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30 novembre 2024
Femmes
SOHAM WARDINI VEUT INSPIRER LES FEMMES
La nouvelle maire de Dakar souhaite que ses paires prennent exemple sur elle pour s'engager en politique - Elle évoque également ses priorités à la tête de la municipalité - ENTRETIEN
Soham El Wardini, la nouvelle maire de Dakar, la capitale sénégalaise, est la première femme à occuper ce poste.
Elle a été élue samedi pour remplacer Khalifa Sall, révoqué suite à sa condamnation pour détournement de fonds publics.
Dans cet entretien elle parle de sa principale priorité, alors que son mandat prend fin en décembre 2019.
Soham El Wardini souhaite que les femmes s'inspirent de son élection pour s'engager encore plus en politique.
PAR GILLES YABI
Y'A-T-IL TROP DE BÉBÉS AFRICAINS ?
La cadence démographique des pays les plus pauvres et les plus fragiles du continent est une menace à la sécurité, à la stabilité, et évidemment, au bien-être des populations actuelles et futures
Jeune Afrique |
Gilles Yabi |
Publication 03/10/2018
Combien de temps le continent abandonnera-t-il la question du contrôle des naissances aux agences onusiennes et aux ONG ? Pour Gilles Yabi, fondateur du think tank citoyen WATHI, la démographie subsaharienne sera l'un des thèmes incontournables des années à venir. Et il est temps que les sociétés africaines s'en saisissent.
« Africa’s dangerous baby boom », que l’on peut traduire par « la dangereuse explosion des naissances en Afrique » : c’est ce titre en couverture du très réputé hebdomadaire international The Economistqui, je dois l’avouer, m’a poussé à acheter un exemplaire à l’aéroport de Dakar. À l’intérieur du journal, le titre de l’article est explicite, et comme souvent avec ce magazine, bien trouvé : « Babies are lovely but… ». Comprendre : « Les bébés sont adorables mais… ». Mais quoi ? « Le taux de fécondité en Afrique maintient le continent dans la pauvreté », annonce avec grande clarté l’introduction de l’article.
Le sentiment qui m’a poussé à acheter ce numéro n’était ni une fascination pour le sujet, ni le partage de l’angoisse exprimée par le titre, pas plus que l’espoir d’apprendre quelque chose de vraiment nouveau sur la démographie africaine. J’avais déjà lu beaucoup d’articles de presse et d’études élaborées de démographes sur les tendances des pays africains, pointant unanimement sur le maintien de taux de fécondité élevés et sur la conséquence certaine de ce fait, une multiplication par deux ou davantage de la population de plusieurs pays du continent d’ici à l’année 2050, soit en trois décennies seulement.
Je dois avouer que c’est l’agacement qui m’a poussé à effectuer cet achat. Je voulais savoir comment l’hebdomadaire célèbre pour ses unes péremptoires sur l’Afrique – « The hopeless continent » (Le continent sans espoir) en 2000, puis « Africa rising » (l’Afrique émergente) en 2011 – allait informer son auguste lectorat international sur le dangereux « baby boom » africain, après avoir entendu si souvent au cours des derniers mois des dirigeants occidentaux, des essayistes, des journalistes, s’émouvoir à l’envi, avec plus ou moins d’honnêteté intellectuelle et de subtilité, de la démographie galopante de l’Afrique subsaharienne.
Ce sentiment d’agacement rappelle un peu celui des résidents d’origine africaine en Europe qui se réveillent chaque matin en entendant à la radio parler de l’immigration comme du problème majeur pour la nation où ils vivent. Le sentiment que l’on ne parle que de vous et pas franchement en bien. Le sentiment que les humiliations, les crimes du passé et les vexations mâtinées de racisme qui se poursuivent dans le présent prennent une nouvelle forme. Celle de la hantise d’une invasion non pas seulement de l’Europe, mais de notre planète commune par des hordes de bébés africains qui deviendront des adultes désespérés essaimant de toutes parts.
Le petit dossier de The Economist que je m’apprêtais à accabler de tous les maux s’est révélé à la lecture clair, équilibré, fondé sur les faits et sur une analyse qu’on ne peut raisonnablement pas contester : la cadence démographique des pays les plus pauvres et les plus fragiles du continent est une menace à la sécurité, à la stabilité, et évidemment, au bien-être des populations actuelles et futures.
La fécondité subsaharienne élevée ne serait pas en soi un problème si elle ne résultait pas de l’absence de progrès significatifs sur plusieurs décennies dans l’éducation des populations, et en particulier dans celle des filles dans beaucoup de pays africains. Si elle n’était pas la conséquence dans beaucoup de cas du refus implicite de lutter contre les inégalités profondes entre les chances d’épanouissement offertes aux garçons et aux filles dans les classes sociales largement majoritaires de nos pays.
Elle ne serait pas un problème si elle n’était pas la conséquence d’un abandon par les élites dirigeantes depuis des décennies de toute prétention à influencer positivement l’avenir de leurs sociétés. Si elle n’était pas le résultat de l’absence de politiques publiques, ignorées par des décideurs obnubilés par l’enrichissement individuel rapide par tous les moyens, par la conservation du pouvoir et de privilèges indécents ou résignés face à la disparition des idéologies politiques et des débats d’idées sur le type de sociétés que l’on veut construire dans un contexte de démocraties électorales vides de substance.
La fécondité élevée dans l’espace sahélien, par exemple, ne serait pas un tel danger si elle ne se conjuguait pas avec des contextes économiques, sociaux, politiques et sécuritaires déjà très précaireset avec des besoins d’investissements sanitaires, éducatifs et énergétiques massifs sans commune mesure avec les capacité des Etats. Elle ne serait pas un sérieux problème si elle n’était pas la conséquence de l’ampleur et de la résilience de faits aussi simples que les grossesses et les mariages d’adolescentes et de fillettes.
Un des chapitres du rapport Goalkeepers publié récemment par la fondation Bill et Melinda Gates, cité par The Economist, expliquait comment le recul de quelques années de l’âge de la première grossesse pourrait réduire significativement le taux de fécondité dans les pays africains, sans entraver les choix individuels des femmes. Peut-on vraiment prétendre que les jeunes filles qui deviennent mères entre 15 et 18 ans, fort nombreuses dans les zones rurales ouest-africaines, font le choix libre et informé de tomber enceinte et sont parées pour connaître des vies épanouissantes ?
Dans combien de pays africains, les questions de santé reproductive et de bien-être familial, parmi les plus fondamentales pour toute société humaine, font-elles parties des sujets de débats argumentés entre acteurs politiques pendant des campagnes électorales ? Allons-nous continuer pendant encore longtemps à abandonner le traitement de questions vitales pour nos pays aux agences onusiennes et aux ONG internationales et nationales comme s’il ne s’agissait pas là avant tout de questions relevant des choix de société et donc de choix politiques cruciaux ?
Que nous nous en offusquions ou non, la démographie subsaharienne sera un des thèmes permanents de discussions internationales pendant très longtemps. Les projections à horizon 2050 et à horizon 2100 de la population africaine continueront à être scrutées et ressassées avec attention et appréhension par les « autres » régions du monde, à commencer par celles dont le poids démographique se réduira significativement face à ceux de l’Asie et de l’Afrique.
Les dirigeants, les acteurs politiques, les chercheurs, les intellectuels et les citoyens africains de manière générale devraient se sentir encore plus concernés que nos voisins sur la planète. On parle après tout nos descendances.
Le meilleur antidote à l’agacement, voire à l’exaspération, face aux intrusions dans l’intimité de nos sociétés qui ont déjà connu tant de violences et d’humiliations, est de faire preuve de responsabilité. Regarder l’état de notre continent tel qu’il est, débattre sans tabou de toutes les questions fondamentales pour l’avenir de nos populations et faire des choix politiques forts et raisonnés reflétant l’intelligence et la dignité collectives de nos sociétés.
LES MILLES ET UNE ASTUCES POUR EMBELLIR SA TÊTE
Adeptes des belles toilettes, les Sénégalaises sont éternellement hantées par le souci d’avoir une belle tête - Pour ce faire, elles font beaucoup recours à des perruques fabriquées, non pas avec des cheveux synthétiques, mais avec des cheveux naturels
Apanews |
Oumou Khary Fall |
Publication 02/10/2018
Qu’importe, si ces perruques coûtent les yeux de la tête et qu’il faut se saigner pour en acquérir. Ça c’est si on a les moyens, mais si on est de condition modeste on fait dans la location, à l’image de Fatou Guèye. Trouvée dans un salon de coiffure, la jeune dame qui en connaisseur dit porter «une perruque raide, longueur 32 et couleur noire », négocie âprement la location d’une autre perruque.
Celle qu’elle porte a déjà été vue par ses copines et il lui faut une nouvelle pour parader au mariage d’une de ses amies dont la date est imminente. Ayant jeté son dévolu sur une perruque aux cheveux naturels frisés, elle finit par l’obtenir au prix de 30000 FCFA pour une semaine de location.
Aux anges après ce marché conclu, elle lance dans un sourire : « C’est une honte pour une jeune fille de mettre des cheveux synthétiques lors des fêtes ou de certaines cérémonies. Il est également honteux de toujours mettre la même perruque ».
Convaincu, lui aussi, d’avoir fait une bonne affaire, le propriétaire du salon de location explique que son business consiste à acheter « toutes sortes de cheveux, avant de les louer aux femmes ». Les prix qui dépendent du temps durant lequel la cliente jugera bon de parader avec la perruque, varient entre 15.000 et 50.000 FCFA.
Pour disposer d’une perruque, la cliente peut payer rubis sur l’ongle ou donner une avance, plus le dépôt d’une pièce d’identité qu’elle récupèrera après paiement du reliquat de la location.
Selon les loueurs de perruques rencontrés, ces précautions sont plus que nécessaires car beaucoup de femmes, habitées par la hantise d’être belles, ne jouent pas franc jeu dans leur quête d’une tête bien apprêtée.
Ass Malick Gadiagua, commerçant au marché HLM 5 de Dakar, jure la main sur le cœur que certaines des femmes qui prennent d’assaut sa boutique à l’occasion des fêtes (Tabaski, Korité ou fin d’année), ont les mains baladeuses.
« Parfois, certaines viennent ici et à les voir bien habillées tu penses qu’elles ont des millions dans leur portemonnaie. Que nenni ! Elles n’ont rien et, à défaut, elles ont une petite somme et veulent acheter des cheveux naturels qui coûtent 300.000 FCFA. Si tu ne fais pas attention elles vont te voler », se désole Ass Malick.
Pape Diagne, commerçant au marché Tilène de Dakar, confirme les dires de son collègue des HLM, en avouant avoir lui-même était victime d’une arnaque ourdie par une de ses clientes et dont le dénouement a eu lieu à la police. Après avoir vendu à une jeune fille une perruque de cheveux naturels au prix de 300.000 FCFA, quelle a été sa surprise de la voir débarquer dans sa boutique 48h plus tard pour lui réclamer son argent, au motif que Pape l’avait flouée en lui vendant une perruque fabriquée avec des cheveux synthétiques.
Heureusement pour le commerçant, sa cliente avait mis au parfum de son plan sa sœur laquelle, pas d’accord avec sa démarche, l’avait enregistrée à son insu avant d’avertir Pape Diagne.
« Une fois à la police ; j’ai fait écouter l’enregistrement à l’enquêteur » qui a ainsi débouté l’arnaqueuse de sa plainte, souligne le commerçant, devenu depuis lors très méfiants à l’égard de certaines de ses clientes.
Parlant sous le couvert de l’anonymat, ce commissaire de police reconnait qu’il a eu à recevoir « beaucoup de plaintes portant sur des vols ou des abus de confiance concernant les cheveux naturels ». « Récemment, ajoute-t-il, j’ai déféré au parquet pour vol de cheveux naturels deux femmes, l’une était en état de grossesse très avancée et l’autre avait un bébé de quatre mois».
Toutefois, souligne le commissaire, « nous utilisons, parfois, la médiation pour régler certains conflits, surtout quand le commerçant vend à son client des cheveux de mauvaise qualité ou bien lorsque la cliente n’a pas pu payer à la date convenue ».
Heureusement, il n’y a pas que l’arnaque pour se faire belle. Imaginatives en diables, beaucoup de femmes ont mis en place des tontines pour se procurer la ou les perruques de leur rêve.
« Dans notre service, nous cotisons à chaque fin de mois 20.000 FCFA chacune, puis on achète une perruque pour l’une d’entre nous et ainsi de suite jusqu’à ce que tout le monde obtienne sa perruque », explique Léontine Ndiaye, secrétaire dans une entreprise de place.
Celles qui ne travaillent pas peuvent confier à leur commerçant la gestion d’une tontine de cheveux naturels alimentée par des cotisations périodiques. A ce propos, le commerçant Mamadou Sène reconnait avoir un groupe de filles qui cotisent chaque jour 5000 FCFA jusqu’à concurrence du prix d’une bonne perruque qu’il se fait le plaisir de leur vendre à tour de rôle.
QUAND LES FEMMES TIENNENT LE HAUT DU PAVÉ !
Les femmes ont fini de faire preuve de leur leadership et leur capacité à présider aux destinées du pays notamment ces deux dernières décennies
Mariame DJIGO, Maïmouna DIA |
Publication 02/10/2018
Une femme vient d’être élue maire de la Ville de Dakar, pour la première fois depuis 1887 au Sénégal. Soham El Wardini de son nom vient ainsi s’ajouter à la longue liste des femmes qui sont entrées dans l’histoire du Sénégal, depuis les héroïnes et autres résistantes pacifiques. Même si les clichés sur elles persistent toujours dans notre pays, les femmes réussissent sans doute à gravir des échelons notamment ces deux dernières décennies avec la série des premières depuis la nomination de Mame Madior Boye comme cheffe de gouvernement au Sénégal. Du foyer aux commandes d’une institution, et en attendant leur accession à la magistrature suprême, focus sur l’ascension des femmes dans notre pays. Avec des éclairages de Pr Penda Mbow, historienne et Diatou Cissé, journaliste, membre tribunal des pairs du CORED.
Il y a une semaine, une Sénégalaise du nom de Maguette Ndiaye a été tuée par son mari à Bilbao, en Espagne. Selon certaines sources, la dame a été «victime de ses ambitions» puisqu’elle était plus «instruite» que son mari et ne cessait de gravir des échelons. Trois jours après ce meurtre, Soham El Wardini qui, jusque-là, était la 1ère adjointe au désormais ex-maire Khalifa Ababacar Sall, remplace son mentor à la tête de la mairie de la Ville de Dakar.
Une grande première dans l’histoire de la municipalité de la capitale sénégalaise puisque Mme Soham El Wardini, 22ème maire depuis 1887 avec Alexandre Jean, est la première femme à occuper ce poste. Cette élection de Soham El Wardini à la tête de la municipalité de Dakar en dit long sur l’ascension des femmes dans notre pays. Jadis reléguées au second plan, les femmes ont fini de faire preuve de leur leadership et leur capacité à présider aux destinées du pays notamment ces deux dernières décennies. Du foyer aux commandes d’institutions jusque-là chasse-gardée des hommes, les femmes sénégalaises tiennent le haut du pavé, malgré quelques difficultés.
TOP DEPART AVEC MAME MADIOR BOYE
Mame Madior Boye est la première femme à occuper la fonction de Premier ministre au Sénégal (2001-2002) sous l’ère Abdoulaye Wade. Avant d’accéder à ce poste, elle a été première vice-présidente du Tribunal régional hors classe de Dakar, puis présidente de Chambre à la Cour d’appel. S’en suivra Aminata Touré qui a été Premier ministre de 2013 à 2014, sous le régime de Macky Sall. Aujourd’hui, elle est envoyée spéciale du Président de la République.
A ces sénégalaises qui ont gravi des échelons, s’ajoutera Anna Sémou Faye qui a été aux commandes de la Police nationale. Commissaire de police divisionnaire, elle a été nommée Directrice générale de la Police nationale le 25 juillet 2013 au lendemain du scandale de drogue qui avait secoué la Police sénégalaise, avant d’être nommée ambassadrice en Guinée en 2016. Elle devient ainsi la première femme à diriger la Police nationale dont le Bureau des relations publiques est aujourd’hui piloté par une femme, le Commissaire de Police Tabara Ndiaye qui est aussi porte-parole de la Police nationale, depuis avril 2017.
Parmi les femmes ayant occupé de hautes positions, il y a aussi l’ancienne présidente du Conseil constitutionnel, Mireille Ndiaye, la présidente du Conseil économique, social et environnemental (Cese). Aminata Tall est portée à la tête de cette institution le 17 janvier 2013, par le Président de la République, Macky Sall. Une femme est à la tête d’une institution, le Haut Conseil du Dialogue Social que dirige Innocence Ntap Ndiaye.
A QUAND UNE FEMME PRESIDENTE DE LA REPUBLIQUE ?
Bref, en dehors du perchoir de l’Assemblée nationale et la Présidence de la République, les femmes auront occupé tous les postes, pouvoirs et sphères de décisions (électifs et nominatifs) ou presque. A quand une femme présidente de la République ? Cette question pourrait bientôt avoir une réponse. Le temps pour les femmes de mener le Sénégal à bon port est bien proche, au vu de l’ambition politique d’un grand nombre d’entre elles. Marième Wane Ly a été la première femme chef de parti politique au Sénégal, elle a été révélée au grand public lors de la présidentielle de 2000. Donc Marième Wane Ly qui, sous la bannière du Parena, avait annoncé sa candidature à la présidentielle de 2000 avant d’y renoncer à quelques semaines de la clôture du dépôt des candidatures, aura été le précurseur de cette présence des femmes dans les starting-blocks de la course à la Magistrature suprême.
En 2012, c’est le professeur Amsatou Sow Sidibé et la styliste Diouma Dieng Diakhaté qui briguaient la présidence de la République. Même si leurs candidatures en tant que femmes suscitaient des railleries aux yeux de beaucoup d’hommes, elles y ont cru et ont tenu… jusqu’au bout. Pour les joutes présidentielles de 2019, revoilà encore les femmes. L’avocate et maire de Podor Me Aissata Tall Sall, par ailleurs présidente du mouvement «Osez l’Avenir», qui se distingue tant par sa «brillance et son courage» annonce sa candidature. Non sans oublier la députée libérale Mme Aïda Mbodj, Mme Nafissatou Wade, Mme Yacine Fall, etc. Pourvu qu’elles franchissent l’étape fatidique des parrains nécessaires pour soutenir leur projet.
Toutefois, il faut dire que même si les femmes brillent de mille feux au niveau de leurs postes, cela n’a pas été chose facile pour elles de diriger des hommes dans une société «patriarcale».
PR PENDA MBOW, HISTORIENNE : «Personne ne pourra empêcher dans ce pays qu’il y ait à la tête de l’exécutif une femme»
La série des premières se poursuit pour les nominations et élections de femmes aux plus hautes instances de décisions jusque-là considérée comme chasse-gardées des hommes. L’une des dernières en date est l’élection de Mme Soham El Wardini maire de la Ville de Dakar le samedi dernier. Penda Mbow, professeur d’histoire à l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar est très optimiste et prédit que personne ne pourra empêcher, tôt ou tard, l’accession d’une femme à magistrature suprême au Sénégal.
«Il n’y a pas de hasard comme vous le savez, il y a eu des femmes qui excellent dans tous les domaines, des femmes qui ont faits des études très poussées, des femmes qu’on retrouvent dans l’espace public depuis très longtemps. Et, je crois d’ailleurs que même les changements sont encore lents, parce que les femmes sénégalaises auraient pu encore occuper des fonctions beaucoup plus importantes et elles peuvent être encore beaucoup plus nombreuses à occuper ces postes. Cela veut dire que si elles excellent partout, elles sont premières, ce n’est que normal.
Avoir une femme présidente de la république, moi je dis que cela viendra tôt ou tard, je ne sais pas dans quelles conditions ni comment, mais le XXIème siècle étant le siècle des femmes, personne ne pourra empêcher dans ce pays qu’il y ait à la tête de l’exécutif une femme. Je ne peux pas dire quand, mais cela arrivera, parce que cela relève même de la logique de l’évolution de notre société.
A partir du moment où elles ont appris à gérer à l’intérieur de la sphère familiale la maison, elles ont tendance à transférer justement le savoir-faire dans l’espace public et dans les institutions. Personne ne peut nier aujourd’hui les capacités des femmes à gérer, à préserver les biens publics et surtout à montrer à tout le monde ce dont elles sont capables. Et c’est une chance que le Sénégal devra saisir pour apporter les changements et la mutation et cette émergence dont on parle et qui ne pourra pas se faire sans l’implication en profondeur des femmes et cela à tous les niveaux»
DIATOU CISSE, JOURNALISTE, MEMBRE TRIBUNAL DES PAIRS DU CORED : «Il y a des éléments objectifs qui puissent expliquer que les femmes prétendent à la présidence de la République»
Diatou Cisse, journaliste, membre Tribunal des pairs du CORED, rappelant que les femmes sont de bonnes gestionnaires, revient sur des éléments objectifs dans le contexte actuel qui puissent expliquer que les femmes prétendent à des postes de responsabilité publique, comme celui de président de la République. Elle a été interpelée suite à l’élection pour la 1ère d’une femme à la tête de la Ville de Dakar.
«(…) Cela s’inscrit en droite ligne de la lutte des femmes pour plus d’égalité pour plus de citoyenneté en fait, parce que de plus en plus les femmes revendiquent et manifestent leurs citoyenneté dans l’espace public. C’est toute cette lutte là qui a emmené les lois comme celle sur la parité. Et dans les partis politiques, les femmes sont de plus en plus conscientes de leurs poids, de leurs forces et également de leur capacité à nouer des alliances, de leur capacité à défendre les droits; c’est le résultat de toutes ces conquêtes là aujourd’hui qui améliore sensiblement la présence des femmes dans les instances de prise de décision au niveau politique.
Au niveau de la formation, il faut quand-même accepter que le niveau de connaissance des femmes s’est largement amélioré ces dernières années. On a des femmes qui ont faits de bonnes études universitaires, des femmes qui sont dans des domaines de compétence très pointus. Je pense que, l’un dans l’autre, effectivement, il y a des éléments objectifs dans le contexte qui puissent expliquer que les femmes prétendent à des postes de responsabilité publique, y compris le poste de président de la République.
