SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
29 novembre 2024
Opinions
par Ndiaga LOUM
AU PRÉSIDENT, À SES ADMINISTRATEURS, À SON RÉGULATEUR MÉDIATIQUE
Ce n’est pas en brimant les libertés, en vous inventant de nouveaux ennemis que vous consolideriez votre pouvoir. Cela ne ferait que « martyriser » vos adversaires et les rendre sympathiques auprès de ces milliers d’apolitiques
« Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ! » (Vérité proverbiale).
Dans les « Républiques bananières », gouverneurs, préfets et sous-préfets brillent par leur zèle à vouloir toujours faire plaisir au « Prince » au pouvoir. Sans doute, en prenant la décision d’interdire le meeting de Mbacké pour des motifs qu’il est incapable de caractériser clairement dans le droit positif tant du point de vue constitutionnel, législatif et réglementaire indiqué en la matière, ce « délégué » du pouvoir exécutif ne pense pas d’abord agir dans l’intérêt de l’État au nom duquel il décide. Il veut donner des gages de fidélité et de loyauté, pour espérer ensuite la reconnaissance pour excès de zèle au moment des prochaines promotions et affectations dans le secteur du commandement territorial. Ce genre de personnes qui essaiment dans l’administration territoriale, et les décisions qu’elles prennent pour « acheter » la reconnaissance du chef de l’État, ne lui rendent finalement pas service. Elles ne sont pas vos amies. Elles sont vos ennemies. Elles ternissent l’image de la « vitrine démocratique sénégalaise en Afrique » savamment « construite » depuis des décennies, par un marketing d’État orchestré en complicité avec le « protecteur » et le « parrain » colonial.
Ce décalage entre ce que l’on projette à l’extérieur et ce que l’on vit à l’intérieur est le fait de ce genre de personnes qui ont toujours confondu la mission de service de public avec l’obligation de plaire aux tenants du régime. Si vous êtes devenu si impopulaire, c’est que dans l’imaginaire populaire, vous n’aviez pas le droit de faire moins que vos prédécesseurs en termes de protection et de consolidation des libertés citoyennes.
Le président Wade a constitutionnalisé le droit à la marche, même s’il a été le premier à violer occasionnellement cette disposition, toujours conseillé, comme vous, actuel locataire du Palais, par ces mêmes « types » bien de chez nous, « louangeurs » professionnels et petits plumitifs de service dont les arguments simplistes se résument à vous dire : « Wade l’avait fait aussi, il interdisait des marches et les meetings ». Mais il est où Wade aujourd’hui ? Ces genres d’arguties qui empruntent au parallélisme des formes relèvent du nivèlement par le bas. De leur proximité, vous ne tirez rien, sinon qu’actes de bassesse et répugnance populaire. Ils vous alourdissent à la légère. Parmi eux, ce triste personnage habitué des faits parce qu’adepte naturel de la soumission volontaire, dirigeant de l’organe de régulation audiovisuelle (CNRA).
Comme les mots trahissent la faible personnalité malléable à souhait comme l’étaient le chef des indigènes à l’époque coloniale et le « fouettard » sous l’esclavage, voici ce qu’il disait lorsque la RTS viola les règles relatives à la couverture médiatique en période électorale en diffusant les consignes de vote d’un chef religieux en faveur du président sortant (Wade) entre les deux tours du scrutin présidentiel de 2012 : « Ce n’est pas interdit de diffuser des consignes de vote ». Ironie de l’histoire, voilà ce que lui répondait le porte-parole à l’époque de son « maître » d’aujourd’hui devant qui il courbe encore l’échine : « Il faut qu’il (Babacar Diagne) arrête ce type de pratique porteur de danger pour l’équilibre de la République et producteur de violence » (Seydou Guèye).
Enfin, et pour ne pas trop troubler la conscience de ses proches, il est à noter que l’actuel président du CNRA avait ignoré dans le passé les correspondances et plaintes du même organe (son ancêtre le HCA) qu’il dirige aujourd’hui. (Voir les détails de ce « mépris » dénoncé à l’époque dans un rapport commis par le même régulateur, dans notre ouvrage : Ndiaga Loum et Ibrahima Sarr : Les médias en Afrique depuis les indépendances. Bilan, enjeux et perspectives. Paris : L’Harmattan, 2018). C’est comme confier la direction de la police à un ancien délinquant.
Bref, cette garnison de « bénis oui oui » n’envisagent la poursuite de leur carrière à vos côtés que dans l’affirmation d’une « loyauté » bruyante et malhabilement exercée (suspension de diffusion des programmes d’une télévision privée, mise à mort programmée d’un groupe de presse longtemps ciblé, Walfadjri). Quel anachronisme à l’ère de la numérisation générale des sociétés ! Ce n’est pas en brimant les libertés, en vous inventant de nouveaux ennemis que vous consolideriez votre pouvoir. Pire, cela ne ferait que « martyriser » vos adversaires et les rendre sympathiques auprès de ces milliers d’apolitiques : la majorité silencieuse, celle qui ne s’exprime que dans les urnes, dans le secret des isoloirs. Ceux qui vous disent le contraire ne vous aiment pas. Ils aiment vous plaire pour encore continuer à profiter des ressources que génèrent les positions de pouvoirs. Ils iront voir ailleurs quand vous perdrez, après avoir, bien sûr, contribué indirectement à vous perdre et à vous faire perdre. Un simple constat dans ce qui se passe tous les jours sous vos « cieux » et sous vos yeux suffirait pour vous en convaincre. Mais l’obsession maladive du pouvoir est un indicateur objectif de manque de lucidité. Il est peut-être, hélas pour vous, déjà trop tard pour bien faire.
PS : Dans une prochaine contribution, je parlerai de « ces quelques magistrats au service du Prince », car il est grand temps dans ce pays, et au vu des risques que court notre démocratie, que chacun prenne ses responsabilités devant l’histoire et en assume personnellement les conséquences ! Est-il juste que les actes isolés et volontaires de trois pelés et un tondu entrainent toute une corporation dans un jugement englobant et systémique ?
