SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
1 décembre 2024
Opinions
Par Assane Guèye
DÉMOCRATIE SANS DÉMOCRATES
Dans un monde qui bascule dans l’irrationnel, ce qu’on définit par « gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple » vire à la caricature du totalitarisme.
« La démocratie n’est pas le consensus mais l’art de gérer les différends sans conflits et de manière civilisée ». Le philosophe Jankélévitch poursuit ici un idéal de plus en plus illusoire. Dans un monde qui bascule dans l’irrationnel, ce qu’on définit par « gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple » vire à la caricature du totalitarisme. Pire encore, telle qu’elle est pratiquée dans de nombreuses contrées, cette démocratie n’est plus qu’un gadget. Les projets de braquage qui fusent de toutes parts la rapetissent sans cesse. Pour ce qui nous touche plus directement, la réputation d’exception sénégalaise n’est certes pas usurpée. Mais ce n’est pas demain la veille l’âge d’or pour notre modèle démocratique. Loin s’en faut, celui-ci traverse une fort mauvaise période qui est le résultat du manque de probité et d’hygiène morale. Il est commode de brandir des slogans et des mots-valises. Patrie avant le parti, patriotes, libéraux, socialistes et consorts ne sont plus que tromperie sur la marchandise. Ceux qui les portent n’ont pas de dilection particulière pour le pays.
Candidature à dose homéopathique
La douche froide est terrible suite à la candidature insinuée, expresse et à dose homéopathique dans un hebdomadaire français. C’est un pas dans la mauvaise direction. Loin de nous l’idée de jouer au juge des élégances. Gardons-nous donc de délivrer la moindre leçon. Le bon sens fera la suite. On ne peut être plus royaliste que le roi ni vouloir le bien d’autrui contre son propre gré. Le refus d’entrer dans la légende, le rejet du panthéon national, c’est aussi une liberté. On va seulement déplorer que le recul de la raison ait globalement pignon sur rue. Il ne restera alors plus qu’une issue. C’est de se préparer à une levée de boucliers qui va tourner en boucle. Comme en 2011, la cacophonie fera siffler les oreilles. Comme il y a dix ans, on pourrait être la risée du monde.
Des gélules pour la démocratie
Beaucoup en rient et pointent une simulation sanitaire et une maladie diplomatique. De l’autre côté, les symptômes sont tout aussi délirants. Il faut des gélules pour les soigner. L’hypocondrie est venue s’ajouter au mal de dos. À force de vouloir monopoliser la douleur, on peut finir comme un légume ou une salade fatiguée. Quant à cette histoire d’évacuation ou de tourisme sanitaire, il semble bien que ce soit une automutilation générale et un aveu d’échec cuisant. Les soins médicaux dépaysés dans les hôpitaux parisiens et marocains ont une signification toute simple. Ça veut dire que l’on vit dans un désert médical où il vaut mieux ne pas tomber malade. Ils sont de plus en plus nombreux ces compatriotes qui traînent des pathologies qu’ils ont du mal à soigner faute de moyens. Et dire que les premiers médecins africains étaient d’abord Sénégalais rend notre cas encore plus désespérant. C’est donc en auscultant nos politiciens remplis de rouerie et d’amateurisme qu’on cerne le mieux l’obscurité de l’âme humaine. Leurs calculs médiocres font des prouesses en matière de transformation de larges franges de concitoyens en gueux.
Les Sénégalais dénaturés
D’habitude si jovial et épris de paix, le Sénégalais est tenaillé par le pessimisme et la colère. Il n’est pas besoin d’aller loin pour comprendre le pourquoi on en est arrivés là. Aucune pilule du bonheur ne peut enrayer le trop-plein de stress. Qui est donc capable de placer le bonheur collectif au-dessus de tout ? Un tunnel interminable s’ouvre devant nous tous. C’est la cohue. Le panel des candidats potentiels n’est guère enthousiasmant. Il y a du tout dans les cortèges. On voit les arrogants, les bretteurs, les incompétents, les prétentieux, les inconséquents, les figurants et une flopée de saltimbanques. La panne de la démocratie nous dit que le pays est en panne de leaders charismatiques et méthodiques. L’anarchie qu’on confond avec la démocratie balaie tout sur son passage.
par El Hadji Omar Youm
MULTIPLE PHOTOS
RÉPONSE AUX DÉPUTÉS ANDRÉ CHASSAIGNE ET JEAN PAUL LECOQ
EXCLUSIF SENEPLUS - Le réflexe néocolonial est têtu. Je ne savais pas que le Conseil constitutionnel du Sénégal avait un bureau siégeant en France. Les droits d'Adji Sarr et de Mame Mbaye Niang ont-ils moins de valeur que ceux de votre protégé Sonko ?
Votre lettre du 17 mars 2023, adressée à madame Catherine Colonna, la ministre française de l'Europe et des Affaires étrangères donc au gouvernement de la République française, révèle malheureusement, encore une fois, la difficulté d’une certaine partie de la classe politique française à se départir du transcendantal colonial.
Par votre courrier susmentionné, vous étalez à la face du monde votre totale ignorance des réalités politiques du Sénégal sur un fond de mépris clivant qui fait, ce qui est inadmissible, la promotion des mouvements facétieux et factieux dont l'objectif irréfutable est de mettre à terre notre système institutionnel et démocratique.
N'eut-été le caractère escamoteur de votre message, pernicieusement fuite pour lui donner une dimension internationale, les contre-vérités y contenues, le mépris manifeste à l'égard de la crédibilité de nos institutions ainsi que la désinvolture affichée à l'égard de notre souveraineté en tant que peuple libre ayant toujours hissé, par des mécanismes internes performants, notre démocratie au rang des grandes, votre écrit captieux n'aurait suscité aucune réaction de notre part sauf à demander son classement au musée des bêtisiers de certains acteurs politiques indigne d'un héritage riche de ses brillants leaders dont le plus contemporain Georges Marchais.
Chers députés,
Avant d'en venir sur le fond de votre insipide lettre, je me dois de relever la formelle contradiction de votre démarche sarcastique par laquelle vous dénoncez la politique africaine de la France, marquée par l’ingérence dans les affaires intérieures des pays africains, tout en sollicitant l’intervention de la ministre française des Affaires étrangères afin que les questions politiques internes au Sénégal soient inscrites à l'agenda du dialogue entre le gouvernent de la France et celui du Sénégal.
Le réflexe néocolonial est têtu...
Mieux, vous dénoncez une présumée ingérence du président Macky Sall dans la politique intérieure française, relayant, de manière grossière, des rumeurs d'une générosité du président sénégalais à l'endroit de madame Marine Le Pen.
Ce que vous demandez au gouvernement français si ce n'est de l'ingérence s'appelle comment ? De l'immixtion dans les affaires relevant de la politique intérieure d'un Etat souverain.
Vous vous permettez même de sélectionner, nûment, les candidatures validées et celles qui doivent être écartées lors de l’élection présidentielle de février 2024.
Je ne savais pas que le Conseil constitutionnel du Sénégal avait un bureau siégeant en France dans un cadre infantile d'un groupe parlementaire dirigé par un enragé dont la cécité intellectuelle est mêlée au préjugé néocolonial.
Quant au fond, votre lettre est I'exemple de la légèreté, pour ne pas dire de la lâcheté avec les faits et la vérité.
C'est pourquoi, je me dois de vous préciser les points ci-après :
1. pays souverain, le Sénégal modèle de démocratie s'est doté, très tôt, d'institutions indépendantes, animées par des femmes et des hommes de qualité dont l'expertise et la rigueur sont saluées partout.
Ce n'est pas à vous, ni à qui que ce soit, même si vous êtes nés avant les indépendances des pays africains, par réflexe congénital, de dire le droit à la place de nos institutions judiciaires qui s'acquittent de leur exaltante mission au nom exclusif du peuple sénégalais souverain.
