minières et humaines, ne sauraient souffrir de tensions sociales supplémentaires.
Voila pourquoi je ne signerai pas cette pétition !
Et j’invite tous nos compatriotes qui seraient tentés de la signer, à réfléchir aux conséquences incalculables de quelques traits apposés sous un texte qui va susciter la haine et la division.
Pour une Afrique unie, libre et réconciliée !
par Zak Alfa Diallo
QUAND LE FOOT ET LES RÉSEAUX SOCIAUX CACHENT UNE XÉNOPHOBIE RAMPANTE
La popularisation de la parole xénophobe qui indexe le Peul Fouta ou l’autre comme responsable de son malheur, ce mépris des Peuls Fouta ou « Ndring » relèvent d’une mécanique d’extrême droitisation de la société sénégalaise
Elle est loin l’époque où les tribunes débordaient d’une saine rivalité lors des matches entre les Lions et le Syli national de Guinée. Loin, cette ère, quelque peu bon enfant, où même un derby entre le grand Hafia Football Club de Conakry et le Jaraaf de Dakar, quoique transpirant les petites querelles idéologiques entre Senghor et Sékou Touré, était avant tout une fête fraternelle du football ouest-africain.
C’est vrai qu’entre temps, il y a les réseaux sociaux, son côté trivial et bestial, l’amplification digitale de la rivalité et le fait que des imbéciles, qui n’osaient pas s’exprimer en public, ont désormais une liberté totale et des moyens de communication à leur disposition, véhiculant le mépris voire la haine entre les supporters des deux pays frères.
La défaite inattendue du Sénégal face à la Côte d’Ivoire en 8èmes de finale de la CAN 2023 a déclenché une série de réactions exacerbées de la part des Camerounais, de Congolais et du voisin guinéen. Comme du reste l’ont fait les aficionados sénégalais lors des victoires de la bande à Sadio Mané contre le Syli et les Lions indomptables. Mais apparemment pour certains Dakarois, des Guinéens sont « ingrats » de chambrer les Sénégalais, ce peuple de la « Téranga » accueillant des « millions de Guinéens ».
Parmi les perles avancées sur les réseaux sociaux, certains reprochent aux Guinéens d’avoir « jubilé (sic) lors de la défaite du Sénégal contre la Côte d’Ivoire ». « Ce sont des choses qu’aucun étranger n’ose faire nulle part dans le monde », s’est avancé un éclairé du web.
« Les Guinéens raflent maintenant tout ce qu’il y a des terrains ou de maisons à vendre en banlieue dakaroise. Dans moins de dix ans, ils constitueront un tiers de la population du Sénégal », note également ce « démographe » des quartiers, insistant sur cette future « bombe démographique ».
Pétition pour exiger une carte de séjour aux Guinéens au Sénégal
« Nous n’avons rien en commun avec la Guinée et sincèrement je ne veux rien avoir en commun avec ces gens-là », fait remarquer un autre inculte à la critique facile. D’autres iront même plus loin en prônant le boycott du Guinéen, avec comme « première étape, d’arrêter d’acheter dans les boutiques de ces minables ». Ce sont-là certains des sortilèges lus sur Seneweb.
Cette phraséologie de tous les excès reproduit finalement un discours du désordre, une version tropicalisée de la soi-disant théorie du « grand remplacement », avec une population « sénégalaise » de souche menacée par les Peuls originaires de la Guinée Conakry. « Faites un tour dans les hôpitaux notamment à Abass Ndao, vous verrez que 95% des accouchements, ce sont des Guinéennes », fait remarquer ce « Zemmour » de la Gueule Tapée qui se fait courageusement appeler « Boy Dakar » sur les réseaux sociaux.
Et dans ce combat pour véhiculer cette idéologie si chère à Renaud Camus, certains illuminés du web, de sinistres personnages et « influenceurs du dimanche » en réalité, ont ainsi lancé une pétition pour le vote d’une loi dont l’objectif hautement salvateur est d’exiger la carte de séjour aux seuls Guinéens. Au mépris des textes de la CEDEAO.
