Quel accueil un artiste-roi peut-il réserver à un Roi, Sa Majesté le Roi, lorsque celui-ci entre dans un espace dédié aux arts visuels ?
V’Arts : le «territoire des arts»…
L’artiste a vu entrer, dans cet espace, des véhicules peu ordinaires, presque des «vaisseaux spatiaux», et il a pris -courageusement- la décision d’aller à leur rencontre, mais surtout de chercher à savoir qui arrivait à cette heure-là, au Village des arts de Dakar ?
Un grand baobab -royal- trône à l’entrée du Village des arts de Dakar, en face de l’atelier de celui qui deviendra roi, artiste-roi, par un coup de baguette magique…
La «canne magique» ?
Comment imaginer, un seul instant, qu’un roi était arrivé et qu’il fallait l’accueillir avec tous les honneurs dus à son rang ?
L’arrivée du roi n’avait pas été annoncée car la visite était strictement privée, voire secrète…
Aucun comité d’accueil n’avait eu le temps d’être mis en place…
Aucune fanfare n’était sur place…
Aucun service officiel…
Aucun hymne ne pouvait retentir, même l’hymne du baobab, l’hymne joué le 30 novembre 2014, au Théâtre de verdure Bakary Traoré du Monument de la Renaissance Africaine (Mra).
Parmi les souvenirs à conserver -précieusement- au Village des arts de Dakar, la visite du roi figurera, en bonne place, lorsqu’il faudra écrire l’histoire du Village des arts de Dakar et des artistes qui la peuplent, du lever au coucher du soleil…
Quelle lumière éclairait, ce jour-là, le Village des arts de Dakar ?
Comment et pourquoi le roi avait-il pris la belle décision d’aller à la rencontre des artistes du Village des arts de Dakar ?
Comment avait-il appris l’existence du Village des arts de Dakar ?
Un jour, cette belle histoire de la visite du roi sera écrite et toutes les «pépites» pourront briller au soleil…
Un jour, nous saurons, avant la fin du vingt-et-unième siècle…
Notre siècle de lumière…
Il est rare, dans notre histoire sénégalaise, voire africaine et même internationale, qu’un roi soit accueilli par un artiste, peut-être le «roi des artistes» ?
Le Village des arts de Dakar, à cette époque-là, avait désigné un «Chef» qui était devenu son «Président»…
La rencontre du «Roi et de l’artiste», dans cet espace de création permanente, le Village des arts de Dakar, était exceptionnelle…
L’artiste, fût-il «roi des artistes», ne savait pas qu’il recevait, pour la première fois en terre sénégalaise, un roi célèbre…
Et puis l’identité de celui qui se trouvait dans le «dernier vaisseau spatial» fut révélée à l’artiste…
L’artiste garda son calme légendaire et il accueillit le roi sans aucune formule protocolaire, mais avec tout le respect dû à son rang…
Cet accueil, plutôt rare et insolite, a marqué l’artiste, mais aussi le roi…
Le roi est sorti de son «vaisseau spatial», il arrivait de la «planète des rois», et après avoir «posé son regard» sur l’artiste qui l’accueillait, il s’est «mis à le suivre» pour une visite guidée exceptionnelle au sein des ateliers ouverts, ce jour-là, du Village des arts de Dakar.
Le roi suivait l’artiste…
Comment imaginer une telle scène ?
Ces «prolégomènes» étant rappelés, entrons ensemble dans l’interprétation de la lumière…
2016 : une année de lumière pour le Village des arts de Dakar…
Aube et Aurore… (2011)
Les artistes auraient dit plutôt : une année de «lumière vive»…
La lumière est tombée sur le Village des arts de Dakar, à quelques encablures du Stade Léopold Sédar Senghor, comme la nuit tombait autrefois sur Tombouctou la mystérieuse…
Tombouctou des «nonuplés» nés au Maroc : la porte de la légende est désormais ouverte et le docteur Ahmed Baba, le savant de Tombouctou, attend son heure à la cour du roi…
Stade Léopold Sédar Senghor sur les clôtures duquel les artistes du Village des arts de Dakar auraient dû dessiner des fres¬ques…
Léopold Sédar Senghor, premier président de la République indépendante du Sénégal, celui-là même qui accueillit en 1964, un autre roi…
«Dialogue des rois» à cinquante-deux ans (52) d’intervalle, intervalle de temps…
Sur l’autre territoire, où un roi fut accueilli, une «lumière brillait dans le ciel»…
Le roi qui venait d’entrer sur le «territoire des arts» ne «connaissait» pas (un roi sait tout…) l’histoire de l’autre roi…
Cette autre belle histoire lui sera contée un jour…
Trois dialogues : «dialogue des rois», «dialogue des territoires» et «dialogue de la lumière» : lumière duale, corpusculaire et ondulatoire…
La lumière éclaire les ateliers des artistes, mais elle éclaire d’abord et avant tout, la «conscience artistique» des pensionnaires du Village des arts de Dakar.
Le «premier roi», accueilli en 1964, sur un autre territoire, proche de la mer, ne «savait» pas (un roi sait tout) que ce territoire où brillait la lumière était situé à proximité d’un village…
Village contre Village…
Mbatal…
Rivage contre virage…
L’espace sait unir et relier tous les temps du monde : passé, présent et avenir…
La visite du roi ne sera pas racontée, en détail, car seule compte finalement, l’heure d’arrivée sur le «territoire des arts», car cette heure-surprise restera magique…
Aucune trace ne sera laissée dans le «livre d’or» posé à l’entrée du Village des arts de Dakar…
1964 : des photos de l’autre roi ont été prises et elles existent toujours dans les archives, bien conservées.
Hommage devra, un autre jour, être rendu par tous les artistes du Village des arts de Dakar au roi qui décida de venir découvrir les œuvres créées et exposées dans les ateliers…
Mille grâces lui soient rendues dans tous ses palais…
Mille soleils brillaient dans les ateliers du Village des arts de Dakar
Pépites d’or…
Ce jour-là, le jour de l’hommage attendu, les mots qui s’envoleront vers le roi devront être des mots forts, dignes d’un roi, et ils sauront toucher le cœur du roi.
Lorsque cette histoire du «Roi et de l’artiste» nous a été racontée, en 2016, après la visite du roi, nous avons été saisi (nous = je) par l’émotion pour une raison toute simple : nous avons «habité» (nous = je) les deux territoires : «le territoire des arts» et le «territoire du pétrole»…
Tu diras au roi -quel privilège- toi, Zulu, l’artiste devenu roi, mon ami, celui que j’ai reçu avec les «Children of Manouche» sur la Terrasse André Malraux de la Casa Manouche, le 21 septembre 2023, et qui a parlé de Pierre Lods, qu’en 1985, le jeune pétrolier que j’étais, avait choisi la «raffinerie de Mohammedia», la «Samir» historique…
Au dernier jour de mon passage à la «raffinerie de Mo¬hammedia» où j’étais en stage, j’ai été reçu par le Directeur général de la Samir (je l’avais rencontré au Negresco à Nice en 1984), M. Menjour qui appartenait à la famille royale…
L’histoire est «circulaire»…
Les «liens majeurs» sont invisibles au soleil…
J’ai écrit ce texte intitulé «le Roi et l’artiste», quelques jours avant la célébration des «Cin¬quante ans» de création artistique de Zulu Mbaye…
Le 27 octobre 2023, l’Afrique célèbre Zulu Mbaye au Musée Théodore Monod.
L’artiste de «l’Ecole de Dakar» est devenu roi…
VOVO BOMBY
Par Mamadou Oumar NDIAYE
QUI ÊTES-VOUS DONC, MONSIEUR LE DGE, POUR REFUSER D’APPLIQUER LES DÉCISIONS ?
Voilà un Etat dit de droit où un fonctionnaire peut se permettre de faire la nique ou un pied de nez à une décision de justice et de tirer la langue à l’organe administratif chargé de superviser les élections
Question : Quel est le point commun entre l’affaire du présumé homosexuel dont le corps a été exhumé et brûlé vif à Kaolack et le refus par la Direction générale des Elections d’appliquer les différentes décisions ordonnant la réinscription d’Ousmane Sonko sur les listes électorales ?
Certains me répondront sans doute que c’est le fait que le préfet de Kaolack, qui aurait dû prendre les dispositions idoines immédiatement pour empêcher cet autodafé de la honte, et le DGE dépendent tous du ministère de l’Intérieur. Peut-être mais ceux qui auront donné cette réponse seront passés à côté de la plaque. Car le point commun dans l’une et l’autre affaires c’est que, dans les deux cas, des gens se sont arrogés des pouvoirs d’autrui et ont prétendu ou prétendent appliquer les lois à leur manière.
Dans le cas du scandale qui s’est produit dans la capitale du Bassin arachidier, des individus illuminés ont prétendu décider à la place de Dieu qui était bon musulman et qui ne l’était pas. Et, par voie de conséquence, qui était digne d’aller au Paradis du Seigneur et qui, au contraire, méritait de brûler dans les flammes de la géhenne. Dans ce dernier cas, un avant-goût du brasier devait leur être donné sur cette terre des hommes où leur corps devait être carbonisé avant même de comparaître devant le tribunal des anges ! Les individus de Léona Niassène, dans la ville de Mame Coumba Bang, ont jugé, délibéré et décidé que le défunt Cheikh Fall, paix à son âme, n’avait même pas le droit de reposer pour l’éternité dans un cimetière pour musulmans. Mieux, ils ont aussitôt exécuté leur décision sans attendre le jugement de Dieu !
Le directeur général des Elections, qui n’est autre que le général de Police Thiendella Fall, lui, a décidé qu’Ousmane Sonko n’a pas le droit de recevoir des fiches de parrainage et a refusé d’en remettre à son mandataire. A en croire cet intrépide et arrogant fonctionnaire, le leader de Pastef ne figure pas sur les listes électorales et, par conséquent, ne peut pas aller à la conquête des parrainages qui sont une condition de la validation de sa candidature à la prochaine élection présidentielle.
