Le nouveau gouvernement sénégalais, sous la direction du Premier ministre Ousmane Sonko, a récemment pris des initiatives louables visant à renforcer la transparence et l’efficacité des institutions publiques. Lors d’une intervention devant la jeunesse patriotique du Sénégal, Sonko a évoqué des audits approfondis dans plus de 60 structures administratives et a souligné la nécessité de renégocier les contrats miniers et gaziers pour garantir que les richesses naturelles profitent pleinement aux citoyens sénégalais. Peut-être que les pierres précieuses trouveront enfin leur chemin jusqu’aux routes sénégalaises, au lieu de disparaître mystérieusement !
Lors d’une récente intervention, Ousmane Sonko a rappelé à la presse ses obligations telles que stipulées dans le Code de la presse sénégalais. Sonko a souligné que les médias, tout en jouant un rôle crucial dans la société, doivent respecter les principes d’éthique et de responsabilité. Son discours visait à rappeler aux organes de presse qu’ils doivent agir en toute transparence et équité, sans se soustraire aux règles et devoirs qui leur incombent. En d’autres termes, la presse doit être aussi transparente qu’une vitre bien nettoyée -et non pas opaque comme un vieux rideau de cuisine !
L’expression «quatrième pouvoir» désigne la presse et les médias, reconnus pour leur rôle de contre-pouvoir face aux trois pouvoirs traditionnels de l’Etat : Exécutif, Législatif et Judiciaire. Ce terme souligne l’importance des médias dans la surveillance des actions gouvernementales et dans la protection de la démocratie. Toutefois, il est crucial de noter que ce pouvoir n’est pas accompagné d’une immunité similaire à celle des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. La presse doit opérer en respectant les lois en vigueur, sans bénéficier de protections spécifiques contre les conséquences de ses actions illégales ou non éthiques. En gros, même les super-héros doivent payer leurs contraventions de stationnement !
Il devient impératif de réguler le secteur des médias au Sénégal afin d’assurer un fonctionnement équitable et transparent. Les entreprises de presse, comme toute autre entité économique, ont le devoir de s’acquitter de leurs obligations fiscales. Le respect de ces obligations est essentiel pour garantir une concurrence loyale et contribuer au développement économique du pays. En s’assurant que les médias paient leurs impôts comme tout le monde, le Sénégal peut renforcer la crédibilité et l’intégrité de son paysage médiatique, tout en soutenant les efforts de développement national. Après tout, même le journaliste le plus audacieux a besoin de payer ses factures d’électricité !
Le discours de Ousmane Sonko rappelle à juste titre que la presse, tout en jouant un rôle vital de contre-pouvoir, doit également respecter les lois et les règles éthiques. La régulation et la responsabilisation des médias sont essentielles pour maintenir la confiance du public et garantir une presse libre mais responsable. Le nouveau gouvernement sénégalais, en prenant des mesures pour renforcer la transparence et l’équité, montre la voie vers un avenir où les médias et les autorités publiques travaillent ensemble pour le bien de tous les citoyens. Et qui sait, avec un peu de chance, nous pourrions même éviter les gros titres sensationnels sur les déboires fiscaux de magnats des médias !
Moustapha SENE,
Mba Management et Sécurité des SI
Par Moustapha DIAKHATE
PETROLE : TOUJOURS L’ALCHIMIE DE SENGHOR
L’unité flottante d’extraction, de stockage, de pré-traitement puis de transfert, présente à 90 km au sud de Dakar solidement à près de 780 mètres en profondeur par un système d’amarrage à tourelle externe, porte le nom du premier Président du Sénégal
L’unité flottante d’extraction, de stockage, de pré-traitement puis de transfert, présente à 90 km au sud de Dakar solidement à près de 780 mètres en profondeur par un système d’amarrage à tourelle externe, porte le nom du premier Président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor.
Senghor fut presque obsédé par notre bassin sédimentaire et surtout par les traces d’huile sur l’étendue de notre vaste zone économique exclusive que nous partageons sur presque 100 000 km2 avec la Guinée-Bissau
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, et après le passage du Général De Gaulle à Dakar, le député puis futur président de la jeune République du Sénégal comprit très tôt les enjeux énergétiques pour un pays dans un monde de productivité industrielle. En effet, le député Senghor suivit de très près les dures négociations entre Etats européens pour le charbon et l’acier.
Juste avant les indépendances, le Président Senghor supervisa lui-même les transferts d’archives du Brgm et de l’Orstom afin de permettre au jeune Etat sénégalais d’accentuer les recherches géologiques et minières onshore et offshore. La roche mère de la partie Nord-Ouest mais surtout les résultats des sondages en offshore au Sud, sur la Zee entre le Sénégal et la Guinée-Bissau, sont concluants, seulement ce sont des huiles fortes en soufre et leur raffinage non encore standardisé. En visionnaire, le Président Senghor pressa son gouvernement de financer la première raffinerie de l’Afrique francophone en 1964, avec les paramètres et caractéristiques chimiques du brut nigérian, très léger, presque sans soufre, donc très facile à raffiner. Senghor sut que les réserves d’hydrocarbures du Nigeria sont importantes et que l’axe Dakar-Abuja était un chemin court et très sûr pour les tankers. Senghor fut précurseur en tout.
Il est vrai que la guerre d’indépendance en Guinée-Bissau et surtout le pétrole lourd -sa forte teneur en soufre- qui y gît n’assurent pas aux investisseurs un Capex intéressant, notamment aux normes environnementales d’émission et de rejet dans l’atmosphère. Malgré tout, le 1er Président du Sénégal fut convaincu qu’une découverte majeure dans la roche-mère atlantique attendait notre pays, et il en fit un motif pour précipiter son départ à la tête de l’Etat. D’ailleurs, dans ses tournées d’adieu aux chefs religieux en 1980, son âge et la découverte du pétrole furent les causes de sa retraite politique.
Aujourd’hui , 75 ans après les efforts tant déployés par l’illustre premier Président pour faire du Sénégal un mecca énergétique, notre pays, 21ème économie d’Afrique avec 30 milliards de Pib, n’arrive pas à mettre en œuvre une raffinerie capable de raffiner, de processer tout le brut issu de ses champs d’hydrocarbures que le Fpso Léopold Sédar Senghor extrait à partir de 10 puits sur les 21 puits forés et percés de Sangomar deep offshore.
La Sar ne peut même pas processer 30% du brut de Sangomar dont le potentiel approche le milliard de barils pour 20 ans d’exploitation. Nous sommes loin de la chaîne de valeur intégrée pourvoyeuse en valeur ajoutée et en emplois. Quelle impréparation des deux régimes libéraux qui se sont succédé ?
Entretemps, nos huiles, un peu plus soufrées, sont semblables au brut russe -l’Oural- et le brut d’Oman que les raffineries asiatiques processent dans le respect des normes d’émission ; ce qui, au temps de Senghor, fut une contrainte avec les deux milliards de barils de pétrole lourd entre le Sénégal et la Guinée-Bissau dans notre Zee commune.
Petrosen doit faire mieux et plus que Senghor et sa raffinerie. L’urgence pour sa filiale trading n’est pas une usine d’urée, mais une seconde raffinerie de grande capacité pour transformer localement nos hydrocarbures dans leur texture actuelle. Ainsi, nous serons dignes du rêve de Léopold.
Moustapha DIAKHATE
Expert en Infrastructures et Politique Energie
Par Seydi GANGUE
REDEFINIR LA MISSION DE LA SAED DANS L’INTERET DES PAYSANS
Parler de la Société d’aménagement des terres du Delta (Saed) m’a toujours taraudé l’esprit en tant que fils du monde rural et en tant que reporter pour plusieurs organes de presse.
Parler de la Société d’aménagement des terres du Delta (Saed) m’a toujours taraudé l’esprit en tant que fils du monde rural et en tant que reporter pour plusieurs organes de presse. J’ai couvert plusieurs activités parlant d’agriculture dans la vallée et à chaque fois le premier constat est le fossé entre le paysan et ce qu’il devrait vivre comme bonheur ou bien être comme son alter ego acteur dans d’autres pays.
A mon avis, le paysan podorois ne vit pas, l’on suce le sang de nos braves agriculteurs qui sont les parents pauvres d’un système qui ne leur laisse aucune chance de vivre convenablement. Le paysan apparait comme un misérable en quête de pitance devant des banques, agences et autres qui, selon des informations concordantes, avancent des chiffres qui sont loin de refléter la réalité aux autorités.
