Un concert semblait sublime. Tout portait vers l’extase… qu’une parole du Cheikh nous ramène à notre terroir de disciples fidèles et autres adorateurs irrationnels. Joies et angoisses nous figent. Du vrai et de l’illusoire, qu’est-ce qui charme ? Suivant des postures, des arguments font plus épouvantail. Une seule certitude : orgueil démesuré et excès de confiance produisent un effondrement. Et des signes d’une décadence sont manifestes. Et parce que tout s’affaisse, le Cheikh a parlé. Il ne pouvait pas continuer à souffrir un déferlement politicien, une incapacité à vivre dans des limites d’une décence et d’une convenance non seulement démocratiques mais simplement humaines. Plus une politesse, plus une opinion qui soient respectées. Et pour une exégèse détaillée de son message, le directeur de «l’école du parti» nous a servi de sa science. Son éclairage est sans ambiguïté. Selon lui, le Cheikh est un révolutionnaire. Il a prescrit une paire de lunettes correctives à des gens qui ne savent plus lire leur pays. Depuis, j’ai rangé mon chapelet. Je ne récite plus mon mantra : «Si le grain ne meurt.»
Une situation n’est sans doute plus soutenable pour qui refuse d’envisager l’avenir sous une forme du pire. Des déclarations et des comportements prouvent, au quotidien, que le déclin n’épargne même pas des émotions. Voire des capacités de penser ? Est-ce irréversible ? Depuis que le Cheikh a parlé, une seule évidence : «Allah n’est pas obligé.» Des âmes raisonnables en tremblent. Leur stupeur ne se voit et ne s’entend pas. Des bruits, des ronflements de «dormeurs» réveillent d’autres, «aveugles porteurs de flambeaux». Inconscients des menaces de leurs torches. Montent des chants de leurs désirs, «spectacle étrange, d’hommes et de femmes qui crient le vrai sans le comprendre, et qui, souvent, vous instruisent de ce qu’ils ignorent». Seulement, le Cheikh, lui, refuse de servir d’épave. Nous enjoint-il de refuser que nos imaginaires soient bridés et violés ? Le penser ne serait pas blasphème tant des politiciens forcent des populations à leur faire dire que leur jeu leur plaît. Quoi pour nous sauver, nous guérir et nous prémunir ?
Non à une imbécillité qui ravage un pays
Sous le grand baobab totémique, combien utile, nous autres ceddo qui vénérons le Cheikh, nous nous sommes retrouvés. Une retraite comme les ancêtres nous l’avaient enseignée. Par syncrétisme, une innovation autorisée par les esprits. Sous la conduite d’un sachant, nous avons d’abord écouté et répété L’ouverture et La 108. Nous nous sommes, ensuite, plongés dans une lecture des enquêtes de l’inspecteur Kopeck. Personne ne misait sur sa sagacité. Oh, qu’il vous prenne en haleine ! Il vous dit tout du rien de leurs vies. Il ne viole aucune loi sur un quelconque document et autres données. Il révèle leur mode opératoire. Une banalité ahurissante. Ils entrent en politique comme dans un mariage de plaisir et s’embourbent précocement dans un crime passionnel. Leurs peines, leurs douleurs, leurs afflictions, leurs souffrances dont ils rêvaient de se débarrasser à travers une «cure de jouvence» font scandale. À peine jaillit une clameur, un seul moyen de défense : l’incohérence. Un preux n’est plus lui-même. Comme «il n’est pas une vérité qui ne porte avec elle son amertume», le code de conduite du politicien interdit de parler vrai. Il ne faut point déplaire ni renforcer un camp adverse. Ainsi «la raison ne sert plus à douter». D’ailleurs, aujourd’hui, «la valeur d’un énoncé ne réside pas dans sa vérité ou dans sa sincérité, mais dans les systèmes de renvois qui font jouer tel ou tel groupe contre tel ou tel autre» (Gaspard Koenig). Loin de ce manichéisme, nous avons fini notre retraite avec un vieux tube de Abdou Ndiaye : «Boroom kër gi neena déet.» Point besoin de s’initier à une mystique du B pour savoir que le Cheikh dit non à une imbécillité qui ravage un pays.
Il nous faut respirer le parfum de l’ordonnance, la critique du Cheikh. Le pays est un et divers à la fois. Sa construction suffit à occuper des ardeurs et ne pas laisser place à l’édification de murs entre des personnes nourries aux mêmes festins et qui partagent un même destin. La lutte qui vaille, après le message du Cheikh, n’est-ce-pas de vaincre des egos ? Toute l’horreur, toute la malédiction ne viennent-ils pas de là ? Le miroir est devenu aveugle que la manière de voir l’autre n’est plus le reflet direct de celle dont l’on se voit. Dans le piège de la violence, hommes et femmes cherchent refuge. Que l’Assemblée nationale, plus que des querelles de borne-fontaine, une foire d’empoigne, devienne un ludus où école de gladiateurs. Que des populations, instruites par l’expérience, élisent des gens sur qui elles ne comptent plus pour changer ou gérer leur vie. Et le Cheikh dit la nécessité de retrouver ce que nous avons perdu.
Par Madiambal DIAGNE
LE PUTSCH RAMPANT DU F24 TROUVE UNE BEQUILLE RUSSE
Le F24 est un front de l’opposition qui a été mis en place pour lutter contre l’intention, qui était prêtée à Macky Sall, de briguer un mandat supplémentaire de président de la République du Sénégal en 2024.
Le F24 est un front de l’opposition qui a été mis en place pour lutter contre l’intention, qui était prêtée à Macky Sall, de briguer un mandat supplémentaire de président de la République du Sénégal en 2024. Mais cet objectif politique est tombé à l’eau, dès l’instant que Macky Sall a fini de dire n’avoir jamais songé à cela et qu’il a même désigné son candidat pour la Présidentielle, en la personne de son Premier ministre Amadou Ba. Le cri de rassemblement du F24 n’est plus donc audible et cette organisation, perdant du souffle, cherche à explorer de nouvelles pistes pour se relancer. C’est ainsi qu’elle a organisé une marche vendredi dernier à Dakar, regroupant quelques centaines de personnes. La manifestation s’est déroulée sans heurts. Les marcheurs exigent la libération «des détenus politiques», qu’ils disent emprisonnés par le «régime dictatorial de Macky Sall». Quelle est bien douce cette dictature au Sénégal, où des opposants peuvent organiser des marches, dans de grandes artères de la ville, crier leurs slogans accablant le «dictateur», au son de chants et danses, et rentrer tranquillement chez eux à la fin de la randonnée !
Mais le plus burlesque est que certains parmi eux avaient brandi des drapeaux russes pour montrer leur inclinaison ou leur béguin pour la Russie du «grand frère» Vladimir Poutine. Eh ben, dans une «dictature», comme celle du Sénégal, on peut bien manifester ses préférences les plus loufoques ou les plus saugrenues, en toute tranquillité ou quiétude. Mais demandez à des opposants russes de manifester publiquement dans leur pays et de traiter le Président Poutine de dictateur sanguinaire ? On verra ce qu’il leur adviendrait !
Honnêtement j’avais espéré entendre quelques réactions de la part d’organisateurs de la manifestation, pour se démarquer de l’exhibition de fanions russes ; j’avais voulu encore croire que ceux qui voudraient chasser la France du sol africain, parce que ce pays est dépeint sous les traits d’un dominateur, d’un exploiteur sans vergogne, d’un impérialiste, d’un suceur du sang des Africains, n’allaient pas prôner de remplacer la France par un nouveau maître, surtout pas la Russie. Encore que nul ne saurait ignorer ce que les Russes ont laissé comme désolation, dégâts et méfaits, partout où ils sont déjà passés avec leurs sinistres mercenaires de Wagner et autres. Je refuse de croire que ces «patriotes autoproclamés», à la sincérité si touchante (il faut le leur concéder), qui veulent l’indépendance politique, économique et financière de notre cher Sénégal, ne souhaiteraient point que leur pays tombe dans la catastrophique situation de la Centrafrique, du Mali, du Burkina Faso, du Niger, de la Guinée ou de la Lybie, partout où les Russes ont pignon sur rue.