Or, là aussi, c’est le Conseil constitutionnel qui, de parla loi, a seul les prérogatives de déterminer qui remplit les conditions pour être candidat et qui ne lesremplit pas. Encore qu’à mon avis, l’opposant ne doive rien attendre de bon de ce Conseil-là… Donc ce n’est pas parce qu’on dispose de fiches de parrainages que l’on sera forcément dans les startingblocks le 25 février prochain. On nous objectera que le leader de Pastef a été condamné à deux reprises (par contumace dans l’une d’elles, une condamnation qui a sauté dès qu’il a été arrêté, une interpellation pour laquelle il doit dire merci à Antoine Félix Diome et Ismaïla Madior Fall ! Et une autre qui n’est pas encore définitive pour diffamation), ce qui a entraîné sa radiation des listes électorales. Certes, la Cour suprême a donné raison à la DGE dans son refus de remettre des fiches de parrainage au mandataire du leader de l’opposition emprisonné mais voilà : le président du tribunal d’instance de Ziguinchor a ordonné la réintégration d’Ousmane Sonko sur les listes électorales. Il s’appelle Sabassy Faye, le magistrat sans peur et sans reproche qui a pris cette décision historique et qui nous rappelle le juge Epiphane Zoro Bi Ballo, qui, en délivrant un certificat de nationalité à Alassane Ouattara, alors accusé d’être un Burkinabé, lui avait permis de participer à l’élection présidentielle ivoirienne….et de la gagner ! Retour au Sénégal : la réintégration ordonnée par Sabassy Faye était d’application immédiate mais le tout-puissant Thiendella Fall, droit dans ses bottes, a renâclé avant de refuser de s’exécuter. Au motif, s’est-il permis d’interpréter, que l’Etat avait fait un recours ! Ah bon, doiton comprendre par là que les décisions de justice ne sont plus exécutoires dans ce pays dès lors qu’un recours et formulé contre elles !
Mais il y a mieux : saisie par les avocats de l’opposant, la Commission électorale nationale autonome, chargée par la loi de piloter tout le processus électoral, a elle aussi enjoint la DGE de réinscrire Ousmane Sonko sur les listes électorales. Nouveau refus de la DGE. Oh, nous savons bien qu’un tel refus, il n’a pas pu le prendre sur sa propre casquette de général de police et a sans doute dû recevoir des ordres pour ne pas s’exécuter. Il n’empêche, voilà un Etat dit de droit où un fonctionnaire peut se permettre de faire la nique ou un pied de nez à une décision de justice et de tirer la langue à l’organe administratif chargé de superviser les élections. Les avocats d’Ousmane Sonko peuvent toujours courir et saisir, comme ils l’ont fait, la Cour de justice de la Cedeao car même si cette dernière leur donne raison, le Gouvernement leur opposera sa souveraineté pour refuser de s’exécuter.
Car qu’il soit bien entendu que la seule demande que l’Etat du Sénégal est disposée à recevoir de cette Cedeao, c’est celle d’envoyer ses soldats faire la guerre. Dans ce cas, c’est sans protestation ni murmures que nos « Diambars » seront mobilisés pour aller faire le coup de feu ! Hors ce cas, le Sénégal n’a aucun ordre à recevoir de la CEDEAO ! Et pourtant même au Niger, pays quand même pas aussi démocratique que le nôtre, l’opposant Hama Amadou, jeté en prison pour une rocambolesque affaire de « trafic de bébés », avait été autorisé à participer à l’élection présidentielle. Il avait réussi l’exploit de se qualifier pour le second tour ! Au Sénégal craint-on qu’Ousmane Sonko mette KO dès le premier tour le candidat du président Macky Sall ? On n’ose pas le croire !
« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir » écrivait Jean de la Fontaine dans sa fable « Les animaux malades de la peste ». Dans notre pays, c’est plutôt selon qu’on appartienne à la majorité présidentielle ou à l’opposition que lesjugements de cour lavent plus blanc que la lessive Omo ou sont implacables. Demandez donc à ce pauvre Papito Kara ! Ce ping-pong Tribunal d’instance de Ziguinchor-DEG-CENA-DGE nousrappelle cette blague d’un médecin arrivé sur le théâtre d’un grave accident de la route, qui examine les nombreux corps allongés sur le bas côté et qui, à l’arrivée des gendarmes, les informe, péremptoire : ils sont tous morts, hélas. Ce qu’entendant, un des blessés s’écrie : « au secours, je suis encore vivant ! » Alors le médecin, imperturbable : « taisez-vous, Monsieur, je connais mon métier, vous êtes tous morts ! »
Appliquée à notre charmant pays et ce feuilleton interminable de l’éligibilité de Sonko, Thiendella Fall pourraitse permettre de balancer avec superbe aussi bien au juge de Ziguinchor qu’à la CENA (pourtant dirigée par un éminent magistrat) : « taisez-vous, ignorants, je connais mon droit ! » Et l’on viendra nous dire après cela que l’Etat de droit n’est pas une réalité au Sénégal du président Macky Sall…
par Hamidou Anne
DANS MON PAYS, L'HUMANITÉ A DISPARU
L’acte de Léona Niassène ne me surprend en rien. Depuis des décennies, une lame de fond obscurantiste parcourt notre pays dans l’indifférence. C'est le prolongement d’un sentiment de puissance des intégristes face à la mollesse de l’Etat
Des Sénégalais ont exhumé un corps, l’ont brûlé et ont chanté et dansé autour du bûcher. Les images sont insoutenables, et je pense avoir rarement vu quelque chose d’aussi affreux. Sous prétexte que le défunt serait un homosexuel, des badauds se sont érigés en policiers de la vertu pour décider de qui a droit à être inhumé ou pas dans un cimetière qui relève, pour rappel, de la commune. Les mots du procureur de Kaolack sont justes : cet acte relève de la «barbarie» pure et simple. L’ouverture d’une information judiciaire est salutaire pour traquer les auteurs et leurs complices présumés et les présenter devant un juge. En 2023, au Sénégal, pays de grands intellectuels, d’artistes, de juristes, cet acte d’une telle cruauté, qui rappelle les heures sombres du Moyen-âge, vient d’être commis par des gens qui, conscients qu’il ne leur arrivera rien, ont filmé leur sinistre forfait. La Justice sénégalaise est souvent décriée, de manière fondée ou infondée, mais elle sera à nouveau attendue sur cette affaire pour laquelle elle devra aller au bout, au risque de saper encore sa crédibilité et de donner prime aux agissements les plus barbares.
Cheikh Fall était un homme. Il avait un prénom, un nom et une famille. Il a une mère dont je n’ose imaginer la souffrance. Il n’était pas qu’une orientation sexuelle présumée comme le relaient les médias, profanant la mémoire d’un disparu qu’on ne peut soustraire de l’immensité de la miséricorde divine. Comment de simples pécheurs peuvent-ils s’arroger un droit sans limite sur des hommes, pécheurs comme eux ? Ces gens n’ont pas beaucoup lu les Ecritures saintes pour profaner le corps d’un homme à peine retourné auprès de Son Créateur. «Certes, Nous avons honoré les fils d’Adam. Nous les avons transportés sur terre et sur mer, leur avons attribué de bonnes choses comme nourriture, et Nous les avons nettement préférés à plusieurs de Nos créatures.» (17 :70)
Je dois confesser que si l’acte de Léona Niassène me choque, il ne me surprend en rien. Depuis des décennies, une lame de fond obscurantiste parcourt notre pays dans l’indifférence générale, notamment celle de l’Etat du Sénégal qui ne fait rien pour préserver et raffermir la laïcité républicaine face à ses adversaires qui pullulent dans tous les segments de la société. L’Etat ne prend aucune mesure radicale pour lutter contre deux grands fléaux qui menacent notre vivre-ensemble : le populisme et l’islamisme.
Des officines dangereuses comme Jamra et And Samm Jikko Yi ont à plusieurs reprises attaqué les libertés fondamentales et menacé la dignité de citoyens, intellectuels, artistes sans que l’Etat ne les arrête. Ces mouvements intégristes et leurs alliés, adversaires irréductibles de la laïcité, ont fait reculer le gouvernement lors du référendum de 2016, qui voulait inclure la laïcité dans les clauses d’éternité. Face à la pression des islamistes, l’Exécutif a malheureusement reculé. Or, à chaque pas de recul des démocrates et des républicains soucieux de la liberté, le camp obscurantiste avance et grignote sur nos libertés. Ces officines ont fécondé des jeunes biberonnés à l’islamisme qui eux aussi, dans un récent communiqué rendu public, souhaitent régir le port vestimentaire des étudiantes à l’université de Saint-Louis. Quelle a été la réaction du Rectorat et du ministère vis-à-vis de cette nouvelle police autoproclamée des mœurs ? Il n’y en a eu aucune à ma connaissance.
L’horreur à Léona Niassène n’est pas un acte isolé, il est le prolongement d’une culture d’intolérance et du désordre et d’un sentiment de puissance des lobbies intégristes face à la mollesse de l’Etat du Sénégal sur des questions relevant de la liberté de conscience et de la laïcité. Elle a un soubassement profond qu’on retrouve dans des actes graves ces dernières années, qui renseignent non seulement sur le délitement social, mais aussi sur l’indifférence de l’Etat et la force émergente du mouvement conservateur sénégalais.
Elle dit aussi quelque chose de la lâcheté des élites qui ne défendent plus des questions principielles, si ce n’est en matière électorale. La Gauche est divisée et un pan chez elle a rallié les intégristes et les obscurantismes, pourtant nos plus vieux et nos plus virulents adversaires.
Les universitaires préfèrent discourir sur «l’élection inclusive» et les péripéties des politiciens avec la Direction générale des élections plutôt que défendre les droits des simples citoyens qui eux, n’ont ni parti ni agenda politique.
Les organisations politiques et les intellectuels se taisent, voire soutiennent, quand Jamra et And Samm Jikko Yi tentent depuis une décennie de régir le Code pénal sénégalais et d’imposer de manière mensongère l’existence d’un agenda Lgbt au cœur de l’appareil d’Etat.
Des coalitions dont Yewwi askan wi, ont signé à la veille des Législatives de 2022, un mémorandum qui remet en question la nature laïque de l’Etat du Sénégal. Des députés fanatiques ont agressé leur collègue au sein de l’Hémicycle, au motif qu’elle aurait été discourtoise avec leur guide religieux. Ils ont été soutenus par leurs collègues parlementaires, notamment de gauche.
Des étudiants avec leurs complices ont brûlé des parties de l’université de Dakar et dansé autour des flammes. Les universitaires, journalistes et intellectuels, qui rivalisent pourtant de pétitions et de tribunes sur la matière électorale, se sont tus, donnant ainsi implicitement carte blanche à cette horreur. Amnesty Sénégal, la Raddho, etc. ont réagi à l’horreur de Léona Niassène. Eux, avec leurs alliés, si prompts à dénoncer la «dictature» au Sénégal, ont eu des accointances complaisantes avec des populistes et des islamistes des dernières années. Au fond, outre des communiqués pour faire bonne figure, il ne faut rien attendre de ces hémiplégiques de la pensée, adeptes de la loterie politicienne plutôt que de la défense du simple exercice d’humanité. Ils ont depuis longtemps sacrifié les principes et les causes humanistes au profit de l’agitation permanente et de la petite politique et vivent ainsi sur une rente.
