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5 décembre 2024
Culture
NDIAROGNE, LE VILLAGE D'ANCIENS RÉFRACTAIRES À L'ISLAMISATION
Même si 170 ans après sa fondation par Samba Codou Niane, vers les années 1850, le village est peuplé maintenant à 100% de sérères musulmans. Ndiarogne a été créé suite à un refus de se soumettre à l’Islam
Le village de Ndiarogne, situé dans la contrée du Mbanj Fadjal, commune de Nguéniène, symbolise le refus que le peuple sérère opposait à toute idée d’islamisation forcée. Ce village a été fondé par Samba Codou Niane, vers les années 1850, suite à la mort de son père dans une guerre opposant le Bour Saloum à Maaba Diakhou Bâ. Ce dernier, sorti victorieux, voulait leur imposer l’Islam. Ces sérères ont quitté Saloum pour venir s’installer entre Joal et Fadjal.
Les Sérères étaient un peuple profondément animiste. Ils font partie des dernières ethnies à accepter l’islamisation. Avec l’arrivée de l’Islam au Sénégal par la vallée du Tekrur, beaucoup de royaumes ont été forcés à la pratique de cette religion avec la guerre sainte menée, par exemple, par El Hadji Oumar Tall et Maaba Diakhou Bâ. Ce dernier qui menait son djihad dans le centre du pays s’est, à plusieurs fois, confronté aux Sérères qui ne voulaient pas se convertir. Le village de Ndiarogne Wolof ,dans le Mbanj Fadjal, est l’un des symboles de la résistance armée du peuple sérère contre l’islamisation. Même si 170 ans après sa fondation par Samba Codou Niane, vers les années 1850, le village est peuplé maintenant à 100% de sérères musulmans. Ndiarogne a été créé suite à un refus de se soumettre à l’Islam.
Le village est situé à côté du baobab sacré de Fadjal sur la route entre Joal et Mbissel. Ndiarogne se trouve dans la commune de Nguéniène, département de Mbour. D’ailleurs, son chef du village, Ibrahima Ndiaye, indique que ce baobab est plus proche de Ndiarogne même si on l’attribue à Fadjal. Non loin de la route principale, c’est une piste sablonneuse qui mène à ce village cerné par une forêt de rôniers. La demeure du chef du village, Ibrahima Ndiaye, se trouve à l’autre bout du village. Sa concession est entourée de palissades réalisées avec des tiges de mil. Averti de notre visite par sa femme, le chef du village sort de son bâtiment en dur. Nous recevant avec la chaleur qu’on ne retrouve que dans ces villages, il nous invite à le suivre chez son oncle, Mamadou Niane, petit-fils du fondateur du village. Il admet que même en étant le chef du village, ce dernier a plus d’informations sur l’histoire de la localité et de son peuplement. Du haut de ses 50 ans, Ibrahima Ndiaye se dit relativement jeune pour évoquer ces sujets sans aviser son oncle. Il nous fait traverser la place publique où les jeunes, regroupés sous une hutte, conversent, assis sur de vieux troncs de rôniers.
Le chef du village nous installe sous un grand acacia, devant la maison de son oncle qui constitue la première habitation du village. Les premiers habitants de Ndiarogne sont des Sérères venus du Saloum qui ne voulaient pas être convertis de force par Maaba Diakhou Bâ. «Il y a eu une guerre entre Maaba Diakhou et le Bour Saloum. Cette bataille a été remportée par Maaba qui voulait obliger tous les habitants à se convertir à l’Islam. Nos ancêtres étaient des résistants Ceddos (guerriers animistes). Mon grand-père Samba Codou Niane a perdu son père, Ndiack Niane dans une bataille avec Maaba Diakhou Bâ. Ses fils ne voulaient pas se convertir à l’Islam et se sont exilés vers le Sine et ont marché jusqu’à Joal», explique M. Ndiaye qui a noté l’histoire de son village dans un vieux cahier. Arrivés à Joal, «et ne voulant dépendre de personne au risque de devoir quelque chose à autrui dans le futur», Samba Codou Niane et sa famille ont séjourné au bord de la plage refusant d’être hébergés par qui que ce soit. Selon le chef du village, après avoir passé plusieurs nuits à la plage, ils ont repéré le site de Ndiarogne, situé entre Fadjal et Fadiouth.
Arrivé avec une dizaine de ses frères, Samba Codou Niane a regroupé toute sa descendance à Ndiarogne. Il a su aussi protéger sa famille tout en poursuivant son mode de vie de Ceddo Sérère qu’il ne pouvait plus mener dans le Saloum, du fait de l’islamisation. «Notre village fait partie des plus anciens de la zone, mais nos ancêtres ont décidé de le protéger mystiquement. C’est pourquoi les nouveaux villages qui se sont installés au tour sont plus grands et plus ouverts à la modernité. On ne subissait aucune influence d’autorités étrangères. Même pour les projets d’infrastructures, les ancêtres proposaient qu’on les réalise à Fadjal, ce, rien que pour protéger la famille», confie le chef du village, Ibrahima Ndiaye.
Son oncle, actuel patriarche du village, Mamadou Niane, égrenant son chapelet acquiesce de la tête. Ce dernier confirme que c’est pour cela que jusqu’à une époque récente, le village n’était habité que par la descendance de Samba Codou Niane. Même les mariages externes à la communauté n’étaient pas permis. Selon les habitants qui vivent d’agriculture et d’élevage, c’est cette protection qui fait que le village de Ndiarogne exploite l’essentiel des terres de la zone.
Adhésion volontaire à l’Islam
Même si le fondateur du village fuyait l’islamisation, son fils Saliou Niane a décidé volontairement de se convertir à la religion musulmane avant sa mort. « Le premier chef du village, Saliou Niane, avait un ami qui faisait du commerce à Ngoyé Seko et a fini par s’installer là-bas. Il a été converti à l’Islam par un marabout de Thiamène de Tattaguine». Compte tenu des relations particulières qui liaient Saliou Niane à son ami, le fondateur du village a compris qu’il pouvait se convertir aussi car son ami était un homme juste qui ne s’engagerait pas dans cette voie s’il n’y voyait pas d’humanisme. «Il a demandé qu’on amène à Ndiarogne le marabout pour se convertir à l’Islam. En tant que responsable du village, il a invité tous ses frères et les membres de sa famille qui étaient sous sa responsabilité à se convertir à l’Islam. C’est ainsi que le village a accepté l’Islam à 100%», rappelle, avec une certaine fierté, le chef du village Ibrahima Niane. Il y voit un signe divin. Selon Ibrahima Ndiaye, le débit rapide, leur ancêtre Ndiack Niane est mort refusant de se convertir à l’Islam, son fils Samba Codou Niane s’est exilé au Sine pour ne pas se faire imposer cette religion, mais Dieu a voulu que Saliou Niane se soit converti volontairement. «Nos parents ceddos refusaient qu’on leur impose quoi que ce soit quitte à donner leur vie. Mais par la méthode douce, l’Islam a été accepté par eux et dans tout le Sine, le Saloum et le Baol», constate-t-il.