Par Assane SAADA
AU SECOURS!
Pensent-ils qu’il y’a en eux une imminence d’une mort politique qu’ils se hâtent à tout faire comme si c’était la dernière fois ? Des gestes graves, des pensées, des paroles… qu’ils pourraient ne plus avoir l’occasion de réaliser...
Pensent-ils qu’il y’a en eux une imminence d’une mort politique qu’ils se hâtent à tout faire comme si c’était la dernière fois ? Des gestes graves, des pensées, des paroles… qu’ils pourraient ne plus avoir l’occasion de réaliser... Ne voulant pas être des spectateurs de leur agonie. Ainsi seraient-ils devenus fous qu’il faille appeler le Cheikh au secours ? Solliciter pour eux son pardon. En effet, notre éthique ceddo nous contraint à la repentance. Nous autres de ce Sénégal où des symboles ont encore un sens. Chez nous, jamais personne n’aurait agi de la sorte. Un vendredi du mois sacré de rajab (qui signifie respecter), après une prière à la grande mosquée de cette cité religieuse, une rencontre avec le khalife, sortir de Touba pour profaner Mbacké ? Touba-Mbacké étant deux phares d’une même lumière de cet autre Saint-Homme qui illumine notre vivre-ensemble. D’où l’imminence, pour ne pas suspendre l’avenir, de redorer des valeurs qui font ce pays.
Beaucoup ont dû se retourner dans leur tombe. D’autres ont repensé à cette autre époque, au discours et à l’interdiction d’un khalife mettant fin à ces grands offices païens… dont Mbacké était le théâtre… Seulement, autres temps autres mœurs… Des étourderies… Et, le plaisir de jouissances furtives qui les portent leur fait croire qu’ils ont donné l’extrême onction. Que plus rien ne résisterait désormais à leurs désirs. Que leur charge est inimitable et fatale. Des manifestants qui courent des rues, plus rien ne leur fait peur. L’émoi des populations les renforce dans leur volonté d’en découdre. Anesthésiés qu’ils n’imaginent point ce qui pourrait advenir d’autres que leur slogan de l’instant. Ils se regardent faire. Dans cet enthousiasme de gens pris par une cascade de désir à n’en plus finir mais qui feraient l’amour à la sauvette.
La politique ne se réduit pas à un heureux désordre
Même qu’ils n’auraient pas qualité pour implorer le Cheikh, des ceddo font pénitence de ce qui est advenu dans cette localité qui magnifie son nom oh combien glorieux. Pour eux, son legs reste un trésor précieux. Le Saint-Homme leur a appris à se battre sans zèle, à triompher et à acquérir une postérité sans être une source de peine, de souffrance… pour quiconque. Et comme le chantait Serigne Moussa Kâ : « Lu baax du baax ba jàll baax (…) Waaye Sëriñ bee weesu baax (…) Waa ju la weddi dóotu baax (…) Waa ju la sopp dal di baax… (les coutumes des anciens sont à suivre car jamais le bon ne traverse le bien… des limites de bon sens que les bienfaits du Cheikh ont surpassées. Qui le renie est en perdition, qui l’adore est porté vers la félicité. » Une pensée à Cheikh Anta Diop, entre autres, qui se sentait fort responsable de la jeunesse de son parti que son discours tempérait toujours leurs ardeurs. Pour lui, on ne peut pas faire l’économie d’une connaissance approfondie de notre société si nous voulons la changer.
L’extravagance ne saurait suppléer l’absence de perspectives. Mais, quand la politique se réduit à rêver à un heureux désordre, profitant des hasards militants, des visiteurs inhabituels et des pillards, des acteurs du jeu politicien étalent leur incapacité à pouvoir se mesurer par le nombre de contradictions qu’ils accumulent. Ainsi, dans son silence, la population se montre plus adulte que « des pantins qui se chamaillent pour la gouverner ». Eux qui promettent que le futur a un avenir, qu’ils sont détenteurs de la solution et se posent en meilleurs candidats à la présidence de la République. Que demain c’est l’insurrection, une République des cendres… Dès lors, sauf à rompre le cours du désastre, qu’on ne s’y trompe pas ! Si demain le feu, que le pays flambe, qui survivra à cette foule qui va les pendre, s’extraire à l’atrocité d’autrui qui ne se repaît plus d’une raison civilisée ? Cependant, le temps est un cercle et 2024 ne passe pas par une ligne droite. Le présent ne préfigure pas forcément la Présidentielle à venir. Le grand embrasement auquel certains aspirent n’est pas inévitable. L’opinion publiée étant, souvent, totalement déconnectée de l’opinion publique.
« L’illusion de renouveau » que laisse entrevoir une élection présidentielle reste un terreau du « dégagisme » cher à certains. D’autres, instruits par l’expérience de deux alternances se sont appropriés ces mots de Nietzsche : « Rien de décisif ne se bâtit que sur un malgré tout. » Le Sénégal est face à son destin avec des politiciens en mal d’intelligence pour écrire un vivre-ensemble. Et, des sables mouvants de l’émiettement politique, on ne s’extirpe pas souvent à temps. C’est la raison de l’enlisement qui fait redouter le pire.
Par Félix NZALE
INADMISSIBLE
L’escalade. Le processus est enclenché et l’on voit mal comment il pourrait être stoppé. A moins de kidnapper Ousmane Sonko pour l’encager, voire de l’éliminer physiquement. Perspective à la fois hypothétique et suicidaire
L’escalade. Le processus est enclenché et l’on voit mal comment il pourrait être stoppé. A moins de kidnapper Ousmane Sonko pour l’encager, voire de l’éliminer physiquement. Perspective à la fois hypothétique et suicidaire. Hypothétique dans la mesure où jusqu’ici le leader de Pastef bénéficie de son droit constitutionnel d’aller et de venir. Suicidaire parce que le pays s’embraserait aussitôt.
Le monde entier a assisté vendredi dernier à des scènes de violences inouïes à Mbacké où le Pastef voulait tenir un méga meeting interdit par le préfet. Au terme d’une confrontation avec les forces de l’ordre qui a duré plus de trois tours d’horloge, les environs n’étaient plus qu’un champ de ruine.
