SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
28 novembre 2024
Opinions
par l'éditorialiste de seneplus, ada pouye
L’ANE DE BURIDAN
EXCLUSIF SENEPLUS - Il mesure sa popularité au nombre de manifestations de soutien comme du temps glorieux de Mobutu et s’enorgueillit, mais avec une modestie bien feinte
L’homme politique a souvent la réaction rapide face à l’usure du pouvoir tout en restant placide tant que l’événement qu’il commente est favorable à la préservation de sa carrière. Il rallie ainsi à sa cause, évidemment noble et salutaire, de nouveaux partisans tous partisans du conservatisme qui demain, il l’espère, seront les artisans de son évidente conservation du pouvoir. Il mesure ainsi sa popularité au nombre de manifestations de soutien comme du temps glorieux de Mobutu et s’enorgueillit, mais avec une modestie bien feinte, que sa parole évangélise d’autres relais d’opinion. Il sent que son heure de gloire est toute proche et qu’il va ressusciter les velléités de l’entre-nous et susciter l’adhésion des bénéficiaires de la ploutocratie. Les manifestations grandeur nature, les siennes mais surtout celui de ceux qui l’entourent, est son principal outil de propagande puisqu’il enregistre et diffuse tout de ses déclarations et prises de position et de son bilan.
Mais le smartphone a de la mémoire et archive pour les VAR. C’est là que ce viscéral objet d’immédiate communication qui a supprimé la conversation d’hier tant il a réussi la conversion d’une majorité à survoler les faits, peut devenir pour lui un redoutable levier d’adversité. Bonjour les VAR, la coupure provisoire du signal des TV dissidentes, d’internet et des réseaux sociaux. Circulez, il n’y a rien à voir !
Bon, la veille du grand matin des élections, le candidat à sa reconduction a la fonction suprême, fort de l’onction populaire qui valide son aura, s’épanche sur la situation évidemment reluisante de son pays, dénonce les dérives populistes des oppositions et confirme essentiellement qu’il veut finir les chantiers qu’il a ouvert et son état d’esprit volontaire et solidaire pour conserver la grandeur, honneur et bonheur au pays.
Le citoyen en rêvait. Que la réalité advienne.
Bien avant midi, après les festives agapes de sa réinvestiture, les distributions de fonction, les promesses à quand même réaliser, les voyages diplomatiques, les promotions claniques, les inaugurations spectaculaires, les stériles conférences continentales, les sondages coûteux, les premières critiques et la flatterie courtisane, le démocrate en son palais trouve qu’il mérite bien mieux que de simplement présider !
Avant de déjeuner avec de rares privilégiés, il concocte quelques curieuses tactiques pour pouvoir faire avaler à son peuple sa faim de maîtriser plus rigoureusement son avenir, le sien bien sûr, celui du pays en bénéficiant aussi, promis, juré. À l’heure de se mettre à table, sa décision est arrêtée : n’en déplaise aux tortueux, scabreux, belliqueux, calomnieux et autres envieux de tous bords, il sera autocrate… à nuance bienveillante si le peuple ne gronde pas trop. Celui-ci est à plat, mais devant la promesse autoritaire de l’auto-promu de lui accorder une part du dessert, il rêve encore, mais ne dort que d’un œil. C’est qu’il se doute qu’un cauchemar est possible.
De 14h à 16h, le chef absolu désormais s’invente des exploits économico-sociaux, vante ses relations internationales, évente quelques rumeurs malveillantes sur les râleurs et les emmerdeurs, réarme sa sécurité et s’alarme de sa baisse de popularité. Mais surtout, il s’isole dans ses certitudes et se convainc qu’il peut faire encore plus que mieux pour lui. À savoir durer, durer en son palais et privatiser sa gouvernance à la César.
De 16h à 19h, il affine son plan, dessine le contour de son coup d’éclat illégitime et met dans la confidence ses plus obligés et zélés encenseurs. Après un court éclair de lucidité, il renonce à s’autoproclamer empereur, mais dictateur lui sied bien.
Au journal télévisé de 20h, à l’instant de la soupe populaire pour les gens d’en haut, le pays digère très mal l’information. Les maux citoyens resurgissent. La rue s’éveille.
Aucun dictateur ne se reconnaîtra dans cette fiction, puisqu’il s’agit d’une fiction. Et ce pays est imaginaire. Personne ne peut en effet songer que son pays puisse bousculer ses certitudes démocratiques et basculer dans l’oppression. Mais beaucoup ont l’impression que la réalité peut dépasser la fiction, et des frictions éclater !
par Babacar Papis Samba
UNE FOLIE MEURTRIÈRE ET ABSURDE
Quelle que soit la pertinence des réalisations ou des investissements dans un pays, les politiques pourront sembler insignifiants à cause de l'insécurité sociale, du déficit démocratique
Boris, Felwine et Bougar ont parlé. Yoro a répliqué. Les rappeurs avaient prévenu.
"Nous étions dans la ferveur des évènements malheureux de mars 2021 et le pays était à feu et à sang. Le Sénégal venait de traverser l'une des périodes les plus sombres de son histoire. Les rappeurs du pays avaient vu venir. Ils pensaient qu'il n’y a jamais un sans deux. Comme à l'accoutumée, ils avaient averti en faisant tonner leurs voix.
Voici quelques extraits de leurs discours qui rappellent à bien des égards les slogans mobilisateurs du mythique groupe anglais, les Beatles dans leur riposte musclée contre la guerre du Vietnam, avec des tubes comme "Power to the people" (Le pouvoir au peuple) et "Give peace a chance" (Donner la chance à la paix) qui ont été repris en choeur par les étudiants américains à l'Université de Berkley.
Le symbolisme et la portée de ces deux textes sous la belle incarnation du légendaire et emblématique chanteur John Lennon, renvoient à la pertinence et l'engagement de ces rappeurs sénégalais qui, à la place des pierres, des pneus brûlés et autres matéraux que les jeunes utilisaient dans les rues, avaient préféré les mots pour fustiger la violence et les dérives qui sont intervenues sous la gestion du pouvoir de Macky Sall. Ils s'étaient très clairement exprimés, sans porter de gants, à travers leur slogan " Free Sénégal". Un opus où Dip, Canabasse, Bril, Ngaka Blindé, Hakill, Jeeba, PBS, MC Yaram, Jahman Express n'étaient pas du tout tendres avec le pouvoir en place.
Il est retenu dans leurs phrasés des refrains comme, "ce qui me fait mal c'est de voir les jeunes mourir et que nos mères n'ont que leurs yeux pour pleurer..." qui figure dans le tube "Khekh you bess" du rappeur Dip Dound Guiss, au moment où Canabasse se plaignait en disant, "Ce qui tu veux nous faire, ça n'ira pas. C'est nous qui t'avons élu et maintenant tu nous as oubliés, et aujourd'hui la police se met à tirer sur nous. Nous avions confiance en toi président Macky Sall..., la démocratie sénégalaise est en perte de vitesse".
Dans "lettre au président" et dans un style qui se veut moins virulent, Brill se fait avocat, "Je suis mandataire de la population, cette dernière m'envoie pour vous dire que le sang coule, les parents pleurent...Le pays ne t'appartient pas, tu ne peux pas en faire ce que tu veux....". Quant à Ngaka Blindé, il écrit : "Sunu drapeau" et les mots débités par le rappeurs sont pathétiques. (Je trempe ma plume dans ton sang avec le coeur lourd et prie le bon Dieu pour qu'il nous vienne en aide. Nous sommes du côté du peuple quand il a besoin de nous. Tout le pays est à feu et à sang, l'heure est grave car les policiers nous tuent et pleurent". C'est ainsi que le rappeur de la banlieue s'était questionné sur ce qui se passe dans ce pays. Alors que Jahman Express ne put s'empêcher dans "Lu Tax" de s'interroger à son tour sur ce qui ce passe au Sénégal en disant : "Pourquoi notre pays a changé de visage pour que tout le monde se mette à prier pour que la paix revienne, pourquoi tous ces morts ? Perplexe et dubitaif Jeeba se demande dans "mon rêve" (Est-ce ça la destinée du Sénégal ?). Revenant à la charge comme à son habitude le mythique groupe PBS avait encore élevé la voix. Pour dire cette fois-ci, à travers un discours de sagesse, et dans "Bayil mu sedd" (faire descendre la pression et la température sociale), un discours qui semble sermonner le président Macky Sall. Et c'est par le biais d'un coup de fil qu'ils ont préféré dire à leur président : "Allô, Àllô monsieur le président, je ne suis pas un partisan ni un ennemi, mais un simple citoyen qui parle librement, on doit discuter, tu dois mécouter sereinement. Rien ne va plus dans le pays, j'ai vu des scènes de guerre.." Quant à MC Yaram, il enfonce le clou trop loin dans des propos que nous préférons taire par décence.
