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26 avril 2025
Opinions
Par Serigne Saliou DIAGNE
ŒUVRE SÉNÉGALAISE DE RÉDUCTION DES LIBERTÉS D’EXPRESSION
Alioune Tine a bien raison de dire aux micros de la 2STv que le Premier ministre Ousmane Sonko est atteint par toute la levée de boucliers sur les actes qu’il pose pour conduire le Sénégal, notamment à travers les réseaux sociaux qui furent jadis son nid
Je disais dans ces colonnes, la semaine dernière, que l’exercice des «Questions au gouvernement» ne se résumerait qu’à une foire de soliloques, avec «invectives, menaces plates, outrages et enfumages» qui y auront la part du lion. Je n’aurais pas été plus devin car le maître de cérémonie, en l’occurrence le Premier ministre Ousmane Sonko, n’aura pas ennuyé son monde. Il aura eu sa tribune toute dressée pour dézinguer tout ce qui bouge et surtout donner le tempo d’une deuxième année d’une gouvernance de rupture qui se cherche encore entre slogans creux, retard à l’allumage et volonté de bander des muscles devant tout le monde. Reprochant à une partie de l’opposition son absence, les coups de mortier n’ont pas manqué. Et sur tous les sujets, notre tout-puissant Pm ne sera pas passé par mille chemins pour annoncer la couleur.
Le Premier ministre s’insurge de l’absence des députés de l’opposition à la séance des «Questions au gouvernement». Ces derniers sont bien dans leur droit de ne pas être présents quand invectives et attaques personnelles leur sont servies à foison, en leur présence ou absence. Ce n’est pas ainsi qu’il pourra promouvoir un dialogue parlementaire serein.
Au titre du débat public, il se sera lâché comme nul autre, en se posant comme gendarme des consciences et censeur attitré de l’espace public. Il érigera le délit de diffusion de fausses nouvelles, ce fourre-tout liberticide dont seul le Sénégal a le secret, pour en faire son sabre dans une croisade contre tous les impertinents, zélés de la parole et contradicteurs. Quand un Premier ministre se permet de nous dire qu’il mettra sa main dans certaines affaires et qu’il a eu à prendre en main certains dossiers en instance devant nos juridictions, il y a de quoi être désespéré pour les lendemains à venir. Si quelqu’un a bénéficié de tous les avantages et excès de la parole libérée, en tant qu’acteur politique, c’est bien lui. Que ça peut être gauche de servir des condamnations pénales à toute personne qui ne voudrait pas restreindre son vocabulaire, afin de ne pas froisser un gouvernement et son parti-Etat !
Au titre du fonctionnement de la Justice, le Premier ministre feindra de ne pas exercer de pression sur les magistrats et le ministère de la Justice. Au rythme où vont les affaires en ce moment dans le temple de Thémis, on peut bien douter de ça. Une Justice à plein régime prend ses aises, et tout ce qu’il y aura pour secouer des cocotiers et baobabs sera mis sur la table. Oui pour une reddition des comptes, mais cela dans les règles de l’art, dans le respect de la présomption d’innocence et une préservation de la dignité des personnes qui ont à se justifier devant les cours et tribunaux. La soif de vengeance et la méchanceté aveugle auront poussé certains commentateurs, pour ne pas dire journalistes, à demander que les gens soient envoyés en prison, même si des cautions sont versées, avant de tirer au clair les forfaits commis. Tout devient ridicule si l’exigence de transparence et l’impératif de reddition des comptes sont troqués contre un agenda de vendetta. Le Sénégal ne finira pas encore de panser les plaies.