Au-delà du veto de l’autorité administrative, les événements de Mbacké sont, à mon avis, en lien direct avec une rhétorique guerrière développée et entretenue au premier chef par des dirigeants en proie à des poussées de bouffées délirante.
D’abord, il est inadmissible que des leaders de l’opposition tiennent un discours de stigmatisation et d’attaque. Il est inadmissible qu’entourés de «leur» jeunesse, ils s’emploient à disqualifier au forceps la présence et les opinions d’une autre partie de la jeunesse. Il est inadmissible d’exciter les sentiments et émotions des uns, notamment en les poussant à l’affrontement physique avec les autre.
Ensuite, il est inadmissible que nos dirigeants, à la tête de l’Etat, ne puissent pas faire un travail sur eux-mêmes afin d’essayer de comprendre la source des frustrations d’une écrasante partie de la jeunesse dans l’optique d’un travail sur le changement des mentalités.
Il est inadmissible que dans une République, ces dirigeants soient encore inspirés par une conception egocentrique, crispée et dogmatique de la démocratie. Il est inconcevable qu’ici, l’on en soit à la répression des voix discordantes, aux accords et interdictions de manifester selon le faciès ou le camp politique, à la «zombification» des masses.
Enfin, il est inadmissible et incompréhensible que la parole des «sages» qui appellent à un recollement définitif à notre société et à notre l’histoire soit ignorée, surtout dans le contexte politique actuel où se développent des propos répétitifs, sans mesure et sans pondération. S’ajoute à cela, il faut sans cesse le rappeler, une couverture médiatique binaire et partisane qui généralement entretient la confusion, la peur et la tension.
Respect strict des normes, des principes et des dispositions de la Loi commune. Rejet de la justice à géométrie variable. Reddition des comptes pour tous. Justice du contexte social… Telles sont sommairement les interpellations que nos dirigeants doivent entendre et être capables d’y apporter des réponses. Mais on ne doit pas entendre les réponses qui soient des condamnations comme c’est la tendance chez certains, mais des réponses qui supposent une réflexion sur ces questions fondamentales.
Autrement, le risque de «guerre civile» évoqué par Alioune Tine sera toujours réel.
par l'éditorialiste de seneplus, jean-claude djéréké
ÉLOGE DE L’INSOUMISSION
EXCLUSIF SENEPLUS - Norbert Zongo et Martinez Zogo, sauvagement assassinés parce qu’ils enquêtaient sur des scandales, font partie des insoumis dont l’Afrique peut être fière
Jean-Claude Djéréké de SenePlus |
Publication 12/02/2023
Certaines personnes prennent l’insoumis pour un indiscipliné, un anarchiste, un rebelle, quelqu’un qui refuse de se soumettre. Telle est aussi la définition du dictionnaire « Larousse ». La limite principale de cette définition, c’est qu’elle ne nous dit pas pourquoi et à qui ou à quoi X ou Y refuse de se soumettre. Pour moi, l’insoumis ne conteste pas pour contester, ne dit pas « non » pour le plaisir de dire « non », ne s’installe pas dans une contestation permanente et injustifiée.
L’insoumis freine des quatre fers face à des lois scélérates ; il se cabre lorsque sont prises des décisions injustes ; il s’insurge contre tout ce qui ne va pas dans le sens de l’intérêt général ; il s’oppose aux choix ou mots d’ordre qui ne sont pas en conformité avec les statuts et règlement intérieur qui régissent le groupe auquel il appartient : mouvement associatif, parti politique, communauté religieuse, syndicat, etc.
Pour lui, vivre « sans être en mesure d’inquiéter qui que ce soit en quoi que ce soit” (P. Bourdieu) n’a aucun intérêt. L’insoumis se rebelle contre le faux, le mensonge, le conformisme, le culte de la personnalité et toute forme de dictature. Les paroles du genre « le chef a dit, le chef ne veut pas ceci ou cela » glissent sur lui comme l’eau glisse sur le dos d’un canard quand il s’aperçoit que les soi-disant envoyés du chef poursuivent leur propre agenda, travaillent non pour le chef mais pour eux-mêmes.
Bref, avant de s’engager, avant d’obéir, l’insoumis veut voir clair, comprendre, être convaincu. C’est pourquoi on peut affirmer que son obéissance n’est jamais aveugle, qu’il « refuse la force qui veut le soumettre » (Tzvetan Todorov dans « Libération » du 1er janvier 2016). La notion d’insoumis comporte ainsi une charge positive chez l’historien français d’origine bulgare. Il en va de même dans l’ouvrage « Le Journal » où, en 1946, André Gide écrivait ceci : « Le monde ne sera sauvé, s'il peut l'être, que par des insoumis. Sans eux, c'en serait fait de notre civilisation, de notre culture, de ce que nous aimions et qui donnait à notre présence sur terre une justification secrète. » C’est effectivement à eux, insoumis et insoumises, que nous le devons si notre monde a accouché de changements majeurs. Leur capacité de ramer à contre-courant a permis à l’humanité d’accomplir un saut qualificatif. Dresser leur liste serait une véritable gageure.
Ici, je voudrais ne citer que le Nazaréen Jésus guérissant des malades le jour du sabbat, l’Allemand Karl Marx dont l’ouvrage culte « Le Capital » reste à ce jour la meilleure critique du capitalisme, le Russe Alexandre Soljenitsyne qui en décrivant dans « L’archipel du goulag » le système carcéral communiste contribua à ébranler les fondements du régime soviétique, les Ivoiriennes Marie Koré et Anne-Marie Raggi prônant le boycott d'achat des produits français et marchant, les 22, 23 et 24 décembre 1949, sur la prison civile de Grand-Bassam afin d’obtenir la libération des dirigeants du RDA arbitrairement incarcérés.