Malheureusement entre temps, Maaba Diakhou Bâ ne verra pas l’expansion de l’Islam dans le Sine parce qu’il a été tué par Bour Sine Coumba Ndofféne Famack Diouf, lors de la bataille de Somb en 1867. Du fait de cette islamisation, Ndiarogne, habités essentiellement de sérères, a commencé à adopter les mêmes pratiques que les musulmans. Avec ce nouveau mode de vie, l’appellation du village a évolué pour devenir Ndiarogne Wolof.
LE JOUR ET LA NUIT, UN HYMNE À LA MORALE
Écrit dans un style simple auquel il doit sa beauté et son originalité, ce livre d'Oumar Sankharé, réédité à titre posthume en 2016 par les Éditions Maguilène, traduit toute la personnalité de son auteur
Décédé en octobre 2015 à Dakar, Pr Oumar Sankharé a marqué son époque grâce à sa dimension intellectuelle. L’homme, seul double agrégé en Afrique de Grammaire et de Lettres classiques, était du lot de ces professeurs qui maîtrisent parfaitement le Grec et le Latin. Son roman « Le jour et la nuit », réédité à titre posthume en 2016 par les Éditions Maguilène, a traversé toute une génération de lecteurs. Écrit dans un style simple auquel il doit sa beauté et son originalité, ce récit passionnant où la « douleur de l’homme » constitue la trame, traduit toute la personnalité de son auteur.
Agrégé de Lettres classiques et de Grammaire, feu Oumar Sankharé est né en 1950 à Thiès. Il a enseigné à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis. Son ouvrage « Le jour et la nuit » occupe, sans aucun doute, une place de choix dans la collection des plus belles œuvres littéraires sénégalaises. Édité pour la première fois en 1992 par les Nouvelles imprimeries du Sénégal (Nis), il lève un coin du voile sur le caractère particulier de son auteur. Un homme singulier qui, au-delà de ses qualités intellectuelles reconnues de tous, était aussi un humaniste d’une extrême sensibilité. La rigueur de sa plume montre combien il tenait à l’ordre et à la discipline. À l’humilité. « Le jour et la nuit » constitue l’une de ses productions les plus connues. Elle aura traversé toute une génération de lecteurs. Pr Oumar Sankharé semble y mêler tous les genres littéraires : poésie, conte, épopée, théâtre…Ce récit qui prend souvent la forme d’une autobiographie, célèbre les us et costumes de la société sénégalaise. Il s’agit d’une célébration de nos valeurs dans toute leur splendeur ; un hymne à la morale. La trajectoire mouvementée du personnage principal, Doudou, nourrit la trame de ce roman d’initiation riche d’aventures. Dans cet ouvrage, le sort s’acharne sur le héros dès les premières pages. À la suite du décès accidentel de son père, les jours se suivent et se ressemblent pour Doudou qui connaîtra une succession de déchéances qui le mèneront même jusqu’à la prison. Une vie qui n’a été qu’un tissu de revers.
Extrait
Perdu dans les profondeurs de la brousse, Ndiobène offre l’aspect habituel des villages africains. Des pistes tortueuses le reliant au reste du pays. Près d’une petite rivière, s’étendent de vastes champs bordés d’arbres. Çà et là, entre des ruelles minuscules, se dressent des agglomérations de cases en argile recouvertes d’un toit de chaume.
Je fus d’abord frappé par l’aimable hospitalité des habitants. En peu de temps, je me fis de nombreux camarades parmi les garçons de mon âge. Nous formions une bande joyeuse dont les activités étaient partagées entre les promenades à travers la brousse et les jeux de plein-air. Armés d’un lance-pierres, nous allions à la chasse des passereaux qui pullulent dans cette contrée. Le tireur qui réussissait à atteindre le plus grand nombre d’oiseaux était déclaré victorieux et, selon la règle du jeu, les autres devaient lui remettre leur gibier. Par les soirs de clair de lune, derrière une concession, nous nous installions en rond. Au milieu se tenait un joueur qui s’efforçait de se délivrer par tous les moyens. L’enfant se débattait de toutes ses forces pour rompre son encerclement. Repoussé, il remontait à l’assaut. S’il arrivait à passer entre deux camarades, ceux-ci étaient éliminés et le jeu reprenait sans eux. Nous organisions également des séances de cinéma. Entre les branches d’un arbre, l’opérateur suspendait un morceau d’étoffe transparente. Derrière cet écran et à la lueur de quelques bougies, il manipulait des pantins confectionnés à l’aide de bûchettes…
DANIEL SORANO, UN ARTISTE COMÉDIEN ACCOMPLI
Son nom est bien plus célèbre que son œuvre, au Sénégal. Pourtant, c’est un personnage réputé dans le monde du théâtre qu’il a marqué par sa transversalité, sa prolificité et son panache en 15 ans de carrière et 41 ans de vie
Il ne fait aucun doute que son nom a fini par se confondre au théâtre sénégalais et autres évènements culturels de grande envergure. Le Théâtre qui le porte est aujourd’hui un symbole architectural tout autant qu’il est un haut-lieu de convergence d’intelligences et de spécificités culturelles. Un peu comme lui, Daniel Sorano. L’homme, Daniel Édouard Marie Sorano de son vrai nom, est un Français né à Toulouse en décembre 1920. Sa mère est une signare nommée Marianne Blanchot, fille de l’ancien Gouverneur du Sénégal François Blanchot.
Il a convaincu son monde pour sa belle tenue sur les planches et sa charmante immersion dans ses rôles de comédien. Ses percepteurs au Conservatoire de Toulouse avaient d’ailleurs très tôt détecté ces qualités. Ainsi, ils le débouteront de la section chant pour l’amener à se concentrer et à briller dans le théâtre. Il intègre plus tard la troupe du Grenier de Toulouse en 1945 et y affute ses premières humanités pratiques. À l’époque, il était déjà distingué dans un rôle de muet, celui de Biondello de La Mégère apprivoisée de Shakespeare. Il s’attachait chaque soir les oreilles avec du fil de pêche et mangeait trois pommes sur scène en roulant des yeux. La performance était beaucoup et agréablement commentée à l’époque par les critiques. En 1952, Jean Vilar lui souffle à l’oreille, après une interprétation : «Ce soir, j’ai appris comment on jouait Molière». C’était à la fin de sa prestation dans le rôle de la Flèche dans l’Avare. Mais le rôle qui construit résolument sa renommée d’artiste est son rôle Cyrano de Bergerac en 1960. C’est à cette époque qu’il faisait les beaux jours du Théâtre national populaire de France (Tnp) aux côtés d’autres grands noms du quatrième art.
