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28 novembre 2024
Opinions
par Juan Branco
PLONGÉE DANS LA LOGIQUE D'UN POUVOIR AUTORITAIRE
Les régimes autoritaires cherchent toujours à instrumentaliser le droit pour se justifier. Quitte à le déformer. Le ministre de la Justice Ismail Madior Fall ment au sujet du Code pénal de son propre pays
Dans un entretien à Jeune Afrique, et repris ce jour par l'AFP, le ministre de la justice du Sénégal ment au sujet du Code pénal de son propre pays.
Il est particulièrement révélateur de voir un garde des sceaux se prononcer au sujet d'une affaire individuelle dans un média étranger, et plus encore encore, de le voir mentir à son sujet de façon éhontée. Il est aussi significatif de voir quel média est utilisé à cette fin, en l'occurence, un organe de « presse » qui n'a longtemps survécu que grâce à la vente de publireportages en l’honneur des potentats de la françafrique.
Comme vous le savez, M. Sonko est le principal opposant au pouvoir sénégalais, dont le président est un proche allié d'Emmanuel Macron. M. Sonko, immensément populaire, est une icône de la lutte contre la corruption et la françafrique, et menace des intérêts puissants. Cela l'a amené à faire l'objet de procédures iniques, dont des accusations de viol pour lesquelles il a été acquitté, et à se voir condamner en son absence à une peine de deux ans de prison pour un délit dont il n’était pas accusé. Cette condamnation, censée le rendre inéligible si elle devenait définitive, a été rendue le 1er juin dernier.
Cela fait longtemps que le pouvoir cherche à le rendre inéligible, M. Sonko. C’est ainsi qu’une première affaire en diffamation avait été audiencée manu militari à cette fin, sans succès à ce stade. C’est ainsi que cette nouvelle affaire tente d’être utilisée comme prétexte pour le radier des listes électorales et ainsi l'empêcher de se présenter aux élections de février 2024. Entre temps, M. Sonko a d'ailleurs été arrêté et placé en détention pour d’autres motifs. L’affaire est guignolesque : le Procureur a initialement justifié son arrestation en invoquant un vol de téléphone portable (sic), avant, une fois l'homme placé en garde à vue, de le faire accuser de crimes d'atteinte à la sûreté de l’État, appel à l’insurrection, terrorisme, etc. Cela doit être étrange, pour un favori à l’élection présidentielle, de passer en quelques heures de voleur à la sauvette à terroriste.
M. Sonko, envoyé en détention provisoire, a immédiatement entamé une grève de la faim et est actuellement en réanimation. Les autorités sénégalaises, qui ont placé en détention entre 1 600 et 1 800 prisonniers politiques, dont des avocats, journalistes, élus et militants, et qui les entassent dans des conditions inhumaines, font depuis face à une intense pression internationale, et tentent en conséquence de sauver la face.
Le Sénégal a longtemps été considéré comme la perle du droit, un exemple en Afrique. Il est donc très important de maintenir les apparences. C’est le sens de cet entretien du ministre de la justice, envoyé au front pour convaincre l'opinion internationale que tout est normal. Déconstruisons-le patiemment.
La loi sénégalaise prévoit que lorsque vous avez été jugé en votre absence, votre arrestation ou Constitution en tant que prisonnier anéanti immédiatement la condamnation par contumace dont vous aviez fait l’objet, afin qu’un nouveau procès soit organisé dans le respect de vos droits. C'est un véritable caillou dans la chaussure du pouvoir, car, s'il leur fallait relancer de nouvelles procédures, celles-ci ne pourraient aboutir à une condamnation définitive avant l’élection de février 2024, et donc empêcher M. Sonko d'être candidat. C’est par ailleurs un caillou dans la chaussure que le pouvoir n’avait probablement pas prévu, l’arrestation de M. Sonko étant intervenue dans des conditions baroques et précipitées.
C’est ce qui explique qu'après le vol de téléphone portable, ils aient en un premier temps tenté d'inventer des accusations multiples de crimes politiques, infondées et qu’ils sont incapables de justifier. Mais en droit sénégalais, et on pourrait rire qu’ils prétendent le respecter, cela ne suffit pas. Le droit est clair. La condamnation de M. Sonko à la peine de deux ans qui le rend inéligible est devenue inexistante au moment où celui-ci a été arrêté. Il est donc éligible tant qu’aucune décision de condamnation définitive ne sera à nouveau prononcée à son encontre.
Dans cet entretien, le ministre de la Justice, face aux questions faussement naïves de Jeune Afrique, commence donc, il ne peut pas faire autrement, par confirmer : "M. Sonko avait la possibilité de faire « anéantir » cette condamnation puisqu’il n’a été ni présent ni représenté lors de son procès." Mais il ajoute immédiatement : « À condition toutefois de se constituer prisonnier ou d’être placé en détention à l’initiative du procureur en vertu de la condamnation en question. Or c’est dans le cadre d’une autre affaire qu’Ousmane Sonko a été placé sous mandat de dépôt le 31 juillet, laquelle vise des infractions extrêmement graves en lien avec la sûreté de l’État. (...)»
Là, comme on le verra, le ministre invente une condition qui n'est nulle part prévue pour tenter de contourner l'obstacle qui menace, de caillou, de devenir montagne. Le ministre de la Justice est toujours aussi benoîtement relancé par Jeune Afrique : "Ousmane Sonko étant déjà emprisonné, peut-il aujourd’hui se constituer prisonnier dans l’affaire Adji Sarr ? - Pour se constituer prisonnier, il faut être libre. Ce n’est pas une question de droit, mais de logique."
On le voit, les régimes autoritaires cherchent toujours à instrumentaliser le droit pour se justifier. Quitte à le déformer. Le Code pénal sénégalais indique en son article 307 : "S'ils [les condamnés par contumace] se constituent ou s'ils viennent à être arrêtés avant les délais de prescription, l'arrêt de condamnation est anéanti de plein droit". Point.
La loi pénale étant d'interprétation stricte, et aucun autre critère ou condition n'étant énoncée par le Code pénal ou le Code de procédure pénale, la conclusion est sans équivoque : la condamnation de M. Sonko a été de facto anéantie dès son arrestation, quel qu'ait été le motif de son arrestation. Point. C'est d'ailleurs une chose évidente, la contumace n'ayant pour objectif que de se saisir de personnes que l'on n'arrive pas à mettre sous main de justice. M. Sonko, sentant le piège venir, avait de toutes façons pris ses précautions, en se constituant prisonnier dès sa garde à vue et, sur nos bons conseils, exigeant que soit acté l’anéantissement de sa condamnation. Ce qu’ils n’avaient visiblement pas prévu.
En somme, le ministre de la Justice ment, en pariant sur le fait que personne n’y comprenant rien, cela passera. C’est souvent à cette fin qu’est détourné le droit. Je reviendrai tout de même sur une autre de ses phrases. Peu après, le ministre affirme : "Pourquoi ne s’est-il pas constitué prisonnier s’il entendait obtenir que sa condamnation par contumace soit anéantie ? Celle-ci est entre-temps devenue définitive."
Mesurons le cynisme de cette déclaration à l’aune des faits suivants : M. Sonko a été kidnappé puis placé en résidence surveillée en dehors de tout cadre légal le 28 mai 2023, soit l’avant-veille de son verdict, alors qu’il était sur le chemin de Dakar pour s'y rendre. Il a ensuite été empêché de quitter son domicile pendant 53 jours par des barrages de policiers qui, sans mandat, lui interdisaient tout mouvement. A peine les barrières étaient-elles levées qu’il s’est fait arrêter pour cette supposée affaire de vol de téléphone portable. Quand M. Sonko aurait-il pu se constituer prisonnier, si ce n'est à l'instant où il a été arrêté ? Mais ajoutons-y une faille logique : selon le ministre, la condamnation de M. Sonko est devenue définitive « entre temps », c’est à dire, si on le suit et connaissant ces faits, avant son arrestation pour un supposé vol de téléphone portable. Or si cela avait été véritablement le cas, pourquoi aucune force de l’ordre n’avait cherché à la rendre exécutoire ? Pourquoi aucun des policiers qui entouraient son domicile n'a cherché à le faire arrêter ?
Parce que le pouvoir sait que l'éligibilité de M. Sonko, contumax, aurait été immédiatement rétablie. D'où la fausse affaire de vol, puis la construction précipité d'un prétexte pour arriver au raisonnement par M. Fall proposé. Dommage que tant d'efforts amènent à un résultat qui demeure infondé. Reste qu'à ce stade, M. Fall a gagné, puisque la stratégie mise en oeuvre leur évite tout contrôle par une instance judiciaire, la radiation des listes électorales ayant été demandée par.... vous l'aurez deviné, M. Madior Fall lui-même. Sur le fondement de son propre raisonnement, et en s'appuyant sur le verrou offert par le parquet pour éviter qu'il soit contorlé.
Notons un dernier point. Dans ce même entretien où, tout en prétendant qu’il n’y a pas de prisonniers politiques au Sénégal, le ministre ne fait que parler d’un opposant politique détenu pour des soi-disant crimes et délits politiques, M. Madior Fall confirme qu'aucun membre des forces de l'ordre n'a été inculpé suite aux 60 meurtres commis depuis mars 2021 par tirs de balle réelle contre des manifestants. On comprend en le lisant que seules des enquêtes administratives ont été lancées (sic), et qu'elles n'ont rien donné. Cet aveu est autrement plus important que ses arguties, car l'absence de procédures internes ouvre la porte à la compétence de la Cour pénale internationale, pour ces crimes imprescriptibles et contre ceux qui les ont commis.
par Ciré Clédor Ly
L'ÉTAT DE SANTÉ DE SONKO A ATTEINT UN SEUIL ALARMANT
Il est à craindre que les seuls soins médicaux ne puissent plus lui éviter une dégradation irréversible de ses organes vitaux. Il faut immédiatement libérer le détenu pour ne pas avoir à traîner le fardeau de ce qui est désormais très prévisible
En ma qualité d’avocat membre du collectif de la défense du leader de l’opposition démocratique, j’avais lancé une alerte attirant l’attention sur l’état de santé de ce dernier, qui se détériorait de jour en jour.
Il accusait alors un début de déficit cardiaque ainsi qu’une paralysie complète de la partie gauche de son corps, entre autres anomalies organiques.