Epictète disait ce qui suit dans son manuel de liberté de penser et de savoir-vivre, De l’attitude à prendre envers les tyrans : «Si un homme possède une supériorité quelconque, ou s’imagine du moins la posséder, alors qu’il n’en est rien, cet homme, s’il manque d’éducation philosophique, en sera inévitablement tout bouffi d’orgueil.» Il pousse son argumentaire plus loin dans la logique que les autocrates ont de ne pas se sentir, en lâchant la sentence qu’un tyran peut dire, sans gêne aucune, qu’il est «le plus puissant du monde». Le discours du Premier ministre au pupitre de l’Assemblée, nous affirmant son «indestructibilité politique», a de quoi embrasser les contours des affirmations des chefs de meute pour se conforter dans leur toute-puissance, et surtout nier de façade à toute force contraire ou antagoniste, la capacité de les toucher. Je suis du genre à croire crânement que tout ce qui sort par la parole dans le sens de menacer, d’intimider ou de se la jouer dur, n’est que reflux d’un subconscient rongé par le doute ou ne cessant de se remettre en cause continuellement. Quand un chef fait ce genre d’affirmation, sa carapace s’est déjà affaissée et toute logique d’exhiber une puissance ou une maîtrise du cours des choses n’est que chute sans fin dans des abîmes. Le droit-de-l’hommiste Alioune Tine a bien raison de dire aux micros de la 2STv que le Premier ministre Ousmane Sonko est atteint par toute la levée de boucliers sur les actes qu’il pose pour conduire le Sénégal, notamment à travers les réseaux sociaux qui furent jadis son nid d’ange, pour dire devant la Représentation nationale qu’il est «politiquement indestructible». Tywin Lannister, personnage de la fiction à succès Game of Thrones, disait bien que tout homme qui sent le besoin de dire qu’il est roi, n’en serait pas un. A chacun de se faire sa religion !
Il y a tout juste cinq semaines, en réponse à Abasse Fall qui disait tout haut que son leader «Ousmane Sonko ne sera plus jamais la cible des insulteurs», je démontrais le procédé par lequel la machine Pastef avançait pas à pas dans une logique de canonisation de son chef pour qu’à terme, évoquer son nom suffirait d’être un péché et un crime majeur. La série de convocations de journalistes, de chroniqueurs et d’activistes en dit beaucoup sur un régime qui est allergique aux armes qu’il aura utilisées sans concession pour se faire une légitimité jusqu’à prendre le pouvoir. Une connaissance, avec un cœur militant pour Pastef, se permettra de m’appeler pour me souligner une hostilité envers sa formation politique et chercher à déconstruire ou peindre négativement tout ce qui venait de leur chef. J’aurai rappelé à cette connaissance ses propres publications, incitant à tort et travers à des casses, ses publications Facebook remplies de haine injustifiée avec leurs lots d’insultes, son statut WhatsApp jubilatoire quand une tentative d’attaque avait été faite contre mon domicile familial. Il y a des réponses qui prennent un temps fou à être servies, mais il est bien, face à l’hypocrisie et une fausse morale consciente, de mettre à nu les gens dans leur couardise et leur sensibilité à géométrie variable. Les muses procurent l’oubli des maux et la fin des douleurs, disait Hésiode. Dans le Sénégal actuel, on pourrait se dire que le débat public et l’espace politique est un triste ballet entre Calliope, muse de l’éloquence, et Thalie, muse de la comédie. Autour de la fontaine d’Hippocrène, à défaut d’inspiration poétique, tout est mis en œuvre pour détruire des adversaires politiques, salir des réputations et mettre au pas des populations. La muse de la parole étant «la plus puissante de toutes», pour taire les esprits, il faut s’attaquer aux discours et faire taire les voix. Ce cirque tragique a de quoi taquiner les muses et tout esprit lucide. Au moment du bilan, on se rendra compte qu’en peu de temps, un modèle de démocratie aura été détruit et des progrès réalisés au gré de longues luttes, anéantis. Tout cela pour plaire à un seul homme. Que la décadence d’une Nation, lorsqu’elle se vit aux premières loges et jour après jour, peut être hideuse !
Par Oumar NDIAYE
LE PIEGE DE THUCYDIDE SE FORME ET SE FERME
La fréquence des passes d’armes verbales entre les États-Unis et la Chine rappelle bien les séquences décrites par Graham Allison dans son ouvrage sur « Le Piège de Thucydide ».
La fréquence des passes d’armes verbales entre les États-Unis et la Chine rappelle bien les séquences décrites par Graham Allison dans son ouvrage sur « Le Piège de Thucydide ». Depuis plus d’une décennie, il est rare de voir une période d’accalmie ou un moment de répit entre les deux pays qui, sur presque tous les sujets internationaux, sont à couteaux tirés sauf sur de rares sujets tels que le climat.
