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3 décembre 2024
Culture
«BAAMUM NAFI» DANS LA COURSE
Après Félicité de Alain Gomis en 2017 et Atlantique de Mati Diop en 2019, c’est au tour de Baamum Nafi, le long métrage de Mamadou Dia, de représenter le Sénégal à ce prestigieux rendez-vous du cinéma mondial
Le film «Bamuum Nafi» de Mamadou Dia représentera le Sénégal à la course aux Oscars. Film totalement réalisé avec des financements sénégalais, le long métrage de Mamadou Dia suit les pas de «Félicité» de Alain Gomis et «Atlantique» de Mati Diop.
Le Sénégal sera bien présent dans la course aux Oscars de cette année. Après Félicité de Alain Gomis en 2017 et Atlantique de Mati Diop en 2019, c’est au tour de Baamum Nafi, le long métrage de Mamadou Dia, de représenter le Sénégal à ce prestigieux rendez-vous du cinéma mondial. L’annonce a été faite par le Hollywood Reporter qui indique dans un article que «le Sénégal a choisi le film Nafi’s father pour le représenter à la catégorie Meilleur long métrage international aux Oscars». «C’est un honneur de pouvoir représenter le Sénégal aux Oscars. Comme le disait l’ex directeur de la Cinématographie Hughes Diaz, c’est bon que notre pays puisse se présenter chaque année avec une nouvelle production. C’est donc un grand plaisir de représenter le Sénégal cette année et de suivre les pas de Félicité et Atlantique», s’est réjoui le réalisateur sénégalais au téléphone.
Il faut dire que si Bamuum Nafi est le 3e film sénégalais à concourir aux Oscars, l’on peut dire qu’il s’agit du premier film 100% sénégalais à atteindre ce niveau puisque aussi bien Félicité que Atlantique ont été des coproductions dans lesquelles le Sénégal a eu une participation financière minime. «C’est un film 100% sénégalais puisque mon associé et producteur Maba Ba, à travers notre compagnie Joydidi, nous avons entièrement produit ce film. Nous l’avons fait nous-mêmes, pas parce que nous ne voulions pas de coproducteur, mais nous n’en avons pas eu. Et Joydidi a fait le choix de produire seul parce que c’est un sujet sensible et c’est aussi un film qu’on pensait être prêt à faire par nous-mêmes et nous l’avons fait», explique Mamadou Dia. Autre fierté pour le réalisateur, le fait d’avoir travaillée avec une équipe technique sénégalaise. Pourtant, se réjouit son réalisateur, les acteurs du film sont des amateurs pour la plupart. «C’était toute la population de Matam qui était les acteurs et la plupart n’avaient jamais joué dans un film, à part les deux personnages principaux interprétés par Alassane Sy et Seïkou Lô qui sont des professionnels. C’est un projet qui a été fait avec beaucoup d’amour et très peu d’argent. Donc nous sommes très contents et fiers de ça», indique M. Dia. «Tokara veut épouser sa cousine, la belle Nafi, ce qui met leurs pères en conflit. Le plus jeune frère est un religieux de haut rang, l’autre un candidat à la mairie de la petite ville du nord-est du Sénégal où se déroule le film. Au début, leur lutte fraternelle semble porter uniquement sur le bonheur de leurs enfants, mais peu à peu, ces derniers deviennent les pions d’une dispute amère sur la tradition, le progrès et la vraie nature de l’islam. Leurs liens familiaux peuvent-ils les aider à surmonter ces différences idéologiques ?» Ainsi ce résume ce film qui a remporté deux distinctions au Festival de Locarno.
Le défi d’être short-listé
Pour le moment, Bamuum Nafi est dans la première liste des films sélectionnés. Et les prochaines étapes seront de faire le maximum de communication autour du film. «Avoir les gens autour du film, être sûr que le film est suivi par les membres votants de l’Académie des oscars», informe Mamadou Dia qui entend se tourner vers la direction de la Cinématographie pour bénéficier des expériences acquises avec Félicité et Atlantique. Une façon de relever à coût sûr le premier défi, à savoir être sur la short-liste. Une étape que les films sénégalais n’ont pas encore pu dépasser jusque-là. Même si le film n’a pas de distributeur aux Etats-Unis, Mamadou Dia conserve son optimisme. «Au Etats-Unis, on s’est surtout basé sur la distribution par les festivals. On a fait le Festival d’Atlanta où on a gagné le Prix du jury. On a fait le New directors new film qui se passe au Museum of modern art du Lincoln center à New York. Mais beaucoup des films qui sont sélectionnés n’ont pas de distributeurs aux Usa.»
CETTE PANDÉMIE DONNE À RÉFLÉCHIR SUR LA PATHÉTIQUE FRAGILITÉ DE LA VIE
Du contexte sanitaire à la création littéraire nationale, en passant par l’émigration des jeunes, Ken Bugul, auteure du célèbre roman « Le baobab fou », répond sans détours dans cet entretien
Réinventer un monde réajusté et renforcer nos capacités de survie et de vie dans un environnement plus proche de la nature et de l’humain. Voilà, la recette de Ken Bugul face aux questions aactuelles. Elle pense que l’homme a toujours la capacité à surmonter les épreuves de la vie, à moins qu’il ne l’exploite par fatalité ou défaitisme. Du contexte sanitaire à la création littéraire nationale, en passant par l’émigration des jeunes, l’auteure du célèbre roman « Le baobab fou », âgée aujourd’hui de 73 ans, nous répond sans détours dans cet entretien.
En tant qu’écrivain, comment vivez-vous cette période de la pandémie Covid-19 ?
La pandémie a affecté tout le monde, écrivain ou non, dans son quotidien. Au début, j’étais un peu déstabilisée par rapport à mes activités programmées, planifiées, mais je me suis réorganisée assez rapidement pour une question de survie. Il fallait continuer à occuper la vie. J’avais un manuscrit à corriger, un nouveau livre sur lequel je travaillais et d’autres activités connexes, des retards de lecture d’ouvrages surtout de la nouvelle génération, et une réécoute des musiques urbaines. Cette pandémie m’a donné l’occasion de réfléchir sur la vie en général dans sa fragilité et sa précarité et de me repencher sur la mienne en particulier dans son optimisme linéaire naïf.
Pensez-vous que les Sénégalais s’en tirent mieux, par rapport à d’autres pays ?
Je ne sais pas ce qui se passe dans le monde en dehors des informations diffusées par les médias. Mais d’après ces mêmes médias, le Sénégal s’en sort assez bien depuis le début. Cependant avec la recrudescence connue ces temps-ci, il faut redoubler d’efforts à tous les niveaux. C’est une question de discipline individuelle pour le salut de tous. Il y a des gens qui ne croient pas à la pandémie, d’autres qui négligent les gestes barrières, d’autres qui s’en remettent à Dieu, en oubliant que Dieu Aime la discipline pour soi-même, pour et envers les autres. Les autorités doivent aussi penser aux circuits socio-culturels traditionnels pour informer et sensibiliser sur la pandémie, mais doivent en profiter pour renforcer les structures sanitaires existantes en les équipant surtout dans les régions et en milieu rural. Dans le Saloum où je suis née, nous avons des structures sanitaires qui ne sont que des bâtiments mais ne sont pas équipés en matériel et en personnel adéquats.
Cette situation, sanitaire, sociale et économique vous-a-t-elle inspiré un thème pour un livre ou non ?