Bref on est est tous complices. On a laissé faire. On a été laxiste et calculateur. Les rappeurs ont finalement eu raison sur nous tous. Contrairement à ceux qui avaient minimisé la situation, défendant mordicus que les évènements de mars 2021 étaient dus au couvre-feu. Or la question était éminemment politique. Il faut encore souligner l'incapacité de nos hommes à tirer les leçons de l'histoire. Dans un pays quand les artistes ne sont pas contents, les pauvres sont fâchés, les jeunes se lamentent, les hommes d'affaires qui créent les emplois et les richesses sont inquiets, là on est pas loin de l'instabilité politique. Les politiques ont alors à comprendre, quelle que soit la pertinence des réalisations ou des investissements dans un pays, ils pourront sembler insignifiants à cause de l'insécurité sociale, du déficit démocratique et de la rupture de communication entre les différents acteurs de la société. Il est vrai que les gens ne peuvent pas être d'accord sur tout mais quils s'accordent au moins sur l'essentiel. Car un pays a besoin d'un consensus sur un minimum de choses pour exister.
Babacar Papis Samba est auteur et adepte de la pensée complexe.
Par Arona Diouf
MARS 2021 ET JUIN 2023, TOUS RESPONSABLES !
Mars 2021 et Juin 2023! Le réveil est toujours difficile après de tels événements. Par la force des choses, notre pays est à la Une de l’actualité mondiale. Que se passe-t-il au pays de la teranga ? Interrogations répétitives des amis étrangers ?
Mars 2021 et Juin 2023! Le réveil est toujours difficile après de tels événements. Par la force des choses, notre pays est à la Une de l’actualité mondiale. Que se passe-t-il au pays de la teranga ? Interrogations répétitives des amis étrangers ? Que répondre ? Rien, sinon dire que ce sont souvent de petites choses comme ça, à la base insignifiantes, qui participent à la destruction d’un tissu social déjà malmené. L’équilibre familial étant rompu, toutes les voies sont ouvertes. Nous assistons impuissants au déclin de notre modèle social tant chanté. Tous responsables ! La haine a fini de braquer les uns contre les autres. « Ce qui nous lie est plus fort que ce qui peut nous diviser »: ça, c’était avant. Ne rêvons plus. Nous avons dépassé les limites. La barque » Sunugaal » tangue. Il faut vite, vite, vite ramer avant que l’irréparable ne se produise si ce n’est déjà fait. Parce que les plaies sont encore là, béantes. Nous gagnerions dès lors à nous rencontrer, à nous regarder les yeux dans les yeux, discuter, échanger les idées et surtout nous aimer. Parce que comme l’a rappelé un éditorialiste citant un sage Bambara » lorsque le feu prend la savane, il ne fait pas la différence entre hautes et basses herbes ». Il ne discrimine en effet pas entre le sage, le pacifiste et le pyromane. Le feu ne connaît pas de frontières si ce ne sont celles que lui imposent d’autres forces. Le feu peut aussi densifier sa puissance destructrice en s’alliant avec d’autres forces invisibles. Mais elles existent et peuvent avoir des motivations politiques, religieuses, géostratégiques ou même localement circonscrites. Lu dul jàmm, jàmm’a ko gënn!
par Jean Pierre Corréa
LA DICTATURE DE L'IGNORANCE
Que Boubacar Boris Diop, Felwine Sarr et Mbougar Sarr soient passés à côté de leurs rôles, n'ayant pas eu en tant qu'intellectuels et diffuseurs de contenus liés au savoir, un seul mot pour condamner cet autodafé barbare est sidérant
"Là où on brûle des livres, on finira par brûler des Hommes".
Heinrich Heine
Faire un tour sur le campus universitaire de Dakar est édifiant sur cette crise que notre pays, notre Sénégal est en train de traverser, et dont la violente survenue semble plus être l'aboutissement d'un processus savamment déroulé, qu'une subite éruption claquant comme un coup de tonnerre dans un ciel serein...
Ce crime terroriste est signé, légendé, assumé, presque revendiqué par ceux qui pensent que ça doit continuer à cramer, pour montrer leur courage par procuration ... "na boye !" intiment-ils à leurs partisans écervelés et bouffés par la haine qui a certes pris source dans le désespoir d'une jeunesse invisibilisée par un pouvoir kleptocrate qui a, depuis 20 ans cannibalisé leurs rêves et leurs aspirations à vivre heureux dans notre pays. Leurs vulgaires courses à s'enrichir sans causes a fait le lit des opportunistes populistes aux solutions simplistes, débitées cyniquement à l'encontre d'un ordre établi, estampillé occidental, souillé par l'universalisme, forcément corrompu, accessoirement maçonnique pour valider l'opprobre infamante, et justifier l'isolement qui feront de nous les proies des fondamentalistes au front bas.
Je suis dévasté par ce que j'ai pu voir dans l'enceinte de notre université, naguère siège de tant de destins libérateurs et d'aventures faisant parts belles à la prééminence et à la célébration de l'esprit et de la connaissance... Annihiler toute la mémoire pédagogique de la Faculté des Lettres, détruire et incendier des centaines de milliers de documents, casser les instruments qui servent à dispenser de la connaissance, brûler notre majestueuse bibliothèque, coeur vibrant de la sauvegarde de notre patrimoine historique, culturel, qui a offert au Sénégal ce leadership que l'Afrique de l'ignorance nous envie, pulvériser le lieu où des générations entières de grands journalistes africains ont été formés aux rigueurs exigeantes de l'information, ne relève nullement du sporadique. Ce crime est signé.
Le savoir et l'information sont toujours les premières cibles des obscurantistes et des ignorants. Ce que j'ai vu n'a pu être fait que par des talibans et des affidés de Bokko Haram dont les soi-disant adversaires d'un troisième mandat sont de fait que leurs idiots utiles... Les autodafé ont toutes les mêmes stigmates de la haine et de l'ignorance crasse.
Oh ! Les intellos sur le retour, qui osent comparer Ousmane Sonko à Mamadou Dia, à Cheikh Anta Diop et à Thomas Sankara, ça suffit les postures... Prenez donc position. Au-delà de Macky Sall, de son bilan et de l'alibi du troisième mandat, c'est le particularisme Sénégalais qui est attaqué et même, que dis-je, ce sont surtout ceux qui s'autoproclament patriotes qui auraient dû être à l'avant garde de ce combat.
Que Boubacar Boris Diop, Felwine Sarr et Mbougar Sarr soient passés à côté de leurs rôles, n'ayant pas eu en tant qu'intellectuels et diffuseurs de contenus liés au savoir, un seul mot pour condamner cet autodafé barbare est sidérant. Que l'on puisse appeler à l’insurrection, demander à des jeunes de sortir dans la rue et de se battre contre les forces de l’ordre, envoyer ses troupes brûler une université, et se faire applaudir, soutenir, approuver par des écrivains et des professeurs d’université, montre le degré de compromission et de lâcheté de certains hommes qui regardent notre nation se faire bouffer par des apprentis sorciers qui pour une fois valident leurs errances politiques toutes en "ismes", est proprement navrant et consternant.
L'écrivain Hady Ba résume ainsi la situation surréaliste de notre Sénégal : "Des écrivains, professeurs, des hommes de culture, affiliés à un parti qui appelle à une révolution qu’ils veulent populaire, mais qui ne dénoncent ni ne déplorent la destruction d’une vénérable université qui sert en majorité les enfants des classes sociales les plus défavorisées, tel est le triste état de notre pays." Fermez le ban, la coupe est pleine !!
