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12 avril 2025
Développement
LES DAMNÉS DU PARI
"Si je ne gagne pas aujourd'hui, je risque la prison." Cette confidence bouleversante illustre le drame qui se joue dans les kiosques de paris sportifs dakarois. Derrière l'effervescence des matchs, se cachent des destins suspendus à un ticket de jeu
Chaque weekend, beaucoup de personnes s’activent dans les paris sportifs à Dakar. Que ce soit en ligne ou dans les agences et kiosques de jeux, tous les moyens sont bons pour être au diapason des matchs. Et obtenir des gains quel que soit le risque à prendre. Entre craintes, espérance et superstition, les parieurs se livrent à cœur ouvert.
En ce jour de weekend, les affiches des matchs des championnats européens sont alléchantes. Au grand bonheur des parieurs. À Liberté 6, tout près de la Maison d’arrêt et de correction du Camp pénal, un kiosque bleu destiné aux paris sportif et mutuel urbain (Pmu) est bien occupé par des parieurs. Dans cet espace, il n’y a que des hommes aux tranches d’âge différentes qui engagent une discussion hyper animée.
Les matchs de la premier League, de la Liga, de la Ligue 1 française et de la Bundesliga sont au cœur des débats. Ces personnes discutent avec passion, faisant appel aux derniers résultats des équipes qui sont à l’ordre du jour, pour peaufiner leurs paris. Et pour cela, stylos, smartphones et connexion internet sont des outils essentiels pour s’y atteler. De temps en temps, des individus qui ne sont pas concernés par cette discussion vivante, viennent valider leur combinaison auprès de la gérante du kiosque. Sur les deux voies de Liberté 6, les gens circulent aisément. Certains n’hésitent pas à regarder indiscrètement ces férus du ballon rond qui discutent sans se soucier des passants. L’heure du démarrage des premières rencontres du jour approche.
C’est le moment de valider définitivement les tickets pour certains. L’hésitation se fait ressentir à travers leurs discussions. Le doute commence à s’installer dans le raisonnement de ces parieurs. « J’hésite à valider mon ticket, car j’y ai mis un match qui commence à 11h et j’ai peur de perdre mon pari dès la fin du premier match », confie M. N., un jeune homme, la vingtaine, vêtu d’un t-shirt blanc assorti d’un short. Cet homme qui était très enthousiasmé pendant le débat, n’est plus trop assuré de ses choix. « J’ai pris des risques sur mon pari. Mais je n’ai pas le choix car j’ai gravement besoin d’argent avant le début de la semaine », conclut-il sur un ton craintif. M. N., n’est pas la seule personne dans cette situation.
Son homologue supporter de Manchester United, arborant le maillot de son club fétiche, est presque dans le même cas de figure. S. T, un homme longiligne, étudiant en master à l’Ucad craint que son club de cœur lui joue un mauvais tour. « En tant que fidèle supporter de Manchester United, je doute de leur victoire face à Brentford. Néanmoins j’ai confiance en eux », souligne-t-il à voix basse. À part la méfiance qu’il a vis-à-vis de son club, S. T., a aussi des superstitions à propos des gains. Le trentenaire évite les matchs matinaux pour ne pas perdre. « Quand je mets un match qui commence à 11h voir 12h, je ne gagne jamais. Depuis que j’ai fait cette remarque, j’ai complétement arrêté d’y mettre ces matchs. Tous mes paris victorieux concernent uniquement les rencontres qui commencent au-delà de 14h », argue-t-il avec beaucoup d’humour. Après avoir lâché ces confessions, M. N et S. T se dirigent vers le kiosque pour valider leurs combinaisons. En ayant espoir que leurs paris soient victorieux.
Miser à tout prix
À quelques encablures de Liberté 6, « Khar Yalla », un quartier périphérique de la commune de Grand-Yoff. Tout près du terrain d’entrainement de l’Asc « Gaal Gui », se trouve une agence de pari sportif de couleur verte et blanche. À l’intérieur des écrans plats diffusant les matchs du jour y sont visibles. Les programmes des rencontres avec les côtes sont affichés sur les murs. Les gérants de l’espace, surveillent de près les comportements des parieurs, composés de personnes d’âge mur et un nombre important d’adolescents. Les discussions et concertations fusent de partout. Une ambiance des grands jours règne ici. D’un joueur à un autre, les méthodes utilisées pour trouver la bonne combinaison sont différentes. L’agence est bruyante, mais cela ne semble pas déranger les occupants des lieux. À cet endroit, les parieurs allient paris en ligne et paris physiques. Cela dépend de la nature des parieurs.
À côté du guichet des paiements, se pointe un homme de taille moyenne hyper concentré sur son smartphone. Il est en train d’effectuer ses derniers réglages, avant de valider son pari en ligne, via une application en vogue au Sénégal. Après un moment d’hésitation, il finit par expliquer son enthousiasme lié au pari sportif, sous le couvert de l’anonymat. « En tant qu’amoureux du ballon rond, je mise mon argent pour vivre ma passion. Je mise de grosses sommes car ça me procure du plaisir, même s’il m’arrive de perdre », confie le trentenaire. Les entrées et les sorties se multiplient dans cet espace de jeu. Au cours des weekends, l’affluence est toujours de mise. Certains parieurs s’exercent sur la sélection des matchs, via les programmes affichés un peu partout dans l’agence.
Les joueurs qui s’y affèrent font preuve de concentration et d’analyse profonde pour trouver les bonnes côtes. Parmi eux, F.T., ouvrier de profession, vêtu de sa tenue de travail, des bottes tachetées d’huile couvrent ses pieds. Il explique les raisons de ses paris excessifs. « Quand j’ai de l’argent je pense automatiquement à miser quelle que soit la circonstance. Je parie beaucoup, car j’aime miser pour obtenir des gains assez conséquents », souligne-t-il, avant de continuer sa sélection avec assiduité en consultant de temps en temps sur son téléphone portable, le classement des clubs qu’il a choisi de mettre dans son combiné.
Parier à leurs risques et périls
Les points de jeu sont éparpillés un peu partout à Grand Yoff. Après « Khar Yalla », Hlm, Patte-d’oie, un autre quartier de la commune de Grand Yoff accueille une zone de convergence des parieurs, situé tout près du stade communal de Grand Yoff. Cet emplacement est presque similaire à celui de « Khar Yalla », mais les adolescents ne sont pas les bienvenus. Le gardien des lieux, habillé tout en noir, veille scrupuleusement à la nature des personnes qui accèdent à cet endroit. Les joueurs ne sont pas nombreux ici. Mais cela n’affecte pas les discussions. Certains discutent sur les clubs à éviter pour ne pas perdre. Tandis que d’autres se concentrent sur les options de pari pour déjouer les pièges des bookmakers à travers les cotes données.
La crainte peut se lire sur le visage de certains parieurs, quand ils choisissent les matchs. Quelques-uns prennent le temps nécessaire pour calculer les côtes en faisant des comparaisons. Les clubs qui reçoivent et qui se déplacent sont aussi pris en compte par les parieurs, pour avoir une idée sur la mise à choisir. T. F, trouvé sur les lieux en train de vérifier ses coupons déjà joués avec angoisse, exprime son émotion sans gêne. « Actuellement, j’ai l’obligation de gagner car je dois rembourser une dette qui date de 6 mois. Et si ces paris effectués ne sont pas gagnants, je risque d’aller en prison. J’ai joué mais j’ai vraiment peur de perdre », confesse-t-il d’un air pensif. L’homme vêtu d’une chemise blanche et d’un pantalon kaki de couleur beige, ajoute : « Je n’ai pas d’alternative, c’est à cause de ça que j’ai recours aux paris sportifs pour régler mes problèmes. C’est un risque énorme que j’ai pris actuellement ».
