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2 avril 2025
Opinions
Par Dialo DIOP
QUI DONC A PEUR DU SUFFRAGE UNIVERSEL EN AFRIQUE ?
Tel un poing dans un gant de velours, Macky Sall appelle l’opposition véritable à un énième « dialogue national », tout en la réprimant férocement et en la menaçant aujourd’hui d’un possible coup d’Etat militaire (1/2)
Première partie : Senghor, père du système du parti-État
Tel est pris qui croyait prendre, dit la fable !
Ivre de son pouvoir absolu, le président sortant Macky Sall, usant et abusant de la force et de la ruse, est tombé dans son propre piège. Il est en effet passé maître dans l’art pervers de dire et de se dédire, de faire puis de défaire, de signer telle quelle la Charte de gouvernance démocratique des Assises Nationales comme candidat, avant d’y annexer des réserves fictives une fois installé au palais présidentiel, prétextant qu’il ne s’agit « ni de la Bible, ni du Coran », de se proclamer « gardien de la Constitution » tout en la foulant aux pieds chaque fois que de besoin, etc.
Sentant sa fin prochaine, voilà qu’il s’affiche désormais en apprenti-dictateur, évoluant ouvertement vers une dictature déclarée et assumée : tel un poing dans un gant de velours, il appelle l’opposition véritable à un énième « dialogue national », tout en la réprimant férocement et en la menaçant aujourd’hui d’un possible coup d’Etat militaire !
Mettant ainsi brutalement fin à la prétendue « exception sénégalaise » en Afrique, avec l’effondrement désormais évident de la vitrine trompeuse du tant vanté « modèle de stabilité démocratique », au terme d’une longue agonie de plus d’un demi-siècle…
Une rétrospective historique s’impose, même réduite à la seule dimension politico-électorale de la question démocratique en Afrique, avec le Sénégal pris pour « type de description »
Rappelons d’abord qu’au temps de la domination coloniale directe, le droit de vote était réservé à une minorité de « citoyens français » (dont une poignée d’autochtones et de métis), l’immense majorité des « sujets indigènes » en étant « légalement » exclue par le sinistre Code de l’Indigénat, qui ne sera aboli qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale (1946).
Par la suite et jusqu’à la cascade des fausses indépendances octroyées, consécutives à l’unique et retentissant « Non » historique de Sékou Touré au pseudo-référendum de Charles de Gaulle (1958), c’est le régime hybride du « double collège » électoral qui va prévaloir.
Depuis lors, nous continuons à subir une domination indirecte de type néocolonial. Au sein de l’ancien empire français d’Afrique, le mode privilégié d’accession au pouvoir d’Etat, et de sa transmission, reste le modèle dévoyé d’Haïti, première république libre, c’est-à-dire non esclavagiste, des Amériques et de la Caraïbe (1804) : coups d’Etat à répétition, avec ou sans assassinat du président déchu, élections truquées et donc violentes, dictature du clan Duvalier (père et fils) avec ses milices armées (Tonton macoutes), trafics en tous genres, etc.
Signalons à titre de comparaison, qu’aux États-Unis d’Amérique, après l’abolition formelle de l’esclavage à la fin de la Guerre de Sécession (1865), les Africains déportés vont devoir poursuivre leur lutte d’émancipation durant un siècle supplémentaire avant d’arracher le droit de voter (1965), un an après l’obtention des droits civiques ayant mis fin à la ségrégation raciale dans les lieux publics ! Tandis qu’en France républicaine, le même droit de vote n’a été reconnu aux femmes qu’en 1947 !
Soulignons, par ailleurs, que le plus ancien mouvement africain de libération, l’ANC d’Afrique du Sud fondé en 1912, (avant la révolution bolchévique en Russie) fut le dernier à accéder au pouvoir en n’arrachant le droit de vote au régime d’apartheid afrikaner qu’en 1994 (après la désintégration de l’URSS) ! Un scrutin sans listes électorales ni carte d’électeur, qui s’est déroulé paisiblement dans l’ensemble du pays, sauf au Kwazulu Natal dont le chef Buthelezi s’est désespérément opposé au principe majoritaire du suffrage universel : une personne, une voix.
Pour en revenir au Sénégal officiel, chacun sait qu’après le « Oui » frauduleux lors du référendum gaulliste et l’éclatement provoqué de l’éphémère Fédération du Mali, le 20 août 1960, c’est l’élimination machiavélique de l’aile nationaliste du premier gouvernement de l’Union Progressiste Sénégalaise (UPS), incarnée par le Président du Conseil Mamadou Dia et celle de ses compagnons d’infortune, victimes du faux coup d’Etat du 17 décembre 1962, qui va faire basculer durablement le pays dans l’impasse du néocolonialisme senghorien.
Dès 1963 et dans la foulée du pseudo-référendum constitutionnel truqué, l’élection présidentielle senghorienne du 1er décembre va se solder par le massacre de centaines de citoyens par l’armée, à partir d’hélicoptères, aux Allées du Centenaire notamment…
Une tragédie occultée dans la mémoire collective, marquant pourtant l’avènement du système de Parti-Etat, qui perdure jusqu’à nos jours. Ce monolithisme politique va se doubler d’un monolithisme syndical, au lendemain de la grève générale des étudiants et des travailleurs de mai-juin 1968, sanctionnée par la dissolution de l’UNTS au profit de la CNTS, adepte de la « participation responsable ». Ainsi, ce que l’on pourrait appeler la première année blanche scolaire et universitaire au Sénégal date-t-elle de 1969. Mais, la persistance de cette crise politique, économique et sociale va contraindre le président Senghor d’abord à se doter d’un Premier Ministre (Abdou Diouf : 1970), puis à tolérer la création d’un parti non pas d’opposition, mais dit de « contribution » (PDS d’Abdoulaye Wade :1974). Il va, par contre, s’opposer jusqu’au bout à la reconnaissance du Rassemblement National Démocratique (RND) de Cheikh Anta Diop, de 1976 à 1981, n’hésitant pas à recourir à une « loi constitutionnelle » sur mesure, selon laquelle il n’existerait que trois courants de pensée politique dans le monde contemporain: le « socialisme démocratique» pour son propre parti devenu socialiste (PS), le « libéralisme démocratique » imposé au PDS Me Wade, qui se réclamait jusqu’alors du « travaillisme », et enfin le « marxisme-léninisme » proposé au RND.
Si Me Wade s’est plié à ce diktat idéologique, Cheikh Anta Diop s’y refusa catégoriquement, s’étonnant de l’absence du panafricanisme dans cette « nomenclature idéologique » ad hoc !
Tout au contraire, fort de son bon droit et récusant l’option de la clandestinité, il va poursuivre au grand jour l’édification d’un parti de masse. N’hésitant pas à interpeller le chef du parti-Etat par lettre ouverte ou à lancer le journal du RND, Siggi qui deviendra Taxaw, afin d’échapper à une interdiction pour faute d’orthographe ; ou bien à pétitionner massivement, à l’intérieur du pays comme à l’étranger, pour la légalisation du parti, ou encore à pousser à la fondation du premier Syndicat des Cultivateurs, Éleveurs et Maraîchers du Sénégal, qui fonctionne encore près d’un demi-siècle plus tard…
Par ailleurs, il convient de relever qu’avant sa démission pour prendre une retraite politico- administrative en France, le proconsul français Senghor a pris le soin d’installer au pouvoir son Premier Ministre Abdou Diouf, à la faveur d’une autre manipulation constitutionnelle par voie parlementaire, (article 35 ancien) lui permettant d’achever le mandat en cours…
Cependant, dès son accession au sommet de l’Etat, le successeur désigné fit mine de prendre le contrepied de son bienfaiteur. Notamment, en initiant une certaine ouverture du jeu politicosyndical et médiatique. Au-delà d’un multipartisme élargi, et non pas intégral, inauguré par la reconnaissance du RND, il va favoriser un pluralisme syndical ainsi qu’une relative liberté de la presse tant écrite qu’audio-visuelle, notamment à la radio-télévision d’Etat. Malgré ces avancées démocratiques limitées, cet héritier politique de Senghor va suivre ses pas pour l’essentiel ; d’abord en persistant dans la violation délibérée de l’article 32 ancien de la Constitution, qui interdisait le cumul des fonctions de chef de l’Etat et de chef de Parti : un « maa tey » fondamental, base même du système du Parti-Etat et source de tous les abus de pouvoir. Cette disposition légale restera néanmoins lettre morte jusqu’à la survenue de l’alternance en l’an 2000. Sauf que le nouveau président Wade, en bon politicien opportuniste, la contournera en supprimant purement et simplement cette incompatibilité dans sa Constitution de 2001 ! De plus, cette dernière, qui a institué le droit à la marche pacifique, sera par la suite annulée de facto, par l’interdiction de manifester au centre-ville de Dakar sur simple arrêté de son ministre de l’Intérieur du moment, Ousmane Ngom…
De même, l’on ne saurait passer sous silence la tragédie du 16 février 1994 qui, au terme d’un meeting légal tenu à Gibraltar sur demande du RND, dans le cadre de la Coordination des Forces Démocratiques (CFD), donnera lieu au massacre d’au moins une demi-douzaine de policiers innocents par des éléments infiltrés, au Triangle Sud : un crime de sang demeuré impuni à ce jour…
Enfin et surtout, après vingt ans au pouvoir, le président Abdou Diouf va solliciter un septennat supplémentaire, ce qui lui sera fatal à l’issue d’un second tour remporté par une coalition de coalitions de l’opposition au sein d’un « Front pour l’Alternance » (FAL 2000).
A l’image de son prédécesseur, il va s’offrir une retraite dorée en métropole, tous deux embrigadés au service de la « défense et de l’illustration » de la culture française !