Daniel Sorano a à, son actif d’interprète, 8 téléfilms, 4 théâtres télévisés, 18 films au cinéma et 23 théâtres. Il avait un don particulier pour la farce et les tonnerres ridicules, tout en inspirant par sa bouille de tendresse qui charmait ses spectateurs. Il est crédité pour avoir bien nourri l’art de suggérer la nuance à travers le trait le plus épais, le plus grossi, le plus théâtral.
Le comédien Daniel Sorano est mort en mai 1962, d’une crise cardiaque, dans sa chambre d’hôtel à Amsterdam. L’acteur, qui était âgé de quarante et un ans, était venu aux Pays-Bas avec un plateau de tournage français pour tourner le film «Le Scorpion». Durant le tournage d’une scène à Amsterdam, Daniel Sorano s’était déjà trouvé mal. Pendant toute la journée, il avait gardé le lit, et en fin de soirée, des employés de l’hôtel ont ouvert sa porte avec un passe-partout et l’ont trouvé mort, étendu à côté de son lit.
Aujourd’hui, le prix Daniel-Sorano qui était remis par l’Académie des Arts et des Sciences de Toulouse a disparu mais de nombreux théâtres et salles portent le nom de l’acteur. Le Sénégal a, aujourd’hui, immortalisé son nom à travers le Théâtre national pour ses origines et ses prouesses de renommée mondiale.
DJILOR DJIDIACK, TERRE DE TRADITIONS
Il faut d’abord entrer en terre sérère, longer un bras sinueux du delta du Saloum, traverser la forêt de Samba Dia, avant de découvrir, à 200 km au sud-est de Dakar, Djilor.
Il faut d’abord entrer en terre sérère, longer un bras sinueux du delta du Saloum, traverser la forêt de Samba Dia, avant de découvrir, à 200 km au sud-est de Dakar, Djilor. Ce village Sérère, royaume d’enfance du premier président de la République du Sénégal, est situé à 1,5 km au sud de Fimela, chef- lieu de l’arrondissement du même nom devenu aujourd’hui commune. Les villages de Ndangane et de Yayème se situent à l’ouest de Djilor, à une distance de 7 km et 2,5 km. Le village comptait au recensement de 2011, 833 habitants dont 90 ménages.
Djidiack est le nom du fondateur du village de Djilor, Dou Djilor Djidiack. Il était prince dans le royaume du Sine. Il a ainsi fondé le village de Djilor avec l’aide de deux familles Palmarinoises, il y’a 470 ans. Djidiack était un prince guerrier qui fut appelé par le roi pour combattre ses ennemis. L’histoire raconte que quand il allait en guerre, il partait seul sur son cheval, étendait les bras et chaque arbre qu’il croisait se transformait en chevalier. Revenu vainqueur de la guerre, le roi oublia les récompenses promises en cas de victoire. Il quitta le royaume, ce qui entrainant une sécheresse, les conseillers du roi lui demandèrent de le rappeler. Dès son retour, la pluie revient et c’est la raison pour laquelle l’histoire racontée par les anciens stipule que Djidiack, outre ses dons de guerrier, savait guérir et retenir la pluie. Niché dans un luxurieux bras de mer, Djilor est aussi le royaume d’enfance de l’ancien poète et premier président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor. C’est le véritable village natal du poète, même si il a été déclaré officiellement à Joal. Affecté par l’Administration, son père avait pris en mariage une fille du village du nom de Gnilane Bakhoum. C’est de ce ménage que naîtra Léopold Sédar Senghor. A l’âge de sept ans, Senghor rejoignit Joal où vivaient ses tantes et grands- parents, et sera inscrit à l’école française. Senghor faisait la navette entre ces deux localités. Djilor a été également « la source d’inspiration de Senghor, son royaume d’enfance. Toute la poésie du président-poète est imprégnée de cette culture sérère », écrivent les spécialistes.
Localité active mais laissée à elle-même
Le village de Djilor Djidjiack recèle d’énormes potentialités. Avec ses 865 habitants, la population s’adonne à l’agriculture, principalement le mil, le riz et l’arachide. La pêche et le maraîchage sont aussi des activités principales dans ce village sérère où « tout le monde est cousin » et où le commerce est peu développé. L’élevage est également très répandu dans cette localité. L’infrastructure dans ce village est assez sommaire même si récemment, on a relevé une certaine amélioration. La route nationale qui traverse le village est une initiative de feu Adrien Senghor en 1978 alors ministre de l’Equipement. Aujourd’hui, elle est bitumée. Dans cette zone, l’accès à l’eau potable est également très difficile. Les populations, laissées à elles-mêmes, sont le plus souvent confrontées à l’accès à l’eau potable et à un déficit d’assainissement. Elles se débrouillent néanmoins et parviennent à s’en sortir grâce aux puits et forages qu’elles désinfectent. Le forage de 3m cubes 600 couvre quatre villages. Les populations de Djilor Djidiack pratiquent une culture vivrière dont la majeure partie est consommée sur place. Ce qui fait qu’elles ne se sont pas confrontées aux problèmes de dettes impayées ou d’impôts impayés. La santé est aussi un objet de préoccupation avec un seul poste de santé et une matrone. Le centre de santé est à 7 km de Fimela et couvre 4 villages. Le niveau de développement est visible du fait de la participation des fils du terroir qui ne cessent de veiller au développement du village. Ainsi donc le poids de ses cadres se fait sentir par l’entremise de beaucoup de projets pour participer au développement de Djilor. Une route goudronnée, une école élémentaire ainsi que beaucoup de réceptifs ont été réalisés, participant dans le cadre de l’embellissement et du décor.
Un cimetière commun pour musulmans, animistes et catholiques
Même si l’Islam y est devenu la religion dominante, les Sérères continuent leurs pratiques animistes couplées avec la religion catholique et musulmane. Cette différence de religion n’altère en rien cependant les rapports entre populations chrétiennes et musulmanes. Cette particularité se retrouve jusque dans le cimetière où se trouvent ensevelis musulmans, catholiques et animistes.