Il est établit que les femmes sont de bonnes gestionnaires parce que tout simplement elles ont à gérer le budget familiale qui n’est pas toujours extensible à volonté, mais qu’elles essaient de gérer de telle sorte à faire fonctionner la famille tout le mois. Donc, on a des prédispositions à faire de la gestion. S’y ajoutent également l’éducation et la socialisation des femmes. (…) C’est autant de paramètres qui rendent les femmes très prudentes quand elles ont à gérer en général des deniers publics.»
PAR LA CHRONIQUEUSE DE SENEPLUS, SALLA DIENG
PAR DEVOIR ET PAR AMITIÉ, (IN) CERTITUDES
EXCLUSIF SENEPLUS - Par devoir de lectrice, et par amitié féministe, je souhaite continuer à vous penser féministe - Voici donc, Ndèye Fatou, mes supputations et mes questions
De toutes les notes de lecture que j’ai eues à faire, celle-ci est de loin l’une des plus déplaisantes. Ndèye Fatou Kane et moi nous sommes connues il y a quelques quatre ou cinq années sur Facebook lorsque nous commentions un post sur… le féminisme au Sénégal. Bien que n’ayant jamais eu l’occasion de nous rencontrer, nous avons échangé quelques messages sur ledit réseau. Y compris à propos du malheur de vivre que j’ai eu grand plaisir à lire. Puis l’annonce quelques mois plus tard de la publication de « Vous avez dit féministe ?» , j’étais si impatiente de lire (enfin) un ouvrage sur le féminisme par une jeune contemporaine que j’ai tout fait pour me le procurer rapidement.
Après la constatation de la brièveté de l’ouvrage qui fait 102 pages hors bibliographie, je me suis délectée de la lecture de votre avant-propos et principalement la mise en contexte historique. Par la suite, je me réjouissais de cette promesse de l’avant-propos très alléchant: « Vous avez dit féministe ? se veut donc une modeste contribution à la cause féministe telle que je la conçois. En ma quadruple identité de Hal-Pulaar, Sénégalaise, Africaine et jeune femmes de la génération »Y ». Comment les luttes féministes portées par des femmes de par le monde, en Afrique, et enfin dans mon pays le Sénégal, ont elles eu et continuent d’avoir une incidence dans ma façon d’appréhender le monde qui m’entoure ? Est-ce que ma perception desdits événements peut être altérée par le fait que je sois une femme ? Comment déconstruire la notion de « genre » qui a quelque peu empiété sur les luttes féministes d’antan, et quelles solutions proposer ? Voilà autant de questions auxquelles j’essaie de répondre tout le long de Vous avez dit féministe ? » (13)
Je me suis rapidement laissée emporter par le brio de vos résumés des quelques ouvrages et extraits biographiques marquants des quatre auteures choisies : Simone de Beauvoir (Le Deuxième Sexe), Hawa Thiam (Parole aux Négresses), Mariama Bâ (Un chant écarlate, et Une si Longue lettre), et Chimamanda Ngozi Adichie (ses ouvrages : Autour de ton cou, L’hibiscus pourpre, et Americanah ; ainsi que ses vidéos : Le danger d’une histoire unique et Nous sommes tous des féministes). Puis au terme du chapitre au titre éponyme de six pages tant attendu de Vous avez dit féministe ? (59-65)…mon excitation s’était éteinte . Mon regard sombre s’est alors promené sur Propos sur le féminisme contemporain (67-77) par… Jean-Aimé DIBAKANA, sociologue et romancier, mais qui est-ce donc ? Pourquoi n’est-il pas co-auteur de l’ouvrage? À la fin de ma lecture de ces 10 pages que j’ai interrompu 1000 fois pour soit réfléchir, taper son nom sur Google, ou essayer de comprendre, j’avais perdu le fil…Je refermai l’ouvrage. (In)certitudes (79-102), la nouvelle qui clôturait l’ouvrage allait devoir attendre! Le lendemain, je relus encore les chapitres précédents avant de me plonger dans (in)certitudes. Puis je refermai l’ouvrage avant de me plonger dans la lecture d’un autre recueil de poésie acheté en même temps et qui me fit beaucoup de bien : « À nos humanités révoltées » de Kiyémis.
Plusieurs mois passèrent, entre la tentation du silence complice mais combien confortable et celle du devoir de réponse, par fidélité à cette cause si personnelle qu’est le féminisme qui m’ a fait vous connaître. Brimant à plusieurs reprises ma franchise spontanée, refrénant mon trop-plein d’entrain contre une nouvelle sagesse, réprimant les mots qui jouaient à saute-mouton pour forcer la barrière de mes lèvres, je préférai le silence. Je trouvai des justifications, des excuses, des opportunités de continuer à me taire : « cet ouvrage est salutaire car il permet le débat sur le féminisme parmi les jeunes générations » ; ou encore « entre féministes, il faut se soutenir ». De plus, il y avait cette note de lecture de Aminata Thior qui résumait déjà assez bien mon sentiment.
L’anglais a cette expression que j’aime car elle me porte : « in my heart of hearts » qui veut dire : « au plus profond de moi ». Au plus profond de moi donc, je savais qu’il me fallait rompre cette tyrannie qui fait que trop souvent, nous hésitons à critiquer, surtout constructivement, car la critique est confondue pour être portée sur une personne et non sur une chose. Et cette chose est ici un ouvrage qui cimente une pensée toujours insaisissable pour moi et censée être articulée dans : Vous avez dit féministe ? Voilà, à moi les incertitudes : Ndèye Fatou Kane, êtes-vous une féministe ? Si oui, de quel féminisme vous réclamez-vous qui nourrit votre « modeste contribution à la cause féministe telle que vous la concevez» dans cet ouvrage? À la fin de sa lecture, je n’ai toujours pas de réponse à ces deux questions. Cet ouvrage veut-il dire : « Vous avez dit féministe ? Mon œil ! » ou « Vous avez dit féministe ? J’en suis une ! »?
N’en sachant toujours rien, je vais vous poser la question directement là où cette conversation a commencé. Sur Twitter. Mais avant tout, ce serait vous manquer de respect que de ne pas me donner la peine de chercher moi-même la réponse dans votre ouvrage que vous vous êtes donnée la peine de produire.
Par devoir de lectrice, et par amitié féministe, je souhaite continuer à vous penser féministe. Malgré tout. Voici donc, Ndèye Fatou, mes supputations et mes questions. Basées sur vos propres mots : Vous avez dit féministe ? (59-65) et je suis tentée aussi de faire une lecture critique des Propos du sieur Dibakana, sociologue et romancier, sur le féminisme contemporain vu que son « analyse » fait quand même 10 pages (67-77) ! Au fil de la lecture de ces 6 pages dans lequel vous articulez votre pensée, j’essaie de vous expliquer Ndèye Fatou, pourquoi j’ai du mal à vous suivre et à vous situer, surtout, et partage avec vous mes questions.
Après la synthèse des quatre chapitres précédents (59-60), vous évoquez la bibliographie qui vous a servie de source (principalement les ouvrages des 4 auteures), ainsi que des liens externes vers des articles ou des vidéos consultés, et un article sur les FEMEN (dont il manque le lien dans la bibliographie) qui vous sert de prélude. Les FEMEN seraient difficilement classifiables et illustreraient par cela même à quel point « le féminisme est travesti » et « n’est pas fédérateur » ? (61) Qu’est-ce à dire ? Pourriez-vous s’il vous plaît préciser votre pensée ?
Puis vous retournez à la raison qui a motivé la rédaction de cet ouvrage : « Une discussion un peu houleuse, un trop-plein d’arguments et une voix grimpant dans les aigus, et on est une féministe ! Dans une époque où compartimenter les individus est une activité fort en vogue, j’ai l’impression que nous assistons à un duel Féministes VS Le reste du monde. » (61) Trouvez-vous péjoratif de vous faire traiter de féministe ? Etes-vous féministe Ndèye Fatou Kane?
Puis vous faites un détour au verset 1 sourate IV intitulée An-Nisa (les femmes) du Coran : « Entendons-nous bien : loin de moi l’idée de me mettre dans une logique de prôner l’égalité homme/femme de manière utopique et de la réclamer à hue et à dia. Mais ne pourrions-nous pas réfléchir à partir de la notion d’individus avant toute chose ? (61) ou encore : « Beaucoup de femmes, qu’elles aient mon âge ou pas, se réclament féministes à tort et à travers. Le débat est faussé à mon sens, car se dire féministe, équivaut à renforcer encore plus la stigmatisation du genre féminin »(62). Donc il ne faudrait plus se réclamer féministe ? Juste se réclamer un individu ? Et renier sa liberté à qui le souhaite de se réclamer féministe en se faisant tribunal du féminisme ?
« Il faudrait s’atteler à une entreprise de déconstruction, en abandonnant toute forme d’affaiblissement. Soyons des femmes, conscientes de notre féminité mais refusons que l’on nous réduisent à cette seule identité. Soyons avant toute chose des individus… » (62) Est-ce cela le changement de paradigme que vous proposez Ndèye Fatou ?
« Beaucoup d’ONG ont instauré une série de programmes axés autour du woman empowerment sous couverts de la thématique du genre,ceci afin de permettre aux femmes d ‘être plus «fortes» en substance. Le débat est faussé selon moi, car il ne faut pas que nous nous placions sur un ring prêtes à en découdre avec les hommes. » (63) Mais que voulez-vous dire ? « Genre », Ndèye Fatou, n’est pas synonyme de « femmes ». De la même manière trouveriez-vous, si vous le souhaitez, des programmes qui s’adressent à promouvoir davantage l’inclusion des hommes, ou des communautés toutes entières, qui sont labellisés sous l’étiquette « genre » je pense qu’il s’agit là d’un détail. De plus, le genre est une notion qui a été contestée et continue de l’être par beaucoup de féministes africaines déjà car ce ne serait pas le principe organisateur de toutes les sociétés.
Après avoir évoqué les années 70-80, vous demandez « Aujourd’hui plus que jamais, qu’a-t-on fait du combat mené par la première vague de féministes sénégalaises ? Quel héritage nous ont-elles laissé ? (…) Il me semble important de nous appuyer sur le parcours de ces femmes de valeur pour prendre nos marque dans la société. » (64) D’accord, cet ouvrage que vous venez d’écrire est important en ce qu’il contribue à mettre en lumière de travail de quatre féministe, mais ce serait bien de citer aussi ces féministes africaines de la 2e , 3e et 4e vague, il y a eu continuité. Donc il faut résumer leur action, à défaut de les détailler. Mais heureusement, nous n’avons pas besoin d’inventer la roue, leur travail a déjà été résumé par ailleurs (comme dans le magazine AWA qui est digitalisé ici ou le site d’African Feminist Forum, à défaut de lire la prolifique production littéraire ou académique sur le sujet ), et nous devons faire l’effort de citer ce travail dans nos références bibliographiques. Par exemple, Mouvements sociaux de femmes de feue Ndèye Sokhna Guèye disponible gratuitement sur le site du CODESRIA : https://www.codesria.org/spip.php?article2397&lang=en ou le féminisme de Fatou Sow par exemple)
« De plus en plus de femmes de ma génération ont fait des études, parcourent le monde et s’intéressent à quantité de sujets ; en somme s’accomplissent personnellement. Donc il nous faut changer de paradigme et sortir de tous ces procédés affaiblissants pour les femmes. » D’accord : Comment ? Que proposez-vous ?
« De plus, j’ai remarqué un désintéressement en ce qui concerne les luttes des femmes. Il est vrai qu’il y a une poignée de femmes de ma génération portant les combats de nos aînées, mais force est de reconnaître que ceux-ci ne sont plus une priorité…une continuité aurait dû être établie, de sorte qu’à l’heure actuelle, l’on s’approprie les luttes de nos illustres aînées, de sorte que jamais, au plus grand jamais, la flamme du féminisme ne s’éteigne ! » (64-65) Mais il y a eu continuité ! Et le passage du flambeau ne se fera pas de gaieté de cœur ou de manière incantatoire sur les réseaux sociaux (seulement), il faut arracher et s’approprier notre part de ce combat, activement (The revolution won’t be televised !).
« L’inclusion des hommes à qui le négativisme entourant le terme féminisme est à imputer. » D’accord pour l’inclusion des hommes, mais le souhaitent-ils tous? Que se proposent-ils d’apporter en tant qu’alliés? Je trouve le terme d’”inclusion” galvaudé car qui le souhaite (homme ou femme) trouvera le moyen d’être utile à une cause. Pas parce qu’un carton d’invitation lui est envoyé pour venir à la table, mais parce que l’ultime objectif du féminisme n’est pas la seule cause féminine, car il est juste utopique de vouloir remplacer une oppression par une autre. La finalité est que toutes les personnes “opprimées” ou “discriminées” en société du fait qu’elles soient nées hommes, ou femmes, qui se réclament comme tels, ou autre, cesse de subir une discrimination basée sur cette identité socialement assignée ou personnellement revendiquée.
« Les enjeux du XXIe siècle autour du féminisme devraient tourner autour d’un changement de paradigme, de façon à ce que chaque fois que le vocable féminisme est prononcé, l’on ne détourne pas la tête… Tel devrait être notre combat, nous jeunes femmes de la génération Y ! » (65) D’accord, encore une fois, comment ? Que préconisez-vous ?
« Tout est question de contexte » je suis d’accord avec ces propos de votre mère, qui font écho aux propos de la mienne et c’est sur cette base que je me permets de ne pas être d’accord avec le sieur Dibakana. Car si l’on suit son raisonnement : « parce que tout est question de contexte », nous africaines, ne méritons pas le féminisme (qu’il définit comme anti-africain) à moins qu’il ne s’agisse parfois du contraire : le féminisme ne nous mériterait pas car nous n’avons pas de problème « de genre » dans nos sociétés.
67-77 : Propos sur le féminisme contemporain : Jean-Aimé DIBAKANA, sociologue et romancier.
Que l’article de Dibakana basé sur idées reçues, accusations sexistes gratuites et clichés figure dans un ouvrage qui traite de la pensée de quatre féministes soulève des questions sur votre motivation. L’article de Dibakana, comme le vôtre choisit de commencer sélectivement par un cliché et un extrême : les FEMEN. Pourquoi choisir de diaboliser le féminisme ? Cet article dès son propos liminaire résout la question à laquelle elle prétend répondre : « Pourtant né au XVIIIe siècle, le féminisme en tant que discours sur les rapports sociaux de sexe en faveur de celui dit « faible » interroge encore sur la structuration et le fonctionnement de nos sociétés. Et ses récentes formes d’expression, telle citée plus haut, sont le signe que les objectifs qu’il s’assigne sont loin d’être atteints, quel que soit le lieu de la planète où l’on se trouve. Dès lors, l’on peut se poser quelques questions : le féminisme sert-il (encore) à quelque chose ? (MAIS OUI monsieur, vu que comme vous le dites dans la phrase précédente, ses objectifs sont loin d’être atteints !) Les valeurs qu’il défend sont-elles universelles ? Aujourd’hui, ses discours ne desservent-ils pas (parfois) les femmes ? » (68)
Pareil dans la section : le féminisme sert-il (encore) à quelque chose ? vous évoquez les droits acquis par les femmes sans pouvoir totalement en jouir ainsi que l’apparition de nouvelles questions sociales… qui vous’amènent à la conclusion p.70 qu’« il semble néanmoins clair que le féminisme en tant que doctrine préconisant l’expression des droits et du rôle des femmes dans la société reste nécessaire ». Mais cela, monsieur vous y avez déjà répondu, donc exercice de style (raté) ?
p.71 Les valeurs qu’il défend sont-elles universelles ?
Cette partie constitue à mon avis, la plus grande insulte aux féministes non-occidentales qui étaient féministes bien avant l’apparition du terme « féminisme » car vous leur reniez par votre complexe d’infériorité puant, le droit et le choix de se revendiquer comme telles parce que soi-disant trop sous-développées (y compris intellectuellement) pour être à même d’articuler une pensée féministe. Vous leur refusez, à ces femmes, et aux alliés qui ont soutenu ce combat en Afrique ou en Asie, leur part d’histoire, leur legs et leur futur. Vous insultez les générations de féministes africaines, musulmanes ou laïques, ou autres qui m’ont inspirée à en être une. Selon vous, « bien qu’ayant également puisé à d’autres sources, le discours féministe est sans conteste un discours européanocentré » ou encore « Concernant leur terrain de revendication, les valeurs féministes ne peuvent s’exprimer que sur des terrains où règne la démocratie, que dans des espaces qui autorisent la liberté de penser et d’agir. On peut difficilement imaginer des femmes s’organisant pour revendiquer des droits à la façon de leurs consœurs européennes en Chine, ou en Corée du Nord par exemple. De la même façon, le féminisme (forcément aussi « activiste », « militant ») suppose une certaine autonomie que permettent notamment des moyens matériels, financiers et bien sûr intellectuels. Est-il possible pour des femmes sans emploi, sans qualification, à la charge totale des hommes de se revendiquer des idées féministes ? C’est le cas de beaucoup de femmes à travers le monde, notamment en Afrique et en Asie. (71)»
De plus, vous postulez que les valeurs féministes véhiculent des valeurs purement européennes sinon occidentales (qu’est-ce que cela veut dire ?), donc incompatibles avec les valeurs de certaines cultures. Par exemple, vous citez le droit à l’avortement, ou le droit de refuser d’être mère qui sont des idées rattachées aux premières vagues de féminisme de la génération de De Beauvoir, (mais aussi par certaines féministes contemporaines), qui a théorisé ses idées dans le contexte d’avant-guerre français dans lequel carrière professionnelle et famille étaient difficilement conciliables. De Beauvoir pouvait-elle de son temps penser qu’il serait possible à Ségolène Royal, mère de quatre enfants de se présenter aux présidentielles ? Pouvait-elle imaginer que quelque années plus tard, le journal AWA parlerait à d’autres femmes, africaines, du sens des responsabilités en milieu professionnel après qu’elles se soient battues pour avoir accès à un emploi salarié ? en 1972(26), Kampoti, la femme sans homme en 1964 (9) ou du choix du mari). Monsieur Dibakana, en sortant ces arguments obsolètes, vous voulez refuser aux femmes comme moi le droit de me revendiquer féministe et d’avoir un ou des enfants parce que je le souhaite. Mais de toute façon, nous n’avons pas attendu des réactionnaires comme vous pour trouver des voies pour concilier nos convictions profondes (idéologiques, religieuses , ou autres) et nos ambitions professionnelles et familiales (pour celles qui en ont). De la même manière (et vous serez étonné, il se trouve des femmes africaines aujourd’hui qui ne souhaitent pas être mères, qui revendiquent le droit de disposer de leur corps et qui ne le seront pas, ne vous en déplaise !). Donc gardez pour vous vos considérations infondées sur le « droit au travail salarié qui n’existe pas « en zone rurale africaine » (72), vos considérations sur le droit à l’éducation scolaire (73) ou au risque des femmes (même non-féministes) qui souhaitent la répartition équitable des tâches de ne pas trouver d’époux (73). Votre discours est englobant et dangereux, c’est le type même « d’histoire unique » contre lequel Chimamanda Adichie met en garde (du moins la Chimamanda d’avant la polémique sur la transsexualité).
« Si lutter pour l’extension du droit des femmes est une démarche louable parce qu’humaniste tout simplement, les moyens et les théories mis en œuvres restent discutables. Déjà, appuyer cette lutte sur l’ambition de gommer les différences « naturelles » entre les hommes et les femmes, de soutenir que les hommes et les femmes sont identiques, est-elle judicieuse ? (74) Mais de quel féminisme parlez-vous ? Comme vous le reconnaissez (enfin) en page 75 : il y a différents courants au sein du féminisme, et au sein d’un même courant, différentes théories, par conséquent, en faisant fi de ce facteur depuis le début de votre analyse car cela risquait de desservir votre analyse pour brusquement vous en rappeler à la presque-clôture de votre propos, vous faîtes preuve d’une malhonnêteté intellectuelle flagrante.
Vos propos tels « l’avortement et la contraception ont libéré l’homme et non la femme, ils fragilisent le mariage ou le couple car il sécurise les relations sexuelles extra-conjugales » (76) ou « De même, encourager les femmes à l’ambition de la réussite professionnelle au détriment de leur rôle de mère, n’est-ce pas participer au renforcement de cette course effrénée vers le profit, vers l’intérêt personnel, n’est-ce pas encourager à cette « machinisation » du monde tant décriée à laquelle pousse le capitalisme ambiant ? D’ailleurs, l’on peut aisément imaginer qui, au sein de la famille, en paie le prix fort : les enfants qui n’ont alors aucun des deux parents suffisamment présent pour eux. » (77) sont regrettables et empreints d’une accusation ignominieuse à peine voilée contre la femme coupable d’aspirer à une identité autre que celles d’épouse et de mère.
Enfin, vous tombez plus bas en remettant en cause le bien-fondé du lien entre le féminisme et d’autres causes autres que celles clairement identifiées comme étant celles liées aux femmes (l’écologie par exemple) et questionner l’utilité du féminisme. Pour ma part, en tant que féministe (ne vous en déplaise, je me revendique une conscience politique et me reconnais de la lignée d’autres féministes), j’ai choisi d’allaiter mon enfant pendant 15 mois car cela était ma préférence pour elle, et me permettait de limiter son exposition aux produits chimiques dans les premiers mois de sa vie tout en étant mobile avec elle. Donc oui, j’ai des sensibilités écologiques car je me soucie de cette planète que nous avons en partage, et politiques y compris en tant que féministe panafricaine car je reconnais le travail réalisé par d’autres hommes et femmes africains ou de la diaspora pour que je puisse jouir des droits dont je jouis aujourd’hui.
Nous ne nous tairons pas Dibakana ! Et vous ne nous ferez pas taire !
Puis (in)certitudes ! À la fin de la lecture de cette nouvelle, j’avais des sentiments partagés. Je prends le parti de reposer mon vieux cœur en me rappelant vos propos page 79 : ce n’est que pure fiction.
Merci de nous avoir offert l’opportunité, à moi et à d’autres, de discuter de féminisme en terre africaine du Sénégal, et bien plus encore. Et comme vous l’auguriez dans votre prélude, oui, votre livre n’échappe pas à la polémique. J’attends avec impatience de lire votre réponse (si vous la jugez nécessaire).