Les parieurs sont prêts à tout pour obtenir des gains. Même s’il faut faire d’énormes sacrifices et en assumer les conséquences. Un autre parieur est dans une situation similaire à celui de T. F. T-shirt noir à l’effigie d’un lutteur, un jean déchiré couvre ses membres supérieurs, ce jeune homme âgé de 25 ans avec la mine dépitée se confesse sous le couvert de l’anonymat. « J’ai impérativement besoin d’argent. Car je dois payer mon logement. Sinon je risque d’être mis dehors car j’ai déjà accumulé des arriérés. Si aujourd’hui je ne gagne pas, je risque de vivre une grande humiliation », explique-t-il, dépité. Cet adepte du pari en ligne espère juste que la chance sera de son côté pour sortir de cette impasse. « Ces temps-ci je ne suis pas chanceux, et j’ai perdu beaucoup d’argent. J’ai épuisé toutes mes économies à cause de ces paris. Et je suis condamné à gagner aujourd’hui pour régler mes problèmes », conclut-il d’un regard rempli d’espoir, après la consultation de ses dernières mises.
Les belles feuilles de notre littérature par Amadou Elimane Kane
BATTEZ, BATTEZ LE TAM-TAM DE LUMIÈRE, LE TAM-TAM DE NOTRE HISTOIRE
EXCLUSIF SENEPLUS - À travers l’histoire de la tradition ancestrale et celle des langues africaines, Doudou Ndiaye Rose Junior, héritier du Sabar paternel, partage ses connaissances dans un domaine qu’il maîtrise de tout son corps, de son esprit
Notre patrimoine littéraire est un espace dense de créativité et de beauté. La littérature est un art qui trouve sa place dans une époque, un contexte historique, un espace culturel, tout en révélant des vérités cachées de la réalité. La littérature est une alchimie entre esthétique et idées. C’est par la littérature que nous construisons notre récit qui s’inscrit dans la mémoire. Ainsi, la littérature africaine existe par sa singularité, son histoire et sa narration particulière. Les belles feuilles de notre littérature ont pour vocation de nous donner rendez-vous avec les créateurs du verbe et de leurs œuvres qui entrent en fusion avec nos talents et nos intelligences.
Doudou Ndiaye Rose Junior fixe ici la transmission « je ne peux me permettre d’écrire cet ouvrage sans parler de mon père, celui sans qui je n’aurai aucune clé pour transmettre sur le Sabar. Cet homme, mon père, Doudou Ndiaye Coumba Rose, grand tambour major ».
En interprète savant, Doudou Ndiaye Rose Junior fait du Sabar un art majeur qu’il veut transmettre par son savoir, son savoir-faire et une pratique incroyable et multidimensionnelle.
Le sabar, l’art du tambour et de la danse au Sénégal, possède une histoire millénaire qui s’inscrit de manière belle dans notre patrimoine historique et culturel.
Cette pratique traditionnelle ancestrale est synonyme de symboles puissants du récit africain. C’est ce que nous fait redécouvrir Doudou Ndiaye Rose Junior dans son ouvrage intitulé De la vocalisation des tambours aux expressions dansées - L’essence du Sabar révélée dans tous ses états.
À travers l’histoire des groupes sociaux, de la tradition ancestrale et celle des langues africaines, Doudou Ndiaye Rose Junior, héritier du Sabar paternel, partage sa passion et ses connaissances dans un domaine qu’il maîtrise de tout son corps, de tout son cœur et de son esprit. Profondément artiste et enraciné dans le cercle ancestral de la transmission de cet héritage unique légué par une généalogie impressionnante, Doudou Ndiaye Rose Junior propose de rétablir la genèse du Sabar, véritable discipline artistique et culturelle, issue du rythme traditionnel africain et portant des valeurs et des symboles qui sont bien loin de l’imagerie du simple divertissement exotique souvent décrit par la société occidentale.
En effet, la pratique du Sabar appartient à des rites ancestraux qui avaient fonction d’éducation sociale et de transmission culturelle et patrimoniale. C’était également un rite fort de communication et d’échanges.
À travers le langage, le rythme, l’oralité, le corps et la danse, le Sabar est une expression artistique qui communique des symboles de l’histoire africaine. Quand on en saisit la complexité, on est émerveillé de cette combinaison transdisciplinaire qui va au-delà de la simple représentation. Le Sabar est histoire, le Sabar est rythme, le Sabar est langage, le Sabar est poésie, le Sabar est oralité, le Sabar est savoir, le Sabar est science. Et c’est cette alliance plurielle qui en fait sa beauté.
En effet, le Sabar s’inscrit dans un mouvement culturel de la société sénégalaise lors de nombreuses fêtes et cérémonies. Mais Doudou Ndiaye Rose Junior, en interprète savant, en fait un art majeur qu’il veut transmettre par son savoir, son savoir-faire et une pratique incroyable et multidimensionnelle.
Ainsi, il interroge les fonctions profondes du Sabar en nous plongeant dans son histoire qui s’attache à réveiller notre patrimoine social, culturel et artistique africain.
Ce livre est un trésor documentaire en la matière et je ne peux que saluer ce travail prodigieux qui, à travers notamment la richesse de nos langues nationales, décline toute l’expression combinatoire de cet art exceptionnel.
Le Sabar, cette danse traditionnelle alliée au tambour, instrument parlant et communiquant, est un tam-tam de lumière dans notre cosmogonie africaine. Il est pour moi incarnation, signification et poésie car il transmet notre tissu mémoriel de manière intemporelle et universelle.
Doudou Ndiaye Rose Junior souligne que « jouer du tambour, c’est forger » et cette image métaphorique me parle infiniment. Il dit encore que, dans l’art du sabar, « le cerveau et le corps ne font qu’un » et je partage amplement cette idée. Il dit aussi que pour parvenir à l’exercice absolu de son art, « il faut devenir son instrument », magnifique parole qui me transporte dans des ciels de rêve, dans des ciels de créativité.
Ce sont aussi pour lui « les mots du tambour et l’esprit de la danse » qui l’habitent en permanence, cette histoire se conjugue à mon verbe épris de liberté et de poésie.
Cet ouvrage est un livre indispensable pour reformer notre récit culturel patrimonial et je suis captivé par cette œuvre minutieuse, précise et transversale dans la compréhension de notre univers cosmogonique, et qui tient compte des va-et-vient culturels et spatio-temporels.
En fin de volume, Doudou Ndiaye Rose Junior indique plusieurs techniques de la danse du Sabar et ce lexique artistique et technique est celui d’un créateur expert qui partage sa connaissance profonde et son savoir-faire. Cette démarche, à la fois artistique et pédagogique, est selon moi inédite dans ce domaine.
En lisant ces lignes appartenant à notre héritage culturel ancestral, je suis ému de voir combien le grand artiste qu’est Doudou Ndiaye Rose Junior, qui brille telle une étoile transnationale, contribue à inscrire notre récit renouvelé, magnifié et participant ainsi à notre renaissance culturelle.