Cette pétition d’une abjection sans nom est le dernier acte d’une xénophobie rampante au pays de Senghor. Le Peul-Fouta bashing ne cesse de prospérer ces dernières années, de fleurir comme une mauvaise herbe domestiquée par ces nouveaux chantres du chaos, héritiers de cette inculture tout en paille et en flammes notée lors des tragiques événements sénégalo-mauritaniens de 1989. Et parfois à des niveaux insoupçonnés.
De plus en plus, la parole xénophobe se libère et même, parfois, se banalise sur certaines plateformes et réseaux sociaux. Les sites d’info et les réseaux sociaux sont finalement devenus un défouloir pour l’intolérance et la haine.
La tactique nauséeuse ou quand le Premier ministre est désigné Amadou Oury Ba
Une situation qui n’épargne même pas de hauts fonctionnaires et certains responsables de l’opposition, qui ne cessent d’appeler le candidat du pouvoir, Amadou Oury Ba ou Amadou Diouldé Ba. L’allusion est claire et la tactique nauséeuse. Dangereuse. Certaines franges « patriotes » ou « nationalistes » profitent d’ailleurs de cette séquence sportive ivoirienne pour tenter de diaboliser le Premier ministre. Comme le dit si bien un ami et frère sénégalo-guinéen, le match de foot et les incidents rapportés sont juste des prétextes qui exacerbent une intolérance à peine enfouie.
Par ailleurs, c’est comme si l’odeur du pétrole et du gaz récemment suscite un espoir de prospérité démesuré chez certains compatriotes qui pensent que les Peuls Fouta vont les envahir davantage si un autre peul prend le pouvoir.
En fait, l’habitude fait tomber dans une triste banalité cette xénophobie rampante. Au point de ne choquer personne. Surtout dans une société dans laquelle l’art de l’esquive fait recette.
A ce sujet, j’ai été choqué par le silence de justes quand un ancien parlementaire s’est avancé, un dimanche 31 mai 2021, dans un délire verbal qui justifie son ignorance derrière des airs savants. « Prenez aussi l’exemple des Guinéens, leur reviennent les petites boutiques de quartier alors qu’ils n’habitent pas ici. Au moindre accroc, ils vont rentrer chez eux », avait-il ânonné. En toute impunité.
Alors comment s’étonner de voir le nombre exponentiel de « likes » chez « Tons TikTok » ou de reprises lors de passages nauséabonds de l’infect Tahirou Sarr dans certains médias en ligne.
L’art de l’esquive
Au rythme où cette « bêtise humaine » gagne en viralité, l’urgence réclame ne plus brider notre capacité d’indignation, de s’ériger en toute responsabilité et en toute intelligence face à cette ignominie galopante dont les conséquences pourraient se révéler désastreuses. Car au lieu d’esquiver, rien de plus indispensable que de démasquer la xénophobie dans toutes ses formes. La tâche est d’autant moins aisée que, de nos jours et dans nos pays africains, personne n’ose s’afficher ouvertement xénophobe.
Dès lors, ce chancre ne défigure clairement aucun visage et, à la moindre trace du mal, des alibis innombrables sont à la disposition de chacun. Or, sous la surface polie et les convenances, nos sociétés de Saint Louis au Cap Skirring, et de Bakel à Dakar ne manquent pas de se multiplier les signes et les gestes de l’exclusion, ou d’entretenir préjugés d’où peut s’épanouir la tige vénéneuse de cette xénophobie anti peule.
La popularisation de la parole xénophobe qui indexe le Peul Fouta ou l’autre comme responsable de son malheur, la critique avec comme moteur la citoyenneté, ce mépris des Peuls Fouta ou « Ndring », comme certains les appellent parfois avec dédain, relèvent forcément d’une mécanique d’extrême droitisation de la société sénégalaise. S’en prendre aux Peuls Fouta, c’est oublier la sénégalité de millions d’entre eux sur des « supposés critères parfaitement aléatoires ». Ce qui constitue un grand danger pour l’unité nationale.