La récente recrudescence de la guerre commerciale re-déclenchée par la nouvelle administration américaine remet ainsi sur orbite la rivalité/dualité entre la Chine et les États-Unis, moteur et marqueur de la scène internationale. Dans cette saga à rebondissements qu’est la nouvelle taxation imposée par Donald Trump sur les droits de douane, il arrive comme au théâtre des suspens surréalistes et des revirements spectaculaires. Mais pour la Chine, le niveau des taxes s’envole même. C’est dire que dans cette nouvelle stratégie commerciale et économique américaine, la Chine reste l’unique cible à faire plier. Alors que les exportations chinoises vers les États-Unis représentent 15 % de son volume de marchandises expédiées à l’étranger, il est clair que les Chinois peuvent se trouver d’autres marchés alternatifs. Ce qui fait que la Chine pourrait se passer, même si ce sera difficile, du marché américain alors que l’inverse semble être plus difficile.
Ces tensions jusque-là contenues sur le terrain commercial sont symboliques et symptomatiques de la rivalité/dualité sino-américaine décrite et prédite depuis plus d’une dizaine d’années par des oracles diplomatiques et des cénacles universitaires. Après la technologie, place maintenant à l’économie pour arbitrer la compétition que ces deux pays se mènent au plan mondial. Chacun cherche ainsi à contenir l’autre dans ces deux domaines. Ainsi, face au « containement » américain dans le domaine de la technologie, les Chinois ont été obligés de « muscler » leur riposte avec des investissements conséquents pour se prémunir de « l’endiguement technologique » mené par les États-Unis. Sur le plan économique aussi, au-delà de renforcer sa consommation domestique, la Chine est en train de se constituer de nouveaux alliés, d’abord dans son environnement immédiat.
Actuellement en tournée dans des pays asiatiques, le président chinois Xi Jinping est en train de se renforcer avec des voisins comme le Viet Nam, la Malaisie, dont certains sont concernés par son mégaprojet « La Ceinture et la Route ». Censé servir d’interconnexion, ce projet est en train de construire des infrastructures routières, portuaires, aéroportuaires, ferroviaires et industrielles qui ont aujourd’hui du sens et peut-être donneront à la Chine des chances dans sa course économique. De son côté, les États-Unis adoptent une politique d’endiguement dans toutes les parties du monde où la Chine a pris de l’avance sur lui. Ces compétition et confrontation résultent du pivot opéré par les États-Unis de la politique étrangère sous la présidence Obama avec un focus sur l’Asie-Pacifique et principalement la Chine.
Cela est ainsi bien expliqué par l’ancien Secrétaire d’État adjoint Kurt Michael Campbell dans son ouvrage « The Pivot : The Future of American Statecraft in Asia » (Le Pivot : l’avenir de la politique américaine en Asie), paru en 2016. Cette valse d’évènements qui continue de tourner montre clairement que nous ne sommes pas éloignés du « Piège de Thucydide » comme théorisé par Graham Allison dans son livre « Vers la guerre : La Chine et l’Amérique dans le Piège de Thucydide ? », publié en 2019. Avec un regard lucide et placide, Pr Allison évoque que la Chine et les États-Unis se dirigent vers une guerre dont ils ne veulent pourtant ni l’un ni l’autre. Selon lui, « le Piège de Thucydide » se met en place quand une puissance émergente vient défier la puissance régnante. Pour étayer sa thèse, il a puisé ses exemples de l’histoire au cours des cinq derniers siècles, cette configuration du « Piège de Thucydide » qui s’est présentée seize fois avec à la fin une guerre à douze reprises. C’est dire qu’aujourd’hui, avec cette veillée d’armes commerciales, ce Piège est en train de se former et peut-être de se fermer…
PAR MANSOUR FAYE
TOUT ÇA POUR ÇA
Encore une fois, il n’y a aucun rapport des corps de contrôle de l’Etat qui a demandé l’ouverture d’une information judiciaire sur mon humble personne.
Aux professionnels du Droit, aux Facultés de Droit et autres hommes , femmes du Droit… vos commentaires s'il vous plait !
Je rappelle ceci : je suis un ancien ministre qui, par l’article 101 de la Constitution, dans l’exercice de ses fonctions, bénéficie du privilège de juridiction.
Encore une fois, il n’y a aucun Rapport des Corps de Contrôle de l’Etat qui a demandé l’ouverture d’une information judiciaire sur mon humble personne.