Une tournée dans le département de Podor permet de constater l’infirmité des surfaces emblavées par rapport au potentiel de 140.000 ha sur les 240.000 que compte la vallée, de Saint-Louis à Bakel. Plus grave, dans le département de Podor, moins de 30℅ des terres disponibles sont aménagés. Dans ce cas, comment peut-on parler d’autosuffisance alimentaire ? L’État du Sénégal a fait d’énormes efforts en créant des pistes de production. Mais quels produits transporter si les organisations paysannes peinent à aller en campagne pour diverses raisons ? Le regard jeté en certains endroits donne des frissons car, malgré la faiblesse des aménagements, beaucoup de surfaces sont en souffrance et les paysans en pâtissent. Passer dans l’Île à Morphil (bande de terre de 220 km) qui offre un décor indigne de ce qui était annoncé comme la «Californie du Sénégal». De qui se moque-t-on ? Les agriculteurs croulent sous le poids de la dette, les taux usuriers des banques ne leur permettent pas de vivre de leur labeur et, au même moment, l’on annonce plusieurs milliards investis, diton, pour booster la production. Que nenni ! La richesse du département de Podor avec le soleil, des terres fertiles, l’eau avec le Fleuve Sénégal et ses 4 défluents, ne sert à rien.
La SAED doit changer de fusil d’épaule et servir les paysans qui, malgré les efforts énormes qu’ils font, ne vivent vraiment pas de leurs terres alors que c’est bien possible. Il faut redéfinir la lettre de mission de la SAED au lieu de la réduire à celle d’appui depuis la mise en œuvre des politiques d’ajustement structurel. Il est bien possible pour l’agriculteur podorois de vivre comme son homologue européen ou d’ailleurs, mais au même moment, réduire le train de vie de la société au bénéfice du paysan autochtone.
Seydi GANGUE
Instituteur
Formateur en management de Projets et de programmes
Consultant
PAR Birane Gaye
LES SÉNÉGALAIS ONT CHOISI LA DÉMOCRATIE
EXCLUSIF SENEPLUS - La vocation du Sénégal n'est pas de suivre les aventuriers de l’AES. Le 24 mars, le peuple a lancé un message clair au nouveau pouvoir. Il faut savoir l’entendre et se méfier des sirènes nationalistes
Le général Mamadi Doumbouya, le colonel Assimi Goïta et le capitaine Ibrahim Traoré devaient être dans leurs petits souliers quand Bassirou Diomaye Faye, président légitimement élu du Sénégal, est venu leur rendre visite. Malgré les tensions qui ont eu cours au Sénégal à la suite des nombreuses « affaires Sonko » et du report de la présidentielle décidé par Macky Sall, le pays a tenu. Le Conseil constitutionnel a censuré l’Exécutif, qui s’est plié aux exigences des Sept Sages. Le peuple sénégalais a fait le reste, en se rendant massivement aux urnes pour élire son président parmi dix-neuf candidats. Le scrutin, marqué par un calme exceptionnel, a été libre, démocratique et transparent en dépit des Cassandre qui, de l’intérieur et de l’étranger, agitaient la menace du chaos généralisé voire de l’effondrement du pays.
Le Sénégal a confirmé son ancrage dans la démocratie libérale et du modèle électoral ouvert qui permettent une compétition entre des projets concurrents avec comme arbitre suprême le peuple souverain.
La présidentielle du 24 mars dernier a été une respiration pour tous ceux qui désespéraient de la démocratie dans une région ouest-africaine engluée dans les putschs, les dérives autoritaires et l’assujettissement à des puissances étrangères, dont certaines envisagent de devenir maîtresses et alliées des nouveaux autoritarismes tropicaux.
En faisant le choix d’élire son président au suffrage universel, ce qui signifie tourner le dos à la tentation du pire, le peuple sénégalais a lancé un message clair au nouveau pouvoir : nous ne voulons pas du modèle illibéral vendu notamment par des puissances conquérantes à leurs nouveaux alliés, mais de la poursuite dans la voie de la démocratie libérale qui seule permet l’alternance au pouvoir et la garantie de l’effectivité des libertés publiques. Il ne faudrait pas que les nouvelles autorités sénégalaises se trompent dans le décryptage du message des électeurs. Celui-ci est éloquent, car il consacre, avec la victoire d’un candidat de l’opposition sans expérience de l’élection ni du gouvernement, la compétition électorale pour choisir librement à qui confier le pouvoir.
Que le président sénégalais fasse la tournée des voisins après son élection est tout à fait normal. Mais il lui faut toujours garder à l’esprit que le Sénégal n’est ni le Mali, ni le Burkina Faso encore moins la Guinée. Aussi, il lui faut se souvenir de la manière dont il est arrivé au pouvoir ; ni par les armes ni par une insurrection. Il a été élu démocratiquement et installé à la suite d'une prestation de serment devant le président du Conseil constitutionnel et d'une passation de service en bonne et due forme avec son prédécesseur. L’heure n’est pas au rapprochement avec des régimes autoritaires dont les dirigeants ont arraché le pouvoir par le fusil sous prétexte que la situation de leur pays était déplorable et que l’armée subissait des défaites face aux bandes armées. Désormais, ils jouissent du confort du pouvoir dans des palais cossus, loin des théâtres d'opérations, se partagent les postes de responsabilité, répriment toute voix discordante et décident de se maintenir au pouvoir sans mandat populaire.
Au Burkina Faso, des opposants et des membres de la société civile sont régulièrement arrêtés s’ils ne sont tout bonnement envoyés au front. En janvier Me Guy Hervé Kam, avocat d’Ousmane Sonko, est enlevé et détenu au secret. Libéré le 30 mai, il a, le même soir, encore été arrêté par la gendarmerie. Récemment, le capitaine Ibrahim Traoré s’est octroyé sans coup férir un mandat « cadeau » de cinq ans.
Au Mali, la junte non seulement refuse de rendre le pouvoir après quatre années de transition, mais Assimi Goïta a suspendu par un décret du 10 avril 2024, les activités des partis et des associations politiques. Les médias ont également reçu l’ordre de ne plus traiter l'actualité politique.
Au Niger, non content de détenir l’ancien président élu démocratiquement Mohamed Bazoum, le régime putschiste empêche toute forme d’expression démocratique. Le général Abdourahamane Tiani, chef de la junte, déroule le tapis rouge à Niamey à Kémi Séba et Nathalie Yamb, activistes pseudo-panafricanistes, mais en vérité relais propagandistes de Moscou en Afrique francophone. En Guinée, quatre radios et une télévision ont été interdites par le régime au mois de mai.
Les délires anti-impérialistes, qui sont en réalité une manière de masquer ses carences en matière économique et de transformation sociale, masquent mal une incapacité à gouverner dans la transparence et la vertu. Il est attendu des dirigeants de la sous-région une volonté et une ambition pour plonger leurs pays dans la modernité mais pas dans la reconstitution d’un agenda qui fait office de vieilles reliques tiers-mondistes. Les discours enflammés sur la souveraineté, le nationalisme économique et le patriotisme ne sont que leurre face aux vraies urgences qui relèvent de la transformation de l’économie, de l’industrialisation, de la réalisation d’infrastructures modernes et de l’attrait des investissements en vue de générer de la croissance et des emplois massifs. La compétition entre les pays du champ devrait se situer au niveau de savoir qui attire les plus grandes multinationales pour lutter contre le chômage des jeunes et non qui montrerait le plus d’attachement à la milice Wagner pour sécuriser son territoire.
Heureusement que le président Faye a catégoriquement fermé la porte d’une adhésion du Sénégal à l’Association des États du Sahel. Le Sénégal est un leader de la Cedeao et de la zone Franc et devrait l’assumer en pesant de tout son poids diplomatique pour renforcer l’intégration régionale, la monnaie commune et la dynamique d’échanges commerciaux au sein de la communauté régionale.
La vocation du Sénégal n'est pas de suivre les aventuriers de l’AES, mais de rester dans le giron des grandes démocraties de la région, avec le Ghana et le Cap Vert. Il s’agit aussi pour le Sénégal de rattraper le voisin et rival ivoirien dont le miracle économique se réalise sous nos yeux. Dakar doit s’éloigner de la tentation autoritaire et renforcer sa coopération avec des puissances démocratiques comme le Nigéria, l’Afrique du Sud, sur le continent, la France, l’Allemagne et le Brésil, hors de nos frontières. Trêve de fanfaronnades nationalistes ! Le Sénégal a vocation à s’ouvrir à toutes les partenaires économiques qui respectent le principe de non-ingérence et qui apportent de la valeur ajoutée à son ambition économique.
