À la fin du XIXe siècle, dans un village du Nigeria, Okonkwo est un notable et un chef de famille respecté par ses pairs pour son courage et la solidité de ses convictions. Il doit pourtant tout abandonner du jour au lendemain en raison d’un accident mortel dont il est tenu pour responsable. De retour de sept années de bannissement, il trouve sa communauté profondément transformée. Des hommes blancs se sont installés dans le pays et leur influence s’étend, modifiant tous les aspects de la vie quotidienne, les croyances religieuses et l’éducation des enfants. Héros tragique, Okonkwo va se confronter à ce nouveau monde et lutter contre la disparition de l’ancien.
Telle est l’histoire contée dans Things Fall Apart, ou Tout s’effondre* (éd. Actes Sud), par l’écrivain nigérian Chinua Achebe (1930-2013). Paru en anglais en 1958, ce roman a connu depuis lors une extraordinaire carrière de « long-seller », avec une cinquantaine de traductions aux quatre coins du monde et plus de 10 millions d’exemplaires vendus. Quant à son auteur, paradoxalement méconnu en France en dehors des milieux avertis, il possède une aura d’une tout autre envergure au sein du monde anglo-saxon. « Si vous demandez à des gens, au hasard dans la rue, le nom d’un écrivain africain, il y a de grandes chances qu’ils vous citent Achebe », résumait en 2013 son ami l’écrivain congolais Emmanuel Dongala dans la revue américaine Warscapes.
« Un trou sur l’étagère »
S’il ne peut évidemment anticiper son succès lorsqu’il rédige Tout s’effondre, Achebe sait en revanche parfaitement quelles raisons le poussent à écrire un tel récit. Venu au monde en 1930 à Ogidi, dans le sud du Nigeria, il est prénommé Chinualumogu, « Dieu lutte pour toi » en langue Igbo. Albert, prénom chrétien placé devant le nigérian, indique qu’il est « protégé par la Couronne » – en d’autres termes soumis au régime colonial britannique.
Parmi les livres anglais émaillant la scolarité du jeune homme, rares sont ceux qui évoquent son continent, si ce n’est pour mettre en scène une Afrique de clichés, primitive et sans culture. L’écriture procédera pour Achebe de la révolte. « Je savais qu’il fallait faire quelque chose, expliquera-t-il, que je définisse ma place dans le monde en rédigeant une histoire à propos de mes origines et de mon peuple. C’était comme s’il y avait un trou sur l’étagère des livres, comme si on en avait enlevé certains. »
EXCLUSIF SENEPLUS - Il est mort relativement jeune même pour les standards du continent. Malgré une notoriété certes tardive mais établie, avant et après sa mort, il ne semble pas jouir d’un rayonnement à la mesure de son talent
« Chaque homme, même le plus pourri, renferme en lui une lumière que l’épaisseur des circonstances, du milieu, des préjugés, des superstitions, cache ; il suffit bien souvent de peu de choses pour qu’elle jaillisse : un sourire, un coup de pierre, une rencontre, même des blasphèmes, à condition de s’accrocher à la vie avant de lui chercher un sens. On devrait faire de l’amour de la vie un métier. »
Williams Sassine, Saint Monsieur Baly, p.253
Jacques Chevrier, incontournable promoteur des lettres africaines en langue française (juré du Grand prix littéraire d’Afrique noire, fondateur du prix Kourouma, critique universitaire…) lui a consacré une thèse en 1992, devenue livre : Williams Sassine, écrivain de la marginalité (1996). Lylian Kesteloot, toute aussi essentielle que Chevrier, le mentionne dans ses anthologies et articles comme admis au club des « auteur du chaos » des années 80. Dans Désir d’Afrique (2002), Boniface Mongo-Mboussa l’évoque, et dans le supplément du livre, L’Indocilité (2005), lui dédie carrément des pages entières, d’où ressort, principalement, sa grande veine humoristique. Bernard Mouralis, grand exégète de la littérature africaine lui aussi, et cheville ouvrière de la revue Présence africaine pendant de longues années, l’a salué et analysé dans ses écrits. Romuald Fonkoua, rédacteur en chef actuel de la même revue et professeur de lettres à la Sorbonne, a décrypté son œuvre. Élisabeth Degon, bibliothécaire émérite, dans un souci plus exhaustif, a retracé toute sa vie dans un essai : Williams Sassine, itinéraires d’un indigné guinéen (2016). Dans les revues, particulièrement celle de son éditeur principal, Présence africaine, on ne compte plus le nombre de textes, mentions, références, interviews, de Williams Sassine.
Hommages : le manque et le trop-plein
La moisson globale est donc généreuse. Ça en fait du monde, du beau monde même, onction de la validation ultime. De tous ces hommages point globalement le même sentiment : celui d’un écrivain atypique, que tant de textes essaient de confesser pour élucider la parcelle de mystère encore imperméable de l’homme et de son œuvre. La tonalité et le registre sont ainsi toujours les mêmes : louangeurs quoiqu’un tantinet circonspects, mélancoliques et empreints de regrets. Comme si l’étoile avait filé trop vite, sans livrer toute sa lumière dans la symbolique charpentée par Paul Verlaine des « poètes maudits ». Un goût d’inachevé donc…
Parmi les nombreux échos de cette célébration, aux inclinations – et c’est notable – globalement posthumes, dominent quelques invariants. Le champ sémantique isole en effet, avec récurrence, deux étiquettes pour caractériser son œuvre : à la marge et indigné. La première pour la singularité et la difficulté – voire l’impossibilité – de le mettre dans une case ; la seconde pour l’énergie fondatrice de son œuvre. On doit ainsi aux écrits de Jacques Chevrier, qui ont le primat de la chronologie, d’avoir plus ou moins imposé cette grille de lecture de la marginalité. Au fur et à mesure que sa notoriété tardive a commencé à se déployer, la filiation des analyses, ainsi influencées, a creusé ce sillon à la fois intéressant, inspiré pourtant réducteur, parce qu’en voulant échapper à la tentation de la caricature, elle tend parfois à la nourrir, desservie du reste par la technicité et la rigidité universitaires. On doit à Élisabeth Degon d’avoir quant à elle formalisé dans son essai – qui a la force de la biographie et de la bibliographie, mais aussi celle de l’analyse et des retombées posthumes de l’œuvre – la relation entre l’auteur et ses contemporains, son pays, ses occupations. En dégageant l’indignation comme une force motrice, et les chemins escarpés de son parcours, recoupé par l’usage au pluriel de « itinéraires », elle donne à apercevoir la source de cette verve et l’environnement qui a présidé à sa naissance.