Je songe aussi à l’Argentin Ernesto Che Guevara, au Cubain Fidel Castro, au Français Émile Zola, auteur d’une lettre ouverte adressée au président de la République française d’alors et intitulée « J’accuse », pendant l’affaire Dreyfus, à l’écrivain camerounais Mongo Beti qui n’eut de cesse de pourfendre la mafia foccartiste en Afrique et l’emprise excessive de la France sur ses anciennes colonies. Norbert Zongo et Martinez Zogo, sauvagement assassinés parce qu’ils enquêtaient sur des scandales, font partie des insoumis dont l’Afrique peut être fière.
PAR Ahmadou FALL
MON CRI DU CŒUR
J’ai réduit le volume de ma plume et la fréquence de mes contributions depuis que j’ai constaté qu’il n’y a presque plus de débat objectif et constructif dans ce pays.
J’ai réduit le volume de ma plume et la fréquence de mes contributions depuis que j’ai constaté qu’il n’y a presque plus de débat objectif et constructif dans ce pays. Des 2 principaux antagonistes, la logique semble être « tous ceux qui sont contre moi sont mes ennemis jurés ! ». On s’insulte, on s’invective et se dresse en soldat intransigeant et despotique de sa cause.
Il faut savoir raison garder. Les politiciens sont une minorité, comptant certes, des patriotes volontaires, avec de nobles ambitions pour leur pays. Mais le chemin emprunté n’est pas le bon. Le Sénégal n’a jamais atteint ce niveau d’insécurité et d’inflammabilité !
À qui la faute ?
Lorsque les lois approuvées par tous, dans leur esprit sont mal appliquées ; lorsque le balance s’habitue à supporter deux poids et deux mesures sans état d’âme… alors, les sujets de droit ressentiront de plus en plus un sentiment d’injustice. Lequel sentiment, se cristallisant, provoque fatalement le désir ardent de retrouver l’équilibre par le RÉVOLTE.
Redresssons notre SUNUGAL, « tappé khol yi, manko ci deug ak ci djoup… ».
Le Sénégal aurait dû investir à Thiès, pour que ses habitants lui rendent en contrepartie la monnaie de la pièce. Les différents régimes ont raté les thermes de convergences du principe de la colonne vertébrale économique. Mais, mieux vaut tard que jamais
Fin d’idylle s’il en est, mais s’il y a une autre chose que j’ai aimée c’est le tweet d’un follower qui se demande si la capitale du rail à deux gares, n’est pas devenue simplement, celle de l’entrepôt des vestiges du glorieux passé ferré de Thiès.
Profitons justement du démarrage de la pré-campagne électorale, lancée par le Macky. Soyons sérieux, plutôt de sa tournée économique à Thiès, pour parler de cette ville rebelle d’un plus de 6600 km carrés, douze plus fois grande que Dakar, dans laquelle se réveillent près de deux millions de citoyens, qui auraient dû être les rois du pétrole. Tant Dieu a pourvu leur terre de bénédiction agricole, minière, culturelle, industrielle, ferroviaire, textile.
Mais, il faut être nous autres, tous régimes confondus, pour rater le rendez-vous de Thiès. D’abord pour ses citoyens, pour les compatriotes ensuite.
Certains diront, que les sanctions politiques des différents régimes sont passées par là. Qui ne se souvient pas de la colère noire des colons, à l’époque de la prétendue suprématie blanche, ballottée par des cheminots thiessois, et leurs deux grèves mémorables entre 1945 et 1948 ?
Que dire de Senghor et de ses sueurs froides, données par un certain Majmouth Diop du PAI né en 1957 à Thiès.
Plus près encore, du 25 février 1988. A quelques heures de la turbulente présidentielle. Abdou Diouf avait essuyé les jets de pierre d’une « pseudo jeunesse malsaine », manipulée par des « bandits de grand chemin », dira dans son livre le magistrat Ousmane Camara.
Et puis 4-4-44, le mbourou ak sow Wade-Idy, avarié par les immondices et défécations de Point E en 2005. Quoique ni Léopold Sédar Senghor ni Jean Collin ne firent guère mieux que Ndamal Kadior et ses 25 milliards de francs CFA pour sa commune. Une première historique pour la rebelle emportée par le “coup d’Etat rampant” puis “debout” de Mahmoud Saleh, la barbouze de Roume.
Enfin, le confessionnal duquel le maitre du verbe a servi jeudi l’extrême onction politique, pour un terminal en beauté du Macky magnifié sur “les langues de la postérité”. Certainement conscient, que le développement du Sénégal passe nécessairement par Thiès. Un Macky 2 final certainement que Thiès doit être un hub vital pour le transport ferroviaire, ce d’autant qu’elle abrite une industries de croissance telles Sen Iran Auto, Senbus, la Nouvelle société textile sénégalaise, la tapisserie des Manufactures sénégalaises des arts décoratifs, en plus des phosphates, de l’agriculture, du tourisme religieux, de la culture, etc.
Que de rendez-vous historiques et économiques de ratés avec Thiès, par tous les régimes, oublieux de l’obligation du renforcement des investissements et services publique pour faire de la ville rebelle, les vertèbres cervicales d’une économie nationale inclusive, parce que conscients du dynamisme thiessois.
Le Sénégal aurait dû investir à Thiès, pour que ses habitants lui rendent en contrepartie la monnaie de la pièce. Les différents régimes ont raté les thermes de convergences du principe de la colonne vertébrale économique. Mais, mieux vaut tard que jamais.
D’ici là, restons sur le folklore et espérons que les promesses et lancements ferrés remettent Thiès sur les rails. Parce que tout ou presque ne sera que politique d’ici février 2024.
par Charles Faye
IDRISSA SECK DIT NON AU TROISIÈME MANDAT
Le leader de Rewmi a osé hier jeudi, dans son fief des grandes messes électorales, pour dire avec la rhétorique et l’éloquence qu’on lui connait à Macky Sall qu’il y a un temps pour gouverner, un autre pour partir
Il fallait oser, Idrissa Seck a osé hier jeudi, dans son fief des grandes messes électorales, pour dire avec la rhétorique et l’éloquence qu’on lui connait à l’illustre hôte du jour, en l’occurrence le Président Macky Sall qu’il y a un temps pour gouverner, un autre pour partir.