Les Sénégalais votent depuis un siècle et demi. Ils ont expérimenté la presse privée depuis les années 70. Le droit de marche est inscrit dans la Constitution depuis janvier 2001. Nos compatriotes, qui en 2022, ont donné plus de députés à l’opposition au Parlement, ont plusieurs fois réalisé une alternance au sommet de l’État par le biais du suffrage universel. Ce peuple est jaloux de sa liberté et de son pouvoir conférés par la Constitution. Il a, le 24 mars dernier, fait une nouvelle fois le choix de la pérennité d’un modèle démocratique qui connaît ses limites certes mais garantit l’exercice des libertés fondamentales. Les Sénégalais ont choisi la démocratie, il faut savoir l’entendre, se méfier des sirènes nationalistes et faire nôtre le rendez-vous senghorien du donner et du recevoir.
Birane Gaye est enseignant.
par Dija Sow
ET MAINTENANT, QUE FAIT-ON ?
La France est le rêve de ceux qui la visitent, la projection de ceux qui la font, le souhait de ceux qui y résident. De gauche ? de Droite ? Aucune importance. Il est temps d’être à la fois humaniste et démocrate
Encore un matin. Encore un matin où le si mal nommé "Rassemblement National" (RN) est aux portes du pouvoir. Un parti dont les racines puisent allègrement dans le pire vice d’une société : la peur de l’autre, le rejet. L’arbre RN a des racines vivaces dans le négationnisme et le pétainisme, mais son tronc, c’est la petite entreprise familiale des Le Pen. Et puis il y a ses bourgeons, les p’tits gars sympas qui prennent des mairies en sympathisants avec la population et Bardella-belle-gueule qui passe si bien sur TikTok.
Pourquoi je ne veux pas que le RN gouverne le pays ?
D’abord parce qu’il le gouvernera mal. La première victime de la guerre, c’est le plan qu’on établit pour la gagner. Voilà pourquoi aucun parti ne tient ses promesses de campagne. Une fois qu’on a des idées, il faut faire avec les imprévus internationaux : crise économique pour Sarkozy, attentats sur le territoire pour Hollande, crise Covid pour Macron…et donc ils prennent des décisions moins basées sur leur programme que sur leurs convictions.
Et moi ça ne me dérange pas qu’un élu républicain, quel que soit son bord politique, prenne des décisions fortes avec ses convictions lorsque le pays traverse une crise. Mais je ne souhaite pas être gouverné à vue par une personne dont la réponse sera à tout bout de champ : “C’est de la faute de l’Autre ! “, par un xénophobe.
Ce que je propose pour le pays
L’identité est une chose qui évolue en fonction de comment on la projette. La France n’est pas le fruit de son passé - aucun pays ne l’est. Elle est le rêve de ceux qui la visitent, la projection de ceux qui la font, le souhait de ceux qui y résident.
Elle n’est que l’arbre des possibles et il nous appartient de lui donner la direction que nous souhaitons. Celle que je souhaite, c'est une décision cohérente avec l’Histoire du monde, et quelque part aussi dans la droite file d’une certaine Histoire de la nation.
Parce que je pense que la France n’a jamais été aussi belle et aussi grande que lorsqu’elle était le pays des lumières, je veux qu’elle voit naître et croître les Lumières de notre siècle : l’éthique technologique et l’intelligence créative, la redéfinition de la place de l’humain dans les espaces naturels et l’univers technologique.
Pour cela, il faut accueillir tous les humains qui souhaitent participer à la belle aventure française : travailler, étudier, penser, douter, écouter et accueillir puis transmettre à son tour.
Pour cela, il faut la paix dans le monde : elle s’obtient par la lutte active et légitime contre les belligérants : diplomatique ou armée, mais ferme et publique.
Pour cela, il faut la paix en bas de chez soi :
Les préfets doivent prendre en charge la délinquance et le crime. Pas les exilés, pas les victimes de produits et de conduites addictives, pas les activistes sociaux et politiques. Ils doivent en avoir les moyens et ne doivent pas avoir la crainte de les déployer. Il n’existe pas de paix sans sentiment de sécurité.
Une politique ambitieuse de grands travaux transformant l’héritage urbain des années soixante en écoquartiers favorisant la mixité sociale et une vraie pénalisation des mairies qui ne construisent pas assez de logements sociaux.
Proposons un nouveau modèle ambitieux centré autour de la commune et de son centre : réhabilitation urbaines, réflexion et mesure nationale contraignante sur la politique de parking sur la voie publique.
Pour cela, il faut la justice sociale :
Remettre à plat notre système fiscal et notre système d’allocation en le basant sur l’individu plutôt que sur le ménage. C’est le premier pas vers la possibilité d’un capital universel inconditionnel, versé à chaque citoyen à l’âge de 25 ans.
Valoriser le Travail, tous les travaux : éduquer ses enfants, être bénévole au club de foot du quartier…autant d’activités qui comptent pour la société et qui doivent donner lieu à une rétribution sociale, pour la retraite par exemple. L'entrepreneuriat vertueux doit être encouragé, en simplifiant la mise en place des coopératives dans tous les secteurs d’activité.
Pour cela il faut l’education pour tous et par tous :
Renouer avec l’éducation populaire en généralisant l’e-learning certifiant. Pour cela former à l’emploi efficace des outils digitaux - pour tous les âges et tous les milieux.
Pour cela il faut la santé :
Attirer et favoriser l’installation de médecins étrangers sur notre territoire - comme le fait déjà très à profit le Canada - mais aussi l’installation d’aides humaines à la personne et d'auxiliaire de vie.
En finir avec la tarification à l’acte à l’hôpital.
Favoriser l’essor de la silver economy afin de préparer par l’innovation le vieillissement de la population.
Pour cela, il faut la croissance, mais pas celle du PIB, celle de l’indice de développement humain : Pour avancer sur la bonne route, il faut les bons indicateurs. Les euros ne valent que s’ils sont transformés en bonheur pour le plus grand nombre. Notre tissu économique est principalement composé de TPE et de PME : simplifions leur implantation et leur développement. Développer encore la lutte contre l’évasion fiscale.
De gauche ? de Droite ? Aucune importance. Il est temps d’être à la fois humaniste et démocrate. Terriens. Ensemble. Pour le progrès de tous et de chacun sur la voie qu'il choisit librement dans le respect de son voisin.
Alors, pourquoi voterez-vous ?
Par Assane Guèye
AU PAYS DE L’OR NOIR
Le Sénégal dispose pour de vrai du pétrole. Magnifique opportunité que la providence a mise dans les entrailles de notre bonne terre.
Le Sénégal dispose pour de vrai du pétrole. Magnifique opportunité que la providence a mise dans les entrailles de notre bonne terre. Dans cette grande Afrique résiliente après avoir été atrocement saccagée par esclavagistes et colons, ce petit pays qui est le nôtre a dû rencontrer dans son cheminement une bonne étoile qui a tissé son destin. Le peuple qui l’habite a eu cette intelligence que beaucoup d’autres sur le continent n’ont pas toujours eue de préserver la stabilité et la cohésion domestiques comme la prunelle de ses yeux. On n’en croit pas encore nos yeux mais la plus grosse nouvelle qui nous soit arrivée depuis longtemps découle de ces gouttes de pétrole qui ont jailli de l’embouchure de Sangomar. Dans «Terre des Hommes», Saint-Exupéry a fait une évocation de l’eau comme s’il parlait à un être vivant. «Avec toi, disait-il, rentrent en nous tous les pouvoirs auxquels nous avions renoncé. Tu es une ombrageuse divinité». De cet autre liquide précieux sans être vital mais autrement plus stratégique, il est loisible d’en dire autant. Toute civilisation qui en découvre sur son sol ou dans ses fonds marins possède un avantage comparatif décisif sur les autres. On n’est plus seulement sur la carte du monde. On figure en son centre. Mais toute nouvelle donne doit donner à beaucoup réfléchir sur les dessous de cartes. Elle pose des défis redoutables. Pour tous ceux qui ont entre leurs mains périssables et leurs frêles épaules cette énergie de référence rare, une vigilance de tous les instants s’impose. Elle doit être intraitable.
Tout donner à la jeunesse
La première mesure d’accompagnement face à la nouveauté est l’accroissement de la sécurité et de la sûreté sur chaque portion du territoire national. Il faut de la tolérance zéro dans un pays qui n’est plus tout à fait le même. En la matière, le Sénégal a de qui tenir. L’Arabie Saoudite par exemple est une destination privilégiée pour faire du benchmark. 3ème plus grosse productrice mondiale, la pétromonarchie est aussi redoutable en négociation qu’en prévention. Elle ne laisse rien passer qui nuise à ses intérêts supérieurs à tel point qu’on peut y entendre les mouches voler. Sans verticalité ni autorité en effet, aucune quiétude n’est possible quand on a ce type de ressources que tout le monde convoite. Le nom du lion est le gardien de son jardin, dit l’adage. Pour nous autres, il y a donc un avant et un après. Comme chez les Saoudiens, les revenus du pétrole doivent être déversés en priorité dans l’éducation, la formation, la culture. Tout donner à la jeunesse qu’il faut armer de sciences jusqu’aux dents et surtout désintoxiquer du folklore qui la retarde énormément quand le reste du monde est branché aux algorithmes et à l’intelligence artificielle.