PAR LA CHRONIQUEUSE DE SENEPLUS, SALLA DIENG
PAR DEVOIR ET PAR AMITIÉ, (IN) CERTITUDES
EXCLUSIF SENEPLUS - Par devoir de lectrice, et par amitié féministe, je souhaite continuer à vous penser féministe - Voici donc, Ndèye Fatou, mes supputations et mes questions
De toutes les notes de lecture que j’ai eues à faire, celle-ci est de loin l’une des plus déplaisantes. Ndèye Fatou Kane et moi nous sommes connues il y a quelques quatre ou cinq années sur Facebook lorsque nous commentions un post sur… le féminisme au Sénégal. Bien que n’ayant jamais eu l’occasion de nous rencontrer, nous avons échangé quelques messages sur ledit réseau. Y compris à propos du malheur de vivre que j’ai eu grand plaisir à lire. Puis l’annonce quelques mois plus tard de la publication de « Vous avez dit féministe ?» , j’étais si impatiente de lire (enfin) un ouvrage sur le féminisme par une jeune contemporaine que j’ai tout fait pour me le procurer rapidement.
Après la constatation de la brièveté de l’ouvrage qui fait 102 pages hors bibliographie, je me suis délectée de la lecture de votre avant-propos et principalement la mise en contexte historique. Par la suite, je me réjouissais de cette promesse de l’avant-propos très alléchant: « Vous avez dit féministe ? se veut donc une modeste contribution à la cause féministe telle que je la conçois. En ma quadruple identité de Hal-Pulaar, Sénégalaise, Africaine et jeune femmes de la génération »Y ». Comment les luttes féministes portées par des femmes de par le monde, en Afrique, et enfin dans mon pays le Sénégal, ont elles eu et continuent d’avoir une incidence dans ma façon d’appréhender le monde qui m’entoure ? Est-ce que ma perception desdits événements peut être altérée par le fait que je sois une femme ? Comment déconstruire la notion de « genre » qui a quelque peu empiété sur les luttes féministes d’antan, et quelles solutions proposer ? Voilà autant de questions auxquelles j’essaie de répondre tout le long de Vous avez dit féministe ? » (13)
Je me suis rapidement laissée emporter par le brio de vos résumés des quelques ouvrages et extraits biographiques marquants des quatre auteures choisies : Simone de Beauvoir (Le Deuxième Sexe), Hawa Thiam (Parole aux Négresses), Mariama Bâ (Un chant écarlate, et Une si Longue lettre), et Chimamanda Ngozi Adichie (ses ouvrages : Autour de ton cou, L’hibiscus pourpre, et Americanah ; ainsi que ses vidéos : Le danger d’une histoire unique et Nous sommes tous des féministes). Puis au terme du chapitre au titre éponyme de six pages tant attendu de Vous avez dit féministe ? (59-65)…mon excitation s’était éteinte . Mon regard sombre s’est alors promené sur Propos sur le féminisme contemporain (67-77) par… Jean-Aimé DIBAKANA, sociologue et romancier, mais qui est-ce donc ? Pourquoi n’est-il pas co-auteur de l’ouvrage? À la fin de ma lecture de ces 10 pages que j’ai interrompu 1000 fois pour soit réfléchir, taper son nom sur Google, ou essayer de comprendre, j’avais perdu le fil…Je refermai l’ouvrage. (In)certitudes (79-102), la nouvelle qui clôturait l’ouvrage allait devoir attendre! Le lendemain, je relus encore les chapitres précédents avant de me plonger dans (in)certitudes. Puis je refermai l’ouvrage avant de me plonger dans la lecture d’un autre recueil de poésie acheté en même temps et qui me fit beaucoup de bien : « À nos humanités révoltées » de Kiyémis.
Plusieurs mois passèrent, entre la tentation du silence complice mais combien confortable et celle du devoir de réponse, par fidélité à cette cause si personnelle qu’est le féminisme qui m’ a fait vous connaître. Brimant à plusieurs reprises ma franchise spontanée, refrénant mon trop-plein d’entrain contre une nouvelle sagesse, réprimant les mots qui jouaient à saute-mouton pour forcer la barrière de mes lèvres, je préférai le silence. Je trouvai des justifications, des excuses, des opportunités de continuer à me taire : « cet ouvrage est salutaire car il permet le débat sur le féminisme parmi les jeunes générations » ; ou encore « entre féministes, il faut se soutenir ». De plus, il y avait cette note de lecture de Aminata Thior qui résumait déjà assez bien mon sentiment.
L’anglais a cette expression que j’aime car elle me porte : « in my heart of hearts » qui veut dire : « au plus profond de moi ». Au plus profond de moi donc, je savais qu’il me fallait rompre cette tyrannie qui fait que trop souvent, nous hésitons à critiquer, surtout constructivement, car la critique est confondue pour être portée sur une personne et non sur une chose. Et cette chose est ici un ouvrage qui cimente une pensée toujours insaisissable pour moi et censée être articulée dans : Vous avez dit féministe ? Voilà, à moi les incertitudes : Ndèye Fatou Kane, êtes-vous une féministe ? Si oui, de quel féminisme vous réclamez-vous qui nourrit votre « modeste contribution à la cause féministe telle que vous la concevez» dans cet ouvrage? À la fin de sa lecture, je n’ai toujours pas de réponse à ces deux questions. Cet ouvrage veut-il dire : « Vous avez dit féministe ? Mon œil ! » ou « Vous avez dit féministe ? J’en suis une ! »?
N’en sachant toujours rien, je vais vous poser la question directement là où cette conversation a commencé. Sur Twitter. Mais avant tout, ce serait vous manquer de respect que de ne pas me donner la peine de chercher moi-même la réponse dans votre ouvrage que vous vous êtes donnée la peine de produire.
Par devoir de lectrice, et par amitié féministe, je souhaite continuer à vous penser féministe. Malgré tout. Voici donc, Ndèye Fatou, mes supputations et mes questions. Basées sur vos propres mots : Vous avez dit féministe ? (59-65) et je suis tentée aussi de faire une lecture critique des Propos du sieur Dibakana, sociologue et romancier, sur le féminisme contemporain vu que son « analyse » fait quand même 10 pages (67-77) ! Au fil de la lecture de ces 6 pages dans lequel vous articulez votre pensée, j’essaie de vous expliquer Ndèye Fatou, pourquoi j’ai du mal à vous suivre et à vous situer, surtout, et partage avec vous mes questions.
Après la synthèse des quatre chapitres précédents (59-60), vous évoquez la bibliographie qui vous a servie de source (principalement les ouvrages des 4 auteures), ainsi que des liens externes vers des articles ou des vidéos consultés, et un article sur les FEMEN (dont il manque le lien dans la bibliographie) qui vous sert de prélude. Les FEMEN seraient difficilement classifiables et illustreraient par cela même à quel point « le féminisme est travesti » et « n’est pas fédérateur » ? (61) Qu’est-ce à dire ? Pourriez-vous s’il vous plaît préciser votre pensée ?
Puis vous retournez à la raison qui a motivé la rédaction de cet ouvrage : « Une discussion un peu houleuse, un trop-plein d’arguments et une voix grimpant dans les aigus, et on est une féministe ! Dans une époque où compartimenter les individus est une activité fort en vogue, j’ai l’impression que nous assistons à un duel Féministes VS Le reste du monde. » (61) Trouvez-vous péjoratif de vous faire traiter de féministe ? Etes-vous féministe Ndèye Fatou Kane?
Puis vous faites un détour au verset 1 sourate IV intitulée An-Nisa (les femmes) du Coran : « Entendons-nous bien : loin de moi l’idée de me mettre dans une logique de prôner l’égalité homme/femme de manière utopique et de la réclamer à hue et à dia. Mais ne pourrions-nous pas réfléchir à partir de la notion d’individus avant toute chose ? (61) ou encore : « Beaucoup de femmes, qu’elles aient mon âge ou pas, se réclament féministes à tort et à travers. Le débat est faussé à mon sens, car se dire féministe, équivaut à renforcer encore plus la stigmatisation du genre féminin »(62). Donc il ne faudrait plus se réclamer féministe ? Juste se réclamer un individu ? Et renier sa liberté à qui le souhaite de se réclamer féministe en se faisant tribunal du féminisme ?
« Il faudrait s’atteler à une entreprise de déconstruction, en abandonnant toute forme d’affaiblissement. Soyons des femmes, conscientes de notre féminité mais refusons que l’on nous réduisent à cette seule identité. Soyons avant toute chose des individus… » (62) Est-ce cela le changement de paradigme que vous proposez Ndèye Fatou ?
« Beaucoup d’ONG ont instauré une série de programmes axés autour du woman empowerment sous couverts de la thématique du genre,ceci afin de permettre aux femmes d ‘être plus «fortes» en substance. Le débat est faussé selon moi, car il ne faut pas que nous nous placions sur un ring prêtes à en découdre avec les hommes. » (63) Mais que voulez-vous dire ? « Genre », Ndèye Fatou, n’est pas synonyme de « femmes ». De la même manière trouveriez-vous, si vous le souhaitez, des programmes qui s’adressent à promouvoir davantage l’inclusion des hommes, ou des communautés toutes entières, qui sont labellisés sous l’étiquette « genre » je pense qu’il s’agit là d’un détail. De plus, le genre est une notion qui a été contestée et continue de l’être par beaucoup de féministes africaines déjà car ce ne serait pas le principe organisateur de toutes les sociétés.
Après avoir évoqué les années 70-80, vous demandez « Aujourd’hui plus que jamais, qu’a-t-on fait du combat mené par la première vague de féministes sénégalaises ? Quel héritage nous ont-elles laissé ? (…) Il me semble important de nous appuyer sur le parcours de ces femmes de valeur pour prendre nos marque dans la société. » (64) D’accord, cet ouvrage que vous venez d’écrire est important en ce qu’il contribue à mettre en lumière de travail de quatre féministe, mais ce serait bien de citer aussi ces féministes africaines de la 2e , 3e et 4e vague, il y a eu continuité. Donc il faut résumer leur action, à défaut de les détailler. Mais heureusement, nous n’avons pas besoin d’inventer la roue, leur travail a déjà été résumé par ailleurs (comme dans le magazine AWA qui est digitalisé ici ou le site d’African Feminist Forum, à défaut de lire la prolifique production littéraire ou académique sur le sujet ), et nous devons faire l’effort de citer ce travail dans nos références bibliographiques. Par exemple, Mouvements sociaux de femmes de feue Ndèye Sokhna Guèye disponible gratuitement sur le site du CODESRIA : https://www.codesria.org/spip.php?article2397&lang=en ou le féminisme de Fatou Sow par exemple)
« De plus en plus de femmes de ma génération ont fait des études, parcourent le monde et s’intéressent à quantité de sujets ; en somme s’accomplissent personnellement. Donc il nous faut changer de paradigme et sortir de tous ces procédés affaiblissants pour les femmes. » D’accord : Comment ? Que proposez-vous ?
« De plus, j’ai remarqué un désintéressement en ce qui concerne les luttes des femmes. Il est vrai qu’il y a une poignée de femmes de ma génération portant les combats de nos aînées, mais force est de reconnaître que ceux-ci ne sont plus une priorité…une continuité aurait dû être établie, de sorte qu’à l’heure actuelle, l’on s’approprie les luttes de nos illustres aînées, de sorte que jamais, au plus grand jamais, la flamme du féminisme ne s’éteigne ! » (64-65) Mais il y a eu continuité ! Et le passage du flambeau ne se fera pas de gaieté de cœur ou de manière incantatoire sur les réseaux sociaux (seulement), il faut arracher et s’approprier notre part de ce combat, activement (The revolution won’t be televised !).
« L’inclusion des hommes à qui le négativisme entourant le terme féminisme est à imputer. » D’accord pour l’inclusion des hommes, mais le souhaitent-ils tous? Que se proposent-ils d’apporter en tant qu’alliés? Je trouve le terme d’”inclusion” galvaudé car qui le souhaite (homme ou femme) trouvera le moyen d’être utile à une cause. Pas parce qu’un carton d’invitation lui est envoyé pour venir à la table, mais parce que l’ultime objectif du féminisme n’est pas la seule cause féminine, car il est juste utopique de vouloir remplacer une oppression par une autre. La finalité est que toutes les personnes “opprimées” ou “discriminées” en société du fait qu’elles soient nées hommes, ou femmes, qui se réclament comme tels, ou autre, cesse de subir une discrimination basée sur cette identité socialement assignée ou personnellement revendiquée.
« Les enjeux du XXIe siècle autour du féminisme devraient tourner autour d’un changement de paradigme, de façon à ce que chaque fois que le vocable féminisme est prononcé, l’on ne détourne pas la tête… Tel devrait être notre combat, nous jeunes femmes de la génération Y ! » (65) D’accord, encore une fois, comment ? Que préconisez-vous ?
« Tout est question de contexte » je suis d’accord avec ces propos de votre mère, qui font écho aux propos de la mienne et c’est sur cette base que je me permets de ne pas être d’accord avec le sieur Dibakana. Car si l’on suit son raisonnement : « parce que tout est question de contexte », nous africaines, ne méritons pas le féminisme (qu’il définit comme anti-africain) à moins qu’il ne s’agisse parfois du contraire : le féminisme ne nous mériterait pas car nous n’avons pas de problème « de genre » dans nos sociétés.
67-77 : Propos sur le féminisme contemporain : Jean-Aimé DIBAKANA, sociologue et romancier.
Que l’article de Dibakana basé sur idées reçues, accusations sexistes gratuites et clichés figure dans un ouvrage qui traite de la pensée de quatre féministes soulève des questions sur votre motivation. L’article de Dibakana, comme le vôtre choisit de commencer sélectivement par un cliché et un extrême : les FEMEN. Pourquoi choisir de diaboliser le féminisme ? Cet article dès son propos liminaire résout la question à laquelle elle prétend répondre : « Pourtant né au XVIIIe siècle, le féminisme en tant que discours sur les rapports sociaux de sexe en faveur de celui dit « faible » interroge encore sur la structuration et le fonctionnement de nos sociétés. Et ses récentes formes d’expression, telle citée plus haut, sont le signe que les objectifs qu’il s’assigne sont loin d’être atteints, quel que soit le lieu de la planète où l’on se trouve. Dès lors, l’on peut se poser quelques questions : le féminisme sert-il (encore) à quelque chose ? (MAIS OUI monsieur, vu que comme vous le dites dans la phrase précédente, ses objectifs sont loin d’être atteints !) Les valeurs qu’il défend sont-elles universelles ? Aujourd’hui, ses discours ne desservent-ils pas (parfois) les femmes ? » (68)
Pareil dans la section : le féminisme sert-il (encore) à quelque chose ? vous évoquez les droits acquis par les femmes sans pouvoir totalement en jouir ainsi que l’apparition de nouvelles questions sociales… qui vous’amènent à la conclusion p.70 qu’« il semble néanmoins clair que le féminisme en tant que doctrine préconisant l’expression des droits et du rôle des femmes dans la société reste nécessaire ». Mais cela, monsieur vous y avez déjà répondu, donc exercice de style (raté) ?
p.71 Les valeurs qu’il défend sont-elles universelles ?
Cette partie constitue à mon avis, la plus grande insulte aux féministes non-occidentales qui étaient féministes bien avant l’apparition du terme « féminisme » car vous leur reniez par votre complexe d’infériorité puant, le droit et le choix de se revendiquer comme telles parce que soi-disant trop sous-développées (y compris intellectuellement) pour être à même d’articuler une pensée féministe. Vous leur refusez, à ces femmes, et aux alliés qui ont soutenu ce combat en Afrique ou en Asie, leur part d’histoire, leur legs et leur futur. Vous insultez les générations de féministes africaines, musulmanes ou laïques, ou autres qui m’ont inspirée à en être une. Selon vous, « bien qu’ayant également puisé à d’autres sources, le discours féministe est sans conteste un discours européanocentré » ou encore « Concernant leur terrain de revendication, les valeurs féministes ne peuvent s’exprimer que sur des terrains où règne la démocratie, que dans des espaces qui autorisent la liberté de penser et d’agir. On peut difficilement imaginer des femmes s’organisant pour revendiquer des droits à la façon de leurs consœurs européennes en Chine, ou en Corée du Nord par exemple. De la même façon, le féminisme (forcément aussi « activiste », « militant ») suppose une certaine autonomie que permettent notamment des moyens matériels, financiers et bien sûr intellectuels. Est-il possible pour des femmes sans emploi, sans qualification, à la charge totale des hommes de se revendiquer des idées féministes ? C’est le cas de beaucoup de femmes à travers le monde, notamment en Afrique et en Asie. (71)»
De plus, vous postulez que les valeurs féministes véhiculent des valeurs purement européennes sinon occidentales (qu’est-ce que cela veut dire ?), donc incompatibles avec les valeurs de certaines cultures. Par exemple, vous citez le droit à l’avortement, ou le droit de refuser d’être mère qui sont des idées rattachées aux premières vagues de féminisme de la génération de De Beauvoir, (mais aussi par certaines féministes contemporaines), qui a théorisé ses idées dans le contexte d’avant-guerre français dans lequel carrière professionnelle et famille étaient difficilement conciliables. De Beauvoir pouvait-elle de son temps penser qu’il serait possible à Ségolène Royal, mère de quatre enfants de se présenter aux présidentielles ? Pouvait-elle imaginer que quelque années plus tard, le journal AWA parlerait à d’autres femmes, africaines, du sens des responsabilités en milieu professionnel après qu’elles se soient battues pour avoir accès à un emploi salarié ? en 1972(26), Kampoti, la femme sans homme en 1964 (9) ou du choix du mari). Monsieur Dibakana, en sortant ces arguments obsolètes, vous voulez refuser aux femmes comme moi le droit de me revendiquer féministe et d’avoir un ou des enfants parce que je le souhaite. Mais de toute façon, nous n’avons pas attendu des réactionnaires comme vous pour trouver des voies pour concilier nos convictions profondes (idéologiques, religieuses , ou autres) et nos ambitions professionnelles et familiales (pour celles qui en ont). De la même manière (et vous serez étonné, il se trouve des femmes africaines aujourd’hui qui ne souhaitent pas être mères, qui revendiquent le droit de disposer de leur corps et qui ne le seront pas, ne vous en déplaise !). Donc gardez pour vous vos considérations infondées sur le « droit au travail salarié qui n’existe pas « en zone rurale africaine » (72), vos considérations sur le droit à l’éducation scolaire (73) ou au risque des femmes (même non-féministes) qui souhaitent la répartition équitable des tâches de ne pas trouver d’époux (73). Votre discours est englobant et dangereux, c’est le type même « d’histoire unique » contre lequel Chimamanda Adichie met en garde (du moins la Chimamanda d’avant la polémique sur la transsexualité).
« Si lutter pour l’extension du droit des femmes est une démarche louable parce qu’humaniste tout simplement, les moyens et les théories mis en œuvres restent discutables. Déjà, appuyer cette lutte sur l’ambition de gommer les différences « naturelles » entre les hommes et les femmes, de soutenir que les hommes et les femmes sont identiques, est-elle judicieuse ? (74) Mais de quel féminisme parlez-vous ? Comme vous le reconnaissez (enfin) en page 75 : il y a différents courants au sein du féminisme, et au sein d’un même courant, différentes théories, par conséquent, en faisant fi de ce facteur depuis le début de votre analyse car cela risquait de desservir votre analyse pour brusquement vous en rappeler à la presque-clôture de votre propos, vous faîtes preuve d’une malhonnêteté intellectuelle flagrante.
Vos propos tels « l’avortement et la contraception ont libéré l’homme et non la femme, ils fragilisent le mariage ou le couple car il sécurise les relations sexuelles extra-conjugales » (76) ou « De même, encourager les femmes à l’ambition de la réussite professionnelle au détriment de leur rôle de mère, n’est-ce pas participer au renforcement de cette course effrénée vers le profit, vers l’intérêt personnel, n’est-ce pas encourager à cette « machinisation » du monde tant décriée à laquelle pousse le capitalisme ambiant ? D’ailleurs, l’on peut aisément imaginer qui, au sein de la famille, en paie le prix fort : les enfants qui n’ont alors aucun des deux parents suffisamment présent pour eux. » (77) sont regrettables et empreints d’une accusation ignominieuse à peine voilée contre la femme coupable d’aspirer à une identité autre que celles d’épouse et de mère.
Enfin, vous tombez plus bas en remettant en cause le bien-fondé du lien entre le féminisme et d’autres causes autres que celles clairement identifiées comme étant celles liées aux femmes (l’écologie par exemple) et questionner l’utilité du féminisme. Pour ma part, en tant que féministe (ne vous en déplaise, je me revendique une conscience politique et me reconnais de la lignée d’autres féministes), j’ai choisi d’allaiter mon enfant pendant 15 mois car cela était ma préférence pour elle, et me permettait de limiter son exposition aux produits chimiques dans les premiers mois de sa vie tout en étant mobile avec elle. Donc oui, j’ai des sensibilités écologiques car je me soucie de cette planète que nous avons en partage, et politiques y compris en tant que féministe panafricaine car je reconnais le travail réalisé par d’autres hommes et femmes africains ou de la diaspora pour que je puisse jouir des droits dont je jouis aujourd’hui.
Nous ne nous tairons pas Dibakana ! Et vous ne nous ferez pas taire !
Puis (in)certitudes ! À la fin de la lecture de cette nouvelle, j’avais des sentiments partagés. Je prends le parti de reposer mon vieux cœur en me rappelant vos propos page 79 : ce n’est que pure fiction.
Merci de nous avoir offert l’opportunité, à moi et à d’autres, de discuter de féminisme en terre africaine du Sénégal, et bien plus encore. Et comme vous l’auguriez dans votre prélude, oui, votre livre n’échappe pas à la polémique. J’attends avec impatience de lire votre réponse (si vous la jugez nécessaire).
LES TRAVAUX D'HERCULE D'ABDOUL MBAYE
Lutte contre la faim, modernisation de l'agriculture, suppression du parrainage, renforcement des pouvoirs du CSM...le candidat investi ce dimanche sous l’emblème de l'ACT dans le cadre de la présidentielle, a déroulé un vaste programme pour le Sénégal
SenePlus publie ci-dessous, le discours d'investiture prononcé par Abdoul Mbaye, candidat de l'ACT à la présidentielle, ce dimanche 30 septembre. Il y détaille les grandes lignes de son projet politique pour le Sénégal.
