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23 avril 2025
Développement
LES PREMIERS COUPS DE FILET DU PJF
Derrière les murs du Building administratif, une équipe de 27 magistrats mène une lutte sans merci contre la criminalité économique. Les premiers résultats révèlent plus de deux milliards de francs saisis et plus de 160 arrestations effectuées
(SenePlus) - D'après un reportage de la RTS, le Pôle Judiciaire Financier (PJF) affiche un bilan considérable après seulement quatre mois d'existence. Cette nouvelle institution, créée en août 2023, s'impose déjà comme un acteur majeur dans la lutte contre la délinquance économique et financière au Sénégal.
Au sixième étage du Building administratif, vingt-sept magistrats, épaulés par leurs greffiers, travaillent sans relâche sur des dossiers sensibles. Selon le reportage de la RTS diffusée vendredi 17 janvier 2025, l'institution a déjà traité 91 affaires concernant des crimes économiques et délits financiers.
Le procureur de la République, El Hadji Aliou Abdoulaye Sylla, révèle des chiffres éloquents : "À ce jour, il y a eu 162 arrestations. Il y a 87 dossiers qui ont été transmis au juge d'instruction." Plus impressionnant encore, le montant des saisies et cautionnements s'élève à "2 milliards 500 millions", auxquels s'ajoutent divers "moyens roulants" confisqués.
Le directeur des affaires criminelles et des grâces (DACG), Yakham Leye, souligne la spécificité du PJF par rapport à son prédécesseur, la Cour de Répression de l'Enrichissement Illicite (CREI) : "Le pôle judiciaire et financier va connaître de la grande délinquance économique et financière. Il sera donc animé par des magistrats spécialisés et qui seront assistés [...] par des assistants de justice qui sont également des experts dans des domaines aussi divers que la finance, la banque, l'informatique, les marchés publics."
Une avancée majeure distingue le PJF : l'introduction du double degré de juridiction. Comme l'explique le DACG, cette innovation permet désormais aux personnes jugées de faire appel, un droit qui n'existait pas sous la CREI.
Le procureur du PJF insiste sur la diversité des sources des dossiers traités : "Nous avons reçu des dossiers de l'Ofnac. Nous avons également été saisis récemment de certains dossiers de la CENTIF." Il réaffirme l'engagement de l'institution envers la transparence, tout en respectant "les règles relatives à la présomption d'innocence et aux droits de la défense."
L'actualité récente du PJF a été marquée par l'annonce d'une traque portant sur 125 milliards de francs, révélée dans un communiqué le 12 janvier dernier. Cette affaire illustre l'ampleur des enjeux auxquels fait face cette nouvelle institution judiciaire.
Le fonctionnement quotidien du PJF, tel que décrit par la RTS, révèle une procédure rigoureuse. Les personnes convoquées sont entendues en présence de leur avocat, avec la possibilité de répondre ou non aux questions du juge. Si des charges sont retenues, leurs dossiers sont transmis au parquet pour la suite de la procédure.
par Jean Pierre Corréa
LA RÉUNION HOULEUSE DU CNP
EXCLUSIF SENEPLUS - Face au tollé suscité par ses récents propos sur la gouvernance des organisations patronales, Amadou Seck, président de l'UPIC est resté ferme sur ses positions, appelant à un renouvellement des instances
Les propos tenus lors d’une émission de la TFM par Amadou Seck, évoquant un déficit de démocratie à l’interne des organisations patronales, avaient abouti à une convocation d’une réunion du CNP, plaçant ce fait au premier rang d’un ordre du jour aux allures de règlement de comptes. Selon des sources concordantes, ce fut le cas.
En effet, plusieurs participants eurent à reprocher au président de l’UPIC ses propos jugés comme dissidents, alors que « l’accusé », a, selon nos sources, avec tranquillité, rétorqué que ses propos étaient d’une part, généraux, mais qu’il les maintenait, même si certains s’étaient sentis visés par sa sortie, appelant à un renouvellement de plusieurs instances patronales. Tous les reproches faits à Amadou Seck ont semble-t-il été balayés par le président de l’UPIC, devant un président du CNP, Baïdy Agne, quelque peu gêné aux entournures, face à la direction que prenait ce débat d’un autre temps. Car, l’évidence semble être de constater l’importance prise par l’UPIC et sa gestion, qui aura valu à Amadou Seck d’être du voyage en Gambie en compagnie du Premier ministre Ousmane Sonko, et surtout les nouvelles orientations du pouvoir en place, dans sa collaboration avec le secteur privé, désorientant un peu les personnalités d’un patronat devenu archaïque dans son fonctionnement, lequel paralyse ses objectifs d’accompagnement du pouvoir en place dans les mécanismes notamment de mise en place de stratégie liées à l’emploi, des jeunes en particulier.