Sa prière sibylline, mais à la profondeur sans équivoque n’était peut-être pas celle qu’attendait le président Macky Sall venu à Thiès, dans le cadre d’une tournée économique ponctuée par un Conseil des ministres décentralisé. Mais le discours de Thiès détonne comme un acte fondateur de la rupture. Qui l’eut crut, à moins qu’ils en eussent discuté avant.
Mais il faut remonter à 2010, le 4 novembre précisément, où depuis la capitale française, le membre encore du Comité directeur du Parti démocratique sénégalais (PDS) qu’il était, envoyait à son « Frère Secrétaire général », en l’occurrence Me Abdoulaye Wade, une lettre dans laquelle Idrissa Seck lui disait que la messe était dite.
« (…) votre candidature pour un troisième mandat est inconstitutionnelle donc irrecevable. Le terme de votre mandat en cours est 2012 et ne peut être prorogé. »
Idrissa Seck a remis ça. Sans trembler, se permettant dans sa prière, lourde de sens de finir par la même chute de la lettre qu’il avait adressée à Me Wade : « « une mention honorable sur les langues de la postérité ».
Ce qui suit parle : « Il me Reste à présent pour conclure M. le président de la République, d’adresser une prière à votre endroit. Qu’il plaise au Seigneur des mondes de continuer à raffermir vos pas, à dilater votre poitrine, pour que vous acceptiez toutes critiques. Celles qui sont contributives, comme celles qui sont abusivement injustifiées.
C’est une des exigences du leadership et vous en êtes un remarquable. Qu’il continue d’apaiser votre cœur, de fortifier votre esprit, pour que les choix futurs que vous aurez à faire puissent vous valoir un parachèvement de votre parcours déjà exceptionnel d’une telle beauté qu’il n’y aura pas d’autres choix que de vous garantir après une longue et heureuse vie auprès des vôtres une mention honorable sur les langues de la postérité. »
Idrissa Seck aurait-il voulu faire comprendre publiquement au Président Macky Sall qu’il ne dépendait que de lui d’entrer dans l’histoire en sortant la tête haute de l’avenue Roume en 2024 ou de se voir prendre la direction de l’oubli après une tentative ratée de 3e mandat qu’il n’aurait pas fait autrement que d’attendre d’être dans sa ville, après avoir organisé un bain de foule monstre, pour sortir l’artillerie lourde et devenir « la nouvelle tête de turc de la majorité », comme le dit si bien le Dr Cheikh Diallo.
Impossible de croire que celui qui soutenait, il y a un peu plus de 20 ans, qu’il est né pour être président attendrait encore 5 longues années. A moins qu’il ne veuille d’une épitaphe définitive, après le coma de 2007. Qui dit qu’Idrissa Seck veut mourir en étant vivant sous l’ère Macky Sall 3.
La rupture est donc consommée même si elle s’impose plus dans la forme que dans le fond. Après tout, le projet libéral est de faire maintenir au pouvoir les “enfants” de “père Wade”quelle que soit la situation. Pourvu seulement qu’elle sacre leur champion.
Les jours prochains nous édifieront, mais tout semble indiquer les dés sont jetés. Ite missa est !
Ci-dessous la lettre d’Idrissa Seck adressée à Me Wade le 4 novembre 2010
Idrissa Seck – Membre du Comité Directeur
Parti Démocratique Sénégalais
Dakar, Sénégal
Paris, le 4 novembre 2010
« Frère Secrétaire général,
Votre candidature à la prochaine élection présidentielle, annoncée depuis plusieurs mois déjà, suscite débats et interpellations dans l’ensemble du pays.
De toutes les questions que pose cette candidature, celle de sa conformité ou non à la Constitution de notre pays est, à mes yeux, la plus importante.
Il m’est utile au préalable de vous rappeler les dispositions de notre parti relatives à la désignation d’un candidat à une élection présidentielle. L’article 20 du règlement intérieur du Pds stipule que «le candidat à la Présidence de la République est investi par le Congrès sur présentation de la Convention Nationale ou du Bureau Politique.»
Devant me prononcer en ces circonstances exceptionnelles, je me suis instruit de l’avis éclairé des plus grands experts, quant à la conformité de votre candidature avec les dispositions pertinentes de la Constitution de notre pays.
Les experts que j’ai consultés sont formels : votre candidature pour un troisième mandat est inconstitutionnelle donc irrecevable. Le terme de votre mandat en cours est 2012 et ne peut être prorogé.
C’est l’opinion du Professeur Guy Carcassonne, Professeur des Universités, Agrégé des facultés de droit dont l’avis est joint. C’est celle des Professeurs et Docteurs en droit, Pape Demba Sy, Mounir Sy et Ababacar Guèye dont les avis ont été rendus publics. J’ai aussi consulté le distingué constitutionnaliste, le Professeur Seri-gne Diop, à ce jour le plus ancien dans le grade au Sénégal. Ses fonctions actuelles l’empêchent de donner un avis public sur la question, mais il serait prêt à vous le communiquer si vous lui en faites la demande, dans le cadre d’une audience. .
Dès lors, le compagnon de trente ans de lutte politique que je suis, ayant été votre premier Directeur de campagne à l’âge de 29 ans, se prescrit le devoir absolu de vous dire que si vous persistez à présenter votre candidature, malgré l’avis unanime de ces éminents spécialistes, vous faites courir à notre parti le risque d’être absent de cette importante compétition électorale. En effet, selon la loi électorale de notre pays, après la publication par le Conseil constitutionnel de la liste des candidats retenus, 29 jours avant la tenue du scrutin, aucun dépôt de candidature n’est possible, sauf décès d’un candidat retenu avant le jour du scrutin.
Or, je ne puis me résoudre à l’idée que le PDS puisse être absent d’une compétition électorale aussi importante pour l’avenir de notre pays. Pas plus que je ne puis me résoudre à ce qu’un des inspirateurs du Nepad et défenseur de la Renaissance africaine, l’un des interlocuteurs privilégiés en Afrique des dirigeants du 68, soit logé à la même enseigne que Mamadou Tandja du Niger.
