Ils sont cinq artistes du Sénégal, du Togo, de l’Inde et de l’Espagne à réunir leurs œuvres dans une exposition en Off de la Biennale. «And Défar», «Faire humanité́ ensemble», est une proposition du Dr Babacar Mbaye Diop secondé par Bintou Camara.
Baye Seydi Thiam pose fièrement à côté de son œuvre, un cheval en fer réalisé en recyclant et en récupérant de la ferraille. Avant d’arriver dans cette cour d’un hôtel du Plateau ou se tient l’exposition «And D́efar»/«Faire humanit́é ensemble», l’œuvre d’art a du voyager depuis Sokone d’abord sur le toit de «l’horaire de Sokone», puis dans «taxi-bagages».
Autodidacte, Baye Seydi, qui a quitté la forge familiale pour retourner à ses racines sokonoises, est d’autant plus fier de son œuvre qu’il a dû vaincre les préjugés négatifs que l’on nourrit parfois sur la récupération. A l’écoute de ces innombrables objets jetés ou abandonnés, Baye Seydi leur redonne vie, les polie et les recycle. Des chutes de fer, des bougies de véhicules, sont autant de matériaux qu’il transforme pour en faire des œuvres d’art.
Pour cette exposition en Off de la Biennale mise en place par le Dr Babacar Mbaye Diop et Bintou Camara, le maître-mot est Humanité. A côté des pièces en fer du jeune artiste de Sokone, trônent les toiles du prodige Abdoulaye Ka.
Inscrit au In de la Biennale, l’artiste, qui vient d’être couronné du Prix Ousmane Sow du droit de suite, inscrit son œuvre dans l’interculturalité. «Avant, je faisais de la peinture abstraite. Quand mon premier enfant est venu au monde, comme je vis seul avec ma femme et que nous travaillons tous les deux, il fallait que je m’occupe aussi de l’enfant. Mais comme je ne pouvais pas aussi rester sans rien faire, c’est ce qui m’a poussé à trouver un moyen de m’exprimer.»
La technique s’impose toute seule et Laye Ka utilise des petits morceaux de papier sur lesquels il dessine des esquisses qui formeront ensuite une mosaïque à l’esthétique particulière. Dans cette exposition, Laye Ka présente des tableaux fait à partir d’un stylo à bille. Il utilise également des matières du quotidien comme le café ou le bleu à linge. De Kolda où il vit, il se plaît à tracer le quotidien des habitants.
Vivant aux Etats-Unis, le Togolo-Aḿericain, Bamazi Tallé,transcende le traumatisme de la perte de son enfant en représentant une série de calebasses sur des toiles aux énergies puissantes. «Mes œuvres ont des ombres mais pas de couleurs et c’est ça la véritable humanité», dit-il. L’Indien Amiya Nimai Dhara et l’Espagnol Juan Carlos Robles Florido ont également choisi les cimaises de l’hôtel Rysara pour y poser leurs toiles.
DES CLICHÉS POUR SENSIBILISER SUR LA CORRUPTION
La Plateforme d’activisme artistique contre la corruption (Paac), marque sa présence dans le cadre des Off de la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar
La Plateforme d’activisme artistique contre la corruption (Paac), marque sa présence dans le cadre des Off de la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar. Dans l’exposition «La corruption» suivie de graffiti à l’Ecole supérieure de journalisme, des métiers de l’internet et de la communication (Ejicom), on peut voir une vingtaine d’œuvres du photographe et réalisateur sénégalais, Gustave Fall, qui montrent en images les désastres de la corruption sur les personnes mais aussi sur la société.
Modeste sur son travail et sensible au sujet qu’il traite, l’exposant, le photographe et vidéaste du projet Paac, Gustave Fall, est en train de lutter contre la corruption. Avec une mise en scène qui est très visuellement impactante, Gustave Fall fait contempler aux visiteurs, un sujet banal qu’est la corruption et ceci, dans le cadre de cette exposition des Off de la Biennale.
De façon très artistique, plus d’une vingtaine de photos y interpellent toutes les consciences sur les désastres de la corruption sur les personnes, mais aussi sur la société en générale afin de stimuler l’engagement des populations sur ces questions et renforcer la sensibilisation. Accrochés sur les cimaises de la salle de l’Ejicom, des portraits sur fond noire, où il y a de l’argent taché de sang, des chaînes, une corde, mettent en scène le combat que mènent les personnes engagées contre la corruption face aux personnes sujettes à la corruption.