Dès son avènement tardif, le prétendu « Pape du Soppi », d’emblée ivre de pouvoir, va réduire le changement promis au simple renouvellement partiel du personnel politicien dirigeant, tout en pratiquant sans aucune gêne une continuité aggravée dans sa politique tant intérieure qu’extérieure. Deux exemples suffisent pour en témoigner :
D’une part en début de mandat (2002), survient le naufrage du bateau le Joola, avec environ deux mille morts. Ce qui en fait la plus grande catastrophe de l’histoire de la marine marchande en temps de paix, quoique le navire fût sous commandement militaire…
Ce traumatisme massif a marqué la rupture du contrat de confiance qui, croyait-on, liait le père Wade à « son peuple ». En tout cas, une cassure brutale aggravée par la gestion calamiteuse des suites humaines et administratives de la tragédie, avec la tardiveté des secours, le refus de renflouer l’épave et surtout le traitement scandaleux réservé au rapport accablant de la commission d’enquête.
D’autre part en fin de mandat, cet adepte autoproclamé du « panafricanisme » va jeter le masque lors de l’agression tripartite franco-anglo-étatsunienne (OTAN) contre le chef de l’Etat libyen, Mouammar Kadhafi (2011). D’abord en sabotant la mise en œuvre de la résolution consensuelle du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine en faveur d’une médiation entre belligérants libyens, ensuite et surtout en conduisant son infâme mission à Benghazi, accompagné de son fils Karim et sous escorte aérienne militaire française, avec une couverture en direct des radio-télévisions françaises…De ce fait, le père Wade aurait dû être traduit devant la Haute Cour de Justice pour flagrant délit de haute trahison de l’Afrique. Deux décennies plus tard, les peuples soudano-sahéliens continuent de payer un lourd tribut humain, économique et écologique pour cette forfaiture demeurée impunie.
Pourtant, ce n’est pas ce crime aux conséquences dévastatrices pour notre continent qui va coûter son trône au président Wade, mais plutôt sa tentative à peine voilée d’organiser une succession de type dynastique en faveur de son fils bien-aimé. Ceci, sous le couvert d’une énième manipulation de la Constitution via la Chambre d’enregistrement parlementaire.
Il aura fallu le soulèvement massif du peuple de Dakar et sa banlieue, un mémorable 23 juin 2011, autour de la bien nommée Place de Soweto (une fois n’est pas coutume !), où siège l’Assemblée nationale, pour le contraindre à renoncer à son projet de révision scélérate. Ce désaveu populaire du président sortant, briguant un troisième mandat inconstitutionnel, se verra confirmé quelques mois plus tard par une humiliante défaite électorale au second tour, face à une nouvelle coalition de coalitions qui, ironie de l’histoire, bénéficiera à un de ses anciens poulains, injustement banni !
Les candidats doivent accepter la réutilisation des bulletins déjà imprimés avec la date du 25 février 2024. Les candidats doivent accepter de comprimer le délai de la campagne électorale. Le CNRA doit pouvoir aussi s'ajuster
Le 15 février 2024, les sages du Conseil constitutionnel (CC) ont sauvé l'image du Sénégal en prononçant une décision historique. Il y a quelques jours, nous rappelions que le CC faisait face à sa propre jurisprudence, la décision n1-C-2016 du 12 février 2016.
Cette dernière a permis, entre autres, au CC d'asseoir les bases légales de sa décision. En effet, le considérant 14 de la décision du 15 février 2024 paraphrase le considérant 32 de celle de 2016 stipulant que « ni la sécurité juridique, ni la stabilité des institutions ne seraient garanties si, à l'occasion de changements de majorité, à la faveur du jeu politique ou au gré des circonstances notamment, la durée des mandats politiques en cours, régulièrement fixée au moment où ceux-ci ont été conférés pouvait, quel que soit au demeurant l'objectif recherché, être réduite ou prolongée ».
Sur la base donc des arguments servis par les sages, nous pouvons dire que le Sénégal rentre dans une phase de stabilité politique et institutionnelle avec la protection définitive du nombre de mandats ainsi que leur durée. À partir de ce moment, les politiques devront éviter toute tentative de torpillage de la charte suprême, source d'instabilité et de pertes en vies humaines et économiques. Aussi, nous constatons que les sages ont majestueusement évité le piège de choisir une date pour le scrutin, ce qui conforterait la thèse de la crise institutionnelle (agitée depuis quelques jours au plus haut sommet de l'État) car le Code électoral stipule à l'article L63 que la date du scrutin est fixée par décret. Les magistrats ont opté pour le respect du principe sacrosaint de la séparation des pouvoirs.
Conformément à l'article 92 de la Constitution, les décisions du CC ne sont susceptibles d'aucune voie de recours. Dès lors, il convient de faire certaines propositions pour faciliter la tenue de l'élection présidentielle.
1/ Contrairement à une certaine manipulation, le CC n'a pas invité les acteurs politiques au dialogue. En effet, le considérant 20 parle « d'autorités compétentes », celles qui sont uniquement titulaires de charge publique. Dans ce sens, nous saluons l'option prise par le président de la République d'opter pour des consultations déjà entamées. Nous lui
recommandons juste de les limiter strictement aux candidats retenus afin de pouvoir respecter l'article 31 de la Constitution et d'arrêter la date du dimanche 3 mars 2024 ;
Comme lors des élections législatives de 2017, nous proposons aux candidats des mesures d'adaptation :
2/ Les candidats doivent accepter la réutilisation des bulletins déjà imprimés avec la date du 25 février 2024 ;
3/ Les candidats doivent accepter de comprimer le délai de la campagne électorale ;
Le CNRA doit pouvoir aussi s'ajuster en :
4/ permettant aux candidats de faire une intervention globale sur la chaîne nationale des journées perdues. À titre illustratif, la perte de 10 jours de campagne équivaudrait à avoir 3*10 minutes (30 minutes) de temps de parole pour rentrer dans le fonds des programmes politiques.
Somme toute, nous nous devons de trouver ces compromis le plus rapidement possible pour montrer à l'opinion internationale que nous sommes capables de transcender les clivages quand le vert, l'or avec son étoile et le rouge sont en train de vaciller.
El Hadji Abdoulaye Seck est chercheur à l'Université du Québec
INQUIÉTUDES ET LIBRE OPINION D’UN MILITANT DES DROITS DE L'HOMME
EXCLUSIF SENEPLUS - Si aucune date n’est fixée pour le jour de l’élection, la situation sera davantage plus confuse et les effets pervers du coup d’Etat institutionnel avorté se feront sentir
Le Sénégal a été considéré comme le pays le plus stable en Afrique, en raison de ses valeurs républicaines et de son ancrage à la démocratie ainsi qu'à l'État de droit.
ous les régimes politiques qui se sont succédé ont pu conjurer les crises politiques, grâce à l'usage d'une violence d'État strictement proportionnée et nécessaire au rétablissement de l'ordre et de la sécurité publique.
Celui qui nommait aux emplois civils et militaires disposait de la force publique, mais avait toujours à l’esprit la primauté du droit, l’impérieuse nécessité du respect de l'équilibre des pouvoirs, la cohésion sociale dont le cousinage réel ou mythique était un socle garant de la paix et de la stabilité.
La paix et l’image du Sénégal étaient à leurs yeux inestimables ; la concertation, le dialogue national ou la médiation valaient leur pesant d'or et rétablissaient toujours une entente durable ainsi que la cohésion.
Malheureusement, le pays a sombré dans les bas-fonds d’une déchéance démocratique, de l’effondrement de l’État de droit, de la dégénérescence de l'ensemble de ses institutions,de la décadence culturelle et, jamais le peuple sénégalais n’a été victime d’autant de cruautés et d'atteintes aux libertés, dans Les libertés publiques et le droit à la justice, la liberté d’expression jusqu’à la liberté de penser, la liberté et le droit d'association, ont été confisqués par des hommes politiques et des magistrats ; le sang a coulé à flots pour la confiscation du pouvoir, une ligue des institutions ayant à n’en pas douter une unité de dessein s’est créée et renforcée, pour contenir le désir, le choix et l’aspiration des Sénégalais à une rupture et à un changement structurel.
L’appel au dialogue ne doit nullement occulter la face hideuse de Janus, et être une occasion pour continuer intelligemment de laisser la bride autour du cou d’innocentes victimes, avec des libertés provisoires en lieu et place de non-lieux qui restituent la dignité humaine et mettent fin à l'injustice collective parce que, vécue et ressentie par tous ceux qui, au Sénégal comme hors de nos frontières, ont suivi les événements douloureux.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a une fois de plus, raté son rendez-vous avec le peuple, lequel lui assigne le devoir de veiller sur le respect de la Constitution et des valeurs qu'il a lui même bien énoncées à l’Attendu 19 de sa décision 1/C/24, rendue le 15 février 2024, car l’attendu 20 suivant laisse un goût d’inachevé et une incertitude, qui ne pérennisent pas la relative stabilité observée par les citoyens depuis qu’il a été saisi de la question sous-jacente du respect du calendrier électoral.
La réponse à cette dernière question était pourtant tranchée et scellée, lorsque le Conseil a annulé la loi votée par l'Assemblée nationale et le décret abrogeant celui qui avait fixé la date des élections au 25 février 2024, car le décret d’abrogation disparaissait avec ses effets juridiques, et celui abrogé était désormais censé ne l’avoir jamais été.
Ainsi, vu l’intérêt majeur du contentieux qui lui était soumis, ainsi que ce qui pouvait être considéré comme une évidence à savoir que la loi votée par l'Assemblée nationale était incompatible et inconciliable avec d'autres dispositions de la Constitution et la sacralité de la disposition tripotée, le conseil Constitutionnel a aussi tardé à rendre sa décision, alors que l’hypothèse d’un second tour n’est pas exclue par la loi électorale, même si les Sénégalais ont massivement exprimé leur choix d’en finir avec le système actuel dès les premières heures du scrutin.
