Une invite aux fidèles catholiques, en particulier les jeunes, à ne pas réduire l’amour au sexe. Voilà le message fort que l’Eglise Catholique du Sénégal a lancé, hier, à la jeunesse chrétienne, à l’occasion des festivités marquant la 30e édition de la Journée mondiale de la jeunesse.
Pas moins de 10 000 jeunes venant des différentes paroisses de l’archidiocèse de Dakar ont pris d’assaut, hier, l’Ecole supérieure d’économie appliquée (Esea, ex Enea) dans le Doyenné Grand-Dakar-Yoff, pour assister à la célébration de la 30e édition de la Journée mondiale de la jeunesse (Jmj). Occasion saisie par l’archidiocèse de Dakar de passer de fond en comble le thème de cette édition : «Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu».
Des informations livrées à l’occasion, il ressort que l’époque de la jeunesse est celle où s’épanouissent la grande richesse affective présente dans les cœurs, le désir profond d’un amour vrai, beau et grand. «Ne permettez pas que cette valeur précieuse soit falsifiée, détruite ou dénigrée. Cela arrive quand l’instrumentalisation du prochain à nos fins égoïstes apparaît dans nos relations parfois comme un objet de plaisir», lit-on dans un document distribué à la presse.
Invitant les jeunes fidèles à redécouvrir la beauté de la vocation humaine, à l’amour, l’Eglise Catholique exhorte aussi ses jeunes à se «rebeller contre la tendance diffuse à banaliser l’amour». Surtout quand on cherche à «la réduire seulement à l’aspect sexuel, en la détachant ainsi de ses caractéristiques essentielles de beauté, de communion, de fidélité et de responsabilité».
«Beaucoup aujourd’hui pensent que l’appel du Seigneur au mariage est démodé. Mais ce n’est pas vrai. Pour ce motif même, la communauté ecclésiale tout entière vit un moment spécial de réflexion sur la vocation et la mission de la famille dans l’Eglise et dans le monde contemporain», renseigne le document.
Aussi, la même source d’ajouter que Dieu ne regarde pas les apparences, mais le cœur. Cela, parce que le cœur résume l’être humain dans sa totalité et dans son unité de corps et d’âme, dans sa capacité d’aimer et d’être aimé. «Quand l’homme et la femme cèdent à la tentation et brisent la relation de communion confiante avec Dieu, le péché entre dans l’histoire humaine. Les conséquences se font tout de suite connaître et elles sont dramatiques», prévient l’Eglise.
MOUSTAPHA CISSE LO COMPTE SAISIR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL SUR LA LEGALITE DE L’ACTE
REDUCTION DU MANDAT PRESIDENTIEL
El Modou GUEYE (Correspondant) |
Publication 30/03/2015
Moustapha Cissé Lo vice-président de l’Assemblée nationale et Mbaye Ndiaye, ministre d’Etat auprès du président de la République soufflent sur les braises. Lors d’un meeting tenu ce week-end à Dalifort, l’un a annoncé le lancement de la campagne pour le «Non» à la réduction du mandat présidentiel alors que l’autre somme les partis de la majorité à se déterminer sans délai comme alliés ou adversaires.
Moustapha Cissé Lo lance la campagne pour le «Non» à la réduction du mandat présidentiel lors du référendum à venir. Il en a fait l’annonce, lors du meeting organisé par Awa Niang deuxième questeur à l’Assemblée nationale à Pikine Dalifort et qu’il co-présidait avec Mbaye Ndiaye, ministre d’Etat auprès du président de la République.
«Je lance officiellement la campagne pour le ‘non’ au référendum. 90% des responsables de l’Apr et des militants de base ne sont pas d’accord. Macky Sall a prêté serment pour exercer un mandat de sept ans. Il doit le respecter, c’est le non-respect de la constitution qui avait fait sortir le peuple en juin 2011. Le serment est plus fort que l’engagement verbal. Il faut qu’on arrête ces histoires qui ne tiennent pas la route. Nous sommes en politique et tout le monde sait que le discours politique est subjectif en substance», a déclaré le vice-président de l’Assemblée nationale qui annonce ainsi que le Conseil constitutionnel sera saisi dans les prochains jours afin qu’il se prononce sur la constitutionnalité de la réduction du mandat présidentiel.
Cissé Lo rejette 2017 et lance la campagne pour le non au Référendum
«Si le Conseil constitutionnel dit que la réduction sans démission par voie référendaire est possible, on engage le combat du non au référendum. Si le conseil dit non, alors Macky Sall est obligé de se plier à la loi fondamentale. S’il ne le fait pas, il y va à ses risques et périls et assumera les conséquences qui en découleront». Sa conviction est claire : «Le mandat n’appartient pas à Macky Sall. Depuis que le monde existe on n’a jamais vu un Président réduire son mandat à moins qu’il démissionne volontairement et quitte le pouvoir. Ceux qui exercent des pressions sur lui ne l’aiment pas. Ce sont des adversaires qui cherchent à lui chiper le pouvoir».
Moustapha Cissé Lo de préciser : «Je préfère faire sept ans et perdre des élections que faire cinq ans et les perdre. Macky Sall a plus de chance en faisant sept ans au pouvoir. Il aura le temps de poursuivre et inaugurer beaucoup de chantiers et mettre en œuvre son plan de développement économique. Et je vous dis que les libéraux remettront le septennat s’ils arrivaient par extraordinaire à revenir au pouvoir. Soyons vigilants. J’alerte et je vais porter ce combat et je suis sûr que je vais le gagner parce que Macky Sall est seul dans cette décision. Notre parti n’est pas d’accord. Et ma position a été portée à la connaissance du Secrétariat national et je ne suis pas seul dans ce combat et vous verrez dans les prochains jours».
Mbaye Ndiaye met en demeure les partis de la majorité à se déterminer
En prenant la parole, Mbaye Ndiaye, ministre d’Etat auprès du président de la République, lui, s’en est vivement pris à certains alliés. «Le peuple sénégalais a besoin de la clarification de l’espace politique national. Il faut sortir de l’ombre, on ne peut pas cheminer avec des candidats tapis dans l’ombre qui déroulent des stratégies tout en faisant croire qu’ils partagent un bilan et une gestion alors qu’il n’en est rien. Il faut que cela cesse», déclare l’ancien maire des Parcelles assainies devant une foule de militants qui applaudissaient à tout rompre. Dopé, il lance : «Excellence M. le président de la République, votre parti l’Alliance pour la République a besoin qu’on identifie ceux qui sont avec lui pour la Présidentielle de 2017. On ne peut pas être avec nous et prétendre nous faire face. Il faut qu’on se détermine et qu’on prenne nos responsabilités, le plus vite sera le mieux».
«LE JOUR N’EST PAS LOIN OU LE CAMES NOUS RAPPELLERA...»
Premier sénégalais agrégé de philosophie, Pr Mamoussé Diagne, qui a fait les beaux jours de la défunte Cdp/Garab gi, aux côtés du Pr Iba Der Thiam, commente, dans l’entretien grand format qu’il nous a accordé, les questions brûlantes de l’heure. Dans des propos teintés de philosophie, Pr Diagne dit ses vérités, sans complaisance, mais avec lucidité.
Quelle appréciation faites-vous de l’enseignement au Sénégal ?
Je dois dire qu’aujourd’hui, tous les enseignants de philosophie au Sénégal ont été mes élèves, sans exception, et tous ceux qui sont passés par la Terminale m’ont eu comme professeur. Par conséquent, mes anciens étudiants avec qui j’ai des liens très étroits, au point que je les considère moins comme mes anciens étudiants que comme mes amis. Je suis extrêmement fier de ce qu’ils sont et de ce qu’ils sont devenus, qu’ils soient de l’enseignement ou en dehors de l’enseignement. Vous sentez bien une distinction que je fais entre ces étudiants d’élite et les étudiants tels que je les vois actuellement dans leur manière de se comporter, dans leur manière de travailler, dans leur façon également de manifester leurs ambitions. Il faut dire que ça correspondait avec une époque tout à fait spéciale où les étudiants arrivaient dans les amphis déjà armés. C'est des gens qui avaient des lectures, qui savaient également mener des discours contradictoires, puisque c’étaient des gens très politisés, très souvent influencés par des mouvements marxistes, et pendant la clandestinité, en plus. Donc, ça les poussait à une auto-formation personnelle qui fait qu’en classe, le rapport au professeur n’était pas un rapport de simple enregistrement, mais de véritable discussion qui se menait dans nos amphis. Ce qui était tout à fait admirable, parce que nous avions bien l’impression et la sensation fondée, à juste titre, d’avoir des interlocuteurs et pas seulement des disciples ou de grands élèves. Et ça, c’est une période que je regrette.
Pourquoi regrettez-vous cette période ?