LE F24, UN REPAIRE DE PUTSCHISTES EN PUISSANCE
Le 1er juin 2023, l’ex-parti Pastef de Ousmane Sonko a publié un communiqué appelant, sans ambages, à un coup d’Etat militaire. Ce communiqué a fait suite à une série de déclarations du genre et d’appels publics, sans équivoque, à l’insurrection, à la violence et au renversement des institutions démocratiques du Sénégal. Aucun responsable politique ou une personnalité membre des organisations de la Société civile affiliées au F24 n’a daigné relever cela pour le déplorer, encore moins le dénoncer. Au contraire, ils continuent tous à hurler avec les loups. Mais le meilleur aveu qu’ils sont des putschistes en puissance et des insurgés insurrectionnels, est qu’ils demandent la libération de personnes qu’ils affublent de la dignité de «détenus politiques». Pourtant, les personnes arrêtées et emprisonnées ont relayé les appels au putsch, à l’insurrection et/ou ont posé des actes pour la réalisation de tels funestes desseins fixés par Ousmane Sonko. Dans leur entendement, c’est encore faire de la politique, en grands démocrates sans doute, que d’appeler au coup d’Etat et à l’insurrection, de jeter des cocktails Molotov dans des bus bondés de passagers et ainsi causer des morts atroces, de brûler des universités et des édifices publics, des domiciles habités et des commerces, de saccager des infrastructures vitales du pays en vue de provoquer un chaos, de menacer les juges et les journalistes et autres adversaires politiques et d’attaquer les Forces de défense et de sécurité ! Dans tout autre pays au monde que le Sénégal, les auteurs de tels faits sont considérés comme des terroristes, et traités comme tels
Mais des membres du F24 se sont montrés plus vils. N’ont-ils déjà applaudi bruyamment les putschs militaires au Mali, en Guinée, au Burkina Faso, au Niger et la tentative de renversement du Président de la Guinée-Bissau au lendemain de son élection. Parmi eux, il y en a qui ont poussé l’indécence jusqu’à dire que le Sénégal risque de connaître les mêmes situations. Et ils s’y préparent. D’autres ont eu le culot de caricaturer l’Armée sénégalaise comme des troupes «peureuses» qui sont beaucoup trop dans les rangs. Jugeons-en ! Les putschs militaires dans ces pays se sont déroulés selon un schéma immuable. La propagande anti-française et de discrédit des autorités politiques démocratiquement élues est déroulée dans un premier temps. C’est après que des drapeaux russes sont brandis à l’occasion des manifestations publiques et l’idée d’un putsch imminent est distillé de manière insidieuse, pour préparer les esprits, les acclimater à la perspective d’un coup d’Etat, jusqu’à ce qu’enfin le forfait finisse par être réalisé. Au Sénégal, le même plan est en train de se dérouler. Lors de la marche du F24 de ce vendredi 27 octobre 2023, des drapeaux russes ont flotté sur la tête de marcheurs et l’apologie du coup d’Etat a été faite publiquement et sacrilège, d’aucuns ont osé lâcher : «Vaut mieux un régime militaire que la dictature de Macky Sall !» Le décor est bien planté. Ils ne se sont pas limités à cela. Avant la marche, les réseaux sociaux ont fait circuler la fausse rumeur de la mort de Ousmane Sonko, histoire de chauffer les esprits. Et pendant cette marche du F24, la folle rumeur d’un coup d’Etat en cours au Sénégal a gagné de nombreux milieux.
Un grand économiste sénégalais, qui se trouvait dans une conférence internationale à Nairobi, désemparé, a dû interrompre ses activités pour sortir de la salle et appeler au Sénégal pour être édifié sur le putsch qu’on disait en cours. Un de ses compatriotes, très connu dans les milieux du trading des hydrocarbures, a fait circuler ce message d’alerte sur un coup d’Etat qui serait en cours au Sénégal. L’émoi suscité est énorme, mais on peut considérer que c’était fait à dessein.
Dans le même sillage, il a été produit et publié sur le web africain, et notamment sur Facebook, une dizaine d’articles s’interrogeant sur l’exception sénégalaise, un pays «à l’abri des coups d’Etat, malgré le potentiel énorme en hydrocarbures» qui pourraient se révéler une étincelle pour mettre le feu aux poudres. Des vérifications de compatriotes, très actifs sur les réseaux sociaux, montreront que tous ces articles venaient des mêmes plateformes et avec les mêmes éléments de langage. De telles attitudes auraient laissé indifférent, s’il n’y avait pas eu des précédents comme Cambridge Analytica ou toutes les interférences pour détourner les opinions publiques aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et même en Afrique.
Le même jour, des milieux du F24 ont fait traduire et faire partager le chapeau d’un article du journal britannique «The Economist» qui s’inquiète de l’exposition du régime de Macky Sall à un coup d’Etat militaire. L’objectif de faire du «bashing» contre le Sénégal est évident. Lisons ces quelques lignes de ce magazine : «Macky Sall, Président du Sénégal depuis 2012, connaît de plus près que quiconque le fléau des coups d’Etat en Afrique depuis 2020 et les efforts visant à les inverser. Deux des premiers coups d’Etat ont eu lieu au Mali, le plus grand partenaire commercial du Sénégal. Puis il y en a eu un chez un autre pays voisin, la Guinée. Une tentative ratée a suivi en Guinée-Bissau voisine. M. Sall était président de l’Union africaine lorsque les putschistes ont frappé le Burkina Faso pour la deuxième fois en 2022. Et il a joué un rôle de premier plan dans la réponse de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), le bloc régional, à chaque coup d’Etat dont un au Niger en juillet 2023. Il est donc inquiétant que lorsqu’on lui demande ce qui peut être fait pour dissuader les coups d’Etat ou ramener les pays à la démocratie, il soit découragé. «C’est difficile, je ne sais pas», dit-il. «Parfois, on s’y perd.».» Qui va croire que cette concomitance de ces faits et actes est gratuite ou simplement fortuite ? Ces opposants, qui se prêtent à ce jeu ou qui se taisent pour ne pas se démarquer de tout cela, ont-ils conscience du grand tort qu’ils font à leur pays ? Leur stratégie est de salir à tout prix et de saper la crédibilité du Sénégal. Ils doivent trouver à qui parler !
Post scriptum : La dépouille d’un présumé homosexuel profanée et brûlée dans les rues de Kaolack
Qu’est-ce qui arrive à ce pays ? La semaine dernière, des associations islamistes ont mis en place une police privée, à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, pour soumettre à une amende, des étudiantes qui portent des «bine-bine», des ceintures de perles. Demain, ils vont exiger de changer le nom de baptême de leur université !
La dépouille d’un homme n’a pu trouver une sépulture digne, ballotée entre Touba et Kaolack, où on lui refuse jusqu’à y être enterrée. Voilà que l’inhumanité a été poussée jusqu’à aller le déterrer et le brûler dans les rues de Kaolack, devant une foule joyeuse. Qui sait s’il n’y aurait pas dans la foule d’excités, des gens qui s’adonnent aux mêmes pratiques ? Les autorités de l’Etat ont fini de faire montre de leur frilosité sur des questions de ce genre. C’est peut-être trop demander aux organisations de défense des droits humains d’élever la voix pour s’indigner devant ce sordide spectacle ! J’allais oublier, ce n’est pas le cadavre d’un «détenu politique» qui a été ainsi profané !
Par Amadou Lamine SALL
PRESIDENT MACKY SALL, LE MEMORIAL DE GOREE VOUS DIT MERCI ET… SENGHOR AUSSI !
Un grand et bien triste flou entoure l’héritage du couple Senghor, pour ne pas oser dire qu’une terrifiante mafia s’est très tôt mise en œuvre pour organiser une razzia froide et cruelle.
En 2003, après deux années d’insoutenable et douloureux combat, le Président Abdoulaye Wade fait signer par le Porte-parole du Gouvernement, Souleymane Ndéné Ndiaye, un communiqué référencé « PRESIREP DAKAR AZ », abandonnant le site de la corniche ouest au projet du Mémorial de Gorée, par suite multiples et incroyables tentatives d’expropriation !
L’histoire est la suivante : dès son accession au pouvoir en 2000, le Président Wade, dithyrambique, avait béni le projet du Mémorial Gorée. Je lui avais expliqué la très forte symbolique et la grandeur historique d’un tel projet, véritable aubaine pour le Sénégal. J’avais insisté sur un projet non politique mais pensé et conçu par des intellectuels sénégalais et du monde noir, dont l’inoubliable Pathé Diagne.
Cette précision était utile, car qui connaît le Président Wade sait combien il accepte peu de ne pas être lui-même l’initiateur en toute chose. Qu’Abdou Diouf puisse être l’initiateur du projet du Mémorial Gorée, ne lui convenait point. Ce soupçon a dû tant peser, qu’après avoir béni le projet, il s’est vite renié et l’a rejeté ! En effet, quelques mois après sa déclaration d’amour au projet du Mémorial Gorée, avec surprise, la presse publiait un matin cette célèbre confidence publique du Président dont il avait malicieusement et maléfiquement le secret : « La fille est belle, mais je ne l’aime pas ». Respectueusement et avec toute l’affection que je lui portais, je lui avais alors répondu : « Quand une femme est belle, elle n’est jamais longtemps abandonnée. Elle a toutes les chances d’attirer de solides prétendants !»