Le débat fut donc houleux, même si Amadou Seck, est resté droit dans ses mocassins, avant d’être orienté sur des objectifs de changer de politiques, comme à l’IPRES ou à la Caisse de Sécurité Sociale, qui faisaient partie du même ordre du jour.
Il faut maintenant espérer que les observations de Monsieur Amadou Seck soient prises en considération pour une meilleure et plus efficace participation de nos organisations patronales aux politiques publiques qui mettront notre pays sur la voie définitive du progrès et du développement.
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LA RICHESSE N'EST PAS UN DÉLIT, PLAIDENT LES AVOCATS DE FARBA NGOM
Les conseils du député dénoncent une justice expéditive qui n'aurait même pas pris la peine d'entendre leur client avant de lancer les poursuites. La défense dénonce ce qu'elle qualifie de "procès de la réussite"
Dans une conférence de presse tenue ce 17 janvier 2025 à Dakar, le collectif d'avocats constitué pour la défense du député Farba Ngom a fait le point sur la procédure de levée d'immunité parlementaire visant leur client.
Selon les révélations des avocats, cette procédure fait suite à une demande du procureur général près la cour d'appel de Dakar, transmise au ministre de la Justice le 3 janvier 2025. Cette requête serait fondée sur un rapport de la Cellule de Traitement des Informations Financières (CENTIF), dont ni le député ni ses conseils n'auraient encore eu connaissance.
Les avocats ont particulièrement insisté sur l'absence totale d'audition préalable de leur client par la CENTIF. "Monsieur Farba Ngom n'a jamais été entendu dans le cadre d'une enquête de la CTIF, il n'a jamais été confronté aux agents de la CENTIF", ont-ils souligné, déplorant que leur client ait été "jeté en pâture" à l'opinion publique.
Au cœur de cette affaire, des allégations médiatiques font état de transactions d'un montant de 125 milliards. Face à ces accusations, les avocats ont tenu à rappeler le statut d'homme d'affaires de leur client, précisant qu'il n'a "jamais eu à gérer des deniers publics" ni "occupé un poste ministériel" sous le régime précédent de Macky Sall.
Dans un communiqué signé par Maîtres Pascal Jacques Pascal Gomis, Guedel et associés, ainsi que plusieurs autres avocats, le collectif a formellement demandé le respect des procédures judiciaires. Ils réclament notamment la conduite d'une enquête préliminaire conforme à l'article 77-98 du code de procédure pénale, issu de la loi 2023-14 du 2 août 2023.
Les défenseurs du député ont par ailleurs affirmé que leur client reste à la disposition des autorités pour répondre à toute convocation, tout en mettant en garde contre ce qu'ils considèrent comme une possible instrumentalisation politique de l'affaire. "Que l'État de droit qui garantit les droits de tous les Sénégalais soit respecté scrupuleusement et à la lettre", ont-ils plaidé.
Face aux enjeux de cette procédure, le collectif d'avocats reste ouvert à l'arrivée de nouveaux membres pour renforcer la défense du député Farba Ngom, qui continue de bénéficier de la présomption d'innocence à ce stade de la procédure.
LA JUSTICE AMÉRICAINE MET TIKTOK AU PIED DU MUR
La Cour suprême vient de valider l'interdiction de la plateforme sur le sol américain, à moins que sa maison-mère chinoise ByteDance ne cède ses activités d'ici dimanche. Une décision qui menace directement les 170 millions d'utilisateurs
(SenePlus) - D'après les informations rapportées par Associated Press (AP) ce 17 janvier 2025, la Cour suprême des États-Unis a rendu une décision historique concernant l'avenir de TikTok sur le territoire américain. Dans un arrêt unanime, la plus haute instance judiciaire du pays a confirmé la constitutionnalité de la loi fédérale qui impose à ByteDance, la maison-mère chinoise de l'application, de vendre ses activités américaines sous peine d'interdiction.