Sur d’autres photos accrochées juste à l’entrée de la salle, l’on aperçoit en portrait, un homme assis sur un canapé au milieu des ordures. Une façon pour l’exposant de montrer l’environnement des corrompus qui est tout le contraire de leur vécu, en oubliant la misère sociale qui les entoure. Les chaînes et les cordes ont suscité une certaine réaction chez les visiteurs, au point d’amener Gustave Fall à comparer cette mise en scène aux Ong qui luttent contre la corruption. Utilisant son œil de photographe, Gustave Fall souligne que la corruption est partout. «Les gens qui sont dans la corruption, l’argent qu’ils mangent ne leur appartient pas», a-t-il déclaré vendredi passé, lors du vernissage.
Activiste attentive à comment les gens sont bafoués et piétinés, Oumy Régina Sambou, l’initiatrice de cette plateforme d’activisme artistique de lutte contre la corruption, précise qu’il faut que les gens comprennent que la corruption est tout à fait anormale, inadmissible et ne doit pas plus avoir cours dans ce pays. «L’idéal pour nous, c’est un pays sans corruption», dit-elle. Elle admet que même si cela ne peut pas exister, il est important de faire en sorte de réduire la corruption, l’impact et le pouvoir que les corrompus ont dans ce pays. Journaliste de profession et passionnée de culture dans l’âme, Oumy Régina Sambou est convaincue qu’à travers l’art et les activités associatives, il est possible d’arriver à un changement de comportement. A travers cette exposition, elle interpelle les citoyens parce que, dit-elle, si aujourd’hui la corruption prospère, c’est que personne n’a réellement conscience d’être dans la corruption.
Selon elle, à l’instar des organismes qui luttent contre la corruption, si les artistes schématisent et facilitent le discours permettant aux populations d’y avoir accès, «on est plus sûr d’avoir des résultats. Semer des graines, pousser à agir afin d’avoir des adultes dans l’avenir plus aptes à faire face à ce fléau», a-t-elle fait savoir. Pour embrasser tous les arts, pour faire mirage et barrer des fléaux de ce genre et donner la chance à toute la population d’être au même niveau d’information, l’exposition du Paac a été suivie d’une séance de graffiti sur la corruption.
Pour sa part, l’artiste graffeuse, Zenix, qui a travaillé sur le terme «illicite», pense qu’il est bien de parler de corruption mais à ses yeux, le mieux, c’est de faire une fixation sur ce qu’est la corruption. «La corruption sous toutes ses formes est illicite», a-t-elle indiqué. Donc l’objectif de son graffiti, dit-elle, c’est d’attirer l’attention sur ce mot «illicite» afin que toute personne qui puisse avoir un aperçu sur son œuvre, puisse comprendre que «illicite est la corruption».
VIDEO
BANDE ANNONCE DE LA SÉRIE SALMA
La série met en lumière, le combat d'une femme moderne, généreuse, pour vaincre tous les préjugés de la société sénégalaise, et pour gagner, par ses qualités intrinsèques et par sa détermination
La série Salma est construite, d'après une idée originale de la sénégalaise Nana Bah, après le succès phénoménal de sa chronique « Entre feu et Passion » qui a été lue par près de 6 millions de personnes à travers le monde.
Salma met en lumière, le combat d'une femme moderne, généreuse, pour vaincre tous les préjugés de la société sénégalaise, et pour gagner, par ses qualités intrinsèques et par sa détermination sans faille, sa place au soleil.
Ce combat passe par une quête spirituelle afin de trouver la force de vaincre tous ses démons, mais aussi tous les ennemis qui se dressent contre ce cheminement. En cela, Salma est un message, un espoir, une lumière pour toutes les femmes. Pour leur dire que rien n'est figé en ce monde, que toutes les femmes ont leur chance pour transformer leur vie et leur monde, avec de la volonté et un peu de guidance et l'amour de soi et des autres.
La série est sous-titrée en 27 langues.