Ce sont là, les raisons pour lesquelles je vous exhorte solennellement à faire en sorte que cette question importante soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine réunion du Comité directeur de notre parti, pour que nous puissions en débattre avec nos frères et sœurs de parti.
Vous avez l’impérieux devoir de rester un exemple, à l’image d’un Mandela ou d’un Lula da Sylva. La possibilité vous est encore offerte de donner une ultime leçon de sagesse à vos compatriotes et au reste du monde. Je vous prie de ne pas la rater, pour garder « une mention honorable sur les langues de la postérité».
par Amadou Tidiane Wone
AU NOM DE QUOI ?
Le libre exercice des activités de mobilisation, d’information, de réunion et de contestation, d’un parti légalement constitué, est de source constitutionnelle et légale. Aucune entrave ne doit y être apportée hors du droit commun
« Il n'y a point de plus cruelle tyrannie que celle que l'on exerce à l'ombre des lois et avec les couleurs de la justice. » Montesquieu.
Notre « République » calquée sur la France dont elle se veut une réplique, est de plus en plus caricaturale. Tant les manipulations des institutions, par ceux qui ne sont chargés que de les animer pour un temps donné, sont devenues envahissantes et disproportionnées. Il est donc temps de retourner vers l'auteur de « L’esprit des Lois » (françaises) Montesquieu, pour prendre la mesure des dérives graves en cours dans notre pays quant aux missions et rôles, tâches et servitudes, dévolus aux agents de l’Etat, les fonctionnaires. Afin d’évaluer, les droits et devoirs de tous, vis-à-vis de la loi qui est sensée assurer l’égalité des citoyens.
L’interdiction de la réunion publique prévue ce vendredi à Mbacké par le Parti Pastef-Les patriotes, nous donne une occasion de nous interroger sur la légitimité et, pire, la légalité de l’acte administratif pris par le préfet de Mbacké. Car, tant dans la forme que dans le fond, le courrier du préfet de Mbacké nous semble inopportun, incongru et vexatoire.
Inopportun. Parce qu’aucun précédent de débordement d’une manifestation « autorisée » n’est à signaler au Sénégal. Bien au contraire ! Toutes les manifestations autorisées se déroulent dans une ambiance festive, bon enfant et la foule, quelque soit sa densité, se disperse tranquillement après la prise de parole du dernier orateur. Par contre, les manifestations « non-autorisées » suscitent toujours une résistance et peuvent déboucher sur des affrontements entre forces de l’ordre et aspirations citoyennes. Au demeurant, les forces de défense et de sécurité sont tenues de respecter les ordres de la hiérarchie même s’ils sont illégitimes ! L’éternelle dialectique entre la légalité et la légitimité ! Un penseur nous rappelle, cependant, que « Quand le mal a toutes les audaces, le bien doit avoir tous les courages »… A méditer !
Incongru. Si la situation actuelle de la capitale, jonchée de gravats et meurtrie par des travaux inachevés qui tirent en longueur peut paraître inadaptée à des mouvements de foules importants, que dire de Mbacké et de la possibilité d’y trouver des espaces à foison ? Interdire, pour le plaisir d’interdire, au point d’utiliser le prétexte du manque d’une signature sur trois est quand-même incongru (!) pour rester dans le registre policé du vocabulaire disponible. Un seul coup de fil aux organisateurs aurait suffi pour faire venir un troisième signataire…Sans compter une erreur matérielle manifeste sur le visa de la loi évoquée. Précipitation ou coup du sort ? Que Justice soit rendue !
Vexatoire. A la fois pour les militants de Pastef mais aussi pour les sympathisants, de plus en plus nombreux de ce parti et parmi lesquels je me compte désormais. Résolument. Nous sommes vexés ! Par le manque de considération dont nous faisons l’objet de la part d’autorités administratives qui sont en place pour nous servir ! Elles doivent, à cet égard, s’assurer du traitement équitable, et non partisan, des droits de tous les citoyens. Le libre exercice des activités de mobilisation, d’information, de réunion et de contestation, d’un parti légalement constitué, est de source constitutionnelle et légale. Aucune entrave ne doit y être apportée hors du droit commun. Ainsi doit fonctionner une République qui se respecte et qui veut conserver la confiance de ses administrés.
« Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. » Livre XI, chap. IV Montesquieu
La responsabilité individuelle, la conscience de chaque agent de l’État est interpellée lorsque la légitimité d’un acte administratif convoque sa légalité. Aucun ordre illégitime ne doit se parer du manteau de la légalité. C’est pour cela que les recours en abus de pouvoir existent. Mais pour fonctionner normalement, ces dispositifs doivent être servis par des hommes et des femmes qui portent des valeurs éthiques et morales fortes et incorruptibles. La formation des corps d’élite de l’administration doit donner une part importante à la rigueur morale ainsi qu’à l’honnêteté ! Sinon nous sommes tous en danger ! Mais…
« Il est une vérité qui nous venge de toutes les autres : Il y’a une fin en toute chose, et aucun malheur n'est éternel », nous rappelle fort justement Yasmina Khadra. Merci !
Notre pays va se relever. La jeunesse généreuse et ambitieuse qui piaffe d’impatience à besoin du soutien des aînés et de leur expérience. Sortons de nos zones de confort pour accompagner, avec sagesse et clairvoyance, les mutations sociétales inexorables qui se font jour. Nul ne peut arrêter la mer avec ses bras ! Il vaut mieux apprendre à nager dans le sens des vagues.
Comprenne qui pourra !
Jummah Mubaaracka à tous les hommes et femmes de foi et de bonne volonté !
C’est une bombe à retardement. L’inactivité et le désœuvrement rongent la société. Les concours du plus beau et du plus grand bain de foule au gré des tournées et rassemblements politiques sont le baromètre de l’oisiveté, du manque d’occupation.