Mais sur le drame de Léona Niassène, la responsabilité incombe pleinement à l’ÉEtat du Sénégal, qui a violé sa promesse de défendre la laïcité, la liberté et le vivre-ensemble. Depuis 25 ans, les gouvernements ont fait le choix politique du rattrapage infrastructurel. Les routes et autres échangeurs sont certes nécessaires, mais la paix civile, la conscience républicaine et l’exercice d’une citoyenneté civique qu’on acquiert par l’école leur sont supérieurs. Et ce sont des valeurs abstraites qui seules peuvent préserver notre société face aux agressions fanatiques et aux menaces islamistes et populistes.
L’Etat du Sénégal a choisi l’irresponsabilité en faisant le choix de ne pas élever la conscience de ses citoyens et de ne pas encourager leur montée en humanité.
On a brûlé un homme mort. On a brûlé sa maison. On a harcelé sa famille en violation des lois de la République et au mépris de toute humanité.
C’est avec tristesse et gravité que je me résous à porter ce jugement sur mon pays.
Le monde entier doit savoir que dans mon pays, le Sénégal, qui se dit modèle démocratique et social, on brûle vif des cadavres devant une foule excitée.
Dans mon pays, le Sénégal, on refuse même aux morts le repos de leur âme.
Dans mon pays, au Sénégal, quand on brûle une université, les intellectuels et les universitaires se taisent, mais quand on juge un homme politique, se remarque une inflation de tribunes et de pétitions.
Ils ont brûlé des livres, nous n’avons rien dit ou si peu. Ils ont brûlé un cadavre. Si nous ne faisons rien, demain ils brûleront vifs des gens dont ils ne partagent pas les idées.
Dans mon pays, le Sénégal, l’humanité a disparu.
par Alioune Gueye, Modou Dione et Hamat Seck
L'UCAD FUSILLÉE ET SOUILLÉE PAR LA POLITIQUE
Le gouvernement cherche à sacrifier des dizaines de milliers d'ambassadeurs de familles pour des règlements de comptes politiques. L'enseignement supérieur est sérieux pour être traité avec autant de légèreté
Alioune Gueye, Modou Dione et Hamat Seck |
Publication 31/10/2023
L'université Cheikh Anta Diop (UCAD) agonise ; « la réouverture ne doit plus être différée ; le temps passe et chaque jour perdu rend hypothétique le quantum horaire pour la validation des enseignements et des évaluations semestrielles ». Professeur Lat Soukabé Mbow.
Un îlot de mots qui décrit les problèmes qui assaillent l'espace universitaire de Dakar. Partant de ce postulat, notre pseudo-intellectualité nous a poussés à adopter une démarche d'une certaine scientificité. Car comme le voudrait l'adage, « l'intellectuel est un athlète de la pensée » ; cet athlète a l'obligation de se prononcer à travers les mots sur les maux qui secouent sa communauté, sur tous les plans, surtout quand ceux-ci impactent négativement sur la bonne marche de son pays.
Depuis les événements de juin 2023, qui ont occasionné la fermeture des universités sénégalaises, l'UCAD n'est pas épargnée. Malgré ce marasme éducatif, des séries de rencontres et de conseils d'administration ont eu lieu afin de sortir de cette situation inquiétante et aux lendemains incertains. Cela s'est manifesté par la décision du Conseil académique de l'UCAD réuni le vendredi 6 octobre 2023 sous la présidence du recteur, professeur Ahmadou Aly Mbaye. Après examen et analyse de la situation et conformément au calendrier établi lors de la séance du 12 juin 2023, le Conseil académique a pris entre autres la décision d'une reprise des enseignements en présentiel dans les meilleurs délais. Une décision salutaire et responsable au vu du chevauchement des années universitaires. Deux semaines plus tard, le Conseil d'Administration du Centre des Œuvres Universitaires de Dakar (COUD) s'est réuni sous la houlette de l'autorité rectorale avec une volonté manifeste de différer l'ouverture de l'université de deux mois pour des raisons qui jouissent d'une légèreté sans égale. Dès lors, il est plus que nécessaire de se poser la question de savoir : qu'est-ce qui a changé entre temps pour que ces décisions changent ?
« États de la situation de l'UCAD… »
Pour les autorités, ces décisions, contestées par les étudiants et les chargés d'enseignement, sont motivées par des raisons sécuritaires. Bref, les enseignants et les enseignés sont prêts pour la reprise, mais le personnel en charge du social n'est pas dans les dispositions d'ouvrir le campus pour les raisons précitées.
Pour certains, la décision de la suspension relèverait d'un manque de volonté politique et d'une tactique politicienne. Pour rappel, lors des violences de juin dernier, selon les témoignages de certains représentants d'étudiants et de travailleurs des campus, des personnes externes ayant envahi le temple du savoir avaient, de concert avec des étudiants, brûlé des équipements et infrastructures dédiés aux enseignements.
Après ces évènements déplorables, il y a sans doute la crainte d'une résurgence et d'une recrudescence des troubles au niveau des campus ; de sorte que chacun puisse comprendre que la reprise doit être soumise à des conditions. Toutefois, les mesures dilatoires prises par le Conseil d'Administration du Centre des Œuvres Universitaires de Dakar (COUD) pourraient aggraver le chevauchement des années académiques ou créer les conditions d'une année invalide. Il est utile de rappeler dans ce contexte que la manière de l'application actuelle du système globalisé du LMD ne permet plus de prendre des libertés sur les normes universelles d'acquisition et de transfert des crédits. Cette situation absconse est le fruit de l'immixtion de la politique dans le milieu universitaire. C'est pourquoi nous allons, dans les lignes qui suivront, interroger l'importance de l'UCAD sur le plan politique en raison de sa position stratégique et de l'importance de sa population pour comprendre l'utilité de la thèse selon laquelle le refus de l'ouverture immédiate est une décision politique.
« Le positionnement stratégique inavoué de l'UCAD et ses prouesses… »
Pour connaître le problème de l'UCAD, il est important de se référer à son positionnement politique, social, économique et scientifique. En effet, étant une des premières universités de l'Afrique de l'Ouest, l'UCAD surgit en plein centre-ville de Dakar. Ainsi, vu son positionnement stratégique tant sur le plan de sa localisation que sur celui des productions scientifiques, la fermeture de l'université de Cheikh Anta peut être considérée comme un échec des politiques déployées par les autorités. En effet, le blocage de l'avenue Cheikh Anta Diop a un impact très considérable sur l'opinion nationale et internationale et peut impacter négativement sur l'économie nationale : l'UCAD est centrale et constitue un boulevard pour paralyser la ville de Dakar.
Tout bien considéré, plongeons-nous sur les chiffres de la recherche de cette institution. L'UCAD est composée de 44 établissements, 44 unités de recherche, 1482 chercheurs, 10 domaines et 7 écoles doctorales (UCAD.sn). Ces chiffres montrent le statut de cet établissement qui, selon le récent classement des universités, se positionne à la première place en Afrique francophone et 21e dans tout le continent. De ce fait, fermer cette université pour des raisons purement politiques est un manque de volonté et un non-respect des droits des apprenants. Ces derniers sont estimés à 85 000 (année universitaire 2020-2021) et produisent une bonne partie de la recherche et de l'animation scientifique de l'université. Cela nous permet de dire, entre autres, que la non-ouverture de l'UCAD jouit d'un problème à caractère social, économique, politique et scientifique.
Au-delà de ces considérations, la production scientifique de l'université doit être un facteur pour la non-fermeture du campus social. D'autant plus, les résultats du CAMES ont donné un pourcentage de 98,5 % d'admis dans les rangs du personnel enseignant de l'UCAD. C'est pour dire que la posture scientifique de l'université doit être prise en considération dans les instances de prise de décisions. Cette non-ouverture peut être assimilée à une sorte de « violence douce » (Pr Souleymane Gomis) vis-à-vis des étudiants, du personnel enseignant et du PATS qui ne font que subir les conséquences de décisions à coloration politique.
« Les propos révélateurs d'un Recteur qui tergiverse… »
À l'occasion de la cérémonie d'ouverture des Assises de l'Université Cheikh Anta Diop, tenue ce jeudi, le Pr Ahmadou Aly Mbaye (Recteur UCAD) précise « dans ces assises, contrairement à ce qui a été annoncé, il ne sera pas question de la réouverture de l'Université, pour la bonne et simple raison que la réouverture ou non de l'université est un sujet qui est ressorti au conseil académique ». Forts de ce constat, les représentants des étudiants ont emprunté la stratégie du bâton pour redorer le blason de leurs pairs après des séries de sorties médiatiques et/ou de communiqués officiels. Cette situation, due principalement à des raisons politiques visibles et lisibles, est en train de mettre l'Université sénégalaise à terre. Comme toujours, « l'université devient un haut lieu d'exécution de décisions politiques au lieu d'être un espace de conflit d'idées et de débat de haut niveau. »
Nul besoin d'avoir des compétences visuelles ou une résonance sur la rotondité de la terre pour savoir que le phénomène de l'enseignement supérieur à distance ne tourne pas rond chez la majeure partie de nos universités ».
Même si les raisons restent toujours les mêmes, dont les actes de saccage et d'incendie, le gouvernement sénégalais cherche plutôt à sacrifier des dizaines de milliers d'ambassadeurs de familles (les étudiants) pour des règlements de comptes politiques.
« Quand la politique foule aux pieds l'UCAD… »
Dès lors, en situation de crise et d'incertitudes, comme en ce moment, surgit inévitablement un conflit entre deux temporalités : celle du politique, qui doit prendre des décisions dans l'urgence, et celle de la recherche, qui peut certes accélérer ses protocoles, mais en aucun cas s'affranchir de toute méthodologie, sous peine de briser la branche sur laquelle elle s'est laborieusement hissée. L'université Cheikh Anta Diop de Dakar est fusillée par la politique et le sang ressorti de ses veines s'est déversé en son sein. En outre, chaque directeur du COUD (UCAD) vient avec son « bétail politique » à travers un recrutement excessif, immodéré et à la longue qui manque de sérieux. Les directeurs du COUD qui se sont succédé (Abdoulaye Diouf Sarr, Cheikh Oumar Hanne, Abdoulaye Sow, Maguette Sene), sous une période aussi courte, ne peuvent pas mettre en pieds des politiques ou stratégies sérieuses pour garantir un « bien-être » des étudiants dans les campus sociaux. Cela dénote d'un manque de sérieux et de volonté de nos dirigeants vis-à-vis de l'université sénégalaise.