LA STYLISTE OUMOU SY LIVRE SA VISION DU COVID-19
Des artistes d’ici et d’ailleurs réunis dans la sélection officielle dénommée « In », mais avec une programmation « Off », exposent leur talent. C’est le cas de la styliste, décoratrice, créatrice de bijoux et costumière, Oumou Sy
La 14ème édition de la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar, (Dak’Art), qui a levé ses rideaux depuis le 19 mai se poursuit jusqu’au 21 juin prochain. Des artistes d’ici et d’ailleurs réunis dans la sélection officielle dénommée « In », mais avec une programmation « Off », exposent leur talent.
C’est le cas de la styliste, décoratrice, créatrice de bijoux et costumière, Oumou Sy dont l’ingéniosité et le savoir-faire ne sont plus à démontrer. Elle a présenté deux installations au Théâtre Doudou Ndiaye Coumba Rose de Dakar. Une œuvre d’art qui relate l’histoire de la pandémie à Coronavirus qui a créé une psychose partout dans le monde, pendant presque deux ans. « C’est très important à mes yeux car, quand le Corona est arrivé, tout le monde avait paniqué et la terre entière était en mouvement pour ne pas dire en ébullition. Moi je me suis enfermée pour confectionner mes deux robes. Quand j’en suis arrivée à la troisième, les vaccins sont arrivés et le Corona était fini. L’Afrique est préservée car elle a su utiliser ses racines et sa forêt sacrée et les nouvelles technologies aussi ont été mises à contribution avec les masques, les gels et tout le reste », explique la native de Podor, dans le Fouta.
Cette exposition « Off » repose sur le triptyque « créer, imaginer et inventer » et montre la créativité de Mme Sy. La première installation, avec ces deux robes parle de la période du Covid-19, la deuxième, d’après elle, est une évolution avec la « robe santé » qui symbolise l’effort dans les recherches médicales sur les vaccins et les remèdes. Les fils qui pendent au niveau des installations représentent les fils de la vie. En effet, dans ces collections, les femmes sont à l’honneur, car il y a des prêtresses sur les différents décors des deux installations… Des calebasses totems entre autres sont visibles dans le déco.
«LE CINÉMA AFRICAIN RÉVOLUTIONNERA LE MONDE»
CANNES 2022 Souleymane et Fatou Cissé, cinéastes, Le Quotidien a réuni le père et la fille, le temps d’une (trop) brève interview
Une des ultimes projections de la présente édition est dédiée à «L’Hommage d’une fille à son père», œuvre de Fatou Cissé, fille de Souleymane Cissé, 82 ans, Prix du Jury à Cannes en 1987, pour le lumineux «Yeleen». A travers le témoignage de ses amis, sa famille, ses proches mais aussi de grands noms du cinéma mondial, le documentaire de sa fille Fatou retrace l’itinéraire du cinéaste malien, de l’enfance à nos jours, dans la section Cannes Classics. Il éclaire pour nous l’homme derrière l’artiste. Le Quotidien a réuni le père et la fille, le temps d’une (trop) brève interview
Souleymane, vous avez, vous-même, rendu hommage à Ousmane Sembène ( O Sembène, 2013), l’auteur historique du premier long métrage jamais réalisé par un noir africain («La Noire de...», 1966). Aujourd’hui c’est Fatou, votre propre fille, qui réalise un documentaire sur votre itinéraire à vous qui êtes le premier réalisateur noir africain récompensé au Festival de Cannes (Yeleen, Prix spécial du Jury en 1987)...
Souleymane Cissé : C’est Fatou qui a senti la nécessité de le faire. Elle m’accompagne dans mes activités depuis 15 ans. Moi je l’ai fait pour Sembène parce que j’ai mal supporté sa mort. Elle m’avait bouleversé. Une amitié sincère nous unissait Ousmane et moi (Ndlr, les deux hommes se sont connus à Moscou en 1964 sur les bancs de l’école de cinéma de l’Union soviétique d’alors, le Vgik). Sembène était mon grand frère. Il m’a reconnu, offert son estime, sa confiance, prêté son épaule. Concernant le documentaire de ma fille Fatou sur ma personne, je ne lui ai rien, absolument rien suggéré.
Fatou, c’est la première fois que vous passez à la réalisation. Quelle a été votre motivation pour franchir le pas ?