Djilor un village mystique ancré dans sa tradition
Depuis la disparition de Djidiack Selbé, guérisseur et fondateur du village, les autochtones, notamment les patriarches, ont voulu préserver la tradition. C’est ainsi que leurs progénitures sont maintenus dans le village pour les préserver du déracinement. De génération en génération, les descendants ont entretenu cet héritage jusque dans la gestion et la conservation de l’arbre sacré. De son vivant, quand les hommes étaient inquiétés sur leur sort, il était là leur disait-il, parmi eux pour veiller sur leur devenir. « Nous considérons qu’il n’est pas mort, surtout que nous n’avons pas vu de corps depuis sa disparition. Du reste, peu de temps avant de disparaître, il nous avait recommandé de faire des prières à l’endroit où il laisserait l’empreinte de ses chaussures. C’est précisément devant l’arbre qu’ils ont trouvé l’empreinte de ses chaussures et depuis l’arbre est devenu mystique et sert de remède », raconte un vieil homme. Des petites calebasses » constituent un des attributs de son legs mystique. Mais Djilor ce n’est pas que le « royaume d’enfance » du Président-poète. C’est aussi une localité riche de sa culture préservée jalousement par le biais des cérémonies initiatiques, des festivités du mariage et des événements de lutte traditionnelle entre autres richesses. Ses habitants sont accueillants et attachés aux liens tissés par leurs ancêtres, plus forts que les différences de religion effacées par une cohésion sans faille à l’image du cimetière mixte du village.
Djilor, une destination touristique
Les atouts de ce cadre naturel enchanteur font du village une destination touristique appréciée. Le paysage est beau et les hommes y vivent en communion entourés de forces mystérieuses invisibles de la nature environnante. Dans ce décor féérique, on ne peut manquer d’être gagné par l’enchantement, loin du spleen. La culture est très riche et variée dans la zone. Un cadre de vie particulier ou tout le monde est cousin dans le village. Bienvenue à Djlor!
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WASIS DIOP, POÈTE POP ET EXPLORATEUR MUSICAL
Chanteur et compositeur sénégalais installé à Paris, il est un musicien au style unique. Alors que son sixième album tout en français, « De la glace dans la gazelle », sortira début 2021, il revient sur son parcours, ses influences et sa philosophie
Chanteur et compositeur sénégalais installé à Paris, Wasis Diop est un musicien au style unique, qui a signé de nombreuses musiques de films. Alors que son sixième album tout en français, « De la glace dans la gazelle », sortira début 2021, Wasis Diop revient sur son parcours, ses influences et sa philosophie.
SEDIMENTS D’UN CONFLIT GENERATIONNEL DANS LE CINEMA
Si les jeunes acteurs estiment qu’ils sont à la pointe de la sensibilisation et de la prévention, les anciens acteurs, quant à eux, considèrent que la nouvelle génération a complètement dénaturé le cinéma
Les téléfilms dramatiques zappés, les séries télévisées en vogue. Elles connaissent un bond fulgurant, ces dernières années, au point de reléguer au second plan les productions de l’ancienne école (théâtre et cinéma). Si les jeunes acteurs estiment qu’ils sont à la pointe de la sensibilisation et de la prévention, les anciens acteurs, quant à eux, considèrent que la nouvelle génération a complètement dénaturé le cinéma. Se pose alors une question de conflit générationnel ?
PAPIS NIANG, REALISATEUR, A LA NOUVELLE GENERATION : «Il est temps, que les jeunes acteurs retournent à la source… originalité, créativité…»
Papis Niang, réalisateur général à Art-Bi Management magnifie le travail abattu par des jeunes acteurs et réalisateurs sénégalais. Toutefois, il les exhorte à miser beaucoup plus sur l’art, la créativité et l’originalité.
Selon le réalisateur Papis Niang, la nouvelle génération a apporté une touche exceptionnelle au cinéma sénégalais. Mais, malgré les efforts consentis, l’industrie cinématographique n’a pas encore vu le jour au Sénégal. «Actuellement, le marché des séries sénégalaises est en pleine expansion, au moment où l’industrie cinématographique est quasiment inexistante. Dans la mesure où les séries télévisées, en ce moment, ne reflètent pas du tout le cinéma en tant que tel. En effet, ces dernières ne réunissent pas tous les aspects du cinéma dans sa globalité. J’ai l’impression qu’elles essaient de répondre à la demande d’une population avide d’histoires, de rebondissement. Et c’est dangereux, car vouloir aborder certaines thématiques pour faire juste plaisir à son audience risquerait de tuer le cinéma», explique-t-il.
BUSINESS, LUXE, HISTOIRES D’AMOUR
Papis Niang de souligner que la nouvelle génération privilégie le business, au détriment de la créativité. «Nous, réalisateurs, nous devons orienter nos productions audiovisuelles vers la sensibilisation, l’éducation… Cette activité noble qu’est le cinéma doit refléter la réalité mais également avoir une touche exceptionnelle artistiquement. Alors que maintenant, les réalisateurs privilégient le business, le luxe, les histoires d’amour pour plaire au public et encore plus pour s’enrichir. On n’oublie jamais les œuvres artistiques de Ousmane Sembène, ce vaillant artiste, parce que dans ces contenus il y’a la créativité. Presque tout ce fait avec les matériels techniques, les acteurs ne font que les 10%», argumente le réalisateur qui sert de «trait d’union entre les deux générations», argumente-t-il.
«CE QU’ON JOUE DANS LES SERIES EST LA TRISTE REALITE»
Chose surprenante, le réalisateur qui sert de trait d’union entre les deux générations affirme ouvertement qu’il ne condamne guère les scènes jugées offensantes ou attentatoires aux bonnes mœurs. «Je ne condamne pas les scènes et propos choquants, encore moins la prégnance du sexe, de la violence… dans les productions audiovisuelles. Ce qu’on joue dans les séries est la triste réalité. Pourtant, on entend pire, quotidiennement, dans les émissions radiophoniques. C’est juste que le fait de regarder donne beaucoup plus d’importance, d’émotions. Toutefois, quoi qu’on puisse dire, la nouvelle génération essaie de mettre à nu certains faits sociaux. On est dans un village planétaire, et aujourd’hui, pour être suivi, il faut choquer. En conséquence, attendons-nous à voir pire», prévient Papis Niang.