Parce qu'il y a eu une détérioration significative des étudiants sur le plan de la qualité. Il y a les effets pervers de la massification de nos universités en faculté des lettres et singulièrement au département de philosophie. Je me rappelle que la totalité des effectifs ne dépassait pas 40 étudiants de la première à la quatrième année tout confondue. Aujourd’hui, nous sommes à 400 et 450 étudiants, rien qu’en première année. Il est évident que ce type de rapport ne permet pas à une pédagogie efficiente de se manifester, et certains de ces étudiants sont loin d’être motivés comme les premiers étudiants, puisqu’ils ont le sentiment, peut- être, de se retrouver simplement dans cette faculté comme déversoir, faute de pouvoir être versés ailleurs. Quand quelqu’un n’est pas motivé, et celui qui enseigne également, et la massification aidant, il y a un nivellement vers le bas extrêmement sensible sur des questions, non seulement de fond mais même sur des questions de forme, sur la façon de s’exprimer, sur la façon de faire une dissertation. Il y en a qui ne dépassent pas, à mon avis, en qualité, de bons étudiants de Terminale de l’époque. Ce n’est pas tout à fait leur faute, c’est un effet systémique, puisque ça tient à la qualité des enseignants qui les forment dans le secondaire, ça dépend du contexte dans lequel ils évoluent, ça dépend de toute cette pression que la société fait peser sur eux et la dispersion de leurs intérêts, au-delà des études qu’ils mènent précisément. On ne peut que le regretter pour eux, on ne peut que le regretter pour le pays, mais il me semble qu’il y a là un énorme gâchis. C’est pareil pour l’enseignement dans le secondaire, puisque, de toute façon, quand on voit le niveau du Bac et le niveau des bacheliers de l’époque, moi qui était inspecteur général avec la responsabilité de donner des sujets d’examens, je me dis que les sujets de l’époque, les élèves de maintenant ne pourraient pas les traiter.
Il m’arrive, quelquefois, en m’en amusant, de retenir des cookies d’élèves, et même quelquefois d’étudiants relativement avancés, et de les soumettre à mes petits enfants qui arrivent à donner une expression correcte, là où l’étudiant en question a fait des solécismes, des phrases incorrectes, alors qu’ils ont, à leur disposition, un outil aussi extraordinaire que l’internet, pour pouvoir même enrichir leurs cours. Mais, certains en font un usage assez curieux, assez scandaleux, de couper-coller, au lieu d’apprendre véritablement à diversifier leurs connaissances, alors qu’ils ont à leur portée une bibliothèque mondiale.
Que préconisez-vous pour que le niveau soit relevé ?
Il faudra, sans doute, un grand effort, de la part du pays, de la part des parents et de la part des principaux intéressés, à savoir les étudiants. C’est l’affaire de tout le monde, mais c’est des affaires essentiellement des partenaires de l’école autour de l’école. Il va falloir que nous soyons beaucoup plus exigeants par rapport à nous-mêmes et par rapport à chacun de ces interlocuteurs qui se partagent, aujourd'hui, l’école. Il faut que nous sachions que le XXIe siècle, c’est le siècle du savoir. C’est ce que proclament, du moins, les Nations-unies. C’est le siècle du savoir. Cela veut dire que les nations qui vont s’affronter, vont s’affronter essentiellement sur le plan des connaissances. C’est le potentiel de matière grise que chaque nation pourra aligner, c’est ce potentiel qui permettra de faire poser sur la carte du monde ou de ne pas exister. Par conséquent, c’est un devoir qui est un devoir de vérité que nous nous devons à nous-mêmes, c’est également une ambition que nous devons nourrir à l’égard de ce monde auquel nous faisons face à l’image de ce qu’on fait les Japonais lorsqu’ils ont fait la révolution Meiji. Ce qui a fait que cette nation qui habite sur une île volcanique dispersée dans le Pacifique, que cette nation - qui a reçu 2 fois la bombe atomique sans disparaître - puisse, non seulement, survivre, mais devienne, en un moment donné, la deuxième nation du monde en termes de concentration de matière grise, de savoir et de savoir-faire. C’est parce qu'au moment de la révolution Meiji, ils ont mis en avant, justement parce qu’ils n’avaient pas de ressources naturelles, la formation des hommes.
La formation des hommes est absolument essentielle, et c’est un problème que nous n’arriverons jamais à contourner véritablement. J’ai évolué, toute ma vie, à travers des concours. C’est pourquoi je ne peux pas accepter que les jeunes de mon pays soient médiocres. Il faut que nous arrivions à mesurer les capacités des uns et des autres. Ceux qui sont doués pour la technologie iront dans les structures où on fabrique ces genres d’hommes. Ceux qui sont doués pour autre chose de la même manière. Quand il s’agit de la formation longue, on laissera dans le système classique des gens qui ont les capacités et les aptitudes pour ça.
Au-delà de cet état de fait, il y a les grèves répétitives qui minent l’enseignement...
C’est l’une des grosses plaies qui gangrènent l’école sénégalaise. Lorsque nous faisions nos études, je crois que la seule et unique grève que j’ai connue - et ce n’était pas de notre fait à nous élèves de Terminale - c’était la grande grève de 1968. Sinon, les années étaient des années pleines. Aujourd’hui, quand vous prenez le rythme scolaire, le rythme des études dans le secondaire, vous n’avez pas un mois sans grève ou sans menace de grève, ce qui fait que les esprits sont en vacances. Quand les esprits des gens sont en vacances, il est extrêmement difficile de les recoller, il est extrêmement difficile d’avoir un influx et une même attention portée sur la formation d’un bout à l’autre de l’année. Il est rare qu’on fasse précisément 9 mois, et ça se ressent sur le niveau des élèves, et je crois que là, il faut un vaste débat également entre les organisations d’enseignants, les populations et ceux qui nous gouvernent, de manière à trouver un système stable et un système performant qualitativement. Quand il s’agit de l'université, c’est la même chose.
Qu'est-ce qui vous déplorez le plus ?
Nous rusons avec le système de manière à produire des années qui n’en sont pas, et je dis que le jour n’est pas loin où le Cames nous rappellera à l’ordre pour dire que nos diplômes ne sont pas valides. Nous faisons chevaucher les années les unes sur les autres. On ne sait plus à quel moment commence l’année et quel moment l’année se termine. Au mois de mai, nous avions terminé l’année universitaire pour pouvoir faire passer les examens de la première session. Aujourd’hui, la session commence en octobre, c’est-à-dire là où devait commencer l’année suivante. Les dernières que j’ai passées à l’université, je ne savais pas quel moment l’année se terminait. Et donc on enchaînait les années les unes sur les autres, parce qu’on devait nécessairement déborder, et en débordant, nécessairement, on commençait très tard l’autre année, c’est-à-dire en janvier l’année civile, et cela n’a rien à voir avec ce que nous avons connu au départ.
Et il faut être extrêmement vigilant. Je n’accuse personne, en particulier, peut- être que sommes-nous tous coupables. Mais, cette culpabilité collective nécessite justement un débat collectif et un débat de fond dans lequel personne ne triche pour que nous puissions avoir véritablement des bases d’accord entre le gouvernement, les syndicats, les étudiants, tout le monde, de manière à ce que nous fassions chacun son mea-culpa et qu’on parte sur des principes qui soient des principes pérennes. Ce que je crains, c’est que simplement qu’une année on en vienne à décréter l’année blanche, même pas parce que le gouvernement ou les dirigeants de ce pays l’auront décidé, mais parce que les instances internationales qui représentent le Cames décident de dire que le Sénégal n’a pas des diplômes valides pour cette année-ci. Et en ce moment-là, nous serons bien attrapés, parce que ce sera l’effacement d’efforts et de budgets qui auraient pu aller à autre chose.
Que suggérez-vous pour que les problèmes qui minent l'éducation au Sénégal ne soient plus qu'un mauvais souvenir?
Nous n’avons pas le droit dans un pays comme le nôtre, avec des moyens qui sont les nôtres, nous n’avons pas le droit d’investir, pendant un an, des efforts et de l’argent et de nous trouver au bout du compte sans rien de substantiel. Par conséquent, il faut que les enseignants enseignent. C’est ça leur métier. Il faut qu’ils acceptent cela, avec les servitudes du métier, avec les contraintes, et qu’ils les acceptent. Il faut que de l’autre côté, le gouvernement, lorsqu’il prend des engagements vis-à-vis des enseignants, veille au respect scrupuleux de ces engagements. Je pense que si chacun, de part et d’autre, inscrit dans un calendrier, les engagements des uns et des autres, la façon dont ça doit être pris, sans autosatisfaction ni tricherie, je pense qu’on peut arriver à redresser les choses, à revenir à la normale.
Ce n’est qu’une norme qu’on doit appliquer et respecter. Et cette norme, elle est internationale, puisqu'en ce qui concerne l’enseignement supérieur, ce n’est même pas le gouvernement sénégalais qui décide, finalement, de faire avancer les enseignants, finalement, de leur notation, ou quoi que ce soit, c’est une instance internationale. Cela veut dire que nous devons constamment nous comparer à ce que font les autres en n’étant pas, quand même, les plus médiocres.