Cependant une curiosité est frappante : l’absence de Sassine dans ce qu’il est convenu d’appeler les « classiques » dans leur acception la plus communément partagée qui forge la popularité. Dans son remarquable essai, La Fabrique des classiques africains (2017), qui balaie les chemins de légitimation des œuvres africaines depuis 1960, Claire Ducournou rappelle le tropisme et la centralité française dans ce processus. Elle y évoque plusieurs critères pour prétendre à l’estampille « classique ». L’un d’eux est l’importance d’avoir un éditeur d’envergure et Français, dans une littérature héritière des traditions et où le compte d’auteur est tombé progressivement en disgrâce. Sassine a de son côté publié chez de petits éditeurs (L’Afrique en morceaux, 1999, le Bruit des autres par exemple) en parallèle ou après Présence africaine. Claire Ducournou mentionne aussi l’importance de la faculté des livres à être enseignés, et donc leur vocation à intégrer les manuels scolaires, ce qui passe par une validation universitaire qui pave la voie à la suite. Avec le prestige des signatures universitaires si importantes dans la reconnaissance des pairs, l’affaire paraissait bien prometteuse. De ce côté en effet, Williams Sassine est bien pourvu, et l’injustice qui a semblé avoir agi contre lui de son vivant est, en partie, rachetée. Comme si la profusion des hommages posthumes, inconsciemment, admettait une forme d’oubli coupable. Ils ne sont pas nombreux en réalité à pouvoir se targuer de susciter cet intérêt académique aussi important et si essentiel dans le processus de fabrication et d’institutionnalisation littéraire du legs. Sassine coche donc une partie des cases. D’où vient alors que son œuvre semble encore, hors des cercles d’initiés, un poil sinon totalement méconnue ? Malgré une notoriété certes tardive mais établie, avant et après sa mort, il ne semble pas jouir d’un rayonnement à la mesure de son talent ni à hauteur de la célébration de ses pairs. Le mystère reste donc entier. D’où la survivance ou presque, d’une mythologie autour de cet auteur métis, carrefour de plusieurs identités culturelles, à la fois seul et singulier, même chez lui.
La gloire populaire quant à elle est habituellement confectionnée par plusieurs facteurs : les honneurs et prix, les ventes, dans une certaine mesure le relais médiatique, l’inscription régulière dans l’agenda du circuit des mondanités littéraires et la convergence des critiques qui établissent la légitimité et l’aura. De ce côté, Williams Sassine est moins touché par la grâce. On est, en bout de course, face à un auteur qui, auprès du public, reste moins connu que beaucoup de ses pairs. Un « classique » au rayon d’irradiation encore modeste. Dans son livre, Élisabeth Degon donne à voir des éléments qui permettent d’évaluer comment l’auteur a vécu cette confidentialité : une tendance dépressive, un mal être chronique, une certaine instabilité financière. Et si vers la fin de sa vie, l’écrivain avait commencé à voir s’élever, au-dessus de lui, « le soleil des immortels » – la gloire dans les termes Balzaciens – il en a si peu joui que la saveur en est restée altérée.
Un ancrage guinéen : le contexte et ses influences sur l’œuvre
Parler de Sassine, c’est essentiellement s’inscrire d’abord dans un territoire : la Guinée. Un détour historique s’impose. La tradition d’une violence politique, militaire, dictatoriale, qui forge les tempéraments d’écrivains chez qui la résistance ajoute une charge dramatique compte tenu des risques de répression. Sassine est un homme de cette Guinée qui a vu ses enfants glorieux quitter le pays dans des exils forcés, entretenant ainsi la légende de l’intellectuel résistant ou « spécifique » au sens Foucaldien ; une figure historique du combattant des Lumières. Chez Tierno Monénembo, grand ami et héritier naturel de Sassine, cette vocation est devenue principielle, un attachement à s’ancrer géographiquement et à lutter contre les bâillons avec le risque de la mort ou de la marge. Sassine dut faire face, en aîné, à ce dilemme : un amour pour Kankan sa ville de naissance, un attachement à la Guinée, mais la solitude et l’âme chagrine de lutter contre des réalités qui semblent inamovibles. Comme un symbole, l’un et l’autre, à différentes époques, sont rentrés s’installer dans leur pays une fois un semblant de stabilité acquise. Problématique commune dans tout le continent, l’extraversion de la culture met la lumière sur ces choix forts, si peu répandus qu’ils en deviennent héroïques. L’acte « politique » d’une inscription locale donne au choix de l’ancrage des accents héroïques. Accents nécessaires même si, en termes de popularité et des intérêts des populations, ce combat reste discret, sinon vilipendé par les tenants du statut quo, parmi lesquels on trouve des pairs qui s’en accommodent fort bien.