Si le scrutin est transparent et loyal, le Conseil constitutionnel n’aura probablement pas à proclamer les résultats définitifs au-delà du 2 avril 2024, ni à s’inquiéter d’un peu probable second tour.
Par ailleurs, le 20e attendu de la décision du Conseil constitutionnel est une boîte de Pandore. Si aucune date n’est fixée pour le jour de l’élection conformément aux lois en vigueur et pour la reprise à zéro de la campagne électorale le 25 février 2024, la situation sera davantage plus confuse, chaotique, et les effets pervers du coup d’Etat institutionnel avorté se feront sentir, sans compter le risque pour le nouveau président élu de ne pas présider la fête de l’indépendance du 4 avril 2024.
Les peuples mûrissent toujours des épreuves cruelles que leur font endurer ceux qui ont la charge et la mission de les servir. Ils apprennent de leurs erreurs dans le choix de leurs dirigeants politiques et le mode de désignation de leurs juges.
Ciré Cledor Ly est avocat à la Cour.
PAR Tierno Monénembo
ILS SONT DEVENUS FOUS
L'Afrique est à bout de souffle. Fomenter des coups d'État, tripatouiller les institutions ou saborder une organisation telle que la Cedeao par les temps qui courent revient à lui servir le verre du condamné
À Niamey, à Ouagadougou et à Bamako, les juntes au pouvoir quittent la Cedeao (pour aller où, mon Dieu ?) sans donner un préavis et sans même respecter le délai d'un an prescrit par la convention. À Conakry, le lieutenant-colonel Mamadi Doumbouya, récemment autoproclamé général d'armée (excusez du peu !), pourchasse les journalistes et les activistes de la société civile après avoir coupé à coups de ciseaux le réseau Internet.
Au Sénégal, Macky Sall reporte la présidentielle, initialement prévue ce 25 février, et s'offre un an de plus dans le but manifeste de ruser avec le tabou du troisième mandat.
À croire qu'ils se sont passé le mot : « Défonce le plafond et moi je brise le mur ! Et toi, mets le feu à la toiture pendant que cet autre pulvérise la véranda ! » La maison Afrique est en démolition et cette fois-ci, ce sont des Africains qui sont les maîtres d'œuvre de cette lamentable entreprise.
Double sacrilège
Ce qui se passe en ce moment équivaut à un double sacrilège. L'unité et la démocratie, ces deux belles causes que l'on croyait sinon sacrées, du moins, nobles, tombent du pinacle et sont foulés aux pieds par de jeunes aventuriers fougueux, sans légitimité, sans expérience. Inutile de relire Byden, Du Bois, Padmore, Gavey ou Nkrumah pour se convaincre que l'unité africaine n'est ni une utopie ni une coquetterie intellectuelle mais une nécessité vitale. Des micropays comme les nôtres n'ont aucune chance de survie dans le monde tel qu'il est. L'heure est aux mégapoles, aux méga-États, aux méganations. Aujourd'hui, un pays de moins de 100 millions d'habitants n'en est pas un. Cela, même les vieilles nations européennes qui sont pourtant des puissances économiques et militaires l'ont intégré dans leur logiciel, malgré les guerres séculaires qui les ont opposées naguère.
Assimi Goïta, Ibrahima Traoré et Abdourahamane Tiani ne manquent pas d'arguments pour justifier leur incroyable décision : ils fustigent la Françafrique, prônent la libération du continent et l'émancipation de l'homme noir. Seulement, n'est pas Sankara qui veut. Les Africains savent d'expérience que le vieux couplet révolutionnaire est à double tranchant : s'il enflamme la jeunesse, il favorise aussi la carrière des démagogues et des opportunistes.
C'est sûr que la Cedeao est loin d'être parfaite. Néanmoins non seulement elle a le mérite d'exister, mais elle est dans son rôle quand elle condamne les putschs. Nous devons la préserver même si beaucoup d'entre nous la prennent pour une coquille vide, jusqu'au jour où nous réussirons à y loger un contenu. On ne renie pas la case familiale sous le prétexte que sa toiture laisse passer l'eau de pluie, on la répare, on l'améliore, on la perfectionne.
L'indépendance réelle de l'Afrique est un devoir qui nous incombe, à tous, mais ne perdons pas de vue que la division est la plus sûre alliée de la domination étrangère. L'Afrique cessera d'être le jouet des grandes puissances le jour où elle gravera sur le front de ses édifices cette devise qu'elle aurait dû faire sienne aux premières heures de la décolonisation : « L'unité d'abord, le reste, après. »
Afrique cherche démocratie désespérément !
Quant à la démocratie, le bilan des régimes militaires et des partis uniques est suffisamment éloquent pour engager là-dessus un débat de sophistes. Si jamais elle était un luxe alors, nous devrions donner les yeux de la tête pour nous la payer et en finir une fois pour toutes avec le règne des présidents à vie et des maréchaux de pacotille. Par chance, elle ne l'est pas, c'est une demande universelle, c'est la pente naturelle de l'Histoire moderne.
Inutile de chercher loin, les malheurs de l'Afrique proviennent de deux manques, j'allais dire, stupéfiants : celui de l'unité et celui de la démocratie. L'Afrique est à bout de souffle. Fomenter des coups d'État, tripatouiller les institutions ou saborder une organisation telle que la Cedeao par les temps qui courent revient à lui servir le verre du condamné.
Le génie en politique, ce n'est pas de savoir ce qu'il faut faire, c'est de savoir ce qu'il ne faut pas faire.
par Mouhamed Abdallah Ly
LES BLESSURES PSYCHOLOGIQUES D'UNE CRISE
EXCLUSIF SENEPLUS - Perte d'appétit, troubles du sommeil, paralysie intellectuelle... Le report de la présidentielle a durement éprouvé les psychés. Le règne de Macky Sall aura été marqué par un brutalisme meurtrissant
En déclarant contraire à la charte fondamentale la loi votée par les députés BBY-PDS le 5 février, pour repousser de dix mois l’élection présidentielle, le Conseil constitutionnel a plongé ce jeudi 15 février le Sénégal dans une nouvelle séquence politique. Aussi, la libération de dizaines de prisonniers politiques, tend à donner du crédit à une volonté de décrispation de la tension. A ce rythme, la question des incidences du séisme politico-juridique crée par le président Sall risque de passer rapidement au second rang de l’actualité médiatique si fluctuante. D’ailleurs, la question d’une loi d’amnistie et celle de la date à laquelle devrait se dérouler le scrutin polarisent en ce moment le débat. Si l’on peut garder espoir que les incidences juridiques, politiques, diplomatiques et économiques inédites qui découlent de son allocution du 3 février ne seront pas malgré tout oubliées de si tôt, qu’en sera-t-il pour ce qui est de son coût psychologique plus évanescent ?
Les larmes du professeur Mbaye Thiam après la décision du chef de l’État de reporter l’élection présidentielle, à quelques heures du démarrage de la campagne électorale, passeront sans doute à la postérité. Ce qui risque en revanche de passer à la trappe, à moins d’être, d’ici-là, mesuré et documenté par des psychologues, ce sont les incidences du choc subi par des milliers de Sénégalais depuis le 3 février. Et même peut-être bien avant cette date. Les rumeurs de renvoi de la présidentielle, hautement anxiogènes, ont en effet circulé dès l’annonce d’une commission parlementaire devant enquêter sur la prétendue corruption de juges du Conseil constitutionnel. L’angoisse due au retard de 2 heures accusé par l’allocution du président, puis les délibérations tumultueuses du parlement ainsi que l’intervention du GIGN dans l’hémicycle, ont aussi fortement augmenté les appréhensions.
Au-delà du caractère bouleversant de ces évènements, le choc semble surtout être causé par les taillades profondes sur les acquis démocratiques du Sénégal, les balafres sur sa notoriété internationale, mais par-dessus tout, la sensation d'un coup de poignard dans le dos. Les Sénégalais n’avaient-ils pas largement plébiscité la voie des urnes et par là-même la voie démocratique et pacifique pour régler leurs contradictions politiques, dès le 25 février 2024 ? Le chef de l’État ne s’était-il pas engagé, à plusieurs reprises et souvent devant les chefs religieux, à remettre le pouvoir au nouveau président élu, début avril ?
Le report de l’élection est donc devenu, ipso facto, une trahison d’autant plus vive que l’incertitude entourant la transition à venir, la menace d’une intervention militaire, les périls pesant sur les libertés, la crainte de manifestations violentes, la paralysie de l’économie, le retour de la censure, etc. ont installé un sentiment d’épouvante largement partagé. Voilà pourquoi depuis l’allocution du chef de l’État, nombreux sont nos concitoyens qui ont confessé pâtir de troubles du sommeil (nuits agitées, cauchemars, insomnies…) mais aussi de troubles de l’appétit et de l’humeur.
Quelques anecdotes. Un couple d’amis m’a raconté avoir solidairement grondé leur aîné lorsqu'il voulut, quelques minutes avant le discours du président Sall, leur faire écouter une chanson. Ce geste de partage d’un adolescent qui rencontrait habituellement la réceptivité affectueuse de ses parents se heurta cette fois à l’irritabilité de ces derniers. Un autre ami, juriste d’une remarquable générosité intellectuelle, à qui je demandais quelles seraient les conséquences juridiques du report me dit être dans l’incapacité de me répondre. Il m’expliqua plus tard, qu’il s’était affalé sur son canapé, des heures durant, comme paralysé. J’appris, par la même occasion, qu’il déclina des invitations à intervenir dans des émissions, estimant ne pas être en mesure de débattre.
Le jour de la plénière à l’Assemblée nationale, un ami et moi, nous sommes rendus place Soweto pour manifester avant de nous replier dans un café face à la répression implacable des forces de l’ordre. Mon camarade refusa mes offres de partager une boisson. Il m’avoua qu’il avait non seulement perdu l’appétit, mais qu’en sus il n’était plus en mesure de boire autre chose que de l’eau !