Plus largement, ces propos nauséabonds distillés ici et là sont finalement le fruit « d’une modernité qui nie notre culture et son histoire ». Tout simplement, et oubliant au passage que la « Téranga » est le socle de la nation sénégalaise.
Pour les Sénégalais d’origine guinéenne, ainsi que tous les sénégalais épris de paix, c’est un devoir de lutter contre ces discours haineux, qui constituent une menace sérieuse pour la paix et la cohésion sociale que nous chérissons tant. Car le pays de Senghor et Cheikh Anta Diop mérite un vivre-ensemble harmonieux et heureux, où la diversité s’exprimerait dans une belle intelligence sociale. Et sportive.
Zak Alfa Diallo est Journaliste, Suisse romande.
PAR Khandiou
FIN DE L'ILLUSION D'UNE CEDEAO DES PEUPLES
EXCLUSIF SENEPLUS - Depuis quelques années, on assiste à la montée du nationalisme dans nombre d’États membres. Au niveau de l’élite politique, on note une absence de leadership au sein de cette organisation créée depuis 1975
La décision est qualifiée par une grande partie de l’opinion de malheureuse, de n’être ni dans l’intérêt de ceux qui restent dans la CEDEAO, ni dans l’intérêt de ceux qui sont sortis, le Niger, le Burkina Faso et le Mali regroupés dans un cadre dénommé l’Alliance des Etats du Sahel (AES).
Les conséquences lourdes dont les civils seraient les premières victimes sont souvent évoquées. Comme elles l’ont été déjà depuis l’embargo imposé à l’AES au lendemain des putschs militaires.
Quid des coups d’Etat constitutionnel et institutionnel qui ont fait le lit de tout ce désordre en Afrique de l’Ouest déjà fortement éprouvé par le péril terroriste, les changements climatiques, les épidémies, etc. ? Nous en reparlerons plus bas.
La CEDEAO des peuples clamée sur tous les toits est une réalité de façade. D’abord l’épidémies d’Ebola en 2015 concentrée notamment en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone, puis la pandémie à Covid-19, ont montré à quel point le multilatéralisme et la solidarité ne sont qu’un vœu pieux. Au contact de la réalité, les faits sont tout autres.
Ne nous voilons point la face.
Depuis quelques années, on assiste à la montée de ce qui s'apparente à du nationalisme dans nombre d’États membres de la CEDEAO. La démographie galopante, combinée à la pauvreté à cause du chômage des jeunes notamment, irritent de plus en plus les populations. Les exemples de scènes de xénophobie en Afrique du Sud contre les Nigérians, et plus près de nous, les mêmes actes entre Burkinabè et Ivoiriens, en sont quelques illustrations. La circulation des personnes et des biens, obligatoire en vertu du protocole de la CEDEAO sur la question, ne connait pas une application rigoureuse. La célèbre phrase qui veut qu'"en Afrique on est partout chez soi" s’effrite chaque jour un peu plus. Le nationalisme est de plus en plus chuchoté, avec pudeur, même dans le cercle des intellectuels africains qui ne croient presque plus aux idéaux d’une Afrique unie. La vocation première de la CEDEAO, soulignons-le, était de mettre en œuvre des politiques cohérentes pour une intégration économique de ses Etats membres.
Au niveau de l’élite politique, on note une absence de leadership au sein de cette organisation créée depuis 1975. S'y ajoute une division issue, entre autres, et plus récemment, des sanctions de la CEDEAO contre les régimes militaires dans la région. Des sanctions qui visent d’abord les populations civiles, faut-il le rappeler.
Mais comment ses militaires sont parvenus à s’imposer dans leur pays respectif et semblent recueillir l’adhésion et le soutien des populations ? Les scènes de liesse populaire qui accompagnent les chutes de régimes civiles, au Burkina Faso, au Niger et au Mali renseignent suffisamment sur la rupture profonde et le manque de confiance de ces populations vis-à-vis de leur gouvernant, de l’élite politique plus généralement.