Cette trame résistante, mais sans fanfares, colorera toute l’œuvre de Williams Sassine : il y aborde toutes les facettes de cette Guinée éternelle où il vit le jour en 1944 ; y projetant les ombres de ses blessures. Il y met parfois la même candeur poétique qu’un Camara Laye parlant de Kouroussa dans L’enfant noir (1953), mais le Jeune homme de sable (1979), deuxième roman de Sassine, est bien plus musclé que l’ode doucereuse de la forge de l’enfant noir. Un livre plus habité, à la verve plus tonique, où on retrouve déjà les obsessions de l’auteur : le combat pour la justice, la dénonciation des privilèges fossilisés, l’énergie de la révolte qu’incarne un jeune homme qui ne renonce pas à girafer au-dessus du tableau sombre de la réalité, pour envisager l’espoir. À la mort de Sékou Touré en 1984 et l’euphorie tétanisée qu’elle provoque, Sassine rentre chez lui, lui l’ancien exilé. La redécouverte des rues, de cette Guinée exsangue où l’espoir s’entête à ne jamais quitter les cœurs, lui inspire un livre, Le Zéhéros n’est pas n’importe qui (1985). Fresque à la première personne du retour au pays après la chute du despote. Roman enlevé, à la fois lyrique, drôlatique, mais aussi tendre et grave, il dépeint la Guinée en terre-martyr. Le rire succède facilement aux larmes, et avec la force d’une narration faussement naïve, on suit l’auteur dans les méandres de ses cauchemars que vient souvent réveiller la vive énergie de l’espoir qu’incarnent presque toujours l’humour et son pendant chez Sassine : l’amour.
Des usages de la truculence, d’une assignation à l’autre
Comment ne pas donc évoquer son style, hâtivement placé sous le sceau de la verve truculente ? De la truculence, il a été déjà beaucoup question dans la littérature africaine. Étiquette nouvelle, née des cendres de l’exotisme-mère, elle désigne cette inclination à la couleur, aux entrailles, à la fête, qui contrecarre le classicisme de la langue et le sérieux un poil barbant de l’analyse. C’est dit rapidement, mais en somme l’essentiel y est dans la perception du sens commun. Comme prophète de la truculence, Sony Labou Tansi fut un maître : le foutre, le sang, la poésie, l’art de la mise en scène, la rébellion contre les codes classiques, avec le génie et l’audace, ont fait de son œuvre la force d’une école nouvelle dont l’influence est perceptible chez beaucoup d’auteurs congolais et au-delà. Amadou Kourouma, bien avant lui, et dans une envergure plus grande, avait tracé sinon inauguré le sillon de l’inventivité linguistique comme élan nouveau, émergeant des trippes du continent. Il a laissé une patte. Ainsi, chemin faisant et émules glanées sur le chemin, de demande de fraicheur – souffle face à la rigidité académique – la truculence tend parfois à devenir sa propre caricature. La bannière rassemble beaucoup de livres inégaux. Elle a fait « style », gouaille foutraque et énergique, elle est devenue identité littéraire d’un Sud dont on célèbre l’extravagance comme une part presque biologique de son ADN. La truculence est ainsi souvent inconsciemment dépolitisée, perçue comme une farce artistique, dépourvue de questions sociales, gage donc d’authenticité sur le vif qui puise dans le cliché, avec un seul avantage sur l’ethnologie : celui de la légitimité de la peau et des origines.
Rejeton des exotismes coloniaux, on quitte une assignation pour une autre. Paradigme faussement nouveau qui démontre que tout change pour que rien ne change : des auteurs africains, on semble toujours attendre non la liberté absolue de la création, mais un bout d’Afrique truculente donc. Les critiques ne s’embêtent plus, la truculence a une odeur, des couleurs, une verve. C’est l’allié presqu’infaillible des quatrièmes de couverture. La tenue du style est souvent vue comme la soumission à l’académie – du Quai Conty parisien, s’entend. Pas par tous, et il est ainsi notable et bien heureux de voir des auteurs, comme Tierno Monénembo, Emmanuel Dongala, et bien d’autres, ne pas céder à cette tentation de redéfinition de soi par le biais de la surcharge linguistique et la recherche « d’effets », car la redéfinition est par excellence l’inauthencité : le naturel est et ne se proclame pas. Et même, à bien y regarder, la truculence n’est pas une fin mais un moyen. À ce titre, elle est universelle. On la retrouve partout, à dose parcimonieuse, escorter les littératures dans le monde.
Celle de Sassine aussi, dont l’œuvre porte l’empreinte de cette espièglerie – elle qui rassemblait toutes les émotions. Il y a donné la mesure d’une démocratie de la truculence qui désigne, quand on la déshabille de ses prétentions émancipatrices, rien d’autre que le rafraichissement du style, assez commun dans l’ordination littéraire. Camara, le héros avatar de Sassine qui rentre à la chute de Sékou Touré, découvre l’alcool, plaisante sur le clitoris, se moque de sa femme et de son enfant, raconte des péripéties endiablées des rues de Kankan. Le même Camara rentre ainsi chez lui plein de rêves et d’excitations. Mais entre les facéties de la vie à Kankan et la recherche d’un trésor familial qu’il veut récupérer, toute l’énergie désopilante du livre finit fatalement dans la gravité d’une situation dont il ne peut se détourner, et que son art du roman, doit affronter après ses grandes respirations poétiques.