Comment des "Patriotes" authentiques et cohérents, peuvent-ils sincèrement, face au désarroi d'une population majoritairement désemparée et choquée par la mise à sac de villes entières, par la prise en otages de citoyens qui depuis une semaine ne peuvent ni circuler, ni produire et générer ce qui leur permet de faire vivre leurs familles, ni se soigner, dont les biens durement acquis ont été pulvérisés par des hordes sauvages, comment peuvent-ils encore attiser ce gigantesque incendie, qui n'est que le fait visible et sensationnel qui cache en fait une attaque en règle du Sénégal et de son modèle de démocratie et de stabilité, qui commence à énerver et à déranger les visées des chacals et des vautours qui se repaissent encore et toujours des ressources d'une Afrique, qu'ils souhaitent voir éternellement dans le besoin, malgré le fait d'être assise sur 75% des richesses mondiales et des terres rares, si prisées dans l'avenir du monde qui se dessine devant nous.
Que les véritables patriotes, sans majuscule prétentieuse, travaillent à disséminer l'idée que l'ère des hommes providentiels est terminée, et que le Sénégal est au-dessus de chacun des hommes et femmes, qui aspirent à le diriger. L'avenir de nos filles et fils est plus important que la démesure de leurs ambitions, et les dangers qui guettent et qui nous entourent, commandent à leurs intelligences et à leur empathie, de s'asseoir, de discuter comme nous avons su si bien le faire tout le long de notre riche histoire, et d'enrichir encore ce qui est au coeur de notre génie, à savoir notre indestructible cohésion sociale, ethnique et religieuse. Ceux qui refusent d'en discuter pour assouvir leurs hubris insignifiants, et qui sont persuadés que leur petite histoire doit se confondre avec la grande histoire de notre nation seront par leur entêtement qui leur sert d'intelligence, responsables de la destruction d'un pays qui longtemps aura été un phare pour notre continent tellement résilient...et résistant.
Ces criminels manipulateurs à la solde des fondamentalistes sont juste les petits hommes gris d'un plan ourdi par des "cons qui sont loin d'être des imbéciles". C'est à nous, tous ensemble, de leur opposer notre génie et notre dignité. Sinon, après qu'ils ont brûlé nos livres, ils n'hésiteront pas à nous brûler vifs sur leurs "improbables autels" qui rendent tellement triste notre si miséricordieux bon dieu.
par Ousseynou THAIM
QUI POUR DÉFENDRE L’ÉCOLE ET L’UNIVERSITÉ SÉNÉGALAISE ?
Au Sénégal, l’école et l’université sont dans un tourbillon indescriptible, victimes d’une politisation calculée et nuisible de leur espace en si peu de temps. Sans doute, l’école et l’université ont toujours été des espaces politiques.
Paix à l’âme des disparus !
Au Sénégal, l’école et l’université sont dans un tourbillon indescriptible, victimes d’une politisation calculée et nuisible de leur espace en si peu de temps. Sans doute, l’école et l’université ont toujours été des espaces politiques. Mais les derniers évènements constituent des pages sombres où l’on peut lire à la fois un passé politique conscient et progressiste et un présent politique immature et rétrograde.
Les évènements de mai 1968 avec la protestation des étudiants contre la réduction des bourses, la contestation gagnant l’ensemble des établissements scolaires et universitaires, la solidarité avec le monde ouvrier avaient des raisons scolaires et universitaires d’être car l’enjeu était d’améliorer les conditions de vie étudiantes. Il était advenu une revalorisation des bourses des étudiants, une construction d’un campus social et surtout une réforme du système universitaire.
Les évènements du 1 juin 2023 sont de tout autre ordre. Après le verdict d’un procès opposant deux citoyens sénégalais, le leader politique monsieur Ousmane Sonko et la masseuse madame Adji Sarr, l’école et l’université, comme boucliers, sont prises à partie. Politisé à outrance, ce procès, qui génétiquement n’a aucun lien avec l’école et l’université, est malheureusement utilisé comme l’occasion d’une déconstruction physique et symbolique des systèmes pédagogiques et andragogiques.
A la faveur des engagements aux niveaux communautaire, continental et mondial l’État du Sénégal s’est donné les moyens de développer son école et son université pour le bénéficie de la jeunesse. Des efforts considérables et soutenus ont été consentis par le Président Macky Sall depuis plusieurs années. Dans la mise en œuvre du Plan Sénégal Émergent (PSE), du Programme d’Amélioration de la Qualité, de l’Équité et de la Transparence du secteur de l’Éducation et de la Formation (PAQUET-EF), de la Concertation Nationale sur l’Avenir de l’Enseignement Supérieur 2013 (CNAES), du conseil présidentiel avec ses onze décisions, des réformes de l’UEMOA, l’Agenda 2063 de l’Union Africaine, de la Stratégie continentale de l’éducation de 16-25, de la Stratégie 2024 pour la Sciences, la Technologie et l’Innovation pour l’Afrique, du Programme 2030 des Nations-unis, du Cadre d’action pour l’atteinte de l’objectif de développement durable 4 (ODD4), l’État a fait des investissements de grande nature, transformant visiblement et en profondeur le visage de plusieurs structures scolaires et universitaires.
La multiplication des collèges et lycées de proximité, l’implantation démocratique des lycées d’excellence, les classes préparatoires scientifiques, l’élargissement de la carte universitaire, la création et le développement des Instituts Supérieurs d’Enseignement Professionnel (ISEP), l’amélioration des conditions de vie étudiante, le développement des infrastructures, l’acquisition de matériel de laboratoire, l’augmentation des salaires, la construction d’un campus social de standing international à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, l’acquisition de bus, de mini bus ou autres matériels roulants pour les facultés, écoles et instituts, la démarche constructive du Ministère en charge de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ont sorti l’école et l’université du chemin caillouteux pour atteindre l’autoroute de l’accomplissement.
Ces institutions sont précipitamment attaquées et gravement atteintes. Mais à qui profitent ces attaques ? Plusieurs écoles ont été fermées, l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar au centre, l’Université Assane Seck de Ziguinchor au Sud, l’Université Gaston Berger de Saint Louis au Nord… ont été vandalisées. La violence physique de cette attaque a détruit tout sur son passage. Des infrastructures en chantier pillées, des bus universitaires et voitures appartenant à des travailleurs incendiés, des bibliothèques brûlées, des archives calcinées…
La violence symbolique a semé la peur faisant quitter les étudiants des campus, les travailleurs invités à rester chez eux, les populations grandement inquiètes de la scolarisation et de la poursuite des études scolaires et universitaires de leurs enfants. Les investissements de l’État, l’abnégation d’une nation, les sacrifices des travailleurs sont réduits en cendre par des jeunes qu’il convient d’appeler « ennemis » de l’école et de l’université, partant, de la société sénégalaise.
L’engagement des forces de défense et de sécurité et des agents de sécurités a fait face au mutisme de certains les intellectuels.
Heureusement et courageusement ! Le Bureau National du Syndicat Autonome de l’enseignement Supérieur (SAES) assumé sa responsabilité devant la nation sénégalaise et devant l’opinion international. Il a sorti un communiqué pour défendre son outil de travail, pour décrier « le saccage tous azimuts des infrastructures pédagogiques », dénonçant « la situation politique nationale délétère ». Monsieur Boubacar Siguiné Sy, Ministre conseiller du Président de la République et Enseignant Chercheur à la Faculté des Sciences et Technologies de l’Éducation et de la Formation a posé justement la question « Faudra-t-il fermer les écoles et les universités du Sénégal » ? Deux rares exemples d’intrépidité et dévouement à l’école et à l’université.
Cette école et cette université ont formé de brillants intellectuels installés au Sénégal et ailleurs, qui n’ont pas le droit de se taire ou de divertir l’opinion pendant que les institutions qui ont permis leur ascension sont fermées ou brûlées. Ne serait-ce que pour le devoir d’Alumni, sans convoquer ce que le savoir représente pour eux, ils doivent défendre ces institutions qui ont participé à leur éducation et/ou formation. Pour l’honneur dû aux deux parrains des deux universités les plus touchées, les Professeurs Cheikh Anta Diop et Assane Seck qui ont participé activement à la construction de l’école et de l’université sénégalaises, nous devons dire, avec fermeté, tout notre mécontentent face à ces actes déconstructifs des institutions scolaires et universitaires dont le récent visage attirait les étudiants du monde entier.