Le site actuel du projet du Mémorial sur la corniche ouest a été acquis sous Abdou Diouf, quand pour les besoins d’un sommet de l’OCI, le « King Fahd Palace » fut construit sur le site dédié au projet du Mémorial Gorée, sur la pointe la plus avancée des Almadies vers l’Amérique ! Depuis, ce nouveau site sur la corniche ouest de Dakar ne cessa de faire l’objet de féroces convoitises. Nous connaissons tous ceux qui ont tenté de l’arracher, sans la manière, au projet du Mémorial Gorée. Ces personnages et puissants prétendants sont inoubliables. Ce ne fut jamais beau encore moins élégant de leur part de tirer une balle en pleine tête au projet du Mémorial Gorée reconnu par toute la communauté internationale. Mais Dieu s’y opposa toujours en enrayant tous les pistolets, à ce jour. Le Président Wade révéla alors son projet caché : le monument de la renaissance africaine ! Mais, en vérité, ce projet n’était point le sien. Il avait été plutôt pensé et créé par l’immense sculpteur Ousmane Sow, aujourd’hui disparu. Ousmane avait même fini de bâtir la statue qui devait prôner au sommet des mamelles. Il s’agissait d’un vieillard marchant et tenant son petit-fils. Le Président Wade finira par lui prendre son projet pour se l’approprier, en proposant lui-même de dessiner et de configurer la statue qui devait prôner sur les mamelles. On connait la suite de l’histoire et elle n’est pas belle !
Sans ce site dédié sur la corniche ouest d’où sont parties depuis 20 ans toutes les études géologiques, environnementales, maritimes il ne pourrait plus y avoir de Mémorial de Gorée ! Ce sera hélas là ou rien ! Au prince, chantre connu du Mémorial, d’en décider !
Un site dédié de la nature de celui qui doit accueillir le Mémorial de Gorée avec une desserte en chaloupe vers Gorée, une autre décidée par le Président Sall lui-même vers l’île des Madeleines, est un site «in situ » et non point une valise de projet que l’on promène ou l’on veut pour l’y poser, l’y adapter. Près de vingt ans ont été nécessaires pour pouvoir enfin être prêt à construire le Mémorial Gorée sur son site actuel de la corniche ouest après tous les sondages, études géologiques de sol conventionnelles, sans compter l’autre tenant incontournable : l’option politique ! Aurions-nous des milliards de dollars pour construire le projet mémoire du Mémorial de Gorée, il ne se construira pas sans volonté politique.
Pour ce qui est de son financement, un réputé ancien Premier ministre de renom me faisait sourire en m’avouant que c’est la volonté politique qui a le plus manqué pour enfin construire le Mémorial Gorée et pas l’argent ! Écoutez-le : « La seule rubrique des divers et imprévus du budget de l’État du Sénégal, pourrait bâtir vingt Mémorial de Gorée ! Il ne s’agit pas d’argent mais de volonté politique affirmée et exécutée !»
Les Chinois qui sont en train d’achever sur la corniche, en biais du site du Mémorial, ce que l’on pourrait appeler la tour infernale du Sénégal, constituée de bureaux et appartements à usage commercial de luxe, ont poussé de très puissants entrepreneurs et de terrifiants hommes d’affaires, à s’activer par tous les moyens permis à des voyous de grand chemin confortés à piller l’Afrique, pour accaparer le site du projet du Mémorial sur la corniche. Le Président, notre cher Président Macky Sall doit le savoir, se boucher les oreilles, résister aux lobbies, aux pressions machiavéliques de tous genres et empêcher le Trésor public d’engranger de l’argent à flot mais nauséabond !
Averti, informé comme il se doit, nous lui faisons confiance. Macky Sall c’est du Macky Sall. On ne joue pas avec ! Il est difficile de croire que des objectifs commerciaux, quelque que soit la puissance du pays qui sponsorise, dominent et gagnent sur un projet culturel international de l’envergure mondiale du Mémorial Gorée ! Le Président Macky Sall n’est pas et ne peut pas être de ce rang !
En effet, ce qui s’était passé sous Wade et qui a fini par échouer, semble pointer le nez, puisque nous avons été informés que le Mémorial sera relancé mais… sur un autre site que celui actuel, naturel et dédié de la corniche ouest ! Avec respect, un autre site n’existe pas et ne peut pas exister hic et nunc ! Faire ce choix, c’est faire le choix de renoncer au Mémorial, tout simplement.
Nous avons entendu de nous-mêmes un puissant et redoutable groupe international dire que le port de Dakar était l’idéal pour accueillir le Mémorial une fois le port de Ndayane achevé.
Comment est-ce possible de tenir un tel langage, une telle ignominie ? En quelle année de l’an 3000 sera donc construit le Mémorial de Gorée s’il faut aller chercher un autre site où le poser ? Que dire et que faire des toutes dernières directives en Conseil des ministres en ce mois d’octobre 2023 du Président Sall pour relancer au plus vite le Mémorial Gorée ?
Oui, tout est fin prêt Monsieur le Président pour mettre en œuvre vos directives sur le site dédié de la corniche ! Oui, le Mémorial peut cohabiter avec l’horrible et incompréhensible tour commerciale des Chinois sur son site actuel ! C’est plutôt cette tour chinoise qui n’aurait jamais dû être construite en cet endroit de la ville de Dakar !
Pour le Mémorial Gorée, rien dans ses missions et ses perspectives, ne sont remises en cause par cette surprenante tour chinoise insolite et monstrueuse qui insulte la politique d’urbanisme de notre cher pays dont le plateau de Dakar est douloureusement agressé par des prédateurs qui ne respectent aucun code de l’urbanisme. Des sondages publics l’auraient confortablement démontré. Les Sénégalais les plus avertis comme les étrangers vivant parmi nous ou de passage, ont du mal à croire à l’autorisation de construire cette tour et à cet endroit ! L’histoire le retiendra !
Monsieur le Président de la République, le Mémorial Gorée reste entier et son site de la corniche répond plus que jamais à sa mission. ! Vous-même n’avez cessé de dire et de répéter ce que le Mémorial va rajouter comme splendeur sur la corniche, pour notre capitale, notre pays.
Alors que personne, Monsieur le Président, ne vous fasse croire le contraire. L’architecte du projet Ottavio Di Blasi vous y convie. Je sais combien vous l’appréciez ! Ne suivez-pas les « terroristes » qui, depuis le Président Wade, fomentent sans cœur et sans foi des coups d’État fonciers pour éliminer ce projet de Mémorial que personne, personne n’a défendu autant que vous. Oui, « il vous attendait », selon votre formule historique et si touchante !
Lancez ce projet que personne ne célébrera autant que vous l’avez célébré. C’est votre projet et il vous survivra. Vous le méritez !
Votre cher Premier ministre Amadou Ba, malgré un agenda fou, a été saisi avec respect, pour mettre en œuvre vos directives en Conseil des ministres pour la relance rapide du projet du Mémorial dont les financements ont été déjà acquis par l’entreprise pilote du projet. L’admirable et si généreux ministre de la Culture et du Patrimoine Historique, le Pr Aliou Sow, y consacre toute son énergie. Le ministre des Finances, Monsieur Moustapha Ba, se tient prêt avec la rigueur et l’efficacité qu’on lui connaît pour faire aboutir vos directives. Il a d’ailleurs peu à faire, si ce n’est nous accompagner sur le chemin des acquis
Monsieur le Président, vous ne nous décevrez pas. Vous avez déjà tellement, tellement fait pour le Mémorial de Gorée !
Je vais conclure en migrant dans un autre cœur… pour vous dire merci, merci pour Senghor. Le Sénégal, l’Afrique, le monde des Blancs et des Jaunes, les Noirs de toutes les couleurs, ont salué votre geste de grandeur et de générosité en rachetant le patrimoine de Sédar étalé sur un marché aux enchères en France. Merci au professeur, ministre Aliou Sow pour son remarquable entregent. Merci à l’Ambassadeur El Hadji Maguette Sèye. Puissiez-vous mandater un notaire ou la personne juridiquement agréée, au nom de l’État du Sénégal, pour enquêter et établir la liste des détenteurs de certificat d’hérédité du couple Senghor-Colette. Ces héritiers connus et certifiés, nous permettront de savoir et de suivre ce fil d’Ariane vers qui détient quoi et au nom de qui et qui a légalité de vendre.
