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28 novembre 2024
Opinions
par El Hadji Omar Youm
CHERS MESSIEURS, BRISEZ VOS PLUMES
Vous êtes, manifestement, dans la compromission, la démission, l’euphémisme dans l’unique dessein, vil et égoïste, de défendre votre image d’intellectuels qui se rangent du « coté du peuple » sans être mue par la volonté de dire la vérité
J’ai lu et relu, plusieurs fois, votre sortie au vitriol sur la situation politique au Sénégal.
Votre analyse m’a aussi profondément troublé que les morts que nous pleurons et déplorons, les énormes dégâts matériels constatés, les bravades de toutes sortes sur des populations sans défense, les saccages de nos universités, de nos bibliothèques incendiées, « le terrorisme digital », les attaques brutales de nos forces de défense et de sécurité vilipendées, violentées et tuées par des manifestants hors la loi …
Si pour vous le seul justificatif à cette sauvagerie devrait être la volonté prêtée au président Macky Sall de briguer un troisième mandat alors chers messieurs, avec tout le respect que je vous voue, briser vos plumes !
Sans vous en rendre compte vous êtes, manifestement, dans la compromission, la démission, l’euphémisme dans l’unique dessein, vil et égoïste, de défendre votre image d’intellectuels qui se rangent du « coté du peuple » sans être mue par la volonté de dire la vérité.
Je voudrais avant tout, regretter votre sarcastique et sournoise « vérité » consistant à affirmer sans raison, dans un jugement de valeur qui n’honore ni votre rang ni votre réputation, et qui, par sa généralisation enlève toute rigueur intellectuelle à votre fumeuse tribune.
En considérant, de façon manichéenne, sans aucune retenue, ni gêne que les tenants du pouvoir constituent une « caste que ni la misère sociale ni sa propre misère morale » ne semble affecter, vous dépassez les bornes de la courtoisie et de la simple civilité en mettant des digues, des barrières funestes à la cohésion et à la justice sociales.
Dans la stigmatisation et les classifications sociétales puériles, beaucoup de prétendus intellectuels ont brulés leur pays sans s’en rendre compte.
Pour ma part, je reste convaincu que dans la classe politique il n’y a pas que des bons d’un côté et des mauvais de l’autre. Une telle assertion est monstrueuse, satanique et constitue, à mon sens, une froide et méchante moquerie qui balafre d’emblée votre petite vérité.
Respectez le peuple qui, en 2019, malgré toutes les affirmations scabreuses contenues dans votre satire, avait réélu le président Macky Sall au premier tour avec plus de 58% du suffrage valablement exprimé des sénégalais.
Respectez vos dirigeants qui se sont engagés en politique pour apporter leur modeste et responsable contribution dans la construction de notre pays, renonçant ainsi à l’intimité d’une paisible vie familiale confortable, se soumettant, avec responsabilité, à la redevabilité, à la critique souvent facile et par endroit envieuse et lâche.
Vous parlez de justice sociale ? De quelle justice sociale ? Notre bilan dans le secteur de la justice sociale est énorme !
Après la mise en œuvre de l’Acte 3 de la Décentralisation pour plus d’équité et de justice dans l’action territoriale, d’énormes chantiers ont été engagés pour réduire les inégalités sociales, mettre en œuvre la carte d’égalité de chance, protéger les personnes vulnérables, créer et élargir les mutuelles de santé, instaurer la bourse de sécurité familiale, renforcer la protection de l’enfance, augmenter les subventions sur les produits de première nécessité, sur l’électricité, sur l’eau, réduire l’impôt au profit des masses laborieuses à travers une réforme de la fiscalité, augmenter les salaires et les pensions, réduire les disparités sociales en dotant les localités périphériques ou isolées d’infrastructures de désenclavement et d’équipements essentiels, tout en renforçant les accès aux soins de santé, à l’eau, à l’électricité…..
Des efforts importants ont été déployés pour faire bénéficier à nos populations, particulièrement celles vulnérables, du progrès économique et social.
Alors, de quelle justice sociale parlez-vous ?
Chers messieurs, de grâce osez affirmer que depuis 2017, avec l’avènement de ce parti de Sonko, nous assistons à une véritable montée en puissance d’un discours politique haineux, médiocre, violent qui constitue une réelle menace pour la démocratie, à la cohésion sociale et à la concorde nationale.
Nous assistons, à la dictature de la minorité politique, une remise en cause de notre système républicain, à une instrumentalisation d’un nationalisme démodé, irréalisable (impossible, ou inapplicable) et inopérant, un discours démagogique fondé sur une remise en cause systématique de nos valeurs sociales, un mépris d’une rare brutalité des institutions démocratiques.
Il faut le dire, le Sénégal découvre une nouvelle ère d’une « bambinerie » politique qui cherche, par l’intimidation et la menace, à bâillonner le pouvoir judiciaire, à garrotter la liberté de la presse et à hypothéquer le droit à une information équilibrée et juste.
C’est une véritable guerre qui est engagée contre la République et ses valeurs.
C’est notre système républicain qui est menacé !
C’est notre mode de coexistence pacifique qui est soumis à rude épreuve !
C’est notre système démocratique qui est remis en cause !
Face à ces acteurs politiques d’un genre nouveau, incultes, malappris et discourtois, j’attendais de vous, à défaut d’une condamnation de principe, un simple appel à la retenue, à la responsabilité de tous les acteurs politiques, au respect et à la protection des biens publics et privés, ainsi qu’à la restauration de la tranquillité politique, rappelant qu’il ne peut y avoir place, dans l’espace politique, par essence démocratique, ni violence physique ni pillages.
Vous n’avez pas entendu les appels au mortel combat, au « thioki fin » comme dans un film de western.
Vous n’avez point vu les dérobades et mises en scène, de très mauvais goût, sur le chemin de la justice d’un monsieur qui a violé, éhontément, les règles de restriction dans le cadre de la lutte contre la pandémie du Covid-19 pour se rendre, librement et sans aucune contrainte, dans un lugubre salon afin d’assouvir une appétence certainement mal domptée. Quelle déception ! Quel silence coupable !
Dans des sociétés moins pudiques que la nôtre où l’accent du débat démocratique est fortement mis sur la probité morale des hommes politiques, pour moins que ça, à défaut de se retirer de la vie publique, des acteurs de premier ordre ont été contraints de présenter, souvent en toute humilité, leur excuse ou leur démission. Mais pour vous, rien de grave c’est simplement la justice qui est aux ordres…
C’est pourquoi, je comprends mieux, désormais, l’autre qui, affirmait, du reste avec raison, qu’« intellectuel n’est pas forcément synonyme d’intelligent ». Au lieu de nommer avec courage, impartialité et sérénité les maux qui guettent notre société, surtout en politique, vous avez préféré utiliser votre plume servile et inévitablement partiale pour tenter d’humilier une partie de la classe politique ainsi stigmatisée, jeter en pâture les gouvernants et, ainsi, rabaisser nos institutions démocratiques. Et, par-dessus tout, vous osez parler de pacte républicain à défendre….
Sans vous en rendre compte, chers messieurs, vous venez de le déchirer. Ce pacte, je ne sais pas si vous en connaissez le contenu, est constitué de l’ensemble des règles et principes, transcendant vos opinions, les miennes, opinions plurielles, multiples, souvent divergentes et qui facilite notre vie en société, dans la République. L’essence de ce pacte, en principe, hors temps, qui outrepasse nos convictions religieuses, politiques, philosophiques, notre appartenance sociale ou politique est dans le respect de nos institutions notamment celles judiciaires.
L’essence de ce pacte est dans le respect de nos forces de défense et de sécurité qui représentent la force de notre souveraineté nationale qui s’exprime exclusivement à travers la loi.
Si elles sont fragilisées c’est, assurément, tout l’édifice social qui s’affaisse.
Chers messieurs,
Aucun mot de reconnaissance voire de compassion ou de solidarité à ces braves citoyens qui, fidèles à leur serment de défendre en tout lieu et en tout temps notre République, ont acceptés, dans ce contexte d’une rare gravité, de faire preuve de retenue dans l’exercice de leur mission à la fois exaltante, difficile et loin d’être banale dans la consolidation du pacte républicain.
Contrairement à votre proposition consistant à changer le régime présidentiel que vous indexez sans raison, j’ai envie de vous rappeler que le problème du Sénégal n’est pas dans le choix entre un régime présidentiel et un régime parlementaire, choix déjà tranché en 2001 par un référendum ayant validé la Constitution, socle du pacte républicain, à plus de 94% des suffrages exprimés avec un taux de participation de plus de 65% des citoyens sénégalais.