Tous les secteurs de la vie sont malades
Les pétrodollars du Golfe persique sont destinés avant toute chose au capital humain qui ne vit plus dans ces contrées d’expédients mais d’expériences fantastiques. Figurez-vous qu’avant de devenir l’oasis qu’elle est aujourd’hui, l’Arabie n’était qu’un désert hostile. Les pèlerins effectuant le grand voyage à la Mecque dormaient à l’époque à la belle étoile et s’empiffraient d’eau de frugales bouillies de riz. Que c’est bien loin ces temps austères. Les revenus du pétrole ont servi là-bas à quelque chose. Les retombées se voient même les yeux fermés. Il doit en être de même pour le Sénégal. Ce pays si proche du paradis mais qui poursuit étonnamment sa descente aux enfers. Tous les secteurs de la vie y sont malades d’une succession et d’un enchaînement de mauvais choix et d’incompétence. C’est simple comme tout. Le but premier du pétrole, c’est de jouer un rôle dans la vie des gens, pour qui tout est urgent et déprimant.
Par Abdoul Aly KANE
LE SOUVERAINISME A L’EPREUVE D’UNE MONDIALISATION DECADENTE
La tentation souverainiste en Afrique trouve ainsi son prolongement en Europe, où se manifeste le rejet d’une Union Européenne centralisatrice, assez éloignée des réalités nationales et des peules
Les élections européennes viennent de livrer leurs résultats avec une victoire sans appel, en France, de la liste menée par le Rassemblement national (RN). Une victoire qui, du fait de son ampleur, a conduit le Président Macron à dissoudre l’Assemblée nationale afin de se doter d’une nouvelle légitimité, entamée par le choix anti européen des électeurs.
La tentation souverainiste en Afrique trouve ainsi son prolongement en Europe, où se manifeste le rejet d’une Union Européenne centralisatrice, assez éloignée des réalités nationales et des peules. Une Union Européenne accusée aussi d’être de connivence avec les Etats unis d’Amérique pour contrôler l’économie mondiale.
La montée des souverainismes dans le monde renvoie ainsi à un rejet d’une mondialisation dont les avantages sont engrangés par l‘oligarchie économique mondiale, soient des multinationales possédant un pouvoir disproportionné d’influence sur les politiques économiques et sociales des Etats nationaux.
Dans ce contexte, un pont semble s’établir entre les tenants du souverainisme en France avec leurs alter ego d’Afrique.
Lors d’un récent débat à la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale dédié aux relations entre la France et l’Afrique, le député français Nicolas Dupont-Aignan a abordé des questions cruciales concernant le franc CFA et son impact sur l’indépendance des pays qui l’utilisent.
Il a évoqué la question de la souveraineté monétaire en ces termes : “On a perdu l’habitude dans notre pays (Ndlr, la France) de se rappeler qu’il n’y a pas de souveraineté nationale sans souveraineté monétaire. Depuis tant d’années, nous (la France) sommes victimes industriellement, économiquement et politiquement de cette dépendance à l’euro. Ainsi, nous avons perdu l’habitude de la souveraineté.
Cependant, je comprends totalement la volonté des peuples africains de retrouver leur liberté monétaire, car celle-ci est indissociable de la construction de leur avenir.”
Concernant le Sénégal le député souverainiste avait ajouté ceci : « Il faudrait peut-être comprendre qu’un jour ces pays d’Afrique auront besoin de retrouver une production agricole et industrielle. Prenons l’exemple du Sénégal : ce pays importe tout, et avec une monnaie trop chère arrimée à l’euro, il ne peut pas se développer. Il est quand même incroyable de voir que tous les pays ont utilisé la dévaluation (pour s’adapter aux conditions du marché) pour se développer et qu’on le nie à ces pays » (sic !).
Le propos est on ne peut plus clair
Avant le député Dupont-Aignan, d’autres figures du landerneau politique français avaient eu à s’exprimer sur la question de la souveraineté économique et monétaire africaine. Mme Marine Le Pen, en direction des élections présidentielles de 2017, avait promis de sortir la France de la monnaie unique européenne si elle était être élue présidente. Lors d’une visite au Tchad, l’alors patronne du Rassemblement national avait tenu les propos suivants sur le FCFA : « J’entends les plaintes des Etats africains qui considèrent par principe qu’ils doivent avoir leur propre monnaie et que le franc CFA est un inconvénient à leur développement économique. Je suis tout à fait d’accord avec cette vision ».
M. Jean Luc Mélenchon de La France Insoumise (LFI) n’en a pas dit moins sur le FCFA lors de sa récente visite au Sénégal dans une conférence conjointe avec le Premier ministre Ousmane SONKO tenue à l’Université de Dakar.
Il faut tout de même préciser que l’arrivée au pouvoir dans notre pays du PASTEF a eu un effet amplificateur sur la perception de la ferme volonté de remise en cause irréversible d’une monnaie et d’une politique monétaire coloniales en vigueur depuis les indépendances, et inapte à impulser tout développement économique.
En effet, Bassirou Diomaye Faye, président démocratiquement élu, et son Premier ministre Ousmane SONKO sont dotés d’une légitimité politique indiscutable. On ne saurait donc leur reprocher d’être arrivés aux commandes par la force des armes, tel qu’on a pu le rétorquer aux dirigeants des pays de l’AES (Alliance des Etats du Sahel c’est-à-dire Mali, Burkina et Niger).
En France, l’heure est donc aux propositions économiques mutuellement profitables — ou « gagnant-gagnant » — à l’endroit des anciennes colonies. Ces déclarations relancent la question de la création d’une monnaie africaine ou de monnaies nationales (ou alors les deux) ainsi que des liens de coopération à nouer pour renforcer leur crédibilité source de pérennisation.
Des élections européennes de dimanche dernier ressort donc une convergence certaine dans la quête commune des populations d’Europe et d’Afrique d’une forme de souveraineté profitable, face à ce qu’on appelle l’oligarchie mondiale qui enjambe les pays pour définir les zones mondiales de profits, et aligner en conséquence ses décisions d’investissements.
La concentration capitalistique via les opérations de fusions et d’absorptions au niveau mondial a recomposé les « tours de table » des grandes entreprises, et rendu la nationalité originelle de l’entreprise sans objet.
Ainsi, nombre de pays ont été délestés de leurs structures industrielles acquises à force d’épargne privée de leurs citoyens et d’allocations de ressources publiques, créant désindustrialisation et chômage sur le Vieux continent.
Les transferts de processus industriels ont connu un développement spectaculaire au début des années 80, en particulier vers les pays d’Asie, réputés pour la maximalisation des taux de marge qu’ils permettent de réaliser grâce au rapport qualité/coût de la main d’œuvre, à la capacité d’absorption de leur marché intérieur, à la faiblesse des coûts de transport et, surtout, grâce à des taux de change monétaire favorables.
Souverainisme africain versus mondialisation
Pour schématiser, le souverainisme prôné en Afrique pour sortir du schéma de développement post-colonial est en butte à une mondialisation économique qui a augmenté sa voilure avec la chute du mur de Berlin.
Le capital mondial se concentre de plus en plus avec le développement des marchés financiers contrôlés par de grands groupes qui détiennent l’essentiel des actions des « transnationales » et interviennent sur les marchés secondaires pour racheter les dettes des Etats, aux fins d’en contrôler les politiques économiques.
Avec les Banques centrales nationales et supra nationales, les agences de notations et les institutions financières internationales, le système économique international n’est plus contrôlé par les Etats en proie aux déficits budgétaires et besoins de financements de leurs systèmes sociaux.
Au-delà de l’Afrique, les populations européennes amorcent aujourd’hui un retour vers un souverainisme à l’échelle de leurs nations, soit 30 ans après Maastricht et aussi après 25 ans de monnaie unique (euro), obligeant les Etats à se conformer à des normes et autres critères de convergence que les populations estiment restrictives en matière de protection sociale et de pouvoir d’achat.
Dans ce système oligarchique mondial où le Sénégal pèse peu économiquement, la tâche assignée à notre pays depuis la colonisation aura été de servir de laboratoire pour la mise en œuvre de réformes favorables à la mondialisation ainsi que la diffusion d’idées, de concepts et de stratégies économiques prônant l’insertion dans le marché mondial.