Un grand flou entoure la vente, il y a peu, à un million cinq cent mille euros, près de 983 millions CFA, le tableau du grand peintre Pierre Soulages, propriété de Senghor, enlevé de la maison de Verson et vendu aux enchères. Gérard Bosio, de son nom, veilleur et très impliqué dans le suivi des biens artistiques de Senghor, en Conseil d’Administration de la Fondation Senghor, invité par le président Moustapha Niasse, est venu nous donner la version des faits qu’il détenait sur la vente du Soulage. Pour ma part, je fus choqué et sans voix après son témoignage !
Un grand et bien triste flou entoure l’héritage du couple Senghor, pour ne pas oser dire qu’une terrifiante mafia s’est très tôt mise en œuvre pour organiser une razzia froide et cruelle. La bibliothèque du Président Senghor à Verson serait, vrai ou faux, nous annonce-t-on, prochainement programmée aux enchères. Mais où se trouve-t-elle donc aujourd’hui si elle a été déjà déménagée ? Son épée et sa robe d’académicien sont introuvables. Les autorités de la mairie de Verson à qui le couple Senghor-Colette a cédé leur propriété, n’auraient-elles pas des informations à nous donner pour nous ider à y voir clair ?
L’État du Sénégal, avec vous mon cher Président, doit veiller jusqu’au bout et anticiper dès à présent sur ce qui va encore arriver, en mandatant, sans tarder, un notaire pour nous mettre face à face avec ceux qui vendent légalement ou illégalement le patrimoine du couple Senghor-Colette. Juste savoir !
Comme vous avez été MA-GNI-FIQUE, Monsieur le Président !
PAR AMADOU LAMINE SALL - POètE
par Adama Dieng
MESSAGE DE SOUTIEN À ANTÓNIO GUTERRES
EXCLUSI F SENEPLUS - L'actualité qui secoue la terre divine de la natalité devrait au contraire reconnaître en toi l'homme d'État, féru de principes, l'humaniste épris de justice, le dirigeant juste et clairvoyant
J'espère que tu es en bonne santé. L’histoire et les récits qui embrassent parfois l’humanité, à travers les conflits et les tourments, écrasant de leur poids la vie des enfants, des femmes et des hommes, laissent parfois peu de place à l’attention individuelle. Il peut même arriver que les amitiés et les loyautés soient balayées par les bourrasques des événements, laissant derrière elles des alluvions qui peuvent déprimer, décourager, voire emporter les semences si durement plantées et les promesses de paix.
C’est dans un moment comme celui-ci que je pense à toi, toi l’ami, l’homme d’État que des critiques injustes et très sévères ont voulu désarçonner ces derniers jours.
L'actualité qui secoue la terre divine de la natalité devrait au contraire reconnaître en toi l'homme d'État, féru de principes, l'humaniste épris de justice, le dirigeant juste et clairvoyant.
Je voudrais donc t’exprimer ici tout mon soutien et ma solidarité sans faille. Toutes les plaintes grossières contre ton auguste personne n’y feront rien. Ces accusations injustes ne seront que des alluvions que l’histoire oubliera. Mais l’humanité et l’histoire se souviendront que toi, António, tu es resté droit et droit, et tu sauras comment, avec ton habituelle force tranquille, affronter l’impitoyable tempête.
Amitiés,
António, dear Secretary General,
I hope that you are in good health. History and the stories that sometimes embrace humanity, through conflicts and torments, crushing with their weight the lives of children, women and men, sometimes leave little room for individual attention. It can even happen that friendships and loyalties are swept away by the gusts of events, leaving behind alluvium which can depress, discourage, or even carry away the seeds so hard planted and the promises of peace.
It is at a moment like this that I think of you, as a friend, as the statesman, whom unfair and very harsh critics have in recent days wanted to unravel.
The news that is shaking the land of divine birth should on the contrary recognize in you the principled stateman, the humanist in love with justice, the fair-minded and far-sighted leader.
I would therefore like to express my full support to you here, and my unflinching solidarity. All the foul cries against your august person will do nothing. These unjust accusations will only be alluvium, which history will forget. But humanity and history will remember that you, António, remained straight and upright, and you will know how, with your usual calm strength, to face the unforgiving storm.
Adama Dieng est président de l’Alliance Panafricaine pour la Transparence et la Primauté du droit (PATROL-AFRICA), ancien Secrétaire général adjoint des Nations unies, Conseiller spécial du Procureur de la CPI.
Par Marcel MONTEIL
SUR LES PAS DE L’HONNEUR
Mettons-nous à l’œuvre débarrassons nous de ces symboles du colonialisme qui freinent tout élan de véritable liberté. Sans précipitation, ni faiblesse, afin d’éviter les impairs des années 80
Bés Bi le Jour |
Marcel MONTEIL |
Publication 28/10/2023
Mansa Kimintang Kamara, esprits perchés sur les mégalithes assesseurs du passé de Koumpentoum, les enfants du Niani disent encore «Non». Ndougoussine, les «homards rouges» et autres compatriotes de Pinet Laprade ne laisseront comme empreintes sur cette terre du Kaabu que leur fuite...devant les troupes des Mansas, des «Maad a Sinig» et du charismatique Djignabo Badji Bassène, l’éléphant de Seulegui. Linguère Ndaté Yalla Mbodj repose en paix car ton combat ne sera vain. La célèbre exclamation du 18 mai 1859 de Faidherbe au commandant de Gorée, Émile Pinet-Laprade, reste d’actualité : «Ces gens-là, on les tue, mais on ne les déshonore pas». Boumi Sanou Moon Faye, rassure-toi, ton exploit du 13 mai 1859 à Djilass sera pérenne, à défaut d’être écrit dans les manuels d’histoire, il sera éternellement chanté par des générations futures. Aussi vrai qu’aucune ligne de notre histoire ne sera effacée, aussi vrai nous dessinerons adéquatement, dignement et admirablement notre futur. Voilà plus de soixante longues années que nous expérimentons la direction de notre nation en toute souveraineté, alors pourquoi vouloir encore supporter volontairement les stigmates de la servitude gravés sur nos rues et autres places prestigieuses ? Que devons-nous à l’usurpateur-envahisseur qu’il se nomme Faidherbe, Tolbiac, Albert Sarraut ou Berthe Maubert, Ponty, Roume, Blanchot, Félix Faure, Peytavin ou Jules Ferry…? Que devons-nous encore au général expert en échec et mat, soi-disant donneur d’indépendance et brillant metteur en scène du cynique et psychopathe système françafrique ?
La nouvelle génération, absolu natif de l’après mille neuf cent soixante, n’est plus ce nègre d’outremer redevable à ses ancêtres gaulois. Elle n’est plus disposée à mémoriser en cours de géographie le débit des cours d’eau d’Europe en hiver. Elle ne s’intéresse plus à la couleur des robes de Marie Thérèse d’Autriche, de connaître le modèle des meubles de Louis XVI. La nouvelle génération ne danse plus la valse. Elle s’est détachée des ornières de l’indigénat et n’aspire plus à ressembler au civilisateur juste pour son plaisir. Nostalgiques, aliénés et masochistes : sachez que le vent de la liberté a soufflé dans les veines de la nouvelle génération. Du sang neuf prêt à faire face et à en découdre avec tous les roitelets et leurs laquais visibles ou embusqués qui voudraient perpétuer la domination et la manipulation.
Jeune génération, actrice décisive de son propre destin, restituer à nos villes et villages leurs appellations d’antan, rebaptiser nos rues et nos écoles devient une dette dont le créancier, notre conscience, est las d’attendre. Nous avons fait tomber les emblèmes du colonisateur, achevons le travail en substituant les plaques de nos rues et places publiques qui symbolisent encore la domination. Nous ne pouvons plus garder comme parrain des rues et des villes, d’ignobles et ingrats conquérants, rois fous et esclavagistes qui caressaient le rêve de la supériorité d’un peuple sur un autre. Ces noms qui rappellent douloureusement notre servitude, notre défaite, celle de nos ancêtres malgré leur bravoure dévouée. Comment pouvons-nous encore supporter de perpétuer des noms d’hôtes irrespectueux et hautains. Malgré l’accueil chaleureux reçu, ils n’ont pas hésité à imposer le travail forcé, à rebaptiser nos villes et villages à leurs noms, à rebaptiser nos symboles, pour finir par rabaisser et travestir nos croyances, juste au nom du déni et de la paresse d’articulation.