Le problème de ce pays n’est donc pas dans la nature du régime, accepté et plébiscité par le peuple. Il est plutôt, à mon sens, au risque de me tromper, essentiellement dans nos us, dans nos mœurs, dans notre système éducatif, dans nos quartiers, dans nos maisons, dans nos lieux de travail, fortement symbolisé par cette sorte de légèreté morale déconcertante, stupéfiante, narcissique et généralisée qui menace notre commune volonté de vivre-ensemble.
Ne pas le reconnaitre c’est faire preuve d’une cécité dommageable !
Dès lors, il ne fait pas de doute que faire porter, exclusivement, la responsabilité de cette situation au seul président de la République, au régime présidentiel, est un raccourci primaire, dangereux, sans fondement intellectuel (rigoureux), qui affadit davantage votre vérité « en commandite ».
Malheureusement, comme le disait l’autre « c’est souvent comme ça avec le quotient intellectuel : un vrai « i » mais un faux « Q » ! ».
El Hadji Omar You est avocat, député à l’Assemblée nationale du Sénégal.
par Diomaye Ndongo Faye
LA TRAGÉDIE POLITIQUE SÉNÉGALAISE
EXCLUSIF SENEPLUS - Macky et Sonko doivent bien se regarder dans le miroir et se poser la question suivante : souhaiterais-je que les historiens relient mon nom à la déliquescence de la République du Sénégal ?
L’histoire du développement politique des sociétés humaines nous enseigne que des tragédies sont souvent survenues lorsque deux des leaders politiques les plus en vue dans l’entité sociale privilégient leurs intérêts personnels au-dessus de ceux de leurs peuples dans leur lutte pour la préservation et/ou la conquête du pouvoir. Ces protagonistes commencent par identifier les sources de grande peur, d’incertitude et d'inquiétude de leur peuple et décident de les utiliser comme fondement de ralliement à leur camp. Chacun se pose comme étant la seule et unique personne capable de mener le peuple à l’autre rive où les causes qui alimentent ces sentiments vont disparaître grâce à la baguette magique que seul lui est en mesure de manier. Si les institutions de cet espace administratif sont assez solides, cette tragédie peut aboutir à leur renforcement, c’est le cas de la guerre civile des États-Unis de 1861 à 1865. Dans le cas contraire, il est possible d’aboutir à ce qu’est devenu aujourd’hui la Somalie.
Ces deux leaders politiques sont aujourd’hui au Sénégal le président Macky Sall et le chef incontesté de l’opposition sénégalaise actuelle, Ousmane Sonko. Ces deux personnes doivent bien se regarder dans le miroir et se poser la question suivante : souhaiterais-je que les historiens associent mon nom à la déliquescence de la République du Sénégal ?
Le président Macky Sall et celles et ceux qui l’entourent sont animés par une forte intention de conserver le pouvoir. Ils usent de tous les moyens qui sont à leur disposition, et ils sont nombreux, pour empêcher toute candidature crédible de leur opposition à l’élection présidentielle du Sénégal. D’abord ce fut Karim Wade et Khalifa Sall et maintenant c’est Ousmane Sonko.
En ce qui concerne les deux premières personnes citées, c’était sur une accusation de malversation et d'usage personnel des deniers de l’État. Je ne dispose d’aucune donnée pour infirmer ou confirmer ces accusations. Ce que je sais cependant, comme tout bon Sénégalais qui suit religieusement l’actualité nationale, est qu’il y a plusieurs personnes qui ne sont pas du tout inquiétées par la justice sénégalaise sous la présidence de Macky Sall malgré les rapports accablants sur leur gestion des biens de l’État sénégalais.
Pour le cas d’Ousmane Sonko, il a d'abord été accusé d’être un Salafiste. Certaines personnes qui ignorent en réalité ce qu’est le Salafisme ou sont animées de mauvaises intentions lui attachent ce sobriquet pour le faire apparaître comme un islamiste radical qui va mettre fin à la laïcité de notre République et imposer la charia au peuple sénégalais dès qu’il accédera à la magistrature suprême du pays. Pour ceux et celles qui ne le savent pas, le Salafisme n’était rien d’autre qu’un mouvement pour le retour aux enseignements du Prophète Mohamed (PSL) et des quatre premiers califes Abu Bakr (632-634), Omar (634-644), Ôthman (644-656) et Ali (656-661). En quelque sorte un appel au retour à l’authenticité et un rejet des interprétations divergentes qui divisaient les musulmans.
En se fondant sur les résultats des dernières élections législatives, il est devenu évident aux yeux de Macky Sall et ses compagnons de l’APR et du BBY que cette diabolisation d’Ousmane Sonko et du Pastef n’a pas eu l’effet escompté sur le peuple sénégalais. Le score du Pastef, qui n’a rien à envier à ceux obtenus par toutes les oppositions politiques qui se sont succédé durant les régimes de Senghor, Diouf et Wade, est remarquable. Cette excellente performance du parti d’Ousmane Sonko a certainement démontré avec suffisance que ce dernier peut bel et bien vaincre en 2024 tout candidat ou candidate que l’APR et le BBY proposeront.
Étant donné que la diabolisation n’a pas produit le résultat escompté, Macky Sall et ses compagnons, qui sont déterminés à rester au pouvoir, ont dû se poser la question suivante : Que faire pour freiner l’élan du Pastef et surtout d’Ousmane Sonko dans leur marche qui semble être inébranlable vers la conquête du pouvoir ?
Ils nous ont tout d’abord sorti la plainte de l'un des leaders de l’APR pour diffamation. Ousmane Sonko a alors rapidement été condamné à six mois de prison avec sursis à l’issue de ce procès. Certains pensaient que cela suffirait pour le mettre hors d’état de nuire à l’ambition de conservation du pouvoir par l’APR et le BBY. Mais le manque de clarté des conséquences de ce verdict sur l’éligibilité d’Ousmane Sonko n’a pas rassuré Macky Sall et ses compagnons. Certes, la loi dit clairement que ce verdict empêche Ousmane Sonko de s’inscrire sur les listes électorales du Sénégal. Mais étant donné que ce dernier est déjà inscrit et que la loi ne dit rien sur l’éligibilité, vouloir interdire à Ousmane Sonko de se porter candidat en 2024 sur la base de ce verdict ne sera pas justifiable ni crédible.
L’affaire en cours contre Ousmane Sonko, son accusation de viol et de menace de mort par Adji Sarr, était alors devenue la roue de secours. Pour écarter le danger qu’une éventuelle candidature d’Ousmane Sonko représente pour la préservation du pouvoir par Macky Sall et ses compagnons, il fallait tout faire pour que le verdict de ce procès le mette à l’écart. Mais le non-lieu du procès contre Sitor Ndour et les preuves sans mérite présentées par Adji Sarr et ses avocats ont très rapidement montré au procureur qu’un verdict de culpabilité contre Ousmane Sonko ne sera pas du tout crédible aux yeux de l’opinion publique sénégalaise et mondiale qui surveille ce procès comme du lait sur le feu. C’est ainsi que, sachant qu’il allait perdre, le procureur a demandé au juge qu’à défaut de pouvoir le condamner pour ce dont il a été accusé, il faut l’incriminer pour le délit de « corruption de jeunesse ». Sur la base des témoignages lors du procès, surtout de celui de la jeune fille qui était avec Adji Sarr dans la salle de massage et à qui cette dernière avait demandé de sortir pour la laisser seule avec Ousmane Sonko, aucun juge qui se respecte n’allait mordre à cet hameçon du procureur.
Malgré ces incohérences dans la présentation des évidences pour prouver que Monsieur Sonko mérite une condamnation par la justice sénégalaise, le juge a décidé de suivre le procureur pour des raisons que seul Dieu et lui-même savent. Une chose est certaine, la légèreté des preuves qui lui ont été présentées et la gravité de la situation qui allait être créée par un verdict de culpabilité capable d’empêcher Ousmane Sonko d’être candidat à l’élection présidentielle du Sénégal en 2024, devraient pousser le juge à la prudence. Certes la force doit rester à la loi. Mais cette force devra reposer sur des décisions de la justice qui ne souffrent d’aucune ombre de doute objectif.
L’autre chose que je reproche à Macky Sall et ses compagnons est l’usage excessif de la force sous la forme d’emprisonnements sélectifs sur des bases douteuses qu’un juge qui se respecte n’aurait jamais approuvées. Le cas de Bassirou Diomaye Faye est un exemple type. En matière de justice, la procédure est aussi importante que les preuves présentées pour condamner une personne. Dans le cas de Bassirou Diomaye Faye, les policiers ont au moins violé la procédure. L’heure à laquelle il a été amené au commissariat et l’absence d’un mandat d'amener constituent des vices de procédures que le juge devant lequel il a été présenté n’avait pas le droit d’ignorer. Une relaxion pure et simple aurait dû être sa décision la première fois qu’il a été présenté devant ce dernier. Non seulement Bassirou Diomaye est en train de moisir en prison sans aucune idée sur la date de son procès, mais l’accusation sur la base de laquelle il a été arrêté manquerait de poids devant n’importe quel juge qui se respecte et qui a le moindre désir de prouver que ce que Bassirou Diomaye Faye a dit dans son texte Facebook n’était pas fondé.