Les concepts/indicateurs comme « taux de croissance », « taux d’inflation », « résilience », « dividende démographique » et tant d’autres encore, s’ils traduisent une réalité sous d’autres cieux, n’ont pas eu la justesse et la percussion nécessaires pour faire le point sur l’état de nos économies et les conduire sur les sentiers du développement.
Lorsque les institutions internationales de financement nous parlent de taux de croissance de 5, 6, 7% voire plus, les caractérisant de quasi exceptionnels par rapport à ceux enregistrés dans le monde, elles ne prennent pas soin de « garder toutes les proportions ».
Plus fortes croissances en Afrique, richesse au Nord : cherchez l’erreur !
La dernière édition du rapport semestriel « Performances et perspectives macroéconomiques de l’Afrique» de la BAD (Banque africaine de Développement) annonce que l’Afrique comptera, en 2024, onze des vingt pays ayant la croissance économique la plus forte au monde. Parmi ces onze pays, le Sénégal occupe la deuxième place, avec un taux de 8, 2%, aprèsle Niger dont le taux de croissance est projeté à 11, 2%.
Dans le même registre, l’OCDE prévoit un taux de croissance du PIB de 0,7 % en 2024 pour la zone euro. Les fortes croissances sont du coté de l’Afrique, alors que la richesse est du coté du Nord.
Le Président américain Obama avait déclaré en 2014 à ce sujet que « l’ensemble du PIB de l’Afrique (2,74 trillions de dollars) était à peu près égal à celui de la France (2,83 trillions de dollars).
C’est dire que comparer des taux de croissance de pays à niveaux de développement différents est inopérant et source de confusion.
Cette comparaison pourrait laisser croire que le taux de croissance des pays africains, supérieur par rapport à ceux de l’Europe, seraient susceptible d’ouvrir la voie à un rattrapage économique, alors qu’il n’en est rien.
Le Niger, considéré comme le pays le plus pauvre du monde, n’a que faire d’un tel indicateur prévoyant 11,2 % de croissance mais destiné en réalité à masquer les effets dévastateurs de la pauvreté et du sous-développement.
Par conséquent, il est établi que la hausse du taux de croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) ne traduit que partiellement la performance d’une économie dans l’absolu ; celle-ci est dépendante du niveau de richesse pris comme point de départ de la mesure.
La richesse additionnelle générée est la seule donnée significative.
Son niveau doit être mis en rapport avec les besoins de couverture des budgets nationaux (pour réduire le recours à l’endettement systématique), les besoins d’autofinancement des infrastructures structurantes et de prise en charge des besoins d’éducation et de protection sociale (systèmes de santé prenant en charge les plus pauvres, systèmes éducatifs élevant le niveau de formation des élites et du monde du travail en général), et de relèvement du pouvoir d’achat des populations agressé par l’inflation.
Pour ce qui concerne le taux d’inflation, il est considéré en UEMOA comme l’objectif majeur de politique monétaire (le taux d’inflation annuel moyen doit être inférieur ou égal à 3%).
Lorsqu’on nous annonce, dans les rapports de politique monétaire, la baisse du taux d’inflation d’une année à l’autre, on se garde de nous présenter le cumul des hausses précédentes, afin que nous puissions juger de leur impact réel sur un pouvoir d’achat à propension baissière, parce que non indexé sur ce taux.
Les fortes hausses de prix des produits alimentaires de l’ère COVID, par exemple, n’ont pas été suivies de baisses alors même que les principaux facteurs (énergie, stockage, ruptures de chaînes de valeurs, transport) ont connu des baisses.
A notre sens, ces concepts et indicateurs affublés à nos économies doivent être assimilés à des « buzz words » qui servent ceux qui en usent mais n’ont pas vocation à mesurer le bien-être des populations pour mieux l’améliorer, objectif majeur de tout gouvernant élu. Ces concepts doivent donc être remisés au profit d’autres plus significatifs (indicateurs de précarité sociale, de couverture sanitaire, des niveaux d’éducation etc.).
L’indice de développement humain de l’ONU, qui fait exception à la règle, est peu convoqué dans les analyses économiques des pays d’Afrique.
La question centrale est de savoir comment allier une croissance économique positive depuis près de 20 ans dans notre pays et une pauvreté également croissante des populations
On a le sentiment que, pour les organismes économiques et financiers internationaux, la croissance est l’objectif principal et la pauvreté l’accessoire.
A quoi sert-il aux populations de savoir que le Sénégal est sur la liste des pays à plus fort taux de croissance du PIB dans le monde puisqu’elles disent elles-mêmes que « la croissance ne se mange pas » !.
S’extraire du système dénoncé par tous ceux qui en appellent à la souveraineté économique passe d’abord par l’appréhension de la réalité structurelle de l’économie, la définition des voies et moyens de sa réorientation, avec en ligne de mire sa transformation structurelle.
Le phasage et le monitoring des programmes mis en œuvre nécessiteront la définition d’autres types d’indicateurs plus adaptés que les « indicateurs standards » qui se sont avérés jusque là inopérants.
Par Mbagnick Diop
GOORGORLU, LE PERE DE FAMILLE DEBROUILLARD, EST-IL SOULAGE ?
Le baromètre de la satisfaction des consommateurs se situe sans doute sur le gain, si modique soit-il, engrangé par les consommateurs.
Comme annoncé depuis l’investiture du Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, le gouvernement a porté à la connaissance des consommateurs la nouvelle nomenclature des prix des denrées alimentaires de première nécessité. Naguère, « Le Témoin » quotidien prédisait que le Président et son gouvernement feraient l’impossible pour venir à bout de la vie chère. Nous n’affirmons pas, sur la base de cette nouvelle nomenclature, qu’ils ont gagné la bataille du « mor-yombalé ». Cependant, l’honnêteté veut qu’il leur soit accordé un satisfécit pour leur bonne foi articulée au respect de la parole donnée. Il serait indécent de hurler avec les aboyeurs qui tentent de saper le préjugé favorable que l’opinion publique accorde au gouvernement placé sous la coordination du Premier ministre Ousmane Sonko.
Le baromètre de la satisfaction des consommateurs se situe sans doute sur le gain, si modique soit-il, engrangé par les consommateurs. Fondamentalement, les sceptiques poseront la question de savoir si le père de famille vivant de débrouille (goorgorlu)se sentira soulagé après les annonces de nouveaux prix faites hier et y trouvera des raisons d’espérer qu’à moyen et long termes, le gouvernement fera plus pour lester le panier de la ménagère. Ce de manière à ce que cette dernière se passera d’un marchandage stressant entre les cantines et les étables du boucher et du poissonnier. C’est une vue de l’esprit, nous dira-t-on, mais il n’en demeure pas moins vrai que la volonté des Sénégalais de travailler pour sortir de l’impasse, pourrait être un appoint à la politique du gouvernement. Comme le disent si bien les jeunes, le temps des combinards est révolu. Ces escrocs, à nul autre pareil, ont pillé les ressources qui pouvaient servir à la promotion économique de notre pays.
Il est de bon augure que le gouvernement décline une vision prospective qui intègre l’environnement international des affaires. Pour préserver les consommateurs du diktat des commerçants, le gouvernement entend créer un réseau de distribution de denrées alimentaires et bien d’autres produits, avec un maillage étendu à l’échelle nationale. A l’état de projet, la faisabilité de ce réseau dépendra des dispositions économiques, financières et réglementaires qui l’encadreront. L’héritage des nouvelles autorités étant constitué d’un passif très lourd, le gouvernement du Président Bassirou Diomaye Faye est assez avisé pour l’apurer graduellement au moyen d’une politique économique et sociale qui dépare d’avec la prétendue gouvernance sobre et vertueuse.
LA FRANCE PLEBISCITE UN FILS D’IMMIGRE ITALIEN AUX EUROPEENNES ET S’APPRETE A L’INSTALLER A MATIGNON
Mais qu’est-ce que nous venons donc faire ici en nous introduisant dans le choix des Français qui viennent librement de choisir la Droite de Jordan Bardella et de Marine Le Pen -c’est déformais l’ordre alphabétique aux élections européennes de juin 2024 ?