À cela s'ajoute, le décret d'un mot d'ordre de grève de 48 h du bureau national du Syndicat autonome de l'enseignement supérieur (SAES), les lundi 6 et mardi 7 novembre 2023 avec cessation des activités pédagogiques et une demande d'arrêt immédiat des cours dispensés en ligne dans toutes les universités publiques. À cet effet, nous saluons sa posture avant-gardiste à la suite des décisions dépourvues d'ambitions des autorités de l'UCAD. Mu par une volonté de solutionner cette crise, le SAES dit rejeter énergiquement l'alibi de la rénovation des infrastructures sociales sur lequel « les autorités qui n'ont pas voulu se préparer à la reprise programmée des cours en présentiel s'agrippent pour annihiler les nombreux efforts consentis par les enseignants-chercheurs ». Une situation qui risque de faire naître les germes de la terreur, de l'intolérance, de la division et de la scission dans nos espaces universitaires. De toute évidence, les pouvoirs publics prétendent mettre en place des systèmes de garantie de la qualité de l'enseignement dans le seul et unique but de fournir aux étudiants un enseignement digne. Baratins ! Ces systèmes sont en fait un moyen pour les responsables gouvernementaux d'asseoir leur tutelle avec une mainmise de l'université selon leurs désirs et aspirations politiques : la politique à l'université est omniprésente et impuissante.
« Le rôle des acteurs pour un retour dans les amphis… »
Le syndicat autonome de l'enseignement supérieur (SAES) a un rôle important à jouer pour le retour des étudiants dans les salles de classes. Dans notre article dénommé « Quand la politique fusille à balles réelles nos universités : quel avenir pour les étudiants ? », nous avons eu à libeller de manière claire et limpide un message pour les autorités universitaires et gouvernementales : « Pour nos gouvernants, l'université ne doit pas être un prolongement de décisions politiques et des cadres d'exécution des visions des politiques. » L'histoire nous a montré qu'aucun pays ne s'est développé sans avoir mis en place au préalable un système d'enseignement performant, innovant et stable, ce qui est loin d'être le cas au Sénégal ». Cet état de fait hante d'année en année l'université sénégalaise. Toutefois, les amicales d'étudiants doivent, au mieux, éviter de s'aventurer dans des questions à coloration politique pour ainsi garantir une certaine froideur et une impartialité dans leur prise de décisions et de positions. Le représentant d'étudiant ne doit en aucun cas jumeler la politique et les intérêts matériels et moraux de leurs pairs. Mieux, les acteurs universitaires peuvent faire de la politique, mais ils ne doivent en aucun cas politiser l'université.
« L'entrée par effraction du système LMD dans nos universités… »
L'introduction du système LMD dans l'enseignement supérieur sénégalais regorge de beaucoup de limites et de défaillances qui n'ont pas été bien gérées par les autorités universitaires. L'université est un sanctuaire sérieux qui mérite plus de considération et les décisions qui y sortent méritent beaucoup plus de froideur et de sérieux. Malheureusement, le système LMD qui se situe sur toutes les lèvres, n'est pas celui qui s'applique dans les universités sénégalaises.
Le LMD favorise la flexibilité et la mobilité des étudiants, l'adaptation aux besoins du marché du travail, l'amélioration de la qualité de l'Enseignement supérieur, la facilitation de la coopération internationale, la capitalisation des UEs, le transfert de crédits, la « semestrialisation » intégrale pour ne citer que ces éléments phares constituant son soubassement. Actuellement, les étudiants de l'UCAD sont confinés au silence afin que les autorités puissent dérouler sur tapis blanc leur politique de positionnement et de gain politique. Nos « intellectuels » ne comprennent toujours pas que « le choix d'un système d'éducation a plus d'importance pour un peuple que celui de son gouvernement » pour ainsi reprendre Gustave Le Bon dans Psychologie de l'éducation.
À toutes fins utiles, le système LMD doit être appliqué de manière rigoureuse dans les universités sénégalaises en se basant sur nos réalités socio-éducatives. Comme le disait Ousmane Diagne, « la plus mauvaise des lois est celle qui est « ineffective », inefficace, inappliquée et inapplicable ». Le système LMD doit s'appliquer dans son entièreté afin de se départir de ce système actuel qui est hybride et inqualifiable. En plus, beaucoup de séminaires, de conférences, de rencontres ont vu le jour depuis sa mise en place, mais malheureusement tous ces pourparlers sont traduits en lettre morte.
Nos gouvernements gagneraient à arrêter leur ingérence dans les affaires universitaires et à cesser toute pratique visant, de manière directe ou indirecte, à plomber l'université par des actes aux finalités politiques. En réalité, cette ingérence est un moyen de lutte anti-institutionnel ou contre-institutionnel utilisé par le gouvernement à des desseins inavoués mais visibles. Nos universités continuent de s'adonner à des stratégies qui ne font que plonger l'enseignement supérieur dans l'agonie. L'enseignement supérieur est sérieux pour être traité avec autant de légèreté. Le Sénégal doit bâtir un système d'enseignement supérieur ressourcé localement et répondant aux attentes de la population sénégalaise. L'UCAD mérite plus de respect et de considération dans le traitement des affaires qui lui sont afférentes.
Dans nos prochaines publications, nous vous servirons notre pensée sur la crise politique qui secoue le Sénégal.
Que le salut du peuple soit la loi suprême.
Vive le Sénégal
Alioune Gueye est chercheur en Mathématiques et Applications
Laboratoire d’Algèbre, Cryptographies, Codes et Applications (LACCA)/ UGB
L’Etat du Sénégal est devenu méconnaissable avec l’emploi de procédés déloyaux et de pratiques inquiétantes. L’Etat du Sénégal toujours pressé de juger Ousmane Sonko, a peur d’être jugé lui-même
L’Etat du Sénégal est devenu méconnaissable avec l’emploi de procédés déloyaux et de pratiques inquiétantes qui présagent d’un futur Etat dictatorial, policier et sanguinaire.
Après l’arrestation arbitraire du leader de Pastef, des comportements jamais soupçonnés dans la gouvernance se sont révélés pour l’éviction d’un adversaire politique, au détriment de la démocratie et de l’Etat de droit comme option irréversible du peuple sénégalais.
D’abord, l’Etat du Sénégal refuse de garantir les libertés individuelles et publiques, ainsi que les droits démocratiques au peuple sénégalais, en refusant systématiquement les rassemblements pacifiques, les marches pacifiques, réprimant à toute occasion ceux qui usent de leur droit de critique sur la gouvernance politique ou économique, expriment leurs pensées ou leurs opinions s’ils ne sont pas catalogués inféodés, partisans ou sympathisants du parti politique au pouvoir.
Fausser le suffrage universel
Le port du bracelet Pastef porterait bonheur et renforcerait la foi et la détermination, aux dires de ceux qui en ont porté et que j’ai eu à rencontrer dans les caves des tribunaux, attendant leur tour d’être placés sous mandats de dépôt, sans s’interroger sur la nature du crime reproché, sachant qu’il n’ont commis aucune infraction.
Ensuite, l’Etat discrédite lui-même les institutions en jetant la suspicion sur les juges dans ses écrits et refusant d’exécuter une décision de justice au su de la communauté nationale et internationale.
L’Etat reste sourd et impitoyable, décidé à fausser le suffrage universel et la volonté populaire, en emprisonnant le personnage le plus populaire, que les sondages politiques donnent victorieux aux prochaines élections présidentielles, malgré l’inopportunité de la mesure et l’état de santé de la personne qui fut très alarmant, même s’il s’est amélioré grâce aux interventions intenses des médecins.
Les arrestations et persécutions des cadres du Pastef se poursuivent dans le dessein toujours d’entraver la candidature d’Ousmane Sonko et toute personne qui pourrait être porteuse de son projet politique panafricaniste ainsi que de son programme national.
Derrière l’arrestation d’Amadou Ba...
L’arrestation d’Amadou Ba depuis le samedi 28 octobre, nuitamment sans qu’il lui soit notifié les motifs de son interpellation, avait un double objectif :
- l’empêcher de se rendre à Abuja pour déposer à la Cour le dossier opposant Ousmane Sonko et le Pastef à l’Etat du Sénégal et dont l’audience était programmée pour le 31 Octobre à 10heures. La personne qui avait pris la suite, employé de mon cabinet, a été empêchée de prendre l’avion pour Abuja et les dossiers qui étaient déjà embarqués dans l’appareil, débarqués. Mais au grand dam de l’Etat, les services de renseignement de l’Etat ont été dribblés et le dossier a été reçu et enregistré au greffe de la Cour de la CEDEAO qui a accusé réception au cabinet ;
- le second objectif visé par l’arrestation d’Amadou Ba est de faire obstacle à la candidature du prisonnier politique Bassirou Diomaye Faye dont il est le mandataire (Diomaye est le second de Ousmane Sonko dans le parti Pastef).
Amadou Ba est en retour de parquet, un régime de détention arbitraire que ne justifie aucune disposition légale et le mandat de Dépôt ainsi qu’un emprisonnement jusqu’après les élections de 2024 au plus tôt, serait de la politique de persécution et de répression politico-judiciaire de l’Etat du Sénégal.
« L’État du Sénégal a peur d’être jugé »
L’Etat du Sénégal a franchi le rubicon en produisant dans le dossier de la CEDEAO une vidéo montée à partir des diffusions de <<ANITA>> qui est son monstre médiatique et il est désemparé lorsqu’il a su que les Patriotes ont rétabli et produit auprès de la Cour les originaux des vidéos qui faisaient partie du dossier qu’Amadou Ba devait amener à Abuja.
C’est pour cette raison que l’Etat joue la carte du dilatoire en demandant le report de l’audience, pour arriver à une date qui ne permettrait à Ousmane Sonko et au Pastef de participer aux élections, ce qui est triste et dégradant pour un Etat.
L’Etat du Sénégal toujours pressé de juger Ousmane Sonko, a peur d’être jugé lui-même.
Qu’en sera-t-il lorsque des artisans responsables du délabrement de l’Etat de droit et du système démocratique seront placés en garde à vue, sous mandats de dépôt et comparaîtront à la barre pour répondre de leurs crimes
Me Ciré Clédor Ly est avocat, membre du Collectif de défense d'Ousmane Sonko.
Par Aissatou Sophie GLADIMA
JOAL, RECEPTACLE NATUREL DES RELIQUES DE SENGHOR
Le Sénégal a décidé d’acquérir les objets ayant appartenu au Président Léopold Sédar SENGHOR qui avaient été mis en vente aux enchères en France par un commissaire-priseur mandaté dit-on par une descendante de Colette SENGHOR qui aurait reçu en héritage
Le Sénégal a décidé d’acquérir les objets ayant appartenu au Président Léopold Sédar SENGHOR qui avaient été mis en vente aux enchères en France par un commissaire-priseur mandaté dit-on par une descendante de Colette SENGHOR qui aurait reçu en héritage les objets dont la place ne peut être que dans un musée tant leur valeur symbolique est incommensurable. En prenant la décision de stopper ce processus de vente, le Président de la République, Son Excellence Macky SALL a réaffirmé son attachement profond au patrimoine national car Léopold Sédar SENGHOR et ses reliques doivent appartenir pour toujours au patrimoine national Sénégalais. Par conséquent, aucune tierce personne ne saurait s’arroger ce trésor culturel. C’est pourquoi, la commune de Joal-Fadiouth, terre d’adoption et partie intégrante du royaume d’enfance du Président-poète salue ce geste o combien important de Monsieur le Président de la République et lui redit sa fierté d’avoir un chef d’Etat soucieux de la préservation de la mémoire vive de son pays et de son legs historico-culturel.