La participation aux élections est encadrée par la loi et il n'appartient à personne de la dire autres que les institutions que le Sénégal s'est librement choisies.
2. II n'y a aucun problème entre le président Macky Sall et l'opposition sénégalaise. Réformateur confirmé, le président Sall a apporté de nombreux changements pour la modernisation de la démocratie sénégalaise.
Notre pays est une démocratie majeure où personne n'est inquiétée pour ses opinions. Les libertés publiques et individuelles sont garanties sans réserve en dépit de dérives graves notées chaque jour contre les institutions.
Pourquoi, de toute I'opposition sénégalaise, il n'y a que monsieur Ousmane Sonko qui soit empêtré dans des dossiers judiciaires? La vérité est pourtant toute simple et limpide.
Monsieur Sonko a été accusé de viols répétés et de menaces de mort par une jeune fille officiant dans un salon de message que l'accusé fréquentait. Ce dossier est devant la justice. Comblen d'hommes politiques en France ont eu maille à partir avec la justice pour divers motifs ?
Messieurs les députés vous pensez, sans doute, que lorsqu'il s'agit de votre pays, votre justice qui a condamné Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, François Fillon, Jérôme Cahuzac, Bernard Tapie, Claude Guéant est une justice libre et indépendante et que pour nos pauvres pays africains, en l'occurrence le Sénégal, nous n'avons que des « machins» au service du pouvoir exécutif servant à réprimer des opposants... Je vous pardonne cet affront sur fond de préjugé néocolonial qui jette manifestement le discrédit sur notre institution judiciaire incarnée par des hommes crédibles, compétents et professionnels.
Messieurs les députés,
Devons-nous considérer la période pré-électorale comme une période d'impunité offrant une immunité absolue aux acteurs politiques notamment les candidats déclarés pour qui aucun acte ne sera suffisamment grave pour mériter d'être examiné par la Justice ou devons-nous être des militants de la justice pour tous, en considérant que nul n'est au-dessus de la loi conformément à notre pacte républicain ?
Les droits des plaignants notamment Adji Sarr pour viol et menaces de mort et Mame Mbaye Niang pour diffamation ont-ils moins de valeur que ceux de votre protégé Ousmane Sonko ? Pourquoi la liberté de diffamer prévaudrait-elle sur la dignité d'autrui ?
Pourtant vous vous gardez, soigneusement, de dénoncer les fuites en avant de votre chouchou qui verse dans le dilatoire et la provocation, défiant les institutions de la République, la justice et les forces de défense et de sécurité notamment.
Pis, monsieur Sonko a fait des appels répétés à l'insurrection, provoquant des dégâts matériels et des pertes en vies humaines à travers le parrainage assumé de manifestations violentes.
Pourquoi l'intégrité des institutions et la sécurité des Sénégalais seraient-elles moins dignes d'intérêt que la liberté de monsieur Sonko d'appeler à la violence et d'inciter à la destruction des biens publics et privés ?
En tout état de cause, I'Etat du Sénégal, garant des droits, des libertés et de la sécurité des Sénégalais et des hôtes étrangers vivant parmi nous ne saurait tolérer Iimpunité et l'outrage systématique aux institutions, oeuvre d'acteurs politiques dont la doctrine populiste est fondée sur la démagogie, I'extrémisme et l'intolérance.
3. Il est curieux que des députés, censés représenter le peuple, soumis à l'obligation de vérité mais surtout de réserve concernant les affaires intérieures d'un pays étranger se soient réduits à être de simples colporteurs de rumeurs.
Un ancien Premier ministre, reconverti en opposant politique, a porté cette grave accusation d'une somme de douze millions d'euros (¬12 millions) remis à madame Marine Le Pen par le président Sall.
Lui-même dit clairement ne pas détenir de preuve de ses fausses allégations.
Vous vous faites l'écho de cette accusation mensongère qui n'honore ni votre statut ni celui de son auteur.
En s'abstenant de faire preuve de discernement, vous vous invitez, bruyamment et tristement, dans ce tintamarre de rumeurs, de fausses informations et d'allégations biscornues qui rabaisse dans les caniveaux de la médiocrité et de la médisance gratuite.
Ce manque de rigueur manifeste informe amplement sur la difficulté de certains, voire leur refus, de rompre avec une certaine culture du tutorat.
Ce temps, pour vous qui avez « une haute idée de la France », est révolu !
Toutefois, je note que vous avez choisi votre camp, celui de l'extrémisme violent, de l'intolérance, du radicalisme qui menace notre République, sa stabilité et sa cohésion sociale.
Vous avez choisi le camp du chaos systémique qui cherche l'effondrement de notre démocratie.
Demain si le Sénégal bascule dans la tourmente vous en serez responsables par cette forme de parrainage incitatif à l'impunité et à la violence.
J'espère que ce qui vous reste de dignité humaine survivra...
par Charles Faye
INTOXICATION
Le Macky n’a plus les lumières de feu Ousmane Tanor Dieng, qui fut pour lui, ce que Dansokho a été pour Wade. Nous voilà orphelins d’eux. Que Ramadan et Carême nous ramènent à la raison.
Décapitation. Dégagisme. Tel l’endroit et l’envers d’un pétrodollar from Sénégal, monnayé dans un artifice d’African business, fluctuant sur les propos d’un discours contextuel, ponctué par la bénédiction constitutionnelle, elle-même validée par le OUI référendaire populaire, le 20 mars 2016.
Comme dirait l’autre, il n’y a pas de truands, mais que des naïfs.
Comme toujours, le candide tombe dans le panneau, roulé dans la farine, manquant tel un neveu de rameau de Diderot, d’analyser les âmes, les prédications morales, le discours politique, les extases sensorielles, intègrant émois, libertinages, coquetteries et bien sûr les non-dits. Tels ces intérêts, enfouis dans l’omission des ambitions coupables.
On ne refait pas le monde. On découvre ou redécouvre le connu. Un air de déjà vu, que seul l’inconnu noie dans le cathéter de sa transmission normative.
Qui d’autre en a le pouvoir que l’incertitude ? La vie n’est pas un poker menteur, même si le full bluffe souvent, comme en politique, où la règle du jeu, se conjugue en mode combinaisons, en variables et vérités du moment.
Et que contrairement au Poker, particulièrement en Afrique, et le Sénégal ne fait pas exception, le pré-carré royal s’arrache les quintes, sur un format quinquennal renouvelable à souhait.
On ne devient pas Président en Afrique, pour redevenir ordinaire, tel le citoyen, qui a perdu par extraordinaire, le sens critique de son choix.
N’est-il pas plus question pour lui, de dégager plus, que de tracer les lignes cohérentes du changement optimal ?
A chacun, sa façon de voir et de procéder en conséquence. Sauf, qu’il est bon aussi, de ne pas tomber dans les travers de la radicalisation, quand bien même, cette dernière serait théorisée par ailleurs.
L’Etat, monstre froid, est un mythe. Une intelligence, certes plus mécanique qu’émotionnelle, mais une intelligence qui garde tout de même, toujours á l’esprit, que seules les richesses transformatrices suppléent les recettes fiscales et douanières.
Encore heureux, que la douane sénégalaise n’ait pas été gangrénée, par la politisation des impôts et domaines.
C’en aurait été cuit.
Pour le moment, le pétrodollar n’est qu’une vue de l’esprit, et ce n’est pas demain, comme le dit le Macky, que nous en disposerons en pagaille, pour en dépenser à gogo, à Dubaï, Ibiza ou Dakar City.
Alors, soyons sereins, et faisons preuve de plus de lucidité, pour que les investisseurs et emprunts étrangers, ne perdent pas confiance en nos capacités, à toujours solutionner non contradictions.