Plus ambitieux, Saint-Monsieur Baly (1973), son premier livre, raconte l’aventure d’un ancien retraité qui, contre des vents hostiles, veut créer son école. D’épaisseur plus politique, on y retrouve le goût de la blague, de la formule, le souci des petites gens et la peinture jamais résignée de la misère, dont l’auteur s’est fait le galeriste. Dans une Afrique où l’école, sous les assauts répétés du manque de moyens, périclite, ce combat pour faire vivre un lieu de transmission rend le livre urgent, intemporel. Tout y est presque de la chair de Sassine, à la fois la finesse, mais aussi la solennité et les grandes digressions philosophiques, dont l’incisive portée ne laisse indifférent. Une énergie du récit palpitant mais sage ; où l’humour demeure « la politesse du désespoir. ». Sa vie tourmentée, instable, entre voyages en Mauritanie et dans la sous-région Dakar entre autres, son statut de professeur de mathématiques, tout son itinéraire est perceptible dans son œuvre. Elle y puise et s’enrichit de cette rage, tantôt violente, tantôt poétique, mais pour sûr rieuse : celle d’un soldat qui n’avait pas les moyens d’un combat face à des adversaires invincibles. Et dont le rire, dans ses multiples fonctions sociales, est devenu le refuge. Jusqu’à ce visage tendre, mais profondément grave, ses yeux d’enfant éternel, qu’abritaient ses boucles noires.
La satire : le refuge et l’école de la liberté
L’énergie de Sassine rayonne, et quand au début des années 90, Souleymane Diallo lance le satirique le Lynx sur la place de Conakry, c’est comme par évidence, dans la communauté des esprits, que Sassine prend part à l’aventure. Le tirage est modeste et Lansana Conté, le président Guinéen, n’est pas toujours joueur. L’horizon du journal est flou. Il faut séduire un lectorat, le débusquer, naviguer à vue entre les tirs ennemis potentiels. Mais le journal tient, il deviendra une référence, du fait de son œil acéré, son humour, des plumes de ses contributeurs. Mais surtout grâce à la rubrique courue de Sassine « la chronique assassine » ! Il y fait montre de toute l’étendue de sa palette dans l’exercice des entrées régulières. La mélancolie transperce ses billets et les piques plaisent. Le Lynx, quelques années après, est devenu un groupe de presse prospère, salué et primé, s’encrant dans la tradition de la satire continentale, jusqu’à Dakar avec feu le Cafard Libéré ou encore aujourd’hui le P’tit Railleur, qui tissent la toile d’un combat pour la liberté sans trompettes militaires. La satire dans le continent a produit de grandes plumes mais bien plus en encore, elle rassemble des esprits, des hommes, le cœur même d’une marge où dans la chaleur et la camaraderie, l’anarchie se brandit comme résistance face à tous les dogmes.
Williams Sassine est mort en 1997, 53 ans. Relativement jeune même pour les standards du continent à la veille de 2000. Derniers jours tristes. La reconnaissance ? Elle est venue quand il s’en allait, ou après sa mort. Alors qu’il était déjà dans la déshérence, terriblement seul au milieu des huées silencieuses et des hourras. Comme si un cordon invisible l’avait enceint et isolé des célébrations tardives. Un cas de plus de la cruauté des temporalités dans la littérature, entre ceux qui prennent le train, ceux qui restent à quai, ceux qui arrivent en retard et courent derrière lui. Ceux qui ont loupé le bon moment ou pris le mauvais train…Une histoire de fortunes et d’infortunes, mais aussi celle d’une mystérieuse incompréhension. Mais l’essentiel semble bien acquis. Au total, une dizaine de livres en 25 ans, et les louangeurs universitaires avaient bien raison : Williams Sassine est de la trempe des plus grands. Et sa tragédie relative ajoute à la chose un surplus de saveur. Plus que l’indignation et la marge, l’un qui dit la seule colère, l’autre qui dit la potentielle folie sublime, c’est le rire qui semble être le soleil illuminé et édenté qui transcende ses livres et sa vie. Un rire peu exclamatif ou ivre. Un rire pudique et inquiet. Un rire comme offre de fraternité. Un rire sans hostilité. Un rire attaché à l’amour de sa terre et des siens. Mais un rire à l’image de ces « héros » ou « zéros » qui peuplent ses livres, combattants pour des valeurs nobles mais semblant condamnées. Un rire grave qui fait écho aux mots de Romain Gary dans La promesse de l’aube (1960), autobiographie sublime où l’autre prophète de la gaité et de l’humour inquiets, comme thérapie face à la brutalité du monde, écrivait : « j’ai grandi dans l’attente du jour où je pourrais tendre enfin ma main vers le voile qui obscurcissait l’univers et découvrir soudain un visage de sagesse et de pitié ; j’ai voulu disputer, aux dieux absurdes et ivres de leur puissance, la possession du monde, et rendre la terre à ceux qui l’habitent de leur courage et de leur amour. »
Ce texte fait partie des "Damnés de leur terre", une série proposée par Elgas, publiée une première fois sur le site béninois Biscottes littéraires, en décembre 2020. Elle revient sur des parcours, des destins, vies, de cinq auteurs africains qui ont marqué leur temps et qui restent au cœur de controverses encore vives. Axelle Kabou, Williams Sassine, Bolya Baenga, Mongo Béti, Léopold Sédar Senghor. La série est une manière de rendre hommage à ces auteurs singuliers et de promouvoir une idée chère à Elgas : le désaccord sans l’hostilité, comme le fondement même de la démocratie intellectuelle et littéraire.
Le prochain épisode est à lire sur SenePlus lundi prochain, le 16 août.
«LA DECISION DU CNRA NE S’APPUIE SUR AUCUNE LOGIQUE, NI FONDEMENT»
Samba Mballo, comédien, se prononce sur la censure de la saison 3 d’«Infidèles»
Samba Mballo est un artiste-comédien, metteur en scène et animateur de communauté. Il donne sa position sur la censure par le Conseil national de régularisation de l’audiovisuel (Cnra) de la saison 3 de la série «Infidèles» en affichant son désaccord, non sans en donner les raisons. Directeur artistique de la compagnie Scène égale théâtre forum et vice-président du Comité national de relance du théâtre sénégalais et Secrétaire général du Caada national (Collectif des associations artistiques pour le développement de l’art) aborde d’autres questions relatives au théâtre sénégalais.