Amadou Elimane Kane est enseignant et poète, écrivain
De la vocalisation des tambours aux expressions dansées… L’essence du Sabar dans tous ses états, Doudou Ndiaye Rose Junior, essai, Lys Bleu éditions, 2024, ISBN : 979-10-422-3611-3
Huit mois après l'installation du nouveau régime, l'heure n'est pas encore au bilan selon Abdoul Aziz Tall. L'ancien ministre appelle plutôt à une prise de conscience collective sur l'importance du civisme dans la réussite des politiques publiques
L'ancien ministre en charge du Suivi du Plan Sénégal émergent (PSE) Abdoul Aziz Tall partage sa réflexion sur les premiers pas du nouveau régime. Dans cet entretien, il appelle à un changement de comportements, condition incontournable pour assurer les ruptures attendues du nouveau régime. M. Tall, également ancien délégué général à la Réforme de l'État, suggère quelques pistes à emprunter pour réussir « l'agenda national de transformation 'Sénégal 2050' ».
Dans une récente contribution parue dans la presse, vous avez écrit ceci : « Un régime qui vient à peine de s'installer doit prendre ses marques et fixer ses repères ». Est-ce que cela s'applique au nouveau régime en place depuis huit mois ?
Il me semble tout à fait prématuré de répondre de façon péremptoire. À la suite de l'élection présidentielle, la récente majorité acquise au niveau de l'Assemblée nationale constitue une étape à la fois critique et majeure dans la mise en place des balises institutionnelles. Permettez-moi d'utiliser une telle expression. Au-delà, il faut toujours considérer les aspects critiques dans la construction et l'évolution fonctionnelle d'une équipe. Il s'y ajoute que l'État du Sénégal s'est toujours reposé sur des ressorts extrêmement solides, au regard de son histoire et des acteurs qui ont construit la nation et l'État. Donc, les marques et repères que vous évoquez ne peuvent être déconnectés brutalement de l'exercice républicain qui a toujours existé, quelles que soient les ruptures annoncées. Autrement dit, il y a des principes incontournables et immuables qu'aucun État ne saurait ignorer parce que ces balises constituent le socle même de l'État et de la Nation. Il y a lieu, à présent, d'aller vers la « transformation de l'essai » pour emprunter un langage propre au rugby, c'est-à-dire passer de l'énorme espérance nourrie par un leadership charismatique et une légitimité incontestable à une adhésion fondée sur des réalisations au plan économique et social découlant de la mise en œuvre du projet « Sénégal 2050 ».
Comment jugez-vous le bilan d'action du nouveau régime après huit mois de gouvernance ?
Parler de bilan au sens managérial du terme me paraît tout aussi prématuré. En huit mois de gouvernance, il est difficile de se prononcer sur un bilan. Précisément, une période de huit mois reste dérisoire sur un mandat de cinq ans. En revanche, comme dans tout système qui fonctionne, il est impérieux d'assurer un suivi permanent qui permet de déceler très tôt les dysfonctionnements éventuels et de leur apporter les mesures correctives. Ce suivi est aussi l'occasion d'identifier les acquis positifs et de les renforcer. C'est le sens que les Anglo-saxons donnent au concept de « control » qui signifie une maîtrise de la situation au fur et à mesure que l'activité se déroule. À ne pas confondre avec une vérification qui s'effectue sur une période plus longue et qui peut donner lieu à des résultats dont les interprétations peuvent être à la fois plus larges et plus détaillées. C'est, du reste, cette dernière conception qui se prêterait le mieux à la notion de bilan. La mise en place récente d'une structure chargée du monitoring et de l'exécution des politiques publiques pourrait bien faciliter l'atteinte des objectifs et résultats attendus.
Le Premier ministre a annoncé, lors du dernier Conseil des ministres, qu'il va faire sa Déclaration de politique générale (DPG) dans le 27 Décembre. Qu'est-ce que vous attendez de ce rituel ?
La Déclaration de politique générale est un événement inscrit dans le calendrier républicain à chaque fois que la Primature a un nouveau locataire. Je dois avouer, pour avoir participé, par le passé, à la préparation de ce type de discours, qu'il s'agit plutôt d'annoncer au peuple, via le Parlement, une compilation des actions prioritaires de l'exécutif, qui s'inspire d'un programme. Ici, c'est l'agenda national de transformation « Sénégal 2050 ». C'est encore le lieu de rappeler la grande importance qu'il faut accorder au monitoring et à la mise en œuvre diligente des politiques publiques déclinées dans la DPG. Au-delà, c'est un événement rituel où chaque acteur (majorité et opposition) joue sa partition. Il est également question de préciser l'application du programme présidentiel en évoquant, autant que faire se peut, les détails, le calendrier et le financement des mesures envisagées.
Vous avez été ministre en charge du suivi du Plan Sénégal émergent (PSE). Y a-t-il des similitudes entre le PSE et la « Vision Sénégal 2050 » ?
Partons du principe que l'État évolue toujours dans une logique de continuité. Par conséquent, il est tout à fait normal de retrouver des points de convergence. Certes, les deux plans ne sont pas des frères siamois, mais leur principal objectif reste et demeure le développement économique et social du Sénégal. Le nouveau régime va forcément s'adosser sur les compétences en ressources humaines qui existent pour mener sa mission à bon port. Et c'est cela la cohérence institutionnelle qu'il faut observer, la vocation de l'agent de l'État étant de contribuer à la mise en œuvre diligente des politiques définies par le chef de l'État au-delà de toutes autres considérations.
Dans la même tribune, vous avez appelé à « un changement impératif de comportement des citoyens » si l'on veut atteindre la rupture tant chantée par les nouvelles autorités. Est-ce à dire que le civisme et la citoyenneté seront la clé de réussite du régime en place ?
Il est essentiel de rappeler et de souligner fortement que les questions stratégiques liées au civisme et à la citoyenneté doivent précéder toute culture et action de bonne gouvernance. De façon permanente, l'État, la société et, par extension, l'école et les médias, ainsi que la famille doivent constituer ce que j'appelle le triangle des valeurs républicaines en termes de promotion, d'éducation, de sensibilisation et de culture. Autrement, toute action, aussi performante soit-elle, est vouée à l'échec. Il ne faut pas se faire d'illusions : les conditions de réussite du nouveau régime sont intrinsèquement liées à un changement majeur des comportements de nos concitoyens. Quelle que soit la légitimité du désir de rupture, le citoyen doit être convaincu qu'il reste et demeure lui aussi au centre du processus transformationnel. À ce propos, le débat public relatif à la gouvernance doit d'abord questionner les contre-valeurs d'une société dont les dysfonctionnements découlent de ses propres comportements.
De cette introspection, il apparaît nettement que l'incivisme et l'incivilité de la plupart de nos compatriotes, qui dépassent tout entendement, devraient être au cœur des préoccupations. Le non-respect des valeurs et règles les plus élémentaires en termes de comportements civiques est plus que factuel. Ceci, à travers l'anarchie qui règne presque partout, notamment en milieu urbain. Les exemples sont légion. L'un des aspects les plus visibles de ces écarts de comportements porte sur l'utilisation des cyclomoteurs dans nos villes qui offrent un spectacle à la fois indigne et affligeant de conducteurs qui violent allègrement les exigences du Code de la route. Le défaut de port du casque est devenu une flagrante banalité. Pis encore, nombreuses sont les agressions des citoyens par des délinquants souvent primaires et qui se font constamment avec l'usage des cyclomoteurs. À côté de « ces engins de la mort », la valse des charrettes sur des artères à grande circulation fait désormais partie du mobilier urbain. Malheureusement, ce ne sont là que des échantillons d'actes d'indiscipline et de comportements à bannir pour accompagner les nouvelles autorités dans cette dynamique de rupture. À défaut, elles seront obligées, via les pouvoirs de délégataires du peuple, de passer plus de temps à corriger nos imperfections collectives en lieu et place d'une concentration sur l'essentiel de leurs missions régaliennes.