Ce ne sont pas les possibilités et valeurs qui manquent. Il est vrai que le Macky n’a plus les lumières de feu Ousmane Tanor Dieng, qui fut pour lui, ce que Dansokho a été pour Wade. Nous voilà orphelins d’eux. Que Ramadan et Carême nous ramènent à la raison.
Par Amadou Lamine SALL
APAISER LE SENEGAL EN DEPLAÇANT LE ZOOM SUR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ?
J'en appelle au président de demander publiquement, sans trop tarder au Conseil Constitutionnel de statuer sur la validité ou non de sa candidature pour 2024, au regard de notre loi fondamentale et que cette réponse du Conseil s’affiche devant le peuple
Il s’agit d’arriver à apaiser notre pays tant divisé, mais plus fort et plus durable que ceux qui croient le diviser. On apprend toujours. Toujours écouter. Toujours lire. Toujours aller à la recherche de connaissances. Toujours privilégier d’aimer, de pardonner, de donner. Un ami avec qui je m’inquiétais de l’avenir de ce si beau pays, me raconte ceci que je ne connaissais pas, que je n’avais jamais entendu auparavant. Que ceux qui savent confirment ou infirment. « Le grand guide Cheikh Oumar Foutiyou Tall, me dit-il, revient de la Mecque. Il donna alors à son fils le prénom suivant : Macky Oumar. Macky veut dire le Mecquois. » Je me suis dit alors qu’il était temps d’avoir moins peur. Que notre président de la République allait nous mener vers le bien et la paix. Si Dieu lui a donné ce prénom par la volonté de ses parents, Dieu qui lui a donné le pouvoir, en passant par le peuple sénégalais, lui inspirera le bien et la paix. C’est notre prière et elle est haute et ardente !
J’ai pris connaissance, avec respect, de la signature, au 22 mars, d’un appel de plus de cent intellectuels interpelant le Président Macky Sall sur la situation de notre pays. Pour dire que nous devons tous nous lever et essayer, chacune, chacun, de contribuer à la paix. J’ai pensé, humblement, ajouter ici ma petite voix comme citoyen - être intellectuel est trop élevé pour moi- pour arriver à éteindre cette crispation nauséabonde qui habite notre cher pays. La présidentielle de 2024 est la raison de tous nos maux ! Le Sénégal semble n’être préoccupé par rien d’autre que par cette échéance ainsi que la candidature ou non du Président Macky Sall à un 3ème mandat. C’est ainsi.
L’humble petit poète que je tente d’être en appelle respectueusement au Président de la République, de demander publiquement, sans trop tarder, et devant le peuple Sénégalais comme témoin, au Conseil Constitutionnel de statuer sur la validité ou non de sa candidature pour 2024, au regard de notre loi fondamentale et que cette réponse du Conseil s’affiche devant le peuple Sénégalais.
On me dira : « Mais le Président l’a déjà demandé en 2016. Tout est clair. Pourquoi y revenir encore ? » Il faut pourtant bien y revenir. En effet, aussi étrange que cela puisse paraitre, les Sénégalais dans leur majorité ne semblent pas avoir entendu ou compris ce qui s’est passé en 2016. En relisant encore la toute récente interview du Président en cette semaine du 20 mars, l’intéressé revient sur ce 3ème mandat et explique pourtant tout. Mais le plus grand nombre des Sénégalais ne lisent pas. Il s’y ajoute que très peu de Sénégalais, même en le lisant, ne semblent pas comprendre grand-chose. Alors laissons le Conseil Constitutionnel, publiquement, mettre tous les Sénégalais devant le verdict juridique, quel qu’il soit.
La vérité est que dans l’entendement populaire, on ne retient aujourd’hui et depuis toujours que le fait que le président de la République veut briguer un 3ème mandat, alors qu’il n’y aurait pas droit. Que lui-même, par moult fois, a dit et redit qu’il ne ferait pas un 3ème mandat. Au regard de cette compréhension fortement et puissamment répandue, il importe de communiquer et de revenir sur ce qui a été acté en 2016 par le Conseil Constitutionnel. Le Conseil Constitutionnel peut y revenir pour éclairer directement les Sénégalais ou bien laisser monter au créneau le ministre de la Justice et le porte-parole du gouvernement autour d’une conférence de presse. Il s’agit d’expliquer la posture du président de la République et communiquer sur l’avis du Conseil Constitutionnel de 2016. C’est fondamental !
Voilà pourquoi, pour faire simple, dans l’urgence, il faut revenir à la case départ. J’ai pensé, après une longue réflexion, que notre cher président de la République pourrait, publiquement, saisir de nouveau, le Conseil Constitutionnel au su de tout le peuple sénégalais, afin que celui-ci statue TOUT DE SUITE sur la validité ou non de la candidature en 2024 de l’actuel Président en exercice. Cela démontrerait encore plus le sens des responsabilités, la transparence et la profonde sincérité du Président envers les institutions. Cela montrerait aux Sénégalais un Président engagé qui souhaite BIEN AVANT 2024, que tout soit clair, dans un sens ou dans un autre pour que le Sénégal s’apaise et travaille.
Cette prise de décision du Président par cette interpellation directe et immédiate du Conseil Constitutionnel, contribuerait à éclairer tous ceux qui pensent qu’il veut s’imposer au pouvoir. Cela atténuerait la très forte tension dans le pays. Il s’agit de déplacer le curseur. Le peuple sénégalais saura apprécier la considération et le respect qu’une telle démarche présidentielle mettrait à jour. Elle serait sans doute, également accueillie favorablement à l’étranger.
Il s’agit pour le président de la République, dans un temps de polémique, de ruse, de stratégie, de manipulation, de donner la parole à notre haute institution juridique, la laisser exercer librement sa mission à un moment fort tendu. Elle concentrera alors tous les regards et assumera ses responsabilités devant le peuple sénégalais. Il faut déplacer le zoom sur le premier pouvoir judiciaire, devant le peuple souverain qui a le dernier mot par les urnes ! Macky Sall sera tranquille, l’opposition tranquille, le peuple sénégalais tranquille ! Ou on attendra les urnes pour tous ou le Président saura, en ce qui le concerne, qu’il est sorti de la compétition. Le pays sera détendu pour ce qui nous reste à attendre d’ici 2024 !
En effet, si le Conseil Constitutionnel infirme la candidature du Président, il en sera pris acte. Si le Conseil valide sa candidature, le Président décidera librement d’aller ou de renoncer d’aller aux élections de 2024. S’il décide d’y aller, ce sera considéré comme son droit légitime, parce que permis et autorisé par la loi suprême. S’il y renonce, son peuple prendra acte de cette grandeur.
Par contre, tout le monde devra se conformer à cet arbitrage du Conseil Constitutionnel ! Le contraire serait risqué, dommageable et conduirait à tous les dangers. S’engouffrer dans une contestation de la décision du Conseil ne mènerait que vers le mur ! Ceux qui auraient du mal à accepter l’arbitrage du Conseil, dans un sens ou un autre, n’auront qu’à attendre le dernier et invincible verdict du peuple devant les urnes et qui tranche tout !
Celle ou celui qui succédera demain à Macky Sall ne saurait passer pour perte et profit les missions confiées par le peuple au Conseil Constitutionnel C’est cette haute juridiction qui, après le verdict du peuple devant les urnes, valide et installe le nouveau chef au palais présidentiel, au nom du peuple. Voila pourquoi elle est incontournable. On ne saurait cracher dans l’eau de source que l’on sera obligé de boire si on veut s’installer officiellement sur le trône ! Voilà pourquoi le Conseil Constitutionnel mérite toute notre attention, tout notre respect, malgré ce que chacune, chacun est libre de penser et de croire. Il nous faut forcément un arbitre ! Nous en possédons deux : le Conseil et les urnes. Si la démocratie n’est pas, quelque part, sauve, elle ne le sera plus !