DIFFERENCE DE MOTIVATION
Le réalisateur n’a pas manqué d’exhorter la nouvelle génération à s’inspirer des anciens acteurs et de leurs productions. «La vieille école, une véritable source d’inspiration ! Étant donné que ces acteurs misaient sur l’originalité, la passion, le professionnalisme, le respect des us et coutumes, la qualité des contenus audiovisuels etc… Au moment où cette nouvelle génération cherche un travail épanouissant pour s’enrichir. Il faut impérativement que les anciens encadrent la nouvelle génération, en prenant en compte cette différence de psychologie collective. Vu que ce qui était flagrant hier, peut ne pas l’être aujourd’hui. Nonobstant, il faut avouer que la vieille génération, quant à elle, a connu la précarité de l’emploi. Raison pour laquelle, ils sont plus cyniques vis-àvis de la société. Avec une telle différence de motivation, on peut, en effet, craindre la présence de conflit générationnel», conclut-t-il.
LAMINE NDIAYE, COMEDIEN ET ACTEUR : La nouvelle génération «joue la carte de la célébrité»
Lamine Ndiaye, comédien et acteur appartenant à l’ancienne génération, estime que les productions de la nouvelle génération ne relèvent pas du théâtre, encore moins du cinéma. Cependant il exhorte la jeune génération à revoir les castings, en mettant en avant les compétences artistiques, le savoir-faire du cinéma, afin de revaloriser ce métier noble. Mais aussi pour jouer efficacement sa partition dans la société à travers l’éducation, la sensibilisation…
«Ce qu’on fait, ce n’est pas du théâtre encore moins du cinéma ; c’est une sorte de captation. Etant donné que ces productions ne sont même pas filmées avec du matériel cinématographique. Mieux vaut l’appeler téléfilm. C’est en fait une sorte d’approche du cinéma», a d’emblée précisé le grand comédien, Lamine Ndiaye. Avant d’exprimer son insatisfaction sur la qualité des contenus, de l’écriture des textes des séries télévisées actuellement en vogue, en insistant sur la manière de jouer. «C’est plus ou moins désolant ! Je pense qu’à ce niveau, on devait dépasser ces genres de thèmes abordés presque dans toutes les séries qui, à mon avis, viennent bouleverser le monde théâtral. Et ces bouleversements ont causé pas mal de maux au niveau de la société. Ce qu’on voit dans les séries actuellement n’est nullement du théâtre. On peut même dire que ce sont des thèmes joués comme on le veut, on le sent. D’autant plus que les aspirations du peuple sénégalais dépassent même l’entendement de ces genres de thèmes. D’autant plus que nous les avions traité auparavant», se désole l’acteur. Pour lui, la nouvelle génération doit être sérieuse en matière de casting et recruter les professionnels. «La question qui se pose est : «est-ce que ceux qui jouent actuellement incarnent bien leurs rôles ?».
Dans la mesure où, maintenant, on prend n’importe qui. Disons qu’actuellement, est acteur qui veut. Généralement, ces acteurs de la nouvelle génération sortent des castings de complaisance, alors qu’en réalité, un sérieux casting est basé sur les compétences artistiques. Même moi, en tant que comédien, si je n’ai pas de place, je ne demande guère à ce qu’on me donne un rôle», tonne-t-il. Et d’indiquer qu’avec ce style de jeu, la nouvelle génération va à l’encontre de la vocation du théâtre. «On risque vraiment de dénaturer le théâtre et ce n’est pas avantageux pour le Sénégal. Notre pays a besoin d’être ancré dans sa culture, la définir comme elle se doit. Actuellement, on ne peint pas fidèlement les caractéristiques du pays, dans sa nature culturelle. On est en déphasage même avec nos exigences et nos valeurs. C’est comme si la nouvelle génération intègre notre métier pour se faire connaître uniquement. On voit des acteurs qui sont incapables de comprendre, de fond en comble, l’histoire de la série dans laquelle ils jouent. Et c’est désolant. Au lieu d’intensifier le jeu à juste titre et à juste raison, on joue la carte de la célébrité», déplore le comédien.
«ON NE CONÇOIT PAS LE MONDE DE LA MEME MANIERE»
Selon le sociologue Mamadou Wane, dit Mao, les personnes n’appartenant pas à la même génération ont du mal à s’entendre sur certains aspects. Ainsi, des conflits surgissent à tel point qu’on parle même de fossé entre les générations.
Les personnes n’appartenant pas à la même génération ont du mal à s’entendre sur certains aspects. Ainsi, des conflits surgissent à tel point qu’on parle même de fossé entre les générations. En effet, les jeunes d’aujourd’hui aspirent aux changements et refusent de subir l’autorité des vieux qui, à leur tour, militent pour la conservation des valeurs ancestrales. Cette mésentente devient, de jour en jour, très perceptible. Cela s’explique, selon le sociologue Mamadou Wane, dit Mao, par le fait que les deux ne conçoivent «pas le monde de la même manière». Toutefois, il relève qu’il y a un socle de valeurs qui est immuable : le respect des autres, la politesse, le contrôle de soi, la religion et le respect des valeurs. Or, sans dialogue intergénérationnel, l’on va vers la déperdition et la perte de nos valeurs, engendrant une «jeunesse sans identité». Car les jeunes sont aujourd’hui attirés par les rôles modèles dans leurs sociétés qu’ils voient à travers les médias.
Pourquoi les jeunes et les vieux n’arrivent-ils pas à s’entendre ?
Ce sont les valeurs qui ont complètement changé, elles ne sont plus les mêmes. D’abord, la notion de liberté est devenue quelque chose qui demande une certaine force surtout dans notre société qui est sitariste alors que la nouvelle génération a envie de se prendre en charge individuellement. L’aspiration des parents et celle des jeunes ne sont pas les mêmes, de même que les normes. Il y a des normes universelles telles que la politesse, le savoir-vivre ensemble, le respect des autres ; ça c’est immuable. La nouvelle génération n’a pas ça ; mais, à mon avis, c’est dans les ambitions et celles-ci différent. Les ambitions des parents, c’est pour que demain tu sois là, que tu ais un «job» dans un bureau, alors que toi tu as envie d’avoir un «job» beaucoup plus libéral. Les jeunes sont aujourd’hui attirés par les rôles modèles dans leurs sociétés qu’ils voient à travers les médias. Les contextes ne sont pas les mêmes, on ne conçoit pas le monde de la même manière car les personnes âgées sont dans un logiciel d’éducation, les jeunes peuvent le percevoir comme étant traditionnelles.
Quelles sont les limites à ne pas franchir ?