Bés Bi le Jour |
Amadou Lamine SALL |
Publication 14/06/2024
Mais qu’est-ce que nous venons donc faire ici en nous introduisant dans le choix des Français qui viennent librement de choisir la Droite de Jordan Bardella et de Marine Le Pen -c’est déformais l’ordre alphabétique aux élections européennes de juin 2024 ? Sinon pour dire et montrer, au-delà de l’espace politique d’ailleurs, combien la France est la France : étrange, bizarre, particulière, double, surprenante, énigmatique, oblique, mystérieuse, canaille, poreuse, ambiguë, équivoque, voilée, belle, libre et rageusement démocratique. Tiens, commençons par ce jeune garçon, Jordan Bardella, nommé à la tête du parti de d’extrême droite de Marine Le Pen, le Rassemblement National, et qui vient de remporter en ce mois de juin 2024, les élections européennes en France ! Plus que Marine Le Pen, c’est bien Bardella qui a fait gagner le RN ! Ce qui veut dire que les Français, dans leur majorité, ont adhéré aux idées et promesses de ce redoutable dribleur, fin prestigiateur et polémiste, fils d’immigrés italiens ! «Jordan Badella l’actuel président du parti d’extrême droite français, le RN, est fils unique de parents divorcés et a grandi en HLM chez sa mère. Jordan Bardella est le fils d’un patron de PME, d’origine italienne et franco-algérienne, et d’une mère, Luisa Bertelli-Mota, née en 1962 à Turin, d’origine italienne. Bardella a les trois quarts de ses racines en Italie. Selon JeanLouis Beaucarnot et le quotidien Le Monde, sa grand-mère paternelle, Réjane Mada, est la fille d’un Algérien de Kabylie, Mohand Seghir Mada, venu en France dans les années 1930 pour travailler comme manœuvre dans le bâtiment à Villeurbanne». Ce que la famille de Jordan Bardella a fait en immigrant en France est honorable puisqu’il s’agissait de tenter d’aller vivre ailleurs et de vivre mieux et à juste raison ! C’est humain !
Voilà donc Jordan Bardella, fils d’immigré, qui pourchasse les immigrés comme cet autre algérien nauséabond du nom de Éric Zémour, un nom propre d’Afrique du Nord d’origine berbère. Il résulte d’une aphérèse du terme azemmur, qui signifie «olivier» en berbère. Zemmour affectionne de tirer à balles de cyanure sur les immigrés et particulièrement les Sénégalais ! Un tribunal vient de le condamner pour ses dérives verbales xénophobes ! Mais pourquoi donc les fils d’immigrés dans le paysage politique français, sont les plus féroces, les plus terrifiants, les plus opposés à l’immigration de leurs sœurs et frères des autres pays et continents venus chercher le pain en terre de France comme leurs parents et eux ? Où serait Bardella aujourd’- hui si on ne lui avait pas fait avec ses parents, cette place en France que lui refuse aujourd’- hui aux autres enfants d’immigrés ? Ce qui fait la beauté et la spécificité du peuple français, c’est sa porosité aux autres jusqu’à oublier leurs contradictions ! Voilà l’histoire. Elle n’est pas honteuse mais elle est révélatrice d’une France contradictoire qui est allée chercher chez un fils d’immigré laxiste, puissamment et dangereusement manipulateur et populiste, des raisons de voter pour le RN et de croire que la France, avec cette horde de loups, va changer le visage d’une France victime comme tous les pays du monde, de difficultés économiques qu’une politique d’extrême Droite sera bien loin de résoudre. L’Italie d’où vient Jordan Bardella est entrain nous le démontre avec le gouvernement de Georgia Meloni ! Mais, il est bon, pour en finir le plus tôt, que Jordan Bardella et Marine Le Pen arrivent enfin au pouvoir, pour montrer aux Français combien ils se sont trompés. C’est cela aussi la démocratie, même si cette dernière n’a jamais été aussi amère et porteuse d’espoir trompeur ! L’Europe se fait peur depuis 2021 et elle commence maintenant à avoir réellement peur. Quant à la France, elle a déjà la diarrhée ! Juillet 2024 et ses élections législatives ne sont plus loin !
La France est bien de toutes les couleurs et de toutes les origines. D’un Noir un peu blanc, d’un Blanc un peu noir, d’un Noir tout noir, d’un Blanc tout blanc, il faut saluer cette belle et grande France pour tous ses métisses et fils d’immigrés qui l’ont grandie et ce, depuis le Général de Gaulle, dont «le nom de Gaulle vient d’une francisation d’un nom flamand, De Walle, qui signifie sans doute le Wallon, c’est-à-dire «l’étranger …» La France est d’une étonnante et tonifiante multiculturalité, confessionnalité, multiethnicité ! Ce n’est pas autrement que nous lisons, parcourons et aimons l’histoire de ces fils de migrants qui ont grandi et fait le football français. Tenez, «Le footballeur Raymond Kopaszewski dit Kopa. Ses grands-parents paternels avaient quitté la Pologne en 1919 pour s’installer dans le nord de la France. Toute sa jeunesse, Kopa entendit parler polonais à la maison. Kylian Mbappé, le Franco-Camerounais. Hier Platini aux racines italiennes, Thierry Henri venu des Caraïbes, Zinedine Zidane, d’origine arabe, Antoine Griezmann d’origine portugaise, Karim Benzama d’origine algérienne, Kingslez Coman d’origine guinéenne, Hugo Lloris d’origine espagnole, Steve Mandada d’origine congolaise, Ousmane Dembélé d’origine malienne, Éduardo Camavinga d’origine angolaise. Voilà la France qui gagne !
Une immigration en football qui a réussi comme celle de Jordan Bardella, en politique ? Certes, sauf que les premiers jouent collectifs et se respectent et que le second joue solitaire dans l’exclusion des autres frères, fils d’ immigrants comme lui ! Chez Jordan Bardella, « Les mots ne disent jamais d’où ils viennent !» Pourquoi les Français font semblant de ne rien savoir ? Chacun cache le tam-tam de la famille qu’il ne faut pas battre sur la grande place : tel Jordan Bardella le surdoué qui porte sur ses épaules Marine Le Pen, moins douée mais fille trempée de son père ! En juillet 2024, aux résultats des élections législatives appelées par le Président Macron, nous saurons si la France, enfin, a franchi le Rubicon et célébré le 1er âge d’une nouvelle démocratie plus osée encore ! Puisse cette France, cette fois-ci, ne pas échapper à ses démons portés par Jordan Bardella et Marine Le Pen, pour installer aux affaires et mettre à l’épreuve un parti depuis longtemps, très longtemps, à guet, sous le soleil, sous la neige, aux portes du pouvoir ! Ainsi la belle et douce France découvrira, «sans phrase et sans bruit», que toutes les roses portent des épines, même si le RN a caché ses dernières derrière un printemps qui promet tout, réinvente tout, une nature sans herbe folle mais rien que des prairies et de belles prairies !
C’est parti : les Français sont otages de l’espoir ! Cet espoir semble désarmer la peur d’un avenir sombre. C’est leur horizon. Il sera difficile de leur faire croire à l’inutilité du sacrifice ! Le RN français n’a même pas besoin de marabouts ! À moins d’un sursaut républicain qui cherche une canne pour tenir bien debout et relever le défi !
Amadou Lamine SALL
Poète
Lauréat des Grands Prix de l’Académie française
par Mohamed Lamine Ly
VERS UN RENOUVEAU DÉMOCRATIQUE ?
Retour sur une crise politique majeure ayant agité le pays, lorsque Macky Sall a tenté d'annuler les élections, défiant ainsi le Conseil constitutionnel. Une situation inédite finalement dénouée par la victoire d'une alliance prônant la rupture
Le 24 mars 2024 s’est tenue au Sénégal une élection présidentielle, dont l’issue présage de bouleversements sociopolitiques majeurs sur la scène politique africaine. En effet, des forces politiques prônant la rupture effective d’avec le système néocolonial françafricain ont réussi à accéder au pouvoir, de manière tout à fait légale et pacifique, en se conformant aux préceptes de la bonne vieille démocratie bourgeoise, qui s’avère, malgré tout, impropre à parachever la libération des classes exploitées et des peuples opprimés.
Le Sénégal, grâce au dynamisme de sa classe politique et à son implication précoce dans la vie institutionnelle de la métropole française, a toujours eu une longueur d’avance dans la pratique de cette démocratie de type occidentale, (abstraction faite de la lugubre parenthèse de la glaciation senghorienne), ce qui lui a même valu, une réputation surfaite de vitrine démocratique au niveau du continent africain.
Un pays aux traditions démocratiques mais inféodé à l’Occident
Il faut, quand même, reconnaître, que les traditions démocratiques au Sénégal et plus généralement, dans notre sous-région, remontent à la période précoloniale, avec une révolution politique[1] anti-esclavagiste, antérieure à la celle française, sans parler de la Charte du Mandé[2], contemporaine, voire antérieure à la Magna Carta (1215), considérée par certains comme la matrice des droits de l’Homme dans le monde, adoptée bien avant le Bill of Rights de 1689 en Angleterre, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Par ailleurs, dès le début du 19ième siècle, des représentants de la colonie du Sénégal seront envoyés dans les institutions parlementaires françaises à l’issue de compétitions électorales très disputées.