Pour nous de Joal-Fadiouth, Léopold Sédar Senghor, chantre de la civilisation de l’universel, constitue l’un des trésors culturels majeurs du Sénégal. A cet égard, son œuvre tout comme ses reliques, ses objets personnels représentent un héritage patrimonial et culturel qu’il faut d’avantage valoriser pour une transmission aux générations actuelles et futures. C’est dans ce sens que l’acquisition par l’Etat du Sénégal, de ces objets emblématiques, qui auraient pu se retrouver après-vente dans des salons privés ou des musées que les Sénégalais ne pourraient jamais visiter, est un symbole fort qui nous conforte dans notre engagement à lutter pour la préservation de notre patrimoine historique et culture.
En effet, la mairie de Joal-Fadiouth, depuis quelques années, a mis en œuvre un programme culturel dont l’une des activités phares est le festival Xemaan Jong Fa Fadiouth qui fait écho à l’appel de la civilisation de l’universel, de l’enracinement dans la culture sérère et de l’ouverture du Poète-Président Léopold Sédar SENGHOR. Une manière pour la commune, dont il a été maire, de lui rendre l’hommage mérité que notre commune réserve à ceux et celles qui l’ont porté dans leur cœur et qui se sont investis ou qui s’investissent encore pour son rayonnement et son développement. Ce festival, rendez-vous du donner et du recevoir à lieu chaque année et sera à sa 4ème édition en décembre prochain. Il est important de rappeler que Joal-Fadiouth est essentiellement une terre de culture, adossée à des valeurs ancestrales authentiques, qui permettent à ses habitants de s’enraciner solidement pour mieux s’ouvrir et apporter leur contribution au banquet de l’universel. Notre conviction profonde est qu’aujourd’hui, plus que par le passé, nous devons revisiter notre histoire, nous appuyer sur ce que nous avons de plus authentique, célébrer nos héros et anciennes gloires, défendre notre patrimoine contre la tentation du doute et de l’oubli, pour nous projeter plus résolument vers l’avenir.
C’est pour toutes ces raisons que la Mairie de Joal-Fadiouth se tiendrait prête à engager les discussions avec l’Etat du Sénégal pour accueillir, conserver et valoriser une partie des objets en question dans un musée de la culture sérère à Joal qu’il a aimé et chanté dans son légendaire poème Joal, je me rappelle. Joal aussi ne peut jamais oublier son fils SENGHOR. C’est donc tout naturellement qu’elle se positionne en réceptacle de tout ou partie des objets lui appartenant car leur retour au pays natal s’apparenterait à un pèlerinage et nul pèlerin sur les traces de l’Immortel ne peut occulter de son itinéraire l’étape de Joal, partie intégrante de son royaume d’enfance. Et comme les lamantins vont boire à la source, Léopold Sédar SENGHOR reviendrait ainsi aux sources ancestrales entre Mbine Diogoye son cocon familial devenu musée familial, pas loin de l’église presque deux fois centenaire de Joal, là où il a reçu son baptême et à quelques encablures de Ngazobil, où il a fait ses humanités.
par Marema Touré
PROFESSEUR IBA DER THIAM, DE LA TRAJECTOIRE PROFESSIONNELLE ET MILITANTE DU CITOYEN HISTORIEN
EXCLUSIF SENEPLUS - Iba Der était un combattant à la foi inébranlable, qui avançait en politique comme en religion. Toute sa vie durant, ce sont ses seules convictions, qui ont guidé, en dernière instance, toutes ses décisions (2/2)
L’inauguration, le 10 février 2023, de l’Université Iba Der Thiam de Thiès (UIDT), m’avait imposé l’agréable devoir d’entamer ce témoignage dédié à mon défunt époux. Décédé le 31 Octobre 2020, le Professeur Iba Der Thiam était un homme exceptionnel. Je saisi l’occasion de cet anniversaire posthume pour compléter cet hommage que je rends à sa mémoire. Dans un premier jet, j’avais abordé l’identité et les valeurs de l’homme ainsi que la pertinence du système de parrainage des établissements scolaires dont il a été le précurseur. Je m’intéresse ici, à sa trajectoire professionnelle, syndicale et politique.
Il est de notoriété que l’illustre disparu a marqué des générations entières à travers son action publique unanimement reconnue. Toutefois, il faut l’admettre, si le militant Iba Der a été au cœur des nobles luttes de sa génération, il a aussi été au centre des controverses syndicales et politiques qui les ont ponctuées ! L’historien patriote a également été mêlé au débat épistémologique passionné mais riche de leçons, qui marqua la parution des premiers volumes de son projet titanesque de réécriture de l’Histoire Générale du Sénégal (HGS). C’est le sens de l’exercice, presque périlleux, auquel je me prête. En tant que témoin intime du dernier versant de sa vie, je me propose d’éclairer, de ma propre lanterne, l’itinéraire complexe du Grand Serviteur du Sénégal et de l’Afrique.
Un Historien Patriote, Enseignant jusqu’au dernier souffle
Persuadé, comme Cheikh Anta Diop que l’« Antériorité des civilisations nègres » loin d’être un Mythe est une Vérité historique, Der était taraudé par la question de savoir, pourquoi notre continent a autant de mal « Au plan des idées, des concepts, des symboles, des valeurs et des références, à se libérer des pesanteurs du passé, des préjugés hérités du système colonial, de l’ethnocentrisme et de l’apriorisme, des clichés, des comportements et des attitudes générées par des siècles d’endoctrinement, d’obscurantisme, de falsification des faits et de travestissements de la vérité, « de mensonge culturel », pour parler comme le regretté et sémillant Cheikh Anta Diop. » (Thiam 2009).
Le Panafricaniste convaincu, ne se lassait jamais de rappeler, la vérité avérée que « le monde négro-africain est, dans l’état actuel des connaissances, celui qui peut se réclamer de la plus ancienne histoire dans la trajectoire plurimillénaire de la très longue aventure humaine. C’est en Afrique qu’on situe le berceau de l’humanité. C’est, aussi, sur son sol, que se sont développées toutes les différentes phases du processus d’hominisation. Les mouvements Pan-noirs du 19ème et du début du 20ème siècles ont attiré, très tôt, l’attention sur les fastes de l’Egypte pharaonique, de l’Ethiopie Antique et sur l’éclat que l’humanisme du Soudan Nigérien a développé du 8ème au 16ème siècles, au moins ».
Conscient de l’urgence de déconstruire la triple colonialité du pouvoir, de l’État et des systèmes de savoir dominants (Lander, 2000 et Quijano, 2007) qui pèse sur le Continent, Iba Der s’est très vite attaqué aux disfonctionnements de notre monde asymétrique. Il trouvait paradoxal que la pensée africaine, pourtant antérieure, réelle et audible soit aujourd’hui marginalisée, réifiée et vassalisée.
Instituteur ayant gravi tous les échelons de la fonction enseignante, Iba Der Thiam est un exemple pour tous ceux qui croient que la pugnacité est la clef de la réussite. Promu en 1983, Ministre de l’Education Nationale, par le Président Abdou Diouf, qui adjoignit à ce Portefeuille, celui de l’Enseignement Supérieur de 1985 à 1988, Der demeura un pédagogue résolu jusqu’à son décès. Le Grand Professeur n’a jamais cessé d’enseigner et encadra à ce titre plusieurs Thèses et Mémoires.
La brillante trajectoire de ses étudiants en thèse, parmi lesquels Kalidou Diallo et Mor Ndaw qui, à son image, sont passés du statut d’instituteur à celui de professeur des universités, illustre à volonté, l’empreinte qu’il aura imprimée à ses fils institutionnels. Comme lui Kalidou, le continuateur de ses travaux sur le mouvement syndical au Sénégal, sera Ministre de l’Education Nationale. Comme lui, Mor Ndaw, actuel directeur d’une école doctorale, a été Inspecteur Général de l’Enseignement Secondaire. Parmi les premiers docteurs dirigés par le Professeur, il faut signaler l’historien artiste, Abdarahmane Ngaïdé, Omar Guèye, Gana Fall et tous ses autres fils que je n’ai pas pu citer.
Le Professeur Mor Ndaw, avec ses collègues du département d’histoire, Dr Daouda Diop et Dr Abdou Karim Tandjigora ont coordonné, avec un grand succès la publication et le lancement des « Mélanges dédiés au Professeur Iba Der Thiam ». Il en a été de même pour la cérémonie d’inauguration de l’UIDT, organisée avec panache, par l’ancienne Rectrice, Pre Ramatoulaye Diagne Mbengue. Ces événements ont été brillamment modérés par les Pr Mbaye Thiam et Lamane Mbaye. Je voudrais saisir cette occasion pour leur exprimer ma gratitude, ainsi qu’aux plus hautes autorités qui y ont été présentes et à tous ceux et celles, dont la seule présence est un témoignage d’amitié. C’est le meilleur hommage que la République et le monde universitaire pouvaient offrir à l’illustre défunt !
L’historien émérite ne s’est jamais départi de sa ferme résolution de défendre l’identité culturelle sénégalaise et africaine. Avec son style singulier, c’est d’abord en pédagogue qu’il occupa sa discipline. Ses publications ont, entre autres, contribué à répondre à l’impératif de disposer, de livres adéquats au double plan culturel et technique dans des matières importantes. Il dota son pays de huit (08) manuels structurants respectivement intitulés : Histoire du Sénégal et de l’Afrique ; Géographie du Sénégal ; Mon premier livre de Géographie ; Les Atlas Jeune Afrique (Sénégal) ; Instruction Civique classe de Sixième ; Instruction Civique classe de Cinquième ; Instruction Civique classe de Quatrième et Instruction Civique classe de Troisième. Ces ouvrages, conformes à son orientation patriotique, sont encore en usage dans les enseignements primaires et moyens du Sénégal. Ils permettent à la jeunesse de fixer leurs repères, de bien s’arrimer à la culture de leurs terroirs et de cultiver le civisme pour être des bons citoyens du monde.