Il s’agit, à la vérité, pour le Président, en demandant au Conseil Constitutionnel de siffler la récréation dans un sens ou dans un autre, de ne plus accepter d’être désigné comme quelqu’un qui décide de tout en soumettant même la justice à son bon vouloir. S’il prend cette décision de tout mettre dans le camp de la justice et de la laisser arbitrer sans tarder, tout peut être sauvé. La justice sera face au peuple ! Je peux me tromper avec cette proposition ici édictée en toute bonne foi, hors de tout camp politique. Mais j’ai la certitude qu’elle peut changer la donne, faire tomber les tensions.
J’aime mon pays et son peuple et j’ai de l’attendrissement pour mon Président. J’ai toujours pensé, à tort ou à raison, que ne pas respecter un Président issu du suffrage universel, c’est ne pas respecter le peuple qui l’a élu ! Comme tous les Présidents avant lui, de Senghor mon bien-aimé à Abdoulaye Wade, il faut rapatrier Macky Sall dans son solennel et étroit habitat : celui de l’exercice du pouvoir ! Un pouvoir a forcément des muscles, mais il faut souvent les montrer sous la chemise. La finesse n’exclut pas l’autorité !
Macky nous laissera-t-il plus de ruines que de pyramides ? Les dernières s’imposent à nous ! Quant aux ruines, elles relèveraient depuis des siècles et des siècles, de la gouvernance d’un mot d’airain : LIBERTÉ ! Cet animal, nul chasseur ne peut le tuer ! Aucun dieu, aucun président, aucune justice, aucun pouvoir contre un autre, aucune rébellion, aucune révolution, soulèvement, trouble, révolte, ne feront taire la LIBERTÉ.
J’ai un respect sacré pour l’opposition. Tous ceux qui veulent accéder au pouvoir doivent être protégés et respectés. Mais le respect des lois est également sacré. Sinon, c’est le désordre, l’impunité, la jungle. Le drame, en vérité, c’est quand on arrive à se poser la question de comment concilier le respect des lois avec la faillite des lois ! Mais, il faut toujours préférer croire à la loi, lui donner ses chances, s’y soumettre, jusqu’à ce que celle-ci montre ses limites, étale sa crasse. Si tous ensemble, nous cherchons la paix, la justice, la concorde, la victoire de la raison, nous vaincrons ensemble le mauvais sort.
Il nous faut une trêve ! Laissons tout le Sénégal être à l’écoute de sa justice quand le président de la République lui demandera de statuer et de donner directement au peuple Sénégalais son verdict. Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans cet enfer et ce méli-mélo indescriptible jusqu’en 2024 ! Que le président de la République déplace tous les pions ! Qu’il les laisse au Conseil Constitutionnel et au peuple sénégalais. Qu’il se soumette à eux !
Tout ce qui est détruit au Sénégal, la vérité, la foi, la raison, l’équité, la justice peuvent le reconstruire. Mais si la vérité, la foi, la raison, l’équité, la justice sont détruites, personne ne pourra les reconstruire !
Encore BON RAMADAN au peuple sénégalais !
Par Amadou Lamine SALL*
* Poète
* Lauréat des grands prix de l’académie française
par Aminata Touré
ADRESSE DE RAMADAN AU PRÉSIDENT MACKY SALL
Les rafles organisées de nos enfants qui sont l’avenir de ce pays nous est insoutenable. renoncez dès maintenant au tout petit chapitre que vous consacrera l’Histoire si vous persistez dans votre projet impossible de troisième mandat
en ce premier jour de Ramadan, je voudrais m’adresser à vous pour m’indigner et vous demander de mettre fin à ces arrestations tout azimut de jeunes dont le seul tort est de manifester contre votre projet de sélectionner vos propres adversaires à la prochaine élection présidentielle, élection à laquelle vous ne pouvez pas participer. Ni le droit ni la morale ne vous y autorisent.
Monsieur le président,
les rafles organisées de nos enfants qui sont l’avenir de ce pays nous est insoutenable. La place de notre jeunesse n’est pas dans les commissariats encore moins dans les geôles! Dans le communiqué du dernier Conseil des ministres, nous attendions vos mots d’apaisement du “père de la nation” en ce mois Ramadan, mois de pardon et de bienveillance pour toute la Oumma islamique. En lieu et place, vous donnez ordre sans équivoque aux forces de défense et de sécurité et certainement à la Justice de continuer à traquer sans merci tous ces jeunes qui ne font qu’exercer leur droits politiques tels que définis par la Constitution sénégalaise et le Pacte international relatif aux Droits civils et politiques signé par le Sénégal le 6 juillet 1970 et ratifié le 13 février 1978.
Monsieur le président de la République,
Alors que les Sénégalais vivent les affres de l’injustice, de l’inflation galopante avec la hausse incontrôlée des prix, le chomage chronique et subissent un stress traumatique aigüe des lendemains incertains, vous rajoutez à leurs souffrances avec votre projet impossible de 3ème mandat tel que vous l’avez avoué sur le bout des lèvres à un organe de presse étranger. Ébahis, les sénégalais y apprennent que vous aviez consulté le Conseil constitutionnel avant le référendum de 2016 et il vous aurait assuré à l’avance que vous pourriez vous présenter à l’élection présidentielle de 2024.
Ce fut alors une consultation secrète dont vous n’avez informé ni vos compagnons politiques, ni votre parti ni votre coalition.
Le plus grave, monsieur le président, c’est que vous ne l’aviez pas dit aux Sénégalais durant la campagne pour le réfendum du 20 mars 2016 et les électeurs ont voté à 62,7% votre projet de révision de la Constitution avec la certitude d’avoir définitivement régler la question du troisième mandat qui est source d’instabilité sociale dans notre sous-région.
Monsieur le président de la République,
Sur cette même question, nous voudrons vous rappeler votre dernière déclaration du 31 décembre 2018 devant toutes les télévisions du Sénégal, elle fût claire et sans ambage: vous déclariez la main sur le coeur que votre second et dernier mandat sera celui que vous accordera les électeurs senegalais en 2019. Et nous, vos collaborateurs de l’époque, avons à l’unisson fait résonance urbi et orbi de votre assurance présidentielle d’avoir cadenasser la Constitution.
Et voilà que nous, vos concitoyens qui combatîmes avec vous le troisième mandat du président Abdoulaye Wade, nous revoilà à devoir remettre le coeur à l’ouvrage pour combattre la régression démocratique que vous comptez nous imposer.
Nous, les démocrates sénégalais parmi lesquels une large majorité de jeunes, comptons avec détermination exercer nos droits constitutionnels pour que la démocratie sénégalaise continue à rayonner.
Monsieur le président de la République,
Il n’est jamais trop tard pour tenter de mieux faire. Par conséquent, prenez la parole, déclarez que vous respecterez la Constitution et que vous ne vous présenterez pas à l’élection présidentielle de 2024, libérez tous ces jeunes injustement embastillés, laissez tous les candidats à l’élection présidentielle concourir librement. En bref, renoncez dès maintenant au tout petit chapitre que vous consacrera l’Histoire si vous persistez dans votre projet impossible de troisième mandat. Envisagez dès à présent la vie en dehors de la station présentielle car monsieur le président de la République seul le pouvoir de Allah reste infini.
Par Mamadou Mbakhé NDIAYE
SE RECONCILIER AVEC LE SENEGAL ETERNEL
Troisième candidature de Macky Sall, affaire Ousmane SonkoAdji Sarr, arrestations, casses, remise en cause des soupapes de sécurité … Le pays est au bord de la rupture.