Alors, je prie Mr le Ministre de l’Intérieur du Gouvernement de SAS « demi-dieu », Général de Corps d’Armée, ancien Haut Commandant de la Gendarmerie et Directeur de la Justice Militaire, de me dire et de dire aux sénégalais, quel est le texte en vigueur au Sénégal, qui lui donne le droit de me notifier, par Arrêté une telle scandaleuse décision, sans aucune forme d'explication ou de justification?
Dois - je comprendre que le Sénégal n'est plus un État de Droit ? Que nous ne sommes plus en République ? Ou simplement, l'acharnement que je subis, cache maladroitement, une intention malsaine à la limite de l'agression ciblée ?
Les Sénégalais voient... et l'Histoire retiendra!!
Par Ibou FALL
L’ASSAUT LANCÉ CONTRE MACKY 2029
Pendant que "Diomaye môy Sonko" dégaine ses meilleures cartes anti-corruption, l'ex-présient parcourt le monde en mode VIP. Ironie du sort : celui qui excellait dans l'art d'éliminer ses adversaires politiques pourrait goûter à sa propre médecine
Semaine haute en couleur dont le pic, à n’en pas douter, est la proposition de l’honorable Guy Marius Sagna, de traduire l’ancien chef d’Etat, Macky Sall, devant la Haute cour de justice… Soit dit en passant, trouver quatre-vingt-dix collègues qui signent les yeux fermés ne devrait être qu’une formalité.
A l’origine de son ire, plus de deux mille cinq cents milliards de francs Cfa de dettes que le nouveau régime trouve litigieux, en plus d’un montant presque similaire de dépenses «hors cadre légal».
Ceci ne devrait être que le horsd’œuvre…
A n’en pas douter, la responsabilité des quatre-vingts morts comptabilisés entre 2021 et 2024 devrait, dans pas longtemps, figurer sur la longue liste des crimes abominables reprochés à l’ancien chef d’Etat.
Pourquoi se gêner…
Ce cher Macky Sall, depuis quelque temps, en plus de «restructurer son parti», comprenez sa machine électorale, multiplie les selfies avec les grands du monde : un coup, c’est avec Donald Trump qu’il échange une poignée de mains après la traditionnelle séance de prières à laquelle les présidents américains doivent se plier ; un autre, c’est un souverain saoudien qui le convie à rompre le jeûne en terre sainte… Son entrée fracassante dans le Conseil d’administration de la Fondation Mo Ibrahim semble la goutte d’eau qui fait déborder le vase : alors que les accusations de falsification de chiffres de la comptabilité publique font les choux gras et d’âpres discussions avec le Fmi, il s’invite à la table où l’on distribue les bons points en matière de probité sur le continent.
Réponse du berger à la bergère ? On parlerait de provocation pour bien moins que ça.
Les élèves sont-ils en train de dépasser le maître ? Apparemment, le tandem «Diomaye môy Sonko» s’inspire des méthodes du précédent régime : alors qu’éclate l’affaire Sweet Beauté, dans l’opinion qui formera les 54% d’électeurs du 24 mars 2024, le doute n’est pas permis. C’est encore et toujours un complot de Macky Sall, qui use de drôles de procédés pour éliminer les concurrents sérieux à la présidentielle.
On rembobine ?
Après 2012, Karim Wade, le «fils biologique» et héritier du Père Wade, ouvre le bal : les malversations dont on l’accuse dépassent l’entendement, mais surtout, il est tenu de prouver l’origine de sa fortune qui serait colossale. Puis, Karim Wade en exil au Qatar et hors de course, quelques années après, c’est pareil pour Khalifa Sall, alors maire de Dakar, qui vient de rempiler et se projette déjà dans la présidentielle…
Alors que, début 2021, l’affaire Adji Sarr éclate en pleine pandémie, pendant que les esprits cartésiens cherchent des arguments de Droit, les autres voient la petite bête que Macky Sall cherche sur la tête de Ousmane Sonko, pardon, le Pros, devenu l’incontestable leader de l’opposition après le désistement de Idrissa Seck, parti brouter soudainement les herbes du Cese.