Fatou Cissé : L’envie a mûri durant trois années avant que je ne me décide. Je sentais que le moment était venu. Mon premier souhait était de rendre hommage à mon père de son vivant et non après sa mort. L’autre élément, au moins aussi important à mes yeux, c’était de faire découvrir qui est l’homme derrière l’artiste connu et reconnu. Beaucoup de gens connaissent son œuvre sans savoir qui il est en vérité. Ainsi, mon grandpère, âgé de 95, évoque nos origines du côté de Nyamina (région de Koulkikoro, Sud du Mali) sur les rives du fleuve Niger. Là où Souleymane a initié un festival de cinéma, interrompu désormais depuis 2014, à la suite des événements et après sa dixième édition.
Quelle est cette part de Souleymane qui ne devait pas échapper à ceux qui apprécient ses œuvres et qui fait de lui votre «héros» ?
Sa force de vie et sa persévérance nourries par sa passion pour le cinéma. Sa très grande sensibilité aussi. Sans oublier, un sens de la débrouille élevé au rang d’art qui va de pair avec ses autres qualités. A côté du cinéma, rencontré dès l’enfance, son autre passion a été le football. Lorsque ce fils chéri s’est brisé la jambe lors d’une partie, sa mère a fait un Avc et elle est demeurée paralysée. Souleymane s’en est tellement voulu. Il s’est alors démené pour chercher l’argent et subvenir aux besoins de sa mère, notamment en installant des plaques pour les vélos et les mobylettes. Plus tard à 21 ans, il a été un de ces pionniers que Modibo Keïta a envoyés à Moscou étudier (Ndlr. En 1961, aux débuts de l’indépendance). Il a enduré de passer de 40° à - 40 °C, a découvert la neige, a essuyé un autre racisme, a dû apprendre une langue inconnue et complexe et aussi se mettre à niveau pour étudier à l’université. Son incroyable persévérance seule lui a permis de s’en sortir comme un grand. Pour moi, c’est là qu’il a puisé la force qui lui a permis d’être le premier Malien à réaliser un long métrage (Den Muso, La Jeune fille, 1975) avec Dounamba Dany Coulibaly, son épouse, ma mère, qui n’est plus. Rien ne lui a été facilité non plus alors puisqu’il a été menacé de prison, ce que lui a évité l’intervention du dirigeant malien d’alors Moussa Traoré.
Souleymane Cissé : Dans le film de Fatou, j’ai tenu à rendre hommage à mon tour à Moussa Traoré parce que c’est juste et normal.
Fatou, dans votre documentaire, deux personnalités du monde du cinéma interviennent pour témoigner de l’universalité de l’œuvre de Souleymane : l’immense Martin Scorcese et le critique français Serge Toubiana. Comment avez vous recueilli leurs propos depuis Bamako, où vous vivez, durant la pleine pandémie du Covid 19 ?
Pour Serge Toubiana, c’est la monteuse Cécile Emond qui a elle-même tourné la séquence à Paris. Je la remercie infiniment car de plus, c’est grâce à elle que j’ai pu terminer mon film. Malgré la pandémie, Cécile s’est déplacée à Bamako pour finaliser l’éditing du film. Quand à Martin Scorcese, les images ont été prises par son propre assistant. Nous sommes en contact avec lui depuis 2007 lorsqu’il a découvert Yeleen, une nuit par hasard, sur son écran de télévision. Le réalisateur des Affranchis a été “scotché” par ce qu’il a découvert dans ce film centré sur l’initiation des Bambaras, cette part mystérieuse de l’humanité qu’il ne connaissait pas. Mais eu égard à l’emploi du temps surchargé de Martin Scorcese, cela m’a demandé neuf à dix mois de patience et de tractations pour obtenir ses propos. Leur force le valait. D’autres cinéastes interviennent également, tels Gaston Kaboré et le regretté Idrissa Ouédraogo pour exprimer ce que le cinéma africain, et mondial, doit à Souleymane. On voit également Robert de Niro, Spike Lee ou encore le cinéaste sénégalais de la nouvelle génération, Alain Gomis.
A ce propos Souleymane, en tant que fondateur de l’Union des créateurs et entrepreneurs du cinéma et de l’audiovisuel en Afrique de l’Ouest (Uceaco), quels réalisateurs voyez-vous porter l’avenir du cinéma africain ?
