L'unique film africain en compétition à la Berlinale, "Félicité", portrait d'une chanteuse de bar à Kinshasa se battant pour son fils, a remporté samedi le Grand prix du Jury.
"C'est un film sur nous, le peuple, nous sommes beaux, nous pouvons aimer ce que nous sommes", a lancé lors de la remise du prix son réalisateur, le franco-sénégalais Alain Gomis, déjà venu à Berlin en 2012 avec le remarqué "Tey" ("Aujourd'hui).
Dans "Félicité", son quatrième film, il brosse le portrait d'une mère courage, qui après son boulot de chanteuse dans un bar tente le tout pour le tout pour amasser la somme nécessaire à l'opération de son fils victime d'un accident.
"Félicité" a été tourné dans la capitale congolaise et suit le quotidien de ses habitants, des hôpitaux aux marchés de Kinshasa, mais se refuse à toute dimension sociologique ou documentaire, malgré le contexte politique tendu en République démocratique du Congo (RDC).
"C'était difficile de faire ce film. Ca a été une année difficile en RDC", a souligné le réalisateur, évoquant notamment les élections.
Le report de l'élection présidentielle, en raison du maintien au pouvoir du président Joseph Kabila malgré l'expiration de son mandat a enflammé le pays et donné lieu à de très violents affrontements.
"J'ai l'impression que le moment est important" pour le cinéma africain, avait souligné Alain Gomis lors de la présentation de son film à la Berlinale.
Le film produit en partie par la France et le Sénégal sera aussi en compétition au Fespaco, le festival panafricain du cinéma qui se tient fin février à Ouagadougou
"Je vois arriver une génération de réalisateurs qui n'a jamais été au cinéma car il n'y a plus de cinémas" sur le continent africain, a-t-il déploré.
Samedi soir, remportant avec lui, le grand prix du Jury, l'Ours d'argent, le cinéaste a notamment plaidé pour un financement plus généreux du cinéma des pays africains
Angleterre: Ibrahimovic se compare à Indiana Jones, toujours un trophée en mains
Zlatan Ibrahimovic, auteur d'un triplé jeudi soir pour Manchester United face à Saint-Etienne (3-0), s'est amusé vendredi à se comparer à l'aventurier incarné par Harrison Ford, Indiana Jones, "qui ramène toujours un trophée".
"Chaque trophée pour moi est incroyable. Partout où je suis allé, j'ai gagné, donc si je peux gagner quelque chose ici (à Manchester, ndlr), j'en serais très content", a déclaré "Ibra", unique buteur lors de la victoire des siens en 16e de finale aller de l'Europa League.
"Les personnes qui me connaissent savent que j'ai joué dans plusieurs clubs, et que je fais toujours de mon mieux. Partout où je vais, je gagne, donc je suis comme Indiana Jones", a ajouté celui qui a déjà les titres en championnat des Pays-Bas, d'Italie, d'Espagne et de France gravés à son palmarès.
Avec ce triplé, le Suédois, âgé de 35 ans, en est à 23 buts toutes compétitions confondues depuis son arrivée à Manchester United, lors de la dernière pré-saison.
Un compteur que la star des Red Devils devrait rapidement faire évoluer puisque MU est le favori de la finale de la Coupe de la Ligue anglaise, le 26 février contre Southampton à Wembley.
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Allemagne: Le club de Darmstadt invite Obama à un de ses matches
Barack Obama, notoirement fan de basket-ball, a été invité mercredi par le club de Darmstadt, qui évolue en Bundesliga (1re div. allemande), à l'un de ses matches à domicile, après avoir découvert que l'ancien président des Etats-Unis suivait le club sur les réseaux sociaux.
"Cher @BarackObama, vu qu'apparemment nous sommes le seul club européen de football que vous suivez sur Twitter, on se voit à notre stade ?", écrit le club sur son compte Twitter, suivi d'un smiley en forme de clin d’œil.
C'est une petite radio locale qui a annoncé que les +Lilies+ étaient le seul club de football des cinq grands championnats européens suivi sur Twitter par l'homme aux 85 millions d'abonnés.
Dans un message vidéo filmé dans le stade du club, figurant dans le tweet invitant l'ancien président des Etats-Unis, le footballeur international américain Terrence Boyd, buteur samedi lors de la victoire contre Dortmund (2-1), déclare que c'est "évidemment un grand honneur".
"Maintenant que vous avez un peu plus de temps, nous voudrions vous inviter à un match au stade Boellenfalltor, ajoute Boyd. Nous avons un maillot tout prêt pour vous", joignant le geste à la parole, en montrant une tunique floquée du 98 et au nom d'Obama.
Darmstadt, actuellement dernier de Bundesliga, compte près de 62.000 abonnés sur Twitter.
Espagne: Maradona se dispute avec sa compagne à l'hôtel, la police se déplace
Lendemain de Saint-Valentin un peu animé pour Diego Maradona: la police s'est rendue mercredi matin dans l'hôtel où réside la star argentine à Madrid après une dispute avec sa compagne, une "discussion" sans conséquence, a-t-on appris de sources policières.
"Quand les agents et les secours sont arrivés, ils ne présentaient pas de blessures et n'ont pas voulu porter plainte, c'était juste une discussion", ont précisé des sources policières à l'AFP.
Cette "discussion" quelque peu animée avec sa petite amie vers 8h30 mercredi matin a toutefois inquiété le personnel de l'hôtel, qui a tout de même décidé d'appeler la police.
Diego Maradona se trouve à Madrid pour assister au match mercredi soir entre le Real et Naples en 8e de finale de Ligue des champions.