Le hasard du calendrier est bien curieux : ceci tombe juste après le show du Premier ministre devant une Assemblée dépourvue de l’essentiel de l’opposition. Il y distribue des menaces en veux-tu en voilà, proclame la «tolérance zéro» concernant les oiseaux de mauvais augure et les esprits chagrins qui sévissent via les réseaux sociaux. D’ailleurs, sur le web, une campagne de diabolisation d’Afrique Confidentielle, depuis une petite semaine, attribue à Macky Sall, une casquette supplémentaire : il serait le rédacteur en chef occulte de cette newsletter qui n’annonce que des mauvaises nouvelles en ce qui concerne le régime «Diomaye môy Sonko».
Là, on ne reprend certes pas les mêmes, mais ça recommence : il y a un sérieux candidat pour 2029 dont la candidature pour la mère des batailles électorales a bien des chances d’être invalidée sous peu…
Est-il nécessaire de rappeler les insinuations du président Bassirou Diomaye Faye, le soir du 4 avril, face à la presse, concernant les manœuvres mackyavéliques souterraines ? Il en conclut mystérieusement que son prédécesseur devra en assumer les conséquences. Ça n’aura pas tardé.
Si ce n’était que ça…
Certes, le peuple des 54% réclame des têtes sur le billot et, plus c’est célèbre, plus la plèbe est contente… Mais traduire devant la Haute cour de justice deux ministres au moins -pourquoi pensez-vous à Mansour Faye et Diouf Sarr ?- est devenu plus qu’une demande sociale.
Comme pourrait le penser le président Bassirou Diomaye Faye auquel fait écho «le meilleur Premier ministre de tous les temps», est-ce le Peuple qui fait pression sur ces braves gens de la Justice ? Ça ne cache même pas sa joie et annonce des emprisonnements même avant condamnation. En plus de quelques seconds couteaux des ministères, il y a des peoples qui défilent depuis quelques jours devant les enquêteurs de la Dic à propos des fonds Covid.
Pour l’heure, après plusieurs vaines tentatives de changer d’air, Mansour Faye se voit notifier, par la Justice, l’interdiction de sortir du territoire. Il sait enfin pourquoi, après examen de ses paperasses à l’aéroport, le flic de service le prie gentiment, mais fermement, de rester à l’intérieur de nos frontières.
C’est également cette semaine que Abdou Nguer, célébrissime chroniqueur plébiscité par un site comme le meilleur de tous, reçoit une convocation. Il y a peu, c’est sur la plainte d’un dénommé Azoura Fall qui s’énerve dans une vidéo par la suite que le chroniqueur ne soit pas jeté directement sur la paille humide d’un cachot. Cette fois, apparemment, pour Abdou Nguer, c’est plutôt mal goupillé…
La rançon de la gloire ?
Par Texte Collectif
LA PSYCHOLOGIE AU SÉNÉGAL : PERSPECTIVE DES ACTEURS SUR LE TERRAIN
La décision du Premier ministre Ousmane Sonko est une excellente nouvelle pour tous les professionnels de la santé mentale exerçant au Sénégal
L’engagement du chef du gouvernement sénégalais, exprimé en Conseil des ministres du 9 avril 2025, de dépoussiérer la loi no 75-80 du 9 juillet 1975 relative à la maladie mentale est une perspective salutaire pour un grand nombre de nos compatriotes. Il est en phase avec les efforts entrepris dans cette direction par le Département de psychologie de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, rouvert en 2021 après sa fermeture suite aux événements de mai-68.
La décision du Premier ministre Monsieur Ousmane Sonko est une excellente nouvelle pour tous les professionnels de la santé mentale exerçant au Sénégal. Elle vient donner un espoir de renouveau dans les structures hospitalières qui peinent à recevoir des subventions pour un fonctionnement optimal. Faut-il le préciser, c’est grâce à l’effort des professionnels de la santé mentale, malgré des conditions de travail qui sont loin d’égaler celles que peuvent offrir les pays du Nord global, que ces structures tiennent jusqu’à présent. Mieux, les hôpitaux continuent à proposer accueil et soin de qualité à un nombre de patients en croissance, malgré le nombre de lits qui reste insuffisant. L’intérêt manifesté par les autorités gouvernementales permet de croire en un réel engagement de leur part à prendre en compte la question de la santé mentale au Sénégal.