Ne comptez pas sur moi pour jouer au petit jeu du Name Dropping, ce n’est pas mon genre. Ce que je considère, c’est ce qui est fondamental. Je ne sais pas comment le rationaliser. Mais moi, au futur du cinéma africain, j’y crois profondément. Cette foi et cet espoir me permettent de continuer à agir et de me projeter dans le temps. Je sais que dans le futur, le cinéma africain va marquer le monde, je sais que l’Afrique, grâce à sa jeunesse, va révolutionner le cinéma, lui donner un autre souffle. C’est moi qui te le dis, crois moi. Pour l’heure, L’Uceaco est en veilleuse, à cause des événements que l’on sait. On ne peut pas créer une structure dans un pays et puis la faire fonctionner ailleurs, dans un autre. Mais j’ai confiance en Fatou et les autres qui assument ses destinées pour qu’elle reprenne dans un avenir proche, je l’espère fortement.
Que pensez-vous des efforts qui sont ceux du Festival de Ouagadougou pour développer la formation technique et artistique, vous qui avez été un initiateur dans ce domaine ?
C’est bien mais à mes yeux, Ouaga c’est aussi plus que cela, c’est spécial. J’espère que ce festival ne perdra jamais son âme. Il a créé un sentiment d’union incomparable entre nous, tous les cinéastes, qu’ils viennent de l’Afrique australe ou du Nord, de l’Ouest ou de l’Est. Ce sentiment est notre grande force.
Fatou, votre film évoque combien le cinéma a absorbé votre père au détriment de sa famille. Les siens lui en veulent-ils ?
Absolument pas. Si Souleymane a été et demeure hyperactif, il est toujours demeuré présent au plan émotionnel, proche de nous. On ne peut lui en vouloir.
Quel est le secret derrière le rire fameux de Souleymane Cissé ?
Fatou Cissé : Il est, selon moi, l’expression de sa force de vie, celle que salue mon film hommage. Son rire a le pouvoir de dissiper les ombres autour de lui (et Souleymane fait entendre son rire qui ravive les braises du soleil couchant sur la baie de Cannes et ce n’est pas une vue de l’esprit).
LE RAPPEL DE MANSOUR SOW
C’est le regard extérieur d’un homme du sérail. Après 30 années dans les rédactions, Mansour Sow a diagnostiqué la tenue du débat télévisé au Sénégal.
Mansour Sow, ancien directeur du Service de la radiotélévision de la Rts, a posé un regard critique sur la façon de conduire un débat télévisé. Après plus de 30 ans passé dans les rédactions, il a tenu à rappeler les prérequis et règles pour ce genre d’émission lors de la cérémonie des 60 ans de l’Union de la presse francophone (Upf).
C’est le regard extérieur d’un homme du sérail. Après 30 années dans les rédactions, Mansour Sow a diagnostiqué la tenue du débat télévisé au Sénégal. En pédagogue, l’ancien directeur du Service de la radiotélévision de la Rts n’a pas critiqué ce qui se fait actuellement, mais il a tenu à rappeler les prérequis pour un débat télévisé dans les règles de l’art. Invité à donner une communication sur le sujet pour marquer les 60 ans d’existence de l’Union de la presse francophone (Upf), Mansour Sow a souligné, dans un premier temps, «l’importance pour un journaliste, d’apprendre à construire une émission de débat avec un plateau représentatif et vivant».
Ensuite, a-t-il précisé, «c’est le plus souvent en fonction de l’actualité. On tente de prendre les acteurs majeurs d’un dossier et, comme c’est une émission de débat, choisir les points de vue différents». Selon l’ancien directeur du Service de la radiotélévision de la Rts, la divergence des points de vue va offrir «aux téléspectateurs une palette de points précis et d’opinions différentes permettant aux participants de confronter leurs positions».
Et pour y parvenir, Mansour Sow a décliné le profil du présentateur. «Le présentateur doit se tenir au courant de l’actualité et veiller à ce que les thèmes choisis correspondent aux besoins et attentes des téléspectateurs, préparer une introduction qui pose le débat sans prendre parti», a-t-il affirmé. Avant de préciser que le travail de préparation et de documentation, de même que la programmation, sont aussi des clés pour la bonne tenue d’une émission de débat. A cet effet, a-t-il souligné, «le présentateur doit être animateur et arbitre. Couper les invités qui veulent monopoliser la parole, c’est d’abord faire en sorte que chacun puisse s’exprimer».