Comment jugez-vous le théâtre sénégalais, plus particulièrement les téléfilms ?
Le théâtre sénégalais vit une transition, du fait de la mise en place d’une nouvelle dynamique de promotion des œuvres à l’intérieur du pays et la participation des acteurs a des évènements majeurs sur le continent. Il y a une certaine prise de conscience de certaines autorités qui suscite un nouvel espoir chez les acteurs, bien que la question d’un fonds dédié au théâtre soit toujours pendante Quant aux téléfilms, nous voyons une prolifération de productions qui est due à des facteurs comme la libéralisation du matériel audiovisuel et la possibilité pour les acteurs de diffuser sur leurs propres plateformes, qui échappent à tout contrôle de la part de la Direction de la cinématographie et de l’autorité de régulation (Cnra). Cette situation d’autoproduction de masse soulève de nombreux problèmes sur la qualité et surtout les conditions d’exercice de la profession d’acteur.
Beaucoup de critiques s’abattent sur les téléfilms, reprochant aux producteurs de dévaloriser la femme sénégalaise. Quelle est votre opinion sur la question ?
Personne ne peut exercer une profession qui impactent des milliers de vies et refuser des critiques. Par contre beaucoup de critiques sur les produits audio-visuels ne sont pas fondées du fait de la méconnaissance du sous-secteur par les populations. Déjà, toutes les scènes qu’on critique ont déjà existé dans certaines productions adulées par les Séné - galais. Nous sommes un Peuple jeune et ignorant sur la fiction. Du coup, notre jugement est d’abord nostalgique d’une époque de la télévision unique avec des productions qui passaient à la case censure. Beaucoup de Sénégalais veulent revoir Daray Kocc en 2021 et dans un monde globalisé. Nous sommes certes conscients des enjeux de préservation de patrimoine, par contre c’est un faux débat que de dire que nos séries dévalorisent la femme sénégalaise alors que nous n’avons aucun modèle de développement avec un schéma précis sur le type de femme que nous voulons. Les téléfilms mettent à nu les tares d’une société où la dépigmentation est un problème et où le style vestimentaire est globalisé. Les Sénégalais font un faux procès à nos téléfilms qui ne montrent que ce qui se passe dans nos quartiers et ce qu’on cautionne tous les jours dans la presse. Maintenant, il faut savoir que les questions d’esthétique sont aussi des questions de choix liées aux aspirations des individus qui font leurs produits. Enfin, il faut aussi comprendre que les produits actuels s’exportent bien. Du coup, ils sont aussi conçus pour un public africain dans lequel nous retrouvons d’autres réalités ; d’où les connections entre les acteurs du continent dans les nouvelles productions.
Comment faire pour que ces téléfilms remplissent leur rôle qui est d’éduquer et de conscientiser la masse au lieu de participer à dégrader la bonne te nue ?
Déjà, nous ne pouvons attribuer aucune dégradation de mœurs aux téléfilms sénégalais, même si nous reconnaissons que des efforts peuvent être faits en matière d’esthétique et surtout de contenu. Tout le luxe supposé mis en avant dans les séries cache en réalité un manque de moyens des producteurs à tourner dans des décors naturels ou concevoir des visuels qui reflètent toute la diversité architecturale du Sénégal. Puisque la demande est là, il faut donc que l’Etat prenne ses responsabilités en réalisant des projets comme une cité du cinéma, une école nationale de formation aux métiers du cinéma, entre autres. Ensuite, résoudre une fois pour toutes la question du financement car aujourd’- hui si nous voulons des productions sénégalaises conçues pour le Sénégal, il va falloir, selon les besoins actuels, injecter 10 milliards par an durant 10 ans et ça je ne pense pas que l’opinion qui critique les productions sera en mesure d’accepter des investissements de ce genre. Il faut que nous puissions ensemble nous accorder sur le modèle que nous voulons. Ensuite, mettre les moyens qu’il faut pour mettre en avant ce modèle et, enfin, accepter que dans des professions artistiques, le brin de folie des créateurs n’est pas compréhensif par le grand public. Ceci étant, le rôle d’éducation est d’abord celui de la famille, l’école, le quartier et non dévolu à des mécanismes de divertissement ou d’influence. Les téléfilms peuvent accompagner l’influence du Sénégal dans la sous-région en mettant en avant nos produits et notre savoir-faire. Alors, affaiblir ce sous-secteur avec des critiques non fondées sera catastrophique pour notre position sur le continent, au moment où les Nigérians ont réussi avec Nollywood.
Ne jugez-vous pas normal le fait que le Cnra agisse pour arrêter toute forme de dérapage com - me il l’a fait avec la saison 3 de la série «Infidèles» en la censurant ?