Est-ce qu’il ne faudrait pas tendre vers le système américain, sans la privatisation, pour sauver le système éducatif sénégalais?
En tout cas, il faut tendre à une plus grande sélectivité, pour ce qui entre dans l’université. Je pense que tout le monde ne peut pas aller à l’université. Tout le monde n’est pas fait pour ça. Moi, j’avais dit à l’époque que ce n’est pas une bonne chose de donner la bourse à tout le monde. Ce n’est pas une bonne chose. Ça veut dire qu’on récompense de la même manière des médiocres et des gens excellents. Je pense que les effectifs auraient pu être dégonflés, des gens aller dans des structures de formation ou dans d’autres structures que l’université. Ne donner des bourses d’excellence qu'à des gens qui ne sont qu’excellents. Choisir ceux qui sont à l’université. Et ceux qui ne veulent pas étudier, qu’ils perdent automatiquement cette aide-là. Deux critères qui devraient servir, à mon avis, à soutenir les systèmes des bourses : l’excellence, d’abord, et aussi la situation sociale de l’enseignant, mais surtout faire en sorte que les effectifs soient raisonnables pour l’université. Je crois et je continue de croire en l’enseignement public. S’il n’y avait pas ça, je ne serais pas arrivé là où je suis. Mes parents n’avaient pas les moyens de me payer mes études. Ce qui me permettait de payer mes études et ce sur quoi on pourrait se fonder pour me mettre à l’internat, à Ponty, pour donner une bourse pour aller en France, mais c’était mes résultats. Et rien d’autre ne doit plaider, à mon avis, pour ce qui concerne la sélection des étudiants.
Que dites-vous des réformes entreprises dans l’enseignement?
Il y en a qui s’y retrouvent, d’autres qui s’y retrouvent moins. Mais, de toute façon, l’enseignement devait être réformé, parce qu’on ne pouvait pas continuer à jeter l’argent par les fenêtres. On ne pouvait pas continuer à fonctionner comme on le faisait avec des étudiants qui payent les repas au prix où c’était en 1968 ou 1969. On ne pouvait pas, non plus, accepter qu’ils ne soient pas des étudiants. A mon avis, il y a des gens qui sont sur le campus sans être des étudiants. Et j’ai même vu, et par la confirmation d’autres collègues, le cas d’étudiants qui, d’une certaine manière, redoublent volontairement, parce que le taux de la bourse (60 000 F), c’est plus que le Smig (ndlr:salaire minimum interprofessionnel garanti). Si vous redoublez, vous en bénéficier deux années de suite. Moi, je dis non. J’aurais viré la moitié de ceux qui ont ce type de comportement, et avec cet argent j’aurais davantage financé les gens qui ont des performances significatives et mesuré tout à la performance. Ne récompensez que les meilleurs. C’est le seul critère sur lequel tout le monde peut tomber d’accord.
Vous êtes le premier agrégé en philosophie au Sénégal. Quelle est la place de la philosophie dans la société ?
Vous posez une question redoutable, celle qui fut posée à Alonkia qui a fondé cette discipline. Ça finit par être mythique cette question-là. C’est le mythe de l’origine. Quelle est l’utilité de la philosophie ? A la limite, la philosophie n’a pas d’utilité, et c’est cela son utilité, justement. La possibilité de ne pas être comparée au travail du menuisier, de ne pas être comparée au travail du maçon, mais de pouvoir s’interroger sur toutes ces activités que les hommes mènent et que les hommes entretiennent entre eux, entre leur milieu, que les hommes entretiennent avec les valeurs. Et dans tous ces cas avoir une vigilance critique. C’est peut-être la capacité de questionner et le monde et soi-même et autrui. C’est ça la philosophie qui, donc, est une attitude, à mon avis, plus que simplement un discours systématisé mis dans un système. Définition courte, mais qui comporte l’essentiel du noyau critique. On philosophe jusqu’à en mourir, puisque Socrate en est mort justement. Badinter le rappelait, en disant que la plus belle plaidoirie de l’histoire de l’humanité, c’était l'apologie de Socrate.
Quel est le regard que le philosophe porte sur la société sénégalaise avec les problèmes de mœurs que nous vivons quotidiennement ?
Très compliquée cette société sénégalaise. Et de toute façon, pas que la société Sénégalaise, parce que le monde est devenu un monde de la complexité. Aujourd’hui, on ne plus catégoriser le monde en ceci est noir, ceci est blanc. Le monde est peut-être simplement grisâtre, c’est-à-dire une couleur relativement indéfinissable avec des comportements variés qui nous appelle à être d’abord humbles, à pouvoir être tolérants, à accepter la diversité du point de vue de l’attitude. Quand il s’agit maintenant du rapport aux valeurs, ce que l’on constatait, c’est une sorte d’inquiétude face à des lignes de forces qui permettaient, dans les sociétés traditionnelles, aux gens de s’orienter de la vie jusqu’à la mort parce que c’était suffisamment balisé. Aujourd’hui, avec ce qu’on appelle la mondialisation ou la globalisation, avec ce désarroi, les gens s’interrogent et se tournent vers des improbabilités, ils survivent pour ainsi dire sur le plan éthique. C’est ça qui est grave. Dans ma thèse de doctorat d’Etat, je dis que ce qui pouvait stabiliser les sociétés traditionnelles, c’était le panthéon oral qui fait que lorsque vous vous demandiez ce qu’était la fidélité, vous pouviez, très clairement, invoquer le rapport de Moussé Bory de Yan Codou et de Samba Laobé. C’est-à-dire, par fidélité, celui qui s’était absenté la veille d’une bataille et qui a poussé Samba Laobé à dire que personne ne dîne, tant qu’il ne serait pas là. Quand il est revenu et qu’on le lui a raconté, il a réuni ses quatre épouses en leur demandant quel comportement il devait avoir lors de la bataille de Guillé. Lorsque les 4 se sont réunies, elles sont revenues en lui disant que s’il revenait vivant de cette bataille de Guillé, il ne serait plus digne d’être leur mari. Ce qui lui a permis avant la bataille de demander qu’elles se détressent les cheveux, se comportant comme quelqu’un qui est déjà mort. C’est cela le sens de la dignité, c’est cela le sens du courage. Si on veut parler d’amitié, si on veut parler de comportement de femme digne, nous avons Yacine Boubou. Bref, nous avons un certain nombre de figures qui ne devaient pas être considérés comme des figures historiques, mais c’est des paradigmes à partir desquels il est possible de régler sa conduite, parce qu’une valeur, ce n’est pas simplement quelque chose qu’on recopie ou quelque chose qu’on applique. C’est quelque chose sur quoi on se règle, c’est la norme à partir de laquelle il est possible de bâtir un comportement, et c’est cela malheureusement, qui fait défaut de plus en plus, aujourd’hui, au profit d’autres types de comportements qui font que l’individu met en avant sa réussite sociale, met en avant ses biens, le bien-être, plutôt que de bien se comporter. Et c’est ce qui m’inquiète le plus. Et ce n’est pas valable pour l’Afrique, pour l’Occident également. Vous avez vu ce qu'est devenue la famille en Occident ? C'est vraiment dommage.
Professeur, que vous inspire la traque des biens mal acquis ?
Par le qualificatif même que vous en faites, vous avez ma réponse. Un bien mal acquis doit être traqué, parce que nous n’avons pas la possibilité ni le pouvoir de considérer qu’il puisse y avoir des gens qui ont par-devers les Sénégalais des biens qu’ils ne méritent par le travail et qu’ils s’attribuent. Ça, ce n’est pas acceptable moralement. Maintenant, le problème est que dans cette traque, pour utiliser votre terme, qu’on ne cherche que la vérité, qu’on ne cherche qu’à restituer au peuple ce à quoi il a droit. Je crois que pour faire la politique en l’accompagnant de l’élément fondamental qui est l’éthique, ça consiste dans la reddition des comptes. Quelqu’un qui n’est pas au pouvoir et qui n’a pas le pouvoir, celui-là, il est moins gêné que quelqu’un à qui on confie une parcelle de pouvoir, parce que ceux-là qui lui confient une parcelle de pouvoir ont le droit, une fois qu’il a exercé ce pouvoir, de dire comment il l’a exercé. C’est un principe qui doit être intangible y compris pour ceux qui ont à appliquer cette affaire-là, pour ceux qui mènent cette traque-là, eux-mêmes. Qu’ils savent, par avance, qu’ils seront eux aussi jugés, sur leur propre gestion. Et je suis trop content que de, plus en plus, les Sénégalais se posent la question : comment telle personne vit et comment elle peut mener ce train de vie, compte tenu de ce que légitimement il peut avoir, de ce que légitimement il doit recevoir pour l’effort consenti à nous diriger ? Diriger, ça se paye à sa juste valeur. Je crois que si les gens ont une vision non déformée de la réalité, ils doivent faire confiance au fait que tout bien mal acquis devrait être susceptible d’être évalué et jugé, parce que si tout le monde a cette conviction, ceux-là qui ont cette conviction savent que sur la moindre parcelle de bien mal acquis ou de position mal justifiée, ils auront à se justifier devant le peuple sénégalais qui, une fois de plus, est le juge, puisque c’est en son nom qu’on parle, qu’on agit et qu’on intervient.