Toujours dans la célébration des 60 ans de l’Upf, un hommage a été rendu à des journalistes disparus et d’autres ayant marqué le métier. Sada Kane, Cheikh Tidiane Fall, Ibrahima Bakhoum, El Bachir Sow, Margaritte Thiam, Mamadou Ibra Kane, Eugenie Rokhaya Aw et beaucoup d’autres journalistes ont reçu des diplômes de reconnaissance. Des familles de journalistes disparus tels que Ibrahima Mansour Mboup, Moriba Magassouba, Mamadou Abdoulaye Fofana, Sidy Lamine Niasse, Pr Oumar Diagne et Cheikh Tidiane Djigo, ont aussi reçu des diplômes de la part de l’Upf.
VIDEO
SERIGNE TOUBA, LE REDOUTABLE COLLECTIONNEUR
Depuis plus de 50 ans, il est collectionneur de toutes sorte d’objets, notamment des œuvres d’art antique et contemporaine. Avec plus de 10.000 pièces, il a acquis aussi des objets rares, voire très rare, dont la valeur de certains tutoie le milliard.
A la Biennale de l' art africain contemporain de Dakar (Dak'Art), on fait des découvertes. Dans le cadre de cette 14ç édition, le plasticien Kalidou Kassé a monté une expo au numument de la renaissance africaine, intitulé "Le Marché international de la Biennale de Dakar (MIAD)". C'est là où nous dégotons Serigne Touba Sène. Un homme qui a le goût prononcé pour l'art et pour plein d'autres objets. L’histoire de ce vif septuagénaire est fascinante à plus d'un titre comme vous pouvez le voir dans cette vidéo.
Depuis plus de 50 ans, il est collectionneur de toutes sorte d’objets, notamment des œuvres d’art antique et contemporaine. Avec plus de 10.000 pièces, il a acquis aussi des objets rares, voire très rare, notamment des objets antiques dont la valeur de certains tutoie le milliard de francs CFA, au moins.
L’homme préfère avoir certains de ces œuvres en présence que de les échanger contre de l’argent. Globe-trotter, dans le cadre de ses affaires multiples, Serigne Touba Sène a fait des pérégrinations qui l’ont mené presque partout en Afrique, en Europe et Outre-Atlantique. Tout commence quelques décennies plutôt quand Serigne Touba a quitté Guédé, son village pour Dakar.
C’est au marché de Kermel que sa belle histoire a pris forme avec le rachat un dimanche de ses œuvres d’art à un prix faramineux, à l’époque par un Noir Américain. Découvrez la suite de son histoire dans cet entretien qu’il a accordé à AfricaGlobe Tv et AfricaGlobe.Info.
LE CENTRE CULTUREL MAURICE GUEYE EXPOSE «KADDU»
Durant la 14ème Biennale de l’art contemporain, les passionnés pourront visiter les œuvres de sept artistes qui exposent sur le thème Kaddu au Centre culturel Maurice Guèye.
Durant la 14ème Biennale de l’art contemporain, les passionnés pourront visiter les œuvres de sept artistes qui exposent sur le thème Kaddu au Centre culturel Maurice Guèye. Le vernissage de cette exposition s’est tenu samedi, en présence de plusieurs autorités de la ville. «Kaddu s’inscrit dans le thème général de cette biennale.
Cette édition a voulu travailler sur le thème Forger, pour dire en fait que les Africains ont besoin d’un travail de re-création, de réflexion, pour aboutir peut-être à une autre forme de développement. Tout cela s’inscrit dans cette perspective-là. Et Kaddu correspond à ça puisque qu’on dit qu’au début de la création, il y a le verbe», a indiqué Patricia Diagne, administratrice de la Fondation Sococim. «Nous sommes restés 4 ans sans tenir de biennale, donc c’est une joie de pouvoir retrouver les artistes dans le cadre de cet évènement. Nous recevons un grand nombre d’artistes originaires du département de Rufisque et qui s’y sont établis, ce qui est une occasion pour la Fondation Sococim de présenter le travail de ces artistes. On est très fiers de ce qu’ils ont montré cette année», a aussi relevé Mme Diagne, enthousiasmée par le retour de la biennale après un repos forcé imposé par la crise sanitaire du Covid-19.