Le premier président sénégalais, Léopold Sédar Senghor, poète, chantre de la négritude, voulait faire de son pays, la Grèce de l’Afrique Noire et défendait une thèse plaçant la culture – et non l’économie – au début et à la fin de tout développement.
Sa francophilie débordante l’empêchait de se rendre compte de la pesante tutelle néocoloniale de l’ancienne métropole et allait être à l’origine du premier conflit politique du Sénégal indépendant., en 1962.[3]
Après la mise à l’écart de Mamadou Dia, la voie était ouverte pour la perpétuation de la mainmise de la France, sur l’économie sénégalaise et celles de plusieurs pays de l’ancienne Afrique Occidentale Française, à travers leur système monétaire basé sur le franc CFA. Sur le plan politique, on a également noté une hantise de la France, à vouloir maintenir ses anciennes colonies dans la sphère d’influence du monde occidental.
Pour consolider son pré-carré en Afrique subsaharienne, la France mit en place, dès 1960, un secrétariat général à la présidence de la République pour les affaires africaines et malgaches[4] dirigé par le puissant Jacques Foccart, personnage central d’une politique plus connue sous le vocable de Françafrique, ayant à son actif, outre le sabotage de monnaies nationales[5], des exécutions extra-judiciaires ou des putschs militaires.
Cela va avoir des répercussions sur la vie politique des jeunes nations africaines, surtout, à cette époque de guerre froide entre les puissances occidentales regroupées autour des Etats-Unis et le camp socialiste dirigé par l’Union Soviétique d’alors. Elle était caractérisée par la diabolisation des forces progressistes, selon le modèle du mccarthysme[6] étatsunien, de triste mémoire, avec un ostracisme marqué à l’endroit des partis proches de la mouvance communiste, victimes d’interdiction administrative ou combattus par une répression féroce, pouvant par endroits, aller jusqu’à la lutte armée (Cameroun). De plus, les dirigeants du monde occidental, convaincus que la démocratie représentative pluraliste ou multipartisane était un « luxe pour les pays africains » confrontés aux affres du sous-développement, imposèrent le modèle du parti unique ou unifié.
Ce mode de gouvernance autoritaire allait être à l’origine d’une floraison de coups d’Etat[7], qui devenaient, par la force des choses, la seule voie de résolution des dissensions politiques ou d’accès au pouvoir.
Après la chute du mur de Berlin en 1989, il devenait urgent, pour le camp occidental, revigoré par l’effondrement inattendu du camp socialiste ennemi, de canaliser – à défaut de pouvoir la contrecarrer - l’aspiration universelle des peuples au progrès social et à la liberté.
Le 20 juin 1990 constitue une date repère dans le cadre d’une nouvelle approche stratégique esquissée dans le discours de la Baule du président François Mitterrand[8]. Il y appelait les pays africains à changer de paradigmes, du moment que la menace communiste semblait s’estomper.
Jusque-là, les critères décisifs de soutien aux pays africains étaient la préservation de régimes hostiles au camp socialiste pour faire perdurer la domination économique de l’impérialisme occidental, tout en garantissant la sécurisation des approvisionnements en matières premières. Après le sommet de la Baule, il allait, dorénavant, falloir prendre en compte, le respect des mythes et leurres occidentaux en matière de droits humains et de démocratie, tels que serinés à leurs opinions publiques. Les régimes de parti unique, furent obligés de se plier aux exigences des puissances occidentales, de suivre l’exemple du Sénégal, qui avait pris les devants[9], par l’acclimatation de la démocratie représentative libérale dans leurs pays, dans le souci de préserver la paix civile, tout en laissant intacts les rapports de domination impérialiste.
Apogée du modèle démocratique sénégalais
Le Sénégal, un des rares pays africains à n’avoir pas connu de coup d’état militaire, avait amorcé, très tôt, sa mutation démocratique, après la longue décennie d’hibernation démocratique consécutive à la crise politique entre Senghor et Mamadou Dia (voir plus haut).
En 1980, le président Léopold Sédar Senghor démissionnait de sa fonction, ne supportant plus la pression de syndicats et partis de gauche, puis il faisait de son premier ministre, son dauphin, lui cédant le fauteuil présidentiel, par la grâce d’un artifice tordant le cou aux dispositions constitutionnelles[10].
Le président Abdou Diouf allait rester aux commandes de l’Etat sénégalais pendant deux décennies, durant lesquelles, deux tendances contradictoires allaient voir le jour. On assista d’une part à un élargissement relatif des espaces politiques et citoyens (multipartisme intégral, émergence de plusieurs syndicats autonomes, pluralisme médiatique…) et de l’autre à une libéralisation débridée des politiques publiques, à travers les plans d’ajustement structurel, selon le mot d’ordre « moins d’Etat, mieux d’Etat ».
Grâce à la lutte soutenue du mouvement national démocratique, on assista à une fiabilisation progressive du processus électoral (identification de l’électeur, secret du vote, fichier mieux maîtrisé…), permettant la survenue de la première alternance démocratique, le 19 mars 2000. Elle avait pour ambition de résoudre l’épineuse question de la demande sociale exacerbée par les plans d’ajustement structurel, du précédent régime socialiste, mais surtout d’approfondir le processus démocratique, en procédant à un rééquilibrage institutionnel et en mettant fin à l’excès de concentration de pouvoirs entre les mains du président de la République. Malheureusement, le président Wade, au lieu de démanteler le système hyper-présidentialiste, allait plutôt augmenter ses prérogatives dans la nouvelle constitution votée lors du référendum du 7 janvier 2001.
Une deuxième alternance sans véritable rupture
En 2012 survint la deuxième alternance démocratique sénégalaise, grâce à la victoire de Macky Sall au deuxième tour des présidentielles sur le président Wade, sanctionné à cause de ses dérives autocratiques. En effet, non content de violer la disposition constitutionnelle de limitation des mandats à deux, il faisait montre de velléités de dévolution monarchique du pouvoir à son fils Karim Wade. Pour contrebalancer la jeunesse et l’immaturité de sa formation politique, l’Alliance Pour la République, le nouveau président était convaincu, que la condition sine qua non de la survie de son nouveau régime était la mise en place d’une vaste Coalition, selon la devise "gagner ensemble et gouverner ensemble".
De fait, la collusion d’intérêts allait conférer à Benno Bokk Yakaar[11] une longévité aussi démesurée que néfaste et en faire l’une des Coalitions les plus massives et les plus unanimistes de l’histoire politique du Sénégal.
On se rendit très vite compte, que le nouveau pouvoir n’avait aucune intention de procéder aux réformes démocratiques consignées dans les conclusions des Assises nationales[12], dans le projet de nouvelle constitution et dans les autres recommandations de la C.N.R.I[13], visant aussi bien à améliorer la gouvernance sociopolitique qu’à instaurer l’équilibre et la séparation des pouvoirs.
Plongée dans les abysses de l’autoritarisme
La gouvernance de la coalition Benno Bokk Yakaar, sous le leadership du président Macky Sall va être marquée par :
La découverte de gisements de gaz et de pétrole, laissant augurer de rentrées de recettes significatives, à l’horizon 2025-2026,
La judiciarisation de la scène politique, ainsi que la criminalisation des acteurs politiques de l’Opposition, abusivement caractérisés comme terroristes,
L’accentuation de l’instrumentalisation des institutions parlementaire et judiciaire, conduisant à des tripatouillages récurrents des textes de lois, voire de la Constitution et à l’embastillement de milliers de militants politiques et d’activistes…
Ces dérives autoritaires allaient se heurter à la résistance de la jeunesse sénégalaise qui, ces dernières années, a été touchée par une lame fond anti-impérialiste cherchant à rompre les amarres avec les anciennes puissances coloniales, particulièrement la France. Cette aspiration au changement est incarnée par plusieurs entités politiques, dont la plus représentative, actuellement, est le Pastef[14], victime d’une persécution impitoyable et catalogué comme ennemi public numéro 1 du régime de Macky Sall. De fait, cette formation politique, qui cristallise les espoirs de larges secteurs de la jeunesse sénégalaise, avait été interdite, le 31 juillet 2023, trois jours après l’embastillement de son leader Ousmane Sonko, qui avait rejoint en prison des centaines de militants de son parti.