UN PEU D’HISTOIRE…
Le Professeur Oumar Guèye écrit qu’en mai 1968, une révolte universitaire a éclaté au Sénégal et abouti à un bras de fer avec le gouvernement du Président Senghor. (1) Les revendications des étudiants étaient multiples, largement inspirées par les mouvements panafricanistes et orientées vers une volonté de décolonisation de l’université dont les contenus des formations alors offertes ne répondaient pas aux réalités de la société. Face à cela, le régime du Président Senghor incarnait le visage du néocolonialisme qu’il fallait combattre pour instaurer un changement. C’est dans ce contexte que fut fermé le département de Sociologie et de Psychologie de l’Université de Dakar, et avec lui, la possibilité de faire émerger une génération de psychologues qui auraient pu développer une méthodologie basée sur une épistémologie mixte et ancrée dans l’approche décoloniale globale initiée par l’École de Dakar. Il a fallu attendre mars 2021 pour que ce département rouvre ses portes. À ce jour, il compte 596 étudiants et offre deux spécialisations en master dont une en Psychologie clinique et psychopathologie de la santé, une autre en Psychologie sociale et du travail. Son équipe d’enseignants-chercheurs collabore avec les centres hospitaliers nationaux afin de favoriser l’immersion professionnelle des étudiants à l’occasion des stages qui jalonnent leur formation.
UN PARTI-PRIS DECOLONIAL
Dès le début, et par devoir de reconnaissance pour le contexte de notre fermeture en 1968, l’option est prise d’implanter la Psychologie au Sénégal dans une perspective décoloniale et contextualisée, intégrant des cours inédits : psychologie indigène, Esclavage, colonisation et traumatisme, santé mentale globale, psychologie interculturelle, psychologie critique, psychologie communautaire, psychologie culturelle du travail, entre autres. Il ne pouvait pas en être autrement car copier les programmes académiques du Nord global reviendrait à exercer une nouvelle violence épistémique sur les prochaines générations de psychologues sénégalais.
En ce qui concerne les curricula, une approche panafricaine est mise en avant, avec la rédaction de manuels d’enseignements communs à dix universités situées dans six pays d’Afrique francophone. Cette initiative, qui vise à terme l’harmonisation des curricula dans le Sud global, n’est sponsorisée par aucun groupe ou organisme étranger. Exclusivement soutenue par l’UCAD, elle recueille la participation bénévole d’enseignants et de praticiens passionnés par leur métier et ambitieux pour leur pays. Il est important de préciser qu’il est coûteux de concevoir des enseignements et des manuels dans une perspective décoloniale, mais c’est pourtant le choix qui a été fait pour sortir du prisme de la comparaison entre nos pays et l’Occident. De ce fait, les futurs psychologues sénégalais ont accès à des méthodes développées en Afrique et basées sur les savoirs endogènes.
L’une de ces méthodes a d’ailleurs reçu le Prix APA (2) de l’innovation en Psychologie en 2020 et le Centre Hospitalier Universitaire de Fann a choisi de l’intégrer dans sa stratégie de renforcement de capacités du personnel hospitalier. L’auteure de cette méthode, Dr Ismahan Soukeyna Diop, a par ailleurs été sélectionnée pour le Bellagio Residency Fellowship (3) de la fondation Rockefeller pour son travail dans le sens de la construction d’un curriculum décolonial en psychologie clinique et l’intégration de méthodes de psychothérapie culturellement pertinentes, basées sur la tradition orale africaine. (4)
UN DEPLOIEMENT ASSOCIATIF
Dans la dynamique enclenchée d’implantation de la Psychologie au Sénégal, l’Association des Psychologues du Sénégal (APSYSEN) a été créée en 2019. La majorité de ses membres donne bénévolement en moyenne 25% de leur temps en consultations gratuites, en activisme ou en formation (voir plus bas).
LA NECESSITE DE METTRE DE L’ORDRE
La Psychologie prend lentement mais sûrement son envol au Sénégal. Pour accompagner ce déploiement, le département de Psychologie de l’UCAD a entrepris la création d’un Ordre des psychologues. Cette instance s’emploiera, une fois sur pied, à réguler l’exercice de la profession de psychologue au Sénégal autant que les relations entre les psychologues et les autres professionnels de la santé mentale, notamment les psychiatres et les psychothérapeutes non-psychologues, acteurs de la Psychologie au Sénégal. Cette tribune ne saurait se clore sans un appel lancé aux consœurs et confrères psychologues de toutes spécialités exerçant à l’étranger à venir joindre leurs efforts à ceux de l’APSYSEN et de l’équipe du département de Psychologie pour aider à construire une Psychologie sénégalaise à la hauteur des défis auxquels font face notre chère patrie et nos compatriotes.