Des sculptures de Balla Niang avec le fer et le bois aux créations sur argile de Khadidiatou Kanté ou encore les objets en fer de Severine Costes, en passant par les tableaux de Ibrahima Cissé Deb’s, Marie Dione, Fatou Mandoye Mbengue, Samba Ndour et Maïmouna Ndoye, c’est toute une palette de créations à visiter le temps de la biennale. Le vernissage a été clôturé par un concert de l’Orchestra Baobab qui a consacré son retour après plusieurs années d’absence dans la vieille cité, terre de plusieurs de ses membres dont Mountaga Kouyaté et son fils, Papino, Alpha Dieng, fils du défunt Ndiouga Dieng, ou encore le saxophoniste, Thierno Kouyaté.
NOUS GAGNERIONS à MIEUX INVESTIR SUR LA FEMME
Abdoulaye Diallo, le Berger de l’île de Ngor, peintre, décline sa vision du thème de cette biennale
C’est au moment où Dakar tremble de peur face à la recrudescence des assassinats visant des femmes que sur l’île de Ngor, son lieu de création, Abdoulaye Diallo, le Berger, a choisi de décliner sa vision du thème de cette biennale : «I Ndaffa #» (Forger). «Taxawaalu» s’est ainsi décliné à travers l’histoire de cette princesse peule, Fatimata Baba Lobo, contée par la styliste Oumou Sy, mais aussi à travers quatre œuvres dédiées à la femme et à la fille. Une façon pour l’artiste d’inviter à mieux investir sur la femme.
Pour cette biennale, vous avez choisi d’organiser un programme spécial «taxawaalu» sur l’île de Ngor. Quel message souhaitiez-vous donner ?
J’étais tellement heureux de voir que le thème de cette biennale est celui qui avait été retenue en 2020, «Forger». J’ai l’habitude de dire que «Forger» est un mot français. I Ndaffa a une autre tonalité, une autre puissance et j’ai souvent voulu inviter les plus jeunes à aller vers le livre du Colonel Mouhamadou Lamine Sarr, qui traite de l’éducation du jeune sérère Niominka pour réellement sentir toute la force de ce mot-là. Naturellement quand on parle de forger, je pense systématiquement à forger les cerveaux. Un cerveau mal meublé ou non meublé pendant qu’on meuble son salon, peut être très dangereux pour une nation. Si nous voulons éviter à notre pays de vivre une certaine pauvreté, une certaine tristesse, il faut apprendre à penser meubler les cerveaux des enfants. Ça, c’était ma première préoccupation. La deuxième, c’était la place de la femme. J’ai dit que nous gagnerions à mieux investir et sur le talent et sur la femme. Parce qu’il s’agisse de problèmes de scolarité, de problème social, en général, tout passe par la mère. Il nous faudrait repenser l’éducation de la mère. Et je ne peux pas comprendre que dans ce monde où l’homme a tendance à tout dominer, pourquoi il ne chercherait pas à entendre et attendre celle à qui on a confié la plus belle des industries au monde, la fabrique de l’humain. Cette fabrique de l’humain se trouve dans le ventre de la femme et je ne peux pas comprendre que dans nos pays, on ne puisse pas continuer à investir sur cette femme qui est au début et à la fin de tout. C’est la raison pour laquelle j’avais décidé de participer à ce off, mais en dédiant mon exposition à la femme et la fille. En faisant quatre œuvres, naturellement La fille, L’épouse, Madame je m’incline et au-delà de ça, poser La question de la décision, que je trouve être la chose la plus angoissante.
On est dans un contexte où des femmes sont assassinées pendant que les politiciens se chamaillent parce qu’ils refusent de respecter la parité. Pensez-vous que nous soyons dans un pays qui respecte les femmes ?
Moi, je respecte la femme. C’est peut-être parce que j’ai été éduqué pour respecter la femme. Je respecte la femme parce que je dois énormément à ma mère. Je n’oublierai jamais que mon père voulait que je devienne imam. C’est ma mère, analphabète, qui, sans oser élever la voix devant mon père, avait décidé d’accompagner son fils pour qu’il puisse faire des études. Et c’est ainsi que j’ai pu faire mon entrée en sixième et mon bac avec une année d’avance, et faire des études supérieures pour devenir ce que je suis devenu, un peintre. Je vis entouré de femmes, j’aime mon épouse, je suis monogame, c’est ma patronne et j’ai trois filles et un garçon. C’est comme si ma vie était ponctuée par la présence des femmes et je ne peux pas ne pas en parler. J’ai l’habitude de dire, n’eut été le péché originel, le problème de l’humanité ne se serait pas posé. Adam et Eve ne seraient pas sortis du paradis. C’est un indicateur très fort parce que nous devons cette humanité à Eve. Je dis aussi, c’est le Créateur qui a choisi. Il aurait pu choisir le ventre de l’homme, du chat, etc. Il a choisi volontairement le ventre de la femme pour cheminer avec elle pendant 9 mois, créer ce qu’il considère être ce qu’il aime le plus, ce qu’il a de plus cher au monde, l’humain. Cette industrie qui se trouve dans le ventre de la femme, est une industrie qui est tout le temps productrice de revenus et de dividendes. Si on ne le juge que par rapport au résultat, pourquoi ne pas réfléchir par rapport à cela : donner à la femme la place qu’elle mérite et cesser de passer sa vie à vouloir coûte que coûte en faire un objet, une victime de ceci ou cela.