Un professeur d’université à la retraite féru de jazz m’a confié ne plus pouvoir être en mesure d’écouter de la musique. Un autre proche que la déclaration a pratiquement trouvé entre deux avions confessa avoir énormément souffert durant son voyage. Ce que je n’ai pas pu lui dire, c’est que les témoignages les plus marquants de perte d’appétit, d’angoisse, d’asthénie, me sont venus de la diaspora. Certains, d'ordinaire peu grossiers, ont même confié avoir proféré beaucoup de jurons ; soit dit en passant, la séquence télévisuelle où l’on voit un chroniqueur subtilement en faire de même a eu une circulation virale. D’autres ont déploré avoir perdu la concentration au travail. Que dire de ceux qui étaient jusque-là du côté du pouvoir et qui ont avoué endurer « honte » et « remords » ! Les mots d’une amie pulaar, universitaire et membre de la société civile, habituellement ni culturaliste ni essentialiste, résonnent encore dans mon esprit : « … et dire que c’est un haal pulaar qui a fait ça, la honte ! ».
Ces quelques illustrations montrent, s’il en est besoin, que l’annonce du report a été vécu par d’aucuns comme un choc émotionnel qui a provoqué des phénomènes d’anxiété, de stress, de détresse. C’est d’ailleurs tout cela qui donne, entre autres, l’impression de vivre ces temps-ci dans un pays au ralenti, dépressif… Un ami ne s’y est pas trompé en ayant la délicatesse de dire à beaucoup et y compris à moi-même : massa ci lu ñu bokk !
Mais que vaut le spleen de nous autres qui malgré le climat politique délétère, humons l’air de la liberté face au mal-être profond de nombreux individus qui sont encore dans les geôles ou qui en ont été élargis après avoir été arbitrairement arrêtés, détenus dans des conditions inhumaines, et hélas même torturés pour certains. Des voix s’élèvent déjà, à juste titre, pour réclamer une assistance psychologique surtout que les récits de nombreux prisonniers récemment élargis ont été si glaçants qu’ils ont fait froid dans le dos lorsqu’ils n’ont pas fait couler de larmes. Que dire de nos concitoyens ceux qui ont perdu des proches, de ceux qui ont été amputés, etc.
Au vu de tout cela, sortir de la crise, ne sera pas seulement un fait « politique » au sens habituel. Une politique du massa qui puisse apaiser, réparer les traumatismes, restaurer psychologiquement, indemniser lorsque c’est nécessaire, devrait faire partie des offres programmatiques pour le Sénégal post Sall tant le « brutalisme » qui a marqué son magistère a meurtri nos esprits, nos corps et nos cœurs.
Mouhamed Abdallah Ly est sociolinguiste, IFAN.
Par Cherif Diop
LA RÉPUBLIQUE BRINGUEBALANTE
La constitution a plié mais n’a pas rompu. C’est à croire que la loi de Murphy s’abat sur Macky Sall. La contrariété est à son comble pour le président.
La Constitution a plié mais n’a pas rompu. C’est à croire que la loi de Murphy s’abat sur Macky Sall. La contrariété est à son comble pour le président.
À travers sa décision historique de ce 15 février 2024, le conseil constitutionnel indique qu’il n’est ni une chambre d’écho des tendances de l’opinion, ni une chambre d’appel des choix de l’assemblée nationale, mais le juge de la constitutionnalité des lois. Cette décision rend un peu de dignité à cette république qui oscille. L’histoire nous dira si Macky Sall a eu raison ou tort d’annuler le rendez-vous du dimanche 25 février 2024. L’onde de choc fut tellurique, mais lui, seul et son conseil de sécurité savent les raisons profondes de ce report. Le conseil constitutionnel a rendu une décision courageuse, pragmatique, apaisante, et intelligente, sans humilier l’institution présidentielle puisque son verdict « valide » aussi le report de l’élection. Les sages n’ont pas soufflé sur les braises d’une situation assez abrasive. Dont acte dit la présidence, il revient désormais au président Macky Sall de stabiliser cette république dangereusement bringuebalante. Il en est conscient, Macky Sall va céder le pouvoir.
A-t-il le choix ? Non. En réécoutant les discours du Président Sall du 03 juillet 2023, celui du 31 décembre 2023, et 03 février 2024, Nous pouvons le dire avec certitude, il ne trahira pas son propre code d’honneur. « Ayant le Sénégal, au cœur, le Sénégal chevillé au corps ». Le président Macky Sall ne peut que respecter sa parole, dernier acte d’une pacification de l’espace public bien entamée avec la libération des détenus « politiques ». Cependant, l'emprisonnement de Ousmane Sonko et de nombre de ses partisans reste un ferment de colère.
Ousmane Sonko, « ce scarabée diabolique »
Politiquement, l’homme semble indestructible. C’est un fait. Sa voix et ses voix comptent. Le tournant des événements actuels met davantage en lumière ce truisme. Comme le coléoptère, connu pour sa solidité hors normes, le maire de Ziguinchor a la carapace ultra résistante. La dissolution de Pastef, l’étêtement du parti n’ont pas réussi à faire disparaître la popularité du détenu le célèbre du Sénégal. Au contraire, l’opinion lui est encore largement favorable. Cependant, Sonko fascine autant qu’il inquiète par sa ligne dure, brut de décoffrage dans un Sénégal inhabitué à ce genre de tribun. Même si la clameur de l’opinion ne se traduit pas toujours en une vérité des urnes. L’opinion n’est pas l’électorat. En 2007, tout le monde a donné Abdoulaye Wade perdant de la présidentiel, jusqu’à ce qu'un certain Macky Sall annonce la victoire du pape du SOPI au beau milieu de la nuit. Dans l’impasse institutionnel, provoquée par ce que le constitutionnaliste Pr Pape Demba Sy a assimilé « à une fraude constitutionnelle », tout indique que Ousmane Sonko est une pièce, et pas des moindres du puzzle de la décrispation, du dégel de ce bloc de granite qui prend forme au cœur de la République.
Pour sortir de l’ornière, la concertation est inéluctable
Le jalonnement d’évènements tragiques depuis 2021 a fini de démontrer que la judiciarisation n’est pas la seule voix du salut. La concertation est inévitable pour éviter l’acmé de la dégradation de la situation. Pour reprendre une fois de plus le Pr Pape Demba Sy qui à mon avis a livré la plus fine et la plus exhaustive analyse de la situation : « on ne peut pas, ne pas aller au dialogue, même si on ne veut pas, on est obligé d’y aller ». Ces propos du sage font écho à ceux de Pierre Goudiaby Atepa, à qui le président Macky Sall a demandé de faire tout son possible pour que les sénégalais puissent se parler entre eux, Ousmane Sonko y compris. Comme M. Atepa l’a dit « Il faut que les deux parties se rassurent ». Que Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko soient amnistiés ou graciés, politiquement ils sortiront de prison avec un gain politique afin de participer à une élection inclusive. Ce mot à la mode comme l’est aussi le populisme. Ce dont on accuse d’ailleurs Ousmane Sonko, d’être un symbole du populisme.
Le mot populisme a fait son apparition ces dernières décennies dans le champ lexical des politiques, avec une forte connotation péjorative. Beaucoup de leaders de notre époque sont catégorisés populistes. Donald Trump, Ousmane Sonko, Jean Luc Mélenchon, Marine Le Pen, Viktor Orban, ou Javier Miley qui vient d’être élu en Argentine. Toutes ces personnalités, différentes à bien des égards, sont taxées de populiste. Néanmoins elles ont le vent en poupe. Eux même définissent le populisme comme étant une vision souverainiste de reconstruction de la volonté économique, politique et d’attention à la sécurité. Et, leurs visions de la gouvernance bénéficient d’un assentiment populaire qui, souvent, faiblit très rapidement. Comment expliquer cette complexité ? Parce que sans doute, la demande d’état est plus forte de nos jours, surtout dans nos pays. Les exigences sont accrues, les gouvernants sont pris au collet, les peuples veulent des résultats tout de suite et maintenait. Comment le président élu naviguera-t-il dans ces moments critiques ? Bon courage au successeur de Macky Sall.
par Aty Kilajaaxal
SËRIÑ MUNTAXA, PAR DEVOIR DE VÉRITÉ
Les Khalifes n’ont aucune obligation de résultat sur la marche politique de la République. L’exigence dont font montre leurs détracteurs s devrait plutôt être réservée aux politiques
Kuy mer di wax sa ayib, buy bég di wax lu la saf lo xam ni lii gëmu ko.
Ku bég ci yaw ni la yaa gën ñépp, saa su meree ci yaw, ni ñéppa la gën wax say ayib wane ko.
SMJ
Dans ce tohu -bohu généralisé, il me parait nécessaire de nous arrêter un instant pour pouvoir situer les responsabilités. Dans notre guerre avec le tyran qui loge au Palais, on mélange les pédales, tire sur tout ce qui bouge, se trompe souvent d’adversaires et finit par se tirer dessus.
J’entends souvent dire que les khalifes devraient se prononcer publiquement sur la situation du pays. Qu’on ne les entend jamais si la population est terrorisée et martyrisée. Que les khalifes ne sont là que pour servir leurs propres intérêts, etc.