Le monde des ressources humaines de qualité sénégalaises ou étrangères fait la fierté de l’école et de l’université au Sénégal. Par conséquent, nous devons nous offusquer de ces agressions foudroyantes de l’école et de l’université. Gardons toujours à l’esprit qu’être un intellectuel, c’est aussi le résultat de grandes institutions scolaires et universitaires ! Avons-nous le droit de nous taire ou de divertir le peuple ! Non ! Non ! Non !
par l'éditorialiste de seneplus, ousseynou bèye
LE CHANTAGE DE MACKY SALL
EXCLUSIF SENEPLUS - Ainsi donc, vous auriez "concédé" à "renoncer" à "votre" troisième mandat. Une demande toute humble ? Un moyen de marchandage lamentable ? Peut-on se prévaloir de sa propre turpitude ?
Ousseynou Bèye de SenePlus |
Publication 07/06/2023
Pas de troisième mandat. Pas de prolongation. Quelle honte M. Sall !
Je peux vous appeler ainsi puisque tout le monde sait que vous êtes un candidat-sortant qui ne tient même pas sa place.
Ainsi donc, vous auriez "concédé" à "renoncer" à "votre" troisième mandat. Une demande toute humble ? Un moyen de marchandage lamentable ?
Certainement, avec la condition que voici : "Je prolonge mon mandat de deux ans, le temps de régler les cas de Karim Wade, Khalifa Ababacar Sall et d’Ousmane Sonko". Rien que !
Karim Wade, qui donc l'avait accusé illégitimement et illégalement de malversations, avant de l'envoyer au cachot, puis en exil doré, avec une si forte amende ? En dépit des protestations de la Communauté internationale, y compris les instances onusiennes ? Qui a persisté à le laisser en exil, isolé de tout son environnement immédiat, y compris de sa famille ? malgré toutes sortes d'oppositions démocratiques à ce sujet ? Qui refuse jusqu'ici de changer les dispositions iniques des art L 29 et L 30 du Code électoral ?
Quant à Khalifa Ababacar Sall, qui donc a profité d'une bévue administrative pour l'accuser de détournements de deniers publics et de "dugug", jettant l'opprobre sur lui et sa famille ? Qui a mobilisé aux pas de charge toute la justice républicaine pour la mettre dans sa poche, la mettre aux ordres pour maintenir l'adversaire dans les liens de la détention et de l'humiliation ? Qui refuse ici encore, de réformer le Code électoral dans le sens de la justice et de la démocratie ?
Enfin, s'agissant du cas actuel, inouï et dramatique d’Ousmane Sonko, mais qui donc a ourdi le complot ignoble de Sweet Beauty ? Avec la bienveillante complicité de qui on sait ? Qui a laissé perdurer et pourrir une telle situation ? Qui a tenu en haleine tout un peuple, deux années durant, autour de ce roman de vaudeville de mauvais goût ? Un goût nauséabond, aux senteurs pestilentielles ? Qui a laissé mourir à la fleur de l'âge, ces bourgeons de l'espoir pour une grande nation comme le Sénégal ?... En attendant que le décombres macabre continue... ? Qui persiste à vouloir rendre hors de course un adversaire légitime ? Qui cherche à organiser des sélections à la Bukki-l'hyenne, plutôt que des élections transparentes, libres et démocratiques ? Enfin, qui cherche à s'insurger pour usurper un droit indu ? Se présenter soi-même aux élections quand la Constitution, légalement, et le peuple, légitimement, le lui interdisent ?
Tout cela à la charge du même manant ! Celui-là même qui, li y a peu, inversait les termes du chantage : "Demandez-moi ... avec respect..." Quelle arrogance, quelle outrecuidance !
Il aurait pourtant suffi...
Et c'est ce Tartuffe des temps modernes qui vient nous demander de lui laisser le temps pour régler tous ces cas-là !
Peut-on se prévaloir de sa propre turpitude ?
Quelle honte, M. Sall !
par Hady Ba
SONKO, CRITON PLUTÔT QUE SOCRATE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le citoyen Sonko aspire à devenir président, mais refuse de se soumettre à un tribunal du pays. Nous sommes une société misogyne. Traiter une femme noire de guenon et se faire acclamer par des mâles noirs
Depuis la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko, tous les demi-habiles évoquent la figure de Socrate et L’Apologie. Ce dialogue se termine effectivement par la condamnation de Socrate pour un délit superficiellement similaire, parce que portant le même nom que celui pour lequel le juge a condamné M. Sonko. Un autre dialogue mettant en scène Socrate est cependant pertinent ici : c’est le Criton. Nous y reviendrons à la fin de notre propos.
Mais évacuons d’abord une évidence.
Macky Sall a-t-il le droit de présenter sa candidature pour l’élection présidentielle de 2024 ? On peut comprendre cette question de manière juridique ou de manière morale. Ce n’est de toute manière absolument pas une question de droit. C’est une question morale. Moralement, le contrat que Macky Sall a passé avec le peuple sénégalais, c’est qu’il s’assurerait que nul ne pourrait désormais faire plus de deux mandats. C’est ce qui est écrit dans notre Constitution révisée, c’est ce qui était dans notre Constitution avant sa révision. Aucune élucubration juridique ne rendra jamais licite une candidature de Macky Sall en 2024.
Une fois qu’on a dit ça, on devrait avoir l’honnêteté de pointer une autre évidence. En République, nul ne peut prétexter quoi que ce soit pour se soustraire à la justice. Ultimement, tout citoyen convoqué par l’autorité judiciaire doit répondre à cette dernière. Peu importe qu’il l’estime corrompue, instrumentalisée ou partiale.
Une dame a accusé un homme de viol. Cette dame existe. Elle se nomme Adji Sarr. L’homme existe, il se nomme Ousmane Sonko. L’homme a lui-même reconnu s’être retrouvé enfermé dans la même pièce que la dame. Il ne nous appartient pas de décider a priori que cette accusation est fallacieuse. C’est à la justice de trancher. De la même manière que toute personne honnête reconnaîtra qu’il est immoral et probablement illégal pour le président Macky Sall de briguer un troisième mandat, toute personne honnête doit dire sans fards que, quelque corrompue et instrumentalisée que soit notre justice, Ousmane Sonko ne peut pas s’y dérober. Il a l’obligation légale de se rendre disponible à la justice de son pays.
Au-delà de cette obligation légale, Ousmane Sonko, qui aspire à diriger la République du Sénégal, doit avoir un comportement républicain. Moralement, il ne lui est pas permis de jeter le discrédit sur les institutions qu’il aspire à diriger et/ou dont il aspire à devenir le garant du bon fonctionnement. Or, depuis qu’il a été accusé de viol par une de ses concitoyennes, M. Sonko a systématiquement montré de la défiance envers les institutions de la République intervenant statutairement dans le processus. Il a nommément désigné des magistrats, des policiers et des fonctionnaires et les a accusés d’être de mèche avec le chef de l’État dans une entreprise visant à l’empêcher de devenir lui-même président de la République.
Supposons que M. Sonko ait raison. Supposons que le président Macky Sall, la magistrature, la police et la gendarmerie sénégalaises aient tous comploté pour jeter M. Sonko en prison. N’y a-t-il personne dans son parti, personne parmi ses alliés, personne dans la société civile qui soit suffisamment honnête et compétent pour prendre sa place ?
Parce que, même s’il a raison, même s’il y a un complot d’État pour lui nuire, il n’en demeure pas moins vraie une chose : une femme accuse M. Sonko de viol et M. Sonko lui-même reconnaît qu’il s’est trouvé enfermé dans une pièce avec cette dame. Cette dame existe. Elle se nomme Adji Sarr. Elle a un récit très précis de ce que, selon elle, M. Sonko lui a fait subir. L’on a réussi, pendant deux ans, à déshumaniser cette dame. M. Sonko s’est permis de dire :
Ce sont là exactement les paroles proférées par un homme qui aspire à diriger le Sénégal. Que ces paroles-là ne suffisent pas à le disqualifier définitivement dans un pays à majorité noir montre à quel point nous sommes une société misogyne. Traiter une femme noire de guenon et se faire acclamer par des mâles noirs. C’est l’illustration presque parfaite du misogynoir : cette oppression à l’intersection du sexisme et du racisme théorisée par la féministe Moya Bailey. Utiliser une maladie, l’AVC, comme disqualification, c’est aussi flirter avec le capacitisme.