Dire qu’une minorité des décideurs au sein du pouvoir judiciaire sénégalais est corrompue est une vérité indéniable. C’est d’ailleurs un mal dont souffrent tous les pouvoirs judiciaires du monde, peu importe l’état d’avancement du développement politique de leurs pays. Aucun magistrat qui se respecte et accepte le règne de la loi comme sève de la République ne songerait à condamner Bassirou Diomaye Faye sous le motif d’offense à la magistrature pour avoir exprimé une telle opinion qui est une vérité mondiale depuis des siècles. Le Pastef a, selon ses leaders, plus de 400 (quatre cents) de ses membres en prison pour des raisons liées à leurs activités politiques. Certes, il est fort probable que parmi les personnes incluses dans ce décompte des membres de Pastef il y a des individus coupables de flagrant délit d’actions ayant causé des dégâts matériels. Il n’est cependant pas exagéré de dire que la grande majorité parmi ces détenus le sont pour ce qu’ils ont dit. Ne pas voir ces personnes comme prisonniers politiques est certainement un comportement plus que bizarre.
Qu’en est-il du côté d’Ousmane Sonko et le Pastef ?
Bien que mon fils, Bassirou Diomaye Faye, soit dans le leadership de ce parti, je dois dire ici que je ne suis pas membre de ce parti. En fait, bien qu’étant un militant de la gauche sénégalaise, j’ai cessé de militer dans un parti politique parce que je me suis rendu compte des limites réelles de leur capacité à sortir mon pays du gouffre néocolonial.
Le programme politique de Pastef est certes louable, mais il y a lieu de rappeler que ce n’est pas une nouveauté au Sénégal. Beaucoup de partis politiques ont vu le jour dans ce pays et avaient proposé d’excellents programmes au peuple sénégalais. Mais pour des raisons multiples, ils n’ont jamais atteint le niveau de popularité de Pastef. Les deux grandes raisons derrière le succès de Pastef sont à mon humble avis :
Le niveau qu’a atteint le manque d’espoir pour trouver du travail chez la jeunesse sénégalaise, ce que les économistes appellent la mauvaise gestion du dividende démographique par l’État sénégalais.
Le développement des médias sociaux et l’extraordinaire habileté des membres de la cellule communication de Pastef de les mettre au service de leur cause.
Qu’est-ce que je reproche au Pastef et son leadership ?
Notre pays, comme d’ailleurs l’écrasante majorité des pays africains, est assis sur une bombe sociale à retardement : mauvaise gestion par leur État, pour des raisons structurelles, du dividende démographique ou en d’autres termes, l’incapacité de l’État/pays de créer les conditions optimales pour l’absorption par le marché du travail de la grande majorité des jeunes qui y accèdent chaque année.
Les leaders d’opinion, qu’ils soient politiciens, religieux, ou de la société civile du pays, devront tout faire pour ne pas être la cause de la production de l’étincelle qui peut faire éclater cette bombe. Les leaders politiques doivent absolument s’interdire, dans leurs efforts pour conquérir ou conserver le pouvoir, de donner à notre jeunesse au paroxysme de sa frustration, une raison quelconque d’exprimer leur courroux contre le gouvernement en faisant recours à la violence. Plutôt que de tout faire pour éviter que cette bombe éclate et embrase le Sénégal avec toutes les conséquences néfastes que cela peut causer, surtout pour un pays du Sahel, Ousmane Sonko et ses partisans semblent profiter du désespoir de la jeunesse sénégalaise pour accéder le plus rapidement possible au pouvoir. Le développement de la culture de l’attitude Gatsa est un danger pour le Sénégal. C’est une tactique qui peut certes servir à mobiliser une jeunesse déboussolée par les effets pervers de la non-viabilité et vulnérabilité de l’écrasante majorité des États africains mais c’est une manière de creuser la tombe du courant politique qui s’en sert pour accéder au pouvoir.
Dans une République, seul l’État a le droit de faire usage de la violence. Il va sans dire que beaucoup de politiciens véreux ont abusé de la confiance de leur peuple et recouru à un usage malsain de la violence, mais la seule réaction à un tel abus qui est offerte aux citoyennes et citoyens d’une République démocratique est le bulletin de vote, pas un gourdin, une machette, un cocktail molotov ou autre.
L’absence d’une condamnation des actes de vandalisme qui ont surgi à chaque fois qu’Ousmane Sonko a été traité d’une manière que les supporters de ce dernier perçoivent comme étant un abus de pouvoir est pour moi troublant. Ousmane Sonko qui aspire à la magistrature suprême de notre pays devrait être le premier à condamner sans réserve cette expression d’un manque total de civisme. Toute autre attitude, silence ou encouragement fait des dirigeants de Pastef les fossoyeurs en chef de toute possibilité de gouverner dans la paix quand le peuple sénégalais leur confiera la lourde tâche de gérer leur État. Ce que ces casseurs ne savent pas est que ce sont eux-mêmes et leurs familles qui vont payer à travers les impôts et les emprunts au nom du Sénégal, les dégâts qu’ils sont en train de causer, surtout les destructions des propriétés de l’État. Un proverbe Pulaar qui a été partagé avec moi par un ami enseignant Pulaar qui vit ici au Nord-Ouest de l’État de New York dit que « So ñiiwa ene habaa e ñiwaako hudo booretee » « quand deux éléphants se battent c’est l’herbe qui va souffrir quel que soit l’issue de la bataille, quel que soit qui a tort ou qui a raison ». Ce sont les baadolo sénégalais qui vont payer le prix des confrontations violentes entre Macky Sall et Ousmane Sonko par des dizaines de morts mais aussi comme indiqué plus haut par les impôts, la réduction des services sociaux de l’État et plusieurs autres manières.
Pour conclure je dirais ceci : il est temps que le duo Macky Sall-Ousmane Sonko revienne à la raison pour l’intérêt supérieur de la nation sénégalaise mais aussi pour les Africains qui utilisent le Sénégal comme exemple pour prouver à leurs compatriotes que la République démocratique est possible en Afrique au Sud du Sahara. Les sages de mes cousins Waalaf disent que « alal du doy, doylu moy alal ». Le président Macky Sall et ses compagnons doivent bien pondérer cet adage Waalaf et réduire de manière significative leur intention de garder le pouvoir pour préserver leurs intérêts matériels. En ce qui concerne Ousmane Sonko et ses partenaires, il est important de faire sienne cette leçon que l’histoire politique mondiale nous a enseignée : tu perdras le pouvoir par la manière dans laquelle tu l’as acquis.
La tragédie finit toujours par la mort d’un des membres du duo qui est coincé dedans. Les dégâts socio-économiques et matériels pour le Sénégal seront incalculables si cette tragédie Macky Sall-Ousmane Sonko connaît l’aboutissement de la grande majorité des tragédies. Il est temps pour vous monsieur le président de la République de vous rappeler qu’en vous confiant à vous seul le droit de l’exercice de la violence, le peuple sénégalais ne voulait pas que vous utilisiez ce droit pour vos gains personnels et/ou ceux de vos compagnons. À vous Ousmane Sonko, je conseille de tout faire pour éviter d’hypothéquer la gouvernabilité du Sénégal par les personnes élues.
Nous n’en sommes qu’au début de cette pièce de théâtre déjà très douloureuse pour les familles qui ont perdu un des leurs dans les manifestations liées à elle. Vous deux pouvez éviter au Sénégal une fin plus tragique en faisant la paix des braves. Président Sall, faites comprendre à vos compagnons qui craignent de perdre les privilèges qui viennent avec le maintien au pouvoir de l’APR/BBY que rien n’est éternel surtout les avantages liés à l’accession au pouvoir dans une République démocratique. Ousmane Sonko, dites aux membres de Pastef et à vos sympathisants que sans une culture du respect de la chose publique et le rejet d’un recours quelconque à la violence, quels que puisse être les injustices commises par les tenants du pouvoir, aucun parti ou coalition qui accédera au sommet de la pyramide politique de notre pays ne pourra bénéficier du climat de paix social sans lequel la prospérité économique est impossible.