L’état de santé de monsieur Ousmane Sonko a atteint ce jour du 30 août 2023 un seuil alarmant, au point qu’il est à craindre que les seuls soins médicaux ne puissent plus lui éviter une dégradation irréversible de ses organes vitaux.
Les autorités politiques ainsi que l’administration pénitentiaire en sont informées, de même que le doyen des juges d’instruction qui a délivré le mandat de dépôt à la suite d’un détournement de procédure du Procureur de la République, lequel est parti d’une arrestation pour un vol présumé d’un portable sans aucune valeur économique, suite à une provocation policière, pour requérir la détention fondée sur une kyrielle d’infractions sans unité de dessein, de connexité ou de concomitance.
Ceux, autres que le doyen des juges, qui ont le pouvoir de mettre fin à sa détention et qui n’avaient pas encore été informés de la situation sanitaire d’Ousmane Sonko, peuvent aller vérifier mes déclarations à la réanimation où le brave docteur traitant s’échine auprès de son patient, pour avoir la confirmation que ce dernier est épuisé et sur le point d’atteindre ses limites, avant qu’il ne soit trop tard.
La philosophie, la morale et le juridisme n’ont plus droit de cité. On ne peut rester sourd et de marbre face aux risques que le maintien en détention d’Ousmane Sonko pourrait engendrer alors qu’il existe des mécanismes juridiques internes conformes au droit International, qui permettent de le libérer à l’instant même où j'écris.
Je lance à l’occasion un appel pressant au président de la République qui nomme aux emplois civils et militaires, pour qu’il renvoie sans retard le ministre de la Justice de son poste pour incompétence pendant qu’il est temps, qu’il le remplace par un homme sage qui maîtrise les arcanes de la justice et le droit international des droits de l’homme et qu’il s’implique pour la libération immédiate d’Ousmane Sonko pour ne pas avoir à traîner le fardeau de ce qui est désormais très prévisible.
Ce sont aussi des conseils et, selon le dicton : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point. »
Maître Ciré Clédor Ly est avocat à la Cour. Au nom de mon devoir et de ma liberté d’informer juste, de penser et de conseiller.
PAR MAMADOU ADJE
COUP D'ÉTAT AU NIGER : "ATHENA SUR LES PAS D'ARÈS", CONFRONTATION FRATRICIDE OU RETROUVAILLES ENTRE FRERES D'ARMES?
Quels sont donc les enjeux géopolitiques et stratégiques de cette opération militaire, quelles sont les forces en présence, quelles pourraient être les conséquences d'une telle opération sur l'U A, elle même très circonspect sur cette éventualité
Aprés plus de trois semaines de gesticulations face à "l'intransigeance" de la Junte, la Cedeao vient de clore sa dernière conférence de planification du 19 au 20 Juillet, pour le déploiement d'une force d'intervention au Niger.
Selon le porte-parole de la conférence, le concept d'opération est validé, ainsi que le concept logistique et le jour "J" déjà choisi.
L'espoir d'une sortie de crise semble avoir été douché par la sortie du Chef de la Junte, qui a quitté sa posture de "stratégie du vide," pour un discours solennel à l'attention de son peuple, son armée, la Cedeao et la Communauté Internationale.
Ce discours, prononcé au moment où les plénipotentiaires de la Cedeao et des Nations unies étaient présents à Niamey, sans être au préalable reçus par le Général Tiani, est un signe de radicalisation face aux injonctions de la CEDEAO et montre à souhait la volonté de la Junte de poursuivre sa logique de gestion du pays avec sa propre feuille de route.
L'adresse du Général Tiani fait ainsi ressortir quatre points, qui remettent toute possibilité de sortie de crise sur la base des conditions de la CEDEAO, aux calendes grecques: la consultation nationale prévue dans un mois, une transition de trois ans ( 03 ans) , un appel du pied pour une alliance avec le Burkina et le Mali, et une mise en garde contre toutes velléités d'agression, qui ne seraient pas "une promenade de santé", même si, il lance un appel au dialogue du bout des lèvres !
Désormais Athéna semble loin de conquérir Thalès et de charmer ses fils Deimos et Phobos lâches dans la nature !
Tout laisse donc à croire , à moins d'un revirement spectaculaire de dernière minute, que seule la diplomatie permet d'espérer, que le lancement de l'opération est inéluctable !
Quels sont donc les enjeux géopolitiques et stratégiques de cette opération militaire, quelles sont les forces en présence, quelles pourraient être les conséquences d'une telle opération sur l'Union Africaine, elle même très circonspect sur cette éventualité et sur la CEDEAO et son impact sur la lutte contre le Djihadisme ?
Le Niger présente des indicateurs sociaux et économiques peu reluisants, qui tranchent avec une importance géopolitique intéressante, par sa position stratégique comme pivot des axes logistiques Est -ouest et Nord- Sud, de l'Afrique subsaharienne vers le Maghreb et par le Fleuve Niger lien ombilical entre l'Afrique de l'Ouest , le Golf de Guinée et l'Afrique Centrale par ses affluents. Il a ainsi historiquement joué le rôle de carrefour des migrations vers l'Eldorado européen attisant la convoitise des groupes armés qui voient dans l'immensité du territoire, 1.267.000 km 2, pays le plus vaste d'Afrique de l'Ouest , la possibilité d'établir des zones de non droit dans des endroits inaccessibles aux forces régulières et propices à la mobilité.
Ainsi quand on se penche de plus près sur la géopolitique du Niger, en particulier, de la région en général, du point de vue ressources naturelles, on peut tout de suite se rendre compte que cette crise marque le début de la fin de l'influence française au Niger et dans le Sahel.
En effet la perte de position dominante sur les ressources stratégiques du pays, notamment l'uranium dont Areva devenue ORION, avait la quasi- exclusivité, est au centre des préoccupations de l'ex puissance tutélaire .
Celle-ci s'est servie à profusion sur ces richesses pendant des lustres , en laissant le peuple Nigérien dans un dénuement scandaleux, car quand les français se chauffent à l'électricité fournie par leurs centrales nucléaires alimentées par Arlit, la quasi-totalité des Nigériens restent dans le noir.
Ce vide anticipé et redouté par La France, qui joue les prolongations en défiant la Junte, pourrait profiter à la Chine déjà engagée sur la construction d'un pipeline de 2000 kilomètres reliant Agadème ( Niger) au port de Semé au Bénin et dans une moindre mesure la Corée impliquée dans l'exploitation de l'uranium avec la France et la Chine.
Pour les Usa, qui ont initié un retour remarqué en Afrique, notamment par la construction de leur plus grande base militaire en Afrique de l'Ouest, à Agadès, ils devraient probablement revoir leur posture dans un contexte qu'ils connaissent peu mais ont l'avantage de ne pas trainer des contentieux historiques.
Ainsi, leur position ambiguë sur le coup d'état, leur donne la possibilité d'être une alternative à la France et de continuer à talonner la Chine dans la région.
Quant à l'Algérie, acteur majeur de la géopolitique de la région, elle ne verrait pas d'un mauvais œil le départ de la France des environs de sa zone d'intérêt dans laquelle elle poursuit des projets structurants de grande importance stratégique, notamment: la route Transsaharienne de 10.000 kilomètres reliant six ( 06) pays ( Tunisie, Tchad, Mali, Niger, Nigeria, Algérie), dont 8000 km déjà réalisés, la dorsale Transsaharienne a fibre optique adossée à cet axe stratégique, d'un cout de 79 M€, destinée à assurer l'interconnexion entre ces six pays et l'oléoduc vers Alger via le Niger, destiné à alimenter l'Europe en pétrole.
Tous ces projets pourraient connaître des retards considérables en cas de déstabilisation du Niger, qui demeure le nœud de communication des axes stratégiques vers les pays frontaliers !
En fait une opération militaire dans un tel contexte serait à haut risque pour tous les efforts financiers déjà investis dans ces projets !
A ces conséquences inéluctables, vont se greffer une crise humanitaire sans précédent dans la région.
En plus la distraction de l'Armée nigérienne, engagée dans la lutte contre le terrorisme et dont le pays est devenu la profondeur stratégique après l'éjection des forces françaises du Burkina et du Mali, par la volonté de leurs nouveaux dirigeants, devrait modifier profondément la posture des forces dans la sous-région et impacter négativement leur efficacité opérationnelle.
Mais la CEDEAO et l'Union Africaine jouent leur crédibilité, déjà largement entamée par les évènements du même ordre en Guinée , au Mali et au Burkina gérés avec un traitement différencié.
La CEDEAO plus particulièrement, qui a pris une posture émotionnelle dès le début, se retrouve, sans autre alternative, que le lancement d'une opération dont le cadre juridique fait débat ou aller à Canossa.
En effet, l'emploi de la force par les états, dans les relations internationales n'est licite que dans trois hypothèses (Art 2 para 4 de la Charte)
-1.autorisation du Conseil de Sécurité
-2.autorisation de l'Assemblée Générale
-3exercice de la légitime défense pour faire face à une agression armée ou à la menace imminente d'une telle menace.
Exceptionnellement sur la base de "l'ingérence humanitaire" pour venir en aide à des populations face à des risques d'abus.
Cette disposition n'est pas expressément dans l'arrangement juridique, mais peut s'appuyer sur le "Right to Protect" ( R2P) ( devoir de protéger ) développé par l'Assemblée Général.
En plus, la nouvelle configuration géopolitique du Monde rend illusoire une unanimité au sein du Conseil de Sécurité des 5 membres permanents sur un mandat autorisant l'emploi de la force.
La Cedeao se retrouve ainsi face à une situation ambiguë et comme Janus, elle offre deux faces d'un même visage.
Toutefois si elle ne réussit pas à résoudre le cas du Niger, de force ou par la médiation , on devra commencer à s'interroger sur la nécessité de maintenir "la sécurité collective" sous son giron.
l'Union Africaine quant à elle ( UA), ayant eu plus de recul, et ayant agi avec plus de sagesse, a pris acte de la posture de Cedeao, mais serait nécessairement une victime collatérale des éventuelles décisions de La Communauté économique.
Enfin que dire d'un retour de flammes qui mettrait ces deux organisations devant "un ordre paradoxal", consistant à porter assistance aux mêmes pays qui professent la force, si les perturbations atteignent ces pays et se propagent dans toute la sous-région. Cette hypothèse basse n'est surtout pas à négliger.