Une année préélectorale, c’est beaucoup de bruit. Des passes d’armes et des insultes sur les plateaux de télévision, des menaces tous azimuts, des divergences quasiment sur toutes les questions sociétales, des craintes sur le devenir du pays. Et le Sénégal ne fait pas exception à cette règle. Troisième candidature de Macky Sall, affaire Ousmane SonkoAdji Sarr, arrestations, casses, remise en cause des soupapes de sécurité … Le pays est au bord de la rupture. Les citoyens sont manifestement perdus dans cette tempête médiatico-politique. Le Sénégal tangue. Le Sénégal stagne. Le Sénégal s’effondre. Que faire alors ?
Il nous faut prendre du recul. Il faut se réconcilier avec le silence qui reconnecte avec l'essence. Selon le philosophe Sénèque, le silence se conquiert de haute lutte, car le bruit est dans notre nature profonde. L’homme est un animal bruyant. Si l'interaction humaine évidemment est conditionnée par la capacité de parler, elle est façonnée par la capacité de faire silence, de s'émerveiller. Le Sénégalais manque d'émerveillement. L'émerveillement d'appartenir à ce grand peuple. Au Sénégal fraternel, au Sénégal spirituel. Au Sénégal ‘’Eternel’’.
Ce Sénégal des pères fondateurs comme Thierno Souleymane Baal, Mamadou Lamine Dramé, Bourba Djolof, Cheikh Ahmadou Bamba, Sidy Hadji Malick Sy, Cheikh Ibrahima Niasse, Cheikh Anta Diop, Léopold Sédar Senghor ou encore du très consensuel griot Mansour Mbaye. Ce Sénégal des chrétiens discrets et aimables. Celui des hommes et femmes humbles, mais dignes. Ce Sénégal des héros du quotidien qui ont vaincu la misère par l’hospitalité.
Par leurs dents immaculées et leur sourire désarmant. Ce Sénégal qui a su traverser les clivages ethniques et religieux pour bâtir une nation où le dialogue résiste au conflit, l'humanité au communautarisme, la médiation à l'adversité, le consensus à la division. Ce Sénégal où le cousinage à plaisanterie arrondit les angles et ‘’huile’’ les relations humaines. Ce Sénégal où un sérère peut prendre une épouse au Fouta, en Casamance ou dans le Boundou. Ce Sénégal de sang-mêlé. Sans aucun doute, ce pays est particulier. Il faut le dire, le chanter, le psalmodier. Ce pays fait bon vivre. Oui, il faut refuser sinon combattre toutes les logiques anesthésiantes de pouvoir, de puissance, de prévarication et d'imposture. Le Sénégal mérite mieux.
Le Sénégal exige mieux. Il faut le dire sans langue de bois. Oui, il faut sortir de cet entre-soi qui voudrait que l’hospitalité, l’intelligence et la stabilité soient une exclusivité sénégalaise. Cette nation n’est ni invulnérable ni inviolable. Quand on regarde une tradition, pour reprendre Jean Jaurès, c’est pour chercher une flamme, pas des cendres. Mais mon intime conviction est que cette flamme est toujours incandescente, vivante et diffuse. Même si, il faut l’avouer, tout ce qui est humain ne nous est pas étranger. Il faut néanmoins avoir la reconnaissance de sentir ce que le grand soufi et pôle de son temps Seydina Cheikh appelle ‘’Souhoudoul minaati’’, c’est-à-dire l’observation scrupuleuse des bienfaits de Dieu à l'endroit de l’être humain.
Les fêlures et faiblesses ne doivent pas occulter la beauté de notre nation qui mérite tous les sacrifices. Osons le témoigner durant ce mois béni du Ramadan…. En silence.
Par Abdou FALL
BENNOO À LA CROISÉE DES CHEMINS
Coalition électorale et gouvernementale exceptionnelle dans son genre en Afrique et dans les démocraties, Bennoo Bokk Yaakar est à nos yeux un bon cas d'école en matière de gouvernance politique dont on n'a pas fini d'exploiter toutes les potentialités
Avec la perspective électorale en vue, c’est bien le temps Bennoo qui arrive pour la majorité.
Coalition électorale et gouvernementale exceptionnelle dans son genre en Afrique et dans les démocraties, Bennoo Bokk Yaakar est à nos yeux un bon cas d'école en matière de gouvernance politique dont on n'a pas fini d'exploiter toutes les potentialités.
Il convient pour s'en rendre compte de mettre en évidence trois contributions politiques qui auront été décisives à mon avis dans la configuration de l'espace politique sénégalais de la période post indépendance.
Noter en premier lieu la lucidité politique du Président Senghor qui a su décoder les mutations de son époque pour rompre à temps avec le régime de parti unique et promouvoir les réformes politiques de la démocratie multi-partisane en autorisant une opposition légale dont le Pds du Président Wade a été le complice et principal animateur.
Accepter en second lieu le génie du Président Abdoulaye Wade qui a su ruser avec le système, se proclamant "parti de contribution" au départ, le temps de négocier un statut de challenger institutionnel de la majorité, ce qui lui ouvrira 30 ans plustard la voie d'une alternance politique pacifique qui nous vaut la fierté d'une démocratie solide et respectée de par le monde.
Le mérite du Président Wade aura été d'autant plus grand qu'à cette époque l'idéologie de la gauche radicale révolutionnaire était largement dominante dans les rangs des élites politiques et intellectuelles en Afrique et dans les pays du tiers-monde.
« Qui du Wadisme ou du kabilisme ! »
Le débat s'est posé avec passion dans les années 1990 sur, « qui du Wadisme ou du kabilisme ! » était la voie pour l'émancipation politique du continent. Ceci en référence à l'option de Kabila père, de faire le choix de la lutte armée pour la conquête du pouvoir dans son pays.
Notre grande fierté aura été d'y avoir cru et d'avoir contribué aux côtés des cadres et militants du PDS à l'avènement de l'option "wadiste" de la conquête du pouvoir préservant ainsi notre jeunesse et notre peuple de la violence politique que certains travaillent aujourd’hui à installer dans notre pays.
La troisième contribution qui a été tout aussi décisive à mon avis est celle du Professeur Cheikh Anta Diop et de ses compagnons fondateurs du Rassemblement démocratique national (Rnd), des partisans tout aussi résolus du respect de la légalité constitutionnelle et de la conquête du pouvoir par des moyens pacifiques. Intéressante a été la théorie proposée de " la pratique de la double appartenance " pour mettre à l'aise les partis de gauche, très actifs dans l'intelligentsia et la jeunesse, sans qu'ils aient eu le poids des partis de masse capables de se poser électoralement en alternative face au puissant régime socialiste que le Président Senghor a méthodiquement construit sur plus d'un quart de siècle.
L'idée était d'inviter les partis de la gauche marxiste, les amis du Président Mamadou Dia et les anciens du Pra / Sénégal à se joindre aux partisans de Cheikh Anta et aux anciens membres du Pai/ Sénégal avec Maître Babacar Niang pour construire ensemble un grand parti unifié, le Rassemblement national démocratique ( Rnd ).
La latitude était laissée à ceux qui le désirent de conserver leur affiliation idéologique et leur autonomie organisationnelle tout en partageant avec les autres entités fédérées une plateforme minimale et une direction collégiale unifiée.
L'expérience n'a pas prospéré comme souhaité mais le Rnd aura joué un grand rôle dans la période de transition du multipartisme limité à quatre courants de pensées idéologiques du Président Senghor au multipartisme intégral institué par le Président Abdou Diouf à son arrivée au pouvoir en 1980. Sans peut être l'avoir théorisé comme on aimait à le faire à l'époque, cette expérience ratée du Rnd du Pr Cheikh Anta Diop en 1975 a été reproduite et réussie avec brio par le Président Macky Sall et ses amis dans la conception de leur parti, l’Alliance pour la République ( Apr ) en 2008 qui est en réalité une convergence d'acteurs politiques d'horizons divers, des libéraux aux divers courants du marxisme. Le même leadership fédérateur du Président Macky Sall donnera naissance à la coalition Bennoo Bokk Yaakaar, socle de la majorité politique au Sénégal depuis 2012.