Le protocole additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance, pourtant document de référence, est peu ou pas considéré par les dirigeants qui, au lieu de mettre en place des mécanismes juridiques, réglementaires et législatifs pour son application effective, trouvent toujours les moyens de rester au pouvoir au-delà de leurs mandats légaux. Des actes anticonstitutionnels qui ne sont presque jamais condamnés par la CEDEAO désormais considérée comme une organisation moribonde, au service de puissances étrangères, la France plus précisément.
Constat : les mécanismes régionaux au sein de la CEDEAO ont montré leurs limites dans de nombreuses situations. Souvenons-nous-en, alors que le Mali et tout le Sahel étaient menacés en 2012 par des groupes armés terroristes, l’organisation n’a pas pu apporter avec célérité une réponse forte et coordonnée à la hauteur de la menace, montrant ainsi des défaillances profondes dans les systèmes de défense collective. Ce qui a été à l’origine de l’intervention de la France rejointe par d’autres puissances et finalement de ce bousculement de forces étrangères dans le Sahel.
Que nos dirigeants se le tiennent pour dit. L’Afrique, sa population, ses armées, ne nourrissent plus de complexes vis-à-vis de l’Occident. Les temps ont changé. Plus rien ne se décidera sur le dos des Africains de plus en plus conscients que tout ce qui se fait sans eux est contre eux, conscients également que leurs nombreuses ressources minérales et leur forte et jeune démographie pèsent sur la balance.
C’est aussi une question de dignité.
Mon avis est qu’il nous faut de grands chocs pour après rebâtir de bonnes choses avec et pour nos populations. La souveraineté ne se proclame pas. On doit aussi mettre en place des réformes endogènes, structurantes et résilientes pour faire face aux chocs exogènes. Nous devons prendre notre destin en main. Ce ne sera pas facile. Nous n'en verrons certainement pas les résultats immédiats. Mais l’avenir et la dignité des générations futures en dépendent.
Par Alpha Amadou SY,
L’HOMOLOGIE ENTRE LE PARTI ET L’ÉTAT, UNE DES SOURCES ORIGINELLES DES PERVERSIONS DEMOCRATIQUES
Dans nos travaux antérieurs, nous faisions remarquer que l’élection de Maître Wade à la magistrature suprême, en mars 2000, était plus que le simple produit d’un mécanisme électoral.
Dans nos travaux antérieurs, nous faisions remarquer que l’élection de Maître Wade à la magistrature suprême, en mars 2000, était plus que le simple produit d’un mécanisme électoral. Elle était plutôt la résultante d’un mouvement social qui débordait le cadre d’un scrutin dont il se servait comme prétexte pour déployer son cours sur l’intégralité de l’espace politique.
Ainsi, au-delà de l’évènement politiquement chargé que constituait le verdict des urnes, cet avènement de Me Wade à la tête de l’Exécutif sénégalais portait la marque indélébile d’une maturation citoyenne. En fonction de cette lecture, nous nous étions posé ces questions : le pouvoir, issu de l’alternance, pourra-t-il toujours être en adéquation avec la mouvance citoyenne en tenant la promesse des fleurs ? L’esprit universel sera-t-il à même de triompher des intérêts domaniaux ? Quid de l’éthique politique dont la centralité dans le jeu démocratique rend intelligible la ferveur citoyenne qui a accouché du « séisme » de mars 2000 ?
Le président Wade semblait prendre la pleine mesure des fortes attentes de ses concitoyens quand il déclarait, comme s’il était élu par tout le continent, la fin de la gestion solitaire du pouvoir en Afrique. Mais son discours, très tôt confronté au magnétisme du pouvoir, révéla son caractère davantage mystifié que mystificateur.
Dès la constitution du nouveau gouvernement, nous avions émis la crainte de voir le pouvoir reconduire cette homologie entre le parti politique et l’État qui a été la quintessence du mode de gouvernance des socialistes défaits. Et Me Wade, en intégrant les états-majors des formations politiques significatives du Front pour l’Alternance dans l’espace du pouvoir, avait hérité de cette homologie qui a été à la base de cette politique désastreuse sanctionnée sans ambages le 19 mars 2000 par les citoyens-électeurs du Sénégal.