A vous entendre parler, vous partagez l’avis de ceux qui disent que c’est une demande sociale…
Je pense que c’est une demande sociale très forte, d’autant plus forte que nous sommes dans un pays sous-développé, d’autant plus forte que ceux-là mêmes qui l’expriment sont ceux qui sont les plus privés, qui portent le plus lourd fardeau. Imaginez que quelqu’un se trouve dans une situation comme celle-là de bien mal acquis et qu’on puisse le certifier, le prouver, qui vous dépasse en 4X4, alors que vous rentrez chez vous, péniblement, devant rejoindre vos enfants.
Peut-être vous les verrez à 22 heures, et que vous soyez 10 fois plus fort que lui, que vous puissiez, éventuellement, l’agresser, c’est-à-dire de régler personnellement un problème qui relève de la justice. C’est une question d’équilibre.
Karim Wade est le premier à être condamné dans cette traque. Quel commentaire faites-vous de la sentence ?
Cette affaire connaît sa première phase, puisque ça se termine par une condamnation. Mais, l’intéressé a déposé un recours devant la Cour suprême, dont on ne sait pas quel verdict elle va rendre. Les sages de la Cour suprême vont examiner les éléments du procès, en général, ils examinent surtout la façon dont les choses ont été menées. Est-ce que c’est conforme au droit ? Et c’est en ce moment seulement que le vrai verdict terminal va apparaître. Donc, il faudrait que les sages se prononcent pour avoir une sentence définitive. Mais, ce qu’il y a, c’est que les uns se proclament innocents, les autres les déclare coupables. La Cour va bien nous dire, dans très peu de temps, où est la vérité, et les Sénégalais vont prendre acte de cette vérité.
Et c’est bien que, dans un pays, qui se réclame du droit, dans un pays de droit, que cette possibilité soit laissée à quelqu’un de faire un recours, et que tout se passe normalement avec des gens qui sont des hommes honorables et indépendants pour qu’ils disent, en dernier ressort, ce qu’il faut que les populations retiennent, et également les gens qui sont incriminés.
Le Sénégal a connu deux alternances. Que retenez-vous de ce que le Président Macky Sall est en train de faire ?
Le fait même de la possibilité de l’alternance est déjà une excellente chose dans nos pays, puisque nos systèmes politiques étaient d’abord verrouillés. Le fait maintenant qu’il soit possible d’aller dans les formations politiques, selon nos tempéraments, selon nos choix, c’est déjà une excellente chose. Le fait que le peuple sénégalais, en dernier ressort, soit seul à sanctionner une gestion, pour dire : «Nous ne voulons plus de tel», est un succès déjà excellent sur le plan du principe et sur le plan du système, et c’est à cela que je fais confiance. Un régime a été sanctionné, c’est le régime socialiste, et ils en ont pris acte, eux-mêmes, et ils l’ont dit dans leur Congrès. Le régime de Wade a été sanctionné, après deux mandats. Qu’on puisse dire que c’est décevant, cela dépend sous quel angle on l’apprécie. On ne peut dire que ce régime n’a rien fait. Je suis très content, quand je prends la Vdn. Les problèmes d’embouteillages sont réglés, puisqu’il a investi sur les structures, et également son vieux rêve de l’Afrique au moment du Népad, c’est une très bonne chose. Maintenant, au moment du bilan, le peuple sénégalais dit que c’est insuffisant ou ce n’est pas bon. Et c’est là le grand problème pour ce régime sur sa fin. Les hommes qui devaient servir le pays dans ce régime, ces hommes-là, ne sont plus acceptés par les Sénégalais. Et au nom de la démocratie, les Sénégalais se sont débarrassés de ce régime. Et c’est là que je me suis satisfait du comportement des Sénégalais. Chemin faisant, les Sénégalais ont beaucoup appris, parce qu’en passant d’un régime à l’autre, il y a un effet de cumul, du point de vue de la conscience politique. Ce qui fait que le régime de Macky Sall sur lequel je compte pour en tirer les leçons, devra en tirer les leçons, sachant qu’au final, s’il ne réussit pas à satisfaire les gens, mais il sera également enlevé comme les autres. Par exemple, les initiatives qui sont prises sur le plan social notamment, je les trouve excellentes. La Couverture maladie universelle, la bourse sociale, c’est des choses auxquelles les gens sont extrêmement sensibles. Quand je mesure ce qui a été fait durant son dernier voyage en Casamance, les fonds qui vont être injectés dans ce coin du pays - et j’espère que ça va continuer de manière à couvrir le pays, à parcourir le monde pour amener de quoi investir - il y a de quoi rassurer les Sénégalais. Et si on s’en sert bien de cette manne financière, je dis un problème extraordinaire va être réglé dans ce pays : le rattachement du Nord au Sud, et l’éradication de la violence qui a sévi dans la partie Sud pendant un bout de temps, qui faisait que les gens avaient peur de traverser la Casamance. Le jour où ce genre de politique réussit, les Sénégalais le reconduiront. On n'y pourra rien, parce qu’il aura réussi.
Est-ce à dire que, pour vous, le bilan à mi-mandat est positif?
Oui, plutôt positif. Parce que, d’abord, il y a un certain nombre de questions dont la politique vertueuse, c’est-à-dire faire en sorte que quelqu’un en arrivant au pouvoir dise : «Vous allez devoir me juger comme vous venez de juger le régime qui a été renversé». Il donne, en quelque sorte, le couteau avec lequel on l’égorge, si jamais il mène une politique comme celle de son prédécesseur, c’est-à-dire, je n’aime pas du tout qu’on personnalise les régimes comme ça, parce que c’est des équipes qui ont travaillé. S’il y a des défaillances sur telle ou telle question, s’il y a des manquements sur telle ou telle question, les populations vont sanctionner de toute façon. Et la sanction, nous la réclamons presque d’avance, si nous tombions dans les mêmes errements. C’est donc une garantie morale qu’on se donne dans l’avenir pour ce jugement, cela semble important. Le fait également qu’on ne voit pas clairement, de manière nette, visible, un gaspillage des ressources, cela me semble important pour un pays comme le nôtre, confronté à d’énormes problèmes. Le fait de régler, de poser, avec la ferme volonté de parvenir à régler la question de l’autosuffisance alimentaire, cela me semble capital, parce que l’arme alimentaire dans le siècle où nous entrons, l’arme alimentaire va être l'arme la plus terrible de chantage des pays du Nord envers les pays du Sud. L’arme la plus lourde pour nous qui importions massivement des choses que nous mangeons. C’est très important de vouloir mettre les gens au travail à travers une politique de formation, ça, c’est plus capital encore, parce que la question du chômage, de l’emploi, ne peut être réglée qu’à partir du moment où les gens sont qualifiés. Donc, chercher à les qualifier par de nouvelles formations certificatives, ça me semble important, parce qu’un régime qui ne s’occupe pas de sa jeunesse est perdu.
Pensez-vous qu’il y a une rupture avec ce qui se faisait?
Oui ! Il y a rupture méthodologique. D’abord, dans cette idée de reddition des comptes. Cela veut dire clairement à chaque ministre qu’on nomme : «Vous savez ce qui vous attend». Le proclamer, dès le départ, et dire pour tout ce qui a été fait dans ce pays, il va falloir que tout le monde rende compte. Il y a des gens qui poussent l’exigence jusqu’à dire que même depuis le Parti socialiste, il va falloir remonter jusque-là, pour pouvoir rendre au pays ce qui appartient au pays. Ce qui est une question de justice, ce qui fait que sur le plan éthique, c’est une nouvelle manière de faire de la politique, dira-t-on. Mais, c’est surtout une nouvelle génération. Il y a une rupture générationnelle qui est très nette, quand on voit les gens qui sont aux responsabilités, la façon dont il travaille, et moi, je crois que c’est important, et également le fait de réarticuler la politique à l’éthique en permanence. Moi, je dis que c’est une très bonne chose, parce que figurez-vous que, si les gens qui le disent ne le font pas, mais c’est leurs propres paroles qui seront retournées contre eux. Et c’est en cela, pour moi, qu’il y a une rupture. Et maintenant, dans les détails, on verra s’il y en a beaucoup, s’il y en a peu. Mais, c’est ça qui est essentiellement pour moi la rupture. Cette philosophie-là qui sous-tend l’action de ceux qui dirigent et à laquelle ils seront confrontés, de toute façon, inévitablement, parce que ce serait injuste de pouvoir poursuivre des gens en se comportant comme eux, alors qu’on a énoncé, dès le départ, que c’est logique que ce qui leur arrive d’être jugés ou d’être condamnés m’arrivera également. Et j’en pose, dès le départ, les règles. Et ça, c’était posé, en principe, depuis la campagne électorale.