Bennoo est la grande coalition jamais aussi réussie dans l’histoire politique de notre pays. De coalition électorale entre des sous- coalitions de candidats, des partis et mouvements, Bennoo a évolué en entente gouvernementale avec un juste partage des rôles et des responsabilités au niveau des plus hautes instances de l'état. Cette alliance conduite avec responsabilité et un sens patriotique élevé par des leaders exceptionnels nous aura donné les moyens d'une stabilité durable sans laquelle aucune politique de transformation de l'économie et de la société ne peut prospérer.
Mais comme nous avons appris en politique la règle selon laquelle " l'opposition unit, le pouvoir divise ", cette leçon de vie mérite d'être toujours rappelée et gardée à l'esprit par les hommes et femmes politiques portant la haute responsabilité de la gouvernance d'une nation. Ne nous voilons pas cependant la face, beaucoup de nos amis ont de la peine à se rendre compte que les contre-performances des dernières élections ont eu lieu sans exception sur des territoires où les leaders n'ont pu réaliser leur unité. Un Bennoo uni restera sans aucun doute, et pour longtemps, le bloc hégémonique sur lequel notre majorité trouvera appui pour la poursuite des grandes réformes engagées dans la perspective d'un Sénégal émergent dans la paix et la stabilité. Je suis de ceux qui pensent que la juste lecture de cette donnée fondamentale du contexte politique du Sénégal fait que l'opposition radicale est bien consciente qu'elle n'a aucune chance de triomphe devant un Bennoo rassemblé et devant toutes les forces républicaines mobilisées du côté de l'opposition. C'est la raison pour laquelle elle se lance dans l'option suicidaire de la rue en lieu et place des urnes. Mauvaise option à mon avis, personne ne trouvant pour autant plaisir à les voir persister dans cette voie d'impasse. Le " diambarisme " n'est jamais payant en politique. Dans la vie tout court d'ailleurs.
La politique relève du champ de la complexité. On ne peut appliquer des solutions simplistes à des problèmes complexes. Taquinant le candidat Djibo Ka la veille de l'élection Présidentielle de 1993, le Président Abdoulaye Wade lui disait : " Djibo, tu ne peux pas doubler Wade, dribbler Diouf et marquer ! " Nous restons pour notre part, convaincus que le courant anarcho-populiste qui s'agite au Sénégal n'a aucune chance de percer devant la ligne de défense des forces de tradition républicaine de notre pays. Du camp de la majorité comme de l'opposition.
La démocratie prendra largement le dessus sur désordre si toutes les forces républicaines du pays s'accordent pour dire : "Non à l'infantilisme politique, la pagaille et la rue ! " et qu'elles s'engagent avec les pouvoirs publics à la mise en route coordonnée des étapes du processus électoral qui nous conduit à la Présidentielle de 2024.
Il est de notre responsabilité collective de contribuer à la gestion sereine de cette échéance capitale dans notre parcours démocratique et notre trajectoire de développement avec nos perspectives de statut de nouveau pays pétrolier et gazier. Ce sont là les bonnes missions qui relèvent de la responsabilité de Bennoo et de toutes les forces attachées à la république et à la démocratie au Sénégal. Tout aussi important est le débat sur la candidature qui semble soulever bien des passions. C'est peut-être le moment de rappeler qu'en démocratie les partis et coalitions de partis sont maîtres exclusifs de leurs choix dans ce domaine, autant dans leurs procédures de délibérations, leurs critères de désignation de leur candidat que leur agenda de publication avec la seule et unique contrainte que leur impose le calendrier fixé par le code électoral.
Une coalition qui gouverne est soumise à des contraintes politiques spécifiques qui ne sont pas celles d'une opposition qui s'oppose, d'une société civile qui revendique la gouvernance d'un état avec des règles d'ONG, ou d'une presse libre dont une bonne partie se croit investie de droits sans devoirs, de liberté sans responsabilités.
Optimiste de nature je reste convaincu que Bennoo uni et mobilisé a encore du beau chemin à faire dans la conduite du Sénégal à l'émergence et au développement. L'élection de 2024 devra cependant être un grand moment pour mettre à jour et actualiser notre offre pragmatique afin qu'elle soit en parfaite adéquation avec les exigences d'un monde en mutations accélérées avec de fortes aspirations citoyennes à la justice, la solidarité et une gouvernance de type nouveau, délibérative et participative. Garder à l'esprit de nos jours que les demandes en matière de gouvernance sont aussi importantes pour les citoyens que les demandes sociales, aussi essentielles qu'elles soient. Autant de chantiers qui, gérés dans la sérénité, laissent intactes toutes les chances de triomphe de notre candidat le moment venu...
Par Vieux SAVANÉ
BESOINS D’EXCELLENCE
Comment contenir l’hyper-présidentialisme, l’Etat patrimonial ? Quel avenir pour la jeunesse, les femmes? A quelques encablures de la présidentielle, point de débats sur un ensemble de maux qui minent la démocratie sénégalaise
A entendre des membres du gouvernement et certains responsables de l’Alliance pour la République (Apr) sommer le chef de l’Etat de se présenter, de gré ou de force, à l’élection présidentielle de février 2024; affirmer qu’ils sont déterminés à le jeter dans l’arène, mains et poings liés, on se dit qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans ce pays. Elu au suffrage universel, clé de voûte des institutions, le chef de l’État ne saurait être un «otage» encore moins «prisonnier» de lobbyistes autoproclamés.
Au-delà de l’irrespect teinté d’arrogance, focalisés sur leurs intérêts personnels, ceux et celles qui déroulent une telle approche se démasquent en réalité, en mettant tout simplement à nu un égoïsme prébendier. Et c’est là précisément, dans ce rapport au pouvoir perçu comme le moyen le plus rapide et le plus sûr de « ne plus avoir de soucis d’argent » que gît le mal sénégalais.
Faut-il alors rappeler que de l’indépendance à nos jours, l’une des batailles épiques a été d’asseoir une démocratie digne de ce nom. Des générations successives s’y sont employées corps et âmes avec le dessein de voir la liberté d’expression, la liberté de vote, la reddition des comptes avoir droit de cité.
Toutefois, alors qu’il aura fallu 40 ans pour accoucher de la première alternance politique, force est de constater comme le montre toutes ces drôles de combines visant à chaque fois à allonger le mandat présidentiel et à mettre l’assemblée nationale au pas, que la démocratie peine encore à se poser, à s’approfondir et à s’enraciner.
La priorité donnée ainsi à la captation du pouvoir ne saurait cependant masquer les enjeux fondamentaux auxquels le Sénégal est confronté. En atteste la désespérance marquée de la jeunesse qui s’échine, en toute connaissance de cause, à vouloir partir coûte que coûte, pour s’extirper de la galère qui plombe ses attentes, quitte à disparaître dans les profondeurs océanes; à s’écrouler, exténués, assoiffés, sur le sable brûlant et hostile du désert.
Quand la détresse s’exprime ainsi, propulsée par une pulsion suicidaire, c’est qu’on n’a plus rien à attendre de la vie. Que cela continue de plus belle, 60 ans après l’indépendance, devrait assurément interpeller sur notre mode de gouvernance, d’autant plus qu’aucun secteur n’est épargné. Ni l’école devenue une fabrique à chômeurs. Ni le secteur agricole soumis à la spéculation foncière et à une production en souffrance faute de transformation et de moyens de conservation. Sans compter toutes ces inquiétudes autour de l’évacuation sanitaire qui sont l’expression d’une défiance criante vis-à-vis du système sanitaire local. C’est dire l’urgence à revenir aux fondamentaux pour se connecter aux besoins d’excellence qui travaillent la société, taraudent nombre de Sénégalais, comme en témoigne le nouvel engouement autour du football national.