Cette décision capitale intervient dans un contexte politique particulièrement tendu. Comme le souligne AP, "la dispute autour des liens de TikTok avec la Chine est devenue l'incarnation de la compétition géopolitique entre Washington et Pékin". La Cour a notamment estimé que "le Congrès a déterminé qu'une cession était nécessaire pour répondre à ses préoccupations fondées en matière de sécurité nationale concernant les pratiques de collecte de données de TikTok et sa relation avec un adversaire étranger".
Les implications de cette décision sont considérables pour les 170 millions d'utilisateurs américains de l'application. Selon les précisions du Département de la Justice citées par Associated Press, si l'application ne disparaîtra pas immédiatement des téléphones des utilisateurs existants, "les nouveaux utilisateurs ne pourront pas la télécharger et les mises à jour ne seront pas disponibles", ce qui finira par rendre l'application inutilisable.
La situation est d'autant plus complexe que le président élu Donald Trump, qui compte lui-même 14,7 millions d'abonnés sur la plateforme, adopte une position plus conciliante. Associated Press rapporte qu'il a évoqué le sujet lors d'une conversation avec le président chinois Xi Jinping, suggérant la possibilité d'une solution négociée.
Les réactions à cette décision sont contrastées. Kate Ruane, directrice au Center for Democracy & Technology, citée par l'agence de presse américaine, a qualifié la décision de "sans précédent", estimant qu'elle "nuit à la liberté d'expression de centaines de millions d'utilisateurs de TikTok dans ce pays et dans le monde". Les créateurs de contenu s'inquiètent également des répercussions économiques, comme l'illustre le témoignage de Desiree Hill, propriétaire d'un atelier mécanique en Géorgie : "Je suis très, très inquiète de ce qui va se passer au cours des prochaines semaines".
La question de la vente reste au cœur des débats. Bien que ByteDance ait déclaré son refus de vendre, certains investisseurs, dont l'ancien secrétaire au Trésor Steven Mnuchin et l'homme d'affaires Frank McCourt, ont manifesté leur intérêt. Cependant, comme le rappelle Associated Press, la loi chinoise restreint la vente de l'algorithme propriétaire qui a fait le succès de la plateforme, compliquant considérablement toute transaction potentielle.
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LE SAVOIR ET LA TRADITION, UN DIALOGUE NÉCESSAIRE
Le philosophe Souleymane Bachir Diagne et l'avocat Doudou Ndoye croisent leurs regards sur l'état du savoir dans la société contemporaine. Entre tradition familiale et nouveaux médias, ils dissipent les maux qui rongent la transmission du savoir
Dans un entretien d'exception diffusé jeudi 16 janvier 2024 sur Belles Lignes, le philosophe Souleymane Bachir Diagne et l'ancien ministre de la Justice, Me Doudou Ndoye, ont livré un dialogue riche sur l'essence du savoir et les défis de la société contemporaine. L'émission, présentée par Pape Alioune Sarr dans son nouveau format, a permis une rencontre inédite entre ces deux figures intellectuelles sénégalaises.
Au cœur de leur échange : l'amour du savoir comme fondement de l'humanité. Pour Souleymane Bachir Diagne, cette quête de connaissance commence par une curiosité naturelle qui, correctement cultivée, se transforme en une véritable aspiration intellectuelle. Me Ndoye a complété cette réflexion en soulignant la dimension spirituelle de cette quête, rappelant la tradition coranique et l'importance de la conscience de soi dans ce processus.
Les deux intellectuels ont particulièrement insisté sur le rôle pivot de la famille sénégalaise traditionnelle. Contrairement aux idées reçues sur l'incompatibilité entre famille étendue et modernité, ils ont défendu la pertinence contemporaine de ces structures sociales. Me Ndoye a notamment partagé son expérience personnelle, illustrant comment ces liens familiaux continuent de façonner positivement la société sénégalaise.
La conversation a ensuite abordé les transformations sociales actuelles, notamment l'impact des réseaux sociaux. Le philosophe Diagne a mis en garde contre leur tendance à créer des "bulles" tribales plutôt que de véritables espaces de partage du savoir. Les deux intervenants ont plaidé pour un retour à des échanges plus profonds et authentiques.