Cette situation ne m’a pas encore inspiré un livre, car nous n’en sommes pas encore sortis. Il faut du recul pour mieux appréhender une situation. Des livres sont sortis à ce sujet, mais sur des spécificités liées à la pandémie, mais pas sur la pandémie elle-même, car elle sévit encore et le virus s’amuse à muter. Des conséquences psychologiques, sociales, économiques, cliniques, sont relevées et relatées, mais ne pas encore traités d’une manière exhaustive dans la littérature. Il y aura beaucoup de publications bientôt, que la pandémie perdure ou qu’elle disparaisse, ce que je souhaite et prie pour. Les réflexions auxquelles la pandémie me pousse au quotidien par rapport à ce que j’observe en moi et dans mon environnement, contribueront certainement à l’écriture d’un livre qui l’utilisera comme toile de fond, mais abordera des questionnements essentiels sur la vie, son sens, son essence, sa finalité et l’homme face à des forces incontrôlables et à sa capacité ou son incapacité à les surmonter, comme depuis les origines de l’humanité. Espérons que l’intelligence et l’utilisation de ses potentialités insoupçonnées mais énormes, pourront aider l’être humain à réinventer un monde réajusté, rééquilibré et renforceront ses capacités de survie et de vie dans un environnement plus proche de la nature et de l’humain.
Justement où en-êtes-vous dans la création littéraire ?
Je viens de terminer la correction d’un manuscrit. Actuellement je travaille sur un projet pour une chorégraphie et j’ai ressorti un manuscrit sur lequel je travaillais. J’ai aussi une pièce de théâtre que je dois dépoussiérer et la travailler. Je suis en permanence en train de travailler ou de penser à un projet. Avoir des projets, projette dans le temps, dans l’imaginaire, dans la créativité et amenuise les petits soucis encombrants et non inspirants du quotidien.
Ces derniers mois, l’on a noté des jeunes sénégalais périr dans l’océan à bord d’embarcations de fortune pour rallier l’Europe. Que pensez-vous de ce phénomène ?
Ce phénomène est récurrent et n’est pas prêt de s’arrêter. Il fait le buzz de temps à autre quand il y a beaucoup de morts en peu de temps. Tous les jours, des hommes, des femmes, des enfants sont en train de mourir ou de vivre dans des conditions inhumaines quelque part sur leur parcours vers l’ailleurs. Il ne s’agit plus d’un ciblage de l’Occident pensé comme un eldorado, mais c’est partir et partir n’importe où. Devoir partir, est le nœud de la problématique du phénomène. C’est sur cela que nous devons réfléchir et nous avons tous les éléments. Pourquoi vouloir partir? C’est légitime de vouloir partir. L’homme est fait pour bouger. L’homme doit bouger. Mais devoir partir et partir n’importe où, comme un suicide, il y a un problème.
Nous devons y réfléchir et y trouver les solutions qui existent. Il faut revoir le système pervers qui s’empare de notre société en la hiérarchisant, en la catégorisant, en les classifiant, à travers des valeurs matérialistes égoïstes et cupides imposées comme nouvelles échelles de valeurs. Où est la connaissance? Où est le savoir? Où est la culture? Où est le respect de la différence? Où est la justice? Où est le sens de la famille? Où est la solidarité séculaire? Où sont nos garde-fous socio-culturels traditionnels qui contribuaient à stabiliser, réguler, et à inculquer des valeurs intrinsèques et endogènes?
Le manuscrit que je viens de terminer en parle mais insiste dans le questionnement sur le motif plutôt que sur les faits en situant toutes les responsabilités.
Vous avez vécu en Europe. Pensez-vous que ces jeunes vont réellement trouver le mieux-être en Occident, l’eldorado ?
Ecoutez, je ne crois pas que l’Europe soit systématiquement visée actuellement. Sa proximité est une raison pour la choisir comme destination dans le «n’importe où». L’Europe est à quatorze ou quinze kilomètres du continent Africain. Du sud de l’Espagne, on peut voir les lumières des villes d’Afrique du Nord, la nuit, en temps clair. J’ai fait avec le grand écrivain congolais Henri Lopez, une rencontre avec des étudiants à Tarifa en Espagne et des étudiants marocains y avaient assisté en faisant une traversée de quatorze kilomètres. C’est une question de proximité. Ceux qui partent visent un espace Schengen tout proche qui leur permettra de se diriger vers d’autres pays. Nous ne parlons pas des autres itinéraires à travers la partie orientale du continent, le désert du Sinaï, vers la Turquie, etc. Il y a aussi les itinéraires plus compliqués à travers l’Amérique latine. Les migrants y rencontrent les mêmes souffrances et la mort. Il faut revoir le film de Moussa Sène Absa, Yole. Ceux qui partent ont connaissance et conscience des difficultés sur le parcours avec ces milliers de morts, hommes, femmes, enfants, des problèmes économiques dans beaucoup de pays d’Europe et d’ailleurs. Il y a aussi la montée du nationalisme, de l’extrême droite, des politiques d’immigration dures, les assassinats par des racistes, par la mafia, le mépris dont les migrants sont victimes en permanence. Les candidats à l’émigration sont au courant de tout cela, mais ils veulent quand même partir. C’est ce «devoir partir» qu’il faut analyser, comprendre et chercher et trouver des solutions. Malheureusement d’un côté comme de l’autre, il y a une méprise et un manque de vision. Les uns donnent des milliards pour freiner l’émigration clandestine, d’autres s’en fichent et n’utilisent pas judicieusement ces fonds alloués à cet effet où les utilisent à d’autres fins. Et pour les uns, les immigrés clandestins ou non contribuent d’une part à l’emploi au noir par des sociétés sans scrupules, et pour les autres ils servent de régulateurs socio-économiques et masquent les insuffisances dans la vision d’une prise en charge responsable des problèmes de chômage et de mal être des gens surtout des jeunes gens harcelés par la société, depuis la cellule familiale.
Vous êtes souvent invitée à des rencontres et salons de livres à travers le monde. Quels échos y avez-vous de la littérature sénégalaise ?
Le Sénégal figure en bonne place dans la littérature. Les noms d’auteurs sont connus, mais pas leurs ouvrages surtout pour les auteurs vivant et se faisant éditer au pays. Il y a un problème au niveau de la chaîne du livre par le manque de promotion, par une implication efficiente des autorités en charge du secteur, de l’auteur jusqu’au lecteur. Les auteurs ont des difficultés pour faire éditer leurs ouvrages, les éditeurs ont des difficultés pour éditer un livre qui nécessite des moyens, des correcteurs quand un livre est retenu pour publication, les techniques relatives à la fabrication d’un bel ouvrage, de bonnes imprimeries qui ont du bon matériel, la distribution, les libraires et un public de lecteurs qui fait défaut. Avant les programmes d’ajustement structurel qui ont été meurtriers avec la culture, surtout avec le livre, le secteur était subventionné. Mais bien que notre autorité de tutelle fasse de son mieux, il reste beaucoup à faire pour booster l’édition. Les mesures imposées par les Programmes d’ajustements structurels (Pas) n’ont pas été réactualisées et réajustés depuis quarante ans, à moins que nous soyons encore sous leur joug. Quand un livre n’est pas distribué, il n’est pas accessible.