À mes frères et sœurs qui brandissent l’argument selon lequel Ousmane Sonko et le Pastef vont détruire notre République s’ils accèdent au pouvoir, je dirais ceci : vous pensez cela parce que vous avez soit une attitude subjective négative à l’égard d’Ousmane Sonko et/ou Pastef ou une connaissance limitée de l’histoire de la démocratie. Premièrement vous n’avez aucune preuve des intentions que vous prêtez à Ousmane Sonko et son parti. Deuxièmement, même si Ousmane Sonko avait ces intentions, il appartient au peuple sénégalais de décider si oui ou non il a confiance en lui pour occuper la magistrature suprême de leur pays. Toute intention de prendre cette décision à la place du peuple sénégalais, quel que soit le moyen utilisé pour le faire, constitue un danger pour le développement politique apaisé de la République sénégalaise et doit par conséquent être condamnée vigoureusement. Se substituer au peuple sénégalais dans le processus du choix de la personne qu’il va remettre la présidence de la République en 2024 n’est ni moins ni plus qu’un coup d’État et donc un crime constitutionnel contre notre République.
Diomaye Ndongo Faye est Consultant en Stratégie développement politique
Princeton, New Jersey, Etats-Unis.
par Mamadou Bamba Ndiaye
ILS N’ONT PAS PLEURÉ LA BU
La véritable « vérité qu’on ne saurait cacher », c’est cette attaque terroriste d’envergure qui a voulu mettre le Sénégal à genoux. La Justice a mis en danger un projet de confiscation de nos richesses dans lequel certains ont déjà investi
Trois plumes infames. Un texte certainement trop vite écrit sous une commande pressante de travestir une « vérité qu’on ne saurait cacher ». Mille vérités pourtant qu’on ne saurait cacher. Telle est, me semble-t-il, la lecture raisonnable d’une tardive louchée de gasoil jetée sur un brasier d’hier. C’est la lecture des silences indécents d’un texte particulièrement perfide.
D’abord, des écrivains devraient éprouver un peu plus de compassion pour les bibliothèques. Et donc dénoncer, ne serait-ce que par allusion, la tentative de destruction par le feu de notre système d’enseignement supérieur. Aucune de nos institutions universitaires n’a échappé à la furie d’incendiaires professionnels équipés d’armes de guerre. Ni le Cesti Mame Less Camara. Ni la Bibliothèque universitaire, cette Bu que les luttes de générations successives d’étudiants ont fini de transformer en bijou. Là réside l’infamie : même pas une larme de crocodile pour la science et la littérature blessées par les vandales.
Quand on n’a pas de sentiment pour les bibliothèques, on ne pleure pas bien sûr pour les casernes, centrales électriques, usines d’eau, réseaux de transport, … systématiquement ciblés et attaqués jeudi et vendredi derniers. De terribles actions de guerre. Oui, la véritable « vérité qu’on ne saurait cacher », c’est cette attaque terroriste d’envergure qui a voulu mettre le Sénégal à genoux. Elle est d’un modèle assez inhabituel en Afrique où on subit davantage des attentats et des tentatives d’occupation de territoires. Mais plusieurs villes pakistanaises l’ont expérimenté ces derniers mois. Sans la sagesse et l’adresse de nos FDS, les plumes infames seraient, ce jour, certainement, en train de danser sur notre tombe.
Discutons du procès en responsabilité. Nous sommes tous responsables, chacun pour ce qu’il a dit et ce qu’il a tu, ce qu’il a fait et ce qu’il aurait dû faire. C’est vrai : sans la perception d’une faiblesse voire d’un laxisme à certains niveaux, les tueurs ne se seraient pas enhardis à ce point. C’est la peur de l’autorité qui entretient la paix et la cohésion sociale, et non l’autorité de la peur.
Ce qui n’est pas vrai par contre, c’est l’explication des événements par nos trois plumes : la fumeuse controverse du « troisième mandat », ce canular érigé en but de guerre tout comme l’avait été le fameux charnier roumain de Timisoara qui n’a jamais existé ; ou les armes atomiques de Saddam Hussein. Le président Macky Sall a bel et bien accepté d’inscrire cette controverse à l’ordre du jour du dialogue national le mercredi. Le jeudi, les vandales sont entrés en action.
Après le canular, le non-dit. Pas un mot sur la condamnation judiciaire du jeudi matin, qui est pourtant le prétexte et le déclencheur de cette entreprise de saccage d’un pays. Par son verdict susceptible d’empêcher une candidature, la Justice a mis en danger un projet de confiscation de nos richesses gazières et pétrolières dans lequel certains ont, de toute évidence, déjà investi de nombreux milliards. Dans d’autres pays africains, ces « investisseurs » du genre macabre ont, alors, mobilisé milliards, armes, combattants et plumes de service, pour protéger leur projet d’enrichissement. C’est le tour du Sénégal, alerte-t-on depuis lors. C’est tellement vrai que l’infamie ose le taire.
Ici, un lien obscène s’établit entre le canular et le non-dit. Le Sénégal est attaqué dans le but de faire triompher un projet de conquête du pouvoir par l’autorisation d’un candidat empêché et l’empêchement d’un candidat suspecté. Moom day bokk, yaw doo bokk.
Où va le Sénégal ? Dieu seul le sait. Mon pari demeure cependant que jamais les plumes infames n’écriront le livre des ossements du Sénégal. La patrie de Cheikh Anta Diop et son Université restent et resteront debout. Inchallah.
Mamadou Bamba Ndiaye est un ancien député.
par Yoro Dia
CETTE VÉRITÉ QU’ON CHERCHE À ENFOUIR DANS LA PLUS SECRÈTE MÉMOIRE DES HOMMES
Le texte de Boris, Felwine et Mbougar est éminemment politique pour ne pas dire fondamentalement partisan. Il est étonnant que votre mémoire ait ignoré le fagot de l’indignation face aux saccages des universités, aux appels à l'insurrection
« Quand la mémoire va chercher du bois mort, elle ramène le fagot qui lui plait », disait Birago Diop dans sa grande sagesse. La mémoire de Boubacar Boris Diop, Felwine Sarr et de Mbougar Sarr est partie chercher du bois mort et elle a apporté le fagot qui lui plait.
Cette volonté de choisir le fagot qui plait est la plus grande faiblesse intellectuelle de leur texte commun malgré l’immense qualité intellectuelle des auteurs. Mais pris individuellement, ils confirment ainsi Max Weber qui disait : « Les associations de savants dès qu’elles discutent de la paix et de guerre, sont des associations politiques non scientifiques » parce que « prenant une position politique, on cesse d’être savant » car on n’est plus dans la « neutralité axiologique » qui faut-il le rappeler doit être consubstantielle à la démarche de l’intellectuel ou du savant. Cette neutralité axiologique qui est le meilleur rempart contre le manichéisme.
Sur les questions humaines, les questions sociales, la nuance et le relativisme sont des principes fondamentaux. On ne le trouve nulle part dans le texte. Ce texte contrairement au « J’accuse » de Zola qui a été comme un « craquement d’une allumette dans une nuit noire » pour parler comme Mbougar, sera comme les traces d’un chameau dans une tempête de sable.
Un texte écrit rapidement pour être dans l’air du temps est par nature éphémère comme le buzz. C’est pourquoi le texte de Boris, Felwine et Mbougar est un texte éminemment politique pour ne pas dire fondamentalement partisan. Tellement partisan que la mémoire choisit le fagot des conséquences (situation actuelle) et refoule le fagot des causes (un projet insurrectionnel). Il est étonnant qu’on cherche à enfouir dans « la plus secrète mémoire des hommes » les appels permanents à l’insurrection de Sonko qui menace le président de la République de mort, appelle les jeunes à aller le déloger au Palais sans oublier les menaces et les insultes contre les magistrats et les généraux. Celui qui « sème les graines de la discorde et de la violence », comme vous dites, est celui qui appelle au meurtre du chef de l’Etat, demande aux jeunes d’aller le déloger, terrorise les magistrats et qui corrompt les jeunes et les adolescents en les fanatisant pour en faire des boucliers humains pour se soustraire à la justice dans des affaires strictement privées et qui traite son accusatrice de guenon atteinte d’AVC. Et c’est ce monsieur qui a « la violence et la peur comme méthode ». Vous faites un transfert purement freudien en écrivant « la première des compromissions consiste à ne pas nommer ce qui est, à l’esquiver, à l’euphémiser, à le diluer par des tours de passe-passe sémantiques ou tout bonnement à travestir la réalité ». C’est exactement ce que vous faites quand votre mémoire choisit le fagot qui lui plait et esthétise la violence prônée ouvertement par Pastef au lieu de la condamner. Avec votre tribune, vous vouliez être dans le rôle de l’intellectuel tapageur comme Zola dans l’affaire Dreyfus. Il y a, cependant, une grande différence éthique entre Zola et vous. Zola avait choisi le camp du plus faible et vous, celui du fort, du puissant qui a profité de la double fragilité psychologique et sociale d’une orpheline. Elle, aussi, fait partie des « populations déjà précaires et laissées à elles-mêmes aux prises avec les problèmes élémentaires du quotidien le plus rude » que vous décrivez. Ce quotidien rude qui a dû l’amener à Sweet beauty, ce qui n’est pas le cas de son bourreau. C’est là où se trouve la grande différence éthique entre Zola et vous. Zola a été avocat d’une belle et grande cause. On ne saurait dire la même chose pour un homme politique accusé de viol dans un endroit sordide. Vous n’oseriez jamais défendre un tel homme aux Etats-Unis ou en France. La situation actuelle exige que chacun prenne ses responsabilités, dites-vous.