JE SUIS FASCINÉ PAR LE PARCOURS D'OUSMANE SEMBÈNE
Mboumba Franck allias Kemit, slameur et poète gabonais
Aïssatou Ly & Fatoumata Hanne Dia |
Publication 15/02/2017
Du slam à la poésie et de la poésie au slam on dit qu'il n y a qu'un pas. Le slameur Kemit a franchi ce pas en sortant ce 4 février 2017 son premier recueil de poèmes intitulé "Damné en années". Paru aux éditions Kusoma, ce recueil porte dans ces 124 pages les aspirations ; les rêves, requêtes et désillusion d'un artiste qui vibre aux sons et préoccupations de son pays. Que dis-je ? de son continent ! Panafricaniste affirmé, passionné de culture et d'histoire, Mboumba Franck allias Kemit le slameur sculpte les mots, les maux d'une Afrique. De ses rêves les plus fous d'une valorisation de la culture noire à ses envies les plus pressantes d'une Afrique libérée de tout mal, ce fils du Gabon qui vit depuis bientôt 5 ans au Sénégal se libère. Du haut de ses 2,02 mètres, une seule remarque est valable : il voit loin, très, très loin.
Pourquoi avez-vous sorti un recueil de poèmes, alors que Kemit est connu comme slameur et non poète ?
J‘ai publié le 4 février dernier ma première œuvre littéraire, un recueil de poèmes. Il vient après la sortie de mon premier album slam le 22 juillet dernier. Un album qui s'intitule "Bilime" qui signifie les années dans ma langue natale (le Punu : une langue parlée dans le sud-ouest du Gabon, dans le village de Ndéndé). Ce recueil de poèmes est en quelque sorte une continuité du disque que j'ai sorti (un Ep de 5 ou 6 titres) et qui s'intitulait également "Années" (Bilime). Mais cette fois-ci j'ai voulu varier en mettant comme titre : "Damné en année"
Pourquoi "Damné en années" ? Vous considérez-vous comme un damné ?
Le titre "Damné en années" m'a été inspiré d'une œuvre que j'ai lue il y a quelques années. Une œuvre de Frantz Fanon (Ndlr : Les damnés de la terre). C‘est une œuvre que j'ai parcourue et qui m'a pleinement inspiré. Donc quand j'ai décidé d'écrire le livre j'ai beaucoup hésité sur le titre. Au début, j'avais mis "d'années en années" mais j'ai trouvé que c'était trop terre à terre. Etant un poète, je me suis dit qu'il fallait en trouver un d'assez original. Quelque chose qui me plaise d'abord et plaise au reste du monde. J‘ai donc choisi "Damné en années", parce que j'estime que je suis condamné à écrire. Il y a beaucoup de choses qui ne me plaisent pas et que j'aimerai changer. J‘écris pour dénoncer. C'est une condamnation que je m'inflige, une tâche que je m'assigne. Parce que quand j'écris je me sens plus libre. C‘est mon havre de paix.
Vous dites qu'il y a beaucoup de choses qui ne vous plaisent pas. "Damné en années" est-il donc un recueil de revendications ?
Lorsque j'ai commencé, j'écrivais plus sur des thèmes revendicatifs. Mais avec la maturité, je me suis ouvert à d'autres thèmes, d'autres réalités. Dans ce recueil, il y a un texte titré : "Les couleurs de l'espoir" et qui figure également dans mon disque Bilime, comme il y a des textes qui parlent des endroits où j'ai grandi, d'autres de la nature. Il y a des thèmes variés. Je parle de pêche, de la nature, de l'environnement etc. Toute thématique en rapport à la société moderne m'intéresse.
Quelles sont les revendications que vous portez ?
J'écris par exemple sur les indépendances et me questionne. Fête-t-on les indépendances chaque année pour le simple plaisir de faire la fête ou doit-il y avoir un réel désir d'indépendance? Sommes-nous vraiment indépendants ? Dans "Damnée en années", je revendique plein de choses. C‘est se mentir à soi-même que de croire qu'on fête réellement les indépendances. Il faut réfléchir, se remettre en question et remettre en question les choses que nous tous avons trouvées. Moi, j‘ai arrêté de fêter les indépendances ; cela fait 3 ans.
Qu'est-ce qui vous gêne dans la célébration des indépendances ?
Nous ne sommes pas indépendants. C‘est quoi être indépendant ? Les États-Unis par exemple, la France peuvent s'estimer indépendants. Mais nous, on croit être indépendants alors qu'on n'arrive même pas à élire nos propres dirigeants. Tout le monde sait, il y a des élections partout en Afrique mais elles ne servent à rien. Tenez, au Congo par exemple, vous pensez que Denis Sassou Nguesso, vous croyez vraiment qu'il a été élu démocratiquement ? Vous croyez que Ali Bongo qui a fait 42 ans au pouvoir, c'est la population qui a voté pour qu'il reste toujours au pouvoir ? Je ne le crois pas. On nous fait croire des choses fausses et on nous les impose comme étant des choses vraies et nous on ne remet rien en cause.
Si on veut que la société change, il ne faut pas juste se dire qu'elle va changer. Si on ne fait rien, rien ne changera, c'est aussi simple que ça.
Parlons slam à présent. Vous disiez avoir sorti un disque en juillet 2016, après 16 ans de pratique, d'abord dans votre pays le Gabon et ensuite ici au Sénégal. Depuis 5 ans que vous êtes au Sénégal, avez-vous eu à fréquenter d'autres groupes de slam ou vous avez toujours évolué en solo ?
A mon arrivée, j'étais dans le collectif "Vendredi slam". J'ai cheminé avec eux pendant des années et nous avons participé à différentes manifestations culturelles dont le festival de jazz de Saint louis. Mais j'ai quitté le navire parce qu'il fallait que j'apprenne à nager tout seul. C'est en quittant le navire que j'ai sorti mon propre disque Bilime.
Vous passez du slam à la poésie. Est-ce pour vous une façon de montrer qu'il n'y a pas de frontière entre le slam et la poésie ?