UN CONTRE TOUS
Malick Gackou, Khalifa Sall, Idrissa Seck, Ibrahima Fall, Souleymane Ndéné Ndiaye, Abdoulaye Baldé... : ils pourraient affronter Macky Sall lors de la prochaine présidentielle
Très peu d'acteurs politiques ont aujourd'hui déclaré leur candidature. Il n'en manque pas pourtant qui rêvent de s'asseoir sur le fauteuil présidentiel dès 2017. Mais ils préfèrent pour le moment s'entourer de mystère, s'il en est. Enquête a essayé de dresser une liste des possibles candidats, sans prétendre toutefois à l'exhaustivité.
2017, date de l'élection présidentielle, se profile à l'horizon. Même si le président Macky Sall n'a pas encore déclaré sa candidature, il ne fait aucun doute que le patron de l'Alliance pour la république (Apr) sera le chevalier de son parti. Tout comme lui, d'autres seront également de la partie. Il y en a parmi eux qui avancent à visage découvert.
Tandis que chez d'autres probables candidats, on a soit enlevé un coin du voile, soit conservé le manteau dans son intégralité. Parmi les possibles challengers de Macky en 2017, il y a Malick Gackou. L'ancien numéro de l'Afp a été exclu du parti le vendredi 13 mars 2015 pour avoir été le chef de file de la fronde contre Moustapha Niasse.
L'homme a pris acte et affirme avoir "définitivement tourné" la page, tout en demandant à ses amis de rester dans le parti pour se battre pour les idéaux qui ont toujours été les siens. Un appel qui peut être interprété comme une stratégie pour brouiller les pistes.
D'ailleurs Gackou est resté imprécis sur sa candidature, promettant de préciser sa position le moment venu. Seulement, la fermeté avec laquelle il s'est opposé à Moustapha Niasse, son ex-mentor, ne l'aide pas à entretenir le flou. Il s'y ajoute que certains frondeurs l'avaient désigné comme leur candidat.
Son handicap est qu'il risque d'être identifié comme le candidat de la banlieue en général, les lutteurs en particulier. Gackou est considéré comme connu uniquement à Guédiawaye. Or, une élection présidentielle est un rendez-vous entre un homme et son peuple (toutes catégories confondues). Il lui reste donc à surmonter ce handicap, sachant qu'il ne peut compter sur l'Afp. Ou du moins sur l'appareil politique du parti.
L'autre possible adversaire de Macky Sall a pour nom Khalifa Sall. Le maire de Dakar, dopé par sa brillante victoire sur l'ancienne première ministre Aminata Touré lors des locales de juin 2014, se positionne de plus en plus. Même s'il parvient toujours à garder le voile, il n'en reste pas moins que sa candidature ne serait une surprise pour personne.
D'ailleurs, il a décidé, dit-on, de participer à la compétition de 2017. Pour l'instant, il travaille à arrondir les angles avec Ousmane Tanor Dieng pour être le candidat du Parti socialiste (Ps), même si le soutien n'est pas encore définitivement acquis. Comme Gackou, il lui est objecté de n'être populaire qu'à Dakar, méconnu du reste à l'intérieur du pays.
Cependant, si jamais il est adoubé par sa formation, il pourrait bien surmonter ce handicap, car en parti historique, le Ps est bien implanté à travers tout le territoire national. Est-ce pour cette raison que le pouvoir porte une attention sur lui ? En tout cas, de tous les possibles concurrents, il est le plus surveillé.
Jules Ndéné, Baldé, Aïda Mbodj, Idy et les autres
En dehors de Gackou et du maire de Dakar, il y a le candidat du Pds, le grand mystère pour le moment. Le parti de Wade a misé sur le fils de celui-ci. Or, si par prudence on peut mettre un gros point d'interrogation sur la candidature de Karim Wade, il ne serait pas exagéré d'encadrer sa participation par l'adverbe de négation "ne...pas".
Les Libéraux le savent si bien qu'ils mettent sur la table deux hypothèses : le boycott ou le sabotage de l'élection. Pourtant, le Pds a pas mal de choix possibles. Le dernier Premier ministre sous Wade, Souleymane Ndéné Ndiaye, s'est déclaré candidat. Aïda Mbodji la mairesse de Bambey, également responsable dans le parti, a été investie par sa base.
Mais pour qui connaît la méthode de Wade, ces deux qui ont refusé de cautionner "la mascarade" (Ndéné dixit) n'ont aucune chance d'être soutenus. Encore moins le mammouth de Ziguinchor Abdoulaye Baldé qui a quitté le Pds pour créer sa propre formation. Mais encore faudrait-il qu'il trouve d'abord une solution à l'équation judiciaire dont il devra faire face. En fait, des indiscrétions le placent comme étant le prochain sur la liste de la Crei, après Karim. Surtout qu'il a été déjà placé sous contrôle judiciaire après sa mise en demeure.
D'autres ambitions ne faisant pas l'ombre d'un doute sont celle d'Idrissa Seck, le premier à avoir quitté la coalition présidentielle. En 2017, il est évident qu'il sera le champion de Rewmi. La candidature d'Ibrahima Fall est aussi presque acquise. L'ancien candidat en 2012 est dans une position de "taxaw tem".
Comme Idy, il a lui aussi claqué la porte de la coalition dès les premières heures. En outre, il y a un groupe composé de Me Mame Adama Guèye, Jean Charles Tall et autres. Eux aussi travaillent à trouver un candidat au sein de mouvement. Il n'est pas exclu pour autant qu'il y ait des postulants significatifs mais inattendus. Il pourrait bien également y avoir des candidatures de divertissement, à l'image de celle de Diouma Dieng en 2012.
«CE BASCULEMENT EST ARRIVE A SON HEURE..., LE MEDIA CENTER S’EST PREPARE DEPUIS LONGTEMPS»
KHAR FALL RESPONSABLE DE LA FORMATION AU MEDIA CENTRE SUR LE PASSAGE DE L’ANALOGIE AU NUMERIQUE
Le responsable du centre de formation Media Centre de Dakar M. Khar Fall, s’est prononcé sur la question du passage du système analogique au numérique qui va bientôt s’effectuer au Sénégal. Selon le responsable de la formation au niveau de ce centre de formation qui estime que le changement est arrivé à son heure, il fallait s’y attendre car, explique-t-il, «c’est le monde qui évolue». Pour cette raison «le Media Center s’est préparé en conséquence».
Le chargé de la formation du Media Centre s’est prononcé sur la question du passage de l’analogie au numérique. Il soutient que son centre s’y est préparé. Le matériel utilisé dans son centre, dit-il, est numérique. Il indique dans ce sens que depuis plus de 12ans, Media Center ne travaille qu’avec du matériel digital. Dit-il « nos caméras, périphériques, bandes de montage entre autres, sont tous du numériques». Même s’il arrive que de temps en temps on utilise l’analogie avec les tables de sons et autres matériels.
Selon M. Fall «ce basculement est arrivé à son heure car il devrait être fait depuis bien longtemps. Dans la mesure où il présente beaucoup davantage pour les consommateurs qui auront la possibilité dés lors de choisir à leur guise leurs programmes».
«Le numérique plus avantageux que l’analogie»
Du point de vu du coût aussi l’ancien membre de la chaine de télévision nationale (RTS) pense que c’est plus avantageux.
«Il y’ un avantage avec le système numérique étant donné que sur le plan de la diffusion avec l’analogie, un seul canal servait à faire passer un seul signal alors qu’aujourd’hui ce même canal peut faire passer entre 12 jusqu’à 20 signaux. C’est un avantage extraordinaire».
Le responsable de Media Centre laisse entendre qu’il se pose un problème de manque de communication sur la question. Dans ce cadre, il prône une meilleure sensibilisation des populations : «beaucoup de personnes ne maîtrisent pas les enjeux de ce passage» affirme-t-il. Avant d’ajouter que la modification ne se situe pas seulement au niveau de la formation : «C’est l’ère d’une nouvelle technologie qu’on va vivre», informe M. Fall.
Il affirme que 80% des ménages ont du matériel analogique. Une situation qui progresse de jour avec les tonnes de matériels en provenance de la France et d’autres vendus à bas prix. Une situation qui, dit-il, doit être revue par l’Etat. «Le Sénégal devrait arrêter d’acquérir ce type de matériels. Dans ce centre on fait des sensibilisations à l’endroit des étudiants pour qu’ils puissent attirer l’attention de leurs parents, qui sont les principaux acheteurs, à ne plus mettre leur argent sur ces types de matériels qui bientôt vont être dépassés pour céder la place aux écrans plats et autres matériel », soutient-il.
«L’Etat doit miser sur la formation des formateurs»
Selon lui, il faudrait que les étudiants qui rentreront demain au niveau des chaines de télévisions, aient déjà un nouvel état d’esprit du numérique pour pouvoir bien s’adapter aux réalités. Parce qu’ils se chargeront demain de la production et de la fabrication. Ainsi l’ancien travailleur de la RTS pense aussi qu’il faudrait que les écoles de formation puissent prévenir par rapport à cette nouvelle expertise pour pouvoir préparer les futurs étudiants. Et dans ce sens, il suggère que l’Etat doit miser sur la formation des formateurs.