Et rappelle ; car le rappel profite aux croyants. (51:55) –
Par devoir de vérité, je ne peux laisser de tels jugements prospérer. Parce qu’entre 2020 et 2024, s’il y a une personne qui a brillé par son patriotisme, son sens de responsabilité, par son leadership hors pair, par son amour pour le pays, c’est un guide religieux, désigné comme étant le véritable père de la nation, le guide et Khalife général des mourides, Seriñ Muntaxa Mbacké. Je vais tenter de revenir ici sur quelques-unes de ses différentes actions et déclarations qui montrent l’inlassable apôtre de la paix qu’il est mais aussi de son inappétence des choses mondaines. En Janvier 2018, il vient d’être khalife et déclare :
«Je n’ai temps à rien et je ne cherche rien de particulier. Je ne cherche que l’agrément de Dieu et la bénédiction de Serigne Touba. Je ne respire que pour lui. Je tâcherai néanmoins d’avoir d’excellentes relations avec tout le monde, tant que c’est possible. Je donnerai à tout le monde le respect qui sied à son rang, tous, sans exception ! J’ai agi ainsi jusqu’à aujourd’hui et je ne changerai pas de démarche. Mais ayez tous en tête que mon unique préoccupation c’est Serigne Touba et comment le servir dans le sentier de Dieu»
Dès sa première prise de parole publique en tant que Khalife, devant tous les dignitaires mourides, il montre clairement la direction qu’il compte prendre. Il s’est fixé un but et rien ni personne ne pourra le détourner de cet objectif.
Sëriñ Muntaxa a manifesté à plusieurs reprises son désamour des choses politiques (la politique telle qu’elle est pratiquée au Sénégal). On se souvient tous de son conseil à maitre Madicke Niang “Aimer Serigne Touba, d’un amour sincère a plus de valeur que détenir tous les pouvoirs et tout l’or de ce bas monde.” Me Madicke Niang arrêtera sa carrière politique après cette audience avec le khalife.
Le 10 juin 2023, devant les baye fall qu’il reçoit pour leur confier la sauvegarde de la sacralité de Touba, il déclare : “Ce qui me fait le plus mal et que j’aimerais bannir totalement de Touba, c’est la politique.” Quitte à déplacer les lieux de vote à Mbacké, mais je ne veux plus d’évènement politique ici à Touba. Il ira même plus loin en déclarant, par l’entremise de son porte-parole Serigne Bass Abdou Khadre, en octobre 2023, qu’il aimerait prendre une pause des hommes politiques. Quiconque vient en tant que talibé pour des bénédictions, il sera le bienvenu mais qu’on l’épargne de la politique politicienne.
Sëriñ Muntaxa un avant-gardiste
Sëriñ Muntaxa n’a pas attendu que le pays soit à feu et à sang pour parler et s’adresser à ses talibés, à ses frères musulmans vivant dans le pays et à tout être qui aime le bien. Allons réécouter sa déclaration faite le jour de la korite en avril 2023 dans laquelle il interpelle tous les chefs religieux et frères en islam du pays en ces termes: “A tous les chefs religieux de ce pays, si nous faisons l’effort d’être des musulmans, de vrais musulmans, d’être des talibés, de vivre l’islam dans sa plénitude, si nous sommes plus unis et si nous restons soudés, si nous le faisons, nous aurons la paix, cette paix tant convoitée dans le monde entier. Par cette voie, nous aurons tout ce que nous désirons dans ce pays ”. Ce discours est d’une richesse et d’une profondeur sans égale. Un appel à la paix, une demande d’introspection et un retour aux fondements de l’islam.
Tabaski 2023, Sëriñ Muntaxa s'adresse aux jeunes, à leurs parents, à tous ceux qui suivent ses recommandations résidant à Touba et partout ailleurs dans le pays. Il dit aux jeunes de réaliser la chance qu’ils ont d’habiter avec Serigne Touba. Il leur rappelle le rôle qu’ils devraient jouer dans la préservation des acquis et la défense de la sacralité de Touba. Les exhorte dans l’éducation, leur demande de rester dans le droit chemin (ihdina siratal mustakhim) et de savoir qu’ils sont l’avenir de ce pays. S’ils agissent ainsi, ils auront la félicité dans ce bas monde et dans l’au-delà.
Aux parents, il demande de s’investir davantage dans l’éducation et la formation des jeunes. « Je sais que vous vous y attelés mais j’aimerais juste que vous redoubliez d’effort. Incitez les au travail car seul cela leur sera bénéfique ». Aux habitants de Touba, il dit : « si vous vous suffisez de Serigne Touba, vous aurez tout ce que vous désirez. Quant à ceux qui viennent ici pour se recueillir, qu’ils se contentent d’avoir la bénédiction de Serigne Touba et que cela leur suffisse »
Aujourd’hui, quand on voit ce qui se passe dans le pays et notamment à Touba, on se rend compte de la raison pour laquelle il a insisté, lors de plusieurs discours, sur la nécessité de préserver la sacralité de Touba. De la raison pour laquelle il a confié ce travail (Samm Wormaay Touba) aux Baye Fall.
Le 10 juin 2023, recevant ces derniers pour le ndigal (recommandation de veiller à la sacralité de Touba). Il recommande en même temps au daara Hizbu Tarkhiyah de psalmodier tous les matins le qasida Matlabul Fawzeyni. Sëriñ Muntaxa explique que ce qasida est plus efficace que les forteresses des grands royaumes d’antan. Que chaque talibé, s’il le peut, le lise tous les jours ou une fois par semaine. (Serigne Bi, Du Maggu Xamoon Naa Ko)
Rappelons quelques-unes de ses actions entre 2020 et 2024
Rappelle, donc, où le Rappel doit être utile. (87 : 9)
Sëriñ Muntaxa Mbacké sur le plan social et politique
En janvier 2020, il donne 10 millions pour indemniser les impactés suite à la démolition du stade Olympique de Mbacké ;
En mars 2020, il est le premier Sénégalais, bien avant l’Etat, à remettre 200 millions au gouvernement pour lutter contre la Covid-19. Il donnera par la suite 70 autres millions au gouvernement sénégalais dans le même cadre de la lutte contre la Covid-19 ;
Septembre 2020, il remet 26 millions aux familles des victimes de l’immigration clandestine ;
En novembre 2020, il remet 100 millions aux commerçants du marché Ocass, victimes d’un incendie ;
Durant tout le confinement entre 2020 et 2021, Sëriñ Muntaxa se charge de donner des vivres aux confinés, sinistrés et daara de Touba. Plusieurs millions et des tonnes de vivre seront distribués par le daara hizbu tarkhiyah et le daara Touba ci kanam à la population de Touba ;
De juin à décembre 2021, il fait préparer des repas copieux pour les maladies et médecins des hôpitaux de Dakar ;
En mars 2021, alors qu’il y a plus de 20 morts dans les manifestations et plusieurs arrestations, il envoie une délégation pour demander à l’Opposition de sursoir à leurs rassemblements – il interpelle le président de la République et lui demande de libérer les manifestants arrêtés (certaines langues de vipère diront qu'il voulait sauver le président, mais pas ramener la paix et la stabilité dans le pays) ;
En mars 2021, il envoie Serigne Youssou Diop et lui remet une enveloppe de 50 millions à distribuer aux familles qui ont perdu un membre ou ont enregistré un blessé ;
En aout 2021, il remet 50 millions aux sinistrés des inondations à Touba ;
En septembre 2021, il remet 30 millions à Touba ca kanam pour l'opération wallu suite aux inondations ;
En octobre 2021, toujours pour venir en aide aux sinistrés et aux daara de Touba et du reste du pays, il donne plus de 100 millions et 150 tonnes de riz au Daara hizbu tarkhiyah pour qu’il les distribue ;
Janvier 2023, suite à un grave accident survenu à Kaffrine, il remet 40 millions aux familles des victimes ;
Mai 2023, il envoie son porte-parole, Serigne Bass Abdou Khadre, et Serigne Youssou Diop, le Jëwriñ du Daara Hizbu Tarkhiyah, au Palais de la République pour remettre au président son discours de korite sur la paix, la tolérance et la cohésion sociale ;
Juin 2023, Sëriñ Muntaxa reçoit en privé le président Macky Sall pour s’entretenir avec lui notamment sur le troisième mandat ;
Juillet 2023, le président déclare qu’il ne se présentera pas aux élections ;
Janvier 2024, suite à un accident survenu sur la route de Poroxaan, il offre 10 millions aux familles des victimes ;
Sans omettre l’argent qu’il envoie tout le temps dans les prisons pour venir en aide aux prisonniers
Sëriñ Muntaxa et l’éducation
6 février 2023, Sëriñ Muntaxa inaugure le complexe universitaire Cheikh Ahmadou Khadim de Touba pour l’éducation et la formation des sénégalais. Construit à hauteur de 37 milliards plus de 2000 étudiants âgés de 6 à 30 ans ou plus y étudient. Les apprenants et les professeurs sont entièrement pris en charge par , Sëriñ Muntaxa Mbacké Khalife General des mourides. (On rappelle juste que pendant ce temps, la plus grande université du pays est fermée pour des raisons politiques) ;
Sëriñ Muntaxa a sous son tutelle plusieurs Daara notamment à Typ, le daaru Tanzil et celui de Poroxaan pour ne citer que ceux-là.
Ses relations avec les familles religieuses
Septembre 2020, il remet 100 millions pour les travaux de rénovation de la mosquée de Tivavouane ;
Avril 2023, il donne 30 millions pour les grands travaux de Medina Baye ;
En Septembre 2023, le Khalife de Thianaba, Serigne Assane Seck, dit publiquement lors du Gamou que Sëriñ Muntaxa lui a envoyé 4 tonnes de vivre et 4 millions quand il venait juste d’être khalife. Il continue en disant qu’à chaque évènement religieux, Sëriñ Muntaxa fait la même chose. Et toutes les familles religieuses du pays peuvent faire le même témoignage
Ses relations avec les pays frères musulmans du monde
En Février 2023, il remet 100 millions à la Turquie après le séisme qui avait fait plusieurs morts ;
En septembre 2023, après le séisme au Maroc, Sëriñ Muntaxa remet 100 millions au Royaume marocain. Ces gestes, au-delà de la consolidation des liens fraternels entre frères musulmans, renforcent les relations diplomatiques de ces pays avec le Sénégal.