"Chers invités,
Chers compagnons,
Chers compatriotes résidant au Sénégal et à l’étranger,
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Le deuxième Congrès du Parti de l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail, qui se tient si opportunément en ces temps cruciaux de l’histoire politique et sociale de notre pays, réunit des femmes, des hommes et des jeunes du Sénégal, ayant en partage l’adhésion aux valeurs supérieures et aux principes forts qui ont toujours imprégné notre marche vers la liberté, le travail, le progrès et la solidarité.
Aussi ne surprend-il personne que d’autres femmes, d’autres hommes et d’autres jeunes appartenant à d’autres groupements politiques mais attachés comme nous tous à ce corpus de valeurs et de principes, nous fassent l’honneur et l’amitié de venir partager avec nous, ces grands moments de démocratie de masse.
C’est pourquoi, je voudrais très chaleureusement saluer la présence de tous ces éminents dirigeants et responsables de l’Opposition sénégalaise, des mouvements citoyens partenaires qui ont tenu à marquer de leur présence cet important moment. Leur présence à nos côtés, est symbolique et en même temps significative de l’âpreté et de l’urgence des enjeux qui interpellent tous ceux qui sont soucieux du présent et du devenir de notre cher pays.
En effet, des pratiques politiques étalées dans la durée sur plus d’un demi-siècle ont largement contribué à abîmer de façon progressive et insidieuse, le socle de nos valeurs. Elles l’ont fait à un point tel que la restauration de ces dernières, plus qu’un impératif politique, est devenue une forte exigence citoyenne, sociale et identitaire pour ne pas perdre notre âme et voir notre peuple voué à la décadence.
La restauration de ces valeurs concerne aussi bien la sphère politique que sociale. Elle doit être comprise comme correspondant à une requête des populations sénégalaises en situation d’éveil de conscience politique après plusieurs années de vécu politique et le passage de deux alternances. Les valeurs les plus malmenées ces dernières années, et en particulier par le présent régime, sont : la vérité, l’amour de la patrie, le respect de la parole donnée et de l’engagement public et solennel, la justice (à comprendre au sens large comme fin des injustices de toute sorte), le respect du principe de solidarité dans la réalisation de la croissance économique et dans son partage rationnel, juste et efficient.
Ici, sont donc réunis des hommes et des femmes, parmi les plus résolus des combattants qui se sont dressés mus par le dessein de porter et diriger la lutte pour défendre et préserver tous les acquis pour lesquels, des générations de Sénégalaises et de Sénégalais n’ont jamais ménagé leur sueur, quelquefois leur sang et quand il le fallut aussi, leur vie.
Ce sont les vertus de jom, de ngor, de mougne, assises sur la foi profonde ancrée dans nos coeurs et nos esprits ainsi que sur un remarquable consensus politique, oeuvre d’hommes et de femmes de grande qualité, qui ont fait que notre pays a toujours évolué en paix et en totale harmonie. Quelques furent les soubresauts, le Sénégal pouvait compter sur le comportement de dirigeants chevaleresques qui savaient, au nom de l’éthique, jusqu’où ne pas aller.
Quand donc des travers mesquins, opportunistes, rétrogrades et exclusivistes, visent à travestir la loi, à instrumentaliser des pouvoirs - singulièrement le judiciaire - à brimer et à humilier des adversaires, à chercher à mettre une chape de plomb sur les hommes libres et sur la société, juste pour permettre à la famille et au clan d’accumuler, d’encore accumuler, de toujours accumuler au détriment d’un peuple, presque devenu exsangue ; alors, face à la gravité d’une telle situation qui peut durablement affecter l’équilibre de notre pays aujourd’hui et demain, oui, ces hommes et ces femmes ou leurs successeurs, comme des millions de Sénégalais doivent se lever, et debout faire barrage à la mise à mort de notre grand et beau pays pour des intérêts bassement matériels, personnels et claniques.
Mesdames, Messieurs les chefs des partis politiques de l’opposition, le seul fait de ne pas être associé à la gestion de l’État n’est pas à l’origine de notre cheminement ensemble. C’est une lutte pour la défense de la démocratie au Sénégal et un combat pour empêcher la spoliation des ressources nationales tant financières que naturelles qui nous ont conduits à apprendre à mieux nous connaître et à être ensemble. Merci encore d’être présents à cet important moment de la
vie de notre parti.
Nous ne le répéterons jamais assez : le principal indicateur de l’existence d’une véritable démocratie se trouve dans la force de l’opposition qui y existe. Tout comme d’ailleurs la réalité d’une dictature naissante ou confirmée, s’apprécie en fonction de l’attitude qu’elle réserve à son
opposition.
La force d’une opposition repose essentiellement sur son regroupement et son unité lorsqu’il faut défendre les fondamentaux démocratiques. Dans des républiques faibles ou affaiblies comme la nôtre, ce cheminement ensemble est alors le meilleur rempart pour s’opposer aux tentatives d’instauration d’un pouvoir absolu, de confiscation de la volonté populaire par l’organisation d’élections manipulées et truquées, et de vol du bien public.
Je me réjouis de constater qu’au Sénégal ce sont bien ces préoccupations qui nous réunissent sisouvent depuis l’an 2016, première année noire de la vieille démocratie sénégalaise.
Mesdames, mesdemoiselles, messieurs les représentants des partis et mouvements alliés de l’ACT et chers compagnons, je vous confonds dans les mêmes salutations. Nous partageons des valeurs, et nous avons la même conception de la politique. Nous voulons pour notre pays que désormais, à la faveur d’une prochaine alternance, une véritable rupture se crée pour offrir une solution à l’exigence de restauration morale dont notre peuple a soif. La politique au service de
l’intérêt général et non plus au service d’une personne, d’une famille, d’un clan, d’un parti constitue le socle de notre engagement en politique. La politique autrement.
Mesdames, mesdemoiselles, messieurs,
Soyez chacun et tous remerciés de votre présence, de votre écoute et de votre engagement.
Notre premier engagement était, est et restera celui de demeurer fidèle à notre parole donnée.
Nous faisons et ferons preuve de constance dans son renouvellement.
Nous l’avions exprimé lors de notre décision d’entrer en politique en 2016 lorsque les premiers compagnons de l’ACT nous avaient fait l’honneur de nous confier la direction de notre parti.
Nous ne prendrons que des engagements que nous nous soucierons de respecter et de faire respecter. Nous redonnerons à la parole politique le respect qu’elle doit susciter lorsqu’elle s’exprime sous la forme d’un programme de parti ou de coalition de partis ; lorsqu’elle est
propos d’un leader politique dépositaire de la confiance des membres de son parti ou de la coalition qui le soutient.
Le « wax waxeet », presque devenu une norme de la pratique politique au Sénégal, doit disparaître de nos moeurs politiques.
Les Assises nationales ont été trahies par certains de ses signataires et l’esprit du 23 juin par plusieurs figures politiciennes participant aux manifestations.
Le programme Yoonou Yokete a été vite versé aux oubliettes, en même temps que les slogans forts qui nous ont fait rêver d’une rupture véritable en 2012 ; rappelons « la gestion sobre et vertueuse des affaires publiques » ou « la patrie avant le parti ».
Or l’Histoire nous enseigne que la paix sociale craint les espoirs déçus. C’est pourquoi nous avons pris l’engagement de ne créer l’espoir dont notre peuple a grand besoin que par undiscours de vérité. Et la vérité en politique est d’abord dans le parler vrai consistant à ne dire le possible ; elle est ensuite dans le respect des engagements pris. A l’opposé, le mensonge et la trahison commencent avec le reniement d’engagements rendus publics sur la base desquels le citoyen vous avait attribué le bénéfice de son vote.
L’heure est venue de créer la rupture avec l’habitude devenue insistante de la parole non respectée. 2019 devra être une année d’alternance par sa quête de porteurs de paroles de vérité, par la sanction de ceux qui se seront singularisés par reniements et mensonges. C’est à ce prix que la démocratie sénégalaise aura enfin réussi un saut qualitatif digne de son histoire. Un saut qui la libérera des rets dans lesquels la retiennent les politiciens professionnels de notre pays depuis de trop nombreuses années.
Car que l’on ne s’y trompe pas : un engagement de nature politique est pris pour gagner la confiance populaire ; une fois ce but atteint, son reniement a pour rationalité de prendre ce qui appartient au peuple au profit de l’auteur de l’engagement, de sa famille, de son clan. Il ne s’agit point d’un mensonge gratuit ; mais plutôt planifié et associé à de la spoliation. Il s’agit de parjure.
Nous avons cru à « la patrie avant le parti ». A l’inverse, la politique mise en oeuvre a profité à la famille, puis au clan, confisquant ressources naturelles, deniers publics, fonctions de responsabilité, emplois dans le secteur public ; ne laissant que portions congrues et pauvreté au reste de la nation.
Souvenez-vous des propos qui furent miens le 14 mai 2016 au moment du lancement des activités de l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail : « L’A.C.T. invite avec empressement les Sénégalais à cultiver et vivre intensément quatre amours : l’amour de la patrie, l’amour des lois, l’amour du travail et l’amour de ses
semblables.
L’amour de la patrie, qui nous fait placer ses intérêts au-dessus de tout autre intérêt.
L’amour des lois, qui nous les fait respecter, qu’elles nous soient favorables ou pas, pourvu
qu’elles soient justes et égales pour tous.
L’amour du travail, qui nous mène tous à l’excellence et à la prospérité.
L’amour de ses semblables, qui nous fait détester ce qui les avilit et aimer tout ce qui les grandit. Les antivaleurs avilissent, les valeurs grandissent ».
J’insiste aujourd’hui sur celui de sa patrie (et de ses semblables, soit donc de son peuple).
• Autant que vous le pouvez, décidez de la servir et de contribuer à sa défense contre l’ennemi de l’extérieur mais surtout de l’intérieur ; car ce dernier, oeuvrant contre l’intérêt général, la met en danger de perte de cohésion et de ciment ;
• Aimer sa patrie, souhaiter la servir, c’est s’efforcer d’y créer des emplois ;
• Aimer sa patrie, c’est faire preuve de civisme et de citoyenneté, accepter de s’impliquer dans des actions citoyennes, d’aider autour de soi. Il n’y a pour se faire ni toujours besoinde compétences particulières, ni non plus de moyens financiers ;
• Aimer sa patrie, c’est toujours privilégier l’investissement chez soi plutôt qu’en pays
étranger ;
• Aimer sa patrie, lorsqu’on est décideur, c’est privilégier l’économie nationale lors des attributions de marché. C’est oser « le Sénégalais d’abord »
• Aimer sa patrie, c’est oser réviser notre conception du développement économique qui aujourd’hui privilégie l’appartenance des économies nationales à un monde de libre échange déséquilibré.
Aimer sa patrie, aimer son peuple, c’est d’abord être à son écoute pour entendre ses peines et réfléchir avec lui sur les possibles solutions, les urgences et les priorités. Mes nombreuses tournées, les échanges au sein des multiples rencontres citoyennes organisées par le parti, permettent de retenir que notre peuple refuse désormais les injustices identifiées comme :
• Le recours à l’arbitraire,
• Une justice à deux vitesses,
• Les passe-droits partout,
• La corruption petite et grande généralisée,
• Les avantages et privilèges décidés en fonction d’une appartenance à une famille, à un parti, à un clan.
Notre société rejette également l’enrichissement rapide, visible, ostentatoire et insultant né de l’activité politique. Elle est de plus en plus consciente qu’il provient d’une confiscation et du vol du bien commun.
Elle hurle son besoin de confort et de revenu familial minimum par le travail et l’emploi, d’eau potable, d’électricité à des prix abordables, d’éducation et de formation adaptées débouchant sur de l’emploi possible, de santé accessible, de sécurité, etc.
Aux gouvernants de répondre à ces requêtes et de trouver solutions à ces besoins. Dans le rythme possible, mais sans relâche et avec obstination. Le choix des premiers combats et celui de leur intensité dépendent de l’identification des priorités pour notre Nation. Toute politique économique se construit à partir de priorités. Nous proposons les suivantes comme celles du Sénégal :
• L’éradication de la faim
• La lutte contre l’extrême pauvreté.
• Et la transition vers la manufacture.
C’est autour de ces priorités que l’accélération de la croissance économique du Sénégal sera organisée qui devra se traduire par une amélioration des revenus et des conditions de vie des citoyens sénégalais, et non par des taux de croissance et autres statistiques, trop souvent mensongers. Ces priorités ne doivent pas être perçues comme des objectifs modestes car il n’y aura pas de limites à la recherche d’un mieux vivre des Sénégalais. Leur choix doit cependant traduire de
manière très nette notre souci de ne plus tolérer la faim et l’extrême pauvreté dans un pays ayant bientôt 60 années d’indépendance. Autour d’elles se construira une économie de croissance et de résilience face aux chocs externes et notamment climatiques.
La persistance de la faim et de l’insécurité alimentaire dans notre pays, qui pourtant prétend à l’émergence, est inacceptable, intolérable. C’est le signe le plus révélateur de l’échec de son développement.
Les moyens de lutte resteront certes l’action humanitaire. Elle sera renforcée sans honte, sans déni mensonger non plus. En associant les femmes et les jeunes dans l’identification des bénéficiaires. En veillant à la plus grande transparence dans les opérations de distribution et de répartition des vivres et soutiens afin d’empêcher un détournement de l’aide au profit des autorités coutumières, administratives ou politiques, ou de la bourse familiale à des fins politiciennes.
A cette action humanitaire, nous associerons sans délai aucun, une action dans la durée de recherche de résilience ; cela débouche sur le haut degré de priorité à donner a développement de l’agriculture sénégalaise.
Les grands principes de notre démarche tourneront définitivement le dos à cette traditionnelle approche visant la recherche effrénée de productions à accroître (avec tous les risques de pertes de production, de leur valorisation insuffisante, de l’absence de leurs déplacements optimum vers les centres de consommation notamment urbains). Ils seront les suivants :
• Celui d’une approche filière « de la fourche à la fourchette » mettant en relation, d’une part les productions existantes, les productions à développer et les productions à créer, et d’autre part les marchés locaux, les marchés nationaux, les marchés sous régionaux et d’exportations lointaines.
Une approche intégrant la recherche de qualité des productions et les éléments de logistique et de marketing.
• Une approche par la recherche du relèvement des rendements. La recherche de résilience dans un contexte d’extension de l’urbanisation qui réduit les superficies consacrées à l’agriculture et crée de l’exode rural, exige un accroissement des rendements et une intensification de l’agriculture. Les moyens en seront :
• le recours à des intrants de qualité en impliquant les coopératives de producteurs et en leur laissant le choix de leurs fournisseurs (en abandonnant bien évidemment le système actuel par lequel l’État choisit lui-même les fournisseurs et les produits sur fond de clientélisme et de corruption) ;
• le recours systématique à des semences certifiées et le contrôle de la qualité des engrais et de leurs conséquences sur l’environnement ;
• le renforcement de l’encadrement des producteurs par le conseil, et par l’utilisation
des medias et de l’e-conseil ;
• la promotion de relations réfléchies et d’intérêt mutuel entre les exploitations familiales et les grandes exploitations à chaque fois que cela s’avère possible ; en
capitalisant sur les leçons positives retirées des exemples de la tomate et du coton au Sénégal, ou de best practices identifiées hors de nos frontières.
• La maîtrise de l’eau pour ne plus dépendre de la seule pluviométrie, et faire durer l’essentiel de l’activité agricole au Sénégal au-delà de 2 à 3 mois par an.
La véritable résilience contre la faim ne saurait privilégier l’arrimage d’une agriculture au commerce mondial, encore moins en faire dépendre l’alimentation d’un peuple. C’est pourquoi au-delà d’une approche globale nous construirons autant d’autosuffisances que possibles dans le* cadre de projets spécifiques. Ils concernent :
i)- la tomate (tomate fraîche, et concentré de tomate);
ii)- le maïs, et en premier lieu la part nécessaire à la production des aliments pour bétail, élément important de la compétitivité de notre élevage ;
iii)- les moutons de tabaski,
iv)- l’autosuffisance pourra aussi être établie pour le riz entier dont les excédents seront exportés afin de rechercher un équilibre de la balance commerciale pour cette céréale ;
Pour ce qui concerne la pêche :
i)- priorité sera donnée à la pêche artisanale, et sa gestion par octroi de licences de pêche et prise en compte des repos biologiques à observer afin de permettre le renouvellement des espèces;
ii)- la lutte contre le pillage de nos eaux par moyens satellitaires de surveillance et le renforcement de notre marine par l’acquisition de navires garde-côtes relèvent de questions de souveraineté et d’absolue priorité; iii)- les négociations d’accords de pêche au profit des pêcheurs sénégalais avec nos voisins immédiats (Mauritanie, Gambie, Guinée Bissau, Guinée Conakry) seront à chaque fois engagées dans le respect des intérêts réciproques en jeu. Un gros effort d’explication et de justification sera déployé en direction de nos ressortissants pour amener au respect des lois des pays voisins mais aussi celles du Sénégal;
iv)- La réduction drastique et la gestion très contrôlée des licences de pêche délivrées à des navires étrangers seront des axes majeurs de notre politique de pêche;
v)- l’accroissement de la part de plus-value locale par la transformation des produits frais sera recherché, et le débarquement obligatoire d’une partie des pêches effectuées par les navires étrangers y contribuera ;
vi) – une grande importance sera donnée au développement de la pisciculture comme réponse au plafonnement des prises de la pêche hauturière.
De même, Les réformes qui seront engagées pour assurer le développement de l’élevage correspondront à une véritable révolution. Elles viseront :
i) - la réduction progressive de la transhumance devenue incompatible avec la disparition de pâturages libres, et l’exigence d’une viande de qualité ;
ii)- la modernisation de l’élevage par la stabulation et la culture de plantes fourragères.
En ce qui concerne l’aviculture, la mise en oeuvre d’un programme rigoureux de constructiond’une compétitivité au profit du consommateur sénégalais permettra de la rendre plus concurrentielle face aux importations. L’objectif est donc double : i) d’une part protéger le consommateur sénégalais contre des prix excessifs par rapport aux normes mondiales et accroître la consommation de cette viande, ii) d’autre part résister par des prix concurrentiels aux importations de ce type de viande qui seront toutefois soumises à des contrôles qualité rigoureux.
Dès lors que nous avons retenu d’ériger la lutte contre la faim en priorité ayant rang de sécurité nationale, nous mettrons en place :
• Des avantages fiscaux très particuliers pendant 5 années renouvelables (réservés aux produits du cru et issus de la transformation artisanale par des groupements de femmes) : l’absence d’imposition sur les bénéfices sera totale.
• Une protection douanière, toutefois limitée dans la durée pour éviter la constitution de rentes locales aux dépens du consommateur sénégalais.
• Une aide à la commercialisation des productions prenant principalement la forme d’une assistance pour la mise en place de coopératives et l’accès aux marchés locaux, nationaux, sous régionaux et internationaux (constructions de halles-loumas ; facilitations de participations à des foires, etc.)
De cette phase de notre programme reposant sur la lutte contre la faim par le développement de l’agriculture, nous attendons :
1. Le développement des revenus dans les zones rurales qui sont celles de plus grande pauvreté,
2. La réduction du déficit de la balance commerciale et donc des paiements du Sénégal ; il en résultera une économie en devises,
3. La création d’emplois, notamment par une meilleure gestion de projets tels les Domaines agricoles communautaires et les Villages du millénaire,
4. La réduction de l’exode rural et de l’émigration,
5. Et même le retour vers la terre et le désencombrement de certains centres urbains.
Notre projet pour l’agriculture sénégalaise repose également sur des programmes et projets essentiels, identifiés comme prérequis ou corollaires à sa mise en oeuvre. Parmi eux :
1. La réforme foncière et l’aménagement du territoire doivent conduire à la définition de terres agricoles inconstructibles (par exemple la sauvegarde de ce qui reste de la zone des Niayes, la préservation de terres dédiées à l’agriculture autour des villages avec définition des zones d’extension de l’habitat, etc.),
2. Un programme de reboisement par le nouveau service civique national en particulier avec arrêt de la coupe de bois excepté dans le cadre d’un reboisement organisé et contrôlé. L’arbre devra désormais être cultivé s’il doit être coupé ;
3. Le recensement exhaustif de certaines espèces d’arbres à travers tout le territoire dans le cadre de programmes conçus pour offrir de l’activité à la jeunesse, également dans le but de protéger certaines espèces « utiles » telles le Baobab.
Sénégalaises, Sénégalais,
L’organisation du développement agricole de notre pays engendrera le recul de la pauvreté dans les zones rurales. Mais vous n’ignorez point que l’échec du développement économique du Sénégal ne réserve pas la pauvreté aux seules zones rurales. Elle est également très présente dans les zones urbaines et semi-urbaines où elle sera combattue par la création d’activités et d’emplois. Elle le sera par notre conception de l’émergence que nous ne faisons pas reposer sur une logique de grands projets ayant le défaut d’être gourmands en ressources budgétaires et d’emprunt d’une part, et aussi celui de privilégier leur réalisation par des entreprises étrangères d’autre part.
Nous construirons l’émergence du Sénégal autour d’une transformation de la structure de son économie, en faisant évoluer son artisanat vers la semi-manufacture, puis la manufacture enfin l’industrie.
Les secteurs devant accueillir la croissance sont identifiés comme ceux déjà fortement utilisateurs de main d’oeuvre, capables de productions de qualité, renfermant des processus de formation par l’apprentissage et susceptibles de renforcement.
L’émergence passe par une transformation structurelle d’une économie. Elle est celle du constat de son évolution vers une économie de manufacture, de production de biens et services contenant davantage de valeur ajoutée pour couvrir des besoins nationaux et
alimenter des exportations.
Le Sénégal n’est pas encore entré dans ce processus vertueux de son économie qui seul peut être à l’origine de son réel développement économique et social.