Mais si la sagesse ne triomphe pas, et que la Cedeao se résout à lancer opération "sans mandat", la volonté affichée par les forces en présence, présage d'un engagement dans la durée.
Dans ce face à face , la CEDEAO se prévaut d'avoir avec elle deux à trois puissances militaires de la sous-région, le Nigeria, le Ghana et la Côte d'Ivoire auxquels viendraient s'ajouter les forces sénégalaises et leur savoir-faire opérationnel reconnu.
La combinaison des capacités opérationnelles des forces de la Cedeao, lui donnerait une supériorité numérique brut de 9/1, soutenue par l'aviation nigériane qui peut assurer une supériorité aérienne initiale sur le théâtre, à condition de réduire les capacités anti aériennes des "coalisés", le Burkina et le Mali solidaires du Niger.
A cela il faudrait probablement ajouter les 1500 hommes des forces spéciales françaises présentes déjà au Niger, si la France décide de participer à l'opération.
En face se trouverait l'Armée nigérienne, renforcée par le Burkina et le Mali, qui ont connu une montée en puissance remarquable dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Par exemple le Burkina s'est hissé à la 6eme place des puissances militaires de l'Afrique de l'Ouest derrière le Niger ( 5eme) et le Mali (4eme ) selon le classement 2023 de Global Fire Power . Cette montée en puissance est surtout liée au renforcement des capacités opérationnelles de lutte contre le terrorisme et le tout sécuritaire des régimes en place.
Ces forces bénéficient aussi d'un engagement permanent sur leur théâtre d'opération respectif face à la menace terroriste depuis près d'une quinzaine d'années !
Une opération de la CEDEAO serait aussi perçue comme un cadeau du ciel par les mouvements Djihadistes qui ont pignon sur rue au Niger, au Mali et au Burkina dans "le triangle des Bermudes" de la lutte anti-terroriste !
Dans la "zone des trois frontières" du Liptako -Gourma ( tri-jonction Mali-Burkina-Niger) opère l'État Islamique dans le Grand Sahel ( EIGS).
A l'Est le quadri- pointe autour du Lac Tchad ( Niger, Tchad, Nigeria, Cameroun) est la chasse gardée de Boko Haram et de l'État Islamique en Afrique de l'Ouest .
Au Nord le Niger offre un autre tri-pointe ( Niger, Algérie, Libye) qui serait propice aux activités des forces combattantes en Libye en cas de déstabilisation du Niger.
En plus, les forces en déshérence dans le conflit soudanais, pourraient profiter de la petite fenêtre libyenne pour rejoindre le Nord du Niger afin d'éviter d'être coincées par la perspective d'un contrôle renforcé de la frontière du Tchad, comme en 2008 du temps de la guerre par proxy entre Bechir et Deby !
Ce tableau peu reluisant ne remet pas en cause les capacités opérationnelles d'intervention de Cedeao, mais essaye d'anticiper les probables conséquences géopolitiques et humanitaires.
Comment donc se passerait cette opération ?
Sans entrer dans le secret des opérations, seulement connus des officiers dédiés à la planification, on peut toutefois concevoir une opération en trois temps dont le premier serait une démonstration de force.
L'opération débuterait par le déploiement par pays dans les zones de responsabilité nationales sur les 2273 kilomètres de frontière avec le Nigeria et le Benin au Sud.
Une attaque préventive au sol permettait de couper le "Niger utile" du reste du pays. Elle serait encore plus efficace, si les forces étrangères sur place y participent .
Cette attaque au sol serait combinée à une opération aérienne nigériane de domination du théâtre par l'établissement d'une suprématie aérienne pour soutenir l'attaque sur les centres de décisions sélectionnés.
Une pause serait ensuite observée pour évaluer la situation, après la démonstration de la détermination de la CEDEAO à atteindre son but.
Mais cette opération ne se fera pas sans une réponse de l'Armée nigérienne, Burkinabè et Malienne qui visera particulièrement le Benin et les capacités aériennes nigérianes.
Cette réponse reposerait sur la Dca et l'attaque des aéroports au Sud de la frontière Sokoto, Kano, Dutse , par l'artillerie sol- sol dont le Niger, le Burkina et le Mali sont bien pourvus, notamment les drones Bayrakhtar TB2, les LRM Grad BM 21et type 63, et les ZSU -23-4 "Soviétiques" qui serviraient à contester la domination de l'Espace par la 3eme dimension nigériane.
Cette réaction des "forces coalisées «rendrait inévitable l'internationalisation du conflit et sa probable extension dans les pays limitrophes.
En outre l'affaiblissement des forces Nigériennes, Maliennes et Burkinabés, sera a l'avantage des mouvements Djihadistes qui n'hésiteront pas à entendre leur zone d'opération autour des "trois frontières" et du Lac Tchad.
Aujourd'hui la zone des "trois frontières", est le théâtre d'un désastre humanitaire sans précédent en Afrique de l'Ouest qui affecte plus de 3 millions de personnes, caractérisé par des déplacements massif de populations que les organisations humanitaires évaluent à plus de 3 millions dans l'Espace Cedeao en 2023.
Dans le tri-pointe au Nord, la situation resterait volatile et le champs sera ouvert aux forces belligérantes en Libye et probablement aux forces en déshérence dans le conflit au Soudan . Ces dernières n'hésiterons pas à transiter vers les zones désertées par les forces de sécurité nigériennes occupées à faire face aux forces de la Cedeao pour s'infiltrer et s'établir au Nord du Niger!
Ainsi donc une opération militaire contre les putschistes au Niger, si elle n'arrive pas à ses fins dans un court délais, risquerait de transformer le pays en une zone de confrontation entre acteurs externes et acteurs internes comme dans le "Grand Orient" après la naissance de l'État Islamique suite à l'invasion de l'Irak.
Cette confrontation aurait pour cadre une situation humanitaire sans précédent, qui pourrait affecter toute l'Afrique de l'Ouest.
Cette dernière alternative est particulièrement redoutée par les pays côtiers, déjà sous l'œil du cyclone des djihadistes, qui profiteront de la crise humanitaire et des déplacements massifs de populations pour transférer la violence dans ces pays. Les régimes en place seraient forcément affaiblis par la montée de la violence, poussant les forces de défense et de sécurité à se positionner comme alternative face à la crise.
Ainsi le mal que l'on essaye de combattre au Niger, pourrait être transféré dans ces pays, à la faveur de cette crise qui contaminerait l'Afrique Centrale et surtout la république éponyme, encore en proie aux démons de la guerre.
En définitive cette intervention est donc possible, avec ou sans mandat, mais les conséquences opérationnelles, géopolitiques et humanitaires en valent elles la peine?
La réponse se trouve dans les lambris des lieux de rencontre des autorités de la CEDEAO qui ne semblent pas pour l'instant mesurer la responsabilité historique d'une déstabilisation globale de l'Afrique de l'Ouest qui pèse sur leurs épaules.
En tout état de cause, après le Niger, si la solution diplomatique prévaut ou si la guerre s'impose, une grande réflexion devrait s'ouvrir sur la "sécurité collective" dans l'Espace Cedeao en particulier et en Afrique en général, prenant en compte l'inclusion des peuples tant souhaitée et leurs intérêts!
Cette réflexion sera l'occasion d'une véritable revue "de la détérioration des termes de l' échange", qui asphyxie les populations africaines et enrichit de manière éhontée les puissances prédatrices des ressources naturelles, dont regorge le Continent !
l'Afrique s'est réveillée et ne retournera plus dans le profond sommeil dans lequel elle a été plongée pendant si longtemps, à coup de somnifère dispensé par les puissances prédatrices et leurs affidés ! Il faudra nécessairement en tenir compte, si on veut renforcer la démocratie sur le Continent.
Le triomphe de la démocratie ne se fera pas par le cliquetis des armes usurpatrices, ni au son des canons de ceux par qui le scandale est arrivé ! Elle se fera par le doux son des violons du nouveau "leadership africain" débarrassé des scories du passé et tout tendu vers la réalisation, non négociable, du bonheur des peuples d'Afrique.
Colonel (er) Mamadou Adje
JFK Warfare School
Expert en "Communication de Défense"
Spécialiste en gestion de "Situations d'Urgence "
Le 29 Aout 2023
Par Bathie Ngoye THIAM
BUS INCENDIE A YARAKH : DE FAUX TEMOIGNAGES RELAYES PAR LE MINISTRE DE L’INTERIEUR
Antoine Félix Abdoulaye Diome est en train de perdre sa crédibilité et cela ne doit pas l’étonner. Combien de Sénégalais ont été abattus par des hommes sous son autorité ?
Antoine Félix Abdoulaye Diome est en train de perdre sa crédibilité et cela ne doit pas l’étonner. Combien de Sénégalais ont été abattus par des hommes sous son autorité ? On nous parle d’hélice de bateau, d’objet contondant ou que sais-je encore alors que les autopsies révèlent des impacts de balles. On nous a aussi montré des images de terroristes tirant sur des manifestants et il s’est avéré que ces tueurs étaient avec les forces dites de l’ordre..
Mardi 1er août 2023, trois morts atroces à Yarakh, sur la même route. Deux personnes calcinées dans un bus, une autre tuée lors d’un « guet-apens » de la gendarmerie passé sous silence. Paix à leurs âmes ! Nos condoléances à leurs proches.
Devant la carcasse encore fumante du bus, le ministre de l’Intérieur s’exprime : « Je voudrais d’abord commencer par présenter mes condoléances les plus émues au nom de son Excellence Monsieur le Président de la République, Macky Sall, suite à cet attentat, à cet acte terroriste que nous venons d’enregistrer… » Allant trop vite en besogne, il développe sa dissertation politique, oubliant de dire à qui il destine ces condoléances. Il termine par « marquer sa compassion et toute sa solidarité, au nom de son Excellence Monsieur le Président de la République, Macky Sall, à l’égard du chauffeur Abdoulaye Diop, de son receveur, mais aussi à l’ensemble de toute la grande famille Aftu. » Pas un mot aux victimes (cinq blessées et deux décédées) ou à leurs proches. Et c’est lui qui proclame qu’il est particulièrement inhumain d’instrumentaliser la souffrance de familles pour servir une cause politique. Quel toupet ! Ensuite, conscient de sa bourde, il a tenté de se reprendre dans ses déclarations postérieures.