C’est une bombe à retardement. L’inactivité et le désœuvrement rongent la société. Les concours du plus beau et du plus grand bain de foule au gré des tournées et rassemblements politiques sont le baromètre de l’oisiveté, du manque d’occupation et de travail décent. Sans grande difficulté, on saisit encore mieux pourquoi et comment nos territoires et bourgades en particulier sont percutés de plein fouet par le désert économique et l’exode rural. Épicentre des services étatiques le temps d’une tournée économique présidentielle, l’ancienne cité du rail est le visage et le paysage d’une certaine forme de désolation largement façonnée par les gouvernements successifs dont le socle repose sur l’incurie pour ne pas dire la nullité.
La ville de Thiès était un de nos bijoux de famille. Une sorte de petite Suisse sénégalaise. Tout y était en bon ordre sans que rien ne dépasse. Ses nombreux trains arrivaient à l’heure. C’était la locomotive qui tirait les wagons. Les gouvernements de passage ont réussi le tour de force d’éteindre le moteur. À l’heure du « mburu ak soow », les jeunes générations sur place sont pour la plupart au régime du pain sec. Les perspectives ne sont pas énormes si ce ne sont pas les emplois-jakarta précaires. Et leur lot quotidien que sont les traumatismes et séquelles des accidents innombrables soignés comme on peut dans les couloirs de l’hôpital régional. Un ministre de l’Intérieur a du reste complaisamment cautionné le pansement sur jambes de bois pour avoir donné instruction afin que ces types d’engins soient laissées en paix et qu’ils aient libre cours. À Thiès comme dans d’autres cités, l’horizon bouché a fermé les débouchés. Il faut bien que nos jeunes frères aient un gagne-pain. 285.000 deux-roues au moins circulent sur l’étendue nationale. Aveu d’échec et d’impuissance.
Il ne s’agit pas de dénigrer mais de s’insurger contre le manque de prévenance pour cette frange de la jeunesse laissée à elle-même et privée en même temps de l’opportunité et du plaisir de s’émerveiller et de se cultiver. La connaissance étant étroitement liée à la qualité de vie et au progrès social. Ce qu’on vient d’évoquer est une plaie qui est en train de les ravager. Le chef de l’Etat a une grande expérience des territoires. Sa visite-marathon aurait un goût d’inachevé si ce sujet épineux n’était pas mis sur la table.
Piètres orateurs
Les états-majors politiques tablent sur 2024 pour conquérir ou conserver le pouvoir. Les effluves d’une campagne électorale prématurée rendent l’atmosphère assez lourde. Il y a lieu d’ailleurs de se boucher le nez tant les discours sont irrévérencieux et médiocres. Les mots ont dû lui brûler la bouche quand le Premier Ministre, d’habitude placide, s’est essayé au jeu des extrémistes qui agitent à longueur de meeting la loi du Talion. Ce fut une sortie ratée. Les piètres orateurs cachent leur lacune dans les outrances. Dans le camp d’en face, on fait preuve du même manque de classe et de la même morgue. D’habitude, ceux qui anticipent les testaments aiment la vie par-dessus tout. Parce que la mort est aussi la destruction des plaisirs et des douleurs. Les tons macabres sont symptomatiques d’un pays qui va mal. Malgré tous les dérapages, le Sénégal a besoin de tous ses fils sains et saufs.
Par Abdoul Aly KANE
L’URGENCE D’UNE INTEGRATION ECONOMIQUE A PAS FORCES
La situation économique de l’Afrique, déjà précaire, s’est dégradée depuis près de deux ans avec le Covid-19 et la crise actuelle en Ukraine
La situation économique de l’Afrique, déjà précaire, s’est dégradée depuis près de deux ans avec le Covid-19 et la crise actuelle en Ukraine. Eloignée du théâtre des opérations militaires de ce conflit européen et peu touchée parla pandémie, elle n’en subit pas moins les contrecoups les plus lourds ou chocs exogènes de ces deux crises.
Face à cette situation nécessitant des réactions communes concertées à l’instar de ce qu’ont fait les pays de l’Europe et d’Asie, les Etats africains réagissent en ordre dispersé et sans l’efficacité qu’aurait permis la mise en commun de moyens propres. L’Afrique de 2023 ressemble à une embarcation tanguant sur les flots agités d’une mer démontée.
Le conflit actuel en Europe et ses développements laissant craindre un conflit mondial lui exige de choisir son camp faute d’une unité politique minimale sur les questions géopolitiques. Son aboutissement va accoucher d’une nouvelle configuration dans les relations internationales et l’organisation de l’économie et du commerce mondial auxquelles le continent ne s’est pas suffisamment préparé ni au plan politique ni au plan économique.
Au plan économique, en dépit des annonces de taux de croissance mirifiques parles experts de tous ordres du style « après l’Asie, c’est le tour de l’Afrique », le continent maintient toujours son état d’arriération économique et social vis-à-vis du reste du monde.
L’Afrique, hors BRICS, est une petite économie participant de façon quasi marginale aux flux en valeurs du commerce international (2,5 % du trafic) lieu où s’échangent les produits des nations. Le paradoxe est qu’elle est le siège de toutes les matières premières stratégiques servant à produire les biens technologiques de dernière génération dont les valeurs ajoutées issues de leur transformation industrielle sont les plus valorisées au monde.
L’Afrique reste cantonnée à la vente brute de ces matières se contentant ainsi de la partie la plus faible de la valeur ajoutée globale, une partie insuffisante pour nourrir sa population et donner des emplois à ses jeunes.
Ainsi, 60 ans après les indépendances, l’Afrique a volontairement sauté l’étape de l’industrialisation pour se spécialiser dans l’import-export et les services tout en reléguant en arrière-plan une agriculture dont l’exercice, dans notre pays, dure trois mois sur une année civile de 12 mois.
Les programmes des institutions de Bretton Woods ayant en perspective la mise du continent sur les rails du développement économique n’ont pas été concluants en matière de transformation industrielle mais également sur le plan du développement agricole.