Les limites à ne pas franchir, c’est le respect des parents parce qu’en Afrique, nous ne sommes pas comme en Europe. On doit être une société fusionnelle. Et ce qu’on voit aujourd’hui, ce sont des types de discours de discriminations des personnes âgées. Les personnes âgées sont presque 9% (de la population), alors que nous avons une population très jeune ; donc il faut donner beaucoup de place à la nouvelle génération, aux nouveaux leaderships de jeune. Il est extrêmement important qu’ils occupent des postes de décision. Ça peut aussi créer des conflits sur le fait que vous arrivez à monopoliser des espaces de décision. Dans les espaces politiques, ce sont des gens qu’on voit depuis au temps de Senghor; cela peut créer un certain rejet. Si aujourd’hui on perd un certain nombre de valeurs, c’est est dû à la marginalisation quelque part. On a eu une société beaucoup plus équilibrée quand, dans la maison, il y avait les grands-mères, tantes, oncles, etc. Et, en tant que jeune ou enfant, on circulait dans l’espace familial. Pendant les vacances, on allait voir nos grands-parents et ça nous permettait d’aller au village, d’avoir l’éducation culturelle. Maintenant, on assiste à ce qu’on appelle, nous les sociologues, l’appauvrissement. Ça devient pauvre, les gens n’ont plus de relations, c’est-à-dire il n’y a plus ces acteurs dans les familles permettant aux jeunes de s’enrichir de l’expérience des ainés. Les visions ne sont pas les mêmes. Mais aujourd’hui, les jeunes rêvent de l’Amérique, de l’occident. C’est là-bas qu’ils veulent faire leurs études et c’est là-bas qu’ils veulent partir. Cela amène ce qu’on appelle l’éloignement social, la distanciation.
Qui des jeunes ou des vieux ont raison ?
Les deux ont raisons parce que le monde est dans un net changement qui est favorisé par les médias, le digital, les voyages, les interactions culturelles. Il n’y jamais eu autant de mobilité dans le monde. L’aspiration au changement n’a pas la même conception du pouvoir politique fondamental. C’est très bien qu’ils aspirent au changement, qu’on ne gouverne plus de manière autoritaire. La liberté, dans une certaine mesure, d’opinion, le changement, l’aspiration, par exemple la lutte contre l’exclusion sociale ; tout ça c’est un changement parce que le monde, tel qu’il est aujourd’hui, est un monde avec beaucoup de marginalisations. Notre modèle économique produit de la masse, produit de l’exclusion sociale. Les jeunes sont allergiques à ça. Ils sont plus porteurs de solidarité concrète. Même leur façon de faire la politique, c’est moins dans les projections, moins dans cette construction de la politique consistant à capter les suffrages pour en faire autre chose. Mais en même temps, de l’autre coté, la résistance pour qu’aussi, même si on doit changer, qu’on y aille avec des valeurs. Il y a un socle de valeurs qui est immuable : le respect des autres, la politesse, le contrôle de soi, la religion et le respect des valeurs.
L’individualisme est-il un facteur déterminant ?
L’ancienne génération, c’était des projets collectifs. Et aujourd’hui, de plus en plus, ce sont des projets individuels, c’est le capitalisme, le système libéral. La nouvelle génération est contre l’injustice, l’arbitraire. Dans l’ancienne génération, quand on revendiquait, c’était pour plus de liberté, d’équité et d’égalité, non à la discrimination, etc. Si nous prenons le cas des enfants de la rue, la plus part des jeunes veulent qu’on trouve de solutions.
Quelles sont les conséquences majeures du conflit entre générations ?
On aura une société bloquée, une société qui ne communique pas. Il n’y a pas dynamique collective, de réponses à des situations comme par exemple la pandémie actuelle de la Covid-19. Il y a toute une stratégie qui repose sur ce qu’on appelle la mobilité communautaire, l’engagement communautaire. Or, aujourd’hui, la plus grande force de l’engagement communautaire, ce sont les jeunes. Ce sont eux qui portent le combat. Si aujourd’hui ils ne portent pas le combat pour le respect des gestes barrières, ils pourraient porter le virus. Peut-être qu’eux, ils s’en sortiront mais ils vont emporter la génération des ainés. C’est dans le dialogue inclusif, au plan social intergénérationnel ; il faut dialoguer. Sans dialogue intergénérationnel, nos valeurs culturelles vont dépérir, il y aura une perte et cette jeunesse sera sans identité. Aujourd’hui, on voit des jeunes filles noires qui portent des perruques blondes et c’est incroyable. Cela veut dire, quelque part, qu’il y a cassure de communication et il n’y a pas eu de transmission de valeurs. Elles doivent être fières de leur peau noire d’ébène. Donc tout ça, ce sont des conséquences de crise de communication qui ne sont pas dues aux conflits générationnelles mais de crise de communication entre générations. C’est la génération des ainées qui vous amène à aimer notre culture en tant qu’africain noir. Mais quand il y a une communication bloquée, des conflits et qu’il n’y ait plus de passerelles, les jeunes vont communiquer à travers les médias. Et puisqu’ils contrôlent les médias, ils transmettent leurs valeurs.
Quelles recommandations face au conflit de générations ?
Il faut utiliser les ainés à l’école. Il faut aussi qu’on valorise notre culture parce que c’est une culture d’une génération qui est passée ou d’une génération d’ainés qui, physiquement ou biologiquement, ne va pas disparaitre. Mais, le problème maintenant, c’est que le conflit de générations fait en sorte qu’on perd cette transmission de valeurs. Il doit y avoir une communication dans l’espace familial. Essayer de réfléchir sur un modèle où les ainés peuvent intervenir, même après la retraite, en guise de bénévoles. Au niveau des médias, qu’il y ait des émissions intergénérationnelles, pas des émissions parallèles : d’un côté, les anciens et de l’autre, les jeunes ; il faut qu’ils se mélangent. Mais aussi la valorisation de la langue nationale.
MACKY VALIDE LE PROJET D'ECOMUSEE
Un projet d’une grande envergure va voir le jour au Sénégal. Il s’agit d’un écomusée qui sera construit dans le village d’Agnam Godo, une localité située dans la commune des Agnam, dirigée par le maire Farba Ngom
Un projet d’une grande envergure va voir le jour au Sénégal. Il s’agit d’un écomusée qui sera construit dans le village d’Agnam Godo, une localité située dans la commune des Agnam, dirigée par le maire Farba Ngom.
En effet, ce dernier a été reçu hier au Palais par le Président Macky Sall. Il était accompagné du directeur général de l’Agence d’exécution des travaux d’intérêt public contre le sous-emploi (Agetip) El hadj Malick Gaye et des représentants de tabita Pulaaku, une association internationale dont les objectifs principaux sont la promotion du Peul et la fédération des populations peuls afin d’appuyer des programmes de développement socio-économique et culturel.