Enfants de Makatamba et de Gana Sira Bana Biaye, de Koli Tenguella Jaaje Ba et de Alboury Ndiaye Seynabou ; sœurs et frères d’un destin commun, nos rues gorgées d’histoire et de culture longtemps étouffées après avoir retrouvé leur dignité, seront régulièrement aseptisées, elles retrouveront le lustre qu’elles n’auraient jamais dû perdre. Plus jamais de postures d’incivilité d’hommes, de femmes et d’enfants agenouillés pour les souiller. Elles arboreront et honoreront les illustres, prestigieux et bénis grands mansas, maad, Djaraf, Saltigué, linguère, serigne, prêtresses, prêtres, gardiens des fétiches, résistants, chercheurs, illustres intellectuels, savants, artistes, sportifs, combattants pour la liberté et l’indépendance, héros oubliés et inconnus. Elles porteront le symbole des jours glorieux tels que : le 23 juin, les longues journées de mai 68 etc.
Embellies, fleuries, débarrassées des épaves et de toutes les autres vermines, elles glorifieront leurs illustres parrains dont les exploits et la bravoure continueront de stimuler à jamais les générations actuelles et à venir de notre pays et de l’Afrique toute entière. Plus jamais les conducteurs anarchiques qui ne font confiance qu’à leurs maigres corrupteurs armés de billets de banque au point de devenir intouchables. Bien loin des ravages de l’incivisme, des courtiers tropicaux, des ambulants perdus par l’exode rural, des exploitants locaux d’enfants errant en haillons. Loin des auteurs de petits larcins, des brigands en puissance, des marginaux et exclus du système scolaire. Les établissements scolaires aussi porteront des noms inspirants et stimulants dont s’inspireront les apprenants afin de donner de leur mieux par leur comportement citoyen et leur aptitude à la persévérance dans toutes les circonstances de la vie.
Messieurs les maires, chers membres des respectables conseils municipaux, ouvrez des conclaves, invitez des notables, des historiens et sociologues, des enseignants, des jeunes et des femmes. Mettons-nous à l’œuvre débarrassons nous de ces symboles du colonialisme qui freinent tout élan de véritable liberté. Sans précipitation, ni faiblesse, afin d’éviter les impairs des années 80. Dans la foulée, nous avions cédé aux fantasmes de dignitaires euphoriques. Ainsi, voulant nous débarrasser du costume du colonisateur, nous avons revêtu le boubou du féodal obscurantiste. Du haut du ciel, jaillit la vérité de la terre, de la sagesse et de la science constructive. Terre qui a vu naître des enfants dignes et persévérants. Des héros ont peuplé Kama et continuent de sillonner le vieux continent, au nom d’une liberté totalement assumée. Une liberté sur fond de savoir, de savoir-faire, de savoir-vivre et de savoir être. Demain, un autre horizon est possible. Un pas de plus vers une vraie décolonisation.
Si Nkrumah, Sékou Touré, Lumumba, Cabral, Cheikh Anta Diop ont été incompris, isolés, parfois assassinés ou poussés à faire des catastrophes, c’est que les progressistes africains ont hésité à leur apporter leur soutien. Sankara n’a pas failli à la règle.
Si Nkrumah, Sékou Touré, Lumumba, Cabral, Cheikh Anta Diop ont été incompris, isolés, parfois assassinés ou poussés à faire des catastrophes, c’est que les progressistes africains ont hésité à leur apporter leur soutien. Sankara n’a pas failli à la règle.
Avec le crime crapuleux commis sur la personne de Thomas Sankara, ce n’est pas seulement notre droit à l’espérance qu’on a voulu assassiner, mais c’est aussi et peut-être surtout notre droit au rêve qu’on a voulu anéantir (comme disait Sankara) aujourd’hui, demain et pour toujours. Notre peine est immense. Et elle est à la mesure du rêve gigantesque auquel n’a cessé de nous convier cet homme tout entier fait de sincérité, de dévouement et d’intégrité. Faire du Burkina Faso, dont le poids économique et géopolitique est plutôt insignifiant, un pays respecté, fascinant et attrayant, ou comme le disait un confrère « inscrire simplement le nom de ce pays sahélien sur la carte du monde », constituent sûrement et déjà un grand mérite pour Sankara. II peut être tentant de se lancer dans une énumération des acquis de la révolution intelligente et non dogmatique qui était en cours au Burkina, mais l’heure n’est pas au pointage des acquis et revers et aux comptes d’épicier. Convaincu de la chaîne de solidarité de tous les processus révolutionnaires de par le monde, le véritable bilan de la révolution burkinabé sera, selon nous, l’œuvre d’une autre révolution au Burkina ou ailleurs. L’enjeu principal de la phase en cours, c’est la dénonciation conséquente et intransigeante de la farce tragique que les bourreaux du fameux Front Populaire déroulent sous nos yeux .
A LA RECHERCHE DE L’ESPOIR PERDU
Au plan personnel, nous avions commencé par nous méfier d’abord de Sankara et de ses camarades. Leurs discours si justes et leurs appels si généreux, en ces temps de crise sévère du marxisme et de désarroi idéologique, nous semblaient trop élaborés pour être sincères. Nous exercions alors notre droit légitime à la suspicion par rapport au marxisme-léninisme kaki, par rapport aux marchands d’illusions qui, à la faveur d’un coup d’État, s’érigeaient en messies sauveurs des peuples d’Afrique, traumatisés par la longue nuit coloniale et néocoloniale. Le sort du marxisme en Chine, au Vietnam, au Cambodge, au Bénin et au Congo, avait fini de nous faire accepter la descente aux enfers et l’assumation pleine et entière de la crise des perspectives, mais jamais la renonciation à l’idéal révolutionnaire de progrès et de justice. Ainsi donc méfiance et retenue étaient notre ligne de conduite. Mais seule la vérité étant révolutionnaire et seule la pratique étant critère de vérité, notre résistance a fini par s’étioler laissant progressivement la place à l’enthousiasme et à l’intime conviction que Sankara et son équipe avaient une qualité majeure, la sincérité. C’est ainsi que nous avons pu dire à un ami qui, lui, préférait rester sur ses positions, que le drame des révolutionnaires et progressistes africains consiste à préétablir le schéma du modèle révolutionnaire idéal et à vouloir y conformer toute expérience en cours. Et que, pour parler radicalement, l’impérialisme c’est nous : car si NKrumah, Lumumba, Cabral et même Sékou Touré et Cheikh Anta Diop ont été incompris, isolés, parfois froidement assassinés ou poussés à commettre des catastrophes, le soutien hésitant et trop exigeant des progressistes africains y était pour quelque chose. Ce jeune, en l’occurrence Thomas Sankara, qui est la somme de nous tous, avec nos discours enflammés, généreux, parfois naïfs, et qui a un « plus » décisif (les rênes du pouvoir), essaye de faire bouger des choses; et au lieu de l’épauler sans toutefois renoncer à notre devoir de critiques, nous préférons passer notre temps – en gardiens du temple auto-désignés – à lui exiger des comptes et des explications.
Face à la réalité dramatique du pouvoir, les critiques de salon sont d’un confort incomparable ! Or donc, Sankara nous a convaincu. La touche personnelle et la séduction du romantique et de l’homme intègre ont fait le reste: c’est-à-dire que par-delà son idéal, on s’est mis à aimer l’homme. Car le style Sankara est une gifle pour tous ces présidents-chefs de villages : tyranneaux à la main gantée, pères de nations misérables, hommes providentiels envoyés par le ciel, dirigeants à vie, ivres de pouvoir et d’autorité, petits sergents devenus maréchaux, infaillibles, rustres, peu raffinés, collectionneurs infatigables de voitures de luxe et de maîtresses, meilleurs clients des fameuses banques suisses, et dont la bonne santé physique et matérielle est inversement proportionnelle à la misère morale et matérielle de leur peuple famélique au nom de qui pourtant, ils vont partout faire la manche, une larme hypocrite au coin d’un œil, l’autre lorgnant le montant du chèque que le bienfaiteur du moment est en train de remplir avec délectation. C’est de cette Afrique-là que Sankara ne voulait plus. Et avant de mettre un peuple démobilisé au travail, il avait compris qu’il était d’abord essentiel de lui rendre sa dignité prostituée. Et la patrie des hommes intègres nous a convaincu que cela était possible. Sankara était un style. Un moralisateur d’une fonction qui nous pose problème tant le glissement vers la tyrannie de nos « présidents » parachutés ou imposés ou élus à 99,99 % nous a semblé une malédiction cruelle.
ET L’ANGE GARDIEN DEVINT L’ANGE DE LA MORT
Sur un autre registre, Che Guevara l’impérissable s’était réincarné en Sankara. Le droit au rêve, à la tendresse, au romantisme, à la révolution humaniste par l’homme et pour l’homme, était reconquis. Dommage que l’homme le plus proche physiquement de Sankara ait compris le contraire de ce que toute l’Afrique progressiste avait compris. Et le « beau Blaise », l’ombre fidèle, le petit frère « protecteur » l’ange gardien, est devenu « l’affreux Blaise », l’ange de la mort. Kaboré, « la grande gueule », comme dit Blaise qui renoue ainsi avec la grossièreté, a bien résumé le coup de folie de l’ancien n° 2 devenu n° 1 : trahison, assassinat, mensonge.