C’est le problème pour les autres au Sénégal. Il y a des talents, mais la plupart sont brisés. C’est dommage. En dehors des auteurs qui vivent en Occident, concernant le Sénégal, on cite toujours l’ancienne génération. Alors qu’il y a de talents en herbe dont il faut faire la promotion en les soutenant par des lieux de résidence d’écriture et de création, des bourses et des aides à la création, par des rencontres avec d’autres auteurs, en soutenant la chaîne de fabrication et de diffusion du Livre. Les médias aussi y ont un rôle important à jouer. Il faut que le Cesti incorpore dans son curriculum une spécialisation en art et en culture. La Direction du Livre du Sénégal doit avoir plus de moyens pour faire avancer la littérature d’une manière efficiente et efficace. La littérature ce n’est pas dans la quantité, mais il faut de bons livres de qualité, bien édités, bien distribués. Pour aspirer à devenir un bon écrivain, il faut avoir beaucoup lu et continuer à lire. Il faut être cultivé pour écrire. Le reste c’est avoir le sens de la créativité en lâchant son imaginaire. La littérature ce n’est pas des histoires à raconter c’est l’art de les raconter. Il faut que les jeunes auteurs lisent, qu’ils se cultivent et travaillent un peu plus leurs manuscrits pour sortir des ouvrages de haute facture qui contribueront à peupler nos imaginaires et ceux du monde. Les éditeurs aussi doivent être plus exigeants sur les ouvrages qu’ils publient. Rendons grâces, car depuis quelques temps, de jeunes auteurs sont en train de relever les défis. Il fut les encourager et les soutenir. Le développement ne peut se faire sans le savoir, la connaissance et la culture dont la lecture inspirante et non des ouvrages de faits divers dont on se lasse très vite pour s’orienter vers des séries télévisées et autres novelas dont le niveau intellectuel n’est pas relevé et nous plonge dans des imaginaires aliénants.
Il nous faut rattraper le retard. Le Sénégal était connu comme un pays de grands écrivains et auteurs dramaturges, de grands poètes. Parmi eux, C. H. Kane, Malick Fall, Sembène Ousmane, Mariama Bâ, Aminata Sow Fall, Cheikh Ndao, B.B. Diop, C. Anta. Diop, A. Sadji, Ousmane Socé Diop, L. Senghor, Ibrahima Sall, Abdou Anta Kâ, A. Lamine Sall etc. Les nouvelles générations comme Fatou Diome, Khady Hane, Mariama Ndoye, Sokhna Benga, Felwine Sarr, et tant d’autres dont beaucoup de femmes qui essaient de porter haut le flambeau pour un renouveau de la littérature. Il faut des moyens et de la reconnaissance pour sortir la littérature du folklore et de la médiocrité.
A parcourant vos œuvres littéraires, le lecteur en apprend sur notre société, les rapports femmes-hommes, les traditions, etc. Cette société que vous évoquiez dans vos livres, a-t-elle changé de nos jours ?
La société n’a pas changé. C’est le système social qui a muté brutalement. Nous sommes dans la confusion totale. Nous avons besoin de nous ressaisir, de nous repenser, de nous réinventer. Nous sommes tous responsables. Il faut une vision et une approche endogènes dans tous les secteurs avec une ouverture au monde devenu un village planétaire. Il faut refonder notre système éducatif en recensant ses forces et ses faiblesses qui sont nombreuses. Le niveau baisse de plus en plus. Ce qui manque à notre système éducatif c’est la dimension de la culture qui laisse à désirer. Il y a des étudiants à l’université qui sont incapables de tenir un discours cohérent et fluide. C’est le cerveau qui est incohérent dans sa non maîtrise de ses langues maternelles qui se sont abâtardies, et cela affecte la maîtrise des langues étrangères dans lesquelles ils sont éduqués. Quand on ne maîtrise pas sa langue maternelle, il est difficile de maîtriser une autre langue. C’est cette confusion perturbante qui est en partie, la cause de notre acculturation et jette le flou dans notre quête d’identification et d’identité. Nous en perdons tout un héritage intellectuel, spirituel, un sens du discernement, une cosmogonie. Il faut que nous sortions rapidement de cette zone de confusion pour redevenir l’homme intégral auquel nous aspirons avec nostalgie pour certains, en développant toutes nos potentialités et sortir de la traîne de la dépendance mentale.
Au-delà de la littérature, quelles activités vous occupent maintenant à votre âge?
Je n’ai pas d’âge. Chaque matin, je suis un être tout neuf, prêt à vivre. Je peux parler du temps qui passe en blanchissant mes cheveux, en ridant ma peau, mais il n’affecte pas la vie qui se présente à moi à chaque instant. La vie n’a pas d’âge. Elle est l’instant. Aujourd’hui plus que jamais, je me sens naître chaque jour et je prends la vie à bras le corps et m’occupe à remplir chaque instant dans des actes et des actions utiles, qui ont du sens pour moi et pour ceux qui m’entourent dans mon quartier et partout. Je trouve la vie si excitante et je ne voudrais pas qu’une question de nombre d’années m’empêche de vivre chacun de ses instants. Je lis, j’échange avec les gens que je rencontre partout et n’importe où, je saisis tout bruit, tout son, tout vent. Je contemple la vie qui m’émeut. Je suis émue par la vie et par la création. Et j’aime les gens parce qu’eux aussi m’émeuvent, me touchent et me rapprochent de plus en plus de Dieu, donc de moi-même. Je rends grâce à cette Energie qui est la vie.
J’aime visiter les lieux de culte, faire le marché et la cuisine. Je mange essentiellement ce que je prépare moi-même. Dans mon prochain ouvrage, il y a une partie consacrée à la relation entre faire la cuisine et écrire un livre. C’est pareil. C’est de la création.
LE VOYAGE INTELLECTUEL DE FELWINE SARR
Il nous invite, dans "La saveur des derniers mètres", à partager ses voyages à travers le monde, mais aussi au cheminement d'un homme qui veut repenser notre manière d'habiter le monde et redéfinir la relation entre l'Afrique et les autres continents
L'économiste sénégalais Felwine Sarr est l’un des intellectuels importants du continent Africain. Ecrivain et professeur d'économie, il est également musicien. Deux de ses livres ont notamment fait date : Afrotopia (2016) et Habiter le monde (2017). Avec Achille Mbembé, il est le fondateur des Ateliers de la pensée de Dakar. Chaque année, des intellectuels et artistes s'y rencontrent lors d'un festival des idées transdisciplinaire pour “repenser les devenirs africains” à travers des concepts adaptés aux réalités contemporaines.
"La littérature, les arts, la production d’imaginaires et de sens demeurent de formidables boussoles pour l’humanité. Nous sommes dans une crise de l’imaginaire, nous n’arrivons pas à déboucher les horizons. (Felwine Sarr)
L’utopie nous dit qu’on peut féconder le réel, faire en sorte qu’il y ait un surcroit de réel. (...) Le premier travail est d'imaginer qu' "il est possible de..." (...) Il faut reprendre le chantier qui consiste à dire qu’il existe des horizons souhaitables, qu’il faut les penser, les imaginer, et travailler pour les faire advenir. (Felwine Sarr)
Felwine Sarr a été, avec l’historienne de l’art Bénédicte Savoy, chargé de rédiger un rapport sur la restitution des œuvres d’art africaines spoliées lors de la colonisation, remis à Emmanuel Macron en novembre 2018.