Selon vous, comment le nouveau régime peut-il mettre fin à ces dérives ?
En amont, il est essentiel de décliner un leadership par l'exemple. C'est le gage d'un effet d'entrainement et de contagion au niveau de la communauté. Il faudrait également esquisser une stratégie de sensibilisation, de communication et de mobilisation sociale. Qu'il s'agisse des radios, des télévisions ou des journaux et réseaux sociaux, les troupes de théâtre, les messages de rappel citoyen doivent être permanents à travers différents supports de communication. Relativement aux médias audiovisuels, il est grand temps, comme l'affirmait Salvador Dali, que nos télévisions cessent d'être « des instruments de crétinisation de notre société ».
Le cahier des charges des organes de presse qui bénéficient de l'appui de l'État devrait comporter une clause de participation à l'effort de restauration des valeurs civiques et républicaines. Par ailleurs, les programmes d'instruction civique dans les établissements scolaires devraient être systématisés et valorisés.
Manifestement, pour vous, le contenu des programmes de certaines télévisions, entre autres, ont un impact négatif par rapport à l'avènement d'un nouveau type de Sénégalais ?
Tout le monde peut le constater, nous sommes envahis, à longueur de semaine, par des séries télévisées et sketchs qui sont loin d'orienter les citoyens sénégalais vers les bonnes pratiques comportementales au sein de la société. Bien au contraire, elles regorgent d'inepties déconcertantes et où l'obscénité le dispute à la vulgarité, l'irrespect, l'indécence, la violence physique et verbale. Quand on regarde certains des programmes de nos télévisions, l'on ne peut s'empêcher de donner raison à ce psychologue qui affirmait que, dans ces images impudiques, tout ce qui concourait à l'intimité de la vie conjugale se trouve ravalé au rang de pratique banale aujourd'hui. Ainsi, nous constatons la perte progressive de nos valeurs de « Jom », « Kersa » et « Sutureu ».
Vous avez suggéré la création d'une institution chargée de la promotion du civisme. Quel doit être sa mission ?
Ce travail de sensibilisation pourrait être confié à une structure de promotion du civisme, qui serait logée à un niveau stratégique pour lui conférer le poids institutionnel nécessaire à l'accomplissement de sa mission. Mieux, il serait indiqué d'ériger un ministère en charge de la promotion de la citoyenneté. Dans ce cadre, le non-respect des règles et principes qui guident le comportement citoyen doit faire l'objet de sanctions sans discrimination de la part des services publics habilités.
Il y a manifestement une forte corrélation entre l'état de développement d'une Nation et le niveau d'élévation de l'esprit civique de ses citoyens !
Les pays asiatiques nous en ont administré la preuve. Nous ne pouvons pas déléguer à un pouvoir l'autorité de nous diriger pour nous comporter ensuite d'une façon qui ne peut qu'entraver l'exercice de sa mission. Les médias qui sont à la fois des relais et leaders d'opinion doivent accompagner le régime à l'avènement d'un comportement citoyen à l'opposé de ceux qui défient ouvertement les règles de civisme et violent les droits et l'intimité de leurs concitoyens.
L'ÉTAT EXCLUT TOUTE RESTRUCTURATION DE SA DETTE
Le message du gouvernement aux marchés financiers est sans ambiguïté. Il privilégie une approche stratégique de gestion de la dette, visant à optimiser les échéances tout en honorant ses engagements
(SenePlus) - Le gouvernement tient à rassurer les marchés : il "n'a aucune intention de renégocier ou de restructurer sa dette", comme le souligne fermement le ministère des Finances dans un communiqué rapporté par Bloomberg. Cette déclaration intervient alors même qu'un audit récent des finances publiques révèle une situation plus préoccupante qu'initialement annoncée.
Le ministère affirme vouloir plutôt "mettre en œuvre une approche proactive et stratégique de gestion de la dette publique visant à optimiser son profil de remboursement tout en honorant strictement ses engagements envers les investisseurs". Cette stratégie vise notamment à obtenir "un profil de remboursement plus approprié favorisant un rééchelonnement avec des échéances prolongées", selon les projets de documents budgétaires.
Cette position ferme sur le respect des engagements financiers intervient dans un contexte délicat : l'audit a mis en lumière que la dette publique dépasse 80% du PIB fin 2023, bien au-delà des 73% précédemment annoncés sous la présidence de Macky Sall. Plus inquiétant, le déficit budgétaire atteint plus de 10% du PIB, près du double des 5,5% initialement déclarés, ce qui a conduit le FMI à geler une enveloppe de prêts de 1,8 milliard de dollars.
Pour faire face à cette situation sans compromettre ses engagements, le Sénégal déploie une stratégie à plusieurs volets. Le pays prévoit notamment d'émettre des obligations de la diaspora pour 1,5 billion de francs CFA, visant à réduire sa dépendance aux financements externes. Il doit également gérer 3,2 milliards de dollars d'obligations en euros et en dollars arrivant à échéance dans les dix prochaines années.
Le gouvernement mise également sur des réformes structurelles, incluant une révision du code minier prévue pour mai et un renforcement du contenu local dans le secteur pétro-gazier. Ces mesures s'inscrivent dans le cadre d'un budget 2025 de 6,4 billions de francs CFA (10,2 milliards de dollars), avec un objectif de déficit ramené à 7%.
Les perspectives économiques demeurent positives malgré ces défis financiers. Le pays anticipe une croissance de 8,8% en 2025, portée par le démarrage de la production pétrolière et la future exploitation du champ gazier Grand Tortue Ahmeyim, un projet de 4,8 milliards de dollars opéré par BP. L'inflation devrait rester contenue à 1,9% l'année prochaine, selon le projet de budget.
La cour des comptes, qui examine actuellement ces révisions, devrait rendre ses conclusions prochainement. Le ministère des Finances prévoit déjà "une révision à la hausse de l'encours de la dette et du service de la dette" pour 2024-2025, avec un déficit budgétaire qui devrait dépasser 11% en 2024, tout en maintenant sa position ferme contre toute restructuration de la dette.
DAKAR SUFFOQUE SOUS LE NUAGE SAHARIEN
Les mesures de la qualité de l'air atteignent des sommets inquiétants, propulsant la capitale sénégalaise devant New Delhi au classement des villes les plus polluées
(SenePlus) - Selon les informations rapportées par Bloomberg, la capitale sénégalaise a grimpé au sommet du classement mondial des villes les plus polluées, dépassant même des mégapoles comme New Delhi et Dhaka. L'indice établi par la plateforme suisse IQAir a enregistré mercredi un score préoccupant de 392 pour Dakar, bien au-delà du seuil acceptable fixé à 101.