Sa production scientifique inclut, entre autres, les publications intitulées : Maba Diakhou Bâ, Almamy du Rip (Sénégal), Paris, ABC, 1977 ; Le Sénégal dans la guerre 14-18, ou le prix du combat pour l'égalité, Dakar, Les Nouvelles Éditions Africaines, réédité en 2009 ; Histoire du mouvement syndical africain, 1790-1929, L’Harmattan, 1993 ; Histoire des Communes et leur rôle dans la construction de la démocratie sénégalaise et dans l’émergence d’un leadership indigène (Des premiers contacts au début du XXe siècle), NEAS – 2014 ; La Révolution de 1914 au Sénégal ou l’élection au Palais Bourbon du Député noir Blaise Diagne (De son vrai nom Galaye Mbaye Diagne) (Tome 1) - L’Harmattan Sénégal, 2014. Son tout dernier ouvrage a été édité, à titre posthume, par le Pr Mamadou Fall, actuel coordonnateur de l’HGS, qui le présente ainsi :
Ce livre porte sur la Tidjania. On y retrouve tout le talent, la générosité et le courage lucide de Iba Der Thiam. Il se fait l’écho d’un mémorable débat entre Amadou Bamba et Khali Madiakhaté Khala sur le sens et la portée de l’action d’un des disciples épigone du jihad de El Hadj Omar Tall : Akhmadou Sheikhou. Les armes de la guerre sainte s’étaient à peine posées qu’il fallait en analyser les ressorts, la portée et la signification. Les arguments, les hypothèses et les paradigmes se croisaient déjà dans ce moment fondateur de notre historiographie. La démarche de Iba Der est celle d’un historien engagé dans une relation sympathique avec son objet. Le texte est déroulé comme un chapelet de l’initié au « wird » Tidiane qu’il est. (Fall 2022).
Au plan continental et international, Pr Thiam figure parmi les principaux rédacteurs de l’Histoire Générale de l’Afrique (HGA), réalisée par l’UNESCO. Directeur des volumes VI et VII de l’HGA dédiés à l’Histoire du Développement Scientifique et Culturel de l’Humanité ; Co-directeur de l’Histoire de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) ; Co-auteur du Tome VI (Parties I et II) de la Collection « Les différents aspects de la civilisation islamique » - UNESCO 2017-, le Professeur a également participé à plusieurs ouvrages collectifs dans la Collection traitant des différents aspects de la civilisation islamique, sous l’égide de l’UNESCO et de l’ISESCO.
Il a également publié plus de 450 articles, conférences, communications, préfaces scientifiques, politiques, économiques et culturels, dans des revues et journaux et à l’occasion de manifestations scientifiques qui traitent de thèmes tellement divers qu’ils confirment encore son éclectisme déjà souligné. Il était le Président de la Commission Nationale chargée de célébrer la Journée du Tirailleur Sénégalais et a également été le Président du Comité pour la Valorisation des Archives de Thiaroye 44 "COVART 44". C’est le lieu de reconnaître ses compagnons dans ce parcours, le Pr Mamadou Koné et le Colonnel Birama Thioune, ainsi que le soutien de tous les généraux, chefs d’état-major de notre armée, qui l’ont soutenu dans cette mission.
Coordonnateur Général du projet Histoire Générale du Sénégal des Origines à nos Jours, de 2013 jusqu’à son éclipse, il dédia les dernières années de sa vie à cette œuvre monumentale. Ce projet qui vise à retracer la cohérence de l’évolution générale du Sénégal, des origines du peuplement à nos jours dans les différents domaines de la vie politique, économique, sociale, syndicale, diplomatique, institutionnelle, scientifique, technique et culturelle, a occupé le dernier versant de sa vie. Il s’est consacré, corps et âme, à en démontrer la rationalité, le but et la méthodologie et à lui donner corps. L’HGS est mise en œuvre par une équipe multidisciplinaire composée d’historiens et de chercheurs des différentes régions ou de la diaspora, appartenant à toutes les disciplines capables de contribuer à la reconstruction du très précieux héritage, qu’est la mémoire de notre peuple, et la construction de repères nationaux communs. (Note conceptuelle HGS).
Les cinq volumes, publiés de son vivant ont, de l’avis des éditeurs, déjà contribué « à reconstruire sur la très longue durée la trame des événements historiques qui permettent d’appréhender toute la complexité des facteurs essentiels d’explication de ce qui fait le Sénégal actuel et son identité, à travers la contribution de ses populations, à l’édification de son unité territoriale et à l’avènement des valeurs communes qui fondent et justifient son attachement au pluralisme, à la démocratie, à la justice, à la paix, à la solidarité, à la dignité et au développement, dans le respect des différences ».
A l’instar de beaucoup de travaux scientifiques structurants, ces publications inaugurales avaient suscité débats et passions. Avec la détermination de la nouvelle équipe dirigeante de l’HGS, il ne fait nul doute que toutes les leçons seront tirées, sans concession, du débat critique et salvateur, que notre passion partagée pour cette histoire qui nous touche dans nos identités intimes, avait soulevé, avec bonheur. La nouvelle équipe et le comité de pilotage d’HGS, s’acquittent magistralement du viatique reçu. Avec ardeur et hardiesse, ils s’attèlent à la tâche de parachever cette œuvre de rédemption africaine que Iba Der Thiam a commencé avec eux. Ils perpétuent la collégialité, la synergie créatrice et le sens de l’éthique qui a toujours été le label de l’HGS. En toute modestie, certains ont même affirmé, que le regretté Historien est irremplaçable. Mais, je voudrais, ici, confesser qu’en les écoutant, je suis constamment émue de redécouvrir que ni le talent oratoire, ni la mémoire des faits, ni la verve du tribun, ni le savoir encyclopédique, ni même la conviction exubérante de l’historien militant, n’a disparu avec l’éclipse du Grand Professeur. Je demeure convaincue que la moisson sera encore plus généreuse et les contributions toujours pertinentes pour réaliser la totalité des objectifs fixés.
Quelle agréable impression de voir certains d’entre eux, croiser, si élégamment, le fer des idées avec l’incorrigible race des détracteurs du projet ! Loin de s’éteindre avec la disparition de Super Der, les fossoyeurs de la ligne éthique et scientifique de l’HGS semblent revigorés par le « courage » sans gloire de s’attaquer à l’honneur du vaillant guerrier endormi. Ces « contradicteurs fugitifs » savent pourtant très bien que même dans sa nouvelle tanière pour un repos mérité, le défunt lion, qui n’a jamais connu la peur, a encore à sa portée la réplique toujours saillante du batailleur aguerri. En vrai gentlemen, la vaillante équipe de l’HGS a insufflé un nouvel élan à la résilience de roseau de leur preux légataire. Comme le digne héritier de Mbakhar Thiam, ils ne se dérobent nullement quand la confrontation s’impose. Comme leurs glorieux prédécesseurs, ils savent affronter, avec classe et célérité, toutes les formes d’adversité !
A cette belle équipe, je rappelle que, comme moi, le public du Sénégal, de l’Afrique et tous ceux qui, dans le monde entier, sont férus d’une histoire africaine réhabilitée et remise sur ses pieds, attendent, impatiemment de découvrir les dix ouvrages produits dans l’année consécutive au décès du Professeur et la suite imminente. Nous savons déjà qu’ils s’inscriront dans le même ancrage local de la production historique des cinq premiers volumes. Nous savons également que ces nouvelles publications seront dans la continuité de la logique d’intégration (..) de chaque lieu de mémoire, chaque grand témoin dans un contexte régional et panafricain comme le dit si bien le coordonnateur.
Un syndicaliste organique doublé d’un militant politique
L’existence de Iba Der Thiam a également été, une vie de combat sans répit pour l’indépendance du pays et les libertés syndicales ; Combat pour la souveraineté effective et totale du Sénégal et de toute l’Afrique ; Combat pour le progrès social des populations du Sénégal, de notre continent et de ses Diasporas. C’est là que réside la signification du saut qualitatif qu’il effectua, très tôt, en renforçant son statut de syndicaliste par un engagement politique constant et fécond, tout au long de son histoire. Combattant des bonnes causes, Der a été un acteur central des polémiques politiques qui ont marqué l’Afrique depuis l’aube des luttes pour la liberté de nos peuples.
De 1955 à 1958, il est élu président de la « Jeunesse scolaire de Kaolack » (JSK), une Association calquée sur le modèle Jeunes Turcs, Jeunes Egyptiens, Jeunes Tunisiens, Jeunes Algériens, qui eut un impact certain sur son orientation patriotique et panafricaniste. C’est ainsi que, dès ses 18 ans, il fût un membre influent du Comité de coordination des Associations scolaires du Sénégal, membre du Rassemblement de la Jeunesse Africaine (RJDA) et du Conseil de la jeunesse du Sénégal.
C’est suivant une logique toute transparente que le militant et spécialiste du mouvement syndical adhéra au Parti Africain de l’Indépendance (PAI), dès les lendemains de sa création, en septembre 1957 à Thiès. Cette cité rebelle a été le théâtre des grandes grèves de cheminots de 1938 et 1947, projetées au cœur des travaux de l’Universitaire Iba Der Thiam. Quoi de plus naturel que ce soit dans ce parti de gauche, qui opta clairement, dès ses débuts, pour le socialisme avec une orientation résolue pour le marxisme-léninisme, le panafricanisme et le pan-négrisme, que Iba Der effectua ses premiers pas en politique ?
Après avoir fourbi ses armes au PAI, l’homme politique Iba Der avec d’autres compagnons rejoignirent le Parti du Regroupement Africain-Sénégal (PRA-Sénégal), créé en septembre 1958, qui fort de son idéal panafricaniste adhéra au Parti du regroupement africain (PRA). On remarque, pourtant que, comme beaucoup de combattant de sa génération, Der n’a jamais rompu avec les objectifs déclarés du PAI, son parti originel. Tout au long de son itinéraire politique, « la défense de la cause de tous les noirs », « la lutte pour l’unité africaine » et « la suppression de l’exploitation de l’homme par l’homme » ont servi de colonne vertébrale à l’action syndical et politique du militant Iba Der Thiam. Ses camarades, qui sont encore en vie, peuvent témoigner avec moi, que si les divergences, surtout tactiques, ont certes conduits certains d’entre eux, à emprunter des pistes différentes (mais souvent convergentes), les mots d’ordre du PAI : Mom sa reew pour l’indépendance, Bok sa reew pour l’unité nationale et Défar sa reew pour la construction nationale et le développement, sont toujours restés au centre de leur foi ultime.
La trajectoire syndicale et politique du citoyen engagé, Iba Der Thiam s’identifie, en effet, à la logique mouvementée de l’histoire politique du Sénégal. De 1960 à 1973, le Sénégal a officiellement vécu sous le régime du parti unique de l’Union Progressiste Sénégalaise (UPS), créée en 1958 par Lamine Guèye et Léopold Sédar Senghor. Ce dernier, élu Président de la République en 1960 resserra l’étau. Le PRA-Sénégal et le Bloc des Masses Sénégalaises (BMS) ont ainsi intégré l’UPS, pendant que le PAI, le Front National Sénégalais (FNS), etc., ont été dissouts. Ce n’est qu’en 1974, avec la conjonction des luttes estudiantines, de l’action syndicale et des groupes politiques clandestins, mais également la pression du peuple et de l’opinion internationale que le président Senghor autorisa la création du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) de Maître Abdoulaye Wade.