Dans la représentation de Oumou Sy aujourd’hui, il est surtout question de figures de femmes fortes de notre histoire. Mais on a l’impression qu’il y a eu une césure quant à la représentation de cette femme…
C’est parce que tout simplement, on nous a tellement mis dans la tête que la femme est faible, qu’on a tous fini par croire que la femme ne peut qu’être faible. Je le dis tout bas, quel que soit le roi de ce monde, le président le plus puissant, je ne suis pas sûr que les grandes décisions de ce monde ne se prennent pas le soir, quand il est seul avec son épouse.
ARIELLE AUGRY EXPOSE SES «EVEILLEES»
Des personnages qui ont marqué l’histoire de l’humanité, les femmes ont leur place. Ces dernières, souvent sous évaluées, sont «exposées» au Musée de la femme Henriette Bathily
Un monde où l’on peut être soi-même existe. Un monde où l’on choisit sa mission au lieu de la subir. Arielle Augry a choisi, pour la cause féminine, de le documenter. Des femmes se sont affranchies, de différentes manières, des dictats et ont marqué leur époque. C’est en somme ce que la Ngoroise d’origine Française veut faire voir. Elle expose 52 mosaïques de femmes qui ont marqué l’histoire au Musée Henriette Bathily jusqu’au 30 juin sur ce thème, dans le cadre du programme off de la biennale.
Des personnages qui ont marqué l’histoire de l’humanité, les femmes ont leur place. Ces dernières, souvent sous évaluées, sont «exposées» au Musée de la femme Henriette Bathily. Signé Arielle Augry, Les Eveillées sont à la Place du souvenir jusqu’au 30 juin. «A l’âge de 10 ans, j’ai voulu être nonne. A l’âge de 32 ans, j’ai décidé de ne pas être maman. A 38 ans, j’ai décidé que mon travail n’était pas de m’occuper d’une famille. Mon travail, c’est l’éveil.» Ce retour sur soi de l’artiste sonne comme une alerte pour les visiteurs. Les 52 mosaïques étalées sur le musée, formant un cercle, donnent à voir un éventail de personnalités, pour la plupart féminines.
De Nina Simon en passant par une parfaite inconnue, Arielle invite le visiteur à sa définition de l’humanité. Sur la technique, la Ngoroise s’appuie sur les objets du quotidien. Du carrelage merveilleusement assemblé aux mégots de cigarettes encerclant un portrait, en passant par la reprise du logo de la boisson Gazelle, l’artiste représente ses personnages, résume sa vie et son combat avec les objets qui l’entourent.
Sa lecture singulière voudrait, par exemple, considérer plus le premier acte politique de Nina Simon à 12 ans que l’ensemble de sa carrière dans un texte illustratif. «C’est une expression beaucoup plus personnelle. Je ne souhaite plus travailler pour les autres. Je propose. Je dis. La personne qu’on est, ce sont forcément des rencontres, ce sont aussi toutes les personnes qui nous alimentent par leurs combats, leurs arts. Tout de suite, il m’est venu 15 hommes. Je me suis demandé pourquoi je n’ai pas de femmes ? Je me suis rendu compte que ma vie était jalonnée de rencontres philosophiques, artistiques, de combats, de féminisme, d’environnement. C’est de là que j’ai choisi mon sujet», a-t-elle expliqué mercredi passé, lors du vernissage. Avant d’ajouter ceci : «Les Eveillées, c’est la personne que je suis en multi facettes. Je veux dépasser le racisme, le sexisme. Notre particularité dans le monde.