Malgré tout cela, certains osent le clouer au pilori pour des raisons purement politiques. “Serigne bi dafa wara wax’’. Ces déclarations publiques que vous attendez et exigez des religieux, si ce n'est pas de la haine doublée d’indiscipline, si ce n’est pour satisfaire vos égos surdimensionnés, je ne vois pas d’autres raisons. Tout ce que l’on ne peut obtenir par la bienséance, faire des appels publics n’y changerait rien. A moins que cela soit du voyeurisme pour le grand public. Sëriñ Muntaxa est un homme de Dieu qui n’agit que pour avoir Sa grâce.
Les Khalifes n’ont aucune obligation de résultat sur la marche politique de la République. L’exigence dont font montre leurs détracteurs s devrait plutôt être réservée aux politiques, président de la République, ministres, députés, au médiateur de la République (une institution que nos maigres francs financent à coup de milliards et qui ne sert absolument à rien du tout).
Bref, j’ai encore plein de choses à dire sur Sëriñ Muntaxa Mbacké, le gardien du temple de l’islam, l’homme multidimensionnel, sur ses remerciements au président lors du dernier màggal mais j’y reviendrai certainement une autre fois.
Sëriñ Muntaxa n’a cessé de se soucier des problèmes du pays et au-delà même. Il reste à ce jour le seul khalife général d’une confrérie qui, cinq jours sur sept, reçoit les Sénégalais pour des bénédictions, pour accueillir leurs doléances et satisfaire leurs besoins. Mbacké Jerejef.
Li fi xew mooy, xeeb ku la gën, yabb ku la mën. Waaye Mbacke yow doxalal. Waxoon nga bu yagg ne: “Ku Dem Ma Dem, Ku Demul Ma Dem” Yobaale nu.
ENCORE UN «DIALOGUE» ET UNE LOI D’AMNISTIE : A QUELLES FINS ?
La satisfaction des revendications légitimes et permanentes des forces démocratiques et sociales constitue une urgence autour de laquelle ces forces se sont battues et continueront de se battre, jusqu’à obtenir gain de cause
1. L’appel au dialogue du président Sall:
Avant les « annonces » de Messieurs ATEPA et TINE rapportées dans les médias à propos de « concertations-négociations » menées entre Macky SALL et Ousmane SONKO, la Coalition Diomaye Président s’était déjà prononcée publiquement, notamment par voie de conférence de presse et de communiqué, en articulant clairement les points de vue suivants : non au coup d’état constitutionnel, non au report- annulation de la présidentielle du 25 février 2024, pour le respect du calendrier électoral et la poursuite de la campagne, pas un jour de plus au président Macky Sall au terme de son mandat le 02 Avril 2024, non au dialogue pipé de Macky Sall ! Et pour cause, car tout au long de son magistère, le président Sall s’est évertué à « réduire l’opposition à sa plus simple expression », et à être le champion du « faux dialogue faussement national ». Depuis 2016, il a institué le 28 mai de chaque année comme « Journée du dialogue national ». Mais comme il le déclare lui-même, tout dialogue suppose des préalables en termes « d’apaisement » et de « confiance ». Ce qui est loin d’être le cas avec le président Sall. Tout le monde peut constater aisément qu’il n’a appelé au dialogue, épisodiquement, que pour se sortir d’une impasse ou d’une mauvaise passe, lui et son camp, avec dans sa besace à tous les coups, trois arrière-pensées constantes : i)gagner du temps, ii) allumer un contrefeu de diversion et de division des rangs de ses adversaires, iii) revenir à l’assaut avec plus d’atouts et de force pour arriver à ses fins.
L’heure n’est donc pas à un prétendu dialogue, mais bien au combat résolu contre le coup d’état du macky. Dans ce cadre, le peuple sénégalais n’attend rien d’autre du Conseil Constitutionnel que de dire le droit, permettant ainsi de rejeter le Décret de Macky Sall annulant le scrutin du 25 février et la loi constitutionnelle de la nouvelle majorité élargie BBY-PDS à l’Assemblée nationale, portant prolongation du mandat présidentiel en cours. Dans ces conditions seulement, des concertations entre acteurs pourraient amener à reprendre le processus électoral exactement là où il a été illégalement et brutalement arrêté à quelque dix heures du démarrage officiel de la campagne électorale. Et il faudra alors faire en sorte qu’une éventuelle nouvelle date du scrutin tienne dans les limites du mandat présidentiel en cours, pour une passation de service avant le 03 avril, date à partir de laquelle le Président en exercice cessera de jouir de toute légalité et légitimité. Telle est la voie de la paix, du respect de la Constitution et du salut de la mère patrie. C’est à cette exigence patriotique que se sont conformés Ousmane Sonko et la Coalition Diomaye Président. Nul n’ignore en effet que, « s’il y a dans ce pays un citoyen bien placé pour se plaindre des décisions iniques du Conseil constitutionnel en son encontre, de l‘acharnement, de l’arbitraire, de la diabolisation à outrance et des multiples procès en sorcellerie, de la violence et de l’injustice sous toutes les coutures, c’est bien le président Ousmane Sonko. Sur la foi de l’ensemble des faits vécus depuis plus de sept ans, l’on peut affirmer avec force que le citoyen Sonko a eu très tôt raison sur toute la ligne face au régime Sall, et si aujourd’hui le Sénégal devait dériver davantage vers la violence et l’instabilité, ou plonger dans une grave crise économique, financière et sociale sans précédent, la responsabilité devrait en être imputée entièrement au président Macky Sall et à son attelage élargi APR-BBY/PDS » (in Ma contribution en date du 07 février 2024).
2-Le coup de pouce mal monté des anciens Présidents Diouf et Wade :
Leur lettre commune a surpris son monde, surtout venant de Diouf qui avait clamé urbi et orbi sa décision de se mettre totalement en retrait par rapport à la vie politique au Sénégal. La lettre qu’ils ont co-signée, valide clairement les positions antidémocratiques et anticonstitutionnelles de Macky Sall : elle entérine la date du 15 décembre pour la tenue de l’élection présidentielle ainsi que la prolongation du mandat en cours ; elle demande à notre jeunesse d’arrêter la violence, dont elle serait donc à l’origine, alors que les jeunes sont les principales victimes de la violence dictatoriale avec son lot de morts, de blessés et d’emprisonnés ; elle surenchérit en pointant deux doigts accusateurs contre l’entreprise de « manipulation » déployée par des « forces extérieures occultes »! Macky Sall ne dirait pas mieux ! Devant le tollé général suscité par cette lettre commune, il n’est pas étonnant que Diouf ait aussitôt diffusé une seconde missive qui sonne comme un désaveu de la première, cette fois-ci à son seul nom, pour essayer comme qui dirait, de se rattraper en confirmant les attributions du seul Conseil Constitutionnel concernant la date de l’élection présidentielle et la durée du mandat présidentiel, en conformité avec la Constitution du Sénégal ! Décidément, par les temps qui courent, les Institutions sénégalaises et les hautes personnalités sensées les incarner, sont loin de briller d’exemplarité !
3- Le vote d’une loi d’amnistie :
C’est Macky Sall lui-même qui a annoncé le dépôt d’un projet de loi à ce sujet sur la table de son conseil des ministres aux fins de « pacification de l’espace public ». Sous nos tropiques, une loi d’amnistie est bien souvent utilisée pour commodément blanchir à grande eau de savon, ou passer en pertes et profits, les crimes ou infractions de toutes sortes commis contre les intérêts du peuple par les tenants du pouvoir ou leurs affidés. L’on se rappelle la fameuse « Loi Ezzan » votée le 7 janvier 2005 par l’Assemblée nationale sous le magistère du président Wade, pour enterrer l’affaire de l’assassinat du juge Me Babacar SEYE, en relation avec les péripéties de l’élection présidentielle de 1993, enfouies dans la formulation passe-partout de l’Article 1er de ladite loi, stipulant :« Sont amnistiés, de plein droit, toutes les infractions criminelles ou correctionnelles commises, tant au Sénégal qu’à l’étranger, en relation avec les élections générales ou locales ou ayant eu une motivation politique, situées entre le 1er janvier 1983 et le 31 décembre 2004, que leurs auteurs aient été jugés ou non ». Pour mémoire, à l’époque nombre d’acteurs politiques de même que plusieurs organisations de la société civile telles que l’ONDH, la RADDHO, la FIDH (cette dernière ne vous rappelle-t-elle pas un certain Sidiki Kaba, alors militant-défenseur des droits de l’homme ?!), s’étaient vivement élevés contre la validation de cette loi par le Conseil constitutionnel du Sénégal- ils avaient même saisi la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. Pour sûr, le président Macky Sall aura bien appris auprès de son grand Maître ! Si pour l’heure, il décide de rétropédaler par rapport à son projet de loi, à Dieu plaise : moo ko sombi, moo koy naan !
4- L’actualité de l’indispensable concertation nationale pour la refondation de la société, de l’Etat et des Institutions :
La satisfaction des revendications légitimes et permanentes des forces démocratiques et sociales constitue une urgence autour de laquelle ces forces se sont battues et continueront de se battre, jusqu’à obtenir gain de cause : libération sans délai de l’ensemble des détenus politiques et annulation des poursuites antidémocratiques à leur encontre, conduite d’enquêtes indépendantes sur les meurtres et assassinats commis depuis 2021 et châtiment exemplaire de leurs auteurs et commanditaires, annulation du Décret arbitraire de dissolution du parti Pastef, respect sans entraves des libertés publiques notamment de presse, d’expression et de manifestation, rétablissement immédiat et durable de l’internet mobile, application intégrale des accords signés avec les syndicats de travailleurs, mesures hardies contre le chômage, la vie chère et l’émigration dite irrégulière, promotion d‘un service public performant et de qualité, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé, des postes, entre autre et réouverture intégrale de toutes les universités fermées, application de prix aux producteurs suffisamment rémunérateurs, organisation d’élections transparentes, démocratiques et inclusives pour une expression sincère de la volonté populaire à travers le suffrage universel direct, libre, secret et égal, etc. Il faudra cependant aller plus loin et en profondeur, sur la voie tracée par les Conclusions des Assises Nationales, les Recommandations et l’Avant-projet de Constitution de la CNRI, pour l’indispensable refondation de la société, de l’Etat et des Institutions : une telle entreprise salutaire devra être portée par le nouveau pouvoir en gestation, pour que vive le Sénégal souverain, dans une Afrique libre et prospère.