LA TRAHISON
Aux yeux de l’opinion mondiale, et jusqu’à preuve du contraire, c’est Blaise, l’ami fidèle, qui a organisé par un processus conscient et «imparable» la destitution-liquidation de Sankara. Ce dernier, se défend-il, voulait nous assassiner. Soit. Mais des preuves Blaise, des preuves ! La réponse de Blaise est alors tombée ahurissante et lamentable (in JA n° 1400) : « Nous sommes en train de rassembler des éléments de preuves ». Ah bon ! Nous qui croyons naïvement que les preuves étaient à portée de main, préalablement rassemblées, vérifiées et solidement établies avant l’exécution du camarade président « traitre à la révolution et à ses amis » !
L’ASSASSINAT
Sur cette question, les incohérences de Blaise Compaoré font mal et poussent au dégoût. Mais, ce qui est encore plus irritant ce sont les gesticulations de ces avocats du diable qui, à travers la presse parlée ou écrite, au Sénégal et ailleurs, essayent avec indécence et arguments aventuristes, de nous convaincre que Blaise ne voulait pas la mort de son « ami ». Les faits sont pourtant constants. Qui mieux que Blaise savait que Sankara resterait fidèle au slogan « la patrie ou la mort » ? Blaise pensait-il que Sankara qui, là encore jusqu’à preuve du contraire, ne se reprochant rien de fondamental, accepterait de suivre tranquillement les mains dans les poches, les gardechiourmes de Blaise, pour être arrêté, humilié, insulté. Ceux qui n’ont pas hésité à couvrir son cadavre encore chaud d’un linceul d’injures n’auraient sans doute pas hésité à ce faire, une fois le « PF » mis aux arrêts et chargé de toutes les bassesses. Le courage a-t-il manqué à Blaise pour venir lui-même neutraliser sans effusion de sang son « ami » qui s’était juré de ne jamais rien faire contre lui et qui a tragiquement tenu parole ? Et ce, en dépit des mises en garde répétées de ses proches, y compris son épouse. Qui donc, sans l’avis et l’aval des grands chefs militaires du Faso, a tendu un guet-apens à Sankara pour le neutraliser mort ou vif, de préférence plutôt mort que vif?
La réaction du peuple Burkinabé traumatisé, les marches vers la tombe de Sankara, en dépit du déploiement des forces dans la rue, n’est-ce pas une preuve que Sankara vivant et en prison, serait vite libéré par tous ceux qui ne connaissent ni ne partagent les vues du fameux Front Populaire. Et ces soldats qui n’ont pu retenir leurs larmes, et ces officiers en désarroi, seraient-ils tous restés impuissants si Sankara le charismatique était encore en vie après le coup de force de Blaise ?
Quant à la rubrique des mensonges, on n’a que l’embarras du choix. Blaise, «l’homme accablé», qui «vit des heures de peine » et dont la grippe est d’origine psycho somatique», a d’abord signé le premier communiqué qui se voulait une rupture de gauche avec Sankara «traitre à la révolution», « autocrate» qui exerçait «un pouvoir personnel» tout en favorisant la restauration du processus néocolonial». Quand le peuple appelé à manifester son enthousiasme et son soutien a pointé un regard dégouté sur le Front Populaire, et quand les «amis du Burkina» ont manifesté leur horreur, Blaise qui est «resté prostré pendant 24 heures» a opéré son virage déroutant : «Sankara est un camarade révolutionnaire qui s’est trompé. Il mérite une sépulture digne à la dimension de l’espoir qu’il a incarné un moment de sa vie». Et ce n’est pas fini, car l’indignation au Burkina et dans le monde, prenant les allures d’une lame de fond risquait d’engloutir le troublant et troublé Blaise. Qu’à cela ne tienne ! L’alibi massue sera alors «c’était lui ou nous. Sankara voulait nous liquider le même jour … Il a joué et il a perdu ... » Comment ? On n’a pas compris … ?» Non c’est vrai, c’est un accident tragique. J’ai même cru que c‘est moi qu’on attaquait ... Quand, à 18 heures, j’ai vu le corps de Thomas à terre, j’ai failli avoir une réaction très violente contre ses auteurs». Excusez le français, car Blaise est ému ou feint de l’être et d’ailleurs poursuit-il», mais quand les soldats m’ont expliqué les détails de l’affaire, j’ai été découragé et dégoûté». Donc jusqu’à 18 heures, Blaise n’avait rien décidé, n’était au courant de rien. Il ne savait même pas le pauvre qu’il lui restait quelques petites heures à passer ici-bas. Et pourtant dans l’heure qui suivait, il avait eu le temps de consulter militaires et civils, de mettre en place le Front Populaire et de signer le communiqué n° 1 du nouveau pouvoir … Et toujours sans que Blaise ne soit au courant de rien parce que cloué au lit par une méchante grippe, vers 16h déjà, la radio était sous le contrôle des putschistes et, un fidèle de Sankara, Osseini Compaoré, commandant de la gendarmerie révolutionnaire, avait déjà été neutralisé, (JA n° 1400). Qui donc a pris l’initiative de cette opération si rondement menée ? «Les soldats» répond sans sourire Blaise le magnifique. De qui se moque-t-on ? Ou Blaise est un mauvais élève de Machiavel, ou il a voulu jouer au monstre alors que ce n’était point sa nature profonde.
SURVIVRE AU MENSONGE
Si Sankara qui, à 16h, pensait à son jogging hebdomadaire, laissant sa femme aller au travail, avait déjà soigneusement planifié l’assassinat de ses meilleurs compagnons, nous disons: «quel culot, quelle sérénité pour un assassin potentiel» ! Liquider proprement un tel comploteur n’est qu’une œuvre de salubrité. Et il n’y a pas lieu de tergiverser là -dessus… Alors, le traitre, le menteur, et l’assassin c’est qui : Blaise ou Thomas ? A moins qu’un troisième larron, triste et véritable héros de cette tragédie, ne surgisse très prochainement pour lever tout le voile opaque de confusion qui torture tous les amis du Burkina. En tout état de cause, Sankara, qu’on a enterré avec autant de haine et d’indécence, est parti la tête haute, l’allure fière, et le crédit que lui confère sa sincérité reste intact. Dommage qu’avec lui soit enterrée et pour longtemps une grande partie de notre estime pour l’expérience burkinabé. Blaise Compaoré doit des comptes à la veuve Afrique et à toutes ces femmes des campagnes et des villes du continent dont les larmes furieuses ont témoigné pour «Sankara, la tendresse». Et aussi quid de la jeunesse africaine en mal d’espérance ? Blaise doit payer et il payera, car une trahison en cache souvent une autre, à moins que Sankara ne ressuscite… sous les traits d’un autre homme intègre. Pour l’instant, le Burkina redevient une province quelconque de la lutte des classes planétaires retrouvant un anonymat provisoire bien partagé de nos jours. «La patrie ou la mort, Sankara vaincra», puisqu’il a déjà survécu au mensonge et à la calomnie et qu’il repose sereinement désormais au Panthéon des Martyrs de l’Afrique martyre.
Cheikh Tidiane GADIO
Professeur de Télévision à l’École de journalisme de Dakar (Cesti) Ancien ministre des Affaires étrangères
*Publié à Dakar en décembre 1987 dans SUD MAGAZINE du Groupe SUD-COM, remis au goût du jour dans le cadre des hommages rendus à Thomas Sankara, au mois de décembre
par Assane GUÈYE
LA DEUXIÈME MORT DE SENGHOR
Être associé de si près à ce qu’il abhorrait le plus au monde n’est ni plus ni moins qu’un crime de lèse-majesté. L’argent, la cupidité, l’ostentation ou le meilleur enchérisseur n’étaient en rien ses tasses de thé.
À entendre son nom mêlé à une opération bassement mercantile, Senghor a dû se retourner dans sa tombe. Sa mémoire a été salie par la mesquinerie friande de rétro-commissions qui s’apprêtait à organiser une cérémonie de profanation, samedi dernier, à l’hôtel des ventes aux enchères de Caen dans le Calvados français. Être associé de si près à ce qu’il abhorrait le plus au monde n’est ni plus ni moins qu’un crime de lèse-majesté. L’argent, la cupidité, l’ostentation ou le meilleur enchérisseur n’étaient en rien ses tasses de thé. Quelques-uns de ses objets et certaines de ses reliques ont beau être enrobés d’or, le bâtisseur de nation n’a jamais été tenté de son vivant par la célébration d’un quelconque veau d’or. Fils d’un riche traitant qui fut un des premiers à porter redingote et nœud papillon, Senghor n’en est pas moins resté humble et désintéressé. À ce qu’on sache, il n’a jamais été déshérité pour que ses pourfendeurs de l’époque le raillent et le surnomment même «député kaki». Son austérité était une sorte de dépouillement.