La décision du Cnra est d’abord une violation de l’article 10 de la Constitution qui consacre la liberté d’expression au Sénégal. Il ne s’appuie sur aucune logique, ni fondement. Le premier point qui prouve déjà qu’il y a un lobby mal intentionné qui veut freiner nos productions audiovisuelles, c’est d’abord que le Cnra nous informe qu’il y a 48 plaignants en plus d’autres Sénégalais sans nous dire qui sont ces personnes et sur quel support ils ont visionné la série, car pour information, l’épisode à polémique n’a été diffusé que sur la plateforme payante wido. Ensuite, le communiqué ne nous dit pas si le producteur a été convoqué. On apprend juste une suspension, donc une décision favorable à une partie sans entendre la deuxième. Cette décision manque de partialité. Le Cnra doit nous dire pourquoi un épisode de la saison 2 non diffusé à la télé entraîne la suspension de la saison 3, d’autant plus que c’est l’autorité de régulation qui nous informe que le teaser de la saison 3 est diffusé sur internet. Aujourd’hui, le cinéma sénégalais est en danger car le Cnra a décidé de céder face à un lobby religieux dans un pays où tous les ménages urbains regardent les chaînes des bouquets satellites. Cette décision est révélatrice de deux choses : les acteurs ne sont pas représentés au Cnra ; la politique culturelle de ce pays est en contradiction avec les ambitions affichées de l’émergence. Nos médias sont de gros consommateurs de films étrangers et on veut nous interdire de produire des films pour le monde. C’est scandaleux et nous allons, de ce fait, constituer une plateforme de l’ensemble des acteurs pour défendre la corporation et surtout défendre tous ces emplois qui risquent d’être menacés si on se plie à la simple volonté d’une organisation, qui refuse d’accepter que nous sommes dans une République laïque comme le stipule l’article premier de notre Constitution. La vraie raison de la suspension de la saison 3, c’est que le Cnra, en réalité, n’a pas les compétences pour suspendre la saison 2 qui est en cours sur Sunu yeuf de Canal+, sur youtube et la plateforme wido d’Orange. Du coup, pour faire plaisir au lobby religieux, ils suspendent une saison qui n’est pas encore là pour leurrer les Sénégalais. Car, le producteur lui-même avait déjà décidé de ne pas la diffuser à la télé, pour des questions contractuelles.
DÉDICACE DU ROMAN ‘’TAXI 359 : DU RÊVE AMÉRICAIN AU CAUCHEMAR’’
Mbour, 8 août (APS) – Le journaliste et écrivain Samba Oumar Fall compte organiser à Dakar une cérémonie de dédicace de son livre ‘’Taxi 359 : du rêve américain au cauchemar’’, publié par les éditions l’Harmattan, en 2019.
Le but consiste à favoriser sa vulgarisation au Sénégal, après sa parution à l’étranger, a-t-il expliqué dans un entretien accordé à l’APS.
‘’Taxi 359 : du rêve américain au cauchemar’’, un roman coécrit par les journalistes sénégalais, Samba Oumar Fall et Papa Waly Ndao, est un cri du cœur destiné à dénoncer toutes ces vies arrachées sans raison aucune, dont celles de citoyens sénégalais vivant aux Etats-Unis d’Amérique.
Ce roman retrace particulièrement l’’histoire de Papa Mor Thiam. Thiam est en fait "un jeune sénégalais placide, resplendissant de santé, pétillant d’ambitions, généreux jusqu’à la moelle épinière, sociable comme pas deux’’, qui n’avait qu’un rêve : aller aux États-Unis et réussir.
‘’Un rêve qui se réalise en 2000. Il n’avait que 17 ans. Mais jamais, il ne s’était douté qu’il reviendrait chez lui dans un cercueil encore moins que son vœu d’être enterré à Touba se réaliserait avant ses quarante ans’’, écrit Samba Oumar Fall, journaliste au quotidien national Le Soleil et un des auteurs de ce roman.
La vie de Pape Thiam va basculer un soir du 16 novembre 2014, à Louisville, dans l’État du Kentucky, aux Etats-Unis.
Quatre jeunes américains, pour lui prendre son argent, lui ont tendu un piège dont il n’est pas sorti vivant. N’ayant pas obtenu ce qu’ils cherchaient, ces adolescents l’ont abattu par balles, dans son taxi.
‘’Son procès, un procès marathon, n’a rien donné. L’arme du crime ayant disparu, les quatre jeunes, arrêtés, n’ont pas été reconnus coupables de meurtre, mais de vol et d’agression. Une véritable aberration !’’, s’indigne Samba Oumar Fall, coauteur du livre avec son confrère Papa Waly Ndao, avec qui il a travaillé au quotidien sportif sénégalais ‘’Stades’’.
Il explique c’est ce dernier, un ‘’ami et frère’’, qui l’a embarqué dans ce ‘’projet à la fois captivant et important qui devrait intéresser tout Sénégalais, parce que touchant une thématique importante : le meurtre de nos compatriotes à l’étranger’’.
‘’Cette œuvre nous a pris des années de recherche, d’investigations et de rédaction. Et Dieu merci, nous avons réussi à publier ce livre en juin 2019’’, a rappelé le journaliste-écrivain pour qui des Pape Thiam, il y en a eu beaucoup aux Etats-Unis, en Europe et un peu partout dans le monde.
‘’Nombreux sont les Sénégalais à être tombés sous le feu des balles, poignardés ou tués tout simplement parce qu’ils avaient un rêve, celui de réussir’’, a déploré Samba Oumar Fall.
Récemment, l’Université de Pennsylvanie a réalisé une étude sur ce livre qui, bien qu’étiqueté "roman" sur sa couverture, est rangé par des spécialistes américains de la littérature dans la section "True Crime" (Vrai crime, en français).
TRAFIC DE VISA : LES MISES EN GARDE DE CARLOU D À SES AMIS ARTISTES
Carlou D reconnaît l’existence de trafic de visa dans le milieu des artistes. Selon lui, ces pratiques, mises au-devant de la scène ces derniers jours avec l’affaire du rappeur Kilifeu, sont bien une réalité dans le monde artistique. Mais parfois, a-t-il estimé, les artistes le font de bonne foi. « C’est un problème super compliqué. Parce que, si tu es artiste, tout le monde vient vers toi. Que ce soit vos frères ou bien même vos amis avec qui tu passes tout le temps. Avant même qu’il soit un problème financier, c’est parfois un problème de famille », a souligné l’artiste chanteur. Toutefois, Carlou D exhorte ses amis artistes à cesser ces pratiques qui sont « un risque pour leur carrière ».