Rumeurs et controverses sur la réalité de « l’attentat terroriste »
Ce 1er août, nous n’avions entendu que le chauffeur du bus et Monsieur le Ministre. L’improbabilité de certains détails sautait aux yeux. De plus, les premiers journalistes arrivés sur place avaient signalé n’avoir vu ni cadavre ni blessé. Cela avait engendré d’inévitables interrogations et rumeurs. Il avait été dit que c’est un individu à bord d’un scooter qui avait lancé un cocktail Molotov dans le bus, que les blessés étaient évacués à l’hôpital Dalal Jamm… Le chauffeur avait même été confondu avec un policier. Toutes ces fausses informations ont vite été balayées, mais quelques questions restent sans réponses.
Les sept gros bras
Le 4 août, sur un plateau de télé, le ministre révèle : « Tel que nous l’ont relaté le chauffeur et les autres victimes blessées, les assaillants étaient au nombre de sept, mais pour l’instant nous en avons arrêté deux. » De quelles autres victimes parle-t-il ? Le receveur blessé au genou, une passagère qui était debout derrière le chauffeur et une grand-mère qui était dans le bus avec sa petite-fille, toutes des victimes blessées, déclarent n’avoir vu que deux agresseurs. Un des riverains les ayant secourues raconte : « Nous avons vu les boys descendre de la passerelle. Ils étaient deux. Ils ont jeté des pierres puis le cocktail. »
Le chauffeur, plus enclin à commenter les faits qu’à les relater fidèlement, parle dans ses différentes versions de « quelque chose comme sept personnes », « six ou sept personnes », « cinq, six ou sept personnes » qu’il décrit inlassablement comme des géants tels qu’on en voit dans les films : « Ces gars sont plus costauds et de loin plus grands que Balla Gaye. » Espérons que le ministre qui en a déjà capturé deux ne nous sortira pas des gringalets.
Etaient-ils encagoulés ?
Sept malabars encagoulés ne passent pas inaperçus en plein jour. Pourtant seul le chauffeur a dit les avoir vus. « On ne voyait que leurs yeux », répète-t-il. Le ministre a acquiescé et confirmé : « Nous avons été informé par la gendarmerie et par les éléments des sapeurs-pompiers que sept individus encagoulés ont pris en étau un car de transport en commun... » La gendarmerie et les sapeurs-pompiers n’étaient pas sur les lieux au moment des faits.
La grand-mère a un récit plus plausible : « J’ai vu arriver un jeune homme de grande taille et de teint clair habillé de noir, avec des lunettes noires, une écharpe au cou et une casquette sur la tête laissant paraitre ses rastas à l’arrière. Il a fait un geste pour arrêter le bus. Je croyais que c’était un client. C’est après qu’il a remonté son écharpe pour couvrir sa bouche. Il a injurié et a lancé une pierre contre une vitre... Le chauffeur s’est sauvé en oubliant d’ouvrir la porte, le receveur et les hommes ont sauté par les fenêtres... A la fin, il ne restait qu’une autre femme, un vieil homme, ma petite-fille et moi… » Peu après, le chauffeur modifie sa version : « Ils portaient des cagoules noires, des masques noirs (geste couvrant les yeux), des gilets noirs, des pantalons treillis et des casquettes. » Quel déguisement ! Comment donc a-t-il pu voir leurs yeux ?
Terroristes « addu kalpe »
Le chauffeur a raconté qu’après avoir mis le feu au bus, deux des assaillants ont « pincé » la porte arrière et sont entrés dans le véhicule pour s’emparer des sacs et téléphones des passagers. Le ministre : « Selon les premiers renseignements recueillis sur place, ces sept personnes encagoulées qui ont entouré le véhicule ont aussi dépossédé de leurs biens les passagers qui se trouvaient à bord. Téléphones portables, argent et autres effets personnels. » C’est vraiment tiré par les cheveux. C’était le sauve-qui-peut dans le bus en flammes. Comment imaginer deux individus y entrer, racketter les passagers et ressortir ?
Le chauffeur explique alors qu’ils ont fait tout cela avant que les flammes prennent de l’ampleur. Hum… Le ministre rajoute que certains passagers ont été dépouillés de leurs biens en sortant du bus. Il ne manquait plus que ça. Les rescapés démentent catégoriquement ces versions: « Ils n’ont « pincé » aucune porte, ils ne sont pas entrés dans le bus et n’ont rien volé… Nous étions prisonniers des flammes et de la fumée. Ce sont des riverains qui nous ont aidé à ouvrir la porte. Nous poussions et ils tiraient. Cela a duré longtemps. »
Qu’est-il advenu de la recette du bus ?
Dans une de ses innombrables interviews, le chauffeur déclare : « Ils ont pris des sacs et des téléphones. Ils ont même emmené la recette de mon receveur. » Le receveur, nettement moins bavard, le contredit : « Tout l’argent était dans un sac à mes pieds. Après, quand on se sauvait, le boy (le chauffeur ?) et moi, je ne me préoccupais pas de sac ou autre. Tout a brûlé. D’ailleurs, ceci en provient. » Et il montre quelques restes de billets de banque brûlés. Le chauffeur modifie encore sa version : « Toute la recette est partie en fumée. » Dans une autre interview : « Je ne sais pas si l’argent a été brûlé ou volé. »
Cinq blessés gravement brûlés.
Cette information émanait du ministre et du chauffeur. Mais le centre hospitalier qui a reçu ces blessés que l’on croyait entre la vie et la mort a révélé qu’ils ont été pris en charge et après une courte période d’observation, ils sont rentrés chez eux. Le plus sévèrement brûlé n’y est resté qu’environ quatre heures de temps.
Comment le chauffeur est-il sorti du bus ?
Il prétend qu’il a traversé les flammes, marchant donc sur une flaque d’essence en feu, et est sorti parla porte avant. Dans ce cas, il s’est forcément retrouvé nez à nez avec les terroristes qui « entouraient le bus » et venaient d’y jeter l’engin incendiaire. Comment leur a-t-il échappé ? Le plus incroyable est qu’il raconte que le cocktail Molotov a éclaté contre son pied et il n’a qu’une petite enflure au niveau du péroné. Cela est absolument impossible. Dès que cet engin éclate tout ce qui est à proximité s’embrase. Lors des manifestations en France et dans d’autres pays, quand un policier est touché par un cocktail Molotov, il s’enflamme immédiatement malgré tout son équipement et ne s’en sort que grâce à la prompte intervention de ses collègues. Le chauffeur doit avoir un grigri qui le rend ininflammable. Même ses vêtements et ses chaussures ne brûlent pas.
Où sont passés les autres passagers ?
Le ministre a dit que le bus était plein. Les seuls passagers retrouvés sont les sept victimes dont deux décédées. Les autres se sont évaporés. Le receveur livre une surprenante explication : « Ils ont pris la fuite quand la police est arrivée de peur, je suppose, d’être pris pour des manifestants à qui on jette des grenades lacrymogènes. » Si les forces de l’ordre sont si redoutées, on n’est pas loin de la gestapo et manifester est devenu un crime. Non seulement ces passagers sont restés introuvables mais, à notre connaissance, aucun de leurs proches ne s’est signalé. Du jamais vu au Sénégal. Est-ce l’inhabituel appel à témoins du procureur qui les effraie ?
D’après le chauffeur, c’est quand il s’est arrêté pour laisser descendre un client que les malfaiteurs en ont profité et ont jeté la « flamme » par la porte. Où est ce mystérieux client ? Était-il de connivence avec les terroristes ? Rappelons que très peu de bus circulaient ce jour-là. Difficile de prévoir les arrivées et les départs. Toutefois, le chauffeur avait le pressentiment que quelque chose de terrible allait se produire. C’est pourquoi il dit que « l’affaire » l’a surpris et ne l’a pas surpris. La grand-mère : « Pendant le trajet, le chauffeur demandait à ses collègues qu’il croisait ou trouvait dans les garages si la route était sure. Ils répondaient affirmativement. Il communiquait aussi avec d’autres gens que je ne voyais pas. »
Les personnes arrêtées
Le 5 août, un journal de la place nous informe qu’un des terroristes arrêtés a avoué avoir reçu la somme de 150 000 francs Cfa, pour incendier le bus. Son nom est donné et il lui est prêté une proximité avec Pastef. Deux jours plus tard, le ministre de la Justice nous dit que les auteurs de cette attaque ne sont pas encore identifiés. Allez donc y comprendre quelque chose. Quoi qu’il en soit, l’Intérieur et la Justice ont tenu à marteler que les dispositions du Code pénal punissent les auteurs des actes terroristes et leurs complices à une réclusion criminelle à perpétuité. Et nos vaillants enquêteurs trouvent facilement des liens avec un certain parti politique. Nos forces de l’ordre devenues forces de défense et de sécurité sont déjà à pied d’œuvre. Par des opérations dites de sécurisation nationale, les « hors-la-loi » sont raflés par centaines. Il faudra sans doute ouvrir des camps à Kédougou, Sébikotane et ailleurs pour les y concentrer. Là-bas, ils pourront manifester sans autorisation et recourir aux concerts de casseroles sans nous casser les oreilles.
Pastef et café-Touba
A l’Assemblée nationale, dans un sermon pouvant dresser des Sénégalais contre d’autres, l’imam Tony Félix touche une corde sensible : l’appartenance confrérique. Il annonce que « Lors des manifestations, les enfants qui « incendient » ont donné au cocktail Molotov le nom « Café-Touba ». Il entend des choses que nous n’entendons pas car c’est de sa bouche que cette appellation nous est parvenue. Après un exposé sur la sacralité du café-Touba, il avance que « celui qui donne ce nom à un engin explosif arracheur de vie, s’il dévoie un autre mot… » Il ne finit pas sa phare et assène que ceux qui ont nommé leur parti politique Pastef ont détourné ce mot du sens que lui donnait Serigne Saliou. Il y a de quoi mettre un mouride impulsif hors de lui. Prions pour qu’il n’y ait pas au prochain Magal de Touba et au Gamou de Tivaouane des « attentats terroristes » ou des « tentatives d’attentat » dont on peut déjà deviner les auteurs, les complices et les commanditaires.