Cette situation critique s'explique par un phénomène naturel saisonnier : l'Harmattan, un vent sec chargé de poussières sahariennes qui souffle sur l'Afrique de l'Ouest de fin novembre à mars. Comme le précise Abdoulaye Diouf, ingénieur prévisionniste à l'Agence nationale de l'aviation civile, "un épisode de poussière" particulièrement intense affecte actuellement le nord du Sénégal et devrait s'étendre à l'ensemble du pays avant de se stabiliser ce weekend.
Les données sont alarmantes : "La concentration de particules dans l'air extérieur dépasse 1000 microgrammes par mètre cube", indique Diouf, soit le double de la moyenne habituelle et plus de 22 fois la recommandation de l'Organisation Mondiale de la Santé fixée à 45 microgrammes. La visibilité à Dakar devrait chuter à "500 mètres ou moins" selon les prévisions.
Les conséquences sanitaires inquiètent particulièrement les professionnels de santé. Le Dr Oumar Ba, du service de pneumologie de l'Hôpital Général de Yoff à Dakar, souligne que c'est "une réelle préoccupation, particulièrement pour les maladies respiratoires comme l'asthme et la bronchite, et chez les enfants qui sont souvent plus fragiles". Il estime qu'environ 10% de la population souffre de problèmes pulmonaires, une proportion probablement plus élevée dans la capitale.
L'impact économique est également significatif, notamment pour la communauté des pêcheurs. Omar Drame, secrétaire général d'un syndicat de pêcheurs de Dakar, explique les risques accrus : "Le risque d'échouage ou de collision avec d'autres bateaux augmente, sans parler de l'impact sur la santé des pêcheurs". À Soumbedioune, seuls quelques marins équipés de GPS osent encore prendre la mer, comme le confirme Issa Fall, coordinateur de l'association locale de pêche.
La vie quotidienne des Dakarois s'en trouve bouleversée. Mamadou Diop, octuple champion sénégalais de triathlon, a dû adapter ses activités : "Pousser son corps en extérieur dans ces conditions n'est vraiment pas une option". Les autorités sanitaires recommandent d'éviter les activités sportives en plein air et conseillent aux personnes vulnérables de rester à l'intérieur et de porter des masques.
Ce phénomène météorologique, qui peut persister plusieurs jours voire plusieurs semaines selon les conditions atmosphériques, continue d'affecter sévèrement la qualité de vie des habitants de la capitale sénégalaise, soulevant des inquiétudes croissantes quant à la détérioration de la qualité de l'air dans la région.
COMME UNE ALLIANCE DE PARIAS
Jean-Baptiste Placca tance des putschistes qui "assimilent leur orgueil à l'honneur de leur patrie", évoquant la rupture entre l'AES et la CEDEAO. "L'interdépendance est telle que les considérations d'amour-propre ne devraient pas y prévaloir"
(SenePlus) - Dans son éditorial de ce samedi 21 décembre 2024 sur RFI, Jean-Baptiste Placca analyse sans concession la sortie du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). L'éditorialiste y voit une décision aux conséquences dramatiques pour les populations, portée par des régimes militaires qui confondent "leur orgueil personnel avec l'honneur de leur patrie".
Cette rupture intervient alors même que la CEDEAO tente de maintenir ces trois pays dans l'organisation régionale. Le chef de la junte nigérienne a d'ailleurs rejeté cette semaine toute tentative de médiation, confirmant le caractère "irréversible" de leur départ. Une position que Jean-Baptiste Placca qualifie de "manœuvre grotesque", particulièrement dans leur décision d'accorder des exemptions de visa aux ressortissants des pays de la CEDEAO.
"Pourquoi n'appliquent-ils donc pas ces exemptions à toute l'Afrique ?", s'interroge l'éditorialiste, qui y voit une tentative de "quémander, par la force, une réciprocité" et d'anticiper "la réprobation de leurs concitoyens, qui ne manqueront pas de leur reprocher cette rupture, lorsqu'elle commencera à leur compliquer singulièrement l'existence".
L'analyse est d'autant plus sévère que le bilan des régimes militaires reste peu reluisant. "Plus de quatre ans après le renversement d'Ibrahim Boubacar Kéita, près de trois ans après le renversement de Roch Marc Christian Kaboré, et bientôt un an et demi après le coup d'État qui a renversé Mohamed Bazoum, ni les Maliens ni les Burkinabè et encore moins les Nigériens ne vous diront qu'ils sont un peuple heureux, en sécurité, à l'abri des privations et de la vie chère", souligne Jean-Baptiste Placca.
L'éditorialiste pointe également le manque de vision politique claire de ces régimes, dont les discours ne sont que "des tâtonnements truffés d'extraits picorés chez Rawlings, Sankara, ou même Sékou Touré". Une différence notable avec les putschistes historiques comme Rawlings au Ghana ou Sankara au Burkina Faso, qui "avaient une idée claire de ce qu'ils pensaient, et ce dont ils rêvaient pour leur peuple".
Si la CEDEAO n'est pas exempte de critiques - l'organisation s'étant "beaucoup discréditée aux yeux des populations" ces dernières années selon l'éditorialiste - la décision de ces trois pays apparaît comme "une diversion" particulièrement préjudiciable. "L'interdépendance est telle que les considérations d'amour-propre ne devraient pas y prévaloir", conclut Jean-Baptiste Placca, rappelant qu'"on ne quitte pas une organisation parce qu'elle vous applique les textes qui la fondent".
Par Fadel DIA
MAYOTTE-EN-FRANCE !
Le cyclone Chido révèle aux Français l'existence d'un département méconnu dont même la population reste un mystère. 'À Mayotte, confie une députée, on sous-estime autant les vivants que les morts
Il y a près de cinquante ans la France opérait ce qui n’était rien moins qu’un holdup territorial, en détachant l’ile de Mayotte des autres composantes de ce qui constituait les Comores, pour en faire une dépendance ultra marine. Si cet évènement nous interpelle encore, c’est qu’il suit d’autres rapts qui ont eu des fortunes diverses.
L e premier nous concerne de près, puisque c’est la tentative de détacher la presqu’ile du Cap Vert du reste du Sénégal en faisant miroiter à la collectivité léboue un projet de protectorat indigène sous l’ombrelle française, alors que le motif principal de l’ancienne métropole était de conserver à son usage, la base militaire stratégique et le port de Dakar qui était alors le premier de la sous-région. Pour son malheur, elle avait affaire à un nationaliste intransigeant, Mamadou Dia, qui a paré au coup en transférant la capitale du Sénégal de Saint-Louis à Dakar, au risque de mécontenter les populations de la vieille ville. Le deuxième coup a mieux réussi et nous ne nous en sommes pas encore relevés puisqu’il est à l’origine de la balkanisation des anciennes fédérations d’AOF et d’AEF. Le succès fut mitigé puisque si le projet a empêché la création d’une grande fédération du Mali avec 4 ou 5 membres, il a permis à la Guinée d’accéder à l’indépendance dès 1958 et qu’au bout de quelques années, la communauté franco-africaine a volé aux éclats.
Le rapt de Mayotte n’a évidemment aucun fondement historique, l’ile n’était pas seulement une partie intégrante d’un seul archipel, mais c’est autour d’elle que s’était créée une colonie française dont elle abritait la capitale et en l’en soustrayant, c’est comme si on coupait la tête des Comores. S’il y a une Grande Comore c’est parce qu’il y en avait de petites, dont Mayotte, qui constituaient un archipel peuplé par les mêmes populations venues des côtes d’Afrique orientale ou de Madagascar qui avaient les mêmes cultures et partageaient la même foi. La France est régulièrement condamnée aux Nations Unies pour y avoir cautionné un référendum sécessionniste et comme l’histoire se répète quelquefois, c’est elle aujourd’hui, et l’Union Européenne en général, qui vouent la Russie aux gémonies pour avoir usé du même procédé en Crimée et dans l’est de l’Ukraine.