À chaque fois qu’un artiste prépare un concert à l’étranger, il y a des gens qui viennent pour qu’ils les mettent dans le groupe. Si vous voyez la tournure qu’il a pris ces temps-ci, vous allez vous rendre compte que c’est une réalité. Mais, chaque artiste doit savoir gérer sa carrière. Avant tout, nous sommes des musiciens, il faudrait que les artistes cessent ces pratiques. Parce que non seulement, ça pourrait les bloquer à ne plus mettre les pieds à l’étranger, mais également, ils peuvent se retrouver en prison », a-t-il déclaré.
Ibrahima Loucard plus connu sous le nom de Carlou D s’exprimait en marge du festival Afrik Impact qui se tient à Denver du 6 au 27 août 2021. L’artiste sénégalais fait partie des têtes d’affiche de ce festival, inscrit désormais dans l’agenda culturel du Colorado aux Etats-Unis.
LES LÉBOUS ONT-ILS RAISON DE RÉCLAMER DAKAR ?
Parce qu’ils sont historiquement implantés sur la presqu’île du Cap-Vert, les Lébous estiment que la mairie de la capitale devrait leur revenir à l’issue des élections locales de janvier 2022. Une revendication ethno-politique qui détonne
Jeune Afrique |
Ousseynou Nar Guèye |
Publication 08/08/2021
Mi-juin, réunis en grand conclave à Dakar, sur la plage dite de la Mosquée de la Divinité, les Lébous ont donné de la voix. Les membres de cette communauté, géographiquement concentrée sur la presqu’île du Cap-Vert qui héberge la région de Dakar, ont énuméré leurs revendications : que les droits de leurs pêcheurs soient mieux défendus face aux bateaux-usines chinois, que les terrains désaffectés de la capitale leur soient prioritairement réattribués et surtout, car c’est bien là ce qui a retenu l’attention, que la mairie de Dakar leur revienne à l’issue des prochaines élections locales, prévues en janvier 2022.
Les Lébous ont précisé que deux ministres pouvaient selon eux prendre les rênes de la capitale : celui de la Santé et de l’Action sociale, Abdoulaye Diouf Sarr, qui est l’actuel maire de la commune de Yoff, ou son collègue chargé de la Pêche, Alioune Ndoye, déjà maire de Dakar-Plateau. Tous deux étaient présents lors du fameux conclave et ils n’ont pas bronché lorsque les notables de leur communauté (Abdoulaye Makhtar Diop, grand Serigne de Dakar, ainsi que l’imam de la grande mosquée de la capitale) ont exprimé leur souhait de faire de l’un ou de l’autre leur champion.
« Ethnicisme municipal »
En réclamant la mairie au nom d’une obligation d’autochtonie, les Lébous portent-ils un sérieux (et inédit) coup de canif à la cohésion nationale ? Acteur de la société civile et directeur exécutif de l’ONG 3D, Moundiaye Cissé s’érige « contre tout ethnicisme, y compris municipal ». Lui-même se décrit comme « Lébou et Sénégalais bon teint ».
Le Sénégal pleure ce samedi 7 août le décès de Mbaye Guèye, ancien champion de lutte âgé de 75 ans. Il est décédé chez lui à Fass Mbao en banlieue de Dakar dans la nuit du vendredi 6 au samedi 7 août suite à une longue maladie. Appelé le premier Tigre de Fass, il était l’un des plus grands lutteurs admirés dans le pays.
L’émotion est grande au Sénégal suite au décès de l’ancien lutteur Mbaye Guèye. Le corps du premier Tigre de Fass a été levé ce samedi 7 août en fin de matinée. Il a été emmené jusqu’à la ville de Touba où il a été enterré dans l’après-midi.
« Il arrivait toujours à terrasser ses adversaires »
« On a perdu un grand champion de la lutte sénégalaise », témoigne Gaston Mbengue, le promoteur de lutte le plus important du pays. Il explique avoir présenté ses condoléances par téléphone pour éviter les rassemblements en temps de pandémie. Mais beaucoup d’acteurs de la lutte se déplaceront dans la soirée à son domicile. C’est le cas de Khalifa Niang, président de l’écurie Tayshinger de Mbao, qui raconte : « Mbaye Guèye symbolisait la témérité et la technicité de la lutte, car il n’était pas grand de taille, mais il arrivait toujours à terrasser ses adversaires ».
Être saint-louisien ou, mieux, un enfant de Saint-Louis, c’est participer d’une culture et je dirais aussi d’un certain ethos que ma famille m’a tout naturellement transmis
Etre saint-louisien constitue une part essentielle de mon identité, alors même que je n’ai pas grandi dans la ville qui m’a vu naître et que je n’y ai jamais séjourné longtemps après que mes parents en sont partis, quand j’étais encore un tout petit enfant. Mais être saint-louisien ou, mieux, un enfant de Saint-Louis, c’est participer d’une culture et je dirais aussi d’un certain ethos que ma famille m’a tout naturellement transmis. J’avancerai en deux mots que cette culture est faite d’une tolérance qui n’est pas condescendance, mais sens du pluralisme.
J’ai dit: enfant de Saint-Louis. Ainsi appelle-t-on, en effet, les Sénégalais originaires de cette ville fondée sur l’île de Ndar en 1659 comme un fort-comptoir français, à qui le roi de France d’alors, Louis XIV, donna le nom de son aïeul. Les Saint-Louisiens ont donc seuls ce singulier privilège, si c’en est un, d’être enfants de leur ville. On ne dit pas, en langue wolof, enfant de Dakar, de Ziguinchor, de Gorée ou de Matam. On est de la ville ou du village où on est né.