L’idée de construire un écomusée pour valoriser la culture peule devrait être matérialisée très bientôt. Sous la houlette de Tabital Pulaagu, le projet sera installé à Agnam Godo. Hier donc, le maire des Agnam, accompagné du maître d’œuvre El hadj Malick Gaye, Dg de l’Agetip, a été reçu par le chef de l’Etat. Ils sont venus présenter la maquette et ont fait valider le projet qui devrait coûter plusieurs milliards. Lors de cette rencontre de haute facture, le Dg de l’Agetip El Hadji Malick Gaye et l’architecte ont présenté la maquette au chef de l’Etat pour la validation du concept architectural et technique de ce projet dénommé «Ecomusée des Peuls».
Après la présentation de l’architecte, le Président Macky Sall a félicité les deux techniciens pour le travail de qualité. Il a néanmoins formulé des suggestions pour enrichir le scénario musicographique.
Prenant la parole, le Dg de l’Agetip a complété l’exposé de l’architecte du projet pour porter à la connaissance du président que le joyau s’exécutera en deux phases. D’abord, la première phase, qui se chiffre à 2 milliards, porte sur la construction de salles d’exposition et de conférence, en plus de l’aménagement d’un grand hangar.
Ensuite, la seconde consistera à mettre en œuvre un scénario musicographique et les travaux s’articuleront autour de la mise en place d’expositions mettant en valeur les spécificités des «ethnies» peules qui sont éparpillées dans 28 pays africains. Pour ceux qui l’ignorent, un écomusée est une institution culturelle permettant de donner les fonctions de recherche, de présentation, de conservation et de mise en valeur d’un ensemble de biens naturels et culturels, sur un territoire, représentatif d’un milieu et des modes de vie qui lui sont rattachés.
A LA CROISEE DES CHEMINS ENTRE LE PASSE ET LE FUTUR
Peycouck Sérère. Ce village, plus que centenaire, est à la croisée des chemins entre le passé et le futur.
Cheikh CAMARA, Correspondant permanent à Thies |
Publication 15/09/2020
Un beau royaume «noon», solide trait d’union entre «Ndione-Ndione», «Faye-Faye», «Digane», «Coundar» et «Khoul Khoul»
Peycouck Sérère. Ce village, plus que centenaire, est à la croisée des chemins entre le passé et le futur. Son présent, ce sont d’abord ses habitants. Très fiers, ils sont des hommes et des femmes très accueillants. Très modestes et surtout très solidaires. A part quelques rares étrangers, tout le monde dans cette localité est « noon », une sous composante de l’ethnie sérère du Sénégal seulement présente dans Thiès et ses environs.
Peycouck Sérère est à la périphérie Est de la ville de Thiès sur la route nationale 2 qui mène vers Khombole. C’est un village composé de cinq quartiers. Il s’agit de Fayène ou « Ki Faye-Faye », ensuite Ndionène ou « Ki Ndione-Ndione » aujourd’hui divisé en deux (Ndionène Boury et Ndionène Ngomack) et « Ki digane ». Vient enfin, Coundar, lui aussi divisé en deux (Coundar Biraye et Coundar Dembé). A côté de ces quatre carrés, il y a « Ki khoul khoul » où vivent les griots qui jouent un rôle essentiel dans la vie du village. Selon une version bien établie, les ancêtres des habitants actuels du quartier Ndionène ou « Ki Ndione-Ndione » sont les fondateurs du village de Peycouck Sérère. Seulement, les nombreux témoignages ne donnent aucune précision sur leurs origines exactes. Certains témoignages retiennent que les « Ndione-Ndione » à la tête desquels il y avait un patriarche sont arrivés à l’approche de la saison des pluies. Ils se sont établis avec leur troupeau à la périphérie Nord-Est sur les champs du clan des Tine ou « Tène Tène » de Ngoumsane. Qui les aurait accueillis sur autorisation des chefs de la tribu trouvée sur place. Et comme l’hivernage approchait, l’urgence était de recouvrir les cases construites à la hâte. Faute de paille fraîche, les « Ndione- Ndione » durent faire avec de la paille ayant déjà servi et appelée « couck » dans le dialecte locale. Par transposition, le terme a servi à désigner les nouveaux habitants.
«Khémès», la brave femme, réarma moralement les survivants d’une méchante épidémie de peste au 19ème siècle.
Comme la plupart des clans de l’époque, celui des « Ndione Ndione » aura connu « grandeur » et « décadence », selon nos sources. « Grandeur parce que la population a connu une telle croissance que les hommes ne pouvaient tenir sous un seul arbre à palabres pendant la période dite méridienne entre les deux saisons. On imagine alors que l’espace était très exigu pour jouer au ‘’yoté’’, un jeu tracé sur le sable avec des bouts de bâtons comme pions à planter dans des sillons faits avec le revers de la main. Ce qui a donné la création de deux autres arbres à palabres appelés ‘’seuguou’’ réservé chacun à un carré. Ainsi, il y a eu ‘’Félène’’, ‘’Nimrod’’, etc. », raconte notre source. La décadence viendra au 19ème siècle. Une méchante épidémie de peste a ravagé impitoyablement la grande famille des ‘’Ndione-Ndione’’. Les rares rescapés se comptaient sur le bout des doigts. Selon les témoignages, « le clan aurait disparu, n’eut été une femme d’un âge certainement adulte prénommée ‘’Khémès’’. Elle aurait réarmé moralement les survivants, traumatisés par la perte de parents, les obligeant à reprendre goût à la vie et de garder l’espoir qu’un jour la grande famille allait s’agrandir. « Ki ndionendione » relevait peu à peu la tête hors de l’eau quand il fut, une fois de plus, touché par une seconde épidémie de peste entre 1916 et 1918. Alerté, le service d’hygiène colonial dut brûler les cases et isoler la population sur le côté Est du village. Aujourd’hui, nous a-t-on appris, il ne reste plus que deux grandes familles. Il y a « Ki ndione-ndione Bouré » (Boury) qui, approximativement, est demeuré sur l’un des emplacements qui abritait un des trois « seuguou », et « ki ndionendione Ngomack » situé un peu au Nord à côté du clan des « Coundar-coundar ». Un autre trait de l’histoire attribue aux habitants de « Ki ndione ndione » une interdiction ferme de consommer du poisson.
Et si Peycouck Sérère m’était conté...