Le slam est une autre forme de poésie où les gens s'expriment librement, sans instrument de musique, sans enivrement. Le père du slam, Marc Smith, est un Américain. S'il a créé le slam, c'était pour se départir de toutes ces règles dans la poésie et de proposer une nouvelle forme d'expression artistique aux jeunes. Puis ça a grandi pour atteindre d'autres contrées, l'Allemagne, la France, l'Afrique. Nous, on essaie de faire grandir la chose ici. Oui, je sors un recueil de poèmes mais ce n'est pas un recueil de poésies classiques. Cela n'a rien à voir.
"On croit être indépendant alors qu'on n'arrive pas à élire nos dirigeants"
Vous ne faites pas donc partie du cercle de ces poètes hermétiques ?
Je vous confie une chose qui peut vous paraitre paradoxale : Je n'ai jamais aimé la poésie classique. D'ailleurs, Baudelaire m'a cassé la tête. Il disait des choses que je ne comprenais pas. Cette poésie je la trouve trop éloignée de moi. On ne peut pas lire un vers en regardant tout le temps un dictionnaire. Si on écrit un livre et tout est compliqué où même pour lire le titre il faut consulter une encyclopédie, on risque de perdre nos lecteurs qui s'éloigneront. Je ne suis pas du rang de ces poètes qui écrivent des choses inaccessibles. Mon recueil est accessible à plusieurs catégories de personnes. Je reconnais qu'il y a des textes qui sont très techniques, qui demandent un certain niveau de culture générale et de connaissances mais ce n'est pas l'ensemble de l'œuvre qui est comme cela.
Kemit semble être quelqu'un de très collé aux us et coutumes de l'Afrique ?
Dans "Damné en années", je me suis amusé à mettre certaines parties dans des langues de chez moi. C'est le cas du texte Ogooué, (Ndlr : nom d'un long fleuve qui parcourt la majeure partie de mon pays le Gabon). Dans ce texte, j'introduis un mot, kombé, qui signifie soleil dans un des dialectes du Gabon. Tout cela pour inciter le lecteur à faire une recherche et à apprendre et avoir ne serait-ce qu'une petite idée des dialectes africains.
Dans un autre texte où je parle de mon village, Ndéndé, et d'une une rivière qui s'y trouve, la Dola. Dans ce texte, on retrouve plusieurs éléments de notre patrimoine comme Mami Wata. Tout comme en Occident, on parle de "La belle au bois dormant", j'estime qu'ici en Afrique nous avons nos propres valeurs. Et nous devons les mettre en avant.
Ce que je revendique c'est la valorisation de nos coutumes, nos langues et je suis contre le fait qu'on abandonne nos cultures, nos traditions, notre héritage culturel. Des gens se sont battus pendant plusieurs années pour qu'on puisse maintenir quelque chose qu'ils ont voulu nous transmettre et nous aujourd'hui on ne mesure même pas la valeur qu'on nous a léguée. On a des traditions, des coutumes, restons dans notre culture et évitons de prendre des choses qui nous viennent d'ailleurs.
Vous parlez de gens qui se sont battus pour le maintien de cet héritage culturel africain. Votre nom d'artiste Kemit s'apparente à Kemit, l'homme noir de l'Egypte antique. Des penseurs comme Cheikh Anta Diop vous inspirent-ils dans votre poésie et votre slam ?
Cheikh Anta Diop, oui parce que son œuvre Nations nègres et culture, m'a ouvert les yeux sur plusieurs choses. C'est une œuvre qui m'a poussé à réfléchir, à chercher et je pense ne l'avoir pas comprise jusqu'au bout. Il y a en outre des personnages que j'ai découverts un peu plus comme Ousmane Sembène. Je suis fasciné par le parcours de cet écrivain-cinéaste. C'est quelqu'un qui a giflé son maître et qui est sorti de la classe. Pour tant, il a été l'un des meilleurs cinéastes du continent. C'est quand même fou ! Il faut oser ! C'est ce parcours de vie qui m'impressionne.
En dehors de Sembène, il y a tous ces leaders : Lumumba, Sankara, Marcus Gavey, Nkrumah, Aimé Césaire... Mon slam, ma poésie, c'est un peu la continuité de toutes les histoires que j'ai lues. J'essaie de suivre les pas de ces géants, même si eux sont allés jusqu'à donner leur vie pour ça.
Sur la chemise que vous portez, il est inscrit : Yitou. Est-ce votre marque ?
Oui, je suis, en dehors du slam et de la poésie, un entrepreneur. Je commercialise la marque de vêtements Yitou. Yitou, ce n'est pas un mot français, ni anglais, mais un mot issu de ma langue et qui signifie espoir. J'essaie de valoriser, à travers cette marque, le travail des artisans africains. Dans Yitou, vous verrez aussi bien du bogolan, du pagne tissé que d'autres tissus qui ont une grande valeur dans nos traditions africaines.
Quels sont vos projets et objectifs ?
Mes projets du moment, c'est de sortir le recueil "Damné en années", en version papier pour le moment, c'est juste en version numérique de le rendre accessible à tous, de le présenter dans les écoles, d'en parler à mes jeunes frères pour qu'ils puissent avoir, ne serait-ce qu'une partie de notre patrimoine à tous. Parce que je pense que ce que j'ai appris à l'école primaire, c'est ce qu'on continue à enseigner aux enfants. Même à l'université, les textes de droit qu'on nous faisait étudier, les Codes civils gabonais et sénégalais sont justes les copies du Code civil français. Nos intellectuels n'ont fait que remplacer certains mots par des synonymes.
Mes objectifs, c'est d'essayer de faire en sorte pour qu'on s'aime nous-mêmes et qu'on apprenne davantage de nous-mêmes. Plus tard, j'aimerais sortir un disque où il y aura tout ce patrimoine culturel africain réuni. Les influences de partout : pas que du Gabon d'où je suis originaire, du Sénégal où je vis depuis longtemps, du Rwanda, un pays que je porte dans mon cœur.