[…] Saint-Louis est connu pour être pluriel dans son histoire et les cultures dont la ville a reçu les multiples empreintes, africaines et française, anglaise un moment, arabe, dans un emmêlement de toutes ces identités à la fois et des hybridations qu’elles ont engendrées. Mais l’ethos de tolérance et d’ouverture dont je parle et dont je dis qu’il me fut transmis par ma famille concerne surtout le pluralisme des religions qui ont donné son énergie spirituelle à Saint-Louis. C’est une ville chrétienne où la célébration du 15 août, la fête de l’Assomption, a une importance toute particulière.
C’est surtout aussi la ville du fanal, cette procession de lanternes qui depuis le XVIIIe siècle est organisée par les riches Signares, en route pour la messe de minuit, la veille de Noël. Saint-Louis est également une métropole musulmane ouverte sur la Mauritanie et le Maroc, où nombre de savants de la région sont venus parfaire leurs études islamiques. […] Centre du livre, de la lecture, de la réflexion, du commentaire et de la discussion, où s’est développée une tradition saint-louisienne d’éducation à un islam lettré, rationnel et ouvert. Plusieurs de mes aïeux ont contribué à cette tradition dans laquelle il n’était pas rare de voir les femmes prendre une part active. Ma grand-mère paternelle, fille de marabout, enseignait elle-même le Coran.
C’est à cette tradition que je dois d’avoir été éduqué dans l’idée d’un islam à la fois rationnel et soufi, dans l’idée que le mysticisme n’est pas l’abandon de la raison, mais fleurit au contraire à la fine pointe de celle-ci. C’est une idée dont s’éclairent aujourd’hui mon cheminement et mes écrits en philosophie de la religion. Elle m’est aussi inspirée par les auteurs modernes que je cite souvent parce qu’ils m’aident à savoir ce que je pense: Mohamed Iqbal ou Henri Bergson.
PLAIDOYER POUR LA CREATION D’UN ORCHESTRE REGIONAL
L’artiste musicien Bachir Bèye milite pour la création d’un orchestre régional à Kaolack, un groupe musical appelé à contribuer au maillage à la fois culturel et social de cette région du centre du Sénégal
L’artiste musicien Bachir Bèye milite pour la création d’un orchestre régional à Kaolack, un groupe musical appelé à contribuer au maillage à la fois culturel et social de cette région du centre du Sénégal.
«Sur le plan culturel, la région de Kaolack a beaucoup de potentialités. Il y a ici toutes sortes de musiciens. Nous souhaitons avoir un orchestre régional à Kaolack afin de pouvoir sensibiliser notre public avec des projets de qualité et accessibles à tous», a-t-il dit vendredi, lors de la cérémonie de présentation du nouveau single de la chanteuse kaolackoise Adji Diarra Niang. «Il est normal que Kaolack ait un orchestre régional, qui soit une pépinière de musiciens», a plaidé Bachir Bèye, par ailleurs responsable technique de l’Alliance française de Kaolack.
Cet orchestre régional est destiné à devenir «une pépinière de musiciens. C’est un acteur essentiel du développement et de l’attractivité du territoire. Il va contribuer au maillage à la fois culturel et social de la région de Kaolack», a soutenu le musicien. Je valide, le nouveau single de l’artiste Adji Diarra Niang, a été réalisé en partenariat avec Festaf Life Man, groupe dirigé par Galass Bèye. Adji Diarra Niang, spécialisée dans le «tassou», style traditionnel ayant des similitudes avec le rap, dit préparer la sortie prochaine d’un autre single destiné à sensibiliser les populations de Kaolack sur le coronavirus.
Adji Diarra Niang est la promotrice du Festival sénégalais de tassou (Festass), un rendezvous culturel rassemblant chaque année à Kaolack différentes générations de musiciens et chanteurs de toutes les spécialités : tassoukattes, rappeurs, poètes et communicateurs traditionnels. Ce festival a pour but de contribuer à «redynamiser la culture, particulièrement le ‘’tassou’’ à Kaolack», selon sa promotrice.
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SI MON ART VOUS ÉTAIT CONTÉ
Artiste-autodidacte, il cultive le crayonnage depuis son jeune âge et en a fait son métier. Que ce soit Sadio Mané, Morgan Freeman, Youssou Ndour, Lupita tous ces stars dans leurs domaines respectifs n’ont pas échappé à la rigueur du crayon d’Adama Mbow
Artiste-artiste autodidacte, spécialiste du crayonnage, Adama Mbow cultive cet art depuis sa tendre enfance sans avoir été encadré par un tiers. Mais le plus surprenant c’est que dans sa famille frères et sœurs, père et mère ont toujours dessiné par passion. Le temps passant, Adama a, lui, décidé d’en faire son métier. Et pour parfaire son art, il clôture ses études en langue et civilisation ibérique pour intégrer l’école nationale des arts. Un choix qui lui permet d’ajouter de nouvelles cordes à son arc en tant qu’artiste puisqu’il va s’enrichir de nouvelles expressions artistiques.
Spécialiste du crayonnage, Adama Mbow réalise notamment des portraits. Des artistes célèbres, des grands chef religieux en passants par des réalités sociales, rien n’échappe à la rigueur de son crayon. Prétendant n’être pas intéressé par l’argent, Adama Mbow nourrit l’ambition de faire plutôt de la transmission de son bagage en tant qu’artiste. Dans cette entrevue, le jeune artiste saint-Louisien, nous raconte comment tout cela a commencé ainsi que les perspectives qui se dessinent pour lui après sa formation à l’École nationale des arts.