«Je remercie le président du CNRA Babacar Touré. Il est très prévoyant. Depuis longtemps, il nous a impliqués et préparés à ce changement en nous convoquant à des réunions, des séminaires d’information. Je lui propose néanmoins d’organiser avec les différents organes de presse de la place, des débats. Ce qui fera que chaque séance servira à expliquer un aspect du numérique et ce, pour mieux imprégner la société dont la grande majorité ne saisit pas la question» a-t-il proposé.
Il invite aussi les chaines de télévisions qui faisaient de l’amalgame dans leur manière de travailler à «opérer le basculement vers le numérique. Même si cher , car il faut un prix à tout».
VENDEURS ET CONSOMMATEURS ENTRE IGNORANCE ET CRAINTES
A un peu plus de deux mois du passage de l’analogie au numérique, des conteneurs remplis de téléviseurs réformés venant d’Europe continuent d’inonder Dakar. Ils sont échangés à des prix à la limite dérisoires. Certains des vendeurs et consommateurs ignorent que ces matériels ne seront plus d’actualité, tandis que d’autres s’y lancent à leurs risques et périls. Seules les grandes surfaces vendent des téléviseurs répondant aux normes en perspective du «tout numérique».
Niarry Tally, Bourguiba, Bopp et Hlm, ces quartiers sont considérés comme de véritables dépotoirs de matériels électroménagers, surtout venant de l’étranger. Il ne se passe pas une semaine sans qu’un conteneur ne soit déchargé quelque part. Dans ce bazar, on y retrouve des téléviseurs non adaptés au numérique. Ce matériel vendu à petit prix, attire des clients qui viennent s’en procurer à cœur joie. A deux mois du passage de l’analogique au numérique, certains font des affaires avec ces marchandises réformées, pour l’essentiel.
A Niarry Tally, ces postes téléviseurs sont trouvables un peu partout. Les prix varient entre 50.000 et 10.000 F Cfa. «Avoir un téléviseur n’est plus un luxe», dira le vendeur. Et de poursuivre que «les affaires, malgré la baisse des prix, ne marchent pas bien. C’est uniquement pendant les manifestations sportives comme la Can (Coupe d’Afrique des nations-ndlr), que les gens viennent en masse acheter des téléviseurs.» Interrogé sur le fait que ces téléviseurs ne seront plus aptes d’ici deux mois environ, avec le passage au numérique, Moustapha Sall répond: «je ne suis pas au courant. Je ne suis qu’un vendeur qui met à exécution les ordres de son patron.» Cette réponse est la même servie par certains vendeurs rencontrés à Bopp et Bourguiba.
Par contre, d’autres connaissent bien cette donne, mais ne croient pas à la disparition totale de ces matériels. «C’est vrai que nous allons être dans l’ère du numérique, mais je ne pense pas que ces téléviseurs puissent disparaitre. Les familles gardent ces modèles dits anciens parce qu’ils n’ont pas les moyens de se payer des écrans plats. Alors, l’Etat devra-t-il leur privé d’images? Si c’est le cas, ca sera chaotique», fait remarquer Amath Dieng, rencontré à Bopp.
Chez les consommateurs, le doute et l’ignorance planent dans les esprits. Ceux qui s’en procurent ne sont pas nantis, ils achètent ces téléviseurs juste pour satisfaire leurs progénitures, tout en gardant l’espoir qu’ils ne vont pas les perdre avec le numérique. Un sentiment partagé par ce père de famille venu aux Hlm acheter un téléviseur. «Je veux faire plaisir à ma femme et aux enfants. Même avec ces prix dans les bazars, il n’est pas évident d’avoir à un bon téléviseur, de qualité et à bon prix. J’ai acheté ce poste à 40.000 F Cfa, mais le vendeur a accepté de me le faire payer en tranche. Et je pense que c’est une bonne partie», explique Marion Mouligan rencontré au Hlm.
Concernant la disparition de ces téléviseurs analogiques au profil de ceux numériques, notamment les écrans plats, l’homme déclare que « c’est impossible, peut-être dans le long terme, oui. L’Afrique n’est pas développée comme l’Europe pour suivre la marche forcée du monde». M. Mouligan est le seul consommateur qu’on a pu approcher. Dans les autres sites, les vendeurs on refusé que l’on s’approche de leurs clients de peur de «gâter» leur commerce. Au niveau des grandes surfaces comme les boutiques agréées Samsung, LG, chez les marocains, etc. tout est à l’ère du numérique. Aucun téléviseur analogique n’est exposé dans les rayons.
Le règne de l’analogie prend fin le 17 juin 2015, place au tout numérique. Au Sénégal, à un peu plus de deux mois du basculement, les populations ne se sentent même pas concernées par un sujet aussi important qui, pourtant, les interpelle directement. Elles n’ont aucune idée de ce qui les attend et ne croient pas, du moins pour le moment, à l’effectivité de l’application de cette directive de l’UIT qui risque de faire perdre l’image à beaucoup de ménages disposant encore de téléviseurs analogiques.
A moins de trois mois de la date butoir pour le basculement vers le «tout numérique» le 17 juin 2015, la population Sénégalaise n’est pas suffisamment préparée à cette perspective, même si l’Etat se dit prêt. Les quelques quartiers de Dakar, notamment Grand Yoff, Sicap, Niarry Tally, Ben Tally, que nous avons visités nous édifient à cet effet. Dans la majorité des maisons où nous sommes rendus, les habitants n’ont aucune idée de ce qui peut leur arriver à partir du 17 juin. Non seulement, ils n’ont aucune information à ce sujet, mais ignorent que les téléviseurs analogiques qu’ils utilisent jusque-ici vont perdre l’image.
Allez leur parler de passage vers le numérique, ils vous rétorqueront: «c’est quoi le tout numérique ? A quoi rime le passage de l’analogie au numérique ?», demandent certains. Après explication, ces populations lancent: «notre préoccupation, c’est d’abord le manger. Nous n’avons pas de quoi nous payer un décodeur, le cas échéant». D’autres diront que c’est à l’Etat de leur trouver des décodeurs pour éviter le scénario des écrans noirs. «Nous refusons catégoriquement d’en acheter, car c’est à l’Etat de le faire à notre place. Nous payons nos impôts convenablement», confient-ils.
Ce genre de raisonnement en dit long sur le niveau d’information de la population qui ne sait pas véritablement de quoi il s’agit. On n’aurait dit qu’il y a une sorte de fossé entre gouvernants et gouvernés, la communication n’est pas passée. Les masses sont toujours dans l’ignorance en ce qui concerne cette nouvelle ère du numérique. «Il fallait au moins ouvrir une vaste campagne de publicité pour informer et sensibiliser les Sénégalais sur les tenants et aboutissants de ce basculement. Mais il n’en est rien», ont suggéré d’aucuns, dans la foulée.
Le Secrétaire d’Etat à la communication M. Yaham Mbaye qui présidait la 8ème session ordinaire de l’Union africain de la radiodiffusion (UAR) le 14 mars dernier sur l’avenir de la radiodiffusion en Afrique, avait certifié qu’au soir du 17 juin prochain, le passage de l’analogie au numérique sera opérée sur tout le territoire national. Car, le gouvernement a pris toutes les dispositions nécessaires pour que la transition soit effective à ce jour. Le président de l’UAR, Khelladi Tewfik, en ce qui le concerne, avait dit que pour survivre et éviter que les chaines de télévision étrangères nous envahissent, nous sommes obligés de fournir des efforts pour entrer dans l’ère du numérique.
Le basculement vers le numérique attendu au soir du 17 juin 2015 va chambouler le fonctionnement des industries des médias. Cette révolution de la société d’information dont les autorités rassurent être prêtes pour le passage, permettra aux téléspectateurs d’avoir une télévision de rattrapage (possibilité d’enregistrer un émission). Les enjeux sont majeurs dans la mesure où les chaines de télévision s’occuperont que de la diffusion avec la numérisation obligatoire. La nouvelle infrastructure mise en place s’occupera non seulement du transport du signal, mais aussi de la diffusion et de l’archivage. Par conséquent, les opérateurs concentreront leurs efforts désormais sur l’édition et la production. Pour Mamadou Baal, membre du Comité national de Pilotage de la Transition de l’Analogique vers le Numérique (Contan), l’heure est venue pour les télédiffuseurs de s’ouvrir aux producteurs externes pour valoriser leurs offres de contenus. D’où, indique-t-il, la nécessité de l’accompagnement de l’Etat pour la promotion des productions locales et l’encadrement des contenus médiatiques.