LE BÉNIN AU CŒUR
PROFIL – Alexandrine Avognon, promotrice de spectacles
Entretiens avec les journaux, émissions radios et télévisions… Depuis une semaine, on ne parle que de «L’Afrique en danse». Tous les médias sénégalais sont subjugués par sa philosophie et surtout le projet à la fois culturel et panafricaniste qu’elle porte. Elle incarne surtout le nouveau visage de la culture et du tourisme sous l’ère de la rupture au Bénin. La Directrice de Arise groupe, Alexandrine Avognon est à Dakar depuis quelques semaines pour lancer son concept «Ma Culture mon futur». Un ensemble de programmes divers qui s’appuie sur les ambassades et consulats à l’étranger pour vendre la destination Bénin, avec l’appui de la diaspora.
Dimanche prochain, le Théâtre national Daniel Sorano va vibrer aux rythmes des folklores béninois. Le tout, sous les tam-tams du célèbre percussionniste sénégalais Mbaye Dièye Faye et le Sing sing rythme. La veille déjà, c’est à dire le samedi 18 février, les Dakarois et les Béninois de la diaspora, pourront suivre au Centre aéré de la Bceao la première édition de Miss Bénin Diaspora au pays de la teranga. «Ce sera un évènement haut en couleur. Car nous avons fait déplacer ici au Sénégal, plus d’une cinquantaine de personnes, afin d’étaler véritablement la richesse de la culture béninoise», a expliqué Alexandrine Avognon.
Elle explique : «C’est un programme itinérant, nous voulons amener tous les Africains à se battre ensemble pour pouvoir faire quelque chose de nouveau, de gratuit. La culture ça ne se vend pas, on l’a en nous, on la porte». Cette jeune dame qui a pour ambition de faire du Bénin la première destination touristique d’Afrique, trouve incontournable la destination Sénégal, pour atteindre ses objectifs. «Nous avons choisi le Sénégal, parce que d’abord c’est une terre de teranga. On y était en décembre dernier et ça s’est merveilleusement bien passé. Après ça on s’est dit, ici c’est un grand carrefour où toutes les nationalités presque se brassent. Donc la première édition, on la fait au Sénégal, puis après ce sera le Bénin au Gabon», détaille-t-elle.
Arise Groupe dont elle est la directrice, a la particularité de ne pas attendre forcément des appuis pour réaliser ses activités. «Nous avons tout ce qu’il faut pour y arriver», convainc Alexandrine Avognon. Toutefois, l’initiatrice du projet «L’Afrique en danse» dit vouloir compter sur l’implication des ambassades du Bénin à l’étranger. «Elles devraient être les premiers vecteurs de la promotion de la destination Bénin. On doit sentir la culture béninoise dans nos ambassades», mentionne-t-elle, tout en soulignant l’importance d’engager une réflexion profonde sur les voies et moyens pour sortir la culture béninoise de sa léthargie.
«La promotion de la culture béninoise doit se traduire par le consommons local», croit d’ailleurs savoir Alexandrine Avognon qui annonce déjà qu’après le Sénégal et le Gabon, d’autres pays comme le Cameroun, l’Afrique du Sud et «sept autres pays avec qui, on a presque les mêmes cultures, y compris l’Afrique du Nord» accueilleront son projet L’Afrique en danse L’itinéraire d’une panafricaniste Avec son concept plus global «Ma culture mon futur», Alexandrine Avognon se positionne comme une ambassadrice de la culture béninoise. Pour cela elle veut faire voyager le plus possible à travers le monde les groupes de folklore qui l’accompagnent dans sa mission.
Pour elle, le panafricanisme, il faut d’abord la vivre et en faire par la suite un rêve continental. «Le panafricanisme dont on nous parle tout le temps, c’est à mon avis l’apport de tout un chacun de nous, l’apport d’une manière spontanée, d’une adhésion volontaire de chacun de nous dans son domaine de prédilection … », confie-t-elle, précisant que «si chaque Africain, à travers ce qu’il peut faire de mieux, ce qu’il peut apporter, ajoute ainsi sa pierre à l’édifice. Et c’est ainsi que ce rêve d’union continentale sera une réalité».
« Nous, (Ndlr, les Béninois) ce qu’on a de plus cher, ce qu’on peut faire, ce qu’on porte de plus, c’est notre culture. Et on a décidé de faire fédérer toute l’Afrique autour de notre culture, autour de nos traditions. Avec nos frères des autres patries, nous allons porter très haut ce flambeau-là», ajoute avec espoir Mme Avognon, qui, il y a quelques années encore, était pourtant, presque inconnue dans le milieu de la culture et du tourisme béninois. En réalité, rien ne prédestinait Alexandrine Avognon à sa nouvelle passion.
Aujourd’hui, elle est pourtant devenue le visage de la culture et du tourisme béninois grâce à sa ténacité et sa ferme volonté d’apporter sa pierre à la construction de la maison Bénin, par le canal de la culture. Avec sa formation de gestionnaire de projet, elle a longtemps travaillé dans le développement rural avant de se reconvertir. «Il faut savoir être polyvalent, avoir l’esprit ouvert, avoir des visions très grandes. C’est ce que j’ai essayé d’avoir très jeune. Et toute suite après, j’ai été portée vers un projet hôtel express international… J’ai atterri dans une entreprise où il y avait ce projet-là, c’était une entreprise de mon cousin. Je l’avais aidé par rapport au projet hôtel express international où il fallait faire la promotion des hôtels et cette promotion permettait à des hôtels d’être remplis sur toute la ligne… », renseigne-t-elle, lorsqu’on cherche à découvrir son itinéraire.