Il faut dire que la mise aux arrêts de M. Ousmane Sonko était l’aboutissement d’un long feuilleton politico-judiciaire ayant débuté en février-mars 2021, en pleine crise de la Covid-19. A l’époque, le leader du Pastef était au centre d’une affaire de mœurs avec des accusations de viol proférées par une jeune masseuse. La tentative des autorités judiciaires de l’envoyer en prison, alors que le dossier donnait tout l’air d’avoir été fabriqué de toutes pièces, (il allait d’ailleurs être acquitté le 1er juin 2023, des chefs d’accusation de viol et de menace de mort), allait déclencher des émeutes meurtrières, qui paradoxalement allaient booster la carrière d’Ousmane Sonko, arrivé troisième à l’élection présidentielle du 24 février 2019 et favori incontestable de celle de 2024. C’est bien pour cela, qu’il sera arbitrairement évincé de la compétition électorale et que le Pastef sera obligé de désigner son camarade de parti, Bassirou Diomaye Faye, comme candidat de substitution.
Le putsch constitutionnel du 3 février 2024
Au début du mois de février 2024, le Sénégal était sous les feux de la rampe, a occupé le devant de la scène médiatique et fait la Une des plus grands journaux internationaux. Le 3 février, le président Macky Sall a pris, quelques heures avant l’ouverture de la campagne électorale, un décret pour annuler la convocation du corps électoral, actant ainsi le report sine die de l’élection présidentielle, une première depuis plus de 60 ans.
Tout est parti de la contestation, par plusieurs candidats à la prochaine présidentielle, du processus de validation des candidatures, qui avait donné lieu à beaucoup de controverses liées essentiellement au flou entourant l’évaluation des résultats du parrainage citoyen[15], mais aussi à l’élimination de la course présidentielle de deux candidats ayant plus d’une nationalité[16], dont le fils de l’ancien président Abdoulaye Wade.
Deux jours plus tard, une majorité de députés va voter une loi pour reporter l’élection présidentielle au 15 décembre 2024. Mais un autre rebondissement spectaculaire allait se produire, le 15 février, quand le Conseil constitutionnel, la plus haute instance judiciaire de notre pays a désavoué le président de la République et les députés de la majorité ainsi que ceux du parti démocratique sénégalais. Le juge électoral suprême avait notamment rejeté, d’une part, le décret présidentiel n°2024-106 du 3 février 2024, portant abrogation du décret convoquant le corps électoral pour l’élection présidentielle du 25 février 2024 et de l’autre, de la loi portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution, adoptée sous le n° 4/2024 par l’Assemblée nationale, en sa séance du 5 février 2024.
Dénouement pacifique de la crise politique
Au lieu de se plier aux injonctions du Conseil constitutionnel, le président allait se lancer dans une fuite en avant, en convoquant un prétendu dialogue national, le 26 février 2024, à Diamniadio[17]. Mais ce dialogue aussi illégal qu’illégitime, cherchait à repousser la date du scrutin de plusieurs mois, au lieu de fixer – dans les meilleurs délais - une nouvelle date pour l’élection présidentielle, seule voie de résolution de la crise politique profonde et inédite, qui mettait à mal le modèle démocratique sénégalais.
C’était sans compter avec la détermination du Conseil constitutionnel à faire respecter les dispositions de la loi électoral en sortant une décision en date du 5 mars 2024 et rendue publique le lendemain. Dans celle-ci, la feuille de route issue des travaux du prétendu dialogue national et qui proposait de remanier la liste des candidats et de reporter l’élection présidentielle au 2 juin 2024, a été rejetée, sans autre forme de procès, car elle aurait eu pour conséquence, de prolonger le mandat du président Sall, au-delà du 2 avril. C’est finalement la date du 24 mars 2024 qui sera retenue. Face à l’inéluctabilité de la victoire du candidat Bassirou Diomaye Faye, attestée par d’innombrables sondages, il ne restait plus au président Macky Sall, inquiet pour son propre devenir et celui de ses proches, qu’à faire voter, le 6 mars 2024, une loi d’amnistie et à faire libérer, la semaine suivante, les centaines de militants Pastef arbitrairement détenus. Parmi ces derniers figuraient le candidat officiel et le président d’un parti en pleine ascension, un parti, qu’on avait fini par dissoudre[18], en invoquant les motifs les plus fallacieux, ce qui ne s’était plus produit depuis le début des années 60.
La réalité des faits démentait formellement cette mesure administrative de dissolution du Pastef, qui pouvait être considéré comme un des partis les plus dynamiques, les mieux structurés, ayant de remarquables capacités en termes de mobilisation de ressources internes. De plus, il a joué les premiers rôles, fait preuve de résilience, de constance et a payé un lourd tribut dans cette confrontation politique épique avec le régime du Benno-APR, dont il a mis à nu les tares que sont la mal-gouvernance illustrée par de multiples scandales à répétition et le soutien à la dépendance néocoloniale.
C’est donc, en toute logique, que le « duo présidentiel » Sonko-Diomaye du Pastef auréolé d’un parcours prestigieux voire héroïque, a remporté l’éclatante victoire électorale du 24 mars 2024 acquise, dès le premier tour, en devançant le candidat de Benno, son adversaire et suivant immédiat de près de 20 points.
[1] La révolution torodo de Thierno Souleymane Baal
[2] La charte charte du Mandé est la transcription du contenu oral, qui remonterait au règne du premier souverain Soundiata Keita qui vécut de 1190 à 1255.
[3] Il s’agissait d’un conflit ouvert entre le président Senghor bénéficiant de milieux d’affaires de la métropole et le président du Conseil, Mamadou Dia, réputé être plus nationaliste. La crise conduisit à l’emprisonnement de Dia, pendant une douzaine d’années
[4] Elle deviendra, plus tard, la cellule africaine de l’Elysée
[5] Dans le cadre de l’opération « Persil », les services secrets français introduisent, en Guinée, une grande quantité de faux billets de banque guinéens dans le but de déséquilibrer l’économie.
[6] Politique de persécution menée aux Etats-Unis, dans les années 1950, à l’encontre de personnalités soupçonnées d’avoir des sympathies communistes.
[7] Le Sénégal faisait figure d’exception, car n’ayant jamais connu de putsch militaire et ayant reconnu en 1974, le premier parti d’opposition
[8] François Mitterrand, président de la France d du 21 mai 1981 au 17 mai 1995
[9] Au Sénégal, Senghor reconnaît le premier parti d’opposition en 1974 et instaure le multipartisme limité en 1976, qui deviendra intégral en 1981, à l’accession d’Abdou Diouf à la magistrature suprême
[10] L’article 35 al2 (loi constitutionnelle n° 76-27 du 6 avril 1976) stipulait, qu’en cas de vacance du pouvoir, le premier ministre –Mr Abdou Diouf, en l’occurrence, termine le mandat présidentiel
[11] Benno Bokk Yakaar, abrégé en BBY (Unis par l'espoir), est une coalition politique sénégalaise fondée en 2012 par le parti de l’Alliance pour la République (APR), en soutien au président Macky Sall.
[12] Les Assises nationales du Sénégal ont rassemblé, entre le 1er juin 2008 et le 24 mai 2009, de nombreux acteurs de la vie publique, représentants de partis politiques, de la société civile et personnalités diverses. Elles avaient pour ambition de « trouver une solution consensuelle, globale, efficace et durable à la grave crise multidimensionnelle qui sévit dans le pays »
[13] Commission nationale de réforme des institutions : structure mise en place par le Président Sall, à la suite des Assises nationales, visant à organiser une large concertation nationale sur les réformes à mettre en œuvre à court, moyen et long terme, pour doter le pays d’une armature institutionnelle moderne, à la mesure de son ambition de devenir et de rester une grande nation de démocratie.
[14] Les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité (Pastef) est un parti politique sénégalais fondé en 2014 par Ousmane Sonko.
[15] Le parrainage électoral, institué par la loi constitutionnelle n°2018-14 du 11 mai 2018, est un mode de présélection des candidats par des électeurs (dont le nombre est compris entre 0,6% et 0,8% du fichier électoral), qui signent des fiches de parrainage.
[16] Les candidats Karim Wade et Rose Wardini ont été éliminés de la liste des candidats, car selon la Constitution de notre pays, tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise.
[18] Le parti politique dénommé « Patriotes du Sénégal pour le Travail, l'Ethique et la Fraternité » (PASTEF) a été dissous par décret n° 2023-1407 pour manquement à ses obligations en vertu de l'article 4 de la Constitution et de l'article 4 la loi n°81-17 du 06 mai 1981 relative aux partis politiques, modifiée par la loi n° 89-36 du 12 octobre 1989.