Bathie Ngoye THIAM
DE LA NATIONALITÉ EXCLUSIVE DU CANDIDAT À LA PRÉSIDENTIELLE
Ndiaga Sylla, expert électoral et président du cabinet CEELECT, rappelle des dispositions de l’article 28 de la Constitution
« Le dialogue politique, renoué après la crise postélectorale de 1988, allait permettre l’entrée de l’opposition dans le premier Gouvernement de Majorité Élargie et faciliter la concertation autour du système électoral sénégalais. Ainsi la Commission Nationale de Réforme du Code Électoral (CNRCE), sous la direction de feu le Magistrat Kéba MBAYE, parvint à élaborer un Code électoral consensuel de 1992. Dans le même esprit, la Loi constitutionnelle n° 91-46 du 6 octobre 1991 portant révision de la Constitution fut adoptée en vue d’intégrer les recommandations de la CNRCE, notamment : la fixation de la majorité électorale à dix-huit ans ; la limitation du nombre de mandats du Président de la République et la durée du mandat à 7 ans ; l’autorisation des candidatures indépendantes et des coalitions de partis politiques ; les compétences des cours et tribunaux en matière de campagne électorale ; l’introduction du quart bloquant à l’élection du Président de la République.
Ce code électoral, adopté à l’unanimité des membres de l’Assemblée nationale le 20 septembre 1991prescrit dans la loi organique relative à l’élection du Président de la République et des députés à l’Assemblée que le candidat à la Présidence de la République déclare sur l’honneur qu’il a exclusivement la nationalité sénégalaise. Mais la Cour suprême, par un arrêt rendu le 15 novembre 1991, a jugé la loi organique non conforme à la Constitution. En vue de respecter le consensus issu des travaux de la Commission nationale de réforme du code électoral, le Gouvernement opte pour la modification de la Constitution. Par conséquent, la Loi n° 92-14 du 15 janvier 1992 abroge l’article 23 de la Constitution et le remplace par les dispositions suivantes : « Article 23. – Tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques et être âgé de 35 ans au moins ».
A l’exposé des motifs de cette loi constitutionnelle, « le Gouvernement a estimé que c’est à juste titre que la commission nationale de réforme du code électoral a souhaité que les candidats à la Présidence de la République n’aient pas d’autre nationalité que la nationalité sénégalaise ».
Il apparaît clairement que le législateur ne s’est pas soucié des conditions et formes d’acquisition d’une autre nationalité que pourrait détenirle candidat. Que le citoyen soit de « binationalité », « bi nationalité », « double nationalité » ou qu’il détienne la nationalité de tous les pays du monde, lui importe peu. Ily a lieu de souligner que la Constitution de 2001 a repris ces dispositions non sans y apporter des précisions et rajouts. C’est ainsi qu’en son article 28, elle dispose : « Tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques, être âgé de 35 ans au moins le jour du scrutin. Il doit savoir écrire, lire et parler couramment la langue officielle ».
Ce rappel historique prouve qu’il y a eu bel et bien un consensus au niveau des acteurs du jeu politique sur la nécessité d’empêcher que le Président de la République détienne une autre nationalité. Pour autant, la déclaration sur l’honneur prévue à l’article LO.114 du Code électoral et par laquelle le candidat atteste que sa candidature est conforme aux dispositions des articles 4 et 28 ne constitue pas une condition suffisante ».
*Extrait contribution publiée, le 12 février 2016
LES MOURIDES ET LE POUVOIR POLITIQUE
«Le pouvoir corrompt mais le pouvoir absolu corrompt absolument ». Cette assertion de Jhon Lock date du XVIIème siècle. Mais elle a posé de manière philosophique la nature de la politique et son influence sur la conduite de l’homme.
«Le pouvoir corrompt mais le pouvoir absolu corrompt absolument ». Cette assertion de Jhon Lock date du XVIIème siècle. Mais elle a posé de manière philosophique la nature de la politique et son influence sur la conduite de l’homme. La révocation de l’édit de Nantes ou la séparation de l’église et de l’état en constituent des péripéties qui montrent la difficulté des rapports entre le spirituel et le temporel.
Mais bien avant des penseurs musulmans ont posé le problème. Déjà en 1085 l’Imam Ghazali après avoir lu Aristote, Platon et Plotin, Ibn Sina et Al Farabi analysa les rapports de la politique et du pouvoir. Dans l’affrontement militaire et intellectuel, entre le sunnisme et le chisme, entre le califat Abasside d’une part et l’Etat Fatimide d’autre part, AL Ghazali est mobilisé. C’est ainsi que dans son ouvrage « les vices de l’ésotérisme », il pose le problème de la légitimation des pouvoirs politiques par le spirituel.
Ce débat posé à cette époque résume les rapports entre la mouriddiya et le pouvoir politique aujourd’hui au Sénégal. Mais Cheikh Ahmadou Bamba est le premier à le comprendre. Face à un pouvoir colonial qui combattait par une kyrielle d’actions négatives la bataille de revivification de l’islam que menait le Cheikh, les rapports furent conflictuels et le chisme absolu de mise.
Plus tard, l’engagement dans la politique des autochtones a entraîné une nouvelle configuration. En effet de Blaise Diagne à Macky SALL, en passant par Senghor, Abdou Diouf, et Abdoulaye WADE le temporel a eu toujours besoin de l’onction du spirituel. Mais ce besoin a toujours été sous tendu par un dipt y q u e attirance-répulsion. Heureusement pour la mouriddiya, la résistance héroïque, pacifique mais à la fin victorieuse de notre guide Cheikhoul Khadim, fondateur de la mouriddiya a permis jusqu'à une période récente de la décomplexer du pouvoir politique. Le refus du Cheikh d’occuper toute fonction fût-elle celle de Cadi montre combien la mouriddiya a constitué un pôle de résistance face à la force politique coloniale
Les indépendances ont changé la nature de ce rapport devenu plus cordial. Il en fut et il en est toujours ainsi entre les califes et les présidents de la république en exercice
Dans les relations particulières : Serigne Fallou/Senghor, Serigne Abdou Lahat/Abdou Diouf/ ; Serigne Saliou /Abdoulaye Wade, Macky SALL/Serigne Mountakha le temporel a toujours pensé avoir gardé la main en sa faveur. Mais en excluant de la gestion de l’état l’intelligentsia mouride par peur de sa force et de sa liberté ; ils leur ont conféré une virginité politique qui sera le germe de leur éclosion future.
Il faut savoir que le débat ne se pose pas en termes de rapports personnels ; mais entre la mouriddiya chevillée à la vérité islamique qui est du domaine de l’absolu et le pouvoir politique pourvoyeur de vérités multiples et relatives. Dans ce sens la disparition successive des gardiens du temple de la mouriddiya et l’avènement des califats des petits fils constituent une nouvelle donne. Il en est de même de l’existence d’un état nation qui se veut républicain mais qui respecte peu ou prou les règles démocratiques. En effet en voulant manipuler une communauté par le biais d’une poignée d’individus momentanément détentrice d’un pouvoir spirituel qui va changer de main, l’état se préoccupe peu de l’intérêt général de la mouriddiya. Se coupant ainsi sans le savoir d’une base électorale de plus en plus éveillée à la chose politique.
Sur le plan économique, l’état contrairement à ce qu’il fait croire aux mourides par le biais des «portes paroles» fait peu pour la communauté ; alors que 70% du PIB, plus de 60% des prélèvements fiscaux viennent d’une communauté productrice à souhait.
Pour preuve le grand magal de Touba regroupant plus de 4 millions de personnes (selon les chiffres officiels du ministère de l’intérieur) est un moment économique majeur pour le Sénégal. Tant du point de vue de la relance de la consommation, de l’augmentation des revenus ruraux, que des explosions des chiffres d’affaires (carburant, électricité, téléphone, transport, alimentation etc…). Permettant ainsi à l’état par le gain sur la Tva et autres taxes de s’enrichir à milliards.
Alors, il faut savoir raison garder, il ne peut y avoir d’accord tacite entre le pouvoir politique et la mouriddiya : à savoir la perpétuation du pouvoir politique entre les mêmes mains contre un droit de regard sur la discipline morale des masses
Cheikh Ahmadou Bamba s’est battu contre la colonisation. Il a payé au prix fort sa résistance pour vivifier l’islam et défendre sa communauté. Foi-Travail disait-il, oui mais pour nous donner l’indépendance de choisir nous même sans contrainte ni obligation. La mouriddiya pour rester fidèle aux enseignements du maître doit savoir que le moment est venu d’être l’acteur de la vie politique nationale mais non l’objet d’une utilisation temporaire par les hommes politiques. En effet personne ne défendra nos valeurs à notre place et ceci quel que soit sa bonne volonté. Mais les frontières devenues poreuses entre la politique et la religion nous obligent à prendre notre destin en main. La nature confuse des relations entre la mouriddiya et le pouvoir temporel ne permet pas une lecture claire de la situation par le citoyen lambda. Les comportements souvent aux antipodes de nos valeurs des hommes politiques, poussent à comprendre et à accepter la sanctuarisation de la ville Touba, Darou Mouhty et Darou Salam par rapport aux activités politiques. Ce cantonnement géopolitique ne peut nullement signifier une rupture définitive d’avec la chose républicaine. Car de par leur nombre, leur organisation, leur poids économique et leur patriotisme, la communauté doit jouer en externalité sa partition. Elle en avait les moyens, elle en a maintenant la capacité intellectuelle. Sinon elle risque de se faire marginaliser et distancer
Les défis du XXIème siècle sont d’ordre économique, pour les relever, la mouriddiya doit radicalement changer ses rapports avec l’état devenus confus car individualisés. Les hommes politiques doivent savoir pour l’intérêt de notre pays que l’apport de la pensée de Cheikh Ahmadou Bamba peut et doit servir à nos gouvernants afin d’ouvrir le chemin à une troisième voie vers le développement.
Quel paradoxe que les défenseurs de la laïcité trouvent normal ou comprennent que le Président américain prête serment sur la bible ; mais accepteraient-ils qu’un chef d’Etat sénégalais musulman le fasse sur le coran ou sur la Bible. Accepterons-nous que nos politiques publiques s’inspirent de la doctrine de la Mouriddiya comme les sociaux-démocrates en Europe? Voilà le dilemme Cornélien de nos penseurs et hommes politiques attitrés.