L’équipe d’enseignement-recherche du département de Psychologie Faculté des Lettres et Sciences Humaines université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal)
(1)Guèye, O (2017). Les acteurs et événements influents de la crise. Mai 1968 au Sénégal. Senghor face aux étudiants et au mouvement syndical. Karthala, pp. 243- 271.
(3) Le Bellagio Residency Fellowship est un programme prestigieux qui accueille des chercheurs, activistes ou artistes dont il reconnait l’excellence et leur propose un cadre unique pour la développer pendant quatre semaines. Ce fellowship a accueilli des personnalités reconnues comme Maya Angelou et Ruth Bader Ginsburg. Plus d’informations sur ce lien : https://www.rockefellerfoundation.org/fellowships-convenings/bellagio-center/residency-program/
(4) TAMPSY OPTOA est un outil projectif de psychoéducation et de psychothérapie basé sur le conte africain. Cette méthode inspirée de la tradition orale africaine renforce l’alliance thérapeutique en utilisant des images et récits de contes africains comme média pour aborder les problématiques psychologiques.
A propos de l’Association des Psychologues du Sénégal
Créée en 2019, l’APSYSEN regroupe des psychologues formés, exerçant dans divers domaines (clinique, scolaire, social, du travail) au Sénégal et à l’étranger. Elle est animée par une conviction forte : l’accès à un accompagnement psychologique de qualité est un droit fondamental. C’est pour cela qu’elle agit avec discrétion, humilité et un profond engagement bénévole. Elle est composée d’une quinzaine de membres, en majorité psychologues cliniciens. Bon nombre d’entre eux interviennent régulièrement dans la formation universitaire en psychologie, en dispensant des cours et animant des TD de manière quasi bénévole. Ils accompagnent mémoires, thèses, recherches et offrent un soutien actif aux jeunes professionnels. La plupart des membres exerçant en institution ont régulièrement accueilli et accompagné des stagiaires. L’APSYSEN a mis en place des supervisions entre pairs et veille, dans la mesure de ses moyens, à ce que ceux qui adhèrent et s’établissent comme psychologues soient dûment qualifiés. L’association est consciente des besoins et de l’intérêt croissant de la population pour les questions de santé mentale et souhaite ainsi renforcer ses actions de sensibilisation. Depuis la crise du Covid-19, ce besoin est devenu encore plus visible. À cette période, l’APSYSEN avait déjà mis en place des dispositifs gratuits d’écoute pour soutenir les personnes en détresse. Aujourd’hui, elle prévoit de développer davantage de campagnes de sensibilisation, en particulier dans les médias, et d’organiser des actions collectives en partenariat avec d’autres structures engagées. Elle aspire également à développer des groupes d’écoute et des ateliers destinés à accompagner au mieux les besoins psychologiques exprimés par la population, en particulier les jeunes et les publics vulnérables. Son objectif est clair : structurer un réseau de psychologues compétents et solidaires, améliorer l’accès aux soins psychologiques, lutter contre les idées reçues, tabous sociaux et encourager le retour des professionnels sénégalais dans leur pays. L’APSYSEN est une structure libre, autonome, ouverte à la collaboration, qui agit avec intégrité et dans l’intérêt des bénéficiaires. Plus d’informations sur nos actions, projets et membres sur www.apsysen.com
PAR Issa Kane
CE SÉNÉGAL-LÀ
EXCLUSIF SENEPLUS - Que voyons-nous ? Imiter l’adversaire politique jusqu’à lui ressembler. Nous sommes dans la logique du Casino où le gagnant rafle tout sans un petit geste consolatoire à l’endroit des perdants. Duñulen may dara ! Tuss !
« Je suis venu pour te dire » non pas « que je m’en vais » comme le chantait Serge, mais pour te dire que je suis là, que nous sommes toujours là, au Sénégal, ce grand pays de grande hospitalité même s’il est, depuis quelque temps, un peu boiteux, un peu enrhumé, un peu nerveux, un peu violent, un peu inquiet et s’il a un peu les crocs.