Très rapidement, Mme Avognon a gravi des échelons au sein de cette structure. Du poste d’assistante, elle a été nommée administratrice déléguée d’hôtel express à l’international. Valoriser la culture, privilégier le partage Entre-temps, elle a été contactée par d’autres agences de voyages où elle a servi avant de se lancer pour son propre compte avec Arise Groupe. « La culture et le tourisme, ce sont des choses que j’avais en moi. Autant, je peux me donner à la culture, autant je peux faire autre chose. Je pense qu’il faut être polyvalent mais l’essentiel c’est d’aimer ce qu’on fait et qu’on le fasse avec le cœur. Je pense que c’est ce que je fais», souligne-t-elle, avouant que sa seule motivation, c’est l’amour qu’elle a pour la culture de son pays.
«Ce qui nous motive pour ces projets, c’est que nous aimons ce que nous faisons. On l’adore, on adore notre culture, on adore notre tradition, on adore notre patrie et on n’a pas de frontière. Un homme de culture n’a pas de frontière et les moyens de communication avec nos frères, c’est la culture», assure encore Mme Avognon. Pour elle en effet, «l’Afrique, est une, il n’y a pas de frontière, on ne dissocie pas l’Afrique du Nord, l’Afrique du Sud, de l’Est et de l’Ouest». «On a voyagé à travers le monde et on a vu un peu comment les gens, les Occidentaux apprécient notre culture. Ils voient toutes les valeurs cachées que nous, on est en train d’abandonner. On est en train de copier aveuglément les Occidentaux. Alors que eux, ils nous vénèrent», relève-t-elle.
Non sans partager l’admiration que les gens montrent en découvrant la tradition béninoise, de Strasbourg, à Durban, en passant par Paris et aux Etats Unis. Avec le Sénégal, Arise groupe qui a déjà représenté le Bénin à plusieurs salons et scènes culturels et touristiques notamment Top Résa à Paris, Solidarissimo à Colmar, Fitur à Madrid et Indaba en Afrique du Sud, compte réaliser d’autres grands projets culturels dans les mois et années à venir. Sa directrice ne cache pas son enthousiasme et sa détermination. Rappelant qu’aux côtés de groupes sénégalais, ils ont eu à faire des percussions ensemble, au point d’impressionner des citoyens du monde venus participer à diverses rencontres, elle dit vouloir valoriser «cette convergence-là, cette complicité-là, et se fédérer pour montrer que l’Afrique est unie». «Avec nos traditions, on peut se mettre ensemble et sortir des choses extraordinaires», se persuade Mme Avognon, invitant tout le public sénégalais à ne rater sous aucun prétexte le rendez-vous de dimanche prochain au Théâtre national Daniel Sorano.
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LE PALMARÈS DES GRAMMYS
Prestation remarquée de Beyoncé qui expose son corps enceinte de jumeaux
Le travail de Beyoncé a été salué par deux récompenses : l'impressionnant "Formation" a reçu la distinction du meilleur clip vidéo, tandis que son album "Lemonade" a reçu celle de Meilleur album de musiques urbaines. L'autre grand vainqueur de la soirée s'appelle toutefois David Bowie, salué à plusieurs reprises à titre posthume. Le chanteur, mort tout début 2016, a vu son album "Blackstar" salué à trois reprises : meilleure chanson rock ("Blackstar"), meilleure performance rock et meilleur album alternatif.
Un mois après sa disparition, l’album posthume du défunt artiste Ablaye Mbaye a été présenté hier au public. Baptisé Intérêt général, il est composé de 9 titres, dont des morceaux coproduits avec l’artiste Baba Amdy. Les fonds récoltés à partir de la vente de cet opus, un mélange de mbalax, d’acoustique et un peu de traditionnel seront remis à sa famille. Intérêt général sera en vente dès ce lundi.
Il avait choisi la date du 4 février pour lancer son album. Dieu en a décidé autrement. Heureusement que comme le stipule l’adage, «un artiste ne meurt jamais tant que son œuvre est sur terre». Hier, l’album posthume du regretté Ablaye Mbaye, a été présenté dans une ambiance triste, en présence de ses parents, amis et sympathisants. Baptisé Intérêt général cet opus a été le fruit d’un long travail. L’artiste a consacré 4 ans pour travailler cette œuvre, dont il n’aura pas l’occasion de gouter les fruits.
Selon son manager, Moustapha Ndiaye : «Ablaye Mbaye tenait vraiment à cet opus, il disait même qu’avec la vente de ce produit, il pourrait acheter une maison pour sa mère, même si l’on sait que les albums ne sont plus vendus comme avant, avec cette avancée de la technologie». «Vous n’imaginez pas combien cet album lui tenait à cœur. C’était un défi qui le dépassait. On se demande même : est-ce que son décès n’était pas lié au stress qu’il vivait à cause de cet opus. Mais le jour où il a rendu l’âme c’est lui qui animait le débat», a fait savoir M. Ndiaye. «On voulait qu’il termine tout ce qu’il a entamé. Mais Dieu en a décidé autrement. Nous qui sommes là feront le reste», a promis Adama Mbaye le petit frère du défunt artiste.
L’opus composé de 9 titres contient des titres inédits, qu’Ablaye Mbaye a composé avec Baba Amdy, et Baye, le guitariste de Cheikh Lo. D’autres morceaux très connus du public ont également été repris sur le produit. C’est le cas de : Nila demmé en version un peu acoustique et traditionnelle et Sope yi en version plutôt mbalax réalisé avec une de ses sœurs. Le défunt artiste avait l’habitude de chanter des thèmes qui éveillent les consciences, et c’est ce qui explique le titre éponyme Intérêt Général. Il y parle de l’engagement des politiciens, pour qu’ils privilégient l’intérêt général au détriment de leur propre intérêt. Quant au morceau Adouna (Ndrl : la vie), qui avait fait l’objet d’une publication sous forme de single, il y traite des difficultés de la vie. Cette chanson très émouvante mise en fond sonore durant la cérémonie, a plongé la salle dans une tristesse.