Combattant indomptable, le dirigeant syndical a été présent sur tous les fronts de la lutte pour revendiquer et faire respecter les droits des travailleurs. Ancien Secrétaire Général du Syndicat Unique de l’Enseignement Laïc (SUEL) et du Syndicat des Enseignants du Sénégal (SES) de 1966 à 1972, ancien membre du Bureau de l’Union Nationale des Travailleurs du Sénégal (UNTS), le militant indocile a été arrêté trois fois et mis en prison pour activités politiques et syndicales. Sa dernière condamnation sous le régime Senghorien, en 1971, devait durer trois ans, avant qu’il n’obtienne une remise de peine par grâce présidentielle, après neuf mois de détention.
Il me plait de souligner que cette période a beaucoup raffermi les liens qui unissent Iba Der et Thiès, cette plate-forme des insoumis qui accueille aujourd’hui l’Université à laquelle, le Président Maky Sall a bien voulu donner son nom. Iba Der et la cité du rail partageaient, en effet, la même grille de principe fondée sur la résistance. L’esprit et la lettre du syndicalisme, dont Thiès a été la capitale attitrée, ont été les constantes dans l’itinéraire curviligne de Der le combattant. Sous cet angle également, les jeunes étudiant-e-s de l’UIDT peuvent et doivent être fiers de leur Parrain.
C’est aussi en acteur déterminé que l’historien engagé a été un témoin privilégié de la révision constitutionnelle du 19 mars 1976, qui porta le nombre des partis à trois au maximum, soumis à la règle de représenter des courants de pensée différents. L’UPS s’arrogea l’étiquette socialiste et démocratique et prit sa nouvelle appellation, de Parti Socialiste (PS) en décembre 1976. Le courant Libéral et démocratique fut affecté au PDS. Des différents démembrements issus du PAI historique, seule la faction dirigée par Majemouth Diop fut reconnue. Le courant communiste ou marxiste – léniniste lui fût attribué et la reconnaissance officielle de l’appellation d’origine, PAI-Sénégal. Avec la révision constitutionnelle du 28 décembre 1978, le nombre des partis fut porté à quatre. Le nouveau courant, représentant le centre ou le conservatisme, fut attribué au Mouvement Républicain Sénégalais (MRS), fondé par Maître Boubacar Guèye.
En décembre 1980, le président Senghor dévoila sa double décision de quitter le pouvoir en se faisant succéder par son Premier Ministre Abdou Diouf. Pour le citoyen militant Iba Der Thiam comme pour tout le pays d’ailleurs, ce fut un tournant important ! Toutes les victimes des persécutions de Senghor se mobilisèrent, avec des directions différentes, les uns pour continuer de faire face au nouvel avatar du régime et les autres pour accompagner les réformes hardies que le nouveau Président entreprit. Parmi les premières mesures, l’abrogation de la Loi des quatre courants, remplacée par la Loi n°81 – 16 du 6 mai 1981 modifiant l’article 3 de la Constitution qui instaura le multipartisme intégral. La métaphore inspirée du président Diouf, « la Mosquée est ouverte et tous les muezzins autorisés à lancer leur appel à la prière » ne « tomba pas dans l’oreille de sourds ». Beaucoup de « feddayin » saisirent la balle au bond pour fonder leurs « chapelles partisanes » et obtenir un récépissé pour leur clan politique.
Cependant, la tactique d’Abdou Diouf ne se limita pas aux réformes. Dans la perspective des élections de 1983, il ficela une stratégie féconde pour garder le pouvoir. Des pans entiers des élites nationales décidèrent également de l’accompagner. Il fut plébiscité par les principaux foyers maraboutiques et obtint le « Ndiguel » du Khalife général de la confrérie mouride. Bien au-delà de la communauté mouride, la puissance du discours de Serigne Abdou Lahad Mbacké frappa la mémoire du Sénégal. D’autres centres de la Tidjania lancèrent aussi des appels au profit du Président musulman qui s’était rendu, plusieurs fois à la Mecque. Le très influent Cheikh Omar Mountaga Daha Tall, petit fils du Grand Djihadiste de l’Islam El Hadji Omar Tall, séjourna longuement au Fouta pour apporter son soutien actif au candidat Abdou Diouf. Mais ce qui était, le plus singulier, c’était la multitude de mouvements de soutien dont certains étaient portés par des « intellectuels patriotes » et avaient une résonnance nationaliste. (Tamba 2011).
Dans cette mouvance, le militant Iba Der prit fait et cause pour le président Diouf. Comme à l’accoutumée, il avança sans masque. Toujours, à l’avant-garde des causes qu’il défend, Super Der démultiplia les fronts. En sus de sa qualité de « Membre de l’Appel des 1500 » lancé en 1981, il fut le Président du Groupe d’Etudes et de Réflexion pour un Sénégal Nouveau (GRESEN), puis fonda le Mouvement « Abdo ñu doy » (Notre confiance va à Abdou). Éternellement égal à lui-même il soutînt, de toutes ses forces, celui qu’il considérait, à cette époque-là, comme le principal porte-étendard des intérêts du pays.
A sa sortie du gouvernement, le 05 Avril 1988, Iba Der poursuivit son action politique. Ses divergences avec certains pôles du pouvoir avec qui il avait déjà connu des antagonismes, surtout autour de son projet d’école nouvelle, a fini par se muer en une cristallisation avec le régime. Au début des années 1990, Der se retrouva, de nouveau dans l’opposition contre le Parti Socialiste et son chef, Abdou Diouf. Ce qui peut apparaître à première vue comme un changement de cap est pourtant un itinéraire logique pour qui connait Iba Der Thiam. Convaincu qu’il était de ne devoir sa loyauté qu’à ce qu’il considère conforme aux intérêts du Sénégal, Iba Der a toujours été constant dans sa position de patriote libre et incorruptible. Généreux dans tous ses engagements, il était foncièrement indépendant dans ses prises de décision et rebelle à toute forme d’asservissement. Sa posture était toujours conforme à la morale du croyant qu’il était.
Avec le multipartisme illimité, qui est toujours de mise, Der et ses camarades créèrent leur propre formation politique, la Convention des Démocrates et des Patriotes Garab-Gi (CDP/Garab-Gi) dont le récépissé lui fut délivré le 13 juillet 1992. Ses compagnons lui firent l’amitié de le propulser au rang de Secrétaire Général (SG) du Parti. A deux reprises, ils l’ont investi comme candidat aux élections présidentielles de 1993 et 2000. Ayant eu la chance de côtoyer les dirigeants de cette formation, j’ai toujours pensé qu’au-delà du projet politique, leur véritable liant résidait dans leur commune conviction que l’action partisane doit être fondée sur l’éthique et les valeurs cardinales de notre société. Leur foi inaliénable dans la primauté de l’intérêt supérieure de notre nation par rapport à leur propre destin a toujours guidé leurs options.
C’est lors des élections législatives de 1993 auxquelles, la CDP/Garab-Gi participa sous la bannière de la coalition « Jappoo Liggeyal Sénégal » fondée avec And-Jëf/Parti africain pour la démocratie et le socialisme (AJ-PADS) de Landig Savané et le Rassemblement National Démocratique (RDN) de Madior Diouf, que Iba Der fit sa première entrée comme Député à l’Assemblée Nationale. Pendant cinq législatures, de 1993 à 2017, il y sera successivement élu. Pendant deux législatures, il fut, le Premier Vice-président de l’Assemblée Nationale du Sénégal. Ce bail, qu’il noua avec la nation sénégalaise dura pendant 24 ans ininterrompus. Ce fut une période centrale dans la trajectoire politique de l’éminent militant. Ces nombreuses prestations pertinentes, percutantes, imbues de justice sociale et toujours du côté des dominés, lui valurent le surnom mérité de Député du Peuple.
Ce n’est possible de survoler, ici, le trajet florissant de l’ancien Coordonnateur du Front pour l’Alternance (FAL) et du Regroupement des partis politiques de la Majorité présidentielle, dénommé « Convergence des Actions autour du Président pour le 21ème siècle » (CAP-21) sous le Président Abdoulaye Wade. Le Président Wade lui proposa les fonctions de Président du Conseil de la République pour les Affaires Economiques et Sociales (CRAES), quatrième personnalité de l’Etat et plus tard celle de Ministre d’Etat auprès du Président de la République, qu’il déclina poliment en faveur de sa nette préférence de continuer à servir le peuple sénégalais en tant que Député.
Parmi ses principaux camarades de la CDP/Garab-Gi, je voudrais ici citer le SG-Adjoint, le très fidèle Ibrahima Fall, son complice de toutes les causes. Quelques portes étendards, dont Mamoussé Diagne, le porte-parole unique de Iba Der en politique, Thierno Lo, Tidiane Ly, tous les membres du Groupe de Rufisque, Isma Dioum, Abdourahmane Seck dit Omer, Meïssa Bèye, Bassirou Guène, Gana Ndour, Mansour Aw, Alassane Ba, Mbaye Sy, Mbaye Sall, Malick Sy, Youssou Sow, Diégane Guèye, Sogui Tine, entre autres personnalités qui figuraient parmi ceux qui portèrent le parti.
Il importe également de nommer les valeureuses dames dont Marème Wane Ly, la première femme candidate à l’élection présidentielle sénégalaise, les fidèles comme Maty Thiaw, Fatou Ba, Adja Oumou Diallo, Rama Sow, Aida Gassama, Aïssatou Ba, Bety Ngom, Mama Mangane et toutes mes autres Ndieuké (belles sœurs) que je tiens encore en très haute estime. Le mouvement était vaste et porteur d’espoir pour beaucoup de jeunes patriotes qui voyaient, en Iba Der une personne intègre et honnête. Des personnalités comme Abou Aziz Kébé, les jeunes Papa Sadio Thiam, le premier de ses neveux à adhérer au Parti, Ibrahima Faye son ombre de toujours, Mamadou Diakhaté, Mawa Ndiaye, Doudou Koulibaly, Ndiaye Diop, Ismaila Madior Fall, Mor Thioub, Mamadou Ndione, Maimouna Ndiaye, Lémou Niang, Khady Ndiaye, Tidiane Baldé et tous les autres qui se retrouvent aujourd’hui dans d’autres partis ou non, mais souvent avec la même sincérité.
Je m’incline devant la mémoire de Falilou Fall, Moussa Bayo, Serigne Taiba Sarré, Pathé Ndiaye, Guédé Diouf, Abdoulaye Diagne, Aly Thiobane, Khady Guène, la grande artiste Mame Saye Diop, Pauline Sène, Mame Basse, toutes et tous les patriotes qui nous ont devancé. Paix à leurs âmes !