Force est de constater que l’outil industriel du Sénégal, qui fut leader au niveau de l’Afrique de l’Ouest au moment des indépendances, a reculé au fil des années, et a même parfois été détruit. Quatre années de mise en oeuvre du PSE (Plan Sénégal Émergent) n’ont rien changé à ce grave échec. L’économie sénégalaise reste dominée par les secteurs primaire et tertiaire. Sa croissance serait essentiellement le résultat de progrès enregistrés dans la production de cultures vivrières
autoconsommées, mais aussi de l’exportation d’or et de produits halieutiques frais. La part de valeur ajoutée locale est toujours minime.
Le Sénégal dispose pourtant d’un artisanat ancien et de qualité en mesure d’évoluer vers la semi-manufacture puis la manufacture. Il s’agit en particulier des métiers de la métallurgie, d’orfèvrerie, du bois, de la cordonnerie, de la confection, de la mécanique, de la transformation des céréales locales. Le meilleur indicateur du dynamisme de l’artisanat sénégalais est sa capacité à exporter ses compétences hors du territoire national.
L’artisanat est en outre le principal pourvoyeur d’emplois au Sénégal. Il ne parvient cependant pas à organiser sa mutation vers un niveau de production qui serait
synonyme d’entrée dans la semi manufacture ou dans l’industrie. Cela est la conséquence d’un manque de vision des gouvernants, qui réduisent l’artisanat à une production de pièces d’art pour touristes, alors qu’il est la principale force de production de notre pays. L’artisanat n’est pas soutenu. Les gouvernants ont par contre fait le choix et l’erreur de s’enfermer dans une logique de grands projets satisfaisant leurs égos et propices à favoriser la corruption.
Pour organiser la mutation de l’artisanat du Sénégal distinguons des mesures à caractère général, de quelques mesures spécifiques à des secteurs sélectionnés.
1. Sans une source d’énergie compétitive à l’échelle mondiale, une industrie de base ne peut se développer. Sa productivité reposera donc sur une réduction très importante du coût de l’électricité, et en particulier celui de la moyenne tension. La référence visée pour le coût de l’électricité devrait être de moins de 10 c USD/kWh.
2. Dans l’attente de pouvoir le faire au bénéfice de tous les espaces géographiques, il conviendra d’en réserver le bénéfice sous forme de subvention à des espaces constitués « Villages des métiers ».
3. La productivité dépendant de la formation de la main d’oeuvre, la formation professionnelle sera développée en soutien à l’apprentissage qui est pratiqué au Sénégal avec une certaine réussite. La formation continue sera également organisée afin de permettre une mise à niveau des artisans dans le cadre de l’évolution de leurs métiers à l’échelle internationale, en rapport avec celle de la demande internationale puisque le marché international restera une cible recherchée.
4. La formation par apprentissage donnera lieu à des certifications afin de pouvoir permettre d’identifier de manière précise la traçabilité de l’apprentissage dont aura bénéficié l’apprenti à défaut de pouvoir disposer d’un diplôme.
5. Des zones de production artisanale, dénommées « Villages des métiers » et spécialisées dans des productions particulières, seront créées près de voies de dégagement, ou dans des espaces réservées aux PME, PMI. Elles seront principalement zones de production,
mais également de vente dans des espaces dédiés.
6. Dans ces zones spécialisées, les artisans concernés pourront bénéficier au moins:
• D’une électricité subventionnée,
• D’une formation professionnelle complémentaire,
• D’un équipement lourd partagé, loué au temps d’utilisation par les usagers et ayants droit,
• D’un atelier partagé de stylisme et design,
• D’une information sur les appels d’offres, notamment ceux de la commande publique,
• D’un conseil marketing partagé,
• D’un guichet bancaire pour crédits permettant des acquisitions d’outils et de petits matériels individuels ; également pour les cautions et financement permettant la participation à des appels d’offre, notamment ceux portant sur la demande publique ,
• D’un effort important consacré à la mutualisation de la satisfaction des grosses commandes publiques ou privées basées sur la sélection des producteurs et la
définition des commandes par un référentiel technique précis,
• D’une centrale d’achat pour les matières premières et intrants, tenue par leur association constituée, ou la mise en place de systèmes de caution auprès des
grossistes vendeurs des matières premières pour garantir l’existence d’économies à l’achat,
• D’un centre d’exposition et de vente à la clientèle (n’excluant pas leurs ventes en
des points extérieurs),
• D’une mutuelle de santé constituée par les artisans installés et d’une protection sociale par la micro-assurance.
7. Dans toute la mesure du possible, et dans l’optique d’une recherche d’optimisation de productivité, des zones d’habitat seront réalisées non éloignées des villages de métiers. Cela concourt aussi à une meilleure productivité (exemples des usines en Chine avec dortoirs pour ouvriers).
8. Des cycles de formation professionnelle par métier seront mis en place avec acceptation d’apprentis dans ces cycles. Une place importante y sera donnée à la formation en langue nationale. Cette formation devra donner lieu à la délivrance de diplômes (CAP, etc.).
9. Dans les quartiers et villes où des artisans bénéficient d’autorisation d’installation et de vente de produits, l’incertitude liée à l’occupation de ces espaces sera levée. Il appartiendra aux communes concernées d’embellir les lieux d’installation grâce à un mobilier urbain approprié en rapport avec les règlements de taxes municipales perçues à cet effet.
10. Dans le cadre d’une coopération bilatérale, la délocalisation de semi-manufactures vers le Sénégal sera négociée.
11. La participation à des foires spécialisées à travers le monde sera organisée avec le concours de l’État afin de permettre aux artisans d’identifier les nouvelles machines et nouvelles technologies en rapport avec leurs métiers.
12. Le soutien de l’État aidera à la recherche et à l’identification de possibilités d’intégration dans des processus de chaînes de valeur mondiales (fabrique de lacets pour des chaussures, de pièces pour produits par grandes marques, etc.)
13. Les professionnels du secteur concerné organiseront avec l’aide de l’État des concours réguliers pour désigner les meilleurs artisans dudit secteur.
14. La protection de l’artisanat et des manufactures naissantes sera assurée par une politique douanière appropriée.
15. La création de « labels Sénégal » certifiés par des processus qualité sera organisée avec le concours de l’État.
16. La recherche systématique de la satisfaction de la commande publique par des productions nationales reposera sur l’organisation de leur éclatement et le règlement prioritaire dans les délais les plus courts possibles des très petites entreprises et PME nationales par la trésorerie nationale.
Abordons à présent quelques propositions spécifiques concernant l’orfèvrerie
1. L’État mettra tous les moyens nécessaires afin de faciliter la création par le secteur privé d’une industrie d’affinage de l’or pour accroître le niveau de valeur ajoutée locale associée à la filière or. Cela permettra d’assurer la disponibilité d’or traité pour l’orfèvrerie locale et pour l’ensemble de la sous-région. Les quantités d’or nécessaires à la viabilité de cette industrie d’affinage lui seront rendues disponibles par la loi, obligeant la livraison d’un pourcentage minimum des productions locales à cette industrie. Les prix de cession à l’industrie d’affinage et ceux de l’industrie d’affinage aux artisans de l’or seront ceux pratiqués à l’international pour ne léser aucun des opérateurs concernés.
2. Un des « Villages de l’or » créés en application de la démarche générale retenue pour la mutation de l’artisanat du Sénégal sera élevé au statut de véritable marché de l’or de l’Afrique de l’Ouest ; il sera rendu particulièrement attrayant et sécurisé pour les touristes et tout acheteur de bijoux traditionnels ou modernes.
3. Le meilleur matériel de production de bijoux par des artisans sera installé en partage pour les artisans membres inscrits.
D’autres propositions sont relatives à la menuiserie
1. En relation avec les associations d’artisans concernés, l’État veillera à faire distinguer l’ébénisterie utilisant du bois noble et plein d’une part, et la menuiserie simple utilisant les agglomérés de bois recouverts de feuilles de bois noble. En particulier les protections douanières des deux types de production seront différenciées.
2. L’État aidera à la mise en place d’industries permettant au moins trois productions essentielles en amont des « Villages de menuiserie ». L’une devra permettre aux artisans de disposer de bois sec. Une autre devra permettre de compacter les morceaux de bois pour la fabrication d’agglomérés de bois. La troisième permettra aux artisans de disposer de feuilles de bois nobles pour la réalisation de placages de qualité.
3. Les artisans spécialisés dans la production de matériaux en bois pour les constructions seront classés selon leurs capacités identifiées par leurs associations une fois leur compétence et la qualité de leurs productions reconnues. Selon ce classement, la
commande publique pourra être éclatée entre plusieurs artisans producteurs dans le respect de principes garantissant une harmonisation du produit recherché, constatée par une réception technique associant délégués du maître d’ouvrage et représentants des associations.
La promotion de la cordonnerie et de la maroquinerie a également besoin de propositions spécifiques
1. L’État aidera à la mise en place de tanneries, et imposera le maintien pour l’artisanat local de l’essentiel des peaux traitées. Il conviendra de réfléchir à la taxation de l’exportation des peaux brutes sans faire subir de préjudice aux vendeurs par le respect des prix à l’international.
2. L’artisanat de coloration des peaux sera de préférence laissé aux groupements de femmes.
3. Un rapprochement sera organisé entre les associations de cordonniers et l’industrie plastique sénégalaise afin de déterminer les possibilités pour cette dernière de subvenir aux besoins en produits pvc de l’artisanat de la chaussure du Sénégal. La logique est celle de la constitution de banques de sous-traitance locales, à étendre du reste à d’autres secteurs.
4. L’État aidera à la participation d’artisans cordonniers sélectionnés (parce que lauréats de concours organisés) à des foires internationales de chaussures avec présentation d’articles en rapport avec les besoins de la demande internationale de saison. Les commandes obtenues seront ensuite réparties entre les producteurs sélectionnés parce que qualifiés.
La confection apparaît comme l’un des secteurs les plus pourvoyeurs d’emplois au Sénégal. Ce secteur mérite donc des propositions spécifiques
1. Les possibilités de transformation locale du coton sénégalais ou de celui produit dans la sous-région feront l’objet d’une étude approfondie afin d’accroître la part de valeur ajoutée nationale dans la filière coton. L’écueil que constitue le coût de l’électricité étant particulièrement important, une solution spécifique sera apportée à ce défi.
2. Favoriser la manufacture de confection, c’est mettre fin à une taxation trop lourde du tissu qui en est la matière première et qui n’a pas réussi à protéger une industrie textile sénégalaise.
3. A la suite d’une sélection rigoureuse, toute commande publique de tenues de travail civiles et militaires devra obligatoirement être réalisée par des artisans locaux. De même l’État apportera tout son soutien pour que des artisans sénégalais puissent gagner des
marchés internationaux, notamment lancés par des entreprises américaines dans
l’objectif de pouvoir bénéficier des dispositions prévues par l’AGOA.
4. Afin de pouvoir faire face à des commandes volumineuses, les industries locales existantes ou spécialisées à créer seront utilisées pour le travail de coupe. Les
commandes seront ensuite réparties entre les artisans pour le montage. La réception sera faite dans le respect de normes de qualité imposées et communiquées à l’avance.
5. L’État aidera à la constitution d’un label « made in Sénégal » visant à faire du Sénégal le principal lieu de confection du vêtement traditionnel africain avec pour marchés les pays voisins du Sénégal, mais aussi le Nigeria et la clientèle constituée par la diaspora noire.Pour ce faire, Dakar sera érigé en grand lieu de la mode africaine par l’organisation de défilés de très haute facture avec le soutien de l’État, orientés vers la conquête de marchés de grosse production.
6. L’État s’engagera résolument dans la sauvegarde du savoir-faire ancestral du tissage de pagnes : identification et recrutement de formateurs, aide à la fabrication de métiers éventuellement légèrement modernisés pour permettre la production de bandes plus larges. Il appartiendra aux stylistes de les réutiliser pour les besoins de mode, en particulier des saisons fraîches.
Évoquons quelques propositions concernant les métiers du fer
1. Des dispositions particulières seront prises pour débarrasser le Sénégal des déchets de ferraille omniprésents dans nos villes et villages, avec mise des coûts des enlèvements à la charge des industriels traitant la ferraille récupérée ou ses revendeurs.
2. L’écueil que constitue le coût de l’électricité étant particulièrement important, une solution spécifique sera apportée à ce défi afin de permettre la compétitivité des fours nationaux de traitement de ferraille. L’exportation de ferraille ne sera autorisée qu’après satisfaction des besoins des manufactures locales. Les exportateurs ne seront pas lésés car les prix d’achat par les fonderies locales seront déterminés en fonction de leurs niveaux à l’international.
3. Les marchés spécifiques du mobilier urbain seront valorisés et organisés afin de pouvoir être satisfaits par les artisans du fer (kiosques, abris divers, lampadaires de rue, glissières des routes, etc.)
4. Un programme spécifique de fabrication locale du petit outillage des mécaniciens et des ouvriers sera développé pour créer une autosuffisance en la matière en moins de 2 années.
5. En rapport avec l’exemple des réalisations chinoises, un programme de production locale de petites machines d’exploitation agricole sera mis en place, associant métiers du fer et artisans de la mécanique.
Les propositions spécifiques à la transformation des céréales locales et des produits du cru visent à sécuriser et à développer une activité très prisée par les femmes sénégalaises
1. L’intégration des activités de production agricole et de transformation des productions sera encouragée et favorisée comme moyen d’accroître la productivité des groupements de femmes intervenant dans le secteur, notamment en milieu rural.
2. Ces groupements organisés recevront un traitement particulier dans tout processus de distribution d’intrants associé à la préparation des campagnes agricoles.
3. Des micro-financements sans orientation politicienne seront mis en place pour permettre l’équipement des groupements de femmes productrices et transformatrices en matériel agricole adapté, en charrette et animaux de trait (ânes).
4. L’investissement partagé en matériel de transformation (moteurs et machines à moudre, etc.) sera érigé en règle.
5. Un fort accent sera mis sur la formation de formatrices et formateurs aux techniques agricoles et de transformation (production, normes sanitaires, emballages, notions de marketing, etc.).
6. Les obstacles majeurs au développement des ventes par les groupements de femmes sont ceux du stockage, de la distribution et de la vente. Sous forme de kiosques (avec disponibilité de froid – produit de préférence par énergie solaire - pour la conservation du tchakri ou des poulets notamment) ou autrement, des points de vente seront établis dans les grandes communes et villes accueillant les productions de tous les groupements établis dans une proximité géographique et répondant à des normes de qualité établies.
7. Des guichets devront être rendus disponibles au niveau des locaux des chambres de commerce régionales.
8. Un système de micro-crédits permettra d’élargir la gamme de produits vendus par les groupements de femmes auxquels s’ajouteront ceux de première nécessité tels l’huile alimentaire, le sucre, le riz et le lait en poudre.
9. Les productions d’huiles corporelles dans leur premier traitement seront exclusivement réservées aux groupements de femmes.
10. La mise en place de caisses d’autofinancement sera encouragée et un soutien complémentaire apporté par l’État lié au constat de leur fonctionnement régulier.
(Le recul de la pauvreté doit être la conséquence d’un accroissement des revenus des plus pauvres en activité ou d’une création d’emplois.)
Sénégalaises, Sénégalais
Vous n’êtes pas sans ignorer que les partenaires bilatéraux et multilatéraux ont une préférence notoire pour les grands projets et les productions nationales alimentant les marchés mondiaux. La démarche « Le Sénégalais d’abord » qui est la nôtre s’exprime en légère contradiction avec cette priorité donnée à l’intégration au marché mondial. Notre démarche privilégiera la substitution aux importations par rapport au développement des exportations, car conséquence du développement de l’agriculture vivrière, de l’agro-industrie, de l’artisanat évoluant vers la semi manufacture puis la manufacture, etc. Par la modernisation de l’agriculture, par la transformation de l’artisanat en semi-manufacture, la création d’emplois sera aussi la conséquence d’une stratégie de développement construite à la base et non plus recherchée par le seul investissement public au travers de « grands projets ». L’installation du secteur privé national au centre de notre stratégie de développement devra permettre aux PME/PMI/TPE, dans ce cadre décrit, de pouvoir s’affirmer et jouer son rôle de créateur de richesses et de fournisseur d’emplois.
La création d’emplois résultera aussi de programmes spécifiques consistant en de « grands travaux » à haute intensité de main d’oeuvre en substitution à cette même logique de « grands projets ». Parmi ces « grands travaux » figurent :
• La Construction d’une nouvelle capitale administrative du Sénégal.
L’ouverture de ce grand chantier permettra une forte utilisation de métiers du bâtiment dans lesquels le Sénégal regorge d’une main d’oeuvre qualifiée. Le chantier sera par contre saisi comme une opportunité de renforcement des capacités de cette main d’oeuvre par tests suivis de formation avant recrutement par les entreprises qui seront concernées par la réalisation des édifices publics.
Le choix du site d’accueil de la nouvelle capitale est pour l’instant conservé secret. Mais il devra respecter au moins 3 critères forts :
• Un éloignement conséquent de Dakar et de la presqu’île du Cap Vert afin de pouvoir correspondre à une véritable démarche de désengorgement de Dakar et
de valorisation d’une partie du territoire sénégalais délaissée;
• Une activité économique existante - ou potentielle à développer - pour ajouter une rationalité économique à celle purement administrative et résidentielle;
• Un accès possible à partir de la région de Dakar par des moyens de transport rapides et de masse ;
• La réhabilitation du chemin de fer est un autre parmi les grands travaux qui seront engagés. Il aura pour objectifs la création d’emplois par l’ouverture d’un grand chantier, le regain d’activités dans les villes de gares, la réduction du coût du fret, une moindre fréquentation et donc la préservation des routes en particulier par les gros porteurs, le renforcement de la relation économique avec l’hinterland que constitue le Mali, mais aussi une recherche de liaison avec le sud-est du Sénégal et l’ensemble de cette zone minière au-delà des frontières sénégalaises.
• La remise en vigueur du projet des vallées fossiles associé à une réalisation de nombreux forages: permettra la lutte contre la désertification du Ferlo par l’amener d’eau dans cette zone à vocation sylvo-pastorale, le développement de zones de pâturages, et le développement de l’agriculture. Les études préciseront les sources de l’eau qui mettra fin à l’avancée du désert et autorisera le développement de la stabulation. Elle pourra provenir du sous sol, du fleuve Sénégal ou de la mer en fonction du coût de son dessalement par l’énergie solaire.
• Le développement de l’économie verte est un autre des gros chantiers à ouvrir pour l’amélioration de notre cadre de vie et la création d’emplois. Il reposera sur le traitement des ordures et la production d’électricité et de composts, l’économie de récupération et le reboisement.
• La lutte contre les inondations et les grands travaux d’assainissement : justifiera le lancement de travaux de réhabilitations urbaines dans les principales villes du Sénégal qui se sont développées sans véritable plan d’urbanisme ou sans que ces derniers, bien qu‘existants, n’aient été respectés.
• Enfin la résorption des abris provisoires au sein des écoles publiques sera l’occasion d’ouvrir un grand chantier accessible à de petites entreprises nationales de BTP.
Le recul de la pauvreté devra être le constat d’un confort minimum du citoyen, également force active du développement.
La recherche de ce confort minimum, au-delà de constituer une réponse à un droit au développement, est en outre indissociable de l’amélioration de la productivité des travailleurs sollicités pour créer de la croissance économique. Plusieurs axes conduisent à l’indispensable amélioration de cette productivité.
• En ce qui concerne l’amélioration de l’accès à l’eau et à l’assainissement : exception faite de certaines situations d’urgence, les programmes de répartition des travaux à travers le territoire seront définis en fonction de la taille des villes et villages (nombre d’habitants), et rendus publics ainsi que leur justification ;
• Le meilleur accès à l’électricité sera la conséquence de l’abaissement de son coût et une amélioration de sa distribution que permettront d’obtenir un meilleur mix énergétique et une efficience améliorée par de nouveaux arbitrages institutionnels.
Un recours plus important au solaire au vu de la dispersion de l’habitat rural reste la solution à l’indispensable démocratisation de l’électricité avec en amont la stimulation de la recherche et développement et la mise en oeuvre de mesures incitatives permettant l’émergence d’une semi manufacture de panneaux solaires et de produits liés à l’usage de cette source d’énergie
• La politique d’un meilleur accès à la santé :
Malgré les efforts considérables faits durant les 20 dernières années, le Sénégal peine à atteindre les objectifs et indicateurs fixés en vue d’aligner ses établissements de santé publique sur les standards communément admis en la matière ; et le citoyen souffre d’un accès particulièrement difficile et coûteux à la santé.
Nos solutions pour un système de santé performant et inclusif reposent sur:
• Une remise à plat de la réforme hospitalière en organisant une consultation
inclusive ;
• La mise en place d’un système de gestion de la performance et de la qualité des services par le développement d’un mécanisme d’audit et de contrôle ;
• La révision de la carte sanitaire au travers d’un recensement général en vue d’avoir un état des lieux précis sur l’ensemble des établissements en relation
directe avec les conclusions issues des concertations inclusives.
Elle aboutirait à la répartition cohérente des structures de santé, à la gestion rationnelle des moyens déjà investis, à l’accès plus facile pour la population à des
soins de qualité.
Par ailleurs le partenariat public privé (PPP) permettra une meilleure couverture de la carte sanitaire par un recours aux établissements privés. En contrepartie de
facilités reçues de l’État, les établissements privés offriront des consultations gratuites aux citoyens selon les modalités encadrées par le PPP.
• La mise en place d’un service national des urgences de qualité, responsable de l’organisation des urgences depuis le ramassage jusqu’à la prise en charge
définitive.
• Le rôle de la tutelle dans la gestion d’une partie du personnel (recrutement et affectation) sera réduit. Afin de mettre fin aux recrutements à caractère politique
mettant en danger la vie des citoyens, le processus de sélection relèvera de l’effectif des médecins soignants et infirmiers-majors.
• L’attribution de primes supplémentaires aux personnels acceptant de servir dans les zones éloignées permettra de mieux répartir l’accès aux soins.
• La mise en place d’un plan soutenu de recrutement des médecins de sorte à résorber le déficit sur un horizon temporel de 03 ans, aidera également à atteindre cet objectif de décentralisation des soins de santé.