Le 17 juin, date butoir pour le passage vers le numérique, arrive à grandes enjambées. Aux lendemains du basculement, le numérique pour tous s’impose, et les opérateurs de télévisions n’ont pas le droit de rater ce rendez-vous avec l’histoire. Ils se doivent d’être prêts pour continuer évidemment à offrir des programmes aux téléspectateurs. Les enjeux restent majeurs dans la mesure où les chaînes de télévisions n’ayant plus de fréquences, s’occuperont que de la diffusion. Avec la numérisation obligatoire, la chaîne de valeurs est cassée. La nouvelle infrastructure mise en place s’occupera du transport du signal, la diffusion et l’archivage. Les opérateurs concentreront leurs efforts désormais sur l’édition et la production. Pour Mamadou Baal, membre du Comité national de Pilotage de la Transition de l’Analogique vers le Numérique (Contan), l’heure est venue pour les télédiffuseurs de s’ouvrir aux producteurs externes pour valoriser leurs offres de contenus.
Soutenant la nécessité d’une mise sur pied d’une plateforme qui puisse amener les éditeurs à accepter de coexister avec les producteurs, l’ancien directeur de la télévision sénégalaise (Rts) souligne que « les éditeurs ne doivent pas être dans une situation où ils doivent faire tout et tout seul. Il faut s’attaquer à la chaîne de valeurs ».
« Faire en sorte que les opérateurs acceptent de se reposer plus sur les producteurs extérieurs qui en faisaient très peu. Tf1 ou Canal font appel à des sociétés privées. Canal n’a pas de cameras pour les matchs de football. Il fait appel à une société de production pour filmer les matchs en direct», a-t-il précisé.
Au-delà de la cassure des chaînes de valeurs, les opérateurs télévisions engageront la bataille des contenus pour espérer avoir le maximum de téléspectateurs et engranger des publicités. Si les promoteurs de télévisions n’auront pas de problèmes majeurs pour le transport du signal, la diffusion et l’archivage en respectant les cahiers de charges définis par l’autorité compétente, toujours est-il que la concurrence deviendra beaucoup plus rude.
« C’est évident que les contenus feront la différence. A partir de ce moment pour sortir la tête de l’eau, notamment bénéficier des publicités, il faut que les téléspectateurs vous regardent. Pour cela, il faut un programme de qualité », a fait savoir M. Baal.
L’Etat providence
Si le basculement interpelle les maisons de productions dans la chaîne de valeurs, il n’en demeure pas moins que l’Etat a une part à jouer. En plus de son rôle d’accompagnement du passage avec la subvention des décodeurs (Seto box), les autorités devraient inciter les privés à se lancer dans la production de qualité de masses, des programmes instructifs, pédagogiques ou éducatifs. Pour Mamadou Baal, « des contenus utiles qui reflètent ce qui les sénégalais voudraient voir. Le marché va se réguler de lui-même. Les meilleurs contenus seront regardés sur les meilleures télévisions. Les annonceurs sauront orienter leurs publicités ».
Le basculement vers le numérique a pour avantage aussi d’archiver tous les contenus télévisuels. La nouvelle infrastructure prendra en charge cette vieille question de l’archivage qui est « un rôle régalien ». Pour Baal, « l’Etat doit archiver les émissions pour que dans 50 ans on puisse retrouver les archives. Aucune chaîne de télévision ne l’acceptera de le faire parce que cela coûte des millions. L’Etat archive pour la postérité que les télévisions le veuillent ou pas. L’Etat ne vendra pas les archives ».
Encadrer les contenus
L’encadrement des contenus médiatiques s’avère un exercice périlleux au regard des convergences technologiques et du basculement. Le Contan entend ainsi procéder à l’élaboration de critères et de conditions de création, d’exploitation et de diffusion de contenus audiovisuels et à la révision des cahiers des charges applicables aux éditeurs de programmes audiovisuels. Ce qui, selon l’ancien patron de la télévision nationale, permettra «aux chaînes de télévision de ne pas produire des émissions soft. Le cahier de charges sera établi pour la protection des téléspectateurs suivant les réalités socio-culturelles. Il est question aussi de mettre de l’ordre dans la maison ».
LES REPARATEURS DE POSTES TELEVISEURS «FORCENT» LE PASSAGE
Le métier de réparateur télé est depuis bien longtemps un travail qui fait le bonheur de ceux qui s’y adonnent. Avec l’avènement du numérique, ce secteur continuera à offrir les mêmes services pour le bonheur des clients au revenus souvent modestes.
Tous les réparateurs de télé rencontrés affirment sans exception que « le numérique n’a rien à voir avec la réparation du poste de télé ». Ils nous certifient que leur travail n’est aucunement menacé et ne va certainement pas disparaitre, car il consiste à réparer le matériel qui est tombé en panne et ce matériel n’est pas numérique : «C’est une question de signal d’émetteur à récepteur, nous sommes entrés dans l’ère du numérique depuis longtemps sans en être totalement conscient. C’est juste une question de branchement et les décodeurs règlent ce problème. D’ailleurs, tous les écrans plats ne sont pas numériques, mais c’est tous les postes de télé qui sont équipés de TNT (télévision numérique terrestre), un dispositif qui leur vaut cette appellation de télé numérique. Par contre les antennes à sonnette vont disparaitre car, ils n’auront plus d’utilité ce qui est loin d’être le cas des paraboles », explique l’un d’entre eux.
Ils disent donc n’avoir pas besoin de s’équiper d’avantage pour être au diapason, seulement que le numérique est beaucoup plus bénéfique que l’analogique : «nous aurons beaucoup plus de chaînes de télé avec des images claires partout sans interférences, ce qui n’est pas le cas de l’analogique qui aujourd’hui est saturée »
Dans la foulée, ils confient qu’ils ne s’inquiètent guère par rapport au service après-vente, il est vrai que la main d’œuvre est gratuite chez eux mais, il arrive très souvent que les distributeurs eux-mêmes n’arrivent pas réparer le matériel en question qui, en fin de compte, atterrit toujours chez eux. Nous avons constaté beaucoup d’écrans plats en réparation.
''POUR AU MOINS UNE DÉCENNIE, NOUS ALLONS VIVRE CES TARES''
MOHAMED MOUSTAPHA DIAGNE, DIRECTEUR DE LA FORMATION ET DE LA COMMUNICATION DU MINISTÈRE DE L’EDUCATION
Dans cet entretien, le directeur de la Formation et de la communication du ministère de l’Education, Mohamed Moustapha Diagne, apporte des éclairages sur les différents problèmes qui plombent le système éducatif sénégalais malgré les nombreuses réformes mises en place.
Pour améliorer la qualité de l’enseignement au Sénégal, le gouvernement a mis en place, il y a deux ans, le Paquet. Où en êtes-vous avec la mise en œuvre de ce programme ?
Après l’évaluation du Pdef, le gouvernement avait jugé nécessaire de mettre en place, un nouveau dispositif pour pallier les insuffisances du Pdef. A côté du Paquet, il y a le Paqueb qui s’occupe de l’éducation de base, ce qu’on appelle le cycle fondamental qui va de 6 à 10 ans. Chaque citoyen sénégalais doit rester à l’école pendant 10 ans pour enrayer tous les risques inhérents à l’ignorance.
Pour le Paqueb, nous avons prévu la construction de 200 écoles, aujourd’hui il y a des lycées techniques, un lycée des jeunes filles qu’on est en train de construire au niveau de Diourbel. Il y a tout un paquet d’infrastructures que l’Etat du Sénégal est en train de mettre en place pour débarrasser du système, ce qu’on appelle les abris provisoires qui posent énormément de problèmes.
A côté de cela, l’enseignant est le premier intra de qualité parce que si nous n’avons pas un bon enseignant, il serait extrêmement difficile voire aléatoire de parler de la qualité des enseignements. C’est pourquoi, par exemple, au niveau de la direction de la Formation et de la Communication, nous avons décidé de nous attaquer à ce problème-là. Vous avez suivi le scandale, (la fraude à l’examen des élèves-maîtres) aujourd’hui cet examen est devenu très sérieux puisqu’en amont comme en aval, il y a un contrôle qualité qui s’opère.
Le ministre a introduit une épreuve éliminatoire, une dictée qui permet de sélectionner les meilleurs parce que nous enseignons en français et nous enseignons le français. Par conséquent, il faut que nous ayons des enseignants qui ont un niveau de langue française acceptable. A côté de cela, aussi bien dans la formation initiale des enseignants que la formation continue, l’enseignant doit être performant, toutes les années il doit se former.
Il y a un dispositif de formation continue, articulé à la formation initiale que nous sommes en train de mettre en œuvre ici au niveau de la direction. Pour cela, il y a un programme qui envisage pour cette année-ci de former 500 maîtres dans les régions de Kaolack et de Fatick. Avec ce projet-là, nous allons doter les enseignants de tablettes numériques et on va octroyer une formation à distance.
A côté de ces programmes de formation des enseignants, il y a d’autres programmes comme Elan (Ecole et langues nationales) (...). Il y a par contre des facteurs exogènes que nous ne maîtrisons pas, notamment les grèves cycliques qui ont une incidence négative sur le système. Il est important de noter que malheureusement, le ministère de l’Education nationale est très exposé parce que la gestion de l’enseignant est transversale.