L’Etat a pris les siennes pour que justice soit rendue en toute sérénité malgré les menaces et la terreur qui a fait désister certains juges. La justice, le seul service de l’Etat qui porte le nom d’une vertu, a tenu son rang en allant courageusement jusqu’au bout. Comme j’ai commencé avec Birago, terminons avec lui. Il est étonnant que votre mémoire ait ignoré le fagot de l’indignation face aux saccages des universités qui est par essence le lieu de la pensée et de la tolérance. Nommons les choses, les fagots de la mémoire de l’Humanité nous rappellent qu’en 1258, quand les Monghols sont entrés à Bagdad, la capitale de l’empire musulman, ils ont fait deux choses : l’incendie de la bibliothèque et une montagne de cranes. Les nazis feront la même chose avec les bibliothèques en jetant les livres au feu. On a une idée du projet quand on commence par saccager des universités et brûler des bibliothèques.
Tout de même surprenant qu’un Goncourt, qu’un prix Neustadt ne s’en émeuvent pas. Comme je disais dans ma réponse aux 114, les intellectuels sont libres de faire la même erreur que Martin Heidegger face aux Nazis mais l’Etat du Sénégal n’a pas le droit de faire la même erreur que la République de Weimar pour la bonne et simple raison que quand un intellectuel se trompe c’est juste une hypothèse qui n’a pas fonctionné mais pour un Etat, c’est une catastrophe incommensurable comme l’arrivée des nazis au pouvoir. On connait la suite.
Par Dr. Adama Aly PAM & Gorgui Wade Ndoye
ALLONS-NOUS DEVENIR UN PAYS SANS MEMOIRE ?
Les évènements en cours dans notre pays sont d’une tristesse infinie. En plus des vies inutilement sacrifiées, nous assistons à la destruction des Archives ce qui est une atteinte au cœur de la nation sénégalaise.
Le Sénégal éternel, notre beau pays que nous désignons fièrement sous le nom de pays de la Teranga, notre Sunugaal offre aujourd’hui un visage balafré : le sang de nos enfants coule, nos universités sont fermées, des bibliothèques et archives incendiées, des biens publics et privés détruits, accès à Internet et aux réseaux sociaux limité ! Notre pirogue tangue dangereusement en eaux troubles. Cette terre qui nous a vu naitre et qui nous gardera dans ses entrailles pour l’éternité vit des moments très difficiles et il est de notre devoir à tous de tirer sur la sonnette d’alarme et d’appeler à la paix des esprits et des cœurs. Le devoir de notre génération est de transmettre aux générations à venir après nous d’un Sénégal de paix et de prospérité.
Les évènements en cours dans notre pays sont d’une tristesse infinie. En plus des vies inutilement sacrifiées, nous assistons à la destruction des Archives ce qui est une atteinte au cœur de la nation sénégalaise. Se relever après une perte totale de mémoire est une mission presque impossible. En effet, les Archives sont la mémoire des institutions et des peuples. Ces vieux papiers, conservés depuis longtemps par des générations de sénégalais, ne sont « pas que de vieux papiers, mais des vies d’hommes, de provinces et de peuples ». Les archives ne sont pas « d’immenses cimetières », mais des lieux où chacun peut retrouver la trace « des expériences, des aventures, des menaces et des drames » de la société. Elles sont indispensables à la « continuité de la conscience humaine », à la bonne gouvernance et à la continuité de l’action gouvernementale. Sans Archives, il ne saurait y avoir d’Etat moderne. Sans Archives il n’y a pas de planification, pas de reddition des comptes ni de capitalisation des expériences. L’étymologie du mot Archives du grec arkhè signifie à la fois le commandement et le commencement. On gouverne avec des Archives et on ne peut comprendre le passé qu’en ayant une lecture rétrospective des faits à travers les traces justifiant les prises de décision et des motivations des acteurs.
Voir les archives de la Faculté des Lettres de l’Université de Dakar, les pièces d’état civil conservées dans les mairies et les archives de beaucoup d’institutions publiques réduites en cendres est une image insoutenable et d’une tristesse infinie. Ce drame va coûter cher à plusieurs générations de sénégalais et d’Africains ayant fait leurs humanités à Dakar. La perte de 200 000 dossiers administratifs d’étudiants ayant fréquenté la Faculté des Lettres de 1957 à nos jours. Ces dossiers renseignent sur les parcours, les objets d’études entrepris par plusieurs générations d’étudiants. Ils gardent également la trace des procès-verbaux d’évaluation des travaux scientifiques dont certains sont signés de la main du professeur Cheikh Anta Diop. !
Cette perte sera lourde de conséquences. Beaucoup de diplômés de cette faculté payeront pendant longtemps les frais de ce drame. Dans le cadre des processus de recrutement, des Organisations internationales procèdent à la vérification des diplômes des candidats. Il sera désormais impossible de répondre à ces demandes et les candidats verront filer des opportunités. Par ailleurs, cette situation fera les beaux jours des faussaires et des détenteurs de faux diplômes qu’il sera désormais impossible d’authentifier. En plus des faux médecins, des faux pharmaciens, nous serons bientôt submergés par de faux diplômés de la Faculté des Lettres.
Il est urgent d’ériger les défenses de la paix par le dialogue dans l’esprit des Sénégalaises et des Sénégalais. “Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix”. Nous ne pouvons renier les principes fondamentaux de l’idéal démocratique si chèrement acquis par les luttes et les sacrifices de nos devanciers et de le substituer à la violence et à la destruction par le feu et par l’épée. La liberté et la paix fondées sur la conscience de soi sont ce que nous avons de plus cher.
La politique de réarmement moral et du désarment des esprits passe par la reconstruction de notre mémoire abimée et par le rapprochement des cœurs et des esprits. Il nous faut faire recours aux valeurs de Ngor, Jom, Kersa et de Teranga que nous ont laissé nos ancêtres.
L’Etat doit désormais donner aux institutions patrimoniales (Les Archives nationales & à la Bibliothèque nationale) les moyens nécessaires à la préservation et à la valorisation de la mémoire de la nation. Nous avons les moyens et les ressources humaines nécessaires pour relever ce défi avec les nouveaux outils technologiques de notre époque. Notre pays a formé depuis plus de 50 ans à l’Ecole de Bibliothécaires, Archivistes et Documentalistes (à quelques mètres du sinistre) plus de 5000 archivistes et bibliothécaires africains qui sont sur tous les continents, dans toutes les Organisations qui participent à la préservation et à la valorisation de la mémoire du monde.
Nous avions tous été heureux d’assister à l’acquisition et au retour des photographies de Serigne Touba Xadim Rasul au Sénégal. Cela a été possible parce que quelque part elles ont été protégées contre l’usure du temps et la folie des hommes. Tâchons d’être dignes de notre devoir de préserver les sources de notre glorieuse histoire et donnons-nous les moyens de transmettre à notre descendance nos archives et notre patrimoine. Ancrons notre action quotidienne dans l’amour et la paix de notre cher pays. Gardons-nous de vendre l’héritage que nous ont laissé nos parents pour ne pas compromettre notre présent et celui de l’avenir de nos enfants.
par Demba Moussa Dembélé
LE TEMPS DE LA TYRANNIE
Jamais les prisons sénégalaises n’ont été aussi pleines de prisonniers politiques. Résister pour le respect des libertés individuelles et collectives. Résister pour la restauration de l’Etat de droit
Le régime à l’agonie et ses mercenaires ont déclenché une campagne de terreur visant tous ceux qui s’opposent à la troisième candidature illégale et illégitime de Macky Sall et les membres du parti Pastef-les Patriotes dirigé par Ousmane Sonko. Cette campagne de terreur a entraîné un recul démocratique sans précédent et de graves violations des droits humains au Sénégal.