• La prise en charge des démunis impose de procéder à une évaluation approfondie de la couverture maladie universelle en associant tous les acteurs
impliqués. Le recours à la carte à puce pour les indigents permettant leur suivi, le taux de prise en charge et la lutte contre la fraude. Il ne saurait y avoir recul durable de la pauvreté sans formation de qualité. Et la qualité de cette formation doit provenir de son adaptation aux besoins de notre économie.
La quête inlassable de la paix sociale au sein de notre système d’enseignement public ne doit toutefois pas occulter la nécessité de procéder à un examen critique du contenu des enseignements qu’il délivre. La paix sociale s’y construira par un dialogue franc et patriotique entre les parties concernées. Il sera d’ailleurs plus facile de la retrouver par la démonstration d’une gestion sobre et vertueuse des ressources globales du budget national, et la fin d’une gestion irréfléchie des révisions de grilles salariales au sein de la fonction publique selon les corps concernés. Les nombreuses régularisations nécessaires et attendues de la situation des enseignants devront être programmées et exécutées.
En termes de contenu des enseignements de notre système global de formation, une toute nouvelle importance sera donnée à la formation aux métiers. Le système d’enseignement du Sénégal doit cesser de produire des chômeurs après une formation coûteuse, mais plutôt des jeunes femmes et hommes capables d’exercer un métier en individuel ou en entreprise, fut-elle petite ou moyenne.
Pour y parvenir nous retenons essentiel de :
• Réaffirmer la mission de formation universelle et d’ouverture de l’école sénégalaise au monde, basée sur les fondements culturels de notre pays, et visant l’insertion sociale et économique.
• Associer à la langue française en milieu préscolaire, les langues maternelles et l’acquisition du langage écrit et parlé.
• Revenir aux fondamentaux de la formation des enseignants en milieu préscolaire, scolaire et secondaire par la capacitation en module psychopédagogique et l’exigence d’une formation de base certifiée.
• Intensifier la construction des écoles, collèges et lycées et supprimer sur l’espace national tous les abris provisoires.
• Veiller à la jonction des systèmes éducatifs des corporations et des établissements scolaires laïcs et publics.
• Maintenir la qualité de l’enseignement par la réhabilitation du suivi et de l’inspectorat des corps d’enseignants et des formateurs.
Il convient pour notre pays de rechercher et stabiliser les meilleurs outils de sélection des élèves et leur orientation en fonction de leurs aptitudes et résultats scolaires du collège.
• Ainsi nous réaffirmerons que seule l’obtention du certificat d’étude primaire avec la capacité de savoir lire et écrire donne la possibilité d’accès au collège (Premier seuil de passage).
• Et mettrons en place de nombreux « collèges de métiers » pour la formation à la plomberie, mécanique, BTP, agriculture, l’art et les technologies, en veillant à
l’adéquation entre la formation théorique d’une part et le stage pratique et technique en entreprise d’autre part, sans exclure celui dans les petits ateliers d’artisans.
L’accès à ces collèges de métiers sera rendu possible par voie de concours spéciaux aux apprentis en séjour dans les petits ateliers du secteur informel.
Notre projet consiste, en concertation avec les acteurs, à soumettre la formation postbaccalauréat à :
• un numerus clausus objectif et transparent pour les affectations et orientations des
apprenants admis au baccalauréat.
• la mise en place de centres d’orientations pédagogiques, ouverts aux apprenants et parents d’élèves, à l’État, aux enseignants, en sus de leur existence au sein des conseils des établissements scolaires.
• l’orientation des apprenants les plus aptes vers les écoles d’élite par voie de concours. Elles accueilleront nos futurs cadres de l’administration et chefs
d’entreprises nationales.
Au même titre que les collèges de métiers, nous retenons :
• de favoriser la formation professionnelle universitaire BAC+2, et soutenir l’autoemploi après formation par des mesures d’incitation fiscale ;
• d’identifier des passerelles entre les formations académiques et celles professionnelles, et de les ouvrir largement aux formateurs et aux professionnels de
l’entreprise. Par cette démarche stratégique dont des détails précis ont souvent été donnés, l’ACT fera sortir chaque année un nombre important de citoyens sénégalais de la pauvreté. Elle sera également à l’origine d’une véritable émergence économique par une croissance partagée parce que
accueillie par les secteurs gros utilisateurs de main d’oeuvre. Il est toutefois important d’identifier les acteurs qui devront porter ces choix de valeurs à
restaurer et de nouvelles orientations économiques à impulser.
En effet, le projet de l’ACT repose sur au moins trois révolutions :
• Celle des valeurs à restaurer : sens de la patrie, citoyenneté, éthique, travail
• Celle agricole
• Celle manufacturière
Il a donc besoin d’une dynamique nouvelle et de force, d’une vision rénovée de la construction de notre nation, d’une remise en cause de nos mentalités.
Il prend ses racines dans une nouvelle vision de la politique devenue ou redevenue sacerdoce au service des populations et cessant d’être un moyen d’ascension sociale et d’enrichissement à ses dépens.
Le projet de l’ACT reposera par conséquent sur deux (2) piliers qui le porteront : les jeunes et les femmes.
Parlons d’abord de la Jeunesse.
La jeunesse sénégalaise a besoin de retrouver l’espoir en un avenir de travail et d’utilité à son pays. Elle est aujourd’hui désemparée et désespérée.
• Comme nous l’avons déjà souligné, la solution durable au chômage viendra de la croissance économique véritable et de la formation vers les métiers. Dans l’urgence, nous retenons de créer des emplois immédiats par la stratégie des « grands travaux ». Leur réalisation privilégiera le recrutement de jeunes ayant l’esprit de pionniers. Mais nous créerons également de l’occupation immédiate par l’organisation d’un service
citoyen et national.
• Nous donnons à ce service citoyen et national la mission de construire un nouvel idéal à la jeunesse sénégalaise par la citoyenneté. La notion de développement est en effet devenue trop abstraite pour mobiliser notre jeunesse africaine. Elle réagira par contre positivement à l’appel consistant à recevoir sa contribution pour sauver son peuple de la misère par des actions citoyennes. Cette contribution sera organisée comme assistance reposant sur du don de soi apportée à d’autres citoyens en besoin. Nous pourrions citer l’amélioration de petites techniques agricoles, de l’hygiène, les cours de vacances, la formation légère dans divers domaines avec acquisition facile de connaissances, la contribution à la construction d’édifices simples, etc.
• Les jeunes diplômés seront encouragés à devenir des créateurs d’emplois pour d’autres moins bien formés qu’eux. L’ensemble du système de préparation à la création d’entreprise sera revisité, et le dispositif global d’aide aux petites PME réformé dans le sens de ne plus servir les seuls membres d’un parti politique mais des projets sélectionnés sur des critères objectifs et présentés dans le respect de critères bancables. L’accompagnement en gestion, l’accès aux différents types de financement seront remis à plat après prise en compte des leçons retenues des diverses expériences vécues par le Sénégal. Hormis la supercherie récente de la Délégation à l’entreprenariat rapide (DER), il est parfois arrivé que le Sénégal invente de bons procédés de financement et d’encadrement. Ils ont malheureusement toujours souffert de leur politisation et de leur mauvaise gestion.
• Des incubateurs de starts-up seront créés, suivant la même logique que les « villages de métiers ». L’objectif étant de rapidement en avoir un au moins dans chaque région.
• Les PME créées comme start-up bénéficieront d’un dispositif fiscal incitatif pendant au moins trois années qui devront être mises à profit pour la consolidation des bases de l’entreprise. Il est en effet regrettable que la fiscalité sénégalaise ne systématise pas la facilitation de l’entrée dans le secteur formel par une fiscalité dérogatoire pendant quelques années. le seul « minimum fiscal » tue plusieurs entreprises chaque année.
Sur un plan tout autre, nous comptons sur les jeunes et les artistes pour donner à la culture sénégalaise le sang neuf dont elle a besoin. Tout le monde connait le rôle et la part essentielle de la culture dans notre style de vie et nos modes de pensée et d’action. Dans ses expressions diverses et variées, elle permet de renforcer notre cohésion et notre unité tout comme elle incarne la marque distinctive et singulière de notre communauté. C’est pourquoi, il convient plus que ne jamais, de lui donner sa place, toute sa place dans nos politiques publiques. En ces temps de boom du secteur des services et du
numérique et de création de richesses y afférant, les industries culturelles et créatives, plus que jamais, devront y prendre leur part et y trouver leur compte en renforçant notre croissance. Les structures de détection, de formation, de création, de productions culturelles seront mieux organisées, et bénéficieront encore plus du soutien approprié de l’État. Les collectivités seront encouragées à organiser avec l’aide de l’État des concours, des compétitions, des vernissages et
autres manifestations de promotion des arts et de la culture. La politique sportive, renforcera le développement du sport de masse et celui de l’Elite. Elle
reposera toutefois sur une meilleure répartition des moyens de l’État entre les disciplines les plus prometteuses susceptibles de conduire à faire flotter victorieusement le drapeau du Sénégal dans les stades du continent et du monde. Cette meilleure répartition des moyens ciblera de façon prioritaire la construction des infrastructures sportives de manière plus rationnelle et équilibrée au profit de plus de disciplines sportives et de plus de régions et non dans le sens de deux infrastructures de prestige très onéreuses (l’arène de lutte et Dakar Aréna) dont le cout global aurait pu largement régler pour longtemps encore, la question des infrastructures sportives au Sénégal. Le sport sénégalais sera reconstruit à partir de la base en accordant un haut rang à la détection des futurs talents, au sein des écoles ou autres structures. Dans chaque région, il sera mis en place un collège sport-études, doté de tous les aménagements nécessaires, afin de créer des
vocations et de les faire éclore avec des générations de sportifs de haut niveau capables de porter brillamment nos couleurs. De même, un appui conséquent financier et matériel sera apporté aux disciplines sportives en phase de professionnalisation pour aider leur montée en
puissance.
Second pilier du projet de l’ACT, la femme sénégalaise est déjà devenue un acteur économique majeur dans notre pays, en particulier dans les zones et secteurs de grande pauvreté. A ce titre elle doit être considérée comme un relais essentiel de la stratégie de politique économique visant de manière prioritaire la lutte contre la faim et le recul de la pauvreté. Au nombre des leçons tirées de mes tournées, échanges et contacts, dans les grandes villes comme dans les hameaux les plus reculés du Sénégal, je retiens que les femmes se soucient davantage de la situation de la famille par rapport à la faim.
Comptons sur elles :
• Pour être des productrices : en leur facilitant l’accès à la terre ; l’équipement en petit matériel et en en faisant des bénéficiaires privilégiées d’intrants
• Pour être des transformatrices : l’État doit protéger la première transformation par elles et parfois créer une exclusivité en faveur des femmes (exemple des huiles
corporelles)
• Pour être des emprunteuses : nous faciliterons l’accès au crédit par la micro-finance en complément à l’autofinancement organisé et constaté sur la base de critères objectifs et non politiques pour mettre fin à l’injustice, et favoriser le remboursement des emprunts pour assurer le renouvellement des opérations de prêt
• Elles seront aidées à commercialiser leurs produits du cru et productions transformées ce que nous avons déjà eu à souligner.
Sénégalaises, Sénégalais,
Comme vous l’aurez constaté nous faisons le choix d’une croissance économique ramenée à la base. L’amélioration du mieux-être du citoyen sénégalais et sa protection contre la misère et le dénuement, contre l’obscurantisme, où qu’il se trouve, sont notre préoccupation principale. Aussi, la décentralisation est au coeur des enjeux du développement et d’une croissance bien répartis dont profiteront les Sénégalais, ceux de la capitale comme ceux de l’intérieur et des zones les plus reculées. Bien appliquée, elle sera une source de bien-être pour les populations tout en participant au développement des collectivités locales. Une nouvelle approche de la décentralisation, beaucoup plus approfondie, est l’option irréversible que consacre le programme de l‘ACT. Elle ne doit pas simplement être bâtie autour de la création de postes de responsabilité politiques, de transfert de compétences factices puisque sans transfert de moyens subséquents.
Certes ! Le Sénégal a une vieille tradition de la décentralisation qui remonte au 19ème siècle avec les quatre (4) Communes de plein exercice. Les réformes se sont ensuite suivies ; mais les collectivités restent pour la plupart et avec l’essentiel des organes, impuissants et inefficaces à
contribuer au développement :
• L’état jacobin est toujours là, non sérieusement réformé, avec sa bureaucratie, la centralisation des décisions et contrôles internes à Dakar et dans les ministères, avec la concentration des décideurs, des budgets et des investissements ;
• Malgré tant d’années d’indépendance et tant de réformes dans cette perspective de décentralisation, la survie d’un clivage entre un Sénégal prospère versus un Sénégal pauvre est visible et réelle ;
• Au niveau mondial, à l’heure de la flexibilité, de l’agilité, de la course entre les lents et les rapides, la survie tenace du paradigme qu’un développement impulsé par le haut serait la norme continue de s’affirmer au Sénégal malgré un « troisième acte », sans pour autant donner l’assurance d’une impulsion accélérée, d’une émergence…
Retenons donc que la réussite de la décentralisation suppose aussi d’audacieuses réformes économiques, car le développement repose sur la création de richesses. En effet, au sens où l’ACT l’a redéfinie, c’est aussi toute une stratégie économique. A titre d’exemple :
• L’ouverture du chantier des grands travaux ferroviaires visera de connecter à terme toutes les capitales régionales par le rail ;
• L’exploitation de la synergie entre le potentiel de l’artisanat, de l’industrie et de l’agroindustrie sera organisée au niveau local;
• Les ressources publiques seront réparties de sorte que les populations à la base en profitent ;
• les décisions de planification d’accès aux services primaires ou essentiels (santé, eau, électricité, éducation) seront prises au niveau régional ou départemental.
Nous concevons la décentralisation comme le levier d’une nouvelle restructuration en pôles régionaux naturels à vocation socio-économique et culturelle pertinents, un levier de réduction des inégalités entre la capitale et la périphérie, un moyen pour les populations d’affirmer leurs talents et créativité. Au total un transfert de compétences plus approfondi est requis et demeure notre choix. Sa réussite durable commande une véritable fiscalité locale capable de pourvoir aux besoins de financements de projets locaux, une plus grande sincérité dans les arbitrages, sans état d’âme, et au profit des populations locales, des dotations significatives pour réaliser les investissements nécessaires à l’amélioration du mieux-être des populations. Mais il est tout aussi essentiel d’avoir à la tête des collectivités et départements des élus soucieux de faire prospérer leurs terroirs plutôt que prisonniers de la politique politicienne. Nous proposerons donc aux Sénégalais, l’élection des députés au scrutin départemental majoritaire à deux tours ; celle des présidents de conseils départementaux ; celle des maires selon le même type de scrutin; tandis que les conseillers seront élus sur liste départementale ou communale.
La gestion du développement local requiert de nouveaux paradigmes, de nouvelles compétences de management. La mise en place d’un Conseil Économique Social et Environnemental par pôle économique permettra de mobiliser les compétences citoyennes aujourd’hui empêchées de jouer un rôle actif dans le développement de leurs terroirs. Créés dans une logique de développement solidaire et partagé, également de nécessaire aménagement du territoire, un effort particulier sera consacré aux six (6) pôles suivants :
i)- Pôle Ouest-Littoral: Dakar-Mbour et Thiès ;
ii)- Pôle Centre avec le Sine-Saloum et la région de Diourbel ;
iii)- Pôle Vallée du Fleuve avec les régions de Matam, Saint-Louis et le Département de Bakel ;
iv)- Pôle Sénégal Oriental avec les régions de Tambacounda et Kédougou;
v)- Pôle Sud avec les trois régions de la Casamance, Ziguinchor, Kolda et Sédhiou ;
vi)- Pôle Zone Sylvo-Pastorale du Ferlo et Louga.
C’est aussi le lieu de dire que nous accorderons un poids particulier aux contrôles citoyens par les populations, aux budgets participatifs, à de nouvelles formes de certifications et de rating. Ainsi sera bâti un leadership nouveau avec des politiques et non des politiciens, des élus et managers désintéressés et motivés par la seule prospérité des populations au niveau local, tous résistant face aux pressions politiques ou autres conduisant à gonfler inutilement les charges de fonctionnement des collectivités, à une mauvaise utilisation des ressources au gré d’intérêts politiques, à l’inflation de personnels sans rapport avec les métiers, la compétence et le mérite. Ces propositions seront soumises en premier lieu à l’ensemble des parties prenantes dans la recherche de la paix définitive en Casamance. Cette région du Sénégal sera le laboratoire dont devra sortir une solution de décentralisation applicable à l’ensemble des autres régions du
Sénégal. La Casamance est déjà ce bel exemple de melting-pot rare entre ethnies et religions. Elle est ce bel exemple où la sauvegarde de la nature est d’importance, où couper un arbre nécessite une délibération villageoise. Nous compterons aussi sur elle pour montrer au Sénégal la voie de
sortie de l’état jacobin. Le temps est venu de construire sur un nouveau credo : « L’argent du Sénégal dans les collectivités locales, les terroirs et les banlieues, au profit des populations à la base », pour parler comme un de nos compatriotes ardent défenseur d’une décentralisation véritable. Aussi, transférons-nous sans aucune hésitation des dotations optimales significatives pour un vrai développement local, pour implanter des services sociaux universels de base, pour procéder à l’aménagement et à l’assainissement du cadre de vie, effectuer des investissements à haute valeur ajoutée sous forme d’infrastructures collectives, instituer des pôles de travaux publics et centres multifonctionnels dignes de ce nom pour faire face aux incendies dans les marchés, à la discipline dans les espaces et rues, aux accidents et catastrophes naturelles, aux ordures et impacts des inondations dans les banlieues et ailleurs. Corrélativement, le secteur privé aura tout un rôle à jouer dans le cadre de partenariats publicprivé avec l’États, les collectivités locales et les unités précitées.
Je vous propose à présent d’évoquer d’autres choix majeurs qui conditionneront l’avenir de notre cher pays. A la faveur du démarrage des productions de pétrole et de gaz, il conviendra d’aller très vite vers une énergie compétitive à l’échelle mondiale comme soutien majeur à l’amélioration de la productivité de l’économie sénégalaise. La faiblesse de cette dernière est sans doute l’obstacle majeur à son émergence. Cela commencera par une énergie subventionnée en faveur des « villages de métiers », point clé de notre projet. Nous mettrons par ailleurs en oeuvre un mix énergétique dynamique qui prendra en compte le caractère épuisable des ressources en hydrocarbures, et fera une place de plus en plus importante aux énergies renouvelables (solaire en particulier ; éolien).
Dès l’indépendance le tourisme a été au Sénégal un secteur fortement contributeur à l’emploi, au développement de l’artisanat d’art, et à l’investissement direct étranger par la création d’infrastructures hôtelières. L’État, au lieu d’encadrer et d’impulser le secteur, est longtemps resté dans une attitude de leader et d’acteur, acceptée par le secteur privé opérant dans les activités touristiques. Ceci explique en partie l’état des lieux particulièrement alarmant, mais aussi l’ambition d’assurer la relance de ce secteur qui ne pourra être que très coûteuse. Cette dernière reposera donc nécessairement sur les efforts de tous et bien répartis entre l’État, les bailleurs de fonds, le secteur privé et les collectivités locales. De l’avis quasi-unanime des acteurs du secteur, la vision politique est construite sur une base erronée : Il est en effet indispensable de sortir du positionnement peu compétitif dans le tourisme balnéaire et de redéfinir un positionnement stratégique avec comme coeur de métier le tourisme d’affaire et le tourisme de découverte. Ce développement se fera en parallèle avec la reconstruction du tourisme balnéaire qui est devenue une nécessité autour de nouveaux sites et par de nouveaux investissements.
L’État devra ensuite veiller à la mise en oeuvre effective de cette stratégie, en partenariat étroit avec le secteur privé. Pour cela, il doit mettre en place un cadre des affaires très attractif, un dispositif statistique fiable permettant de suivre les performances réelles du secteur, et une agence opérationnelle professionnelle garante de la stabilité institutionnelle. Celle-ci devra prendre en charge :
• La promotion du tourisme d’affaires qui visera notamment à développer de façon significative les réunions et congrès organisés à Dakar et à Diamniadio. Par contre la promotion du tourisme de découverte devra s’appuyer en particulier sur de nombreux documentaires réalisés en partenariat avec les journalistes internationaux spécialisés dans le secteur ;
• La promotion et le suivi de la qualité des sites hôteliers, en s’appuyant sur les nouvelles classifications internationales, et en accordant la plus grande importance à la formation professionnelle. Une démarche qualité sera encouragée sur l’ensemble des maillons de la chaîne du tourisme, de l’accueil à l’aéroport jusqu’au retour à destination ; Il conviendra d’engager résolument la construction d’une filière complète de formation aux métiers touristiques couvrant toute la chaine de valeur de l’offre touristique et non uniquement les métiers de l’hôtellerie ; de mettre en place, dans le cadre d’un partenariat public privé (PPP), des modules de formation des guides touristiques et de l’ensemble du personnel nécessaire pour le développement des segments touristiques visés (circuits de découverte, nature, croisières etc.) ; d’inclure également l’apprentissage des langues étrangères, notamment l’anglais, dans les cursus.
La question de l’érosion côtière, problème majeur de notre environnement, doit être portée à un niveau très élevé d’importance et d’urgence dans les préoccupations gouvernementales. Des études par nos universités et centres de recherche, des programmes et investissements
spécifiques doivent être conçus et réalisés pour sauver la côte sénégalaise au-delà de seules préoccupations touristiques, avec l’appui des partenaires techniques et le recours aux travaux d’autres centres de recherche à travers le monde. Nous attendons des industries extractives une forte contribution à l’équilibre de la balance des paiements (pétrole et gaz, or), au budget de l’État (pétrole et gaz) pour assurer le remboursement des excès d’endettement hérités du régime actuel.