Cette relation de correspondance entre le Parti et l’État, une constante déterminante durant les quarante ans de règne des socialistes, a connu deux formes d’expression différenciées. Sous Senghor, c’est la position au sein du parti qui détermine le statut dans l’administration. Les principaux leaders socialistes étaient placés dans les plus haute sphères de l’État Cette configuration gouvernementale, propre au Parti- État, est pratiquement inversée avec l’avènement de l’ÉtatParti dont le cycle est ouvert par le duo Abdou Diouf/Jean Colin et clos avec le tandem Abdou Diouf/ Ousmane Tanor Dieng.
Le pouvoir de Me Wade a hérité de cette deuxième forme d’homologie dont la caractéristique essentielle est de coopter des cadres et des technocrates qui sont ensuite mis en demeure de se trouver une base politique. Cette forme d’homologie sécrète un présidentialisme d’autant plus accentué que le PDS qui en hérite ne bénéficie ni de la même pratique militante que le parti socialiste ni de la même régularité du fonctionnement de ses structures dirigeantes. Pire, le parti libéral a terriblement souffert de son identification à la personne de Me Wade.
Révélatrice, à ce sujet, est la fulgurante promotion politique du fils du président Wade. La volonté de faire accéder Karim Wade à l’espace du pouvoir a trouvé son répondant dans cette dynamique qui a éjecté du PDS des cadres précieux pour le parti libéral. Au nombre de ceux-ci Aliou Sow de la direction du Mouvement des Jeunesses Travaillistes et Libérales et Aminata Tall, militante de première heure, et capitalisant une riche expérience gouvernementale avant et sous l’alternance, responsable du Mouvement national des femmes.
La dernière victime de cette stratégie de mise à mort politique de tout libéral soupçonné de s ‘opposer à l’accès de Karim Wade au sommet a été Macky Sall qui avait été ministre, puis premier ministre, directeur de campagne et enfin président de l’Assemblée nationale.
Le projet, qualifié de dévolution monarchique du pouvoir, avait alimenté un puissant courant de résistance porté par des militants d’autant plus remontés qu’ils rappelaient, pour reprendre Abou Abel Thiam, que Karim Wade « n’avait pas voté pour son père en 2000, tout simplement parce qu’il n’avait pas qualité d’électeur, ayant obtenu sa carte d’identité seulement en 2002 ».
Et le double recours au parachutage et au tripatouillage constitutionnel pour forcer le destin politique de son fils a été sanctionné par le verdict sans appel de la rue le juin 2011, confirmé par les urnes en mars 2012 !
À la suite de cette débâcle électorale, Macky Sall a accédé à la Magistrature suprême. Cette élection avait été jugée d’autant plus salutaire pour la consolidation de l’État de droit que le nouvel élu avait vécu auparavant l’expérience traumatisante de l’arbitraire politique. Mieux, le fait que son élection a été portée par une dynamique des forces coalisées contre les dérives d’autoritarisme avec son lot de privations, de sacrifices et même de morts d’homme avait conféré une légitimité certaine à cet optimisme.
Dans cet esprit, Macky Sall avait déclaré, à haute et intelligible voix, vouloir s’en limiter à deux mandats, conformément à l’esprit de la Constitution. Et cet engagement était rythmé par un slogan d’une forte charge républicaine : la patrie avant le parti !
Bien plus, dans l’euphorie de sa coalition victorieuse et dans une ambiance particulièrement marquée par les effets salvateurs des luttes citoyennes, Macky Sall reconfrontera davantage les citoyens en dénonçant les transhumants ravalés au rang de… rats.
Toutefois, cette volonté si clairement affichée d’être en phase avec l’idéal originel de l’alternance politique n’a pu résister à la logique pouvoiriste. Ce retour du même a été largement favorisé par la reconduction par Macky Sall de l’homologie entre le Parti et l’État. Précisément, en optant de gouverner, en plus de sa coalition primitive « Macky 2012 » , avec tous ceux qui ont apporté ne serait-ce qu’un moindre concours à son élection, notamment toutes les autres forces constitutives de BBY, le leader de l’APR s’était engagé dans les sentiers battus par ces prédécesseurs.