Les Mahorais qui avaient cédé aux sirènes françaises rêvaient de voir leur territoire transformé en ile des Maldives du Canal de Mozambique, grâce à ses 1100km2 de lagons, ses 195 km de barrière récifale, ses 170 plages de sable, ses 200 km de sentiers, sans compter son incomparable richesse d’espèces végétales. Cinquante ans plus tard Mayotte a le visage d’une Haïti du nord de l’Océan Indien, y compris en insécurité. Le taux de pauvreté est de 86%, le niveau de vie y est sept fois plus faible que la moyenne française et son seul titre de gloire est de posséder « le plus grand bidonville d’Europe ! » Sa superficie n’est pourtant que la moitié de celle de la commune d’Arles, en France, mais il y a encore, faute de routes praticables, des villages inaccessibles aux secouristes et dont les habitants n’ont encore reçu aucune aide alimentaire, cinq jours après une catastrophe qui est la plus grave que l’ile ait connue depuis un siècle.
Le cyclone Chido a au moins le mérite d’avoir fait découvrir aux Français un petit territoire érigé en département français il y a treize ans mais dont personne ne connait le chiffre exact de la population : 320.000 ? 520.000 ? Personne ne sait car à Mayotte, dit une de ses députées, « on a toujours sous-estimé aussi bien les vivants que les morts ! ». Gaza peut faire chaque jour le bilan des personnes tuées par les bombardements israéliens tandis qu’à Mayotte, cinq jours après le passage de Chido, on en est encore à de vagues estimations, jamais réactualisées, du nombre des victimes : une trentaine selon les chiffres officiels, alors que selon certains habitants des centaines de corps restent ensevelis sous les décombres et dégagent une odeur de putréfaction.
La vérité c’est que près de cinquante ans après son annexion, un malentendu demeure sur les relations de l’ile avec la France, le statut de ses habitants, la nature et la dimension de ses besoins. Pour le Premier Ministre, François Bayrou, Mayotte se trouve « hors du territoire national ». Pour le président Macron, qui lors d’un précédent voyage avait ironisé lourdement sur les kwasa- kwasa, les bateaux de pêche locaux qui « ne ramènent pas du poisson mais du Comorien ! », les Mahorais ne sont que des gens qui ont la chance de vivre en France. C’est le sens de ses paroles tenues par un homme qui aime les bains de foules mais qui contrairement au Roi d’Espagne ne sait pas tenir ses nerfs et qui était en plein délire face à des Mahorais qui criaient leur détresse : « Vous êtes contents d’être en France… Si ce n’était pas la France, vous seriez 10.000 fois plus dans la merde ! » Un président de la République devrait-il s’exprimer ainsi face à tant de détresse. Puisque la Corse et Mayotte ont été acquises par la France par le même procédé, Macron oserait-il tenir un tel discours devant des manifestants Corses ?
Pourtant les Mahorais ne réclament ni autoroutes ni piscines, ce qu’ils demandent c’est de l’eau, un repas, un abri pour se protéger. Quand le président de la République croit pouvoir tout régler en 4 heures de visite, quand il se vante d’avoir débarqué avec 4 tonnes d’aliments et de médicaments, quand la ministre de la Santé promet de pré positionner 10.000 doses de vaccins contre le choléra, quand le Premier Ministre annonce qu’il va tout reconstruire en deux ans, on peut se poser la question de savoir si en France on a une idée de l’ampleur des besoins des Mahorais qui sont plus de 300.000 sur un territoire de moins de 400 km2, pour lesquels trouver de l’eau à boire est depuis des années, un combat de tous les jours, dont les habitations sont détruites à 80% et dont le pays n’est pas à reconstruire mais à construire ! « Je ne peux plus regarder mon ile » a crié un Mahorais impuissant face au désastre. Espérons que les autorités françaises regarderont enfin Mayotte les yeux dans les yeux !
Pour terminer par une note optimiste, saluons le formidable élan de solidarité envers les sinistrés qui se propage en France, porté par des Français qui ne sont pas seulement d’origine mahoraise, par des communes ou des institutions. C’est une chose que nous ne savons pas faire et dans des cas similaires nous nous contentons souvent, dans le meilleur des cas, de dire « ndeysaan » et de nous en tenir là. Il y a quelques semaines la Gambie, la Falémé, le Sénégal ont débordé de leurs lits comme jamais ils ne l’ont fait depuis 1958, détruisant des centaines d’habitations, inondant des champs et jetant dans le désarroi des dizaines de milliers de personnes et pourtant, à quelques rares exceptions près, nous n’avons rien fait qui soit à la hauteur de cette catastrophe. Pas même une journée de deuil national !
par l'éditorialiste de seneplus, Benoit Ngom
DIOMAYE, DIOUF ET LE SOFT POWER DU SÉNÉGAL
EXCLUSIF SENEPLUS - Les similitudes entre les deux présidents éclairent d'un jour nouveau la diplomatie sénégalaise. Leur rencontre de juin dernier signe la fin d'une tradition où chaque nouveau régime prétendait réinventer le pays
La visite que le président Diomaye Faye a rendu à Paris, au mois de juin dernier, à l'ancien président Abdou Diouf mérite d'être saluée comme une marque de respect, de considération, mais aussi comme l’expression de la reconnaissance d'une sorte de "droit d'ainesse " ancrée dans nos traditions, et enfin et surtout une affirmation solennelle du principe républicain de la continuité de l'Etat.
Ce faisant, le président Faye a voulu rompre avec cette désastreuse "tradition" qui voulait que chaque nouveau régime se soit senti presque dans l'obligation d'agir comme si l'histoire du pays commençait avec lui.
Cette pratique dommageable et contre-productive a fait de beaucoup de nos compatriotes des citoyens dépourvus de tout souvenir. Or, une société composée de citoyens qui ont oublié leurs traditions et qu’une mauvaise pratique politique empêche de pouvoir se référer à leur mémoire historique immédiate n'a aucune chance de fonder des valeurs de civilisation sur les quelles ancrer son destin. En vérité, croire que l'arrivée d'une nouvelle personne a la magistrature suprême du Sénégal peut à elle seule, quelle que soit sa valeur, expliquer le prestige international de notre pays, c’est refuser de voir la vérité en face. C’est aussi empêcher à la jeune génération de comprendre que les grandes civilisations que nous admirons aujourd'hui ont été construites pierre après pierre.
Le prestige et l'influence du Sénégal, la réalité de son Soft Power, nous le devons à la clairvoyance de nos dirigeants qui ont su inspirer à des diplomates chevronnés des actions fondées sur nos valeurs fondamentales de civilisation. Le prestige du Sénégal au niveau mondial, nous le devons aussi à la sagesse de sa Nation, à la lucidité de sa classe politique, à la conscience élevée de ses citoyens qui, en l'espace d'une génération, ont pu montrer leur maturité en réalisant trois alternances de régimes, avec panache, dans un continent où l’instabilité politique est la règle. Le prestige du Sénégal, nous le devons enfin à la perception qu’a son peuple de l'enseignement et de la pratique des différents guides historiques et actuels des communautés religieuses du pays.