La promotion…en attendant de l’immortaliser
«La vie est ainsi faite, l’homme fait tout ce qu’il peut pour trouver de l’argent, une fois acquis, il se tourne vers autre chose, pour pouvoir acquérir cette chose-là. Des fois la vie te fait tellement rire, mais il arrive à un moment où il te fait vraiment pleurer, c’est ça la vie», disait-le défunt dans ce morceau comme s’il avait senti sa mort. En le réécoutant, son manager étreint par l’émotion n’a pu résister et est sorti de la salle. Les autres titres de l’album sont entre autres : Parfum, Boudone deugue, moytoul… Youssou Ndour s’est porté volontaire pour la promotion de cet opus. Il sera vendu en ligne, et en version cd.
«Nous demandons à tous ceux qui font la communication de nous aider. Ils doivent prendre comme exemple Youssou Ndour qui a mis tout son personnel pour promouvoir le produit. Tout ce que les artistes gagneront à travers cet album sera remis à ses parents. Nous voulons que chacun dise : j’achète tant pour aider. Déjà Pape Maël en a acheté 2000 exemplaires», a dit Moustapha Ndiaye.
Il faut souligner que 2 terrains ont été offerts par des bonnes volontés pour réaliser le rêve de l’artiste. L’on informe aussi qu’une place dédiée aux artistes par la mairie Colobane, Gueule Tapée, portera son nom.
CE SERAIT UN BONHEUR DE FAIRE UN FEATURING AVEC UN SÉNÉGALAIS
L’artiste ivoirien Meiway a offert samedi dernier un savoureux show au dîner-gala de Emma style. En clôture de la 7e édition de cet évènement de mode, «Le professeur Awolowoh» a assuré une reprise de ses classiques au grand bonheur du public. En presque 30 minutes de prestation, le «Zoblazo» a enflammé la salle au point que certaines dames se sont improvisées choristes, livrant une collection de déhanchement avec pour refrain à la bouche : «On a gagné» ou encore «Tu es ma chérie, ma chérie préférée…». A sa descente de scène, «Le 13e apôtre», comme on le surnomme encore, a répondu à nos interpellations malgré son essoufflement.
Quelles sont vos impressions en voyant l’enthousiasme du public sénégalais à reprendre vos morceaux ?
Ecoutez ! Ce n’est jamais facile de se produire devant un public étranger. C’est toujours un challenge d’affronter ce public là, mais quand on sort de scène dans ces cas-là comme aujourd’hui, on est tout à fait soulagé. On est surtout soulagé d’avoir tiré son épingle du jeu, comme diraient les sportifs. Ça s’est plus ou moins bien passé. On s’est très bien amusé et le public a été très réceptif.
Pourquoi on ne vous retrouve sur scène à Dakar qu’à l’organisation du Emma style show ?
Emma style, cela fait 3 éditions et chaque fois c’est la même ferveur. Je crois qu’on a réussi autour de Emma à fonder une famille qui s’est agrandie aujourd’hui. C’est autour de cette grande famille qu’on se réunit chaque fois et cela donne cet évènement. Ça s’est très bien passé cette année encore et j’espère que je serai là une prochaine fois.
A quand un grand show de Meiway pour le public dakarois ?
Quand vous allez l’organiser. Dès qu’un organisateur m’invite, met toutes les conditions en place et tout le schéma en place, tout l’environnement adéquat, ça sera un bonheur de venir faire une prestation pour le public dakarois. Ce fut le cas par exemple au Fesman il y a quelques années. Si vous l’organisez, ce sera avec plaisir que je vais venir.
Parlez-nous rapidement du dernier album qui fait votre actualité…
Illimitic c’est le 12ème album de ma discographie qui est sorti depuis septembre dernier. Il se comporte très bien depuis qu’il est sur le marché. On a fait plusieurs concerts qui ont très bien marché, notamment celui-là. Le prochain concert, c’est à Paris dans une semaine exactement. Il y a un bon engouement. Ça tourne. Cela veut dire qu’il y a de bons retours et c’est tout bénéfique pour le travail qu’on a accompli. Au menu de ce nouvel album intitulé Illimitic, il y a les grands tubes de mon répertoire qui ont fait bouger les gens en Afrique et à l’étranger.
Vos déhanchements sur la musique Zoblazo ne changent pas malgré trente années de carrière. Quel est votre secret ?
(Rire) C’est ce que vous dites, non. On n’est pas si jeune que ça et forcément ça laisse des traces. Là j’ai un peu de courbature après ce show. C’est l’âge. On fait une musique qui est tellement énergique que forcément, à un certain âge, on commence à le ressentir dans le corps, le physique. Mes performances sont de moins en moins bonnes à mon avis. Je peux mieux faire. Mais n’empêche que la persévérance dans le travail avec mes danseuses me permet de me maintenir physiquement.
Avez-vous à l’idée des projets de featuring ou de duo avec des artistes sénégalais pour vous essayer à notre mbalax national ?
Ça serait du bonheur. Ce serait un vrai bonheur de faire un featuring avec un artiste sénégalais. Vous savez, on fait un métier qui est formidable, où l’adversité n’existe pas. En musique, on ne fait jamais de combat. Au contraire on fait des duos et pas des duels. Donc ça serait un bonheur de travailler avec des artistes sénégalais. Pourquoi pas ? Cela m’est rarement arrivé. On s’est souvent retrouvé sur des scènes pour faire des concerts, mais je n’ai jamais été dans des studios avec un artiste sénégalais pour réaliser un son. Non ! J’espère qu’un jour ça arrivera. J’aime bien le mbalax et le Sénégal. Je suis très proche du Sénégal. Je connais la culture sénégalaise et donc ça sera un bonheur de m’en inspirer.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, BOUBACAR BORIS DIOP
DE LA NÉGROPHOBIE DES SOCIÉTÉS ARABES
EXCLUSIF SENEPLUS - Les transitions démocratiques en Afrique… La CPI… Les violences et humiliations subies par les Noirs en Afrique du Nord et ailleurs…
PROPOS RECUEILLIS PAR FRÉDÉRIC ATAYODI DE SENEPLUS |
Publication 07/02/2017
La vieille négrophobie des sociétés arabes, jusqu’ici assez sournoise, est en train de se décomplexer au point de devenir de plus en plus meurtrière
Au Ghana, Nana Akufo-Addo vient de mettre un terme à ce que l'on a appelé avec humour "la ‘’tyrannie des John". Nous venons d'avoir une nouvelle alternance avec le vainqueur qui félicite le vaincu. Le scénario semblait se répéter en Gambie avant la volte face de Jammeh. Dans l’ensemble quelle lecture faites-vous de l’état de la transparence et de la bonne gouvernance en Afrique ?