Pour ne pas conclure sur ce registre central de la vie du patriote émérite, je voudrais simplement confier aux observateurs non avertis, pour qui la trajectoire du militant Iba Der Thiam pourrait apparaître faussement versatile, que ce qu’il importe d’en retenir c’est que dans toutes ses postures, toute sa vie durant, sa seule boussole était le Sénégal. L’Afrique était sa patrie et la Ummah sa Communauté. Son engagement militant repose sur la même sincérité. Au pouvoir comme dans l’opposition, il demeurait fidèle à ses convictions et défendait ses idées avec la même la verve et les mêmes discours toujours engagés.
C’est avec la même générosité parfois débordante, les mêmes superlatifs qu’il aimait aligner, que Der parlait de ses camarades mais aussi de ses adversaires du moment. Même quand il les avait soutenus, dans des périodes où il croyait qu’ils incarnaient au mieux les intérêts du Sénégal, il n’hésitait pas à traduire son état d’âme au moment où il posait ses actes. Iba Der Thiam était toujours quitte avec sa conscience. Il ne se souciait pas des commentaires que suscitaient ses partis pris, car il était constamment certain d’avoir agi dans l’intérêt stricte du Sénégal.
Désintéressé, qu’il était de toutes formes de prébendes, de richesses matérielles et même de prestige, son intégrité était reconnue de tous. Iba Der était un combattant à la foi inébranlable, qui avançait en politique comme en religion. Toute sa vie durant, ce sont ses seules convictions, qui ont guidé, en dernière instance, toutes ses décisions.
Fall Mamadou, 2022, Discours prononcé lors de la cérémonie de lancement des « Mélanges dédiés au Professeur Iba Der Thiam », Dakar, UCAD.
Lander Edgardo (dir.), 2000, La colonialidad del saber: eurocentrismo y ciencias sociales. Perspectivas latinoamericanas, Buenos Aires CLACSO, Consejo Latinoamericano de Ciencias Sociales, p.4-23.
QUIJANO Aníbal, 2007, “COLONIALITY AND MODERNITY/RATIONALITY”, Cultural Studies, 21: 2, 168 — 178. DOI: 10.1080/09502380601164353 URL: http://dx.doi.org/10.1080/0950238060116435
Thiam Iba Der, 2009, « De la Nécessite de Faire Appel à d'autres Sagesses et Cultures pour enrichir l'histoire de la Démocratie Et des Droits Humains », Série de Conférence sur la Renaissance Africaine, UCAD, Dakar, Sénégal.
Cette partie repose essentiellement sur les différentes « biographies » de Iba Der dont le Curriculum Vitae celle qu’il avait lui-même élaboré, qui a été plusieurs fois repris en particulier la version proposée par Kalidou Diallo et celle de Mor Ndaw.
PAR Ousseynou Nar Gueye
DÉFUNT PRÉSUMÉ GAY BRÛLÉ À KAOLACK, SIGNE D'UNE PSYCHÉ COLLECTIVE MOYEN-ÂGEUSE
Ce cadavre profané et brûlé est le signe de la prévalence majoritaire dans la société sénégalaise d'une psyché essentialiste qui est persuadée que les races humaines existent, qui croient à la notion de sang impur, à l'existence de castes
"Cadavre exhumé hier et brûlé à Kaolack, car le défunt est un présumé gay" : oui, c'est de la sauvagerie, de la barbarie.
Le cadavre avait été précédemment éconduit du cimetière de Touba.
Bravo, Monsieur le Procureur de la République à Kaolack, de condamner au nom de l'intérêt général, de poursuivre et de condamner les babouins moyen-âgeux qui ont commis cette horreur sans nom à Leona Niassène, Kaolack.
Ce cadavre profané et brûlé est le signe de la prévalence majoritaire dans la société sénégalaise d'une psyché essentialiste qui est persuadée que les races humaines existent, qui croient à la notion de sang impur, à l'existence de castes, au péché consubstantiel à la personne et imprescriptible sur terre et à l'impureté de certaines personnes du seul fait de leur naissance ou de leurs origines.
Halte au discours de haine qui finit dans les actes de haine !
Ousseynou Nar Gueye est le fondateur du site d'info Tract. sn
par Texte Collectif
AFFAIRE OMAR BLONDIN DIOP, L’HEURE DE VÉRITÉ
50 ans après la mort en détention du philosophe, une cinquantaine de personnalités politiques, intellectuelles et artistiques, dont Boris Diop, Felwine Sarr, Mohamed Mbougar Sarr entre autres, exhortent à réouvrir le dossier judiciaire
50 ans après la mort en détention du philosophe Omar Blondin Diop, une cinquantaine de personnalités politiques, intellectuelles et artistiques exhortent les autorités sénégalaises à réouvrir le dossier judiciaire. Un appel renforcé par le témoignage du juge à l’époque chargé de l’enquête, une nouvelle reconstitution 3D des dernières heures du détenu ainsi que la révélation inédite d’un ancien collaborateur du président Senghor.
La tragique disparition d’Omar Blondin Diop le 11 mai 1973 à la prison de Gorée n’est toujours pas élucidée 50 ans après. Selon la version officielle, il se serait suicidé dans sa cellule.
Le 6 juin 1973, le père d’Omar, feu le Dr Ibrahima Blondin Diop, a déposé une plainte pour « coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner » et « non-assistance à personne en danger », qui s’est soldée par une ordonnance d’incompétence prise par le Tribunal Correctionnel de Dakar le 12 juin 1975.
Aujourd’hui, plusieurs éléments nouveaux viennent renforcer cette exigence de vérité et la nécessité d’une réouverture du dossier judiciaire.
D’abord, la récente apparition de feu le Juge Moustapha Touré dans le film documentaire intitulé Omar Blondin Diop, un révolté du réalisateur Djeydi Djigo, qui affirme, après reconstitution sur site, son intime conviction de l’impossibilité matérielle pour Omar de commettre un tel suicide. Une reconstitution que tout un chacun peut visualiser grâce à la modélisation 3D inédite proposée par Le Monde dans son reportage vidéo du 27 octobre 2023 intitulé « Affaire Omar Blondin Diop : enquête sur la mort suspecte du célèbre opposant sénégalais » et réalisée par la journaliste Laureline Savoye.
Ensuite, le témoignage de Jean-Pierre Biondi, ancien conseiller audiovisuel au cabinet du président Léopold Sédar Senghor, dans la série podcast du 18 septembre 2023 intitulée « Omar Blondin Diop, plutôt la mort que l’esclavage » et réalisée par les journalistes Clémentine Méténier et Florence Morice pour Radio France Internationale, qui qualifie la version officielle de la mort d’Omar de « mensonge d’État », révélant que la version circulant à la présidence parmi les proches du président Senghor était bien celle d’un homicide commis par les gardiens de la prison.
Nous, Sénégalais-e-s, Africain-e-s, citoyen-ne-s du monde épris de justice, aux côtés de la famille, des amis et des camarades d’Omar, exigeons vérité et justice pour Omar Blondin Diop.
50 ans après, nous disons toujours, à l’instar du proverbe africain : « Quelle que soit la longueur de la nuit, le soleil finit toujours par se lever ».
Ont signé :
Abdoulaye Diallo, ingénieur (Mali) ;
Adama Samassekou, ancien ministre de l’éducation nationale (Mali) ;
Aguibou Diarrah, diplomate, ancien ambassadeur (Mali) ;
Alioune Nouhoum Diallo, ancien président du Parlement de la CEDEAO, ancien président de l’Assemblée nationale (Mali) ;
Alioune Sall dit Paloma, sociologue (Sénégal) ;
Alioune Sall, député à l’Assemblée nationale (Sénégal) ;
Alioune Tine, militant des droits humains (Sénégal) ;
Alymana Bathily, sociologue des médias (Sénégal) ;
Amadou Tidiane Wone, ancien ambassadeur et ministre (Sénégal) ;
Aminata Dramane Traoré, ancienne ministre de la culture et du tourisme, essayiste (Mali) ;
Aminata Fall, juriste, présidente de l’Association des juristes sénégalaises (Sénégal) ;
La présente pétition est une initiative de la Fondation Omar Blondin Diop, établie par la famille, les camarades et les amis du philosophe révolutionnaire dans le sillage du 50ème anniversaire de sa mort, commémorée à Dakar en mai 2023. Pour toute question, veuillez contacter : info@omarblondindiop.com
Par Abdoulaye DABO
L’EQUATION DE LA DIFFUSION DE LA CAN
A trois mois du coup d’envoi tout un mystère entoure les droits télé de la Can 2024. Inhabituel. A pareille époque tout se savait sur les droits
Bés Bi le Jour |
Abdoulaye DABO |
Publication 30/10/2023
On connaît à peu près tout sur la prochaine Can. Les équipes, les sites, les arbitres les groupes et les dates. On peut même spéculer sur la folle l’ambiance qui va régner un peu partout en Côte d’Ivoire pendant ce grand rendez-vous. Mais ce n’est pas pourtant la disparition de tous les nuages dans le ciel. Une grande inconnue et pas des moindres persiste encore dans le lot. A trois mois du coup d’envoi tout un mystère entoure les droits télé de la Can 2024. Inhabituel. A pareille époque tout se savait sur les droits. Le détenteur, le coût et toutes les modalités d’acquisition. Aujourd’hui rien n’a encore filtré sur cette importante question. Ça donne l’image d’un marché qui garde ses rideaux fermés d’une opération de rétention voulue qui pourrait déboucher sur une surenchère. En lieu et place des négociations, l’inquiétude des Etats, des diffuseurs, des sponsors et par ricochet le public sportif. Traditionnellement, cette période était celle des négociations, des transactions et des accords. Mais c’est plutôt un calme plat, une omerta qui nous change des précédentes éditions.
Le seul droit dont dispose tout le monde, c’est celui de s’inquiéter
Si le foot africain a atteint une grande valeur marchande et une si grande popularité dans le monde, c’est bien grâce à sa large diffusion. Son coût onéreux pour les diffuseurs, qui a souvent été dénoncé n’a jamais entraîné un quelconque renoncement des pays à acquérir les droits. Au contraire, les coûts des droits Tv ont poussé les Africains à trouver des solutions pour développer des stratégies commerciales, rentables ou pas, pour offrir aux populations cette fête du football africain. Une situation presque inédite qui interroge plus qu’elle inquiète. La presse africaine face au défi des retransmissions télévisées de sa plus prestigieuse compétition se déroulant sur son sol. Une Afrique fragmentée au plan satellitaire, démunie au plan technique et divisée au plan commercial. Bref, mal organisée pour affronter ce marché. Un tableau peu reluisant pour s’imposer dans un marché ouvert et où règne un véritable rapport de force économique et financier. Le seul droit dont dispose tout le monde en ce moment, c’est celui de s’inquiéter. Mais pas celui de retransmettre la Can 2024. Affaire à suivre.