Du guléet. Déedéet. Bindkat bi tëbul rekk bind Bàmmeelu Kocc Barma. Nde, ginnaaw Doomi Golo, bii mooy ñaareelu téereb nettali bu werekaan bi, Bubakar Bóris Jóob, génne ci làmmiñu wolof. Te sax, li ko jiitu, Bóris jot na fee yatt xalimaam gu set gi te neex, tekkil nu téereb Aimé Césaire (Une saison au Congo) bi ci kàllaamay Kocc, tudde ko Nawetu deret.
Moom, nag, tur wu yéeme la tànn, daldi koy duppe ñaareelu téereb nettali bi këru móolukaay EJO génne : Bàmmeelu Kocc Barma.Tur woowu de, day naxe. Ndaxte, du jaar-jaari walla jaloorey boroom xam-xam bu siiw boobu di Kocc Barma Faal la ciy nettali. Déedéet ! Nettali bi nu Bóris di baaxe, walla boog xew-xew yim nuy saabal, muŋleen jukkee ci jéyya ji fi amoon, daanaka 20i at ci ginnaaw : suuxu Gaalug « Joolaa » gi daan lëkkale Ndakaarook Sigicoor. Ndeysaan, ba tey, askan waa ngiy jooy 2000iy doom-aadama yi ci labe woon.
Rongooñ yooyoo tooyal xolu bindkat bi ; mu boole ciy yosam, def leen daa. Ci daa ju tiis jooju te lëndëm la capp xalimaam gi. Ngir biral metit ak njàqare yi 1883i way-labu Gaalu Joolaa gi doon yëg, keroog ba ñuy lab. Dafa di, bu sañoon, bakkan bu ci ne, dina biral sag dund. Maanaam, « 1883 toqi deret. Ak benn. Bunu fàtte benn toqu deret boobu. Bunu ci fàtte benn, sax. »
Waaye, kim ci tànn doy na misaal ñeel way-lab yépp. Li ko waral mooy ne, kooku, dub como. Mukk ! Soxna Kinne Gaajo mi Bubakar Bóris di nettaliy jaar-jaaram ci téere bi, ab taalifkat bu mag la woon, siiwoon lool. Gis ngeen, soxna soosu, turam wër na àddina ndax rafetaayu xalimaam ak solos mbindam. Aka xareñoon ! Ndeysaan, bu dul woon tolof-tolof yim daan jànkoonteel, kenn waxatu ko tey. Bare na ñuñ fiy kañ ak a tagg te Soxna Kinne Gaajo xoolu leen sax. Waaye, ay nattoo ko gaaraloon ba mu àggoon ci di jaay boppam guddi gu nekk ci benn goxu Ndakaaru – Caaroy. Laaj bi bindkat biy laaj ci téere bi, « Taalifkat walla lagara ? », loolu lay wund. Ndege, Soxna si, ñaar yépp la boole woon.
Moom sax, Kinne Gaajo ci boppam, jéggi woon na loolu lépp. Ci dëgg-dëgg, moom daa bokkoon ci nit ñu kéemaane yooyu nga xam ne, bokkuñu ak nit ñi doxalin. Foo ko fekkaan, ciy feemi boppam la daan deme, di ci doxe, di ci waxe. Feemi boppam kese, nag ! Maanaam, nit ku moomoon boppam la ; dara tënku ko woon te tënkuwul woon lu dul ci li ko safoon. Bu yeboo ñu ne, Kinne Gaajo, amul woon tiitukaay. Moo tax bindkat bi ne, « Kinne Gaajo masul a def leneen lu dul jéem a xàll aw yoon. Yoonu boppam. » Looloo tax ay dëkkaaleem ak i xamaaleem jàppe woon ko ni ku ràkkaaju, ku yenuy dàllam, maanaam ab dof.
Jaar-jaar bu doy waar boobu la xaritu-ndawam, doomu-ndeyam ji Njéeme Pay, di nettali, gannaaw ba mu réeree (ak i taalifam yu bare) ci géej gi. Mu mel ni ku nuy fàttali mennum Dawid Jóob mi fi woon : « Mu mel ni kon Dawid Jóob ak Kinne Gaajoo bokk àtte foofu. »
Njéeme Pay, taskatu-xibaar la woon. Mi ngi ame woon lijaasam ci lekkool bu mag boobu ñu duppe Cesti. Ku xareñoon lool ci liggéeyam la. Cib rajo biñ moomaloon seen bopp, moom ak i àndandoom, la daan liggéeye. Rajo ba, Péncoo FM la tuddoon. Ndegam moo dencoon kayiti xaritam yi, Njéeme Pay dafa jàpp ne, sas la ci moom : « …sas nañ Njéeme ». Loolu moo ko tax a yéene biral taalifam yu am maanaa yi mu fi bàyyi, ba noppi « … xamal askan wi kan moo doon Kinne Gaajo… » ndaxte, « Àddina ba àddina daj, amul ku sañ ni moo ma gën a xam Kinne Gaajo. » Lim ko dugge mooy fexe ba àddina sépp xam kan moo doon, dëgg-dëgg, Kinne Gaajo. Njéeme daal, tawax na temm fas yéene noo nettali Kinne Gaajo. Konte, Njéeme Pay, sàmmonte na ak kóllëre gi doxoon ci digganteem ak ndem-si-Yàlla ji, xaritam.
Fi Njéemey daanele nettaleem bi la ko keneen di aw, jël kàddu gi, jokk nettali bi. Loolu, nag, ci feemi bindkat bi la bokk. Ndege, aw-awley nettalikat ci téereb nettali, du lu bees ci mbindiinu Bóris. Njëkk na koo def ci Doomi Golo. Ndaxte, xew-xew yi daan am ca Ñarelaa, góor gi Ngiraan Fay mi doon xaar bésam a nu leen jëkk a jottali laata muy faatu. Gannaaw gi, Aali Këbóoy mi ñépp jàppe woon dof (nees jàppe Kinne Gaajo itam), moo mujje àggale li nu Ngiraan doon nettali.
Nettalikat biy aw Njéeme Pay ci Bàmmeelu Kocc Barma, jigéen la ni moom. Te, ndeyu-mbill gi ci boppam, Kinne Gaajo, ca barsàq ja mu nekk, mooy wéyal nettali bi… Moom la sax de. Baatam beey bëtt suuf si ko sàng ca bàmmeel ba mu roñu, di jib ba ci téere bi. Noonu, mu daldi dekki, di nu xamal ay jaar-jaaram ak i yëg-yëgam. Jàngkat bi, nag, mënul lu dul topp bindkat bi cib « dóor-dàqe » bu dul jeex. Mel ney àndandoo yuy dem ba yàgg, réeroo ; ku ci nekk di wër keneen ki. Ndaxte, yuq gi lal Bàmmeelu Kocc Barma yépp, ci diggante ñaari way-jëmmal yooyu – Kinne ak Njéeme- la ràbboo. Waaye, yemu fa de. Déedéet ! Dangeen a desee xam Bóris rekk. Waaye aka cee aay ! Moo taxit, defatina mëninam. Day wër-wërloo ak yow, naan la « … naxee-mbaay… ». Noonu la lay def, di la wommat, yow miy jàng téereem. Ruq-ruqaan bu nekk mu dugal la fa ; dëkkoo-dëkk mu wërloo la. Tey. Démb. Ëllëg… jamono yépp lay boole ràbb, fu ne mu yóbbu la fa. Moom daal, tëralinu mbindiinam a deme noonu, xoromu lool nag !