La discussion s'est conclue sur l'importance des centres traditionnels du savoir au Sénégal, notamment Touba, évoquant le développement récent de ses universités comme signe encourageant pour l'avenir de l'éducation. Les intervenants ont souligné l'importance de préserver ces espaces de réflexion qui permettent de transcender les divisions et de cultiver une véritable quête de connaissance.
LA CHUTE ANNONCÉE D'UN PROCHE DE MACKY SALL
L'ascension de Farba Ngom intrigue. Sa réputation d'homme de l'ombre au train de vie fastueux n'a cessé de croître. Celui qui ne dort jamais, connu pour ses rendez-vous nocturnes, pourrait bientôt voir ses nuits perturbées par la justice
(SenePlus) - « Je n'ai pas peur d'Ousmane Sonko. Je ne capitulerai jamais et même si je dois aller en prison, ce sera avec dignité ». Ces mots de défi lancés par Farba Ngom lors d'une conférence de presse de l'APR ce 16 janvier 2024 pourraient être ses dernières bravades en tant qu'homme libre. L'homme d'affaires et député, surnommé le « griot de Macky Sall », est désormais dans le collimateur de la justice sénégalaise pour une affaire présumée de blanchiment de capitaux d'une ampleur vertigineuse : 125 milliards de francs CFA.
L'ascension de Farba Ngom intrigue autant qu'elle fascine. Issu d'une famille de griots de Nguidjilone, le village natal de la mère de Macky Sall, cet homme qui n'a pas dépassé l'école primaire est devenu l'un des personnages les plus puissants et les plus redoutés du Sénégal. Comme le rapportait Jeune Afrique en 2022, sa réputation d'homme de l'ombre au train de vie fastueux n'a cessé de croître. « C'est l'homme à tout faire du président. Il est ses yeux et ses oreilles au sein de Benno Bokk Yakaar et à l'Assemblée nationale », confiait alors un membre de la coalition au pouvoir sous couvert d'anonymat.
L'affaire qui pourrait précipiter sa chute est d'une complexité rare. Selon le quotidien Libération, cité par Jeune Afrique, elle impliquerait des transactions en cascade entre les comptes bancaires d'une holding appartenant à l'homme d'affaires Tahirou Sarr et ceux de plusieurs sociétés civiles immobilières et professionnelles gérées par Farba Ngom. Plus troublant encore, une partie des fonds proviendrait directement des caisses de l'État sénégalais.
La fortune du député « apériste » avait déjà fait l'objet de vives controverses. En 2018, Moustapha Cissé Lô, alors premier vice-président de l'Assemblée nationale, s'interrogeait publiquement : « Farba Ngom doit apporter des réponses aux gens qui l'accusent de détenir plusieurs milliards, alors que personne ne lui connaît une entreprise qui lui permettrait de faire une telle richesse. »
Figure atypique de la politique sénégalaise, Farba Ngom est connu pour ses habitudes nocturnes. « Vous pouvez venir me voir à une heure ou deux heures du matin. Moi, je ne dors pas », confiait-il en 2022 à Jeune Afrique. Ces insomnies pourraient désormais prendre un autre sens : l'Assemblée nationale doit examiner ce vendredi 17 janvier la demande de levée de son immunité parlementaire, sollicitée par la justice. Une commission de onze membres sera chargée d'instruire cette requête.
Le député-maire des Agnams, qui a siégé sans discontinuer à l'Assemblée nationale depuis 2012, pourrait ainsi voir son parcours politique brutalement interrompu. Les infractions présumées sont lourdes : association de malfaiteurs, blanchiment de capitaux, escroquerie portant sur les deniers publics, corruption, trafic d'influence et abus de biens sociaux.
par Birane Diop
« LE LAMBEAU » DE PHILIPPE LANÇON EST UNE ŒUVRE MAJEURE
Il incarne une conscience universelle dans un monde sous tension, marqué par le terrorisme et les menaces fascistes. De sa "gueule cassée" à sa renaissance, son récit est un monument de dignité et de résilience
Le 7 janvier 2025, la France a commémoré le dixième anniversaire des attentats contre l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo. Cette date, gravée dans la mémoire collective de la République, ravive des souvenirs douloureux et des cicatrices toujours béantes dans le corps social. Des vies ont été fauchées au nom d’une idéologie meurtrière. Cette barbarie inqualifiable, perpétrée par les frères Kouachi, deux ennemis des joies simples et du bonheur fugace, a coûté la vie à douze personnes et en a blessé plusieurs autres.