Madieye Mbodj,
Membre de la Coalition Diomaye Président
Par Khady Sy Ba
SŒUR YOLANDE DIEME, DEUX VOCATIONS EN UNE VIE
Qui suis-je pour présenter une femme au parcours si exceptionnel ? Comment dévoiler devant cette auguste assemblée le parcours d’une parfaite inconnue ? Mais j’ai été rassurée, dès la page de couverture, par les images qui mettent en évidence le titre...
Dakar Harmattan, Sénégal, 2024, préface de Alpha Amadou Sy
C’est avec une grande appréhension que j’ai accepté l’honneur qui m’a été fait de présenter le livre qui nous réunit aujourd’hui, car parler de l’ouvrage équivaut à parler de son auteure, Sœur Yolande Diémé.
Qui suis-je pour présenter une femme au parcours si exceptionnel ? Comment dévoiler devant cette auguste assemblée le parcours d’une parfaite inconnue ? Mais j’ai été rassurée, dès la page de couverture, par les images qui mettent en évidence le titre du roman. Des images très familières, parce que je suis née et j’ai grandi dans l’une des maisons situées derrière l’École Notre Dame de Lourdes, qui était et demeure notre adresse, et où l’on venait s’amuser -le plus souvent en cachette-ou observer la statue de Marie et les pigeons qu’on appelait « pitakhou Mariama ». En outre, beaucoup de personnages cités dans l’ouvrage me sont familiers : Pr Alpha Sy, le Père Giraldo, le Gouverneur Mbagnick Ndiaye. Finalement, Sœur Yolande ne m’est pas si étrangère. Elle est aussi une ancienne élève du Collège Ameth Fall, futur Lycée Ameth Fall.
L’on dit chez nous que l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt, que la fortune sourit aux audacieux. Sœur Yolande, votre prénom, d’origine grecque, évoque l’aube-première lueur du soleil qui commence à blanchir l’horizon. Votre prénom préfigure votre destin. Vous avez suivi cette voix intérieure qui vous invitait à être au service de Dieu et des humains, notamment des enfants. En a résulté votre double vocation : Sœur de la Présentation de Marie et éducatrice.
La narration à la première personne nous plonge, dès les premières lignes, dans la vie de l’auteure. « Sœur Yolande Diémé est une Joola, fille de la Casamance, née en 1939 d’une famille très nombreuse. Ses parents nés animistes embrasseront le christianisme. »
Ses études l’ont conduite, après le certificat et l’entrée en sixième, à Saint-Louis l’obligeant ainsi à traverser le pays « du sud au nord ». Quatre années passées au collège Ameth Fall lui ont permis de découvrir la vie à l’internat, à côté de la vie en communauté, les différences culturelles, de comparer la simplicité de la vie au village au « raffinement saintlouisien ».
En 1959, après la troisième, Sœur Yolande refusa de revenir à Saint-Louis sous prétexte qu’elle serait envoyée en France. Aussi, décida-t-elle d’être enseignante. Elle ignorait cependant qu’elle avait rendez-vous avec le destin. Recrutée par les Sœurs de la Présentation de Marie de Bignona, elle deviendra vite religieuse. Ce destin va la conduire en France en 1960, malgré la réticence de sa mère. Après tout, une sœur, la famille en comptait déjà. Comme à Saint-Louis, la narratrice sera marquée, en France, par la différence de culture, les habitudes alimentaires, l’individualisme et la rigueur climatique.
De retour après trois ans passés en France, sœur Yolande fut affectée à Élana, un village à côté d’Affignam, non loin de Bignona. Elle prononça ses premiers vœux le 22 août 1963, avec l’aval de ses parents. Elle repartit en France, pour prononcer ses vœux temporaires ; c’est la phase pratique de la vie religieuse basée sur la Constitution avant les vœux perpétuels. Entre temps, Sœur Yolande retourna au pays natal après un voyage mouvementé. Après l’apprentissage, les responsabilités. En 1970, Sœur Yolande retourne à Lyon comme Conseillère Régionale de la Mission Française. En 1975, elle séjourna à Rome pendant un an à la demande de la Supérieure Générale. L’occasion fut mise à profit pour continuer ses études religieuses. En 1979, vingt ans après son séjour en tant que collégienne, le destin ramena Sœur Yolande à Saint-Louis où elle devait prendre les rênes de l’administration de l’École Notre Dame de Lourdes.
Un autre combat commence, des défis à relever. Après l’obstacle culturel du premier séjour, place à l’écueil religieux. C’était l’après indépendance ; la perception des Chrétiens avait bien changé. Il fallait ranger tous les signes d’identification à la religion et se faire discret, sous peine d’essuyer des jets de pierres. Des coups, Sœur Yolande savait en prendre ; mais elle savait aussi en rendre dans les limites du respect. C’est tout le charme de sa personnalité. En attestent ses combats de principe gagnés lors de son premier séjour en France, lors de l’épisode du chien « raciste » à Élana.
À Saint-Louis, l’audace de Sœur Yolande a vite porté ses fruits. Grâce au soutien, un jeudi, de l’Imam Sow, elle put obtenir le respect et la reconnaissance des populations de Sor en seulement deux mois. Les relations entre chrétiens et musulmans étaient pacifiées.
Le succès donnant des ailes, Sœur Yolande convoqua un jeudi encore les parents d’élèves en présence de l’Evêque, pour faire part de sa résolution d’afficher les signes chrétiens et de reprendre les prières dans l’établissement. Ce fut le boycott par les musulmans qui retirèrent les enfants, mais le début d’une ère nouvelle pour l’établissement. Le vœu de Sœur Yolande sera exaucé au bout de deux mois et l’École Notre Dame de Lourdes va vite renaître de ses cendres et se développer. De deux classes en 1979, elle passera à six. La qualité de l’enseignement et la discipline ont fini de convaincre les populations de confession musulmane. En 1985, Sœur Yolande dut retourner à Bignona pour être directrice de l’École de la Présentation de Marie. Elle reviendra à Saint-Louis en 1992, après sept ans d’absence pour des raisons de santé. Mais son séjour ne sera pas de tout repos. Elle se rendra de nouveau en France de 1993 à 1994.
Sœur Yolande avait bien vieilli. Ses enfants de 1979 lui avaient donné de nombreux petits-enfants à éduquer. Mamie devait construire un jardin d’enfants. Mais l’espace faisait défaut. Grâce au partenariat, elle réussit à faire construire douze classes.
Tout travail bien fait mérite reconnaissance. Sœur Yolande sera décorée à Louga par le Président de la République Abdoulaye Wade, sur proposition de son ministère de tutelle. En fin stratège, Sœur Yolande mettra cette décoration à profit pour obtenir un terrain à Boudiouck au nom de sa congrégation avec l’appui des autorités administratives. C’est là-bas que sera érigée l’Institution Présentation de Marie.
Après la reconnaissance humaine, le couronnement divin. La célébration en 2002 du cinquantenaire de l’arrivée des Sœurs en Casamance lui permettra de renouer le contact avec la Supérieure générale, la Révérende Mère Angèle. Ce qui lui valut le financement de son projet d’établissement à 100% par les Sœurs d’Italie et de France.
En 2004, la retraite sonna, mais Sœur Yolande devait respecter une promesse, la contrepartie de la subvention française, et retourner en France pour aider ses sœurs aînées sous le poids de l’âge. Elle fit le vœu d’y rester jusqu’à la fin de ses jours. Entre temps, l’IPM ouvrit ses portes en 2007, sous la direction de la Sœur Jeanne Marie avec 24 classes fonctionnelles.
Le 1er janvier 2012, le destin va ramener Sœur Yolande au Sénégal, un an après le rappel à Dieu de sa sœur aînée. Elle était venue pour trois mois mais c’était sans compter avec la détermination de la Sœur Supérieure Provinciale qui l’a convaincue de rester au bercail. « Ses sœurs avaient besoin de ses cheveux blancs ». C’était elle « l’aînée, le repère ».
On n’enseigne pas seulement ce que l’on sait, on enseigne ce que l’on est, déclarait Jean Jaurès. Sœur Yolande, vous êtes un modèle de rigueur, de sérieux, de persévérance, de citoyenneté active, une éducatrice qui a su imprimer la marque de sa personnalité, de son identité.
Aujourd’hui, du haut de ses quatre-vingt-cinq ans, ayant consacré l’essentiel de sa vie à former des hommes et des âmes, elle reprend son parcours du sud au nord pour nous proposer cet ouvrage de 99 pages et 9 chapitres. Le chiffre 9 est symbole d’achèvement et de réalisation. Vous avez achevé votre ouvrage avec l’évocation de la mort-celle de votre sœur de sang et de votre sœur de congrégation.