L’héritage de Senghor a été dilapidé
Le classicisme rigoureux et la simplicité sont des manteaux de géants dont se parent les contemplatifs. Senghor était d’abord et avant tout un homme de culture. Le monde désincarné et froid des commissaires-priseurs n’a jamais été le sien. Senghor était un homme de qualité, cultivé et chaud de la chaleur complémentaire de toutes les races et de toutes les cultures. La responsabilité de la caricature dont il vient d’être l’objet est partagée et incombe à tous dont lui-même. L’héritage de Senghor a été dilapidé. À la minute où il a quitté le pouvoir de son propre chef, une entreprise de «désenghorisation» a été déclenchée par les socialistes et dans lequel Diouf porte une responsabilité. Tout ce que le premier président avait construit pierre par pierre a été soigneusement et cyniquement démantelé en commençant par sa méthode et sa méticulosité. Depuis des décennies donc, la rupture de transmission qui est un mal sénégalais est resté phénomène quasi ininterrompu. Cherchez l’erreur.
Senghor n’était pas démiurge
Un lourd héritage difficile à porter a été mis entre des mains peu sûres qui tremblent de fébrilité et d’infidélité. Entre des socialistes coupables de parricide et des libéraux se présentant toujours avec un petit sourire commercial, voire populiste au coin des lèvres, on est prudent à faire du pilatisme en les renvoyant dos à dos. Wade et Senghor dialoguait au-dessus du peuple, d’après l’ex-pape du Sopi qui s’en est glorifié. Leur successeur à tous a empêché l’irréparable à la suite de louables efforts mais au prix fort. Seulement voilà, l’émerveillement du temps de Senghor a été remplacé par l’énervement et le moutonnement des temps présents. À force de desséchement, tout va à vau-l’eau. Cette affaire dégradante d’enchères est en fin de compte un linge sale de famille qui démonétise ceux qui réduisent tout à l’état de marchandise. Senghor n’était pas démiurge. Il aurait pu manquer de prévoyance sur ce coup. Au fond, depuis les machinations qui ont visé un innocent qui s’appelait Dia Mamadou, tout n’est plus que coq-à-l’âne et de l’or perpétuellement transformé en plomb.
AU LOUMA DU PARRAINAGE
On ne se lasse jamais avec ce parrainage. Comme louma ! Chaque samedi, les politiques descendent sur le terrain, les marchés. De vrais bana-bana ! Les collecteurs comme des marchands ambulants.
On ne se lasse jamais avec ce parrainage. Comme louma ! Chaque samedi, les politiques descendent sur le terrain, les marchés. De vrais bana-bana ! Les collecteurs comme des marchands ambulants. Avec un wakhaalé carte d’identité 2000, 5000… D’autres comme waa promo qui tapent aux portes des domiciles.
À l’Assemblée, les partis majoritaires ont verrouillé les portes. Difficile de se payer un député, un maire ou un président de Conseil départemental. C’est du «bali-bali».
Par Abdoul Aly KANE
SENEGAL, DE LA REGRESSION AU RAIDISSEMENT
Jadis réputée pour sa jovialité, son sens de l’accueil, sa « téranga », le Sénégal est en train de se transformer sous nos yeux en un lieu de désespérance. La tristesse et l’angoisse du lendemain sont perceptibles partout, surtout chez les jeunes
Jadis réputée pour sa jovialité, son sens de l’accueil, sa « téranga », le Sénégal est en train de se transformer sous nos yeux en un lieu de désespérance. La tristesse et l’angoisse du lendemain sont perceptibles partout, surtout chez les jeunes, force vive de la nation. Les élections présidentielles, naguère perçues comme l’occasion de choisir ceux qui vont nous gouverner pendant les cinq ou sept prochaines années, se présentent sous la forme d’une « sélection » de ceux qui pourront y participer, et des non-partants, du seul fait du « Prince ».
Pour l’instant, les candidats à la candidature non encore frappés d’inéligibilité pour insuffisance de parrains ne s’expriment pas trop sur la façon dont ils vont gouverner le pays, une fois élus. Comme programme économique, ils ne proposent que quelques slogans et ce qu’ils croient être leurs atouts ou coefficients personnels.
A l’approche de la date fatidique de l’élection présidentielle, les inquiétudes se manifestent et le pessimisme quant à l’avenir est le sentiment le plus partagé au sein de la population. Les couches défavorisées subissent de plein fouet la hausse des prix des produits alimentaires et de l’énergie. Les familles peu aisées qui s’en sortent sont celles bénéficiant de transferts monétaires d’émigrés.
Cela explique que, quel qu’en soient les risques, l’émigration soit considérée comme la meilleure solution selon les jeunes et leurs parents.
La classe moyenne constituée d’actifs et de retraités, à force de subir des coupes sévères sur son pouvoir d’achat du fait des effets conjugués de l’inflation et de la non indexation des revenus, subit la crise tout en s’interrogeant avec inquiétude sur l’avenir.
L’Etat lui-même donne des signes d’essoufflement en matière de trésorerie. N’ayant plus comme ressources financières tangibles que l’endettement auprès des bailleurs de fonds institutionnels à des taux d’intérêt concessionnels, l’Etat est bien obligé de s’éloigner des marchés obligataires dont l’effet est d’alourdir davantage une dette dont les conditions deviennent de plus en plus insoutenables (taux d’intérêt moyen de 10% pour une maturité courte).
L’endettement privé extérieur butte en effet sur la notation du pays en termes de risque et de capacité de remboursement par les agences de notation. L’endettement privé intérieur devient intenable pour les entreprises du secteur privé local.
Elles sont créancières de l’Etat pour les subventions à elles accordées et non encore payées; et de ce fait, elles doivent elles-mêmes « nourrir » ces créances dues par l’Etat sur leur trésorerie propre. L’actuelle crise de liquidités est imputable à l’Etat. La gestion budgétaire publique est loin d’être optimale. Un budget de dépenses, absorbé pour une large part par la masse salariale et le paiement de la dette, ne saurait générer une croissance endogène substantielle génératrice de revenus. Les PPP (partenariats public-privé) ont fini de démontrer que l’essentiel des revenus des sociétés de patrimoine servent à rembourser les emprunts ayant servi à ériger les infrastructures (SONES, TER entre autres). Parmi les solutions, la restructuration du budget de la nation est indispensable. Il faut agir sur les postes de dépenses les plus lourds et on n’a pas besoin du FMI pour le faire. À sa décharge, le FMI est juste une banque qui ne sollicite personne à priori. Comme un pompier, on l’appelle lorsqu’on n’arrive plus faire face à ses engagements financiers. Il prête des liquidités et, en retour, entend être remboursé de ses débours. Elle a un droit de regard sur la comptabilité de ses clients pour s’assurer que la capacité de remboursement est réelle. En cas de déséquilibre pouvant mettre en péril les crédits qu’elle accorde, elle pose des conditions ou conditionnalités pour bien dégager la capacité du « repayment ». Ce qu’on doit lui reprocher, c’est de financer de l’improductif et de ne pas tenir compte de l’impératif de développement économique. La masse salariale de la fonction publique doit être réduite via la digitalisation des procédures administratives, la promotion de l’enseignement à distance, mesures accompagnées de la reconversion de l’effectif excédentaire dans le tissu économique. Le train de vie de l’Etat doit être drastiquement réduit, les gaspillages éradiqués, les détournements de deniers publics sévèrement sanctionnés, la maintenance du patrimoine public effectuée à bonne date pour en préserver la qualité parmi tant d’autres réformes à faire.
Au-delà des mesures d’ajustement que nous devons opérer de notre propre chef, il reste que le développement est consubstantiel à la bonne valorisation de nos matières premières sur le marché international et à leur transformation industrielle.
En effet, la mondialisation est pleine de paradoxes pour l’Afrique qui est le continent le plus riche en ressources naturelles mais le plus endetté. Par où passe sa richesse ? Ne parlons pas de mal gouvernance car les sommes détournées par ses dirigeants corrompus sont vite reprises dès leur cessation de fonction au titre de biens mal acquis ; la liste est longue : Abacha, Bongo, Mobutu, Bokassa, Dos Santos, avec des menaces qui planent sur d’autres dirigeants en activité.