Loin d’avoir surgies ex-nihilo, toutes ces victoires engrangées dernièrement ( Can 2022. Chan 2023. U20 2023) sont plutôt ancrées dans le terreau fertile de l’effort soutenu. Fruit d’un lent, minutieux et patient travail de formation, elles consacrent une vision bâtie sur l’édification d’une confiance en soi autour d’entraîneurs locaux qui ont désormais contribué à désinstaller dans la tête de nombre de Sénégalais l’appel à un « sorcier blanc » pour espérer la victoire. Il aura fallu la venue de Aliou Cissé, le soutien de la fédération, de l’Etat, une politique axée sur la formation, pour décrocher le graal, arriver enfin à des résultats probants.
Aussi convient-il maintenant de faire ruisseler tout cela sur l’ensemble des autres agrégats. Cela est d’autant plus impérieux que ces victoires, à travers l’engouement qu’elles suscitent, boostent au plan psychologique, réconcilient avec l’estime de soi et expriment avec force la soif furieuse de réussite. Aucun atavisme donc sinon que le possible se nourrit précisément d’une exemplarité qui incombe à tous et à toutes, et au premier chef aux élites qui dirigent ou qui aspirent à diriger le pays. Si prompts à se défausser sur les autres, cause de tous les malheurs, elles feraient mieux d’opérer un retour critique sur ces années d’indépendance, s’inspirer des figures majeures de notre histoire commune.
A l’image de Tierno Souleymane Baal, initiateur de la Révolution torodo, qui au 18e siècle, avait fustigé la corruption, l’impunité, l’enrichissement, le népotisme, la dévolution monarchique du pouvoir. Ainsi avait-il lancé cette invite à ses fidèles : « Détrônez tout imâm dont vous voyez la fortune s’accroître et confisquez l’ensemble de ses biens; combattez le et expulsez le s’il s’entête ».
Et d’ajouter: « Choisissez toujours un homme savant et travailleur; fondez-vous toujours sur le critère d’aptitude ». Par ces recommandations fortes, il s’inscrivait déjà en porte-à-faux avec certaines pratiques d’aujourd’hui. Celles qui s’asseoient sur la bonne gouvernance, promeuvent l’appartenance partisane pour les postes de responsabilité, encourageant ainsi l’idée selon laquelle le pouvoir est un moyen d’amasser une puissance financière aux fins d’entretenir une clientèle politique captive tout en se mettant à l’abri du besoin.
Et voilà qu’on continue de s’éloigner de ces modèles inspirants. En lieu et place on nous promet un « mortal combat » sur fond d’affaires privées et de supposés complots d’Etat qui polluent l’atmosphère politique et nous éloignent des questions substantielles. Comment contenir l’hyper-présidentialisme, l’Etat patrimonial ? Comment rendre effective l’édification d’un Etat impartial? Quel avenir pour la jeunesse, les femmes? A quelques encablures de l’élection présidentielle, point de débats sur un ensemble de maux qui minent la démocratie sénégalaise. En lieu et place le bruit et la fureur. Et c’est bien dommage car le pays mérite mieux
PAR Fatoumata Sissi Ngom
RECOMMANDATIONS D’AMOUR POUR UN SYSTÈME-SÉNÉGAL STABLE ET COMPOSÉ
EXCLUSIF SENEPLUS - J’ai très mal pour mon cher pays que j’aime tant. Les images récentes d’un Ousmane Sonko malmené comme un malfrat sont assez tristes. Quelle dégringolade. Cette violence, décriée à juste titre, est le fait de qui en réalité ?
L’image du Sénégal qui est aujourd’hui présentée aux yeux du monde est déplorable. A cause des manifestations relatives à ce qui est nommé « l’affaire Ousmane Sonko », il y a eu un mort le 20 mars à Bignona. Il y a eu aussi énormément de blessés avec tout ce que ça comporte de fatalités : blessures corporelles, yeux en sang, dents cassées, acheminement dans des hôpitaux. Quelle est la valeur d’une vie humaine anonyme ?
Les différentes déclarations pour l’exacte application de la Constitution sénégalaise sont d’une grande pertinence. Néanmoins, en ces temps turbulents, propager anthropologiquement de l’énergie d’amour et de lumière à notre pays, le Système-Sénégal, est plus que nécessaire. L’amour doit se faire pour co-créer et co-construire un Sénégal et un monde nouveau !
Je rêve d’un autre monde et j’aime ce que j’appelle et ai élaboré comme étant le “Système-Sénégal”, ou le “Sénégal-Système”, joli jeu de miroirs ! La Nation sénégalaise est un système. Un système d’hommes et de femmes, de lois, de règles de vie, de valeurs, d’infrastructures*, et le tout évoluant dans un écosystème qui a été, jusqu’ici, une vitrine de la démocratie et de la stabilité sociale en Afrique. Aujourd’hui, le système-Sénégal évolue dans un chaos : emprisonnement de journalistes, batailles fratricides, escalade de la violence. Tout chaos est annonciateur de nouveauté. Mais quel type de nouveauté ?
J’ai très mal pour mon cher pays que j’aime tant. Les images récentes d’un Ousmane Sonko malmené comme un malfrat sont assez tristes. Quelle dégringolade. Cette violence, décriée à juste titre, est le fait de qui en réalité ? Quelles sont les circonstances qui entouraient les faits ? Les policiers étaient-ils eux-mêmes sur les nerfs ? Avaient-ils bien pris leur petit-déjeuner, ce jour-là ? Ou bien est-ce le fait, comme c’est dit çà et là, d’un ordre suprême et unilatéral ? Il faut savoir raison et discernement garder. En vérité, personne, à part la poignée de concernés, n’en sait rien et tant que la justice n’aura pas rendu son verdict, tout ne sera que spéculation et projections mentales. En attendant, il y’a mieux : il y a la paix !
Faites l’amour et non la guerre
Aux jeunes, aux moins jeunes, au lieu d’aller vous déverser dans la rue, allez, faites l’amour ! Arrêtez les manifestations, n’y allez plus ! Ne sortez pas de chez vous ! Déconnectez-vous des réseaux sociaux ! Oui, faites l’amour ! Prenez du plaisir ! Sortez de cette matrice infernale qui bouffe votre énergie et vous empêche de faire les choses qui comptent : votre bonheur, votre mieux-être, le maintien de votre énergie positive et surtout de votre intégrité psychique. Si vous devez absolument hurler, hurlez un bon coup et évacuez la colère, mais bien au chaud, chez vous. Ceux pour qui vous risquez vos vies et dépensez votre énergie vont dîner dans les restaurants chics de Dakar le soir en refaisant le monde, s’envolent à Paris, à Bruxelles ou à Montréal au moindre bobo pour se refaire une santé, pendant que vous, vous payez les pots cassés dans votre vie quotidienne.
Je voudrais m’adresser aux manifestants qui obéissent aux appels à « lutter » et qui sortent colériques de chez eux afin d’aller en découdre avec les forces de l’ordre, « casser du flic », « casser du matos », et qui passent leurs journées sur Twitter et Facebook à propager de la mauvaise énergie dans les esprits, à insulter le pouvoir, l’opposition, tout le monde. Oui, les mots, écrits ou parlés, renferment de l’énergie et il faut savoir bien les utiliser. Toute insulte proférée, tout manque de respect, toute pensée haineuse, tout viol, reviendra tôt ou tard à son émetteur, sous quelque forme que ce soit, comme un boomerang. C’est une des lois du karma qui régissent l’univers.
Il est aussi intéressant d’analyser la question des manifestants de rue sous l’angle du genre. L’anthropologie de la foule montre que ce sont les hommes qui y vont, qui vont se battre, et même sur les réseaux sociaux ils portent l’archétype de la colère qui s’extériorise. Ce sont les hommes qui souvent filent droit devant, tirés par je ne sais quelle force invisible, pour porter des combats qui ne sont pas vraiment les leurs.