L’effondrement de l’Etat de droit
En février 2021, plus d’une centaine d’universitaires sénégalais avaient publié un document sur la crise de l’Etat de droit dans notre pays. C’est un fait que sous le régime actuel, la séparation des pouvoirs, qui est le fondement de l’Etat de droit, n’existe plus. L’exécutif, en l’occurrence le président de la République, a domestiqué les autres pouvoirs législatif et judiciaire. L’Assemblée nationale n’est qu’une simple chambre d’enregistrement des projets soumis par le Président et son gouvernement. Quand il ne peut plus la contrôler, comme c’est le cas présentement avec la poussée de l’opposition après les législatives de juillet 2022, il essaie de la paralyser Un fait dénoncé par les députés de l’opposition.
L’un des piliers de l’Etat de droit est la Justice. Les universitaires cités plus haut, soulignent que « l’Etat de droit exige la soumission totale de l’Etat au droit ». Ce qui veut dire que la Justice ne doit pas accepter d’être au service de l’Exécutif. Elle doit être indépendante et traiter tous les citoyens sur le même pied d’égalité. Ce faisant, elle consolide l’idéal démocratique et renforce la confiance des citoyens. Mais quand la Justice donne l’impression d’être au service de l’Exécutif, elle tend à perdre sa crédibilité et suscite la défiance des citoyens.
Sous le régime de Macky Sall, il y a eu des cas où la Justice a été instrumentalisée pour écarter des adversaires politiques. Khalifa Sall et Karim Wade en ont été les premières victimes. Ousmane Sonko risque de les rejoindre. Ses avocats et une grande partie de l’opinion disent que le verdict rendu le premier juin confirme la thèse du complot visant à l’écarter de la course à la présidentielle. Par ailleurs, le traitement inégal entre les citoyens proches de l’opposition et ceux du pouvoir renforce les soupçons de partialité de la Justice au sein de l’opinion. Les arrestations tous azimuts de militants ou sympathisants du parti de Ousmane Sonko semblent le confirmer.
Le Sénégal ; une prison à ciel ouvert.
Jamais les prisons sénégalaises n’ont été aussi pleines de prisonniers politiques. Pour un oui ou un non, les gens sont cueillis par la Police ou la Gendarmerie, parfois avec des méthodes indignes d’un pays qui se dit démocratique, et envoyés en prison pour plusieurs mois. Les journalistes ne sont pas épargnés. Papa Alé Niang était la première victime de cette répressive aveugle, Serigne Saliou Guèye, Pape Ndiaye et bien d’autres viennent allonger la liste. Les femmes journalistes ou non ne sont pas épargnées non plus. Même des femmes enceintes ont été envoyées en prison.
Les arrestations de journalistes traduisent un net recul de la liberté d’expression et celle de la presse. Cela a été confirmé par le mauvais classement du Sénégal récent de Reporters sans frontières (RSF).
Aujourd’hui, tous ceux qui s’opposent à la troisième candidature de Macky Sall ou soutiennent l’opposition sont en danger. C’est pourquoi le Sénégal est devenu une vaste prison à ciel ouvert. Il est l’un des pays africains ayant le plus grand nombre de prisonniers politiques. Une véritable honte pour notre pays !
Confronter la tyrannie
Les acquis démocratiques conquis de haute lutte et au prix d’innombrables sacrifices ont été perdus sous le régime actuel. L’obsession avec la troisième candidature illégale et immorale a entrainé la violation flagrante des principes les plus élémentaires de l’Etat de droit. La politique de terreur est en train de restreindre l’espace démocratique comme une peau de chagrin.
Mais aucun peuple ne peut accepter de courber l’échine face à la dictature. Face à la tyrannie, le peuple n’a d’autre choix que de résister. Résister pour défendre les acquis démocratiques en danger. Résister pour le respect des libertés individuelles et collectives. Résister pour la restauration de l’Etat de droit Face à l’injustice, c’est le droit inaliénable de tout peuple de défendre ses droits.
par Ass Malick Mbaye
DE L’OBLIGATION ET DE LA NÉCESSITÉ DE RÉSISTER JUSQU’AU BOUT
Macky Sall a l’ambition de fouler au pieds tout ce sacrifice et ces années de lutte et nous ramener à l’époque d’avant les indépendances
Le Sénégal est à la croisée des chemins. Le peuple est appelé à choisir entre la résistance à la tyrannie du régime de Macky Sall par devoir de préserver les acquis démocratiques et de maintenir la paix et la stabilité sociale dans notre pays ou l’abdication par peur qui découle d’une forte campagne d’intimidation par le même régime.
Dans la grande échelle des valeurs, le courage est supérieur à la peur et la lâcheté ! La Liberté est supérieure à la servitude. La dignité est supérieure à l’avilissement et à l’abaissement. Macky Sall et son régime ont fait le choix historique, délibéré de transformer le Sénégal d’un régime démocratique garantissant liberté d’expression et de mouvement, paix et stabilité à un régime autoritaire, dictatorial qui agit brutalement contre son peuple pour éliminer toute velléités d’opposition à leurs ambitions.
Macky Sall a été élu avec 65% des suffrages (1) en 2012 sur la base d’un programme dont quelques-uns des points saillants ont été les suivants :
La réduction du mandat présidentiel de 7 à 5 ans y compris celui pour lequel il a été élu. En avril 2012, à peine élu, lors de sa première adresse à la nation, il déclarait : “Déjà, comme vous le savez, j’ai décidé de ramener à 5 ans le mandat de 7 ans pour lequel je suis élu sous l’emprise de l’actuelle Constitution”
La limitation du mandat présidentiel á deux termes consécutifs. Il réitéra sa volonté de la réduction immédiate de son mandat. Le citant, il disait à l’époque : “Il faut qu’on comprenne, en Afrique aussi,qu’on est capable de donner la leçon, et que le pouvoir ce n’est pasune fin en soi”. Dans la même lancée il disait: “je tiens également àce que les dispositions constitutionnelles limitant l’élection duprésident de la République à un mandat de 5 ans, renouvelable uneseule fois, soient verrouillées, sans possibilité de modifications.” (2) (3)
La réduction des prix des denrées de premières nécessité
La mise en place d’un programme massif de 500.000 emplois à terme de son premier mandat de 7ans (extrait de son programme de campagne Yoonu Yokkuté - Le Chemin du veritable Développement)
Le respect et la séparation des pouvoirs et le renforcement des institutions
Un gouvernement sobre et vertueux: réduire le train de vie de l’Etat, maintenir le nombre de ministres à 25 maximum, assainir le budget de l’Etat, éviter la gabégie, etc. (3)
Que sont devenues ses promesses 11 années plus tard et à la veille de ce qui doit être son dernier mandat?
Sa promesse de réduire le mandat de 7 ans pour lequel il a été élu á 5 ans n’a jamais été tenue
Sa promesse de limitation du mandat présidentiel à deux termes
consécutifs est complètement oubliée. Il est entrain de manigancer pour faire un troisième mandat
Sa promesse de gouvernement sobre et vertueux avec un nombre limité de ministres et d’agents du gouvernement s’est révélé être un mensonge. La nomination sans limite de ministres conseillers et de ministres d’Etat sans portefeuille s’est établie comme pratique normale et banale. C’est d’autant plus grave que ces ministres conseillers sans portefeuille ont quasiment les mêmes avantages et privilèges que les ministres “normaux” en plein exercice! Ceci pèse énormément sur le budget déjà colossal de l’Etat et contredit ses ambitions d’assainissement budgétaire
Sa promesse de réduire le prix des denrées de premières nécessitée ne s’est pas réalisée. Jamais n’ont été les prix aussi élevés. Le pouvoir d’achat des sénégalais est largement affaibli, installant une précarité insoutenable chez la majorité des citoyens ! Ceci entraine de facto l’insécurité et la promiscuité en tout genre
La création de 500.000 emplois n’a pas eu lieu comme promis. En lieu et place la jeunesse est en train de vivre son pire cauchemar. Au moment où j’écris cet article (05.06.2023) on en est à 16 morts et 500 arrestations selon les sources officielles (6). La plupart de ces victimes sont dits être des jeunes (voire des mineurs selon certaines sources). Leur seul crime est de vouloir exprimer leur déception et manifester leur désir de changement et leur aspiration à un Sénégal plus juste !
A défaut de tenir ses promesses électorales, Macky Sall a enclenché une campagne d’intimidation et de séquestration jamais connue dans notre pays.
Ses opposants politiques et les membres de la société civile qui osent élever la voix contre ses dérives sont immédiatement arrêtés ou assignés à résidence avec la complicité de la justice qui s’est totalement mise au service du régime en place. Les preuves sont multiples et visibles à tous les niveaux.
A cela s’ajoutent les détournements de deniers publiques, malversations et corruption en tout genre par les membre de son gouvernement et de son clan.