Le commerce africain constitué essentiellement de l’exportation des matières premières indispensables au développement agro-industriel mondial fait à peine 2% du commerce mondial. Cela signifierait-il que ces matières premières (or, zircon, cobalt, lithium, platine, bauxite, platine, titane, diamant, chrome, manganèse, pétrole, gaz etc.), sont acquises en monnaie de singe ?
Il ne s’agit plus d’une détérioration des termes de l’échange, ou d’un échange inégal ; c’est du vol !
Dans la structure du ratio Endettement/PIB, ce n’est pas la dette qui est lourde, c’est plutôt le PIB, somme des richesses annuelles créées, qui est faible. La dette de l’Afrique est la conséquence de la spoliation qu’elle subit dans l’exploitation de ses ressources. A ce titre, il est permis de dire que le pacte colonial est toujours en vigueur. C’est la raison pour laquelle le phénomène des « boat people » sénégalais perdure et prend chaque jour plus d’ampleur.
On nous prête ce qu’on nous ôte de la bouche et on fait mine de nous faire cadeau des remboursements ou alors de « restructurer » notre dette. Quelle farce ! On en rirait si la situation n’était pas aussi tragique !
En sa qualité de nouveau pays pétrolier et gazier, le Sénégal semble être, comme d’habitude, le champ d’expérience pour maintenir le statu quo en matière d’exploitation. Alors que le pétrole et le gaz, donc de l’énergie, dictent leur loi dans l’économie mondiale, les compagnies pétrolières comme BP annoncent un désengagement des divers champs. En contrepartie on promet au Sénégal de fortes compensations s’il consent à s’orienter vers la transition énergétique en se détournant progressivement des énergies fossiles. Faudrait-t-il accepter cela ? Pourquoi ce deux poids deux mesures ? Quelles mesures prendre pour sortir de ce diktat non imposé aux pays pétroliers et gaziers du Moyen-Orient ? Voilà un thème de campagne essentiel pour nos candidats, plus porteur pour les populations et l’économie que des discours enflammés sur des projets de révision de la Constitution.
Le monde entier observe le Sénégal !
L’exploitation efficiente du pétrole et du gaz permettrait à nos entreprises de hisser la compétitivité du «made in Sénégal » sur le marché mondial. Faute de disposer de ces ressources énergétiques, les pays de l’Union européenne affichent présentement une croissance économique inférieure à celle de la Russie. Il est urgent que le Sénégal fasse entendre sa voix. Certes le Président Macky Sall a fait état de ce diktat à l’opposé des intérêts du Sénégal, mais il faut prendre les décisions qui s’imposent. Jouer au bon élève des institutions de Bretton Woods ne mène à rien, sauf à l’impasse.
En conclusion, la situation du Sénégal est regardée de très près au plan international. Le monde nous observe par rapport à l’affaire Sonko et l’émigration massive de jeunes vers les côtes espagnoles au risque de leurs vies.
L’image renvoyée est celle d’un déficit en termes de partage des fruits de la croissance, de démocratie et de respect des droits humains.
L’échec économique du régime de Macky Sall est illustré parla politique d’emplois des jeunes. Arrivé au terme de sa magistrature et de son Programme d’insertion socioéconomique et d’emploi des jeunes ‘’Xëyu ndaw ñi’’, mis en œuvre en avril 2021 pour un montant de 450 milliards de francs CFA sur trois ans, on peut affirmer sans craindre de se tromper que le Président Macky Sall n’a plus aucune solution pour l’emploi.
De toutes façons, ce programme manquait d’envergure puisqu’il ne prévoyait que 65.000 emplois créés pour la période 2021-2023 alors que la demande moyenne annuelle est de 300 000 jeunes par an sur le marché du travail ( ref Sophie Naudeau de la Banque Mondiale).
S’agissant pour l’essentiel d’emplois non salariés, furent mises à contribution des structures de financement comme la DER et la BNDE. Fort d’une telle expérience en milieu bancaire, nous avions attiré l’attention sur les écueils déjà rencontrés dans ce type d’initiatives, en rappelant les difficultés de la Délégation à l’Insertion, à la Réinsertion et à l’Emploi (DIRE) de la fin des années 80 dans la mise en œuvre de divers programmes en faveur des « maîtrisards », des banques en difficultés comme la BIAO Sénégal en matière de déflation/réinsertion d’effectifs dans la vie économique.
Au-delà de la question du financement, nous avions identifié à l’époque les principaux écueils à franchir pour la réussite de tels programmes à savoir l’identification de profils répondant au métier d’entrepreneur (leadership, connaissance techniques et financières, désir d’entreprendre), l’identification des secteurs d’activités porteurs, la qualité des études de marchés et de faisabilité, et enfin l’accompagnement et le coaching des promoteurs sur la période de démarrage.
L’expérience du financement de l’emploi non salarié de la DER n’a pas été concluante. Elle s’est heurtée à l’absence d’un package et finalement s’est plus assimilée à du saupoudrage teinté de politique qu’à autre chose.
Face aux difficultés de tous ordres, on observe un raidissement du régime d’un Macky Sall sur le départ.
En réaction, peu de contre pouvoirs se manifestent et, lorsqu’il en existe, les actions manquent de coordination.
Des pétitions d’intellectuels sur les dérives nées de ce raidissement voient le jour mais, au vu des listes des signataires et de l’absence de démarches de mise à jour, il est permis de penser que le nombre de signataires est moins important que leurs qualités et casquettes.
L’institution judiciaire, qui est un pouvoir institutionnel, est la plus fortement mise à l’index dans le traitement des litiges, politiques en particulier. La presse, à quelques exceptions près, n’échappe pas à cette caractérisation de « souteneurs du pouvoir en place ». Les autorités religieuses ne sont pas épargnées dans ces accusations de collusion.
Refusant pour certaines de se placer en position d’intermédiation, ou alors prédisant l’issue du scrutin à venir, elles sont généralement considérées comme prenant fait et cause pour les régimes en place, qu’eux-mêmes d’ailleurs considèrent comme étant de droit divin.
Les syndicats sont moins engagés que par le passé dans l’arène politique à l’instar de leurs devanciers comme l’UGTAN, l’UNTS et même la CNTS.
La faible fréquence des renouvellements de dirigeants des organisations syndicales, consuméristes et même de la société civile, n’alimenterait-elle pas le sentiment d’un alignement de la plupart d’entre eux sur les positions du pouvoir ?
En généralisant l’observation, on pourrait parler alors de culture démocratique à tendance autocratique dans notre pays tellement les dirigeants d’institutions, d’organes, d’associations et autres rechignent à passer le témoin. Ce phénomène est d’ailleurs observable jusqu’au niveau du quartier et du village. A titre d’exemple, nous avons pu observer dans certains villages du pays que les cartes d’électeurs des populations étaient soigneusement gardées dans les malles d’un notable désireux de pérenniser son pouvoir, et ressorties le jour du vote avec des indications précises sur le choix à opérer moyennant rétribution.
La problématique du pouvoir autocratique est d’ordre sociétal. Il faudrait donc craindre que l’issue, quelle qu’elle soit, de l’élection de février 2024 ne suffise à restructurer la démocratie dans notre pays.
Aussi croyons-nous que les prochaines « Assises nationales » devraient inclure dans leur programme la remise en question de « l’homo senegalensis » actuel par rapport au pouvoir.
En définitive, dans un Sénégal pré-électoral, tous les signaux indiquent une tendance à la régression sur tous les plans.
Le niveau de violence et d’insécurité atteint durant les évènements de mars 2021 et de juin 2023 a fini de convaincre que notre société pourrait facilement atteindre un point de bascule à la moindre étincelle.
Faute de solution en interne faite de dialogue et de participation des citoyens à la gestion de la cité, le pouvoir actuel a pris l’option de se raidir pour se perpétuer.
Il revient au Président Macky Sall, en sa qualité de garant de la paix sociale, de privilégier l’apaisement en desserrant l’étau dont il connait le mécanisme mieux que quiconque.
LA CONQUÊTE DE L’ESPACE DÉMOCRATIQUE
Notre ventre qui conjugue tout au présent nous a toujours empêché de penser au futur. Aide-toi, le ciel t’aidera. Avec le premier satellite en novembre, il faudra un petit pas vers la conquête de l’espace démocratique chez nous.
Notre ventre qui conjugue tout au présent nous a toujours empêché de penser au futur. Aide-toi, le ciel t’aidera. Avec le premier satellite en novembre, il faudra un petit pas vers la conquête de l’espace démocratique chez nous. Ces partis yobaalema pullulent à la vitesse d’une fusée. Ce serait un bond de géant, comme celui de Armstrong, si on assainissait cet univers ! Ce n’est pas mauvais qu’il y ait une constellation de candidats, mais là, on se perd. Un peu de con-science.