Way-jëmmal yiy jëf ak a jëflante ci téerey bindkat bi, mëneesul a xam fum leen di loqatee. Dafa di, ñoom, dañuy méngoo ak jëmm yees leen di melal ba ñu faf mel niy nit dëggantaan. Sàllaaw ! Te, ku la ci gën a am maanaa, nga ne kii. Jëlal taskatu xibaar bu xereñe bi te gëm liggéeyam, « Te surnalist bi, liggéeyam du dara lu dul taataan i xibaar, siiwal leen. », doy na firnde. Walla nga xool kiy mbubboo surnaalist, di mbuxum ak a jaayu ngir lu mu def ci poosam ba mu dëll. Mooy ku njublaŋ kooku, te mu fexe ba yoxosu, dugg ci biir surnaalist yi, fexeeti ba bokk ci seen i njaatige yi gën a am doole ; kooku noonu rekk demoon bay noggatu politiseŋ yu ñàkk-jom yi, « Te kilifa gu fi am alal mbaa bayre mu luqati say mbóot, ni la soo ma joxulee nàngami milyoŋ ma def sama liggéey ». Waaw, kii nga xam ne nag, taal fitna rekk a ko soxal, « Nun surnalist yi nag, na ma Yàlla baal waaye liggéey bu doy waar lanuy def : su musiba dalee ci kow askan wi, lu mu gën a réy, gën a metti, nu gën a raatukaan. » Waaye, geestul it liggéeykatu bànk bu maandu bi, walla waxambaane wu lafañ wii moroomam yiy tooñ,« Am na ñu ma doon kókkali, naan booy bii bumu nu sonal, lafañ doŋŋla. » Nanga xool yit politiseŋ yu ñàkk faayda yi. Nóoxóor yi nga xam ne, seen biir doŋŋ a leen jiital, tax ba bindkat bi (mën a tooñ ba dee !), boole leen ñoom ñépp, waa Nguur geek Kuje gi, di leen ñaawal,« Yëf yi powum mag doŋŋ la : kenn du taxawal pàrti ngir defar sa réew walla jëmale ko kanam. »
Mu am it jeneen jëmm ju am solo ci nettali bi, moo di ndeyu Kinne Gaajo, jigéenu kaw gi, di néew-ji-doole ju ñàkk lépp ba mu des jikko ju rafet ak jom, « Moonte Yaa Ngóone, lim ma won moo doon ne ngor, tabe ak njub, fépp fu suuf si ŋàyyeeku goqiy doomi-aadama, soo demee fekk leen fa. »… Xanaa du noo ko gisandoo ? Ndax deesul a fekk way-jëmmal yu ni mel ci mboolem-nawle mi ? Konte, mel na ni, Bubakar Bóris Jóob du cib maaliforo lay tabaxe ay way-jëmmalam,
Ñi mu nuy indil ñépp, dañuy mat li mu leen soxlaa ba jëmmal leen. Ni tëgg biy naxanteek wurus wi, walla tabaxkatu ndaa biy mooñ banam, « Noo mënti def, fàww nga gajafal ban bi, di ko mocc, di naxanteek moom, daanaka, ba mu miin sa nuggaayu loxo, nooy nepp, ni nemm, lu la neex nga def ko ci. Soo nee : ‘Amoon na fi’, mbooloo mi ni tekk di la déglu, bala ngay sañ ni : ‘Fa la léeb doxe tàbbi géej, bakkan bu ko njëkk a fóon tàbbi Àjjana !’ dinga wax lu set. Wax lu set mooy rekk : teqale, tasaare, ràbb, ràññee bu baax kañ la fen di jur dëgg ak kañ la dëgg di yées fen. Mooy : jëmbët fulla ci sa liggéey – bind liggéey la war a doon – te lu mu metti metti nga muñ ko. » Liggéeyu bindkat bi daal, duy caaxaan walla lu yomb !
Bóris bëggul lu yomb, utul lu yomb. Moo tax, way-jëmmal yi muy tabax làmboo maanaa jees leen xame. Li koy gënatee màndargaal mooy ñaar ñi gën a yées jikko ci Bàmmeelu Kocc Barma : surnalist bii di Lamin Jàllo ak politiseŋ bii di Ngañ Demba. Ndaxte, ñoom ñaar ñooñu kat, li ñuy bon a bon yépp ci jikko, ñoo ciy tamit, ñi ci ëpp xorom, neex deret ba, ñàkk leen a bëgg day jafe. Ndax Bóris jëlul ay nit dëggantaan, ñu xam leen am déet, dugal leen ci téereem bi ?
Bokk na ci màndargay téere bi, ñenn ci way-jëmmal yi bokk ci way-labi gaalug « Joolaa bi ». Fës nañ ci téereb nettali bi lool, sax. Nde, bindkat bi dina dem ba am ñu mu ciy tudd seen i tur dëgg, ànd ceek kersaak yëg-yëg gu réy, ndax li mu leen xamoon, moom ci boppam, ci bi ñuy dund.
Xawma kan, waaye kilifay nguur gi, ñoom, Bóris moyuleen ci téereem bi. Waaye, moo yey xalab leen. Ndax, kat, ñooñu, defuñu lu dul féex, ñàkk yitte, ñàkk aajo, doyadi ba nga ni lii lu mu doon ! Rax-ci-dolli, ñoom ñooñu, ñooy ndeyi-mbill gi, ñoom ñi sàggan ba musiba bu ni mel dal ci kow askan wi. Ak seen yambaraay ! Ak seen cuunewaay ! Ñu waroon a walluji way-lab yi, génne leen ci seen njàqare ji, waaye ñu nooyal ba ñooñu mujjee dee. Bu nu waxantee dëgg rekk, ñoom politiseŋ yi, ci yeneen i itte lañ nekkoon. Ki koy firndeel mooy Seneraal bi làngi woon ca coroom ba, jamono ji jéyya jiy am. Te, boobu, kenn ñemewu ko woon a gëtënsi, fa mu doon gundaandaat, di ko yëgal balaa ba amoon ca géej ga.
Waaye, du njiit yi kese ñoo sikk. Askan wi tamit, kenn demul ñu des. Nde, mooy la waa ji waxoon rekk, askan wu nekk, njiit ya mu yeyoo lay am. Réew moo dem, na askan wa mel, noon lay njiitam mel ndax ca askan wa lañ soqeekoo. Bu ko defee, cuune, yaafus ak càggan yi kilifa yi àndal ba tax jéyyab Joola bi dikkal nu, dees na leen fekk ci askan wi. Loolu la nettalikat bi xam ; ndax ku mën a seetlu la ndeke. Moo tax, deñul ciy sulli mbóoti askan wu déggadi wii, tigi, « … xoolal ma kalandoo yi, njaga-njaay yeek kaar-rapit yi, fu leen neex taxaw, ku ci alkaati laaj say kayit nga tàllal ko kayitu téeméer gu tilim mu lem denc, ni la soo ñibbee ngoon nuyul ma Jekk-Tànk ! »
Doxalin bu ni mel, nag, warul a bett kenn. Ndaxte, dara yàqul Senegaal lu dul yëfi maa-tey ak maslaa bu ëpp. Nde, Senegaal mooy réew moo xam ne « … lu neex waay mu def te dara du la ci fekk ! ». Bi Joolaa bi suuxee ak léegi ba Njéeme Pay di nu ko nettali, am na daanaka 20i at. Waaye, la woon, fa woon, na woon. Jikko yi soppeekuwuñ. Moom, kay, ndax yéesul sax lees di laaj. « Lu fi xewati sama ginnaaw ? Pólitig rekk. Ndékkee pólitig, añe pólitig, reere pólitig. Kon, ci gàttal : dara lu bees xewu fi. Masàmba randu, Mademba riigu. Waaye Mademba, dañ koy wax nag te dee, masutoon a xalaat ne bés dina ñëw mu ne faax ci jal bi. Fit wi rëcc, mook soxnaam ñuy giroo cere ji, di ko caxat-caxatee, ku ci gën a fëqle sa moroom nga ne kii la ! ». Jikko de, dinañuy wax ne laago la ! Te, laago du wér. Am déet ?