La mouriddiya grâce à l’héritage de son fondateur, sa vitalité économique et sa cohésion dans ses rapports avec l’état doit donner le la. C’est la seule manière pour elle de jouer son rôle protecteur de l’islam et celui de moteur de développement économique pour l’intérêt du peuple sénégalais. Afin que les acquis que nous ont légués les pères fondateurs de notre nation ainsi que Cheikhoul Khadim, soient préservés.
A l’heure de l’intelligence artificielle, la richesse des nations ne se détermine plus à l’aune de leur richesse en matière premières : le gaz, le pétrole, le lithium, le zircon etc…. ne suffisent pas pour mener un pays à l’émergence et au développement.
La pauvreté extrême des pays qui sont pourvus de ces matières premières en constituent la preuve irréfutable. Dans notre pays la déliquescence de nos valeurs exacerbée par l’utilisation inappropriée des réseaux sociaux, l’ignorance de nos valeurs cardinales, le manque de patriotisme empêchent et empêcheront notre décollage. Dans cette optique se ressourcer dans les écrits de nos ancêtres chevillés autour de la foi, du travail de l’action et de la discipline constitue notre seule voie de salut.
L’apparition de l’intelligence artificielle et son développement fulgurant dans les pays développés creusera davantage le retard de nos nations.
L’absence de réforme de la gouvernance économique mondiale nous plombera définitivement. Mais ces énormes batailles futures à mener ne peuvent être réussies sans une remise en cause de «l’homo Senegalensus» tel qu’il est aujourd’hui.
Ibrahima SALL
Economiste - Consultant Président du Model
Par T. Assane Bâ
LE PARADOXE DU FOOT SENEGALAIS
Au Sénégal, nous sommes désolés de le dire, les dirigeants veulent construire le football en commençant par le haut. Ce qui est important pour eux, c’est le résultat des équipes nationales et rien d’autres.
Au Sénégal, nous sommes désolés de le dire, les dirigeants veulent construire le football en commençant par le haut. Ce qui est important pour eux, c’est le résultat des équipes nationales et rien d’autres. A preuve, de 2021 à 2023, le foot sénégalais connaît des jours fastes au niveau des équipes nationales toutes catégories confondues.
Ces dernières ont raflé presque l’ensemble des coupes mises en compétition. Le Sénégal a été l’un des premiers pays africains à faire le plein de trophées en moins de deux ans. En effet, les Lions, après plusieurs années d’attente, ont vu leurs efforts couronnés de succès pour avoir remporté pour la première fois de son histoire la coupe d’Afrique des nations seniors au Cameroun. S’ensuivent par la suite d’autres trophées comme celui du Beach Soccer, du Championnat d’Afrique des nations (Chan), de la coupe d’Afrique des moins de 20 ans et des moins de 17 ans. A cela s’ajoute même celui dessourds muets. Tout cela pour montrer que le Sénégal s’est hissé sur le toit du football africain durant ces deux dernières années. Ému par tant de trophées, le président Macky Sall avait promis un plan Marchal du foot local. En attendant de définir les contours, le Sénégal reste un géant aux pieds d’argile. Le week-end dernier, les clubs, représentants du foot local ont tous été éliminés sur le plan africain. Aucun club n’a réussi à sortir la tête des préliminaires. Ce qui voudrait dire en d’autres termes que le Sénégal reste au niveau des clubs en deuxième division, mais en première au niveau des équipes nationales. Le football sénégalais a commencé, après plusieurs années de disette, à se faire respecter à partir de 2000.
La JA de feu le président Omar Seck avait commencé à jeter les bases en 1998 en réussissant à se hisser pour la première fois en finale d’une ligue des champions. Une finale perdue face au club Sfaxien. Cette génération de joueurs a été la base de l’équipe des Lions qui ont réussi à se qualifier à la Can au Nigeria avant d’être renforcé par les professionnels venus d’Europe. Avec un maigre budget, les clubssénégalais ne peuvent pas rivaliser avec leurs homologues africains. Ce n’est pas le talent qui manque, mais tout est lié à un problème d’organisation. Les dirigeants du foot restent attentifs au plan Marchal du football local prôné par le chef de l’État. Des mesures urgentes doivent être prises pour empêcher les meilleurs joueurs de migrer dans des clubs européens
Les solutions ne manquent pas car tout a été cogité, il reste seulement la volonté politique. Mais puisque Macky Sall veut prendre à bras le corps le problème, nul doute qu’il va tenter de poser les jalons avant son départ à la tête du pays. Cette élimination prématurée des clubs au tour préliminaire des différentes compétitions africaines prouve à suffisance le paradoxe du football sénégalais où les équipes nationales caracolent en tête, là où les clubs rasent les murs ou sont les premiers à la queue.
par Madiambal Diagne
CES BOUFFONS QUI SE RÊVENT PRÉSIDENT DU SÉNÉGAL
Cest une foire aux candidatures, aussi bien dans le camp de la majorité que dans celui de l’opposition. N’a-t-on pas déjà assisté à l’élection de maires si indignes ou de députés les plus ignares qu’il puisse exister en 2022 ?
C’est à croire que l’homme politique sénégalais n’apprend pas de ses erreurs ou de celles des autres. En novembre 2011, j’ai reçu une personnalité qui a eu à exercer de hautes fonctions au sein de l’appareil d’Etat et qui songeait à se présenter à la présidentielle de 2012. Mon hôte souhaitait bénéficier de mon soutien et m’annonçait vouloir me confier la gestion de ses fonds de campagne. Je le remerciais de cette marque d’estime et de confiance, tout en lui soulignant que de mon point de vue, il était en train de se fourvoyer sur son poids électoral et sa capacité à gagner l’élection ou même à y peser de façon significative. Je lui conseillais ainsi de soutenir un candidat de sa génération, en l’occurrence Idrissa Seck ou Macky Sall. J’expliquais que derrière un de ces deux candidats, il ferait figure en quelque sorte de numéro deux de celui qui pourrait gagner ou être, à tout le moins, faiseur de roi.
En effet, mon analyse voulait que sa représentativité électorale pourrait demeurer un mythe et nul ne saura réellement son poids électoral mais que si d’aventure il se mettait à se peser devant les électeurs, le mythe tomberait fatalement. Mon interlocuteur, comme vexé par ma réflexion, éclata de rire et considérait que c’est l’un ou l’autre (surtout Macky Sall) qui devait se ranger derrière lui. Et contre toute rationalité, il se lève pour me dire avec assurance que c’est lui le prochain président de la République et qu’il a fini de faire faire le «listikhar» (forme de prédiction ésotérique fondée sur des préceptes coraniques). Je restais dubitatif en lui affirmant : «Dans ce cas, je ne vous empêcherais pas alors de devenir président de la République du Sénégal.» Nous nous quittions en nous promettant de nous revoir. Plus jamais il n’est revenu vers moi, mais la personne a suivi sa logique en posant sa candidature. Je ne pouvais m’empêcher de faire une chronique le 9 janvier 2012 intitulée : «L’erreur de se compter», sans pour autant évoquer cette anecdote. Je mettais en garde ce genre de candidats, qui se multipliaient, contre le ridicule auquel ils s’exposaient ainsi. Le fameux candidat a récolté un suffrage franchement humiliant.
Aux élections législatives du 30 juillet 2017, chaque Sénégalais semblait se voir «députable». Le foisonnement des listes de candidatures était tel que quelque 47 listes s’étaient lancées dans la course. Là aussi, le 19 juin 2017, nous publions une chronique d’alerte pour dire : «On finira par ne plus les prendre au sérieux.» Les élections législatives 2017 se révéleront être les plus chaotiques de l’histoire électorale du Sénégal, avec une désorganisation dans la campagne électorale et un véritable chaos le jour du scrutin. Au final, seules huit listes avaient pu engranger au moins un siège de député.
C’est en tenant compte de ces enseignements que le gouvernement a voulu instaurer, après une concertation avec la classe politique, le système du parrainage citoyen comme un filtre pour éviter les candidatures farfelues. L’opposition politique, qui avait pourtant souscrit à l’idée du parrainage, se rebiffa sur les modalités jugées trop contraignantes et les positions se montraient si figées que les parlementaires de l’opposition boycottèrent la séance d’examen de la réforme du Code électoral instituant le système du parrainage. Ce système sera expérimenté à la Présidentielle de 2019 et aux législatives de 2022. Il a pu permettre de limiter le nombre de candidatures et reste maintenu, même si une réforme survenue en 2023 en allège un peu les modalités.
Il n’empêche qu’on assiste de nouveau à une foire aux candidatures, aussi bien dans le camp de la majorité que dans celui de l’opposition. Nous disions : «Ce pays est-il devenu une péripatéticienne debout au coin de la rue pour que tout le monde puisse s’autoriser à lui demander des faveurs ? N’importe quel énergumène, farfelu ou va-nu-pieds, peut se fabriquer de vagues états de services ou des titres académiques et se porter candidat à la Présidentielle. C’est comme si chaque citoyen de ce pays voudrait devenir Président. C’est à croire que tout le monde y pense : du lutteur du dimanche au chef d’entreprise, du commerçant du coin au professeur d’université, de l’artiste au journaliste. En vérité, sous nos costumes stricts ou nos grands boubous amidonnés, il y a toujours un grain de folie à libérer en clamant : «Je veux être président.» Ils sont tous devenus fous.» Ces lignes sonnent si actuelles, comme si on les a écrites aujourd’hui même.
Ne risquerait-on pas de faire élire un indigne à la fonction présidentielle ?