Pour toutes ces raisons, nous devons accepter, avec lucidité, que chacune des différentes personnalités qui ont présidé aux destinées du Sénégal, en fonction des réalités économiques et politiques du moment, a essayé de maintenir le pays sur les rails de la stabilité sans laquelle aucun espoir de développement n'est possible. Ainsi de Senghor à Abdou Diouf en passant par Abdoulaye Wade et Macky Sall, la volonté de garder le Sénégal debout et fier parmi les nations a été le massif d'ancrage de leurs politiques respectives. C’est pourquoi, au nom d'un sursaut intellectuel et patriotique, essayons de reconnaître à chacun d'entre eux sa contribution au développement culturel, politique et humain de notre nation.
L'amnésie sélective, le snobisme de la contestation tous azimuts, sont un danger pour tout peuple qui aspire à jouer dans la cour des grands. A ce sujet, l'ouvrage collectif que des juristes sénégalais et étrangers ont rédigé, en hommage à Abdou Diouf, que vient de publier les "éditions Librairie juridique africaine *" nous a inspiré quelques remarques et réflexions sur les similarités entre les présidents Diomaye Faye et Abdou Diouf en termes de parcours, visions, postures et convictions, qui témoignent de leur engagement pour un leadership politique et diplomatique du Sénégal au niveau africain et international.
A cet égard, il convient de noter que les deux présidents ont appartenu à la haute administration, et que si le président Faye, à l’âge de 44 ans, est incontestablement le plus jeune président élu du Sénégal, le président Diouf, au moment où il succède à Senghor, qui volontairement avait écourté son mandat électif, avait 45 ans. L'acte le plus significatif du président Faye dès son élection a été de se démettre de toute responsabilité dans son parti Pastef qui venait de le porter avec brio à la tête du Sénégal. Rappelons, que malgré le contexte tumultueux de l'époque, Abdou Diouf avait jugé en 1996 que si le Sénégal voulait être un Etat démocratique moderne et jouer dans la cour des grands, le président de la République ne devait plus être un chef de parti. En ce sens, c’est tout heureux que le président Faye, après une longue parenthèse, ait repris à son compte cette marque de fabrique des grandes démocraties.
La volonté de consacrer l'Etat de droit, afin que la justice sauvegarde les droits et libertés du citoyen a été immédiatement affirmé par le nouveau gouvernement de Faye et Sonko en organisant comme sa première manifestation d’envergure, les "Assises de la Justice "et en proclamant la redevabilité et la lutte contre l'impunité comme les deux faces de la médaille du nouveau régime. Sur ce point, si le président Diouf n’a pas réussi à atteindre ses objectifs avec la CREI, il a tenu à ce que le Sénégal fut le premier pays à ratifié le statut de Rome qui fonda la Cour Pénale Internationale.
Les deux hommes se rejoignent aussi dans leur ferme volonté d'être mus par de seules considérations patriotiques, dès lors qu'il s'agit de porter au niveau de l'arène internationales les fils du Sénégal les plus méritants qui sollicitent leur soutien. C'est comme cela que j'ai compris toute la solennité avec laquelle Mme Yacine Fall, ministre de l’intégration africaine et des Affaires Étrangères a entouré le soutien de l'ancien ministre, Amadou Hott, candidat à la présidence de la BAD, en invitant à joindre l’équipe de campagne des personnalités qui ont fait leurs preuves dans les anciens régimes.
Cette démarche peut être l'expression d'une volonté de redynamiser une diplomatie sénégalaise au long cours, dont le rappel de ses hauts faits nous paraît utile dans cette période, où notre continent cherche les moyens de parler d'une voix forte pour être entendu là où le sort du monde se décide, au Conseil de Sécurité de l'ONU. En ce sens, il convient de rappeler à la jeune génération les prouesses de la diplomatie sénégalaise dans le temps.
En 1974, Amadou Mactar Mbow fut le premier africain élu à la tête de l'Unesco. Que l'ouverture de Cour Internationale de Justice aux Juristes Africains se fera avec l'élection du magistrat sénégalais Isaac Forster en 1964. Ce qui ne sera qu'une étape dans les manifestations des capacités des diplomates du Sénégal qui réussiront à faire élire une deuxième fois un Sénégalais en la personne du juge Kéba Mbaye en 1981 à cette même Cour. Ce qui pour un pays de la taille du Sénégal était incontestablement une prouesse.
Le Sénégal, pays en majorité musulmane, qui a donné de grands érudits à la Ummah Islamique devait être selon ses dirigeants, plus visible dans la gouvernance internationale du monde Islamique et assurer plus de présence dans ses activités culturelles et politiques. Grace à de l’entregent de sa diplomatie, le Sénégal réussira à élire en 1975 son ancien ministre des Affaires Étrangères Karim Gaye en qualité Secrétaire Général de l'OCI avant d'organiser quelques années plus tard, en 1991, le Sommet de l'Organisation de la Conférence Islamique au Sénégal.
Cette détermination à placer les Sénégalais dans la galaxie des Administrateurs de la société internationale va être réaffirmée par l'élection en 1993 de Jacques Diouf en qualité de Directeur Général de la FAO.
Enfin, le nouveau président Faye a fait remarquer, dès son accession au pouvoir sa détermination à mobiliser sa diplomatie au service de la consolidation de l'intégration africaine comme le montre son engagement à sauvegarder l’intégrité de la CEDEAO, organisation dont l'un des acquis les plus importants, le Protocole sur la libre circulation des biens et des personnes, a été signé en 1979 à Dakar. Cet engagement digne du rôle que le Sénégal a toujours voulu jouer en faveur de l'unité et du développement de l'Afrique mérite d'être soutenu.
La volonté panafricaine de soutenir les grandes causes de notre continent en réarmant intellectuellement et moralement nos compatriotes grâce à l’incarnation d'une autodétermination, et d'une souveraineté fondées sur la réappropriation de notre histoire, explique certainement, les initiatives du président Faye et son gouvernement par rapport au massacre de Thiaroye ou de l’inauguration à Thiès de la statue de Lat dior Damel du Cayor.
C'est au nom du triomphe de la cause des Noirs, que le Sénégal fut le premier pays en 1976 à soutenir les revendications du gouvernement provisoire de Papouasie Nouvelle Guinée. Ce qui fit dire au Prix Nobel Wole Soyinka, que ce soutien faisait de Senghor un président qui "méritait une place d’honneur".
C’est cette même fibre patriotique qui amena le Sénégal à se dresser contre le régime de l'Apartheid qui permit à une minorité de blancs soutenus par certains pays occidentaux de perpétuer une féroce domination sur la majorité noire.
Ainsi quand Mandela visita le Sénégal avant son arrestation par le régime sud-africain, Senghor décida de reconnaître son mouvement, l'ANC en octroyant à son bureau de représentation au Sénégal un statut Diplomatique. Abdou Diouf suivra cette voie de la continuité de l'Etat et de la pérennisation des valeurs de solidarité active et de Téranga en offrant, pour la première fois aux membres de l'ANC et aux libéraux blancs, l’opportunité d'engager le dialogue, à Dakar en 1987. Cette rencontre valut au Sénégal beaucoup de prestige international et d'amitié de la part de Nelson Mandela.