Il conviendra de favoriser l’exploitation des ressources minières encore inexploitée du sud-est (fer et marbre) par la mise à disposition de moyens de transport (rail) et d’énergie. Relier le sudest minier du Sénégal aux zones minières frontalières dans l’objectif de créer une dynamique régionale de développement sera une de nos options fortes. Une autre consistera à privilégier systématiquement la transformation locale d’une partie des productions minières. A titre d’exemple, la part de la production d’or nécessaire à l’émergence d’une orfèvrerie de réputation mondiale. Cette anomalie par laquelle le Sénégal exporte plus de 150 milliards FCFA d’or par an au point d’en faire le premier poste d’exportation de notre pays sans que nos artisans puissent trouver les quantités nécessaires à leurs productions sera
corrigée. Nous accorderons un soin tout particulier au développement de filières de formation aux métiers liés à l’environnement de l’exploitation et de la commercialisation du pétrole et du gaz. Une commission d’enquête parlementaire élargie à des experts nationaux et internationaux sera très tôt chargée de l’examen approfondi de toutes les conventions en cours portant exploration ou exploitation de ressources naturelles du Sénégal. L’objectif sera de s’assurer que les intérêts de la Nation ont à chaque fois été protégés, et d’éventuelles corrections seront apportées lorsque
ceux qui nous auront précédés ne se seront pas évertués de vendre le sous sol du Sénégal à des conditions irréversibles. La transformation de l’économie sénégalaise ne concernera pas uniquement les secteurs traditionnels de la révolution industrielle. L’accélération significative du développement de
l’industrie numérique devra également être engagée. Le Sénégal attend de pouvoir libérer la créativité de sa jeunesse et créer de la compétitivité économique par une plus grande accessibilité et une réduction des coûts de l’internet. Cela passera par un renforcement de la régulation des oligopoles, notamment au niveau de leurs tarifs de facturation.
L’absence d’une vision stratégique basée sur une approche parfaitement intégrée de la révolution numérique n’a pas permis de mieux appréhender la façon dont elle transforme la vie des citoyens, non plus d’en tirer le meilleur parti et d’aider ceux qui risquent d’être laissés pour compte afin d’éviter un gap numérique entre citoyens sénégalais. Ce gap s’est malheureusement parfois creusé au-delà du raisonnable entre le Sénégal et le reste du monde, notamment plusieurs pays d’Afrique. La faiblesse, voire la quasi-inexistence, du soutien au renouvellement des compétences à la recherche et à l’innovation freine le développement d’une industrie du numérique au plan national pouvant assurer la compétitivité du secteur de l’économie numérique sénégalaise. C’est dans le cadre d’un partenariat visant une collaboration durable au travers d’une approche PPP (Partenariat Public Privé) et la mobilisation de fonds de soutien à l’innovation, que sera organisée la gouvernance opérationnelle de notre vision de l’économie digitale. Ce partenariat inclura le secteur privé national et international, les institutions académiques, les collectivités locales et les partenaires internationaux dans la mise en oeuvre d’un plan directeur national des TIC sur une période de 05 ans.
Il est essentiel de quitter la logique du secteur des télécommunications « vache à lait fiscale » pour résolument faire le choix du développement du secteur, transformé en locomotive de la plus grande partie du reste de l’économie. Le succès et l’utilisation de la 4G sont fortement compromis au Sénégal par l’importance du prix de réserve. Ce dernier fera l’objet d’un sérieux réexamen. Une étude comparative avec les autres pays d’Afrique permettra d’apprécier, et sans doute de
réviser, le degré de pression fiscale pesant sur les opérateurs sénégalais sous forme de redevances sectorielles, en particulier le coût des redevances pour les fréquences mobiles et les fréquences des faisceaux hertziens. La construction de la compétitivité du secteur a également besoin de plus de régulation
notamment dans le domaine du partage d’infrastructures, tout comme une régulation plus active des coûts d’interconnexion.
En effet, la mutualisation des infrastructures essentielles (sites et fibre noire) est une condition nécessaire pour la baisse des tarifs internet. C’est elle qui permettra à titre d’exemple de fournir les services 4G à un plus grand nombre de citoyens et dans des délais beaucoup plus courts. Egalement d’avoir des prix de détail plus accessibles aux citoyens tout en garantissant une rentabilité aux opérateurs qui leur permettra d’avoir des capacités d’investissements plus importantes. Enfin, elle aidera grandement au désenclavement numérique et à réduire la 20 «fracture de couverture» des zones rurales qui restent largement mal desservies car considérées non rentables par les opérateurs privés. Les missions de régulation de l’ARTP seront donc réexaminées dans cette optique. Le secteur privé national sera encouragé à fournir des solutions TIC et à promouvoir leur utilisation par les citoyens et les institutions publiques au travers d’une politique de labellisation, de certification mais aussi de soutien spécifique reçu lors des appels d’offres publics. Un programme détaillé de dématérialisation intégrale des procédures administratives et services aux citoyens et entreprises à l’horizon 2020-2024 sera engagé. Cette option s’appuiera sur le développement des services mobiles et le taux d’accès au mobile pour mettre en place des services en ligne portant sur :
I)- des services d’informations aux citoyens et aux entreprises ; ii)- des outils de gestion des droits et obligations des citoyens et entreprises ; iii)- des outils de gestion des procédures administratives ;
iv)- le règlement de tous droits et taxes ; v)- la disponibilité des documents administratifs tels les extraits de naissance sans déplacement, les casiers judiciaires, etc. Comme vous l’aurez constaté nous mettons de nouveau le confort, le mieux- être du citoyen au coeur de nos options de politiques publiques. Il est inadmissible qu’au 21ème siècle, le citoyen à la recherche d’un extrait de naissance ou de casier judiciaire, voyage si souvent des centaines de kilomètres pour l’obtenir.
L’État impulsera et soutiendra les initiatives mettant les TIC au service du développement (TICD) ; notamment celles visant à mettre le numérique en appui à l’éducation, à la santé, à l’agriculture, à la démocratie et à l’inclusion sociale, à la finance inclusive, au commerce des produits locaux et à la valorisation du patrimoine artistique et culturel. Il soutiendra également la Recherche et l’innovation par la mise en place d’un institut de haut niveau à vocation régionale spécialisé dans l’informatique médicale, l’intelligence artificielle, la robotique et l’informatique industrielle. Notre objectif est ambitieux. Il est celui de faire du Sénégal un hub technologique mondialement reconnu. Il permettra alors de favoriser l’éclosion des services offshore dans le domaine du numérique.
Notre option forte d’organiser le développement économique à la base nous conduit à conférer un rôle majeur aux petites et moyennes industries. La petite taille est en effet le coeur de l’économie sénégalaise.
Outre l’organisation de la mutation de l’artisanat vers la semi manufacture, des programmes particuliers seront développés pour assurer l’éclosion de petites et moyennes industries. La part de l’État dans ce sous projet spécifique consistera à réaliser des zones industrielles dans la périphérie de la plupart des villes secondaires, et en commençant par les plus importantes d’entre elles que sont Touba, Mbour, Kaolack, Saint Louis et Ziguinchor. (CF. les Pôles de
développement économique) Ces zones industrielles seront conçues dans le cadre d’une coopération avec les syndicats patronaux de quelques grands pays semi-industrialisés soucieux de délocaliser certaines de leurs activités manufacturières de « première génération ».
Évoquons à présent quelques pistes pour assurer le financement de notre programme. Une politique d’endettement extérieur agressive, menée par le régime actuel, malgré les nombreux avertissements du Fond Monétaire International, de la société civile et des économistes sénégalais, laissera peu de marge au gouvernement de la prochaine alternance. L’absence de croissance suffisante a limité celle des recettes publiques. En outre ce régime a donné la priorité au remboursement de la dette extérieure. Cette attitude a eu pour conséquence l’augmentation de la dette intérieure. Les difficultés vécues par les
entreprises nationales qui portent trop longtemps des créances au titre de la commande publique ont eu des incidences sur l’activité économique du Sénégal et subséquemment un resserrement des recettes budgétaires. La mauvaise gouvernance a régulièrement, et dans la durée, affaibli les capacités à gérer des
organisations et services d’une certaine taille et / ou complexes. Le Sénégal est devenu un pays où on ne peut prétendre à des fonctions de direction (administration, parapublic) si vous n’avez pas la carte du parti au pouvoir et si vous ne faites pas de bons résultats aux élections ; ce qui leur est toujours rappelé par le Chef de l’État à la veille des scrutins. Le sous-développement relatif du Sénégal s’est aggravé gonflant les besoins de progrès dans une
mondialisation vécue, et créant un besoin d’accélération de croissance. Sans risque de caricature, deux constats s’imposent : ou l’État ne peut plus ; ou l’État ne peut plus tout seul. De mauvais choix et des contraintes budgétaires et managériales l’engagent dans un processus d’enfermement progressif et durable dans une situation de stagnation économique.
Dès lors les apports majeurs et significatifs des privés nationaux et étrangers sont devenus indispensables à la création de richesse, très souvent par substitution à l’État. Ce dernier doit toutefois demeurer arbitre, régulateur et veiller à ce que le renforcement de la qualité des services assurés par le secteur privé ne soit pas accompagné de l’exclusion des citoyens les moins nantis. Bien au contraire, l’objectif recherché devra également être l’extension de l’accès à des services de meilleure qualité. Le Sénégal a déjà mis en place le dispositif légal et règlementaire permettant le recours au PPP. Le réexamen de l’ensemble des textes permettra son réaménagement et son alignement sur les meilleurs standards internationaux. L’objectif principal recherché par l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail consistera à remettre le citoyen-usager au centre de l’action de l’État et de l’administration et donc à privilégier la recherche de sa satisfaction en qualité de client.
Parmi les secteurs susceptibles d’accueillir le PPP au Sénégal, nous citons :
• Le secteur de l’électricité, en particulier celle décentralisée. Afin de permettre l’élargissement rapide de l’accès à l’énergie dans les zones rurales, de mini-centrales solaires pourront être financées partiellement par des fonds d’investissement regroupant des contributions de Sénégalais de la diaspora, notamment dans les zones de forte émigration.
• L’enlèvement et le traitement des déchets et ordures. Dans les villages et villes secondaires, il conviendra de faire une place particulière aux associations de femmes et de jeunes lors des appels d’offres qui seront organisés.
• Les voies de communication : voies ferroviaires et gestion du transport ferroviaire; canaux fluviaux et transport fluvial ; voies maritimes (désenclavement, interurbain côtier (Dakar, Hann, Rufisque, Bargny, etc.), etc.) ; autoroutes; gares routières ;
• L’assainissement : parce que déjà l’un des plus gros défis sanitaires et de confort du Sénégal. Les eaux de pluie comme les eaux usées sont concernées ;
• La construction et l’entretien des routes au-delà des autoroutes du fait de l’inexistence d’entretien et de coûts de réalisation extrêmement élevés, signe d’une corruption très importante.
• L’éducation : avec un focus fait sur la problématique de l’important retard à combler au plan de la formation professionnelle.
• La santé : au moins ses infrastructures, ses équipements, et sa gestion. L’échec y est total, la gratuité annoncée inexistante, la mauvaise qualité des soins et de l’hôtellerie patente, le personnel soignant insuffisamment qualifié.
• De manière générale, toute priorité échappant aux capacités de l’État : développement de capacités de production dans l’agriculture ou la pisciculture ; reconstitution de filières de semences certifiées ; programme de « reboisement utile » en particulier.
• Enfin les collectivités locales doivent être identifiées comme partenaires possibles: les politiques de décentralisation mises en oeuvre ont transféré des compétences aux collectivités sans qu’elles ne disposent de ressources humaines appropriées dans leur grande majorité. Cette situation livre des périmètres comme propices au développement des PPP (assainissement, traitement des déchets, attribution de terres de culture, etc.). Bien évidemment il sera nécessaire de lier prise en charge effective de ces compétences transférées dans le cadre de PPP et mise à disposition des moyens d’honorer semblables contrats.
Pour assurer la meilleure protection des intérêts nationaux , le secteur public bénéficiera systématiquement de l’assistance de cabinets d’avocats de très haut niveau habitués aux meilleures pratiques afin d’éviter des clauses léonines dans la durée nécessaire à ce type de contrats, et donc les conflits qui en naîtraient.
L’obligation de publication des contrats passés dans un cadre PPP sera prise en compte par la réforme des textes qui sera engagée.
Le renforcement des compétences du partenaire public sera essentiel pour le rendre en mesure de superviser et de contrôler les entreprises privées afin de veiller à ce qu’elles respectent leurs obligations contractuelles. L’existence d’une part de prestation publique concomitamment à celle fournie par le privé sera
maintenue pour mise en concurrence et comparaison afin de créer de la performance. Pour les appels d’offre PPP ouverts à la concurrence internationale, et parmi les soumissions venues de partenaires privés étrangers, la réforme de la législation devra permettre un privilège accordé à celles associant des partenaires nationaux dans la mise en oeuvre des PPP concernés. Dans le même esprit, les sorties de BOT seront organisées de manière à privilégier un relais assuré par l’investisseur privé national. Il ne saurait être envisageable de parler d’économie et de prix sans évoquer la monnaie par laquelle ils s’expriment.
Alors commençons par rappeler que le franc de la communauté financière africaine est africain. Il est panafricain puisque celui de 8 pays membres de l’UEMOA. A ce titre il a longtemps été exemple mondial, leader mondial, puisque monnaie unique de la seule union monétaire ayant atteint niveau semblable d’achèvement.
Une monnaie doit être forte. C’est le cas du franc CFA par sa remarquable stabilité par rapport aux grandes monnaies internationales au cours des 24 dernières années. Mais une économie en mutation, comme doit le devenir celle prétendant à l’émergence, ne peut s’accommoder d’une monnaie rigide par rapport à ses fondamentaux internes. Or le projet de l’économie de l’Afrique de l’Ouest est bien de se mettre en situation d’émergence. Nous engagerons donc des échanges avec l’ensemble de nos partenaires pour :
• Conserver et affirmer le caractère africain du franc CFA ; rebaptiser notre vieille monnaie pourrait y aider grandement,
• Renégocier les principes de la garantie de sa convertibilité et de son rapport de change à l’égard des monnaies internationales,
• Réviser certains aspects de la gouvernance de l’Institut d’émission de notre monnaie nationale et commune.
De nouveau nous le répétons : notre sacerdoce consistera à rechercher inlassablement le mieuxêtre du citoyen sénégalais par les fruits de la croissance mais également par une gouvernance s’en préoccupant. Nous avons déjà abordé la question de l’amélioration de l’accès aux soins de santé que nous
associons à la construction du recul de la pauvreté. Celle de la protection de l’enfance et en particulier celle des enfants de la rue nous tient
particulièrement à coeur. Le nombre élevé d’enfants dans les rues vivant de mendicité au Sénégal, son impact sur l’environnement économique et social ainsi que les conséquences négatives sur le développement des enfants, ont transformé ce problème en fléau social qu’il convient de combattre vigoureusement en plaçant cette problématique au coeur des préoccupations de l’État.
La mendicité au Sénégal ne pourra être éradiquée sans la ferme et constante volonté politique de l’État d’y mettre fin, et la nécessaire collaboration des acteurs concernés, soit :
• les responsables des vrais daara où le Coran est réellement enseigné;
• les parents des élèves apprenant le Coran au sein de daara ;
• les centres d’accueil de l’enfance déshéritée ;
• les bonnes âmes soucieuses de donner l’aumône et faire oeuvre de charité.
• le secteur privé en comportement RSE ;
• les ambassades et consulats des enfants mineurs venus des pays voisins.
En raison du fait que plus de 40% des enfants mendiants du Sénégal sont ressortissants de pays voisins membres de l'UEMOA ou de la CEDEAO, il sera indispensable de fixer par la règlementation communautaire des limites à la libre circulation des personnes et des biens (CEDEAO| UEMOA) pour empêcher la traite des personnes et en particulier celle des enfants. Le retour de cette volonté politique qui fait tant défaut dans notre pays se manifestera en
premier lieu par celui de faire respecter la plupart des accords et traités internationaux signés par notre pays et relatifs à la protection de l’enfance. De même le dispositif juridique existant sera exploité pour engager une action de répression conformément aux lois en vigueur. Les bonnes initiatives des daaras qui refusent la mendicité à leurs talibés seront soutenues en les appuyant au mieux par des projets et programmes à caractère économique et social. En l’absence de solutions familiales, les enfants retirés de la rue ou des daaras à fermer seront placés dans des daaras ou centres d’accueil agréés susceptibles de les prendre en charge convenablement, Les daaras agréés seront impliqués dans le développement du programme des domaines agricoles communautaires (DAC) en renouant avec les traditions de culture des champs jadis attachées si fortement au daara (seront concernés les talibés d’un certain âge). Des bourses de sécurité familiale seront offertes aux familles des enfants en situation de retour en famille. Un important travail de recensement des daaras ouverts sera mené sur toute l’étendue du
territoire en vue de tenir un fichier régulièrement mis à jour en soumettant toute nouvelle ouverture à une obligation de déclaration et à l’obtention d’une autorisation
Ce recensement concernera également les centres d'accueil d'enfants de la rue, permettant de les classer en "centres d'excellence", "centres reconnus", avec bénéfice du statut de "centre d'accueil agréé" périodiquement soumis à des contrôles et inspections. Sous la forme de propositions et de possibilités offertes aux daara agréés, des ponts seront établis entre la formation traditionnelle coranique et celle de l'enseignement classique, générale ou professionnelle, afin de permettre aux élèves de daara d'avoir plus de débouchés au terme de leur apprentissage. La sécurité participe au mieux-être du citoyen. Les forces de sécurité sénégalaises méritent de recevoir un particulier hommage, elles qui ont réussi, à ce jour, à préserver notre pays de certains gros risques. Toutefois, une nouvelle conception de la sécurité du citoyen motivera une réforme des renseignements généraux et de la police afin que ces forces soient moins orientées vers la lutte contre les opposants politiques et la répression des manifestations pacifiques, et par contre davantage soucieuses de la sécurité des citoyens. Les principes de
ronde et d’îlotage seront développés. Des programmes spécifiques concerneront l’extension de l’éclairage public dans les zones les plus exposées à la périphérie des grandes villes, la sécurité routière (basée en particulier sur une analyse systématique et approfondie des causes d’accident), la lutte contre le vol de bétail, la
meilleure implantation géographique des forces de sécurité, la réforme de la formation des policiers. Nos différents corps d’armée (génie militaire, armée de terre, marine, armée de l’air) seront renforcés en vue d’assurer une adéquation continue entre le niveau d’armement et l’évolution des missions qui leur sont assignées. L’évolution de l’environnement politique et économique devra être prise en compte dans le renforcement de nos forces de défense, en particulier la protection de nos ressources halieutiques et pétrolières. A l’instar d’autres corps et corporations la gestion politicienne des carrières y sera bannie et le retour à l’objectivité dans les décisions de promotion sera un des moyens de renforcer le dévouement de nos forces de sécurité au service de la Nation. Nous accorderons une importance particulière à la protection du citoyen consommateur contre la spéculation et les prix excessifs, parce que considérant que la pauvreté est en partie la conséquence de prix artificiellement trop élevés du fait de marchés mal structurés. L’État veillera à l’organisation d’une concurrence véritable pour garantir la formation de prix justes et s’évertuera à faire évoluer les habitudes vers l’affichage des prix dans le commerce. La régulation des prix sera organisée dès lors que l’un des fournisseurs contrôle 25% ou plus d’un marché donné. La régulation des marges sera également surveillée selon le niveau de vente : en détail, en demigros ou en gros. Cette régulation visera à protéger le petit commerce contre des rabais excessifs accordés aux grandes et moyennes surfaces.
Parfois au prix de profondes modifications de pratiques et de mentalités, il nous faudra réinventer une administration au service du citoyen devenu client, et si souvent créateur de richesse au profit de la nation toute entière. L’amélioration des procédures administratives sera possible par un recours systématisé à
l’informatique. L’État mettra en oeuvre un programme de lutte contre la petite corruption dont souffre le simple citoyen dans la plupart de ses contacts avec l’administration centrale ou décentralisée. La lutte contre la grande corruption sera engagée par la révision de notre droit pénal. Les peines seront renforcées pour sévèrement sanctionner tout coupable de crime économique, en particulier de détournement de biens publics. Le préjudice subi par la Nation fera l’objet d’une peine de prison incompressible dès lors qu’il aura dépassé l’équivalent de dix années de revenu moyen du paysan sénégalais. A titre illustratif, cette somme est d’environ cinq millions de FCFA. Le crime économique par détournement de deniers publics sera en outre rendu imprescriptible. Une diaspora mise à contribution
Le Sénégal c’est aussi celui hors de nos frontières. Sénégalais de la diaspora, vous savez rester attentifs à la vie en votre mère patrie, à ses difficultés, ses souffrances et soubresauts politiques. Votre pays ne vous doit rien de moins que sa stabilité sociale grâce aux transferts entrants qui chaque année viennent de votre peine à l’étranger. Nous vous devons avant toute chose un grand respect pour tout cela plutôt que de ne chercher qu’à profiter de votre poids électoral. Ce respect commence par la désignation de consuls et d’un personnel diplomatique, triés sur le volet en raison de leurs compétences, plutôt que choisis membres du parti au pouvoir pour les récompenser ou pour assurer la fraude au moment des élections. Ils auront des consignes claires définissant leur mission : apporter l’assistance idoine à chacun de vous, contribuer à faciliter votre séjour à l’étranger dans le respect des lois de votre pays d’accueil, et tenir à votre
disposition toute la documentation administrative dont vous avez besoin. Au-delà de ce colossal effort qui est le vôtre et qui permet de limiter les affres de la pauvreté dans notre pays, qui entretient l’investissement dans le bâtiment, mais aussi dans les écoles, lycées, centres de santé et lieux de culte et donc de paix, nous organiserons votre contribution à la bonne marche du Sénégal inspirée par les bonnes pratiques que vous aurez relevées dans vos lieux de séjour. Vous êtes déjà bailleurs de nombreux investissements à caractère plutôt social. Les mêmes espaces qui les accueillent peuvent également recevoir des projets avec retours sur investissements assurés. Je pense en particulier à l’eau et l’électricité rurales au travers de formules PPP réservées aux micro-projets. L’aide à votre retour sera sérieusement organisée. La mise en place d’un système d’information de grande qualité et de précision, votre accueil orienté sous forme d’assistance personnalisée et un système de facilitations particulières intégrant parfois l’effort financier du pays que vous décidez de quitter en sont quelques grands axes. Le Sénégal compte sur votre investissement ou sur votre retour pour créer des emplois. Une Nation qui se construit a besoin de tous ses talents, en particulier ceux qui parviennent à briller à l’étranger.