Des écrivains, professeurs, homme de culture affiliés à un parti qui appelle à une révolution qu’ils veulent populaire mais qui ne dénoncent ni ne déplorent la destruction d’une vénérable université qui sert en majorité les enfants des classes sociales les plus défavorisées. Tel est le triste état de notre pays.
La phrase de Sonko à l’endroit de son accusatrice est intéressante : “Même si je devais violer quelqu’un, je ne violerais pas cette femme qui ressemble à une guenon atteinte d’AVC.” N’est-ce pas là une phrase de violeur ?
Si je vous accusais de pédophilie, me diriez-vous : “Même si je devais violer un enfant, j’en choisirais un de plus mignon que celui-ci” ? Bien sûr que non. Pour quiconque n’est pas un pédophile, il est inenvisageable de violer un enfant. Pour quelqu’un qui n’est pas un violeur, il est inenvisageable de violer une femme, aussi belle soit-elle. M. Sonko, lui, peut parfaitement envisager en public de violer une femme, il se défend juste en nous disant que ce n’est pas une femme comme Adji Sarr qu’il violerait.
La question est donc : M. Sonko dit-il la vérité quand il nous dit que ce n’est pas une dame pareille qu’il violerait ? La dame affirme qu’il l’a violée. Il ne nous appartient pas de nous prononcer sur l’effectivité du viol. Le juge a estimé, quant à lui, que M. Sonko n’a pas violé Adji Sarr mais qu’il en a fait son objet sexuel d’une manière répréhensible. Des intellectuels, des universitaires, des politiques, nous appellent, parce que M. Sonko a été condamné, à manifester, à déloger du Palais le président élu, etc. Des enfants meurent sous les balles de policiers et de nervis. Tout cela parce que quelqu’un en qui beaucoup d’entre nous avaient placé leurs espoirs s’est mis en situation d’être accusé de viol et affirme qu’il est le seul à pouvoir nous sauver d’une prétendue dictature de Macky Sall. Sur 16 millions de Sénégalais, il y en aurait un seul qui serait capable de nous sauver de la dictature ! Sauf que notre sauveur potentiel est accusé de viol par une dame qui se nomme Adji Sarr. Sauf que ce sauveur espéré a été condamné pour corruption de jeunesse par un juge assermenté.
Revenons au Criton.
Après la condamnation à mort de Socrate, un de ses riches amis, Criton vient le voir en lui disant qu’il a affrété un bateau pour le conduire hors de la Cité. Criton et Socrate conviennent que la condamnation est injuste. Socrate aurait donc le droit de s’en soustraire, affirme Criton, et il lui en donne les moyens. Dans le dialogue, Socrate argumente pour la thèse selon laquelle, même si la peine est injuste, étant donné que c’est un tribunal normalement constitué qui l’a prononcée et que les lois de la Cité ont été appliquées par ceux qui en avaient les prérogatives, alors Socrate a l’obligation de s’y soumettre. Refuser de se soumettre à une loi, dit Socrate, c’est les violer toutes. Refuser de se soumettre à un jugement, c’est remettre en cause le système judiciaire dans son intégralité. Le citoyen Ousmane Sonko aspire à devenir président de la République du Sénégal, mais refuse de se soumettre à un tribunal de la République du Sénégal. Si jamais il devient président de la République du Sénégal, pourquoi accepterait-il de se soumettre aux lois qui lui déplaisent ?
Sans même arriver jusque-là, comment pourrait-il, s’il était élu, prêter serment devant les juges qu’il a discrédités ? C’est le même système judiciaire dont il refuse actuellement le verdict qui serait chargé de valider son élection.
par Doudou Ka
CETTE VÉRITÉ IRRÉFUTABLE QUE VOUS NE SAURIEZ CACHER
EXCLUSIF SENEPLUS - Ce que le Sénégal traverse, aujourd’hui, n’est que la conséquence tragique et destructrice des prophéties du pire d’Ousmane Sonko avec son « mortal kombat » - Réponse à Boubacar Boris Diop, Felwine Sarr et Mohamed Mbougar Sarr
Réponse à Boubacar Boris Diop, Felwine Sarr et Mohamed Mbougar Sarr
Sous le titre « Cette vérité qu’on ne saurait cacher », vous avez publié une réflexion qui a été largement relayée par la presse nationale. Je l’ai lue avec beaucoup d’intérêt. Et je profite de cette tribune pour vous dire tout mon respect pour cette certaine excellence intellectuelle sénégalaise que vous incarnez. Et si j’ai pris le parti de vous répliquer, c’est uniquement en ma qualité de citoyen sénégalais, d’intellectuel et d’ingénieur qui nourrit une forte passion pour le développement de son pays. Le jeudi 1er juin 2023 aurait pu être un jour presque normal, parmi tant d’autres dans la marche de notre pays. Mais voilà que le verdict du procès Ousmane Sonko-Adji Sarr en a fait un des moments les plus sombres de notre histoire, avec son cortège de morts, d’agressions et de destructions qui ont choqué et attristé à travers le monde entier.
Ces événements, je ne les ai pas regardés sur une télé haute définition, je les ai vécus dans ma chair, au milieu des déflagrations, mes domicilies de Ziguinchor et de Dakar attaqués, assistant à l’agression de la République du Sénégal, la nôtre. Quarante-huit heures infernales pendant lesquelles, notre pays a frôlé l’anéantissement de son système démocratique. Alors messieurs, les crises graves, comme celles que le Sénégal vient de connaître, doivent être des moments de vérité et non de positionnement partisan. Ce qui s’est joué sous nos yeux, c’est le prix de la responsabilité de tous ceux qui, depuis des mois, nous ont abreuvé d’une rhétorique imbibée de haine et ruisselante de violence.
Alors pourquoi me suis-je senti si mal à l’aise en vous lisant ? Parce que votre analyse est délibérément à charge. En vous ruant exclusivement sur le président de la République Macky Sall avec une férocité partisane, vous vous êtes érigés en directeur de conscience en élevant en même temps, un épais mur de silence pour taire les dérives du Pastef et de l’homme par qui tout est arrivé, Ousmane Sonko, qui aura passé tout son temps, à diffamer, à manipuler les jeunes, à diviser les filles et fils du pays et à défier les institutions de la République. Mais ça, c’est l’autre vérité irréfutable. Celle que vous avez voulu nous cacher. Le Sénégal est un engagement que nous partageons. Jeter un regard critique sur la gouvernance du président Macky Sall, quoi de plus normal dans un État démocratique, mais cela ne devrait pas vous empêcher d’ouvrir vos yeux sur les causes des événements tragiques que notre pays vient de traverser et qui ont failli porter un coup fatal à nos institutions.
De quoi cette déflagration est-elle le nom ? Tout est parti des écarts intimes d’un présidentiable nommé Ousmane Sonko qui a enfreint un couvre-feu, en utilisant abusivement, à des fins personnelles, les privilèges de député que le peuple du Sénégal lui avait octroyés. Au moment où des millions de Sénégalais acceptaient, bon gré mal gré, les rigueurs et contraintes liées au confinement Covid-19. En bravant les restrictions de circulation imposées à tout un peuple, pour aller « corrompre » une jeune masseuse de 20 ans dans un jacuzzi, Ousmane Sonko a roulé à contresens des règles de conduite républicaine, oubliant par la même occasion, de joindre ses actes à ses discours. Pour quelqu’un qui avait mis l’éthique et la morale au poste de commande de sa stratégie de conquête du pouvoir, c’est une faute qui, dans un pays normal, constituerait un arrêt de mort politique pour le président du Pastef.
Et les exemples sont légion
DSK, tout puissant patron du FMI, a été renversé et détruit, sa carrière politique pulvérisée en quelques heures et pour moins que le cas Ousmane Sonko. Qui ne se souvient pas de l’affaire Monica Levinsky. Une jeune stagiaire au début de la vingtaine, comme Adji Sarr, qui a failli provoquer la destitution d’un président américain. Le 17 août 1998, Bill Clinton admet devant les caméras avoir eu une liaison avec Monica Lewinsky. Il avait tout nié tout au début de l’affaire. C’est son ADN, retrouvé sur un vêtement porté par la stagiaire qui a fini par le confondre. Ousmane Sonko a refusé, il faut le rappeler tout prélèvement de son ADN pour aider à la manifestation de la vérité. Le point commun à ses deux scandales sexuels est que du haut de leur toute puissance, Directeur Général du FMI pour l’un et président de la toute première puissance mondiale pour l’autre, tous les deux accusés ont accepté de se soumettre à la justice américaine. Pas Ousmane Sonko, comme si la justice était pour les autres.