L'orientation que le président Faye et son premier ministre Ousmane Sonko ont commencé à imprimer aux relations internationales du Sénégal mérite d'être consolidée par la mobilisation des patriotes expérimentés et de bonne volonté, car elle peut à n'en point douter, renforcer le Soft Power du pays en permettant un redéploiement très significatif d’une diplomatie sénégalaise fondée sur la continuité de l'Etat et sur le patriotisme au service de le l’intégration africaine.
Le tandem Diomaye-Sonko, l'étoile la plus brillante de la constellation des nouvelles forces souverainistes africaines, dont la réussite du "Projet" pourrait être le premier jalon vers la renaissance de l'Afrique, doit essayer de fonder son action sur les acquis glorieux légués par les anciens, sur la compétence et la bonne volonté d'une jeunesse patriotique.
Benoit S Ngom est président de l’Académie Diplomatique Africaine.
Hommage à Abdou Diouf, éditions librairie juridique africaine, décembre 2024.
NATURAL JUSTICE DÉVOILE L'ABÉCÉDAIRE DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE EN BANDES DESSINÉES
En sensibilisant le public à travers des films éducatifs, l'organisation entend rendre les enjeux liés au sujet accessibles à tous. Cette initiative vise également à mobiliser les communautés locales et la jeunesse sénégalaise.
L’ONG Natural Justice, en partenariat avec l’Agence Nationale pour les Énergies Renouvelables (ANER), a organisé jeudi 19 décembre à Dakar une projection de film suivie d’un panel pour présenter l’abécédaire de la transition énergétique au Sénégal. Cet événement a pour objectif de sensibiliser le grand public aux notions clés de la transition énergétique et aux défis climatiques, tout en mettant en lumière les efforts du Sénégal dans ce domaine.
Dans son allocution, Sokhna Dié Ka, directrice du Hub Dakar de Natural Justice, a mis en exergue l'importance de cet enjeu pour le pays. « Cette projection nous offre l'opportunité d'échanger et de partager nos visions sur des thématiques cruciales, notamment les problématiques liées au changement climatique et à l’accès à l’énergie. » Elle a également souligné les avancées du Sénégal à travers des projets tels que la stratégie « Gas to Power » et le développement des énergies renouvelables. Selon elle, ces initiatives sont indispensables pour réduire la dépendance énergétique tout en promouvant une transition bas carbone : « La maîtrise de ces enjeux demeure pour nous un grand défi, actuel mais aussi futur, pour les générations à venir. »
L’approche inclusive adoptée par Natural Justice repose, selon elle, sur une sensibilisation des communautés locales, afin qu’elles puissent pleinement participer à cette transition. Pour cela, l’organisation a développé un outil innovant : des bandes dessinées éducatives pour rendre les concepts accessibles à tous, en particulier aux jeunes.
Pour sa part, Suleyman Tosun, représentant de l’ambassadeur des Pays-Bas au Sénégal, a témoigné de l’engagement de son pays en faveur de la transition énergétique au Sénégal. Évoquant ses propres expériences dans des zones dépourvues d’énergie, il a rappelé l’importance vitale de l’accès à une énergie fiable et renouvelable. « L'énergie, lorsqu'on l'a, semble tellement naturelle qu'il est presque impossible d'imaginer la vie sans elle. Pourtant, pour des millions de personnes dans le monde, c'est une réalité quotidienne. »
Il a salué les efforts du Sénégal, qui intègre déjà 30 % d’énergies renouvelables dans son mix énergétique. Suleyman Tosun a également insisté sur la nécessité de continuer sur cette voie : « Investir dans le solaire, l’hybride et la bioénergie, c’est comme passer de la charrette à l’auto : on va plus loin, plus vite, et sans polluer les routes. »
Un appel à la jeunesse pour un avenir durable
Kader Diop, représentant de l’ANER, a délivré un message d’espoir et de mobilisation. Soulignant les ressources naturelles inépuisables du pays, il a encouragé les jeunes à s’engager dans le développement des énergies renouvelables : « Le soleil se lève tous les jours. Vous n’avez pas besoin d’appuyer sur un bouton pour qu’il apparaisse. C’est une grâce que nous devons exploiter au mieux pour assurer notre souveraineté énergétique. »
Il a également rappelé les efforts déjà accomplis par le Sénégal et fixé un cap ambitieux pour l’avenir : « Aujourd’hui, nous avons atteint 30 % d’énergies renouvelables dans notre mix énergétique. J’espère que demain, vous, la jeunesse, porterez ce chiffre à 80, voire 100 % », s’est-t-il adressé aux enfants qui ont assisté à la projection des bandes dessinées.
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LA SORTIE CONTROVERSÉE DE MACRON À MAYOTTE
"Sans la France, vous seriez dans une merde beaucoup plus profonde", a lancé le président français aux habitants réclamant de l'eau potable. De quoi raviver les tensions dans ce territoire d'outre-mer pourtant moins aidé que les autres
(SenePlus) - Une vive altercation a éclaté entre Emmanuel Macron et des habitants de Mayotte lors de sa visite dans l'archipel dévasté par le cyclone Chido, rapporte Reuters. Face aux critiques sur la gestion de la crise, notamment concernant l'accès à l'eau potable, le président a eu une réponse cinglante qui fait polémique.
"Sept jours et vous n'êtes pas capables de donner de l'eau à la population !", a lancé un habitant au président selon l'agence de presse. La réplique présidentielle ne s'est pas fait attendre : "Vous êtes contents d'être en France. Sans la France, vous seriez dans une merde beaucoup plus profonde, 10 000 fois plus, il n'y a aucun endroit dans l'océan Indien où les gens reçoivent plus d'aide."
Cette sortie présidentielle s'inscrit dans une série d'échanges tendus lors de sa visite du quartier Pamandzi. "Ne dressez pas les gens les uns contre les autres. Si vous dressez les gens les uns contre les autres, on est foutu", a également déclaré le président à la foule, selon Reuters.
L'opposition n'a pas tardé à réagir à ces propos jugés déplacés. Sébastien Chenu, député du Rassemblement National, a estimé que "le président ne trouve pas exactement les bons mots de réconfort pour nos compatriotes mahorais qui, avec ce genre d'expression, ont toujours le sentiment d'être traités différemment". Le député de la gauche radicale Eric Coquerel a quant à lui qualifié ces commentaires de "complètement indignes".
Face à la polémique, Emmanuel Macron s'est défendu dans un entretien accordé à MayotteLa1ere, accusant certains manifestants d'être des "militants politiques du RN". Il a également tenu à contrer le récit selon lequel "la France ne fait rien", expliquant que "le cyclone n'a pas été décidé par le gouvernement. La France fait beaucoup. Nous devons être plus efficaces, mais les discours de division et d'agitation ne vont pas aider."
Cette controverse intervient dans un contexte particulièrement dramatique pour l'archipel, qui fait face à la pire tempête depuis 90 ans. Selon Reuters, si les autorités n'ont confirmé que 35 décès, certains craignent que le bilan ne s'élève à des milliers de morts, notamment dans les bidonvilles des collines qui n'ont pas encore pu être atteints par les secours.
L'État français consacre environ 1,6 milliard d'euros par an à Mayotte, soit environ 8% du budget des territoires d'outre-mer et 4 900 euros par habitant, précise Reuters. Un chiffre qui reste inférieur aux 7 200 euros par habitant à La Réunion ou aux 8 500 euros en Guadeloupe.