Il devient urgent de sortir de l’inconscience collective et de la métastase mentale qui est surtout le fait d’une masculinité inconsciente et toxique. Une masculinité qui « prend » tout en donnant l’illusion de « donner ».
Une autre forme de gouvernance moins centrale et plus humaniste est possible
La tyrannie la plus réussie, c’est de limiter la fraternité à certains individus et de déclarer d’autres comme ennemis à abattre et à éliminer.
Que chaque maire et leader politique local de tous bords politiques, au nom de la décentralisation, prenne ses responsabilités. La gouvernance locale n’est pas seulement affaire de politiques et d’infrastructures, mais aussi d’éthique. Recommandez de l’amour et du plaisir personnel aux hommes et aux femmes qui habitent dans vos villes. Une autre façon de gouverner, moins centrale, inclut aussi de toucher les coeurs et les consciences. Le Système-Sénégal, Le Sénégal-Système, jeu de miroirs, l’humain au centre !
Choisissez vos combats et pensez à vous
Au nom de quoi aller risquer sa vie ou déployer de l’énergie hargneuse et négative pour des gens qui ne vous connaissent pas ? C’est du temps perdu qui pourrait être déployé sur des activités créatives ou génératrices de revenus et de santé. La colère bloque l’abondance et crée des maladies. Rien ni personne ne vaut que vous vous mettiez en rogne. Ce sont les boules puantes mentales qui nourrissent l’atmosphère délétère au Sénégal et la colère collective qui minent le bien-être individuel, le système-individu, le Système-Sénégal. La colère et le ressentiment ont assez détruit la planète et ses hommes comme ça. Que vive un Système-Sénégal** stable et composé, le Sénégal-Système***, formidable jeu de miroirs. Que l’amour règne dans notre magnifique pays. La vérité peut éclater sans qu’il y’ait émergence de martyrs anonymes et inconscients. Alors, pour aujourd’hui, demain, et après-demain, faisons l’amour et non la guerre !
*à paraître
Fatoumata Sissi Ngom est écrivaine sénégalaise, analyste de politiques et ingénieur en mathématiques financières et en informatique.
Par Mahmoudou WANE
MAQUILLAGES EN DEMOCRATIE
Le mercure est en train de monter, s’approchant inexorablement de la ligne rouge, comme si rien ne pouvait l’arrêter.
Le mercure est en train de monter, s’approchant inexorablement de la ligne rouge, comme si rien ne pouvait l’arrêter. Les acteurs politiques semblent déterminés à s’affronter dans un combat mortel, au prix de vies innocentes transformées par le gré des ambitions en chair à canon. On va donc vers des lendemains incertains, lourds de tous les dangers. La faute à nos cécités tenaces…
Nous étions jeunes, quand Me Abdoulaye Wade, alors leader tout-puissant de l’opposition sénégalaise, mobilisait les jeunes dans la rue pour instaurer des bras de fer continus et stressants au président Abdou Diouf. Ceux qui connaissent bien Me Wade diront que le plan développé à l’époque par le ‘’Pape du Sopi’’ est celui qu’on appelle ‘’Stratégie du bord du gouffre’’, qui consiste à entrainer son adversaire jusqu’au sommet de la falaise, pour lui faire entrevoir le danger de la chute (et donc de la mort certaine).
Mais Me Abdoulaye Wade, ‘’gaindé’’ et ‘’leuk’’ en même temps, savait aussi manier les bonnes vertus de la discussion. Il laissait toujours des brèches et une ouverture pour désamorcer la ‘’bombe’’ avant qu’elle n’éclate, au prix souvent de sa crédibilité politique. C’est bien cette posture qu’il partageait avec des hommes à l’intégrité reconnue tels Maguette Thiam, Dansokho, Bathily, etc., qui a rendu possible les différents gouvernements d’union que le Sénégal a connus dans les années 80 et 90. C’est aussi cela la différence fondamentale entre le ‘’Bleu en chef’’’ de la période des braises et les nouveaux caïds de la pègre politique.
Fondamentalement, les jeunes restent rebelles. C’est tout à fait compréhensible. Et qui se rappelle bien son niveau de maturité lorsqu’il fut jeune, de la facilité avec laquelle il pouvait se faire manipuler à l’appât de lendemains meilleurs, comprendra et excusera tous les excès et ivresses des jeunes d’aujourd’hui.
De ce point de vue, rien de nouveau sous les cieux. Si nouveauté il y a, elle réside sans nul doute dans l’affaissement du niveau des politiques (comme des autres secteurs d’ailleurs de la vie nationale) au point que le seul génie déployé est de type musculaire. C’est une sorte de carence qu’on cherche à camoufler avec la poussière de la meute.
Il est bien incompréhensible, avec toute l’expérience politique acquise par notre pays, depuis plus d’un siècle, qu’on en arrive là. Et que nos hommes politiques, comme Ousmane Sonko, se prennent encore et toujours pour des demi-dieux sortis de la cuisse de Jupiter. Entendons-nous bien : il ne s’agit point de condamner avant la lettre qui que ce soit. Le leader de Pastef a tous les droits pour aspirer à toutes les ambitions permises, y compris celle d’être président de la République.
Mais, en démocratie, l’exigence de transparence est une des pièces maîtresses de cet édifice en commun qu’on appelle République. La vie privée du citoyen lambda ne devrait intéresser l’opinion publique, tant qu’elle est circonscrite dans les limites de la loi. Cela veut dire que la vie privée d’un Youssou Ndour ne nous intéresse aucunement, tant qu’il ne lève pas le petit doigt pour dire : ‘’Je veux être président de la République.’’ Car, à partir de ce moment-là, il est soumis à la loi des projecteurs. Lorsqu’on convoite la confiance populaire, qu’on veuille être le suppôt de la volonté du peuple, président, député ou maire, on n’est plus un citoyen ordinaire. On sort du lot. Un investissement plus méticuleux devrait d’ailleurs concerner la charge de président de la République, vu tous les pouvoirs dont il dispose.
Mais pour évoquer le sujet sous un angle moins tranché, il y a bien une urgence à faire un saut qualitatif dans le sens de faire évoluer notre démocratie. Nos candidats à la magistrature suprême se présentent devant les électeurs avec des jeux de masques si corsés qu’on les prendrait pour de doux agneaux. Cette règle est vraie sous nos tropiques comme ailleurs.
Mais une fois installé au trône, voilà que les masques tombent un à un, pour montrer souvent un visage bien loin de la première perception que nous en avions. Le président Macky Sall lui-même était perçu comme un ‘’doux’’ d’entre les ‘’doux’’, sans main de fer. Nous savons aujourd’hui que malgré certaines qualités réelles, il sait être redoutable et impitoyable. Les citoyens doivent savoir que les politiques ne leur disent pas tout. Et qu’ils oublient bien souvent de signaler à leurs ‘’militants bien aimés’’ qu’ils ont un tel homme d’affaires comme ami qui finance en catimini la campagne et qui est assez doux pour se faire rembourser ensuite en marchés sonnants et trébuchants, après élection de Sa Majesté.
Assurément, l’une des faiblesses de notre jeune démocratie réside là. Notre aîné et confrère Vieux Savané le relevait dans son dernier papier, dans les colonnes de ‘’Sud Quotidien’’. Les Sénégalais sont des as du ‘’dégagisme’’. Mais ils ne peaufinent pas assez leur esprit critique, lorsque l’heure du choix arrive. Disons que c’est le suivisme et le gommage systématique de toute aspérité de leur leader bien aimé qui deviennent son passe-temps favori, sa priorité absolue, son ‘’jihad’’ absolu ; en Grand-Place comme dans les réseaux sociaux.
Une des lacunes de notre démocratique. A corriger ou périr !