Nun nag, njort nanu bu baax ne, ci gis-gisu Bóris, tóoxidóoni bu « Joolaa » bii, amul lu ko gën a ñàng : « Bi Senegaal dee Senegaal ba tey, dara masu fee xew lu ëpp solo suuxu Joolaa bi ». Monte, ñakkul ne, xew-xew yooyu yépp, lenn rekk lay wund : dàq ganaar, waxaale sa soxla. Maanaam, dafa mel ni bindkat bi day sukkandikoo suuxu Joola bi ngir xamal nu leneen : ngir tey gëstu bi muy gëstu ñeel aadaak cosaanu askanam. Uséynu Béey
(Ñaareelu pàcc bi feek i fan)
UNE ENVELOPPE, MILLE EQUATIONS
S’il est vrai que tout soutien est la bienvenue en cette période de disette, force est de reconnaître que le flou reste entier sur le profil des bénéficiaires de l'aide de l'Etat aux acteurs culturels
Une cagnotte de 2,5 milliards de francs CFA pour soutenir les acteurs culturels sérieusement impactés par la fermeture des lieux de spectacle en raison de la riposte contre la Covid. S’il est vrai que tout soutien est la bienvenue en cette période de disette, force est de reconnaître que le flou reste entier sur le profil des bénéficiaires. Acteurs et tutelle se renvoient la patate chaude de la répartition.
2,5 milliards de francs CFA. C’est le montant que le chef de l’état a décidé d’allouer aux acteurs culturels. Un soutien octroyé au lendemain des manifestations des acteurs qui protestaient contre l’interdiction des rassemblements. «Le chef de l’Etat m’a demandé mercredi de mettre à votre disposition une enveloppe de 2,5 milliards de francs CFA en guise d’aide. Il ne s’agit pas encore une fois d’un remboursement. Je vous rappelle que la santé des Sénégalais reste la priorité des priorités», déclarait le ministre de la Culture et de la Communication à l’issue d’une rencontre avec les acteurs.
FLOU AUTOUR DES AYANTS DROIT
2,5 milliards de francs cfa. A première vue, le montant peut sembler important. Mais qui doit en bénéficier ? Qui est acteur culturel ? Le ministre lui semble préférer laisser aux acteurs y répondre. «Je recommande aux acteurs culturels de réfléchir à une clé de répartition du fonds d’aide qui leur est destiné», a-til lancé aux acteurs. Et de leur côté, l’heure est à la prudence. Dans un communiqué, la Coalition des acteurs culturels (Cam), comme pour dégager ses responsabilités, estimait que «la meilleure solution c’est de ne pas donner l’argent aux associations. La Cam et ses alliés demandent au ministre de la Culture et de la communication que la gestion et la distribution de cette subvention restent sous la responsabilité directe du ministère de la Culture». Aujourd’hui le flou est entier. On parle de 5000 danseurs, même si le chiffre peut sembler abusé, il en dit beaucoup sur le manque d’organisation de ce secteur. Pour rappel, lors de la première vague, l’état avait mis 3 milliards pour soutenir les acteurs.
A l’époque, le mode de répartition suscitait des interrogations. Par exemple, 100 millions de FCFA ont été alloués aux communicateurs traditionnels. Journaliste culturelle et critique de cinéma. Oumy Régina Sambou est convaincue qu’il n’y a pas une seule clé de répartition qui vaille. Selon elle, cette enveloppe devrait plutôt servir à la structuration du secteur de la culture. «C’est le seul moyen de la rentabiliser. Personnellement, je ne vois aucune grille de répartition pertinente», estime-t-elle.
FOU MALADE «POURQUOI NOUS AVONS LAISSE LA PATATE CHAUDE AU MINISTERE»
Pour Malal Talla alias Fou Malade, par ailleurs membre de la Sodav, l’enveloppe de 2,5 milliards de francs cfa ne règle pas le problème. En effet, selon le rappeur, depuis que la fermeture des lieux de spectacle a été annoncée, beaucoup qui se réclament acteurs culturels s’agitent alors que depuis belles lurettes, ils n’ont produit aucun spectacle. «C’est pourquoi nous, de la coalition des acteurs de la musique avons dit au ministère de lui-même s’occuper du dispatching. Nous sommes contre cette manière de procéder. Le moyen utilisé n’est pas le bon. On y voit des acteurs culturels qui ne sont pas actifs. Il y a qui n’ont pas de spectacle depuis des années. Est-ce qu’ils ont le droit de réclamer autant que Dip, Viviane, Waly... qui sont tout le temps en activité», s’interroge-t-il. Selon Malal, s’il y a désordre, c’est en partie parce qu’on ne sait pas qui est acteur culturel et qui ne l’est pas. «Celui qui fait le Bongo peut se lever et demander sa part, personne n’y pourra rien. C’est pourquoi le statut de l’artiste va permettre de régler une bonne partie du problème», espère-t-il.
LA COALITION DES ACTEURS DE LA MUSIQUE RECLAME PLUTOT UN AUDIT DES FONDS PASSES
C’est à croire que l’affaire est loin d’être réglée. En effet, la Coalition des Acteurs de la musique (CAM) et Alliés qui regroupe une quarantaine d’organisations et structures de la culture qui se sont réunis ce dimanche pour définir la conduite à tenir a plutôt Mis de l’huile sur le feu. Dans un communiqué, elle révèle qu’après avoir mené plusieurs démarches, pour une issue heureuse, elle a été finalement écartée. « Le mercredi 23 décembre 2020, la CAM et ses Alliés tenaient un sit-in à la place de la Nation pour dénoncer l’injustice faite aux acteurs du spectacle vivant.
Ensuite le 24 décembre 2020, le ministre de la Culture invite la CAM et ses Alliés pour leur annoncer une aide de 2,5 milliards accordée par M. Le Président de la République. Deux jours plus tard, une délégation de la CAM est reçue par le Directeur de Cabinet du chef de l’Etat en compagnie du conseiller culturel à la présidence pour travailler ensemble sur une sortie de crise engendrée par la pandémie», dit le communiqué. Mais, poursuit le document, le 31 décembre 2020, les membres du comité de pilotage et les représentants des sous-secteurs de la culture sont invités pêle-mêle à la Maison de la Presse pour une réunion de partage et d’informations sur l’aide octroyée aux acteurs culturels. Une réunion à laquelle la Coalition et ses Alliés ont été zappés. « Est-ce parce que nous avions clairement déclaré dès le 24 décembre que nous n’entendions pas que l’argent soit distribué aux responsables d’organisations professionnelles mais plutôt que l’aide arrive à qui de droit ?», s’interrogent les acteurs.