Parmi les survivants de ce drame figure Philippe Lançon. J’ai beaucoup pensé à lui le jour de la cérémonie d’hommage aux victimes. Depuis que j’ai lu son livre Le Lambeau, d’une traite, un après-midi d’été 2018 sur les berges du Rhône, son récit me hante et me bouleverse.
Né en 1963 à Vanves, Philippe Lançon est à la fois journaliste et romancier. Il exerce son métier au quotidien Libération et en tant que chroniqueur à Charlie Hebdo. Il a été grièvement blessé lors de cet attentat, tout comme Coco et Riss. C’est cette histoire tragique que Philippe Lançon raconte dans son roman autobiographique Le Lambeau. Un ouvrage dans lequel chaque mot célèbre la liberté, l’intimité, l’universalité, la fraternité, mais aussi la fragilité de la vie. Cette vie qui ne tient parfois qu’à un fil, le tout bercé par la musique de Bach et les textes de Proust.
Philippe Lançon retrace, à cœur ouvert et avec une grande dignité, les quelques minutes qui ont bouleversé sa vie et celle de ses collègues, ainsi que les deux années de convalescence médicale qui ont suivi l’attentat, marquées par des opérations chirurgicales de six à huit heures. Pourtant, la veille de l’attentat, il s’était rendu au théâtre avec Nina. Le lendemain, Philippe Lançon se réveille de mauvaise humeur, fait des exercices tout en écoutant l’interview de Michel Houellebecq sur France 2. Partagé entre Libération et Charlie Hebdo, il décide de se rendre à la réunion de rédaction de Charlie. Était-ce un signe du destin ?
Philippe Lançon dresse un panorama dont il est le centre, à la fois acteur et metteur en scène de son propre drame. Avec son visage défiguré et sous l’emprise des hallucinations provoquées par la morphine, Lançon mène un combat acharné. Il va réapprendre à affronter sa « gueule cassée » dans le miroir, de sa nouvelle maison, à la Salpêtrière. Il écrit : « Mon corps entier devenait ma mâchoire, cette inconnue qui m’écartelait et semblait parcourue par des courts-circuits. »
Cet événement lui fera cependant comprendre l’importance de la famille. Pendant ces moments extrêmement douloureux, c’est son frère qui resta à son chevet, l’aidant et répondant à ses moindres besoins. En une phrase : Le Lambeau est une ode à la famille et à l'amitié sans faux-semblants.
Ce texte de 512 pages dégage une profonde humanité. C’est un ouvrage dont la plume a été trempée dans l’encre de l’humanisme et de la vulnérabilité. Malgré tout ce qu’il a vécu, Philippe Lançon n’a exprimé ni haine, ni désir de vengeance. Il distille de l’amour et de l’empathie dans toute sa complexité humaine et avec ses failles assumées. Le Lambeau nous interroge, nous bouleverse et, par moments, nous réduit au silence. Tous les mots de ce récit de vie sont d’une justesse incroyable.
J’ai été terriblement frappé par le bel hommage qu’il a adressé au personnel soignant qui était à son chevet, pendant cette longue et douloureuse période de réparation. Passer trois mois, alité à hôpital est une épreuve considérable. Je n’ai jamais lu une page de Charlie, mais jamais je ne cautionnerai la mort d’un journaliste ou d’un dessinateur pour ses écrits ou ses dessins. Écrivain de talent, Philippe Lançon incarne une grande conscience universelle dans un monde sous tension, marqué par le terrorisme et les menaces fascistes. Il fait partie de ces grands écrivains qui occupent une place spéciale dans mon panthéon personnel, celui de la littérature et de l’humanisme. Le livre de Philippe Lançon nous montre encore magnifiquement cette vérité implacable : Quand tout sera perdu, ou presque, il ne restera que la littérature, la musique, l'art, le cinéma et les liens tissés avec ceux que nous aimons d'un amour pur et désintéressé.