La date exacte de création de Peycouck Sérère est encore un secret de l’histoire. Cependant, à travers la tradition orale transmise de génération en génération, l’histoire retient, suivant les « circonstances de la fondation du village, que « les premiers habitants seraient, en effet, arrivés à l’approche de l’hivernage ». Pourquoi avaient-ils préféré cet endroit à un autre? Nul ne sait. La raison est peut-être liée à leur statut de paysans et de pasteurs. Ils avaient certainement besoin d’assez d’espace pour cultiver et faire paître le bétail. La preuve : les hectares à perte de vue légués aux fils actuels du village et qu’ils cultivent ou cultivaient encore avant que la démographie galopante du village et de la ville de Thiès ne vienne les conquérir. Ces terres sont bien connues sous les appellations de « thiop tia » (les terres déboisées) et « diora » (le sol dior). Nos sources renseignent que « les premiers venus n’étaient pas seuls sur le site. Ils ont trouvé sur place les gens de la localité de Ngoumsane qui les ont accueillis à bras ouverts. Un groupe de « sages » trouvé sous l’arbre à palabre raconte : « l’hivernage approchait. Il fallait vite dresser des cases. Mais la grande équation, c’était de trouver de la paille pour faire les chaumières. Les ‘’Ngoumé-ngoumé’’ - c’est ainsi que l’on désigne les habitants de « Ngoumsane » - sollicités, n’avaient que de la vieille paille ayant déjà servi, qu’on appelait et on l’appelle jusqu’à présent ‘’couck’’. Les nouveaux arrivants s’en contentèrent pour couvrir les toitures de leurs cases. Cela a servi de prétexte aux « Ngouméngoumé »pour désigner leurs nouveaux voisins. Ils leur donnèrent le nom de ‘’couck-couck’’ qui veut dire les gens à la vieille paille. L’histoire de Peycouck Sérère est donc intimement liée à celle du village de Ngoumsane ».
Sous un grand arbre surnommé «wouly» ou «mboul», se reposaient les voyageurs venus du Baol en route vers Rufisque
L’histoire fait également remarquer que le village est devenu, par la suite, un lieu de rencontre. Son emplacement géographique en faisait, en effet, un lieu d’escale pour les voyageurs venus du Baol vers le centre du pays (actuelle région de Diourbel) et en route vers Rufisque (dans la région de Dakar), une ville très commerçante à l’époque coloniale. Ces voyageurs, raconte une vieille dame sous le couvert de l’anonymat, « des Wolofs généralement, se reposaient sous un grand arbre que les ‘’Noon’’ surnomment ‘’wouly’’ et que les Wolofs connaissent sous le vocable de ‘’mboul’’. Pour désigner le lieu, ils parlaient de ‘’pey u couck’’, l’escale ou ‘’le lieu de rencontre de couck’’. Le nom est resté, auquel on adjoindra le mot sérère de la dénomination de l’ethnie à laquelle appartiennent les habitants du village ». Fait remarquable : l’endroit est aujourd’hui situé à quelques cent mètres de la route nationale qui n’a fait que remplacer l’ancienne piste autrefois empruntée par les voyageurs à califourchon sur leurs chevaux.
En plus de la modernité, Peycouck Sérère s’ouvre au monde
L’arbre en question, plus que centenaire, a existé jusque vers les années 1985 avant que le poids de l’âge n’ait eu raison de lui. Il s’est affaissé un beau jour de saison sèche. Son emplacement est occupé par une parcelle à usage d’habitation. Les cases sont, aujourd’hui, devenues de l’histoire ancienne. Elles existent encore, mais elles ne sont plus témoins du sommeil de ses occupants. Elles sont utilisées comme cuisines ou débarras pour la plupart. L’architecture à Peycouck Sérère est celle de bâtiments construits en dur avec du ciment. Certaines habitations sont mêmes faites de terrasses. D’autres, si elles sont à un niveau de rez-de-chaussée, sont prévues pour supporter un ou deux étages. Un coup d’œil, même furtif, renseigne sur le niveau de vie des habitants du village. Le village est également électrifié depuis 1999. Ses habitants sont joignables aussi à tout moment grâce au téléphone fixe comme mobile. Les poteaux électriques se dressent le long des rues principales et alimentent les concessions. Ainsi, des téléviseurs aux postes radios en passant par les lecteurs de CD, les réfrigérateurs, les congélateurs et les ordinateurs, chaque famille est aujourd’hui fière de mener sa vie au rythme du courant électrique. Les toits des maisons sont surmontés d’antenne de télévisions MMDS et parfois hissées très haut.
En plus de la modernité, Peycouck Sérère s’ouvre au monde, à la civilisation extérieure. Faisant aujourd’hui presque partie de la banlieue thiessoise. Le village rattaché à la commune de Thiès bénéficie d’eau potable. En plus des puits traditionnels, l’eau coule des robinets dans chaque concession. Pour ses habitants, le défi majeur pour Peycouck Sérère aujourd’hui, c’est de réussir la mutation dans laquelle le village est engagé depuis quelques années. La localité, du fait d’une urbanisation galopante accueille des nouveaux habitants, des Wolofs notamment. Comment alors vivre avec les autres et en même temps conserver sa culture et sa langue ?
SERIGNE ABDOUL AZIZ SY, L'INOUBLIABLE RÉGULATEUR
Le 14 septembre 1997, disparaissait celui qui, d’outre-tombe, continuent d’inspirer le monde
Le 14 septembre 1997, disparaissait Serigne Abdoul Aziz Sy qui, d’outre-tombe, continuent d’inspirer le monde. Quatrième fils de Seydi El Hadj Malick Sy et de Sokhna Safiétou Niang, celui qu’on appelait affectueusement « Dabakh » pour son altruisme a vu le jour en 1904. Conscient du destin qu’il était appelé à accomplir, il a entrepris, à l’image de son père, des voyages particulièrement studieux auprès du grand érudit Serigne Hady Touré et d’autres pérégrinations qui l’ont mené au Cayor et à Saint-Louis, carrefour d’idées et de connaissances. Il est resté dans la vieille ville jusqu’en 1937 chez Serigne Birahim Diop, un des « Mouqadams » d’El Hadji Malick Sy. Serigne Abdou acquiert rapidement la réputation de poète et de panégyriste très apprécié des membres de la confrérie. Le saint homme s’est illustré par son érudition, son éloquence mais aussi par son engagement pour la cause islamique. Intronisé troisième khalife de la confrérie Tidiane du Sénégal à partir du 13 mai 1957, après la disparition quasi simultanée de ses frères Seydi Ababacar Sy et Serigne Mouhamadou Mansour Sy, il a su être le défenseur des faibles. Régulateur social hors pair, Dabakh entretenait des relations chaleureuses avec toutes les sensibilités religieuses. Après avoir veillé, pendant 40 ans, sur l’héritage de Seydi El Hadj Malick Sy, le sage de Diacksao tire sa révérence le 14 septembre 1997.