Sénégalaises, Sénégalais,
Il nous faudra réparer notre démocratie abîmée et malmenée. Il nous faudra rendre durables, irréversibles et en amélioration continue les révolutions à engager. Le mot révolution n’est pas trop fort car il s’agit d’adopter une nouvelle réorganisation de l’équilibre des différents pouvoirs dans le cadre d’une nouvelle Constitution inspirée de l'Avant-projet de Constitution de la Commission Nationale de Réforme des Institutions (CNRI). Il nous faudra aussi sacraliser la Constitution.
Nous proposerons donc au peuple sénégalais l’adoption d’une nouvelle constitution pour reconstruire une nouvelle République.
Elle devra prendre en compte les évolutions majeures ci-après:
En ce qui concerne le Président de la République,
Le système de parrainage citoyen sera supprimé pour les candidats des partis ou coalitions de partis. Il sera de nouveau allégé pour les candidats libres.
Le président de la République ne pourra être Chef de Parti ou Membre d'une association durant l'exercice de ses fonctions. Les principes de révocabilité, de responsabilité et de reddition de compte lui seront appliqués dans les conditions déterminées par le constituant. La puissance du pouvoir présidentiel sera largement atténuée : Le Président de la République quittera le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), moins de juges constitutionnels seront nommés par lui, davantage de juges seront directement choisis par d’autres institutions;
Le Premier Ministre et le Gouvernement :
Le Gouvernement sera en charge de conduire la politique de la Nation sous la direction du Premier Ministre.
L’exécutif sera rendu moins dispendieux avec un maximum de 25 ministres, nombre fixé par la loi ; certains d’entre eux devront obtenir le non véto de l’Assemblée nationale ;
Le nombre de membres du Cabinet du Premier Ministre et des Ministres, sera limité au minimum nécessaire et également fixé par la loi.
Avant leur nomination, les Ministres nommés aux départements des Affaires étrangères, des Finances, de l'Intérieur, des Forces Armées, de la Justice, des Mines et Ressources naturelles feront l'objet d'une enquête de moralité comme tous les autres ministres mais en plus seront préalablement auditionnés par une Commission parlementaire. Ne pourront porter le titre de ministre et siéger au Conseil des Ministres que les membres du Gouvernement ayant en charge un département ministériel ainsi que les ministres délégués nommés auprès de ces derniers.
La haute administration En ce qui concerne les attributions de responsabilités au sein de la fonction publique l'appel à candidature sera consacré comme règle générale pour les emplois de la haute fonction publique et de direction des structures du secteur parapublic. Les recrutements civils et militaires seront normalisés, de même que les avancements répondront à des principes républicains, de transparence, de mérite et d'équité. Mettre fin au déni démocratique que représente le scrutin à un tour est la nécessaire première étape de la construction d’une assemblée nationale plus représentative et dotée de pouvoirs renforcés. Le mode d’élection du député sera révisé par un redécoupage des circonscriptions avec un député par circonscription. Ce qui permettra la mise en oeuvre d’un mode de scrutin majoritaire à 2 tours. L’Assemblée nationale perdra cependant sa qualité de « constituant ». L’objectif est de combattre et mettre fin aux incessantes manipulations de la constitution dont sont passés maîtres les régimes africains, celui du Sénégal ne faisant pas exception. Seul le Peuple aura la capacité de modifier la loi fondamentale par voie référendaire. Il n’y a pas d’autres moyens de se protéger contre ces incessantes manipulations de notre constitution au gré de la volonté du Président en place d’assurer sa réélection et asseoir un pouvoir quasi absolu. L’Assemblée nationale, nantie de pouvoirs renforcés, deviendra le lieu d’impulsion de la vie politique nationale: Elle pourra déclencher une procédure de mise en accusation du Chef de l’État , du Premier
ministre ainsi que des Ministres, notamment pour violation de serment, violation délibérée de la Constitution, atteinte grave aux droits de l’Homme, malversation, corruption, enrichissement illicite, atteinte à l’unité nationale et à l’intégrité du territoire, etc. Elle sera tenue de mener au moins deux commissions d’enquête chaque année, l’une d’entre elles étant à l’initiative de l’opposition. Puisque le passé récent a prouvé que l’exécutif pouvait être le repère de copains et de coquins,
l’Assemblée nationale disposera d’un droit de veto sur la signature de conventions conduisant à l’exploitation des ressources naturelles du Sénégal. L’audition des bénéficiaires pressentis lui sera possible. Les remises de pénalités fiscales ayant une incidence forte sur les recettes budgétaires, et supérieures à un montant à déterminer devront être votées par l’Assemblée nationale. Le Président de l'Assemblée nationale et le questeur seront soumis à la Déclaration de patrimoine et à la Déclaration d'intérêt.
La suppression du Haut Conseil des Collectivités Locales et Territoriales, ainsi que du Conseil Economique Social et Environnemental au profit de Conseils Economiques Sociaux et Environnementaux pour chaque pôle économique permettra une mise à disposition de compétences au bénéfice de la décentralisation.
Sénégalaises, Sénégalais,
Ma profonde préoccupation de rendre au pouvoir judiciaire du Sénégal son indépendance ne vous étonnera pas. La Justice constituant un rempart de la démocratie, elle sera soustraite de la tutelle de l'exécutif (et du législatif) et assurera son pouvoir sans entrave. D’importantes réformes seront opérées et le Pouvoir judiciaire sera exercé par la Cour Constitutionnelle, le Conseil d’État, la Cour de Cassation, la Cour des Comptes et les Cours et Tribunaux.
La création de la Cour constitutionnelle sera un élément clé de la réforme judiciaire. Elle sera la plus haute juridiction de l'Etat. Elle connaîtra de la constitutionnalité des lois et des engagements internationaux, des conflits de compétence entre l'Exécutif et le Législatif. Elle garantira les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques. Il sera mis fin à sa traditionnelle incompétence. Toute personne physique ou toute personne morale légalement constituée pourra, dans les conditions prévues par la loi, saisir la Cour Constitutionnelle d’un recours lorsqu’une mesure d’ordre législatif lui paraît porter atteinte aux droits fondamentaux de la personne humaine ou remettre gravement en cause les principes et valeurs de la République, de la démocratie et de l’Etat de droit.
Le Conseil supérieur de la Magistrature (CSM), organe de gestion de la carrière des magistrats, garantira le principe de l'inamovibilité des juges du siège. Il sera présidé par le Président de la Cour Constitutionnelle. Outre le Président de la Cour Constitutionnelle et deux personnalités de haut rang, désignées respectivement par le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale, le Conseil Supérieur de la Magistrature sera composé, au titre des membres de droit, du Président du Conseil d’Etat, du Premier Président de la Cour de Cassation et du Procureur général près ladite Cour, des Premiers Présidents des Cours d’Appel et des Procureurs généraux près lesdites Cours et, au titre des membres élus, d’au moins un nombre égal de membres choisis conformément aux dispositions prévues par la loi organique sur le Conseil Supérieur de la Magistrature. Le Parquet ne sera plus sous la tutelle du ministère de la justice. Il sera institué un Juge des libertés pour mettre fin aux abus de la détention préventive. L’Agence judiciaire de l’Etat sera renforcée, préparant les plaintes de l’Etat en ayant recours,
lorsque nécessaire, à des cabinets d’avocats ou autres experts externes. L’accès aux medias publics doit refléter la qualité de notre démocratie. Les médias publics seront mis en compétition avec ceux du privé pour parvenir à privilégier la qualité de l’information par eux donnée et son caractère général. Les médias publics ne seront plus utilisés comme supports de propagande du parti au pouvoir, mais comme moyens de promotion des actions gouvernementales en direction des citoyens. L’ensemble du système audiovisuel, public et privé, sera mis à contribution pour diffuser des publicités portant information, prévention, éducation civique, etc. des citoyens. Les thèmes abordés par les productions seront relatifs à la santé, l’hygiène, la formation à des techniques agricoles et à l’usage des intrants agricoles, etc. Assurer une répartition équilibrée de ces passages entre les différents medias publics et privés sera le rôle principal du ministère en charge de la communication. Le règlement de ces passages remplacera le renoncement illégal à des impôts dus, ou la distribution de subventions trop souvent basée sur des critères purement subjectifs, toutes mesures destinées à créer la dépendance de la presse. Pour finir, notre projet est de hisser la solidarité nationale comme un nouveau paradigme et symbole du commun vivre ensemble :
• Solidarité avec les handicapés en réformant le programme national d’insertion des handicapés afin de leur assurer une discrimination positive par des emplois réservés dans la fonction publique, et des mesures incitatives de recrutement dans le secteur privé ; l’État et les collectivités veilleront en outre aux aménagements urbains et des services permettant d’en faire des usagers de plein droit ;
• Solidarité avec les personnes du 3ème âge en favorisant leur prise en charge sanitaire tout en évitant les écueils du Plan Sésame, et asseoir une valorisation des pensions de retraite sur la base d’une étude rigoureuse et d’une rationalisation de la gestion des fonds de retraite ;
• Solidarité avec les femmes et les enfants. En effet, cette catégorie de la population est l’objet d’une violence de plus en plus récurrente. Nous nous engageons à durcir la règlementation de nature à la rendre plus répressive et fortement dissuasive.
Conclusion
Les grandes lignes, les choix majeurs de notre projet pour le Sénégal viennent de vous être présentés. Les détails en sont disponibles dans le programme que nous avons conçu de manière inclusive, en ouvrant la participation à sa rédaction à tous les compagnons du parti mais aussi aux citoyens qui ont souhaité apporter leurs contributions. Qu’ils soient tous remerciés. Les réformes institutionnelles qui seront engagées, s’inspirent beaucoup des travaux des Assises
nationales. Elles représentent pour nous un engagement de programme minimum auquel nous tiendrons à rester fidèles. Vous avez désormais une idée claire de notre ambition pour le Sénégal. Dans un passé vieux de quelques années, d’autres programmes vous ont été présentés ; d’autres engagements ont été pris pour solliciter vos suffrages. Jugez notre engagement en vous référant à notre passé et à notre parcours professionnel et social. Nous vous avons souvent rappelé notre conception de la politique, du développement économique, de la solidarité, de l’action de l’administration. Notre projet est un projet porteur de révolutions multiples, qui vise à rénover, après tant d’années d’échec, l’organisation et le système économique et social de notre pays. C’est un projet vivifiant pour une jeunesse à laquelle nous cherchons à redonner espoir. Une jeunesse encadrée et guidée par quelques aînés porteurs d’expérience, et qui craignent, comme
l’histoire l’enseigne, que lorsque toutes les portes de l’espoir se ferment il ne reste plus que désespoir, source de révolutions violentes et autres déflagrations. Il ouvre aussi des perspectives aux femmes, couche laborieuse de notre société en leur permettant un plein épanouissement économique et social.
Sénégalaises, Sénégalais, il est l’heure !
L’heure de se redresser et se tenir debout pour une refondation en profondeur : celle dont notre pays a besoin.
Menons le Sénégal sur une route des possibles, une route sur laquelle nous ont déjà précédé des pays comme le Cap Vert, le Rwanda ou le Ghana.
Une route de citoyenneté active qui renforcera notre profonde et féconde adhésion aux valeurs qui nous rattachent à notre cher pays en réactivant notre sentiment d’identité nationale et en cimentant notre partage d’un destin commun pour lequel, s’engager, donner et servir, devrait être le meilleur viatique.
Une route où le travail sera élevé au rang de priorité et d’institution, capable de conférer ou de restaurer chez l’individu son être social, capable de ranimer son éminente dignité et de lui donner des raisons de croire en lui, en sa communauté, en son pays et d’y vivre en paix et en harmonie en contribuant positivement à son développement et à son rayonnement.
Ce défi nous interpelle tous. Il interpelle plus encore les jeunes générations héritières d’un pays aux grandes et anciennes traditions qui doivent se lever comme un seul homme pour construire et défendre un avenir à la mesure de leurs espérances.
Compagnons de l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail, aujourd’hui,
Sénégalaises et Sénégalais, demain,
Il me revient l’honneur de solliciter votre confiance,
Pour reconstruire ensemble le Sénégal.
Devant Dieu, je fais le serment de ne jamais faiblir face à l’exigence de la mériter,
Vive le Sénégal !"
SOHAM WARDINI, SYMBOLE DE LA CONTINUITÉ
À l’issue d’un conseil municipal réuni en session extraordinaire ce samedi 29 septembre, l'ancienne première adjointe a été élue maire de Dakar - Pour ses partisans, cette victoire est également celle de Khalifa Sall
Jeune Afrique |
Manon Laplace |
Publication 30/09/2018
Ils sont 83 conseillers municipaux à s’être succédé, samedi 29 septembre, derrière le tissu en satin beige de l’isoloir de la salle du conseil, au premier étage de l’Hôtel de ville de Dakar. Une procession qui aura duré à peine plus d’une heure, au terme de laquelle Soham El Wardini est devenue la première femme maire de la capitale sénégalaise. Elle sera chargée de mener à son terme le mandat de Khalifa Sall, révoqué le 31 août dernier.
Sur 88 votes comptabilisés (certains par procuration), 64 sont allés à l’ex-première adjointe de Khalifa Sall, lui offrant une large victoire dès le premier tour. Un résultat sans surprise pour les élus de la coalition Taxawu Dakar, majoritaire au conseil. « La ville va opter pour la continuité, donc voter pour Soham El Wardini qui a assuré l’intérim depuis l’incarcération de Khalifa Sall en mars 2017« , assurait le conseiller municipal Bamba Fall avant l’ouverture du scrutin.
Au fond de la salle, Banda Diop, le maire de la commune de Patte d’Oie, affiche un visage fermé derrière les épais carrés noirs de ses lunettes. Depuis le 17 septembre, cet ancien proche de Khalifa Sall, lui aussi membre de Taxawu Dakar, s’est lancé en solo dans la course à la mairie. Dans son sillage, Moussa Sy, conseiller municipal et second adjoint de Khalifa Sall, a annoncé sa candidature in extremis, à la veille du scrutin. Ils ont obtenu respectivement 11 et 13 voix. « Toutes les obédiences politiques sont représentées dans ce conseil municipal, il est donc naturel que tout le monde n’ait pas été derrière Khalifa », analyse Dada Mboup, une sympathisante de l’ancien maire incarcéré venue assister au vote dans le public.
En terrain conquis
Si Soham El Wardini a souhaité jouer l’apaisement, proposant de « tendre la main » notamment à Moussa Sy, avec qui elle collabore depuis 2009, nombre de soutiens de Khalifa Sall ont vu dans ces candidatures dissidentes une trahison fomentée par le camp au pouvoir. Pris à partie dans la salle du conseil, Moussa Sy et Banda Diop sont sortis de l’hôtel de Ville sous les sifflets et les injures, rudement bousculés par des militants que le service d’ordre a eu toutes les peines du monde à maîtriser.
Un miroir inversé de l’accueil réservé à Soham El Wardini, en terrain conquis ce samedi. Dès son arrivée sur l’estrade, la nouvelle édile a déclenché les vivats des conseillers. Lors du décompte des bulletins verts, couleur qui la représentait, de vives ovations se sont élevées depuis le parvis de la mairie, où s’étaient massés des partisans avides de suivre le décompte se tenant un étage au-dessus de leurs têtes.
Prochaine échéance : décembre 2019
Pour les soutiens de la nouvelle maire, « la victoire de Soham El Wardini est celle de Khalifa Sall ». L’édile promet de faire honneur aux Dakarois en poursuivant les projets initiés avec le maire incarcéré, tout en conservant les équipes de ce dernier. Si elle dit ne pas encore s’en soucier, Soham El Wardini a devant elle l’échéance électorale du 1er décembre 2019, date des prochaines élections locales.
"LE SÉNÉGAL ET LE NIGÉRIA ONT DÉMONTRÉ QU'ILS PEUVENT RIVALISER AVEC TOUT LE MONDE "
Le président de la Fiba, Horacio Muratore, ne tarit pas d’éloges à l’endroit des deux équipes de basket féminines, participantes au Mondial en Espagne
«Une des plus belles histoires de cette Coupe du Monde est sans aucun doute le parcours des équipes africaines. Le Nigeria et le Sénégal ont démontré qu’ils peuvent rivaliser avec tout le monde. Je les félicite d’ailleurs pour leur résultats. Le Sénégal a remporté un succès historique (contre la Lettonie) et a réalisé un grand match contre l’Espagne (mercredi en match de qualification pour les quarts de finale). Il a fait un peu trembler l’hôte du tournoi. Cela aurait été fantastique que les deux équipes africaines atteignent les quarts de finale.
Le Nigeria a mieux joué que les USA – champions du monde en titre – au cours de la première mi-temps du quart de finale de vendredi et il a battu la Turquie, l’Argentine et la Grèce. C’est extrêmement positif pour le basketball africain et pour le sport en général», a-t-il confié dans un entretien accordé à Fiba.com.
Il souhaitait que les équipes africaines aillent plus loin dans la compétition en dépassant les quarts de finale.
ET SI SIBETH DIÉDHIOU VOUS ÉTAIT CONTÉ !
Découverte de celle qui fut forcée à régner sur le peuple de la basse Casamance, également appelée pays Kassa
Sibeth Diédhiou ne pouvait échapper à son destin. Fuir jusqu’en Guinée-Bissau n’y fera rien. Elle était destinée à être reine pour succéder à sa mère dans le Floup. A Siganar, où les souvenirs de la prêtresse sont encore frais, sa fille, Saber Lambal Diatta, sous le poids de l’âge et de la maladie, marche courbée en deux et parle difficilement. Avec pour seul vêtement un pagne noué autour de la taille, des touffes grisonnantes en guise de chevelure, elle sort avec peine de sa case. Avec peine, elle s’assoit à même le sol à l’entrée de la véranda. «Les gens viennent souvent ici pour en savoir plus sur ma mère Sibeth, bredouille-t-elle en Diola, traduit par notre guide. Actuellement, je suis malade et j’y parviens difficilement, mais je vais quand même essayer.» Sous une fine pluie, la voix chevrotante et le corps tremblant, Saber Lambal nous apprend que sa mère Sibeth Diédhiou, née en 1915 à Siganar, était une prêtresse choisie par Dieu pour succéder à sa mère, Ayimpène, et communier avec les populations. Une succession qui ferait suite à des rêves au cours desquels un génie apparaissait à Sibeth pour exiger qu’elle assume la fonction de reine, en prenant la place de sa mère auprès des fétiches.
Plusieurs rêves avec la même injonction que Sibeth voulut ignorer dans un premier temps. «Elle ne voulait pas accepter au début, parce qu’elle avait peur, explique Saber Lambal. C’était l’époque coloniale et les populations n’étaient pas en très bons termes avec les colons.» De plus, Sibeth se disait que les villageois ne croiraient pas que la jeune fille qu’elle était devait devenir reine du jour au lendemain. Pour échapper à ces visions qui la tourmentaient, elle quitta son village pour se réfugier en Guinée-Bissau. Mais les esprits ne la lâchent pas, elle tombe gravement malade, perdant presque la vue, et ses rêves se poursuivaient. «Les esprits lui ont fait comprendre que si elle n’acceptait pas la charge qui lui était dévolue, elle risquait sa vie, raconte sa fille. Le guérisseur consulté lui dit également la même chose. C’est ainsi qu’elle fut contrainte de revenir au village et d’assumer son rôle.»
Un règne imposé
De retour à Siganar, Sibeth rassemble les habitants du village pour leur faire part de la situation. «En ce moment, c’était pratiquement la sécheresse, mais Sibeth révèle aux villageois les sacrifices et prières à faire, et il y eut une pluie abondante juste après. Cela lui facilita la tâche et les villageois crurent en elle.» Sibeth Diédhiou avait le don de voir ses prédictions se réaliser. L’administration coloniale qui doutait de ses pouvoirs au début, voulut lui créer des difficultés. «Les colons lui ont créé beaucoup de problèmes, voyant en elle une menace à leur autorité, confie Saber Lambal. Mais lorsqu’ils n’ont plus eu de doute sur ses dons surnaturels, ils ont décidé de collaborer avec elle. Elle était une sorte d’intermédiaire entre les villageois et l’administration coloniale.» Son règne fut d’ailleurs marqué par sa collaboration avec les colons. Pour assurer la paix, elle convainc les villageois d’accepter de verser le tribut en denrées alimentaires imposé par les Européens. Mais cela ne manqua pas de créer des mécontents, qui commencèrent à remettre en cause son autorité. Ce fut la révolte, certains villageois voulurent se débarrasser de Sibeth. Il fallut l’intervention de l’administration coloniale, et Sibeth se réfugia au village de Santhiaba, à Ziguinchor, pour sauver sa vie.
Héritière d’Aline Sitoe Diatta ?
Mais les versions de l’histoire diffèrent. Pour certains, Sibeth Diédhiou a ‘’hérité’’ des fétiches d’Aline Sitoe Diatta. Etant jeune, elle fit partie de la délégation de Siganar envoyée à Kabrousse (ou Cabrousse) pour prêter allégeance à Aline Sitoe. L’on raconte qu’elle fut ainsi initiée aux mystères et rituels des fétiches. Et au moment de la révolte du peuple Floup, lorsque les villageois refusèrent de fournir la réquisition de riz exigée par l’administration coloniale, avant de prendre la fuite à l’arrivée des troupes françaises, l’histoire raconte que Sibeth, restée seule, ramassa les fétiches de la prêtresse Aline Sitoe pour les rassembler dans sa propre concession. Elle entretient les fétiches de sacrifices et de libations tout le temps que dura la fuite des villageois. A la disparition d’Aline Sitoe, les habitants regagnèrent les villages et réclamèrent à Sibeth les fétiches. Mais celle-ci refusa, arguant que puisqu’elle seule avait eu le courage de rassembler les fétiches et de les entretenir, au moment où les villageois les avaient abandonnés, elle continuerait désormais à le faire. Ainsi, à la disparition d’Aline Sitoe, Sibeth, détentrice de la totalité des fétiches, apparut comme sa digne héritière.
Pour l’heure, il n’y a pas d’héritière connue de Sibeth Diédhiou, morte en 1976. Sa fille, Saber Lambal, vit dans un grand dénuement à Siganar. Ce village qui s’efforce de conserver l’héritage de son illustre reine.