Post-scriptum : voici les mots que j’avais écrits sur ma page Facebook le jour où il a reçu le prix Femina, le 5 novembre 2018 : « Le prix est amplement mérité. Félicitations à Philippe Lançon pour ce récit bouleversant et poignant, écrit avec une grande dignité et un courage admirable. Je suis vraiment heureux pour lui. »
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LA DERNIÈRE CONFÉRENCE DE PRESSE DE BLINKEN VIRE AU CHAOS
Le Secrétaire d'État américain a été pris à partie par des journalistes qui l'ont accusé d'être un "criminel" pour sa gestion du conflit à Gaza, avant d'être évacués de la salle par les services de sécurité
(SenePlus) - Selon Reuters, la dernière conférence de presse d'Antony Blinken, Secrétaire d'État américain sortant, a été marquée par des incidents au Département d'État.
L'agence de presse rapporte que plusieurs journalistes critiques de la position américaine sur le conflit à Gaza ont violemment interpellé le chef de la diplomatie américaine. "Criminel ! Pourquoi n'êtes-vous pas à La Haye ?", a notamment lancé Sam Husseini, journaliste indépendant connu pour ses critiques de la politique étrangère de Washington, selon Reuters. L'incident a atteint son paroxysme lorsque les services de sécurité ont dû physiquement évacuer le journaliste qui continuait ses invectives.
La confrontation s'est poursuivie avec Max Blumenthal, rédacteur en chef du Grayzone, qui a interpellé Blinken sur la continuité des livraisons d'armes : "Pourquoi avez-vous maintenu le flux d'armements alors que nous avions un accord en mai ?", avant d'être lui aussi escorté hors de la salle, précise l'agence.
Reuters souligne que ces tensions interviennent dans un contexte particulièrement lourd : depuis l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023, qui a fait 1 200 morts et environ 250 otages selon les chiffres israéliens, la riposte israélienne a causé la mort de plus de 46 000 Palestiniens, selon le ministère local de la Santé. L'offensive a également provoqué le déplacement de presque toute la population de Gaza, soit 2,3 millions de personnes.
Face à ces interruptions, Blinken, qui quittera ses fonctions lundi pour l'administration Trump, est resté calme, sollicitant le silence pour poursuivre son intervention, rapporte l'agence. Interrogé sur d'éventuels regrets concernant sa gestion du dossier israélien, le Secrétaire d'État a défendu sa position en expliquant que le gouvernement israélien avait mené des politiques "fondamentalement soutenues par une écrasante majorité d'Israéliens après le traumatisme du 7 octobre".
Reuters note que l'administration Biden n'a pas pu établir de conclusions définitives sur des incidents particuliers qui pourraient constituer des violations du droit international, Blinken invoquant l'imbrication du Hamas dans la population civile. "Je soulignerais également qu'en Israël même, des centaines de cas font l'objet d'enquêtes", a-t-il ajouté, "Ils ont un processus, des procédures, un État de droit... C'est la marque de toute démocratie."
Selon l'agence, cette dernière conférence mouvementée s'inscrit dans un contexte plus large de contestation, avec des manifestants campant depuis des mois devant le domicile de Blinken en Virginie, allant jusqu'à jeter de la peinture rouge - symbolisant le sang - sur les véhicules transportant le Secrétaire d'État et sa famille.
La guerre à Gaza risque de définir l'héritage de politique étrangère de l'administration Biden sortante, conclut Reuters, malgré l'accord conclu mercredi avec le Hamas sur un cessez-le-feu en échange de la libération d'otages.
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LE CRI DU CŒUR D'AISSATA TALL SALL POUR FARBA NGOM
Alors que plane la menace d'une levée d'immunité parlementaire sur son collègue député, la patronne du groupe parlementaire d'opposition monte au créneau : « Ils marcheront sur nos cadavres », lance-t-elle à l'endroit de Pastef
La députée d'opposition Aissata Tall Sall a livré un plaidoyer vibrant ce jeudi 16 janvier 2025, en marge de la conférence de presse de protestation contre la procédure de levée d'immunité parlementaire visant son collègue Farba Ngom, mis en cause dans une affaire de plusieurs milliards de francs CFA.
Rapportant une conversation avec l'intéressé, la parlementaire a déclaré : « Farba Ngom m'a dit : 'Ma sœur, je sais que les jeux sont déjà faits parce que leur majorité écrasante est là pour écraser' ». Elle a ensuite martelé que l'opposition resterait « debout pour mener la résistance contre l'injustice, contre le mensonge, contre la loi du plus fort ».