Où étiez-vous lorsque le champ politique ne résonnait qu’au rythme de la défiance et de l’outrance d’un homme, Ousmane Sonko. Où étiez-vous quand tout un pays n’était abreuvé que de « force restera au peuple ». Où étiez-vous quand Ousmane Sonko lançait ses appels au « mortal Kombat », à la résistance et à la désobéissance. Où étiez-vous quand le président de Pastef, pénétré de son sentiment d’impunité médiatique et judiciaire, imbibé de son illusion de puissance, donnait rendez-vous aux jeunes de tout le Sénégal « pour la solution finale », aller déloger le président de la République. Où étiez-vous lorsque Ousmane Sonko indexé toute une communauté ethnique qu’il accusait d’être les petites mains de l’État pour diviser la Casamance. Où étiez-vous lorsque le président du Pastef traitait nos magistrats de corrompus, insultait nos généraux de l’armée, accusait les forces de défense et de sécurité d’assassinat ? Où étiez-vous lorsque Ousmane Sonko, dans une posture antirépublicaine, refusait de reconnaître la légitimité du président Macky Sall ? Diantre ! Où étiez-vous, quand Ousmane Sonko, triomphant et au faîte de sa popularité politique, menaçait de mort le Président Macky Sall. Où étiez-vous quand Ousmane Sonko menaçait avec ses moyens « de rendre le pays ingouvernable ». Nous avons tous eu tort de ne pas le prendre au mot. De là à penser que le scénario noir de ces derniers jours était écrits d’avance. Où étiez-vous lorsque Ousmane Sonko, s’adressant à son accusatrice, la comparait à « une guenon atteinte d’AVC » se laissant aller à perdre son froid avec une insolence indigne d’un présidentiable : « si je devais céder à la tentation du viol, je me choisirais plutôt une vénus ». Où étiez-vous quand Ousmane Sonko se vautrait dans cette inadmissible indécence.
Depuis les accusations de viol portées contre lui, tout dans le discours d’Ousmane Sonko n’est que violence, outrance et défiance. Mais tout cela n’est que la conséquence de l’adulation médiatique du président du Pastef, ajoutée à l’indulgence coupable de nos élites, de nos intellectuels qui se sont affranchies des règles de l’idée républicaine, pour la défense d’un homme, plus préoccupé par son sort personnel que par la République, prêt à s’emparer illégitimement d’un pouvoir des mains d’un président qui tient sa légitimité du suffrage universel. Ce que le Sénégal traverse, aujourd’hui, n’est que la conséquence tragique et destructrice des prophéties du pire d’Ousmane Sonko avec son « mortal kombat ». Il ne s’est trouvé aucun intellectuel pour tirer le signal d’arrêt d’urgence, pour stopper les dérives antidémocratiques et l’aveuglement populiste d’un parti et de son chef qui, pour prévenir toute condamnation qui pourrait entraver la candidature d’Ousmane Sonko en 2024, n’ont eu de cesse de menacer et d’intimider toute personne ou institution qui se mettrait en travers de leur chemin vers le Palais. Quoiqu’il en coûte. Mais vouloir brûler tout un pays, y installer le chaos pour espérer prendre le pouvoir aura été un calcul perdant.
Alors chers messieurs, on aurait aimé vous entendre sur la dénonciation de cette machine infernale à brûler et à saccager qui s’est acharnée avec une barbarie sans nom sur nos universités, nos collèges, nos lycées et même nos écoles primaires ; du jamais vu au Sénégal. Jamais, des manifestants sénégalais ont atteint un tel degré d’ignominie pour faire triompher une cause politique. Ces attaques contre des lieux du savoir et d’autres secteurs vitaux de notre économie comme les banques, le réseau de distribution d’eau et d’électricité, sont l’illustration de l’intrusion dans les manifestations de fantassins de l’anarchie trop impatients de prendre le pouvoir, dont l’objectif était de provoquer l’effondrement de notre démocratie et l’anéantissement de la République. Là aussi, motus et bouche cousue. Les Sénégalais que nous sommes, républicains et démocrates de tout bord, attendaient un peu plus d’un prix Goncourt. Mais, au lieu d’éclairer, vous avez asséné vos certitudes, mettant tout sur le dos du Président Macky Sall. Quid des responsabilités d’Ousmane Sonko qui porte une immense responsabilité politique et morale dans la survenue des événements exceptionnels que notre pays vient de traverser ? Lorsque vous écrivez que « la situation en cours résulte de la dérive autoritaire du président Macky Sall. L’hubris d’un pouvoir qui emprisonne ou exile ses opposants les plus menaçants, réprime les libertés et tire sur son propre peuple avec une révoltante impunité », vous profanez l’essence même de l’honnêteté intellectuelle qui recommande que vous vous éloigniez des prises de position opportunistes.
Car, ce qui se joue, aujourd’hui, et demain dépasse les arithmétiques politiques et électorales. C’est le choix de la stabilité contre l’aventurisme, le choix de la République contre l’obscurantisme, le choix de la démocratie contre l’anarchie. Et aucune ambition politique, fut-elle présidentielle, ne justifiera pas qu’on ait pu manipuler et instrumentaliser une horde de hors-la-loi qui, de manière, réfléchie, orchestrée, et méthodique, ont voulu détruire la République du Sénégal, la plongeant dans un cycle de violence dramatique et inédite et créant une commotion majeure dans le pays. La vitrine démocratique sénégalaise s’est incontestablement fissurée. Mais elle ne s’est pas fracassée. La République ne s’est pas effondrée. L’État est resté debout. Les digues démocratiques n’ont pas cédé. Une belle réponse à ceux qui avaient déjà commencé à théoriser la fin du destin Sénégalais. En ce moment plus qu’à un autre, je veux adresser toute ma reconnaissance aux Forces de défense de sécurité sénégalaises que vous accusez de « dé-républicanisation ». Personne n’a le droit de piétiner l’honneur et la dignité de nos policiers, gendarmes et militaires qui sont les premiers serviteurs de la Nation. Le devoir de l’Etat est de nous protéger. C’est la base de son existence. Les FDS en sont le pilier. Elles méritent tout notre respect parce qu’elles ont risqué leurs vies pour préserver les nôtres et notre système démocratique. S’ils n’avaient pas fait face aux forces insurrectionnelles qui voulaient détruire notre pays, je ne serai certainement pas là en train d’échanger avec vous. Échanger, délibérer, deux mots justement, qui sont aux confins de la démocratie.
Les ruptures et les déchirures provoquées par les événements que nous venons de vivre ont créé un profond traumatisme dans le pays. Il ne suffira pas de claquer les doigts pour remettre les cœurs et les esprits en état de dialoguer, comme il ne s’était rien passé. On ne redémarre pas un pays comme on redémarre une voiture. Dans la crise, il est impératif de penser à demain, au futur de notre pays. Opposition et pouvoir doivent renouer les fils du dialogue. C’est un impératif politique et patriotique catégorique. C’est pour cela que le dialogue national lancé par le président Macky Sall est une réponse à cette demande sociale des concitoyens. Nous avons une communauté de destin. Ce qui ne veut pas dire que l’union des cœurs est forcément l’unité des idées. Nous sommes un pays de liberté où toutes les oppositions se sont toujours librement exprimées mais dans le cadre des principes républicains. Car, aucune démocratie ne s’est construite sur la haine, la violence, la rancune et les rancœurs. Il est de la responsabilité de chaque Sénégalais de veiller à la stabilité du pays pour que le Sénégal, portes et fenêtres ouvertes, puisse continuer à résonner comme un hymne à la démocratie et à l’espérance pour toute les filles et les fils de notre belle République.
Doudou Ka est ingénieur civil des Ponts et Chaussées et banquier d’affaires,
Coordonnateur national du S24 : Convergence des Démocrates pour la Sauvegarde de la République
Par Me Wagane FAYE
L’ERREUR EST HUMAINE, MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Mais si humaine soit-elle, celui qui la commet sciemment est susceptible de poursuites, et éventuellement encourir des sanctions et être tenu à réparer le préjudice qu’il a causé.