Le camp de Benno bokk yaakaar se déchire en mille morceaux. L’annonce du renoncement de Macky Sall semble avoir libéré toutes les ambitions, les plus folles. D’aucuns sont bien conscients de ne pouvoir rassembler les parrainages nécessaires ou ne mettront pas des ressources pour battre campagne. N’empêche, ils se rêvent dans le rôle d’un présidentiable et occupent la scène publique. On est presque certain que le Président Sall ne leur vouerait pas assez de respect ou de considération pour songer faire avec certains d’entre eux une cérémonie de passation de pouvoirs au matin du 2 avril 2024. Seulement, au nom d’on ne sait quelle absurde logique, il les accepte autour d’une table ou dans des séances de casting pour désigner le candidat qui portera le flambeau de Benno bokk yaakaar. S’il voulait brouiller les cartes et rendre vulnérable le candidat qu’il aura choisi, il ne s’y prendrait pas mieux ! L’émiettement du réservoir d’électeurs de Benno bokk yaakaar risquera d’amoindrir leurs chances respectives à se qualifier pour un éventuel second tour à la présidentielle de 2024. La raison les visitera-t-elle pour leur éviter de se saborder ? Rien n’est moins sûr ! Au demeurant, certaines candidatures semblent s’expliquer par la recherche d’une certaine impunité. Des prédateurs de ressources publiques, poursuivis par la clameur publique, ont le toupet de demander à être président de la République, mais peuvent monnayer leur retrait au profit d’un candidat qui leur garantirait l’impunité.
On assiste à la situation identique de foisonnement des candidatures au niveau de l’opposition. Chacun des leaders se voit comme le prochain président de la République. Ils cherchent tous à se disputer le même électorat, le bassin des mécontents ou frustrés du régime de Macky Sall. La compétition est encore d’autant plus ouverte dans les rangs de l’opposition que les situations judiciaires de la figure de proue de l’opposition, Ousmane Sonko, et de ses principaux lieutenants, semblent montrer que le parti Pastef sera hors de la course électorale de 2024. Ainsi s’évertuent-ils à donner des gages de fidélité et de loyauté pour espérer, le cas échéant, recueillir l’électorat du parti Pastef. La manœuvre semble d’ailleurs être cousue de fil blanc aux yeux de nombreux militants du parti du maire de Ziguinchor.
Qu’ils soient tous candidats d’un bord comme de l’autre, les votes seront éclatés et au soir du décompte des votes, les candidats sont partis pour se tenir dans un mouchoir de poche et les différences seront estimées à quelques centaines ou dizaines de voix. La conséquence sera que la qualification à un second tour pourrait se révéler si étriquée et suscitera à coup sûr de vives contestations de cette élection. Un Tartempion, parce qu’il aura de l’argent pour acheter des votes ou parce qu’il aura la grande gueule ou qu’il aura la possibilité d’être soutenu par des milieux les plus lugubres et les plus dangereux pour la paix et la sécurité dans ce pays, se retrouverait dans une posture de pouvoir devenir président de la République ! Et si le schéma catastrophe se réalise pour qu’il le devienne, qu’adviendrait-il de ce pays ?
L’interrogation ne devrait pas résulter d’un pessimisme exagéré ou d’une prophétie d’un oiseau de mauvais augure. En effet, n’a-t-on pas déjà assisté à l’élection de maires si indignes ou incompétents ou de députés les plus ignares qu’il puisse exister, aussi bien aux élections locales de 2022 qu’aux élections législatives de la même année ? Certains de ces élus sont totalement inconnus de leurs électeurs qui, le lendemain du scrutin, cherchaient à voir à quoi ressemblait la personne qu’ils venaient ainsi d’élire pour diriger leur communauté ou les représenter à l’auguste Assemblée nationale. Les populations n’ont pas tardé à récolter les mauvais ou amers fruits de leurs turpitudes. Apprendront-elles de ces désillusions ? Peut-être aussi que les populations élisent toujours les dirigeants qu’elles méritent.
Le 7 août 2023, dans ces colonnes, nous avons essayé d’attirer l’attention sur des risques d’ingouvernabilité du Sénégal en 2024, mais force est de dire que nous faisons tout pour installer le chaos. La pratique politique est viciée dans ce pays avec des chômeurs professionnels ou des gens qui n’arrivent pas à se réaliser et qui trouvent que la politique reste le moyen le plus rapide ou le plus commode pour accéder à l’honorabilité sociale ou aux prébendes.
Le stratagème est simple, il suffit de créer un parti politique ou un mouvement citoyen, aussi facilement qu’on se ferait une omelette, pour pouvoir s’asseoir à une conférence des leaders avec un sigle et participer à investir un candidat et bénéficier d’un retour d’ascenseur une fois que le candidat remporte l’élection présidentielle. On voit des personnes être nommées à des emplois publics sans le moindre mérite ou la moindre qualification professionnelle. Il leur suffit simplement de pouvoir se prévaloir d’être le représentant de telle organisation politique. N’a-t-on pas vu des responsables recevoir des enveloppes régulières et des vivres, parce qu’ils sont comptés parmi les dirigeants d’organisation ayant soutenu tel ou tel candidat victorieux ? Les présidents Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et Macky Sall ne nous démentiront pas ! Que Dieu veille sur le Sénégal !
PAR Habib Ba
MACKY SALL : TABLEAU CLINIQUE D’UN DICTATEUR
EXCLUSIF SENEPLUS - Depuis qu’il est là, on ne lui connaît pas de numéro 2, de dauphin, de candidat, à six (06) mois d’une élection dont il n’est pas partant. Ce qui ne l’empêche pas de tenir en joug et sous le stress toute une nation
Le dictateur est un personnage qui pèche par Hybris. Le dictateur est arrogant, orgueilleux, démesuré et vaniteux. Autant de traits psychologiques qui le rendent excessif et débordant tel un fleuve qui sort de son lit et cause des dégâts. L’orgueil, l’ignorance, la carence de sens historique et de culture le pousse à violer les principes universellement reconnus et acceptés. C’est pourquoi le dictateur finit toujours par lancer un défi à Dieu et au Cosmos.
Par exemple, Pharaon a fini par dire un jour qu’il est le Seigneur très-Haut. Nous avons entendu notre apprenti-Pharaon local, nous rappeler un jour que les choses dépendaient de sa « Volonté ». Comme Tantale qui défia les Dieux de l’Olympe, le dictateur aussi ignore, viole, désacralise les deux (02) formules qui ornent le Temple de Delphes : Gnothi seauton -Connais-toi-toi-même et Mêdan agan -Rien de trop.
Le dictateur est celui qui ne connaît pas qui il est, celui qui ne reste pas à sa place, qui se prend pour Dieu, fait du wax waxéet, viole le droit, les principes du droit romain - par exemple rendre à chacun le sien. Il veut tout prendre, occuper toutes les places, faire ombrage à tout le monde. Il se croit supérieur aux « Autres », pour parler comme les Judas qui devraient s’appeler logiquement Yeew Askanwi. Il est le Roi-Soleil. Peut-être parlera-t-il un jour comme Napoléon : « J’ai le droit de répondre à toutes vos plaintes par un éternel « je suis ce que je suis ». Je suis à part de tout le Monde, je n’accepte les conditions de personne. Vous devez vous soumettre à toutes mes fantaisies, et trouver tout simple que je me donne de telles distractions ».
Les courtisans de Staline lui faisaient croire qu’il était plus haut que les espaces célestes et que seules ses Pensées étaient plus hautes que lui. Cependant, il était le plus médiocre et le plus faux d’entre tous. Même les talons compensés n’étaient pas oubliés pour mystifier les foules, cacher son Jeu, apparaître toujours sous de grands airs.
Les études et examens biographiques et cliniques sur les dictateurs, tyrans et despotes, à travers le temps, révèlent un résultat effroyable unanimement partagé, à savoir leur folie. La règle veut que le dictateur vienne de la plèbe, de la populace. C’est un personnage qui n’est même pas d’accord avec lui-même. Il est dans le ressentiment, la vengeance. Il est dans un déchirement intérieur permanent, un conflit psychique qui s’aggrave de jour en jour. Le dictateur est miné, dominé par les forces réactives et négatives qu’il porte originairement en lui. Il vit dans l’Anarchie des instincts. Et comme il lui manque la science de l’esthète et de l’artiste, il recourt, en parfait Butor, brute, bête et gribouille politique qu’il est, à la Castration, à la liquidation, à la « réduction de l’opposition à sa plus simple expression ». Supprimer, éliminer tout ce qui ne l’arrange pas. Tâche vraiment impossible quand on sait que ce sont la dialectique, le principe des contraires qui sont à la base de la vie, de la perpétuation de la vie. Il n’a jamais entendu le rôle, le travail nécessaire et positif du négatif.
Le dictateur est incapable de donner du style à son caractère, d’harmoniser, de mettre en accord les forces réactives et actives en son sein. Il est incapable de sublimation, d’élévation, de catharsis, de grandeur, de pardon, de désintéressement - il fixe des conditions à ses soi-disant actes de bonne Volonté et de grandeur, des conditions, « da ngéen may naan ci njéek ».
Les faits et gestes du dictateur ne sont ni spontanés, ni naturels, ni dépourvus de calculs. Il est sournois, il louvoie, la démarche est lambine. Ses actes ne sont pas harmonieux, ni authentiques. Au contraire, ils sont irréguliers, saccadés, coincés. Avec lui, le grand style, le raffinement ne sont pas au rendez-vous. Depuis qu’il est là, on ne lui connaît pas de numéro 2, de dauphin, de candidat, à six (06) mois d’une élection dont il n’est pas partant. Ce qui ne l’empêche pas de tenir en joug et sous le stress toute une nation. Il n’est pas en mesure de surmonter le conflit psychique qu’il porte. Il a peur, c’est un Matamore incapable de spiritualiser l’inimitié. Même Carl Schmitt, le juriste et philosophe du Nazisme, reconnaît la nécessité d’un ennemi fort. Il est l’Archétype de l’opposant au pouvoir. Maître Wade ne refusait pas les joutes démocratiques faisant confiance à sa culture et à son charisme.
Le vrai opposant au pouvoir est donc le premier dictateur de notre pays depuis 1960, dépourvu de culture et de charisme, qui a une revanche à prendre sur la société et qui ne compte que sur la force et l’arbitraire pour imposer sa volonté. Nous espérons bientôt refermer cette malheureuse parenthèse qui a balafré de façon indélébile, l’image d’exception qu’était le Sénégal. Que nous redevenions les artistes que nous fûmes et que nous retrouvions très rapidement notre science des médecins qui ajoutent du sucre, du miel, du vin dans leurs mélanges afin d’atténuer l’amertume de l’absinthe !
par malick sy
L’ALERTE DE TECHNICIENS SUR LES RISQUES
Le train va rouler lors du prochain magal de Touba. C’est le voeu des autorités en charge de ce secteur qui veulent ainsi satisfaire à une vieille doléance des fidéles nostalgiques de ce moyen de transport. A-t-on mesuré tous les risques sécuritaires?