Ce changement de cap a non seulement créé de la frustration au sein des « militants de la première heure », mais a éloigné le Président des fortes attentes citoyennes. Ainsi, en plus de l’enterrement progressif du slogan la partie avant le parti, les acteurs de cette pernicieuse mobilité politique, dénommée transhumance, furent lavés à grande eau sous prétexte qu’il faut bien trouver les moyens de massifier la mouvance présidentielle. S’y ajoute que, sous la poussée de ses camarades sans doute les moins soucieux du respect de son code d’honneur, la question de la durée de son premier mandat de même que celle du nombre avaient fini par faire monter l’adrénaline au sein du landerneau politique.
Dans ce contexte apparait toute la fragilité des multiples coalitions constituées en dehors de repères idéologico-politiques, lesquels leur garantissent solidité et engagement. Ainsi, les membres de la majorité, laquelle ne manque certainement pas d’identités remarquables, ne sont, en vérité, fidèles à Macky Sall que dans la simple mesure où ils ont ou espèrent avoir des postes de sinécure. Dans cette logique, la figure du militant est minorée au profit du manœuvrier politique qui entend se faire payer à la tâche !
Le triomphe de ce mode de gouvernance rend, au moins en partie, intelligible toute cette mise en scène tragico-comique dont l’Assemblée nationale du Sénégal est encore une fois de plus le théâtre. Après le face à face de tous les dangers des policiers et des gendarmes en 1987, se dessinent, sous nos yeux, les conditions d’un duel inédit entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel. Sans préjuger de l’issue de ce contentieux désastreux pour les institutions, il est clair que l’alliance entre le PDS et BBY pour mener une enquête sur les conditions du rejet de la candidature de Karim Wade et, par ricochet, mettre un terme un processus électoral, atteste d’une profonde déchirure qui n’a pas encore livré toute sa vérité. S’agit-il d’une stratégie pour réaliser la volonté prêtée au chef de l’État de rester encore au pouvoir ? Est-il question d’une fronde contre le choix d’Amadou Ba ? Le couts politique héritera de ces questionnements.
En tout état de cause, l’unité de BBY est d’autant plus en sursis que le Président Macky Sall, pour avoir renoncé au pouvoir, n’intéresse plus aucun manœuvrier politique !
En définitive, il se donne alors à lire que l’APR, à l’instar du PDS des flancs duquel elle est sortie, ne s’est pas préoccupée de ces questions majeures, relatives au présidentialisme, à la représentation démocratique, aux rapports entre l’État et le Parti, et aux réseaux de prébendes. Ce faisant, le système politique sénégalais draine les mêmes tares non sans donner l’impression de faire toujours un pas en avant et deux pas en arrière. Et l’avenir politique interroge car même si des offres politiques existent, elles ne sont pas, pour une raison ou une autre, soumises à l’examen des citoyens-électeurs. En lieu et place se constate un basculement vers une juridicisation à outrance des questions politiques avec le risque de voir les Sénégalais se détourner du jeu politique.
Par Kaccoor Bi
«CES AUTRES RENTIERS DE LA TENSION»
Ce pays qu’on leur a confié dans la paix, ils doivent avoir l’élégance et la courtoisie de nous le rendre dans le même esprit et partir.
Le drame, en Afrique, c’est de voir des aspirants au pouvoir se métamorphoser sitôt élus ou après quelques années d’exercice du magistère suprême. L’homme au visage d’agneau peut se révéler être en moins de temps qu’il n’en faut en méchant loup. Surtout si l’on arrive avec l’idée de régler des comptes à des gens avec qui on a eu des contentieux antérieurs ou dont le crime est de vouloir être Califes à la place du Calife que vous êtes devenu.
Dans les régimes dictatoriaux des premières années de nos glorieuses indépendances, où l’on faisait peu cas du respect des droits de l’Homme, on coupait les têtes ou faisait disparaitre ces empêcheurs de gouverner sans avoir de comptes à rendre.
Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux et la toute-puissance des organisations de défense des droits de l’homme, c’est l’exil forcé ou la prison pour faire taire ces messieurs et dames qui ont le toupet de s’opposer aux nouveaux monarques au pouvoir. Ça vous fait penser à un pays à la démocratie très chahutée depuis quelques années ?
On peut bien se désoler de la trajectoire prise par ce charmant pays qui vit des moments d’incertitudes à quelques heures du démarrage de la campagne électorale et où l’on agite sournoisement l’idée d’un probable report de la présidentielle. Un report motivé par des calculs politiciens fort douteux. Report qui se justifie d’autant moins dans un pays ou aucune institution n’est en crise et où tout marche même si on peut déplorer les erreurs d’appréciation des Juges du Conseil constitutionnel concernant la candidature de Karim Wade.
Le chaos que l’on agite dans des discours martiaux et virils pourrait ne point venir d’opposants ou de populistes que l’on toise avec la haine au cœur comme s’ils n’étaient pas des Sénégalais. Il pourrait plutôt venir de gens qui n’ont cessé de déclarer qu’ils ne laisseraient pas ce pays, qu’ils croient être leur propriété, à des aventuriers qui se trouvent être des membres de la plus grande formation politique du pays. Un parti dont ils n’espéraient guère voir un des responsables faire valider sa candidature pour la présidentielle. C’est dans ces moments troubles que l’on nous tympanise avec l’idée d’un report du scrutin et la formation de je ne sais quel gouvernement d’union nationale de transition.
A tous ces « rentiers » de la tension – l’expression est empruntée à un proche du Chef — qui se sont réfugiés dans les dédalles du pouvoir. A tous ces gens, donc, on est tenté de demander d’arrêter de jouer avec le feu après avoir fait traverser le pays dans des zones de turbulences à cause de leurs calculs machiavéliques. Ce pays qu’on leur a confié dans la paix, ils doivent avoir l’élégance et la courtoisie de nous le rendre dans le même esprit et partir.
Par Moussa KAMARA
AUX URNES, CITOYENS !
Nos politiciens, encore eux, se manifestent en voulant faire différer l’élection présidentielle. Pour dire vrai c’est une infime partie de l’opposition, précisément le Pds, qui se démène ainsi pour faire revenir dans le jeu son candidat recalé...
Nos politiciens, encore eux, se manifestent en voulant faire différer l’élection présidentielle. Pour dire vrai c’est une infime partie de l’opposition, précisément le Pds, qui se démène ainsi pour faire revenir dans le jeu son candidat recalé par le Conseil constitutionnel. Ils oublient que ce parti a perdu de sa superbe depuis qu’il a été jeté dans l’opposition par Benno Bokk Yakaar.
Le puissant Secrétaire Général National des années de braise a pris de l’âge et tous ses ultimes projets ont été contrariés. Son fils biologique lui a succédé mais a causé le départ des fils putatifs et autres ténors du parti. Ceux qui sont restés dans le parti le sont plus par affinité avec la famille ou pour avoir bénéficié des largesses de Wade Président. Encore que, pour ces derniers, la reconnaissance du ventre n’est pas toujours mise en bandoulière !
Les caciques du Pds d’antan ne sont plus à l’Assemblée nationale. Où les jeunes d’aujourd’hui, très radicaux, voulant tout changer tout de suite, n’ont aucune idée des confrontations Ps/Pds d’antan avec des débateurs de très haute facture et maîtrisant leur sujet, qu’ils soient dans le pouvoir d’alors ou dans l’opposition. Cette époque est sans commune mesure avec ce que l’on voit et entend de nos jours. A l’époque il y avait aussi des analphabètes comme aujourd’hui, mais ils étaient très discrets et sans Internet. Aujourd’hui qu’il y a la traduction simultanée et la recherche du buzz, la parole n’est plus distribuée, elle s’arrache. Notre société se retrouve en miniature à l’Assemblée. Toutes les vilénies dans cette société peuvent se constater dans cette Assemblée. Après on viendra nous dire que nous n’avons que les dirigeants et députés que nous méritons.