Pour nous, c’est un nouveau cycle qui commence après la publication de cette œuvre autobiographique. Vous avez utilisé tous les moyens de transport possible pour accomplir votre sacerdoce. Au tour du public de voyager à travers votre récit de vie. Au tour du roman, produit des cheveux blancs, d’éclairer la vie des plus jeunes pour que continuent à naître d’autres vocations. Que d’autres œuvres suivent ! Puisse l’école continuer à être, comme l’a souhaité Abbé Alex Mbengue, « une pépinière d’hommes [et de femmes] qui contribuent à la santé physique, intellectuelle et morale de leur pays ».
par l'éditorialiste de seneplus, almamy wane
LE DERNIER FRANÇAFRICAIN
EXCLUSIF SENEPLUS - Cette descente aux enfers est le parcours obligé d’un pays qui a vu ses « élites » trahir encore et toujours avec de fausses ambitions, de faux desseins politique et de vraies compromissions
La longue et chaotique présidence de Macky Sall s’achève par une violation flagrante de la Constitution ou lorsque celle-ci devient un instrument de lutte pour le pouvoir, ouvrant ainsi la voie à toutes sortes de dérives.
La violence politique, c’est la couardise assumée au sommet de l’Etat qui se réfugie derrière l’ordre républicain, par conséquent, les forces de l’ordre sur lesquelles repose une paix sociale artificielle au service d’une patrimonialisation de l’Etat sans précédent.
L’allocution du 3 février 2024 est l’aboutissement d’une caporalisation soutenue du pouvoir judiciaire à des fins politiciennes.
Cette défection prévisible au sommet de l’État a mis en danger des populations jusqu’ici malmenées par des politiques économiques en décalage avec les besoins réels du pays. Nous avons aussi assisté au cours de ces dernières années à une criminalisation systématique de l’espace politique, prélude à un détricotage savamment orchestré du tissu républicain.
Le but ultime de ces manœuvres, c'est la confiscation du pouvoir et le résultat est pour le moins catastrophique. L’utilisation de la chambre des députés par les tenants du pouvoir a permis de semer le doute sur la fiabilité du Conseil constitutionnel. Un « doute » utile servant de caution à la pirouette qui a permis l’arrêt du processus électoral à quelques heures de l’ouverture de la campagne, semant la confusion.
Une situation inédite dans l’histoire politique du Sénégal. Une longue tradition démocratique a été ainsi stoppée pour permettre une mise à jour du partage du « gâteau national », garantie d’un statu-quo permettant au système politique sénégalais, allié naturel du néocolonialisme, de résister à l’offensive populaire du désormais ticket Sonko mooy Diomaye.
Disons-le haut et fort, la démocratie est une affaire de culture, d’intuitions vives et de stature. C’est surtout une histoire d’amour, car il faut aimer son peuple. Il faut aussi aimer la démocratie. Le système politique sénégalais incarné par Macky Sall et ses affidés est caractérisé par une présidence hypertrophiée, qui ignore les règles du jeu démocratique et qui arbore un certain mépris du droit. Un droit élastique et malléable à souhait.
Les libertés fondamentales sont bafouées et les lois soigneusement contournées avec une suffisante désinvolture notamment pour éliminer l’opposant Ousmane Sonko et ses partisans. Les Sénégalais depuis plus de trois ans sont pris en étau entre un pouvoir extrêmement brutal et des conditions de vie désastreuses sous le regard passif de la communauté internationale. Des journalistes sont emprisonnés ainsi que des leaders d’opinion, des imams etc. Plus de quatre vingt morts, des centaines de blessés et des milliers de prisonniers politiques dont la plus part sont des jeunes.
Que dire de cette jeunesse traquée, martyrisée et embastillée, cette si précieuse ressource naturelle, dans un monde évanescent. Le souvenir du jeune rappeur Baba Kana, torturé à mort sous nos yeux par des forces de l’ordre, est encore frais. Souvenons nous du martyr de Papito Kara emprisonné pour des publications sur les réseaux sociaux puis déclaré mort sur le chemin de l’exil, près des côtes espagnoles. L’horreur au pays de la « téranga ». Pas d’enquêtes judiciaires ou parlementaires donc pas de responsabilités établies. C’est dire que toutes les conditions pour mener à cette impasse étaient réunies. Depuis 2012, nous glissions sur une pente raide qui nous a mené à l’allocution présidentielle du 3 février 2024, un tournant historique qui marquera la fin d’un modèle démocratique sophistiqué, tant vanté. Une parade politique qui a survécu malgré les changements à la tête de l’État sans jamais montrer le chemin de la prospérité.
Les Sénégalais manifestent aujourd’hui pour le respect strict du calendrier électoral malgré l’exclusion de la course du principal opposant Ousmane Sonko. Les manifestations sur toute l’étendue du territoire national ont fait 3 morts et plusieurs blessés. Macky Sall « seul et contre tous » a décidé d’imposer son propre calendrier dont il est exclu malgré lui. Le monde grouille et gronde pour que l’élection se tienne dans les meilleurs délais.
Le chef désarmé
Au Sénégal, nous entrons dans la phase ultime de destruction de l’Etat pour assouvir les appétits d’un clan qui n’a qu’une seule religion : l’argent. À cela s’ajoute des « fantasmes » géostratégiques persistants qui troublent la paix sur l’étendue du continent africain. La sous-traitance du savoir qui permettait un mimétisme reléguant le patriotisme, la nation ou l’histoire au second plan n’est plus suffisante pour contenir la puissance des réseaux sociaux qui permettent aux populations, malgré certaines dérives, de s’informer en temps réel.
L’offensive économique, politique et culturelle contre l’Afrique mobilisent des moyens aussi importants que ceux qui sont utilisés pour lutter contre la pauvreté et les grandes pandémies. C’est une évidence. Cette ingénierie de la domination par procuration, une sorte d’esclavage des temps modernes est rejetée par les populations de plus en plus conscientes de leurs droits. C’est cela la mutation ultime d’un État post-colonial bridé, une vitrine de la démocratie. Cette descente aux enfers est le parcours obligé d’un pays qui a vu ses « élites », malgré les changements successifs à la tête de l’Etat, trahir encore et toujours avec de fausses ambitions, de faux desseins politique et de vraies compromissions. On ne vient pas en politique pour transformer la vie de ses concitoyens mais pour faire fortune ou pour parader en rasant les murs. L’alternance en 2000 est passée par là.
Le Sénégal ne peut échapper à son destin, il ne peut survivre artificiellement en feignant d’ignorer les mutations fulgurantes en cours dans son environnement immédiat. C’est un pays doté d’une riche histoire et d’une grande tradition démocratique et qui a été ravalé au rang de démocrature au cours de ces dernières années. D’illustres hommes ont traversé la vie politique de ce pays sans jamais quitter le sentier républicain au prix de mille sacrifices. Deux hommes qui ont marqué l’histoire politique du Sénégal et de l’Afrique me viennent à l’esprit, il s’agit de Mamadou Dia et de Cheikh Anta Diop. Tous deux avaient très tôt perçu les contours d’une Afrique unie et solidaire dans un monde où les rapports de force sont motivés par des logiques économiques impitoyables. L’historien américain Frédéric Cooper décrit la genèse de ce type de relation :
« Les difficultés économiques de l’Afrique s’explique moins par les caractéristiques intrinsèques du continent que par les relations asymétriques que ce dernier entretient avec l’Europe depuis le 15e siècle. »
La françafrique, émanation du néocolonialisme, a toujours préféré avoir à faire à une « élite » servile et zélée qui a toujours montré sa capacité à organiser le pays en fonction de ses intérêts particuliers. Une sorte de Sénégal sans les sénégalais.
Ceci dans le mépris total de notre histoire commune et parfois dans une sorte de réécriture de notre récit national. Ce qui est déroutant, c’est cette reproduction soigneusement codifiée au sommet de l’État autour d’une politique antinationale quelque soit le résident du palais et qui, méticuleusement « rationalise » la pauvreté tout en redistribuant des prébendes. La rupture avec le peuple ne peut plus être contenue dans des conciliabules diurnes et nocturnes car les Sénégalais sont désireux de voir une autre façon de faire de la politique. C’était déjà le cas en 2019, au lieu de cela, nous avons eu droit à la privatisation intégrale de l’espace public par un pouvoir arrogant et vindicatif qui semblait mener une guerre contre son propre peuple.
Le théoricien militaire prussien auteur du livre « De la guerre », Carl Von Clausewitz dit ceci :
« Ce que les hommes ont de fâcheux, c’est une agitation intérieure les poussant à une activité impressionnante qui dépasse la capacité de leur intelligence. Ils entendent y entraîner d’autres et s’ils ne réussissent pas, voire s’ils finissent par échouer du fait des défauts de leur intelligence; ils deviennent méchants; ils n’ont plus de coeur et (...), sans s’en rendre compte ils manquent à la vérité, à la loyauté et à la bonne foi. »
Nous le voyons bien dans un contexte mondial très volatile où les nationalismes, partout prennent le dessus, il est évident que le Sénégal n’est pas sur sa trajectoire naturelle pour affronter les enjeux économiques sous-régionaux proprement africains. Après douze années d’une gestion monarchique du pouvoir, acceptée et vécue dignement par le peuple sénégalais, le pays n’avait pas besoin de cet acte séditieux contre la règle la plus élevée de l’ordre juridique de notre pays.
Ce que les Sénégalais souhaitent aujourd’hui, c’est une réelle indépendance. Autrement dit, une souveraineté effective qui profite aux Sénégalais. Ce que les Sénégalais veulent, c’est enfin profiter de la terre de leurs ancêtres, en y vivant décemment. Ce que les Sénégalais veulent, c’est une justice impartiale prompte à contrecarrer toute dérive solitaire du pouvoir. Ce que les Sénégalais veulent, c’est vivre dans la communion des esprits et dans la paix. Ce que les Sénégalais veulent, c’est un pays capable de mettre en oeuvre ses propres stratégies politiques, économiques et sociales voire militaires. Nous avons un choix à faire entre la servilité et le courage !
Le pouvoir en Afrique a toujours été une sinécure, une sorte de labyrinthe baroque où la fête est permanente avec ses courtisans, ses griots et ses journalistes corrompus, etc. Il vaut mieux avoir de véritables alliés pour espérer retrouver la porte de sortie...