J’en cite seulement quelques exemples ci-dessous :
Mamour Diallo, nommé par décret en 2015 directeur national des impôts et domaines a été accusé en 2018 par l’ex-inspecteur de la même organisation Ousmane Sonko pour des faits supposés de "transactions immobilières et de détournement de deniers publics" (TF 1451/R) portant sur un montant de 94 783 159 000 F Cfa.
Une commission d’enquête parlementaire dont les membres sont tous des militants de l’APR avait alors “blanchi” Diallo. Pourtant l’Office National de Lutte contre la Fraude et la Corruption cite l’affaire dans son rapport 2018-2022 (4)
Greenpeace Afrique cite le rapport de l’OFNAC, par rapport à la délivrance par le ministère des pêches et de l’économie maritime d’une lettre de garantie dite « promesse de licence de pêche » à des navires en phase de naturalisation. Pourtant, cette pratique n’est prévue, ni par la loi 2015-18 du 30 juin 2015 portant Code de la pêche maritime Sénégalaise, ni par une disposition réglementaire habilitant l’autorité concernée à procéder de la sorte (4)
Le maire de Sindia Thierno Diagne a été épinglé pour un détournement
de fonds publics d’un montant de cinquante-quatre millions de francs CFA, dans l’affaire de lotissement Sindia-Ndombo pour la Coopérative d’habitats SONATEL. Ceci est également cité dans le même rapport de
l’OFNAC
Les détournements des fonds COVID estimés à plusieurs milliards est le dernier d’une série de détournements de deniers publiques et autres faits de corruption perpétrés par le régime de Macky Sall. Aucune action n’a été prise jusqu’à ce jour, malgré les promesses du procureur de la République Amady Diouf (7)
Il s’y ajoute la présence vérifiée et confirmée de milices armés à qui on semble avoir donné l’ordre de tirer sur les populations civiles qui sont en train de manifester leurs désaccords conformément à la loi ! Il y a en ce moment quelques vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux qui confirment ces allégations. Il semblerait que le régime se serait préparé à toute éventualité qui pourrait aller jusqu’à une situation de guerre civile. Nous prions Allah de nous en préserver !
Le Sénégal malgré sa pauvreté, s’est toujours illustré par la maturité politique de ses citoyens qui ont toujours veillé minutieusement à préserver sa stabilité sociale. Macky Sall apparement a l’ambition de fouler au pieds tout ce sacrifice et ces années de lutte et nous ramener à l’époque d’avant les indépendances.
Nous nous devons de lui résister jusqu’au bout car s’il réussit, il plongera le Sénégal dans une période sombre de terreur. Nous nous devons de lui résister jusqu’au bout car il y va de notre liberté, notre bien-être et de l’avenir de nos enfants et petits-enfants.
Un Etat dans un mauvais Etat. Ce n’est plus une colère contre un régime ni un soutien à Sonko. C’est bien du grand banditisme. On pille des magasins de petite et grande surface. Comme des « baaraa gnind », on porte fièrement des sacs de riz volés
Un Etat dans un mauvais Etat. Ce n’est plus une colère contre un régime ni un soutien à Sonko. C’est bien du grand banditisme. On pille des magasins de petite et grande surface. Comme des « baaraa gnind », on porte fièrement des sacs de riz volés. Et certains en rient. On ose même penser affronter les machettes du foirail pour avoir son mouton. Ce ne sont que des moutons de panurge ! La meute qui profite des émeutes. Ainsi va le Sénégal qui commence à recevoir des messages de la communauté internationale jusque-là « réservés » à certains pays. La risée…
Par Malick GAYE
LA PAIX, LE DIALOGUE, LA RECONCILIATION ET LA STABILITE SOCIALE RESTENT UN IMPERATIF POUR LE SENEGAL
La paix est le chemin de l’espérance face aux obstacles et aux épreuves, elle est aussi un bien précieux, un objet pour l’espérance auquel aspire toute l’humanité.
La paix est le chemin de l’espérance face aux obstacles et aux épreuves, elle est aussi un bien précieux, un objet pour l’espérance auquel aspire toute l’humanité. Espérer la paix est un comportement humain qui renferme une tension existentielle ; c’est pourquoi même un présent parfois pénible « peut être vécu et accepté s’il conduit vers un terme et si nous pouvons être sûrs de ce terme, si ce terme est si grand qu’il peut justifier les efforts du chemin ». De cette façon, l’espérance pour la paix est la vertu qui nous met en chemin, qui nous donne des ailes pour aller de l’avant, même quand les obstacles semblent insurmontables.
Notre communauté humaine porte dans sa mémoire et dans sa chair les signes des conflits qui se sont succédé avec une capacité destructrice croissante, et qui ne cessent de frapper spécialement les plus pauvres et les plus faibles. Aussi, des nations entières peinent à se libérer des chaînes de l’exploitation et de la corruption, lesquelles alimentent haines et violences. Aujourd’hui encore, autant d’hommes et de femmes, d’enfants et de personnes âgées, sont niées face à la dignité, à l’intégrité physique, à la liberté, y compris religieuse, à la solidarité communautaire et à l’espérance en l’avenir. De nombreuses victimes innocentes portent sur elles le supplice de l’humiliation et de l’exclusion, du deuil et de l’injustice, voire même les traumatismes de l’acharnement systématique contre leur peuple et leurs proches.
Les terribles épreuves des conflits civils et internationaux, aggravées souvent par des violences sans aucune pitié, marquent pour longtemps le corps et l’âme de l’humanité. Tout conflit ou difficultés sociales, en réalité, est un fratricide qui détruit le projet même de la fraternité inscrit dans la vocation de la famille humaine.
Les problèmes d’ordres politiques économiques ou sociales, nous le savons bien, commencent souvent par l’intolérance à l’égard de la différence de l’autre, qui renforce le désir de possession et la volonté de domination. Elle naît, dans le cœur de l’homme, de l’égoïsme et de l’orgueil, de la haine qui pousse à détruire, à enfermer l’autre dans une vision négative, à l’exclure et à le faire disparaître. Les conflits internes sur le plan politique, économique ou social se nourrissent de la perversion des relations, d’ambitions hégémoniques, d’abus de pouvoir, de la peur de l’autre et de la différence perçue comme un obstacle ou comme une privation de liberté indispensable pour certaines couches.
Il est paradoxal, que « notre monde vit la perverse dichotomie de vouloir défendre et garantir la stabilité et la paix sur la base d’une fausse sécurité soutenue par une mentalité de crainte et de méfiance qui finit par envenimer les relations entre les peuples et les populations et empêcher tout dialogue possible. La paix et la stabilité internationales sont incompatibles avec toute tentative de construction sur la peur de la destruction réciproque ou sur une menace d’anéantissement total ; elles ne sont possibles qu’à partir d’une éthique globale de solidarité et de coopération au service d’un avenir façonné par l’interdépendance et la coresponsabilité au sein de toute la famille humaine d’aujourd’hui et de demain ».
Toute situation de menace alimente le manque de confiance et le repli sur soi. Le manque de confiance et la peur renforcent la fragilité des rapports et le risque de violence, dans un cercle vicieux qui ne conduira jamais à une relation de paix. En ce sens, la dissuasion reste une sécurité illusoire.
Dans un contexte de manifestation débordante pour notre pays le Sénégal, de troubles dans plusieurs sens sur le plan sécuritaire, avec des gaspillages et des pillages de biens appartenant à autrui, d’affrontement entre les forces de défenses et de sécurités et les manifestants, nous montre que notre responsabilité citoyenne nous interpelle à suggérer un trait d’union qui va incarner les possibilités de dialogues et de réconciliations entre le pouvoir et l’opposition mais aussi entre le pouvoir et une frange de la population surtout sa jeunesse pour un avenir meilleur car le Sénégal est et doit toujours rester un modèle de démocratie pour l’Afrique de l’ouest et pour le monde entier.
Il est tant que des personnes dignes de ce nom très crédibles et porteur de voix se lèvent portant et constituant un seul groupe, fort et unis, très objectif composées de toutes les couches sociales, civils, citoyennes, religieuses, culturelles, et professionnelles pour mener cette médiation entre les concernés et trouver une solution avec les acteurs en conflit pour sauver notre pays car il est temps de passer à la vitesse supérieure pour l’émergence de notre pays.
La responsabilité de tous étant interpellée, il est tant de s’unir pour la même cause car ayant un dénominateur commun qui est la victoire de notre chère pays le Sénégal.
La paix et la dignité naissent à l’instant où l’ambition et l’arrogance sont fossoyeurs, il y a des menaces de paix faisons le nécessaire pour l’éradiquer.
PAR AMADOU LAMINE SALL
NON MON PAYS N’EST PAS UN PAYS MORT !