Il faut reconnaitre que nous sommes loin de l’époque des Bokassa et Idi Amin Dada. S’il y a autant de contentieux électoraux, c’est bien parce que le suffrage universel est devenu la seule source de légitimité politique. Beaucoup de choses sont certes à parfaire et je suis persuadé que cela se fera au fil des ans. Je m’en réjouis, naturellement, mais d’un autre côté, cela me laisse de plus en plus perplexe. Pour ne rien vous cacher, cela m’arrache parfois un sourire bien amer. On a l’impression que les mêmes élites se relaient à la tête de l’Etat, la transhumance rendant par ailleurs quasi impossible tout renouvellement en profondeur de la classe dirigeante. Si l’alternance ne permet pas de relever le défi du changement, elle n’est finalement rien d’autre qu’une façon plus élégante et démocratique de se partager le gâteau national.
Une alternative à la démocratie, ça existe ?
Je n’en connais pas. S’il y en avait une, cela se saurait. Il ne viendra à l’idée d’aucune personne réfléchie de dénoncer la démocratie, on n’a encore rien trouvé de mieux pour éviter l’écrasement des faibles par les plus forts. Je pense toutefois qu’il faut lui donner un nouveau sens, veiller à ce qu’elle ne se transforme pas en une sinistre farce. Nous voyons tous que sous nos cieux le président, une fois élu, ne tient plus trop compte de l’opinion de ses concitoyens. En fait, dans un pays comme le nôtre, il est bien conscient de devoir sa nouvelle position à des lobbies dont les plus puissants et redoutables sont étrangers. Ceux-ci financent de même des groupes de pression locaux qui sont une épée de Damoclès au-dessus de la tête de l’heureux élu et plus ce dernier a des choses à cacher plus ils le trouvent génial. Un chef d’Etat facile à faire chanter sera en effet plus enclin à servir leurs intérêts que ceux de son propre pays. Signe des temps, ce débat fait rage aux États-Unis, la controverse a éclaté avant même la prestation de serment de Donald Trump. C’est amusant de voir les Américains si choqués à l’idée que Trump pourrait être un jouet entre les mains de Poutine car pour la plupart des pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, c’est une histoire bien connue que celle de ces fantoches tenus en laisse de l’extérieur. Peut-être aussi faudrait-il chercher de ce côté pour percer ce que j’appelais dans notre dernier entretien les mystères de la politique étrangère de Macky Sall ? On ne peut pas tout réduire à cette dimension éthique, fondatrice de la liberté d’action du leader mais je crois qu’elle est essentielle. En fait, si j’ai un tel respect pour Paul Kagamé c’est parce qu’il est d’une intégrité personnelle au-dessus de tout soupçon. Si ces gens, qui le détestent tant par ailleurs, avaient prise sur lui, il lui serait impossible de prendre les bonnes décisions pour son peuple au point d’obtenir les résultats que chacun peut constater. Au final, c’est bien que les droits des citoyens soient préservés, c’est bien qu’ils soient libres à l’égard de leurs dirigeants mais si ces derniers ne le sont pas à l’égard des puissances etrangeres, l’exercice democratique devient dérisoire.
Trois pays, l’Afrique du Sud, le Burundi et la Gambie ont claqué la porte de la CPI dénonçant sa partialité. Un précédent dangereux ?
Ils ne sont pas les seuls. La Russie a également claqué la porte de la CPI et la Namibie et le Kenya sont sur la même voie. Et quand on sait que la Chine, les Usa et l’Inde n’en ont jamais fait partie, on peut fortement douter du caractère international de cette juridiction. Le reproche qui lui est fait de cibler en priorité les dirigeants africains est tout à fait fondé. Sur dix instructions en cours, neuf concernent le continent et on est à peu près dans les mêmes proportions pour les affaires déjà jugées. J’espère, faute d’un retrait massif et concerté sous la bannière de l’Union africaine, que nos pays vont être de plus en plus nombreux à quitter la Cpi. Je n’oublierai jamais le jour où j’ai entendu son Procureur de l’époque, Luis Moreno Ocampo, valider lors d’une conférence de presse à New York la fable obscène d’un Kadhafi aux abois en train de faire distribuer des caisses de Viagra à ses ‘’mercenaires africains’’ pour leur permettre de mieux violer des femmes arabes… Je ne vois franchement pas comment après cela on peut prendre au sérieux une telle institution.
Comment appréciez-vous le déroulement du procès de Laurent Gbagbo ?