Nous sommes le ministère utilisateur, le ministère de la Fonction publique, l’employeur, et le ministère des Finances, le payeur. Il faut que nous (Etat et enseignants) comprenions définitivement que l’enjeu de cette école, c’est l’avenir du Sénégal.
Personne n’a intérêt à sacrifier nos enfants à travers le sabotage de l’école publique. Nous reconnaissons qu’il y a des dossiers qui s’entassent au niveau de la Fonction publique ou au niveau du ministère des Finances pour la mise en solde. Et ce n’est pas normal. Je sais qu’il y a une opération coup de poing qui est en train d’être menée à la Fonction publique pour évacuer le maximum de dossiers.
Je considère que l’Etat doit faire beaucoup d’efforts, ce n’est pas normal qu’un enseignant reste dix ans sans être reclassé, sans avancer. Par contre, sur certaines revendications d’indemnités, il faut qu’on comprenne que nous avons un pays aux disponibilités financières limitées. Certaines revendications sont démesurées parce que même si l’Etat les accepte, il ne pourra pas les satisfaire.
Il n’y a pas de nouvelles revendications. Les enseignants demandent juste l’application des accords signés avec l’Etat il y a un an? Et les autorités, avant la signature de ce protocole, disaient qu’elles ne signeraient que des accords réalistes et réalisables.
En fait le point d’achoppement, c’est la validation au 2/3 pour les années de volontariat et contractualisation. En ce qui concerne les fonctionnaires et les décisionnaires, c’est réglé. Nous sommes à 28 milliards. Ce n’est pas soutenable mais l’Etat a accepté cette validation. Chaque partie devrait faire une concession.
Il y a quelques années, il y avait des retards de salaires, ces questions-là ont été évacuées. Aujourd’hui, il y a la mensualisation du salaire des vacataires, ça c’est un acquis. Comme les problèmes de salaires ont été réglés, sur les questions d’indemnités, on ne devait pas y accorder trop de temps pour sacrifier l’école.
Au-delà des indemnités, il y a aussi la question de la formation...
Sur la formation, ils posent le problème des titulaires de diplômes spéciaux. Ces questions-là sont traitées, elles sont gérées entre l’Education nationale et l’Enseignement supérieur, notamment la Fastef. Ce sont des questions qui sont en train d’être prises en charge et je suis sûr qu’avant la fin de l’année, elles seront évacuées. Il y a aussi la question de la formation des instituteurs adjoints : nous sommes en train de travailler avec les Inspections d’éducation et de formation (Ief) pour procéder à une collecte des données, et ces instituteurs-là seront formés avant la fin de l’année.
Si aujourd’hui les mouvements de grève sont suivis, c’est surtout à cause des dossiers qui s’entassent au niveau de la Fonction publique, il ne s’agit pas seulement de la question de la formation. Pour ce qui est du ministère de l’Education nationale, il n’y a aucun dossier en instance là-bas, tous les dossiers se trouvent entre la Fonction publique et le ministère des Finances. Le ministère de la Fonction publique est en train de dérouler l’opération coup de poing. Les conditions sont extrêmement difficiles parce qu’i n’y a pas suffisamment de personnel.
En qui concerne le Paquet et le Paqueb, quels sont les actes concrets qui ont été posés avec ces programmes ?
En termes d’infrastructures, nous sommes en train de construire des écoles. Il y a un projet qui concerne la construction de collège au niveau de Dakar, le comité de pilotage s’est déjà réuni. Pour Dakar, nous allons refaire des collèges et en construire de nouveaux pour que les collèges existants puissent souffler.
Partout dans le pays, le Paquet est en train de construire des écoles. Les autres données sont les programmes pour l’amélioration de la qualité des enseignements, notamment la formation des enseignants et l’accompagnement des élèves.
Cette année, le gouvernement canadien a investi des milliards de F Cfa dans l’achat de livres de lecture et de mathématiques au niveau du Sénégal. Il y aussi les cantines parce que il y a des difficultés sociales qui entravent la qualité des enseignements, des enfants échouent parce qu’ils sont issus de milieux défavorisés.
Effectifs pléthoriques, abris provisoires, non-respect du ratio inspecteurs-enseignants et quantum horaire ne constituent-ils les obstacles pour prétendre aller vers l’amélioration de la qualité des enseignements ?
C’est lier à la nature du pays que nous avons. Si vous voyagez dans la sous-région, le Sénégal est en avance sur énormément de pays. On est dans un processus, c’est un système qu’on est en train de parfaire et nous n’avons pas encore les moyens de nos politiques. Tout ça se fait avec des moyens financiers énormes.
Si vous voulez une école vraiment performante, une école de dernière génération, il faut mettre les moyens. Malheureusement aujourd’hui, 80 % du budget de l’Education nationale vont au fonctionnement.
Avec cette obligation d’études durant 10 ans, on voit des enfants qui vont au collège après 6 ans d’études sans pouvoir lire ni écrire ?
C’est vrai ! On a déjà parlé du niveau de recrutement, on a eu à procéder à des recrutements qui ne répondaient à aucune norme de qualité, qu’est-ce que vous voulez ? Le ministre a montré des copies de gens qui ont été détectés lors de la fraude, ce sont des enseignants de ce genre qui passaient dans le système. Ces enseignants sont encore dans le système et tout le monde le sait. Moi je suis pour une réforme du système, pour cela il faut qu’on ait le courage. Parce que nous avons des enseignants dans le système éducatif qui n’ont rien à faire dans le système.
Si on ne peut pas les reformater, il faut les sortir du système et les affecter ailleurs. Un enseignant doit avoir un excellent niveau parce que quand vous intervenez sur les enfants, vous intervenez sur un produit qui va jouer sur l’avenir du pays. Les précédents gouvernements ont procédé à des recrutements qui nous rattrapent aujourd’hui.
C’est un passif que nous avons trouvé ici et sur lequel nous sommes en train de trouver des palliatifs et cela va demander du temps. Nous acceptons que ce sont les tares de la politique qui ont infecté le système. Je pense que pour au moins une décennie, nous allons vivre ces tares-là.
Autre problème, c’est le manque d’encadrement dont souffrent les enseignants avec notamment le non-respect du ratio enseignants inspecteurs, que comptez-vous faire pour régler ce problème ?
Il y a eu une longue grève des inspecteurs, le problème c’est le problème de mobilité, les inspecteurs qui sont des cadres du système ne sont même pas véhiculés. Quand vous êtes inspecteur dans la brousse, si vous n’avez pas de Pickup, vous ne pouvez pas aller loin. Il y a eu des négociations entre le gouvernement et les inspecteurs, aujourd’hui dans les accords, la question de la mobilité doit être réglée, la question des indemnités aussi.
Ce que nous demandons aux inspecteurs, c’est que quand ces questions seront réglées, il faudra procéder à des opérations coup de poing, à la limite c’est de l’injustice que certains enseignants vivent. Des enseignants courent après une simple visite de l’inspecteur pour avancer, en termes de plan de carrière, c’est deux ans ou trois ans, ce n’est pas normal, c’est une injustice sociale.
Les syndicalistes ont aussi déploré la réduction du budget de fonctionnement des écoles, qu’est-ce qui explique cela ?
Les écoles ont deux budgets, il y a des dotations que les établissements reçoivent de l’Etat, ce sont ces budgets qui ont subi des ponctions, c’est à tous les niveaux du gouvernement, au niveau central comme au niveau décentralisé. Pourquoi ?
Parce que le Sénégal n’avait pas un budget réaliste, parce que si l’Etat nous accorde un budget d’un million de F Cfa et qu’il ne peut pas recouvrer un million de F Cfa, ce n’est pas la peine, on est revenu à des budgets réalistes.
Les collèges reçoivent aussi les cotisations des parents d’élèves, le ministère des Finances leur a reproché cela, parce que ces budgets collectés à partir de la cotisation des parents d’élèves n’étaient pas déclarés au niveau du ministère des Finances alors que ce sont des ressources additionnelles. Le ministère des Finances a procédé à ces ponctions-là. Dans tous les cas, ce qu’il faut dire c’est que sur cette affaire-là, l’Etat ne pouvait pas continuer à mettre des budgets surréalistes.
Il y a ce qu’on appelle les budgets prévisionnels et les budgets exécutés, entre les deux, il y a la collecte des impôts, des taxes, c’est pourquoi l’Etat a dit nous allons faire avec ce que nous avons. Il y a aussi la question de l’indemnité, l’Etat a procédé à des mesures de rationalisation.
Par exemple, pour les magistrats qui habitaient des maisons de fonction, l’Etat payait un million cinq cent mille F Cfa (1 500 000), en leur accordant 500 000 F d’indemnités, l’Etat a fait des économies énormes. Evidemment, il y a derrière une étude sur le système de rémunération et de motivation. Je suis d’accord avec le principe à corps et grade égal salaire égal.