Dans ce pays « chacun ici est un héros avant de naître » Tant qu’il y a le ciel il y a toujours l’espoir qu’un oiseau y passe….
Dans ce pays « chacun ici est un héros avant de naître »
Tant qu’il y a le ciel
il y a toujours l’espoir qu’un oiseau y passe….
C’est ce matin que je l’ai appris depuis Rabat la ville printanière…
Rabat est ensoleillé Dakar en deuil
et mon cœur est en larmes comme un glauque ciel d’hivernage…
Pourtant mon pays n’est pas un baobab nocturne
une herbe noire une fleur froide
un fruit anémique une terre agenouillée
Mon pays n’est pas une route coupée
une chaussée pourrie au ciel boueux
Mon pays n’est pas dans l’urgence des vautours
il est dans la foulée des tigres et le lion a encore la mâchoire qui brûle
et le ventre en flammes
Mon pays n’est pas un pays mort
mais elle est pourtant morte la mémoire jadis souriante
mort le sang dans la case des hommes venimeux
et le rêve de ceux qui ont cru dompter l’alphabet court nu dans les rues
et les enfants ne jettent même plus des pierres à ce lambeau de rêve…
Mon pays n’est mort que dans la hâte de ceux qui marchent avides
sur les chemins de mirages les yeux embués et l’horizon cupide…
Mon pays n’est mort que chez les fils de l’impatience
les fils malicieux de la politique
les sidéens du pouvoir dans
la malaria et le paludisme des urnes les fils arqués et maudits de la politique fétide
les bergers à venir mais si fatigués déjà comme
de vielles peugeot des années de jazz
Mon pays n’est mort que dans les rois asséchés et
les princes des oracles qui mûrissent le trône avant le maïs et l’arachide
les terrasses d’or avant la paille de chaume des toits du Sine des baraques et taudis des banlieux
la chaise de satin avant le tabouret de termitière…
Mon pays n’est mort que dans les fils surdoués des feux de
brousse qui dévorent jusqu’aux refuges des lépreux aux portails fastes
des banques…
Ce pays mon pays n’est mort que chez les morts d’avant les lampes
car elles arrivent elles arrivent les grandes lampes
arrivent les fauteuils de soie les canapés de laine dans les taudis de Pikine Guédiawaye Ganaw-Rail
arrivent les rideaux rouges et pourpres
arrivent les bronzes rares les toiles des enfants d’Oussouye
les livres des enfants du Fouta
arrivent les sourates les chants grégoriens les libations de Tivaoune Touba Yoff-Layène Médina-Baye Ndiassane…
arrivent les femmes les hommes d’un siècle nouveau
d’un temps d’espérance…
Mon pays n’est pas un pays mort
malgré les fourmis et les fatigues les cafards les sommeils lents les réveils taraudés
les souliers usés
les chaussettes frelatées soumises aux faims des rats les orteils au vent…
Mon pays n’est pas mort malgré les
journaux aux manchettes de fin du monde…
Mon pays n’est pas un pays mort
malgré les cuisines vides dans la solitude d’un oignon
d’une pomme de terre verdâtre comme d’un méchant quolibet…
Mon pays n’est pas un pays mort
une cargaison puante…
Mon pays est une marée haute d’épices et d’encens
il vit ce pays se tourne et se retourne et danse et pleure et chante
dans l’angoisse pourtant infinie que dorlote une foi infinie
que consolent une cloche un minaret le regard velouté d’une maman infinie…
Mon pays n’est pas un pays défunt
il ne porte comme la vie que les pas lourds d’un soldat endeuillé
d’un policier blessé
d’un enfant amputé
Mon pays comme la vie ne porte que
le sourire au gingembre
d’une femme que la beauté honore…
Il est bien debout mon pays grave beau et fort…
Mais il est vrai que les fleurs quoique belles meurent toujours un soir
ou est-ce un matin je ne sais plus…
mais reste toujours le parfum qu’elles ont laissé et puisse ce parfum habiter
la nostalgie des cœurs
irriguer le vertige
être le remontoir de nos vies
nourrir l’avenir sinon…
sinon elles seront vraiment mortes
pour toujours les fleurs que
l’on croyait immortelles
mortes pour rien
mort aussi le triomphe du jour de gloire et l’oubli monstrueux alors se lève tragique comme une tendresse décapitée
une malédiction brutale dressée comme une lance…
Mon pays n’est pas un pays mort
mon pays n’est pas un murmure
son peuple au front d’étoiles et à la bouche de sel
est un océan qui ne s’annonce plus
une mer haute féconde navigable
pour toutes les fraternités du monde…
Pourtant des enfants sont tombés sous des balles aux yeux clairs sans lunette des officiers sont tombés surpris par des balles traîtresses
c’etait en mai
c’était en juin
il faut vite en oublier l’année maudite…
Des femmes et des hommes sont rentrés à la maison et ont mis leur mémoire dans des tiroirs qu’ils n’ouvriront plus jamais…
Je voulais crier
mais ne pouvais pas crier…
je cherchais la Vérité parmi mille vérités et ne pouvais la trouver…
l’odeur de la bête pourrie était tenace
le vent de son chemin sûr
la boussole facile
mais pas une trace de la bête…
je cherchais où ranger ma colère
mais je n’avais plus en moi d’armoires vides…
J’ai prié alors Dieu de me parler pour trouver la juste voie entre le prince haletant le peuple en colère et les autres tous les autres ivres du trône infect…
Dieu m’a répondu qu’Il n’avait pas le temps qu’IL était en Ukraine
qu’IL ne trouvait pas d’hôtel
que la nuit tombait que des villes brûlaient qu’il était déjà minuit…
Je voulais crier
mais un poète ne crie pas il chante il chante… mais comment chanter la mort le sang…
Mon pays n’a pas autant pleuré depuis Jésus depuis Mohamed…
Je voulais crier
la démocratie me faisait signe d’une main amputée des quatre doigts
derrière une porte défoncée et des murs brûlés
elle avait les fesses dénudées le corps tremblant le visage démaquillé
mais les seins debout et ardents
chauds comme un bon pain un matin de froid glacial…
Elle me demandait un vêtement pour se couvrir
elle avait les pieds nus et gercés
elle m’empruntait des chaussures et moi il y a bien longtemps que
je ne portais même plus de chaussures
c’est la faim qui me préoccupait
le courage des ouvriers le cri des paysans et mon beau pays qui brûlait…
Des amis me suppliaient de dire à la démocratie
derrière cette porte défoncée que je ne pouvais rien pour elle
qu’il fallait plutôt attendre les juges
et les juges repassaient leur toges avec des feuilles d’or
et les rayons des lambris de leur palais leur servaient de fer à repasser…
Je voulais crier
mais je ne pouvais pas crier
alors pour crier j’ai fait ma valise
j’y ai rangé précieusement avec un gros rat noir et affamé
le livre de la Constitution
la liste des juges
la photo du bâtiment de la Cour Constitutionnelle
la photo du palais présidentiel et celle de l’Assemblée Nationale…
Quand j’arriverai je lirai ce qu’il en reste de la Constitution
de la liste des juges
de la photo du bâtiment de la Cour
du Palais
de l’Assemblée
peut-être alors je pourrais secourir la démocratie
cette femme nue
appelant au secours
derrière la porte défoncée aux murs soudain pailleté de pourpre…
Pourtant
puisse la pirogue rester la pirogue
le fleuve le fleuve
puisse le phare fidéliser le sommet des Mamelles
que la patrie dise la patrie le khalam le khalam
puisse ce peuple à tête de sourates et de psaumes ce peuple de foi glaneur de paix
renaître en fleurs
puisse-t’il ne pas fêler nos rêves
raréfier le pain le sel
retarder les aurores
Pour un jour
le Sénégal peut avoir peur
pour un jour
le Sénégal peut avoir honte
mais jamais ce pays ne périra
tant qu’il restera
quelque part un
bout de ciel
un lambeau de minaret le mirage d’une croix…
Et je suis parti
habiter le pays de la prière et du silence
ce pays des prophètes que j’aime…
Là-bas m’a-t-on dit il n’existe point de drapeaux rouges ni de chars ni de fusils ni de prisons rien que des jardins de Dieu…
Là-bas je pourrais crier sans que personne ne me fasse taire
brûler ma modeste
chaumière
faire mal à mes enfants chéris
couper le signal des libertés faire croire que la mort est un « ours qui danse »avec une jeunesse éméchée…
Pourtant
malgré les mots les cris les peurs la mort la douleur l’interrogation chacun sait ici pour quoi nous serons toujours vivants et
le Sénégal toujours vainqueur…
Demain
bien vite
reviendra le Soleil
il reviendra pour
avoir signé un
pacte sacré avec les ancêtres
pour que jamais le cercle de feu ne cerne la montagne