Mais si humaine soit-elle, celui qui la commet sciemment est susceptible de poursuites, et éventuellement encourir des sanctions et être tenu à réparer le préjudice qu’il a causé.
Quant à celui qui s’amuserait à porter plainte sans fondement contre quelqu’un, et lui porter préjudice, il peut courir le risque d’une action pour dénonciation calomnieuse dans certains cas.
J’avoue que je suis inspiré par la situation catastrophique, au double point de vue économique et humain, et parla forte probabilité de responsabilité qui pèserait surle Président Macky Sall en rapport avec la plainte de Mme Adji Sarr sans laquelle, les pertes en vie humaine et en biens matériels subis dans notre pays depuis deux ans, n’auraient pas eu lieu.
La responsabilité de notre chef de l’Etat repose essentiellement sur le fait incontestable que dès lors qu’il détient à lui seul tous les pouvoirs de l’Etat, toute catastrophe à l’origine fautive que les citoyens vivent en ce moment, l’implique et partant, il est tenu d’en répondre. C’est la contrepartie du fait d’avoir accaparé tous les pouvoirs. Tous les citoyens, notamment les intellectuels savent de quoi je parle. Mais si certains parmi eux ont fait le choix de ne pas l’admettre, soit par ignorance, soit par je m’enfoutisme, soit par opportunisme, en âme et conscience, ils savent bel et bien que le pouvoir n’est nullement partagé chez nous. Donc la charge des responsabilités de toutes sortes ne doit incomber qu’à celui qui concentre tous les pouvoirs dans ses mains.
Quant à ceux qui en souffrent, ils ont fait le choix de tourner le dos aux possibilités de tirer profit des subsides que le « béni-oui-oui Monsieur le Président » à chaque occasion, leur permet d’atteindre et de jouir.
Plusieurs faits peuvent permettre à tout un chacun de constater que, telle que la gestion du pouvoir d’Etat est constitutionnellement et réglementairement agencée dans notre pays, ce qui ne date pas de la prestation de serment du Président Macky Sall pour s’installer au trône, il importe de le souligner. Mais s’arcbouter sur l’argument consistant à dire « mes prédécesseurs ne gouvernaient pas autrement », ne nous fait pas avancer. Pire, cela peut faire que certains pays d’Afrique qui prenaient le Sénégal, jusqu’à une époque récente, comme un exemple à suivre, se détrompent et aillent chercher des exemples à suivre ailleurs.
Là où la concentration excessive des pouvoirs entre les mains du chef de l’Etat est le plus nocive, c’est l’effacement des frontières entre les pouvoirs. Cette notion de frontières entre les pouvoirs pourrait faire sourire certains qui ont pris note de ce qu’il y a longtemps qu’elle s’est mise à faire des pas de géant en arrière.
En me souvenant de mon mandat de député sous le régime du Président Abdoulaye WADE, je persiste et signe que les parlementaires ne servaient à rien, sauf à applaudir. Ils ne faisaient ni contrôle de l’action du gouvernement, ni enrichissement de la réflexion prospective.
Et c’était compte tenu de cette réalité que, lorsque le Président Abdoulaye WADE avait décidé, pour des raisons de politique politicienne, de proroger notre mandat de député, en faisant fi de la Constitution, d’un commun accord, sous l’impulsion du Professeur Abdoulaye BATHILY, à l’époque Secrétaire Général de la LD, parti en coalition avec le PDS, nous primes la décision de démissionner car conscients du fait qu’accepter la prorogation de notre mandat de députés, par la seule volonté du chef de l’exécutif, sans piper mot, aurait signifié que nous demeurerions sous sa coupe et mettrions nos professions de foi sous cape.
Le Président Abdoulaye WADE qui, étant dans l’opposition, fustigeait le fait qu’ « au Sénégal on ne démissionne pas », sous entendu même si on vous fait avaler des couleuvres, aurait dû féliciter ses « amis » de la LD que nous serions, qui venaient de prouver qu’ils avaient pris au sérieux ses propos d’opposant, auxquels lui-même ne croyait certainement pas. Pour la petite histoire, une secrétaire au cabinet d’Abdoulaye BATHILY, que j’avais croisée dans un couloir de l’Assemblée nationale, après m’avoir informé que celui-ci venait de faire déposer à son secrétariat de vice-président du bureau de l’Assemblée les clés de son bureau et celles de sa voiture de service, actant ainsi sa démission, m’avait dit : « on n’a jamais vu ça ! ».
Ceci dit, pour éviter les menus détails qui allongeraient mon papier, je passe audit pouvoir judiciaire.
Comme le pouvoir législatif, le pouvoir judiciaire n’en est pas réellement un. On en juge mieux par les résultats des recours dans le domaine politique et aussi à l’occasion des jugements des litiges où est greffable une quelconque préoccupation à caractère politique.
Rien n’y fait. Même une affaire purement civile au sein d’un couple, on en a connu un cas, sans la moindre connotation de la notion d’ordre publique, même une affaire qualifiée de pénale à dessein, dans la rigueur des principes et une application rigoureuse de la loi pénale, si la préoccupation politicienne force la porte et s’introduit dans la chambre des débats, le droit en sort ipso facto. Des cas concrets pour corroborer pourraient être développés avec des détails pertinents, mais ce serait superflu, tellement cela reviendrait à défoncer des portes déjà plusieurs fois ouvertes.
Il s’y ajoute que Monsieur le Président se serait passé de l’organisation d’un dialogue dithyrambique digne d’un meeting de lycéens, qui aurait permis à certains élèves distingués dans l’art de la laudation de faire croire à Monsieur le Proviseur qui aurait été à l’origine de la rencontre, qu’elle peut être utile. L’ex-mentor de Monsieur le Président Sall avait l’habitude de dire à ses partisans qu’ils ne connaissent pas les Sénégalais. Mais lui aussi, je doute qu’il les connaisse. En tout cas pas mal de raisons permettent d’en douter.
A entendre certains intervenants au Dialogue, on dirait que, pour eux, les meilleures interventions sont celles qui rivalisaient dans l’art de décocher des flèches les plus méchantes les unes que les autres sur Ousmane SONKO. A quelles fins ? Allez savoir.
N’eût été ce que je lisais sur le visage du Président de séance, attestant apparemment des marques de satisfaction, je me serais demandé si la plupart des présents au dialogue réfléchissaient à la très sérieuse question de savoir dans quel état sera maintenu notre pauvre pays jusqu’à la fin de la précampagne et de la campagne électorale pour les futures élections présidentielles. Puisque, comme on dit gouverner c’est prévoir, j’invite Monsieur le Président de la République à réfléchir sur la situation qui prévaudra dès aujourd’hui.
A mon avis, peuvent avoir raison les irresponsables qui soutiennent qu’il vaut mieux être un citoyen inconscient qu’un citoyen qui se pose des questions, notamment sur l’avenir du Sénégal. Ne peut-on pas rétorquer à ceux-ci que notre pays a besoin plutôt que ses fils unissent leurs efforts chaque fois que de besoin pour contribuer à sa bonne marche.
Me Wagane FAYE, Avocat à la Cour
PAR Hamidou Anne
LE SÉNÉGAL VAINCRA À NOUVEAU
Par je ne sais quelle logique, l’Etat du Sénégal a laissé un citoyen -affabulateur, médiocre, manipulateur, violent, séditieux- s’ériger au-dessus du droit pour faire ce qu’il veut
Les violences, qui ont explosé à l’issue du verdict de l’affaire opposant M. Ousmane Sonko à Mme Adji Sarr, sont intolérables en démocratie. Depuis deux ans, les morts s’empilent, des biens publics et privés sont détruits, l’autorité de l’Etat est sans cesse remise en cause et une culture de la jacquerie tend à s’installer. Aucune violence verbale voire physique ne saurait être acceptée dans un Etat de Droit, et les citoyens ne peuvent être pris en otage pardes feux dont ils ne sont nullement à l’initiative. Je ne commente pas les décisions de Justice sur la place publique, par principe et eu égard à ma conception de la République. Mais pour la lecture politique des événements, hélas, rien de ce qui se passe au Sénégal ne me surprend. Les autorités ont laissé s’installer une culture de l’outrance et de la défiance vis-à-vis des institutions républicaines, qui atteint ici son paroxysme avec des citoyens qui prennent des armes contre leur propre pays.