La notion de développement économique n’est plus évoquée en perspective, les préoccupations étant plutôt tournées vers l’équilibre budgétaire et le remboursement de la dette. Les divers programmes d’ajustement structurel ont fini paradoxalement par céder la place à des programmes nationaux de « lutte contre la pauvreté » et d’autres programmes sectoriels initiés par les Etats eux-mêmes. Aujourd’hui, cette pauvreté tape à la porte de couches sociales jusque-là préservées au Sénégal.
Avec la montée d’une inflation devenue structurelle aggravée par les effets du conflit géopolitique actuel, la classe moyenne, usuellement porteuse de l’équilibre familial et national, est atteinte dans sa capacité à faire face à ses besoins essentiels en alimentation, en santé, en énergie.
Encensée il y a peu par les multinationales de l’alimentation comme pilier d’un marché africain émergent, cette couche sociale plie sous le poids de la hausse des prix des produits alimentaires, de l’énergie, du transport ainsi que des charges sociales inhérentes au sous-emploi des jeunes.
La jeunesse a le sentiment d’être abandonnée par un Etat sans solutions durables et sa propension à la révolte et au besoin de changement est renforcée par les fréquentes annonces de cas de gabegies, de prévarications financières de la part de hautes autorités. Des cas non suivis de sanctions administratives et judiciaires. La gestion des fonds Covid-19 au Sénégal, dont on nous dit (maladroitement d’ailleurs) que seul 0,7% du montant total décaissé aurait été distrait de la procédure normale d’exécution de la dépense publique, aura marqué négativement les esprits. Les Sénégalais attendent, sur cette question, des sanctions exemplaires à la hauteur de l’affront subi. Il est présentement convenu parles experts du monde entier, y compris ceux de Davos, que l’Afrique doit sortir du modèle de non industrialisation qui lui est imposé via l’exportation de ses matières premières sans transformation préalable. Cela doit procéder d’abord de la volonté politique de nos dirigeants de mettre en œuvre des programmes économiques tendus vers la transformation structurelle, l’affectation des ressources publiques vers l’investissement, la répression de la corruption, le développement du capital humain, la quête concrète de l’intégration économique du continent via les régions et sous-régions.
Les économistes et autres spécialistes des sciences sociales doivent aider à cette réflexion dans des cadres adaptés pour la redéfinition de nouveaux paradigmes. Les politiques d’émergence économique en solo sont obsolètes compte tenu de la tendance mondiale aux regroupements économiques multipolaires. Il s’agit des plans Sénégal Emergent (horizon 2035), Gabon Emergent (horizon 2025),Côte d’Ivoire Emergent(horizon 2020), Cameroun Emergent (horizon 2035), Tchad Emergent (horizon 2025) etc…
Il est urgent, pour prendre le cas de notre pays, de changer le discours économique officiel faussement perspectiviste promettant l’émergence économique en 2035 alors que la géo-économie mondiale subit des bouleversements en profondeurs appelant à des choix cruciaux.
Vu la lenteur avec laquelle les institutions régionales et sous régionales avancent sur les questions de développement économique à l’échelle communautaire, il est impératif que les économistes, les statisticiens, les démographes, les spécialistes de l’éducation et de la formation, la société civile africaine s’emparent en urgence de ces questions pour dresser les contours d’une intégration économique réaliste.
La priorité devra être accordée à la sécurité alimentaire d’une Afrique pas loin d’abriter 2,5 milliards d’individus en 2050 soit dans 27 ans. La vraie unité africaine sera celle réalisée à travers l’intégration de son économie.
En définitive, et comme rappelé dans une précédente contribution sur la priorisation de l’agriculture vivrière rendue nécessaire par la situation géopolitique actuelle, l’intégration par l’agriculture doit constituer la base économique sur laquelle bâtir le développement industriel du continent via l’agro-industrie.
Tirer les leçons du passé
Dans cette perspective, les leçons du passé doivent servir. L’après- barrages de l’OMVS puis le NEPAD ont porté en leur temps le projet agricole régional intégré sans succès notable. Les barrages de Manantali et Diama, mis en service en 1988 et 1989, étaient prévus au départ pour irriguer 375 000 hectares de terres, arrêter l’intrusion des eaux salées dans le cours fluvial, rendre navigable le fleuve Sénégal de Kayes à Saint-Louis, et enfin produire 800GWHd’énergie hydroélectrique par an.
Sur 375 000 hectares de terres, objectif finalement ramené à 240 000 hectares, seuls 130 000 sont actuellement irrigués depuis 1989 date de mise en service de Diama.
Au finish, en dépit d’importants financements affectés aux investissements en infrastructures directes et connexes, les prévisions ayant prévalu à la mise en œuvre de ces barrages n’ont pas été réalisées ni en termes d’autosuffisance alimentaire via les aménagements hydro-agricoles, ni en termes de production hydroélectrique.
Un des paradoxes frappants est qu’avec ces barrages, environ 21 milliards de m3 environ sont « lâchés dans l’océan Atlantique chaque année pour réguler les volumes d’eau dans le souci d’en favoriser l’hydroélectricité (Mali), et ce, au détriment de l’agriculture à laquelle Diama était dédié pour le Sénégal.
Leur réinjection sur les terres arides du Djolof et environs, envisagée il y a une vingtaine d’année dans le cadre du programme de la revitalisation des vallées fossiles, devrait être rediscuté avec l’Etat mauritanien réfractaire au projet à l’époque. Le moment est d’autant plus propice que les deux Etats — Mauritanie et Sénégal — ont noué un partenariat pour la production du gaz naturel du gisement de Grand Tortue Ahmeyim.
La conception du pouvoir et le repli confortable sur l’espace étriqué que le colon a attribué à chaque pays empêchent notre classe politique d’envisager l’avenir au-delà des frontières géographiques nationales procédant de la balkanisation du continent. Nos dirigeants, pour bien « marquer leurs territoires »,se contentent des apparats quasi royaux (insignes, croix et rubans, drapeaux et hymnes nationaux) alors qu’ils savent pertinemment que les Etats souvent lilliputiens dont ils ont la charge ne sont pas viables. Il est grand temps de passer à une autre échelle.