Dans une intervention passionnée, l'ancienne ministre a rappelé que « le Sénégal n'a pas été bâti seulement le 24 mars » et que les nouveaux dirigeants ont « trouvé une nation unie et solidaire du FA jusqu'à la Casamance, de Dakar jusqu'au fin fond de Tambacounda ».
Son discours a atteint son paroxysme lorsqu'elle a lancé : « Le jour où ils voudront s'attaquer à la nation, à la République, défaire l'État, ils marcheront sur nos cadavres, mais on ne l'acceptera pas ». Elle a promis un combat sans merci, assurant que l'opposition serait « plus courageuse, plus déterminée et plus intelligente » que ses adversaires.
La parlementaire a conclu en affirmant que son groupe politique poursuivrait la lutte « tant à l'Assemblée nationale que sur le terrain politique », s'engageant à défendre « la vérité contre le mensonge » et « le Sénégalais contre une faction ».
L'ENQUÊTE QUI RÉVÈLE LES FAILLES DE L'AFFAIRE BASSÈNE
Le journaliste purge une peine à perpétuité pour un massacre qu'il n'aurait pas pu commettre d'après de nouveaux éléments explosifs. Son véritable crime semble être d'avoir voulu révéler les dessous d'un conflit très lucratif en Casamance
(SenePlus) - Une enquête du Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ) jette un nouvel éclairage troublant sur la condamnation à perpétuité du journaliste René Capain Bassène, révélant de nombreuses irrégularités dans une affaire qui soulève des questions sur la liberté de la presse au Sénégal.
L'investigation menée par le CPJ fin 2024 dévoile un schéma inquiétant de témoignages obtenus sous la contrainte. "Ils me battaient constamment, me déshabillaient et utilisaient une matraque électrique sur mes parties génitales quand ils n'aimaient pas mes réponses", a confié Bassène au CPJ, décrivant son interrogatoire après son arrestation en 2018.
Cette violence systématique n'était pas réservée qu'au journaliste. Sept coaccusés ont déclaré au CPJ avoir été contraints d'incriminer Bassène. Le cas d'Ibou Sané est particulièrement édifiant : malgré un pistolet sur la tempe, il a refusé d'admettre connaître le journaliste. Son prétendu témoignage a pourtant été utilisé contre Bassène au tribunal.
Le profil de Bassène émerge comme celui d'un journaliste chevronné dont les investigations sur le conflit en Casamance devenaient gênantes. "Mon principe a toujours été d'aller chercher des informations à la source", a-t-il expliqué au CPJ. Son quatrième livre en préparation, intitulé "Un conflit qui nourrit plus qu'il ne tue", promettait des révélations explosives sur l'exploitation du conflit par certains acteurs.
"C'était un livre assez explosif dans lequel il mentionnait les organisations par leur nom et évoquait le problème de la coupe du bois", a confirmé au CPJ Xavier Diatta, proche du journaliste. Les menaces s'étaient multipliées, au point que selon son épouse Odette Victorine Coly, "il ne prenait plus les appels d'un numéro qu'il ne connaissait pas".
L'examen des documents judiciaires par le CPJ révèle des incohérences majeures dans l'accusation. Les prétendues réunions où Bassène aurait planifié les meurtres sont contestées par neuf participants présumés. La géolocalisation du téléphone de Bassène dans la forêt le jour du massacre est contredite par quatre témoins qui l'ont vu ailleurs. Des courriels présentés comme preuves comportent des anomalies flagrantes, notamment un message prétendument envoyé alors que Bassène était déjà en détention.
En prison depuis 2018, Bassène maintient son innocence : "Je suis prêt à passer ma vie en prison, mais ce que je ne supporte pas, c'est l'injustice de m'entendre dire que je n'ai pas été arrêté à cause de mon travail de journaliste", a-t-il déclaré au CPJ.
Cette affaire s'inscrit dans un contexte plus large de pression sur les journalistes couvrant le conflit en Casamance. Le Sénégal, selon le recensement 2023 du CPJ, figure parmi les cinq pays africains qui emprisonnent le plus de journalistes, une situation préoccupante pour ce pays considéré comme l'une des démocraties les plus stables d'Afrique.