Ainsi, pour la Cam, il faut un audit de la gestion des premiers fonds de 3 milliards octroyés en juin dernier, la mise à l’écart des organisations reconnues coupables de malversations, la gestion par le ministère de la culture du fonds de 2.5 milliards par le biais d’une banque ou tout autre organisme assermenté, la mise en place d’un comité paritaire de veille et de contrôle «dans lequel nous demandons notre droit de siège en tant que Coalition regroupant des organisations de tous les secteurs pour suivre la bonne distribution des fonds destinés à parts égales à chaque acteur culturel».
LA CHRONIQUE DE PAAP SEEN
NOTES DE TERRAIN (1)
EXCLUSIF SENEPLUS - Notes de terrain s'arrête pour un moment - Retrouvez toutes les chroniques de notre éditorialiste Paap Seen - Merci aux lecteurs et aux lectrices
Il y a un an, presque jour pour jour, « Notes de terrain » devenait un rendez-vous hebdomadaire sur SenePlus. Chaque dimanche, je parlais de mes rencontres. Je disais mes expériences. Je faisais des commentaires sur des sujets divers. J’ai décidé de prendre une pause. Retrouvez, ci-dessous, toutes les chroniques. Merci aux lecteurs et aux lectrices.
Divorce Pape Cheikh Et Kya, Jalousie Entre Actrices, Colle dit tout :"Je ne suis plus Mariée à cause..."
par Ousseynou Nar Guèye
LE PAATHIO IRRESPONSABLE DES ACTEURS CULTURELS SÉNÉGALAIS
Avec 5,5 milliards, ce que les acteurs culturels devraient faire, c’est investir dans la création d’entreprises innovantes aptes à opérer dans l’économie de croissance et dans l’acquisition d’immeubles de rapport leur générant des loyers
Le Covid peut être une maladie mentale aussi. Et il me semble pouvoir l’affirmer sans être valablement démenti : c’est ce dont sont atteints les acteurs culturels (auteurs, interprètes, éditeurs et producteurs) qui sont les ayant-droits de la SODAV (Sénégalaise du Droit D’auteur et des Droits voisins du Sénégal) et ceux des acteurs culturels et artistiques sénégalais qui n’en sont pas membres. On ne peut, en effet, pas penser autrement, quand on voit comment ils procèdent pour (ne pas) tirer profit de l’importante manne, au total 5,5 milliards en deux fois, qui leur est remise par l’Etat au titre de l’impact négatif du Covid sur leur activité artistique et culturelle.
Ces acteurs culturels ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et ont décidé, dans les deux cas du cadeau doublement offert par l’Etat, pas plus que de procéder à un paathio, d’autant plus inéquitable qu’il est égalitaire. Pour ce qui est du sous-secteur musique, les 11 816 artistes et auxiliaires qui s’y activent ont reçu chacun un appui égal de 127 148 FCFA par personne après 4 mois d’inactivité dus au Covid. Le partage des 3 milliards en plus d’être égalitaire donc inéquitable, a été un véritable partage de boukki où la Sodav a pris la part de la hyène : selon le document rendu public le 15 juin par celui qui était encore le Directeur des Arts au ministère de tutelle, Abdoulaye Koundoul (depuis lors nommé directeur du théâtre Sorano), il a été convenu que la moitié du fonds, soit 1,5 milliard, soit octroyée à la Sénégalaise des droits d’auteurs et des droits voisins (SODAV dont 90% des recettes proviennent de la musique), 500 millions au cinéma et à l’audiovisuel, 200 millions au livre et à l’édition, 182 millions au théâtre, 100 millions aux communicateurs traditionnels, 50 millions au stylisme et à la mode, 50 millions à la danse, 20 millions au conte, 20 millions aux artistes handicapés et 28 millions aux quatorze centres culturels régionaux (2 millions par centre). Ainsi les chèques qui ont été remis le 30 juin 2020 allaient aux sous-secteurs Arts visuels pour 500 000 000 FCFA, Communication traditionnelle : 100 000 000 FCFA, Musique (hors SODAV) : 500 000 000 FCFA, Cinéma et audiovisuel créatif : 250 000 000 FCFA, Style et mode : 50 000 000 FCFA, Artistes en situation de handicap : 20 000 000 FCFA, Théâtre : Comité de relance : 94 878 000 FCFA, Pôle des Non Alignés : 27 122 000 F CFA. Soit un total de 1 542 000 000 F CFA. Pour compléter le tableau, il faut noter que 85 millions ont été réservés par le comité pour faire face aux imprévus.
Six mois plus tard, en ce mois de décembre 2020, après que les artistes interprètes soient interdits de prestations (notamment ceux de la musique) par le préfet et le gouverneur de Dakar dans les bars, dancings et restaurants et qu’ils aient fait un sit-in ayant réuni de maigres troupes à la Place de la Nation (ex-Obélisque), voici que Macky Sall remet la main au pot, avec cette fois-ci 2,5 milliards, ce 24 décembre 2020, en père Noël des tropiques.
A nouveau, un « comité de pilotage » (qui ne pilote rien à part le pilotage à vue !) est annoncé, pour la « gestion » (sic !) de ce nouveau fonds d’aide de 2,5 milliards de francs CFA alloué aux acteurs culturels pour atténuer l’impact du Covid-19 sur leurs activités, indique la directrice des arts Khoudia Diagne. "On s’est réuni pour discuter de la manière dont ce nouveau fonds devrait être gouverné, qui en a droit, comment faire la répartition’’ ou s’il faut reconduire le mode de gouvernance du premier fonds, a-t-elle indiqué dans un entretien. "Au final, tout le monde était d’accord que le format adopté lors de la première répartition a été la bonne, à savoir qu’il faut un comité de pilotage qui représente tous les sous-secteurs à savoir deux par discipline, et après avoir des sous-comités", a-t-elle indiqué.
Les acteurs culturels étaient représentés par les membres du comité de pilotage du premier fonds et les organisations professionnelles, parmi lesquelles l’Association des métiers de la musique, les Acteurs de l’industrie musicale, la Coalition des acteurs de la musique, "Say Wi". Il a été recommandé, après échanges entre le ministère et les acteurs culturels, que les bases de données soient revues par chaque sous-secteur, ces dernières ayant fait l’objet des nombreuses discordances lors de la première répartition du fonds de trois milliards accordés aux artistes. "Il faut que ces bases de données soient réactualisées par les sous-secteurs et après on en fera un document de base de travail pour cette nouvelle répartition", a souligné la directrice des arts. Les acteurs culturels ont proposé aussi que le fonds soit logé dans une banque et que les aides soient remises sous forme de chèque aux ayant droits. La directrice des arts estime que ce point "nécessite des discussions, il nous faut retourner vers l’autorité pour voir si cela va être validé ou pas".
« Cet appui vise à permettre aux acteurs de mieux supporter les impacts négatifs du COVID-19 sur leurs activités, les manifestations culturelles n’étant pas encore autorisées en raison de la résurgence de la pandémie. »
Eh bien, toutes ces recommandations sont légères et perdent de vue l’essentiel : avec 5,5 milliards, ce que les acteurs culturels devraient faire, c’est investir dans la création d’entreprises innovantes aptes à opérer dans l’économie de croissance et dans l’acquisition d’immeubles de rapport leur générant des loyers et de salles de spectacles leur appartenant, ceci pour leur vie entière et au-delà. L’Etat qui les laisse ne pas faire ceci est aussi coupable de non-assistance : l’appui financier doit s’accompagner de renforcement de capacités en gestion et stratégies d’autonomisation. Il est irresponsable qu’on maintienne ainsi les acteurs culturels dans une économie de subsistance et une posture de politique de la sébile tendue, avec des sommes qui ne servent qu’à faire bouillir la marmite jusqu’à ce que les sommes en question fondent et disparaissent naturellement comme neige au Sahara. A ce rythme, même si 1000 milliards, soit le quart du budget annuel du Sénégal, était octroyé aux acteurs culturels covidés, cela ne ferait jamais que 1 million pour chacun, vite englouti par les dépenses ordinaires de la vie quotidienne.