M’enfin… Le Pds pourra-t-il réussir son projet de faire participer Karim Wade à l’élection présidentielle ? Un vaste chantier mené par des hommes et femmes pas forcément du même calibre que leurs devanciers. Faut savoir que les bisbilles entre le Pds et le Conseil constitutionnel ne datent pas d’aujourd’hui.
Ceux qui défendent le plan, pour ne pas dire projet, du Pds sont moins lourds, moins audibles, moins convaincants et moins hardis. La force du Pds, c’était sa capacité de mobilisation. Qui pouvait remplir tous les terrains vagues de Dakar où se tenaient ses fameux meetings. Avec l’effritement qui a vu ses cadres essaimer selon leurs intérêts vers d’autres cieux, ce parti est moins prégnant, plus absent que présent. Et malgré les foucades de son intrépide et frasque députée, Karim Wade est hors course. Et nous irons tous voter à Dieu ne plaise le 25 février.
par Oumou Wane
NOTRE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET ASSEMBLÉE NATIONALE DÉSHONORÉS
Ce séisme contre notre République et nos institutions, n’a d’autre but que de rebattre les cartes pour déboulonner ou repositionner certains candidats. Lorsque je regarde ces gens, je me demande bien qui représentent-ils ?
Les débats violents sont un classique de la vie politique au Sénégal. Clashs et coups d’éclat à l’Assemblée nationale, menaces en pleine séance parlementaire ne sont pas rares chez nous, mais les agressions physiques n’ont pas leur place dans un débat politique sain.
L’atmosphère délétère qui régnait au sein de l’Assemblée nationale sénégalaise ce mercredi 31 janvier 2024, a en effet transformé l’hémicycle en scène indigne d’affrontements verbaux et physiques.
La honte et le déshonneur sur nos institutions démocratiques ont atteint leur paroxysme lorsque Mame Diarra Fam a dépassé toute bienséance, en interceptant physiquement Thierno Alassane Sall pour l’empêcher de s’exprimer, outrepassant ainsi toutes les attentes de respect et de décence dans un environnement politique de plus en plus haineux et choquant.
Mais posons-nous la question de ce que cache cette confrontation explosive. Au-delà de l’incident lui-même, cette confrontation ne révèle-t-elle pas, outre les tensions croissantes au sein de la vie politique sénégalaise, une tentative d’user de manœuvres pour empêcher un vote démocratique ? D'une stratégie consciente de déstabilisation de l’appareil politico-judiciaire sénégalais et d’un appel au chaos démocratique ?
Là, dans une Assemblée nationale vernaculaire, sans coup férir, une députée drapée dans ses lâchetés et calculs politiciens accuse de conflits d’intérêts et de soupçons de corruption certains membres du Conseil constitutionnel, la plus haute institution de notre pays. En clair, selon certains députés, ils auraient été corrompus pour faire invalider certaines candidatures. Les accusations sont graves et ont toutes les chances de se retourner contre leurs auteurs sous le trait d’une plainte en bonne et due forme !
Dieu merci, Thierno Alassane Sall a échappé ce mercredi à une agression et sur ces entrefaites, le président de l'Assemblée nationale a finalement suspendu la séance.
Ce qui me choque, me meurtris et m’inquiète c’est qu’il se dit que ce séisme contre notre République et nos institutions, n’a d’autre but que de rebattre les cartes pour déboulonner ou repositionner certains candidats. Lorsque je regarde ces gens, je me demande bien qui représentent-ils ?
Au Sénégal, la polémique enfle concernant un potentiel report de l’élection présidentielle du 25 février prochain, ce que Macky Sall lui-même a réfuté. Ce que le Premier ministre Amadou Ba et candidat à la magistrature suprême, a clairement écarté, précisant que les autorités administratives sont déjà à pied d’œuvre pour poursuivre le processus électoral.
Alors, commission d’enquête parlementaire ou pas, que nous retrouvions vite confiance en nos institutions, que nous reparlions à nouveau de l’avenir qui nous attend et que la campagne présidentielle commence pour que nous débattions enfin sur le fond et le sens des idées et de la politique.