Par je ne sais quelle logique, l’Etat du Sénégal a laissé un citoyen -affabulateur, médiocre, manipulateur, violent, séditieux- s’ériger au-dessus du Droit pour faire ce qu’il veut, au mépris des règles collectivement acceptées et dont l’Etat est censé être le garant. En République, on ne laisse pas un citoyen insulter et menacer magistrats, hauts gradés, hommes de rang, appeler à l’insurrection et au coup d’Etat, appeler au meurtre du chef de l’Etat, diffuser des mensonges et discréditer les institutions sans rien faire. Quelle est la logique d’interpeller un citoyen qui viole la loi sur la voie publique et le convoyer chez lui, au lieu de l’acheminer au Commissariat le plus proche ? En refusant de faire face à l’inéluctable, l’Etat du Sénégal a banalisé l’inacceptable et inséré à dose homéopathique à une catégorie de citoyens, qu’elle pouvait se hisser au-dessus de la règle de Droit et aux jeunes que les institutions n’étaient pas à sacraliser.
Je le rappelle pour ceux que cela pique : M. Sonko est un fasciste. Comme tous ceux de son obédience politique, il ne peut respecter les institutions car il n’est ni démocrate ni républicain. Il vit sur la rente de l’affrontement permanent pour espérer conquérir le pouvoir par la force ou en tout cas provoquer une rupture du fonctionnement normal des institutions. Dès lors, quand on gouverne un pays, de surcroît un grand pays comme le Sénégal, on ne saurait laisser le désordre s’installer et procéder ainsi à la dévitalisation des institutions, car elles sont le garant de notre commun vouloir de vie commune. Sur ce sujet précis, il convient de rappeler qu’on ne combat le fascisme que par le Droit et les principes républicains, et non par la violence sur des civils désarmés, qu’aucune cause ne saurait justifier. Notre arsenal juridique est doté de dispositions pour sanctionner définitivement toute déviance antirépublicaine.
Aussi, il est inacceptable de faire recours à des civils comme supplétifs des Forces de défense et de sécurité. Une démocratie s’honore de toujours demeurer dans le corset du Droit. M. Sonko est un délinquant condamné deux fois en moins d’un mois par un magistrat du siège. Ses opinions sont antirépublicaines, et son parti vient le 2 juin dernier d’appeler officiellement à l’insurrection et au putsch militaire. Ces gens sont des ennemis de la République qu’il faut combattre, de manière ferme, quel qu’en soit le prix, sinon, à terme, c’est la République qui va s’affaisser, nous plongeant tous dans un cycle dangereux et pour une durée indéterminée.
Le parti Pastef et ses satellites appellent les Sénégalais à descendre dans la rue pour en finir avec le régime et nul responsable identifiable n’est aperçu dans les manifestations ? Où sont les représentants de la société civile qui soufflent sur les braises ? En démocratie, on ne permet pas à des individus encagoulés de marcher dans les rues, et ce quelle que soit la cause qu’ils prétendent défendre. Nous avons l’habitude dans les marches de protestation, de voir des visages connus, mais où sont-ils ? Au contraire, des bandes de pillards, des casseurs, des hommes armés paradent dans les rues, tuent des Sénégalais, et aucune voix sérieuse parmi les hommes politiques, intellectuels et membres de la Société civile ne dénonce ces crimes.
Ces pillages, ainsi que cette violence d’un autre âge exercée sur des civils et des policiers et gendarmes ont un objectif précis : faire peur et choquer les citoyens pour les inciter soit à la révolte, soit à rester cloîtrés chez eux pour paralyser le pays.
Le parti Pastef a imposé la tyrannie sur les réseaux sociaux, et sur les intellectuels et les journalistes ; des consciences rampent sur le tapis du reniement pour échapper à la furie des nouveaux censeurs et insulteurs publics. Désormais, c’est dans les quartiers qu’on menace et tue pour asseoir définitivement la terreur. Où sont les consciences qui se disent démocrates et progressistes quand le sac de l’université est opéré, quand les facultés sont incendiées, quand le Cesti qui forme les fabricants de l’information nécessaire à la vie démocratique est attaqué ? Ils ont brûlé la bibliothèque de l’Université de Dakar. Les livres, chemin balisant vers le savoir, sont les ennemis de ces gens qui prospèrent sur le lit de l’ignorance et de l’obscurantisme. J’ai pensé aux fascistes boliviens quand ils ont chassé la Gauche au pouvoir. Leur premier forfait a été d’incendier la bibliothèque de l’intellectuel et homme politique progressiste, Alvaro Garcia Linera, qui était composée de 30 000 livres.
Rien n’est surprenant dans cette terreur, car l’ennemi de ces gens, c’est la lumière qui libère et élève l’humain afin de lui rendre sa dignité d’homme qui pense et agit en liberté et en responsabilité.
Notre pays fait face à une tentative insurrectionnelle incontestable organisée, et dont les prémices sont visibles depuis quelques années à force de discours guerriers, de manipulation des masses par des médias irresponsables, de recours systématique aux infox et d’une volonté d’acquisition du pouvoir par la rue au détriment de la voie démocratique. L’Etat a une responsabilité dans le pourrissement de la situation, à force de légèreté et d’absence d’actes forts visant à défendre la République. Mais l’opposition dite républicaine a aussi joué avec le feu par calcul politicien, par haine d’un homme et par avidité du pouvoir. Elle a vendu son âme pour des sièges. J’ai déjà assez écrit sur la fumisterie d’une Société civile qui se fait un devoir de prendre parti et de miser sur un bon cheval sans reculer devant aucune abjection. Je passe outre les intellectuels, tétanisés à l’idée de prendre leurs responsabilités et dont l’activité favorite est de verser dans la facilité à taper sur le Président Sall, sans jamais dénoncer l’usage du discours violent et antirépublicain de M. Sonko qui leur inspire une peur sidérante et qui promeut tout ce contre quoi ils écrivent et agissent depuis des années.
Cette crise est le fruit d’une irresponsabilité de la classe politique, mais elle est aussi la conséquence d’un délitement de nos institutions depuis 2000. Le temps d’aborder ces questions de fond viendra, mais quand des irrédentistes qui, en quarante ans, n’ont jamais pu régner sur un centimètre carré de territoire sénégalais, paradent à Dakar, il faut faire face et répondre à l’urgence du devoir moral. Par sens de l’Etat, par patriotisme et par conscience républicaine, mon soutien à nos institutions républicaines en ces temps incertains est sans réserve. Il n’y a, de mon point de vue, ni la Gauche, ni la Droite, ni la majorité, ni l’opposition, il y a la République face à des individus qui, contre elle, ont pris les armes.
Post-scriptum : M. le président de la République, votre gouvernement a annoncé une attaque de notre pays par des bandes armées alliées à des mercenaires étrangers. Je fais le choix de vous croire, ayant mis ma sécurité et une partie de ma souveraineté entre vos mains en tant que représentants légitimes et légaux du Peuple sénégalais. Conformément aux lois de notre pays, je soutiendrai toute mesure que vous et votre gouvernement prendrez pour restaurer l’ordre public ainsi que la quiétude de nos concitoyens, arrêter les bandes armées et les mettre à la disposition de la Justice, même si je suis lucide sur le caractère si infime d’un soutien de ma part.
Le gouvernement ne devra pas reculer face à un ennemi de type militaire dont les revendications ont moins une base politique qu’insurrectionnelle. Tout recul signifiera l’effondrement de la République que vous avez juré de préserver.
Le Sénégal, depuis l’indépendance, n’a jamais été vaincu. Le Sénégal vaincra à nouveau ses agresseurs d’aujourd’hui. M. le président de la République, vous êtes assis sur le fauteuil d’un des plus illustres Africains, Léopold Sédar Senghor ; vous avez l’honneur de diriger une grande Nation dont le rayonnement traverse les âges et les frontières. C’est au nom de cet honneur, le plus grand possible, qui est de conduire aux destinées du Sénégal, le pays de Dieu, que je vous prie de préserver la République laïque, démocratique et sociale, la Nation indivisible et l’Etat fort et prestigieux.