Et pour ces 5,5 milliards, certains esprits à courte vue disent que les « grands » artistes devraient céder leur part aux « petits » : Pourquoi ? Les « grands » sont des Sénégalais comme les autres et ce sont aussi leurs impôts qui abondent ces dons. Ensuite, des artistes dont les œuvres ne sont pas inscrites au répertoire de la SODAV du fait qu’elles ont un éditeur musical étranger (français pour la plupart, et sont donc à la SACEM) comme Duggy Tee, Awadi, Ismaël Lô ou autres n’ont pas reçu et ne recevront pas un kopeck de ces 5,5 milliards : la fuite des œuvres à l’étranger, un autre sujet à aborder pour une autre fois. Oui le Covid n’est pas qu’une maladie physiologique. Le Covid est aussi une maladie mentale. Et les acteurs culturels sénégalais en sont frappés. Leur donner des milliards relève de l’acharnement thérapeutique qui ne changera pas leur situation de précarité structurelle.
Ousseynou Nar Gueye est Directeur général d’Axes et Cibles Com SARL
(Titulaire d’un DESS/Mastère en Relations interculturelles et Gestion des Arts option politiques culturelles internationales, obtenu en 1999 à l’Université Paris III-Sorbonne Nouvelle)
UN COMITÉ DE PILOTAGE POUR LA RÉPARTITION DE L’AIDE DE 2,5 MILLIARDS CFA ALLOUÉE AUX ACTEURS CULTURELS
Ce mode de gouvernance a été retenu après une réunion d’information et de partage organisée jeudi à la Maison de la presse, en présence du secrétaire général du ministère de la Culture et de la Communication, Habib Léon Ndiaye.
Dakar, 1er jan (APS) - Un comité de pilotage sera mis en place pour la gestion du nouveau fonds d’aide de 2,5 milliards de francs CFA alloué aux acteurs culturels pour atténuer l’impact du COVID-19 sur leurs activités, a appris l’APS de la directrice des arts Khoudia Diagne.
"On s’est réuni pour discuter de la manière dont ce nouveau fonds devrait être gouverné, qui en a droit, comment faire la répartition’’ ou s’il faut reconduire le mode de gouvernance du premier fonds, a-t-elle indiqué dans un entretien.
"Au final, tout le monde était d’accord que le format adopté lors de la première répartition a été la bonne, à savoir qu’il faut un comité de pilotage qui représente tous les sous-secteurs à savoir deux par discipline, et après avoir des sous-comités", a-t-elle indiqué.
Ce mode de gouvernance a été retenu après une réunion d’information et de partage organisée jeudi à la Maison de la presse, en présence du secrétaire général du ministère de la Culture et de la Communication, Habib Léon Ndiaye.
Etaient également présents à cette rencontre, Birame Faye, directeur de cabinet du ministre de la Culture, ainsi que le directeur général du Théâtre national Daniel Sorano, Abdoulaye Koundoul.
Les acteurs culturels étaient représentés par les membres du comité de pilotage du premier fonds et les organisations professionnelles, parmi lesquelles l’Association des métiers de la musique, les Acteurs de l’industrie musicale, la Coalition des acteurs de la musique, "Say Wi".
Il a été recommandé, après échanges entre le ministère et les acteurs culturels, que les bases de données soient revues par chaque sous-secteur, ces dernières ayant fait l’objet des nombreuses discordances lors de la première répartition du fonds de trois milliards accordés aux artistes.
"Il faut que ces bases de données soient réactualisées par les sous-secteurs et après on en fera un document de base de travail pour cette nouvelle répartition", a souligné la directrice des arts.
Les acteurs culturels ont proposé aussi que le fonds soit logé dans une banque et que les aides soient remises sous forme de chèque aux ayant droits.
La directrice des arts estime que ce point "nécessite des discussions, il nous faut retourner vers l’autorité pour voir si cela va être validé ou pas".
Le chef de l’Etat Macky Sall avait octroyé, le 24 décembre dernier, 2,5 milliards de francs CFA aux artistes, après une première subvention de 3 milliards qui leur avaient été alloués en juin dernier.
Cet appui vise à permettre aux acteurs de mieux supporter les impacts négatifs du COVID-19 sur leurs activités, les manifestations culturelles n’étant pas encore autorisées en raison de la résurgence de la pandémie.
par Ousseynou Nar Guèye
INCH'ALLAH, MOT-BALISE
Adosser la concrétisation de tout projet à la volonté divine apparaît plus que naturel aux Sénégalais, qui n’y voient là aucun fatalisme. Pour les étrangers avec qui ils interagissent, en revanche, c’est souvent une autre histoire
« S’il plaît à Dieu ». Inch’Allah, donc. Dans le texte. Les Sénégalais, tous autant qu’ils sont, les musulmans (naturellement), les chrétiens, et même les animistes au nombre anecdotique sont toujours prompts à utiliser cette locution presque machinalement. Pour commencer ou clore toutes leurs phrases exprimant des décisions, des projets, des souhaits ou des intentions. Ceci n’est-il pas normal dans un pays qui se définit comme d’abord « croyant » ?
Adosser la concrétisation de tout projet à la volonté divine apparaît plus que naturel aux Sénégalais, qui n’y voient là aucun fatalisme. Mais uniquement l’expression de leur foi, en ce que même si la foi peut déplacer des montagnes, c’est toujours Dieu, en fin de compte, qui dispose sur ce que l’homme propose. On ne passera donc pas une journée à Dakar ou ailleurs dans le pays sans entendre quatre ou cinq fois « Inch’ Allah » dans la bouche des locaux.
Mais dans leurs relations avec les non-Sénégalais, notamment non-musulmans, c’est une autre paire de manches : cet « Inch’ Allah » apparaît aux visiteurs du pays et « hôtes étrangers vivant parmi nous » (phrase consacrée des discours présidentiels à la nation), comme une épée de Damoclès concernant les accords passés avec les natifs. Inch’Allah ? Y compris pour les intentions les plus simples ? Inch’Allah, même si la survenance de la chose est prévue dans l’heure qui suit ?
Effet Larsen
Le doute a vite fait de naître devant cette expression peu cartésienne. Les étrangers prennent cette habitude des Sénégalais à tout remettre (nonchalamment ou avec enthousiasme) à la volonté divine comme une manière pour eux de se délier par avance de leurs promesses et engagements sans encourir de conséquences, au cas où celles-ci ne seraient pas tenues. Et même pire, comme une antiphrase signifiant exactement le contraire de ce qu’on vient de leur affirmer. Effet Larsen garanti.
Aussi, les Sénégalais éduqués à l’école occidentale ou ceux habitués à voyager ont appris à éviter l’emploi trop fréquent de cet « Inch’Allah » avec des personnes dont ils savent qu’elles ne sont pas de leur sphère culturelle ou cultuelle, mais aussi dans le cadre de transactions formelles.