Le train va rouler lors du prochain magal de Touba. C’est le voeu des autorités en charge de ce secteur qui veulent ainsi satisfaire à une vieille doléance des fidéles nostalgiques de ce moyen de transport. A-t-on mesuré tous les risques sécuritaires pour mettre en circulation le train durant cette période de rush. Selon Bes bi Le Jour, des techniciens émettent des réserves et alertent sur les risques possibles d’accidents et demandent d’y sursoir.
L’idée est géniale : réentendre le sifflement du train, et surtout sur l’axe Touba-Diourbel. C’est une volonté des autorités politiques, exprimée en juillet dernier, pour faciliter le transport des personnes lors du Magal. Précisément par le Directeur général du Chemin de fer du Sénégal (Cfs), Malick Ndoye, lors d’une réunion d’information, le 18 juillet dernier, consacrée à la réhabilitation du chemin de fer sur l’axe Dakar-Tambacounda. Et on était à seulement 45 jours de l’événement religieux. Il y avait tout de même des préalables, beaucoup d’ailleurs, pour y arriver.
Le Dg du Cfs avait indiqué que la circulation du train entre Diourbel et Touba est assujettie à des conditions dont « le visa technique » qui est délivré par l’ingénierie. Mais cette remise en service serait « exceptionnelle », juste pour les besoins du Grand Magal de Touba, parce qu’il y a des travaux de sécurité à mener. Pour le cas spécifique du tronçon Diourbel-Touba, voici les éléments marquants du projet de réhabilitation du chemin de fer : « 45 km de ligne à rouvrir, 700m de renouvellement de voie, 13 passages à niveau à sécuriser, 14 appareils de voie à renouveler ou à entretenir, 230m d’ouvrages hydrauliques à régénérer ou à entretenir, 1 ouvrage busé à rétablir, 700 m de dressage, nivellement et bourrage mécanique lourd et 2000 tonnes de ballasts à remettre en voie. »
Sans doute, tout cela a été fait ou en tout cas le maximum pour procéder même à des essais. Puisque le « voyage inaugural » a été fait, jeudi, avec une grosse satisfaction du ministre des Transports. « Cela veut dire que 72 heures avant le Magal, le train va commencer à rouler de Thiès vers Touba ou bien de Diourbel vers Touba, vice-versa, pour transporter les fidèles en période de Magal », s’est réjoui Mansour Faye à l’Aps. Trois jours après le Magal également, « le train va continuer à desservir les fidèles pour leur retour après avoir célébré cet évènement religieux », a-t-il ajouté. Il a, en outre, salué le travail « remarquable » du directeur général des Chemins de fer du Sénégal. Mais des spécialistes émettent des réserves sur cette mise en circulation du train.
« Un risque de faire circuler des trains en période de grande affluence »
A l’appui de documents, des spécialistes du chemin de fer doutent sérieusement des garanties de sécurité pour remettre le train sur les rails. « Les rails actuels datent de l’époque colonial et ne sont plus fabriqués dans le monde entier. D’autres types de rails devraient être trouvés mais, cela n’a pas été fait », affirment-ils. Rien que pour cela, estiment-ils, « c’est un risque d’y faire circuler des trains, surtout en période de grande affluence des passagers comme le Magal ». Dans un document sous forme de contre-rapport technique, ils sont formels : « Il est impossible de rendre opérationnel en deux mois un train, même un train de marchandises. Ils font du rafistolage. C’est quelque chose de très sérieux le transport des fidèles, et il faut le traiter de façon sérieuse. C’est un show politique qui peut nous coûter très cher en vie humaines parce qu’on ne démarre pas un nouveau service en période de rush. Le programme de restauration des gares est non effectif. Mieux, les gares ne sont pas sécurisées. Le système de communication est défaillant pour ne pas dire inexistant, pas de système signalétique ni de passages à niveau sécurisés. Il y a des risques de déraillement parce qu’en période de magal, on ne contrôle plus les charges au niveau des voitures encore moins au niveau des trains. Maintenant, si on veut escamoter les procédures et faire du show politique en mettant en jeu des vies humaines sur une période aussi sensible que le magal, si on laisse faire et on se tait, on est tous complices. »
Et ces techniciens estiment que, « techniquement, un train qui n’a pas roulé pendant plus de trois ans, qu’on veut remettre dans un timing de deux mois, cela pose problème ». Ils ajoutent : « Ils sont en train de poser des traverses, c’est très risqué de faire rouler en période de magal. Il n’ y a pas eu de test de circulation grandeur nature sur le tronçon Thiès-Diourbel, encore moins sur l’axe Diourbel-Touba où on fait du rafistolage. Cela devient un problème. » S’agissant de la démolition de rails et traverses existants, soulignent-ils, il n’est pas complètement réalisé sur toute la ligne ferroviaire du tronçon Diourbel-Bambey. S’agissant des passages à niveau et des emprises, aucune mesure n’a été prise. Ces mêmes techniciens confient : « Les emprises des passages à niveau dénombrés au niveau des communes de Diourbel, Bambey, ne sont pas sécurisés. » Cette même préoccupation a été faite lors du Comité régional de développement consacré à la relance du chemin de fer par le préfet du département de Bambey.
Les revendications des travailleurs
Pour mener à bien les missions à eux confiées, les travailleurs, par la voix de Babacar Gaye, Secrétaire général du Syndicat unique des travailleurs du rail (Sutrail) veulent être « bien équipés et motivés », pour accomplir leur travail en toute quiétude. « Le Grand Magal, étant un service spécial, doit être une totale réussite, d’autant que tout le monde nous regarde pour ce qu’on va donner en termes de résultat. Raison pour laquelle, la Direction générale doit renforcer les moyens pour accompagner les braves agents de la Direction des infrastructures ferroviaires (Dif), de la Direction du matériel roulant (Dmr), de la Direction de l’exploitation (Dex) et de la Surveillance générale, tous engagés pour accomplir la mission. Certes, il y a des efforts consentis, mais ils méritent d’être augmentés ».
Mansour Faye, ministre des Transports : « C’est un test grandeur nature »
Le ministre des Transports, Mansour Faye est ravi que le train recommence à siffler pour faciliter le transport des fidèles. Mais il précise : « Si toutes les conditions sécuritaires sont réunies, un plan de circulation sera mis à la disposition des voyageurs et des populations à l’occasion du Grand Magal. C’est un test grandeur nature qu’on va apprécier, analyser pour la suite à donner, en vue de prendre les dispositions appropriées pour un transport des voyageurs par train. »
L’histoire de Touba avec le rail
Entre la confrérie mouride et le chemin de fer, c’est une longue histoire. En effet, pour la construction de la grande mosquée de Touba, Cheikh Mouhamadou Moustapha Mbacké avait mobilisé les fidèles mourides. Ce sont ces derniers qui ont financé sur fonds propres les travaux. Cet attachement au rail explique sans nul doute, l’enthousiasme qui a accueilli l’arrivée du train, jeudi dernier, au niveau des gares ferroviaires de Mbacké et de Touba.
Malick Ndoye, Dg des Cfs : « Les résultats de l’audit du matériel roulant sont rassurants »
Interpellé sur ces risques de faire circuler le train durant le magal, le Directeur général des Chemins de fer du Sénégal renvoie au Directeur général des Grands trains du Sénégal (Gts) : « On devrait terminer avant le Magal comme indiqué précédemment, sauf cas de force majeure. Pour les trains, je vous prie de contacter M. (Samba) Ndiaye qui en a la charge. Je suis en charge de la voie ferrée des bâtiments gares/exploitation et des trains de fret. En complement, je peux d’ores et déjà vous dire qu’on a mandaté un auditeur pour inspecter les trains avant de les autoriser à rouler sur notre réseau. Les résultats de l’audit du matériel roulant sont rassurants ; d’où l’autorisation de faire les tests de rodage à partir d’aujourd’hui (17 août). »
Sur la question des risques de faire rouler le train, Babacar Gaye, Secrétaire général du Syndicat unique des travailleurs du rail (Sutrail), confie : « Rassurez-vous, aucun risque ne sera pris pour la circulation des trains lors du Magal, car la plate-forme est en train d’être reprise pour soutenir la voie ferrée. L’expertise est avérée à tous les niveaux pour garantir la sécurité des circulations. L’infrastructure est renforcée, et côté matériel aussi, des tests sont en train d’être effectués avec les rames des Grands trains du Sénégal, avant tout transport de pèlerins. Donc, on va s’assurer de tous les aspects liés à la sécurité et au confort avant démarrage. »
Samba Ndiaye, Dg des Gts : « Toutes les conditions techniques et humaines sont réunies pour aller à Touba »
Le Directeur général des Grands trains du sénégal (Gts), Samba Ndiaye, déclarait à l’Aps, le 17 août, lors d’une remise de dons au daara de Coki, dans la région de Louga : « Il n’y a que quelques réajustements à faire sur un train, c’est pour dire que toutes les conditions techniques et humaines sont réunies pour que nous puissions aller à Touba pendant le Magal. Le personnel a été formé en conséquence, et le matériel a été inspecté, il y a deux jours, ce qui a donné des résultats favorables. » Pour lui, « cette volonté d’aller à Touba pendant le Magal s’inscrit dans le cadre de la Stratégie nationale ferroviaire déclinée par le président de la République ». Laquelle a pour objectif de relancer le trafic ferroviaire sur l’ensemble du territoire national.
Les Gts sont dotés d’un parc de trains constitué de trois rames réversibles de 240 places chacune et d’un train express de 392 places. « Aujourd’hui, la dynamique, c’est que nous devons aller à Touba pendant le Magal. Alors, on espère que les moyens financiers suivront pour que véritablement cet outil de transport de masse qui garantit la sécurité et le confort des voyageurs puisse faire son travail d’antan, qui constituait à transporter les populations vers des destinations comme Saint-Louis, Bamako et Touba », a-t-il dit. Jeudi dernier, le ministre des Transports terrestres, Mansour Faye déclarait à l’issue du voyage entre Diourbel et Touba par le train : « Je suis très satisfait de l’état d’avancement des travaux de réhabilitation du chemin de fer Dakar-Diourbel, surtout par rapport à la diligence apportée à ces travaux en cours, dont la réception est prévue au mois de décembre prochain ».