Tout le monde est bien conscient de l’embarras du tribunal. Sans avoir jamais été un admirateur de Gbagbo, je suis de ceux qui le considèrent aujourd’hui comme un otage. Rappelons les faits : à la faveur d’un contentieux électoral, des blindés français forcent les grilles de son palais et plus tard, après une arrestation particulièrement humiliante, filmée sous tous les angles, il est conduit à la Haye dans une opération spectaculaire, style Rambo, et depuis au moins cinq ans des témoins supposés à charge défilent à la barre pour se contredire les uns les autres ou à l’occasion avouer avoir menti sur commande. Je me souviens aujourd’hui de tous les intellectuels qui hurlaient contre Gbagbo, allant jusqu’à lui imputer le massacre de Duékoué au cours duquel des centaines de ses propres partisans avaient été sauvagement assassinés sous le regard impuissant des Casques bleus. Accusée de symboliser dans le conflit ivoirien la justice des vainqueurs, la Cpi a parfois comme des remords, on l’entend alors murmurer timidement le nom de Guillaume Soro mais les impératifs de la realpolitik lui font vite perdre la mémoire. Quant à Blaise Compaoré, personnage beaucoup plus intéressant comme chacun sait – même et peut-être surtout par rapport à la guerre civile ivoirienne – aucun de nos champions locaux des droits de l’homme n’a cru jusqu’ici devoir l’importuner. Pour moi, le cas Gbagbo est simple : si on ne trouve rien contre un accusé, il faut lui rendre sa liberté. L’exemple de Slobodan Milosevic devrait nous faire tous réfléchir : surnommé ‘’Le boucher des Balkans’’, traîné dans la boue, il est mort soudainement, dans des conditions mystérieuses, dans cette même prison de la Haye. Son procès a quand même eu lieu par la suite et il a finalement été reconnu innocent de toutes les charges qui pesaient sur lui… Presque personne n’est au courant de cet épisode parce que les medias dit globaux l’ont passé sous silence. Que l’on me comprenne bien, cependant : je ne suis pas en train de présenter Milosevic en innocente victime d’une juridiction aux ordres des Occidentaux. Je connais beaucoup trop mal la situation dans l’ex-Yougoslavie pour me permettre un tel raccourci. J’estime simplement que le fait mérite d’être signalé parce qu’il est un argument de plus en faveur de la libération de Gbagbo.
Vous étiez au Mali il n'y a pas bien longtemps. La menace terroriste y est toujours bien présente.
Aminata Dramane Traoré organise chaque année une manifestation dénommée « Migrances ». De Dakar, Demba Dembele, Taoufick Ben Abdallah et moi-même avons rallié Bamako pour y prendre part avec d’autres amis. Aminata est très respectée dans son pays, même par ceux qui sont en désaccord avec elle. Comme vous le suggérez, on ne peut pas être à l’heure actuelle au Mali sans parler de la menace terroriste mais ces trois journées de réflexion ont surtout été l’occasion de préparer à notre manière le sommet Afrique-France de Bamako. Nous avons clairement réaffirmé dans un texte notre position sur certains grands sujets de l’heure - le franc Cfa, les Ape et la Cpi – avec en toile de fond la question centrale de la migration. Le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a ouvert les travaux par une déclaration sans ambiguïté sur le refus de son pays de signer les ‘’accords de réadmission des migrants clandestins’’ que l’Union européenne veut lui imposer. Des migrants venus d’Algérie et de Libye ont fait des témoignages bouleversants et l’une d’elles s’est adressée à l’assistance à partir de Syrte, cette ville libyenne devenue un épouvantable enfer pour les Subsahariens.
"VIOLENCES ET HUMILIATIONS NÉGROPHOBES"
Vous semblez beaucoup réfléchir à toutes ces questions liées à la situation des Subsahariens en Afrique du Nord. Qu'est-ce qui le justifie ?
La question est devenue si importante à mes yeux que j’y reviens sans cesse. Je l’ai longuement abordée il y a quelques semaines dans une interview avec un quotidien espagnol et au cours de cette édition de ‘’Migrances’’ j’ai choisi de centrer mon exposé sur ce seul sujet. C’était d’ailleurs d’actualité puisque quelques jours plus tôt avait débuté en Algérie la rafle de 1400 migrants Africains. Brutalisés, spoliés, insultés – un officiel du nom de Farouk Ksentini, chef d’une Commission de Promotion et de Protection des Droits de l’Homme les accusant publiquement de propager le sida – ils ont finalement été conduits dans des camions de sable à Tamanrasset, c’est-à-dire à près de 2000 kilomètres d’Alger. Là, on en a remis quelques centaines aux autorités nigériennes, les autres restant sur place avec interdiction formelle de quitter les lieux. Nos medias, très excités par l’affaire Jammeh, n’en ont pas soufflé mot. Cette indifférence est à mon avis assez révélatrice d’un certain état d’esprit élitiste : quand un journaliste, un avocat ou un diplomate est molesté quelque part, nous sommes tous révoltés et la levée de boucliers est immédiate mais lorsque des centaines de jeunes jugés pour ainsi dire sans importance sociale sont brûlés vifs, jetés aux requins ou abandonnés comme des chiens dans le désert algérien, cela ne nous indigne pas vraiment. Et ces ratonnades en Algérie ne sont rien à côté des violences et humiliations négrophobes subies par les mêmes migrants au Liban, dans les monarchies du Golfe et dans la Libye post-Kadhafi. On ne doit évidemment pas généraliser : à Alger des voix se sont élevées contre ces exactions et en Tunisie les bonnes volontés sont en train de se mobiliser du mieux qu’elles peuvent contre ce fléau. Le problème n’en est pas moins réel et ce n’est pas en s’obstinant à le nier que l’on va se donner une chance de le résoudre : la vieille négrophobie des sociétés arabes, jusqu’ici assez sournoise, est en train de se décomplexer au point de devenir de plus en plus meurtrière. Et c’est justement pour cette raison que nous ne pouvons plus continuer à nous taire. En réalité nous en parlons souvent entre nous, de ce racisme-là, sans toutefois que cela aille plus loin : chaque fois que des jeunes Camerounais et Sénégalais sont assassinés au Maghreb ou quand l’affaire Mbayang Diop en Arabie Saoudite fait la ‘’Une’’ des journaux. Ce serait bien du reste que la situation de Mbayang Diop soit rappelée chaque jour par les radios privées, systématiquement, pour l’aider à rester en vie. En fait, seule une certaine pudeur nous a toujours empêchés de poser publiquement le débat. L’heure est venue de nous y résoudre, sans haine et surtout pour éviter que la situation ne finisse par échapper à tout contrôle.