C’est vrai qu’à chaque fois qu’un jeune homme de trente ou quarante ans nous prévient qu’il viendra nous voir, nous prédisons, hélas, qu’il s’apprête à embarquer dans un rafiot comme d’autres milliers de sa génération pour amerrir sur une plage italienne ou espagnole ou mourir dans les océans, brisant le rêve de toute une famille, de tout un quartier, de tout un village.
Voilà plus de deux décennies que l’espoir de devenir, un jour, un membre de la famille dont la voix compte et un jeune du quartier qui a réussi socialement, salué avec déférence par les vieillards s’est exfiltré des cœurs de ceux qui ne croient plus à la générosité de leur pays, aux professions de foi des gouvernants et de l’opposition politique distribuées à la veille des échéances électorales, bref à l’honnêteté de la société politique.
Tous les mêmes, disent-ils : ce sont les mêmes compères. Dans les camps militants, ils génèrent des violences verbales et physiques, des dégâts matériels et corporels inestimables, des coups bas, chaque militant bande les muscles sur le terrain à la manière de Popeye et à la fin de l’élection, l’on sabre, ensemble, facétieusement, le reste du champagne chapardé quelques semaines plus tôt dans les supermarchés saccagés à l’occasion de manifestations politiques.
″Enfin les ennuis commencent″, disait le vieux François. Non, c’est plutôt une bonne nouvelle, une naissance, le baptême chez les Manjaks (gente njaago) ! C’est la distribution des postes et des prébendes. Tant pis pour les mutilés ! Tant pis pour les familles éplorées !
C’est ainsi que cela se passe dans les téléfilms pour la gouverne de Ngor Djidjack Senghor, la petite tête et d’Aline Assome Diédhiou, la simple d’esprit. Comme les leurs, mon cousin sérère et ma cousine diola ne comprennent toujours pas pourquoi l’acteur mort dans un film aujourd’hui, joue le lendemain dans un autre, dans un autre rôle. Cela s’appelle du cinéma dans une grande salle fermée ; de la duplicité, en politique. Le jour où l’on votera une loi qui criminalisera la pantalonnade et la fourberie, ces deux sparadraps du Capitaine Haddock de la politique sénégalaise, il n’y aura plus de compétitions électorales dans ce sympathique pays.
On aime, on adule, on tombe en transe face à un politicien micro en main, en campagne électorale avec des promesses fabuleuses et puis on a honte de soi-même, on se déteste quand il arrive au pouvoir : les renoncements, les reniements, les revirements et le bel alibi du ″face aux réalités du pouvoir″ qui déleste les naïfs militants tombés dans l’esprit moutonnier, l’esprit de meute de tout rêve d’une nouvelle vie de confort moral et matériel. Sur un terrain de football, on appelle cela une passe décisive … but … ambiance dans la tribune … plutôt dans les cercles familiaux des hauts responsables politiques. On a gagné ! On a gagné ! On a gagné ! Désormais, place aux conjoints, à la fratrie, aux descendants, aux ascendants, aux bailleurs des séditieux, aux copains, aux coquins, aux fous du roi. Tout ce monde est au milieu de la Caverne d’Ali Baba. Satan est seul avec les jouisseurs. ″Do you feel like we do ?″, nous demandent-ils comme Frampton, excité, sur scène. ″Yes, guys !″, répondons-nous. Les casseurs, les pyromanes, les insulteurs, les animateurs de meeting … Oust ! Dehors !
″Les politiciens sont tous les mêmes. Ils promettent des réformes, puis réforment leurs promesses″, disait Leonid Sukhorukov. ″Que c’est triste Venise !″, se confiait à nous Charles. Que c’est triste, aussi, notre pays ! Inquiet, avions-nous dit à l’entame de notre propos. Oui, nous sommes inquiet et c’est pourquoi nos nuits sont toujours courtes car jusque-là, nos dirigeants n’arrivent pas à prendre de la hauteur, non pas la hauteur tragique du pendu mais la hauteur républicaine qui fait d’un président de la république, d’un Premier ministre ou d’un ministre, un grand monsieur estimé, salué avec une naturelle révérence, une réelle déférence à leur contact avec leurs compatriotes de par le respect scrupuleux des engagements électoraux pris ou qui fait d’un député, une honorable personnalité qui n’injurie pas, qui ne boxe pas, qui ne vole pas, qui ne verse pas dans les trafics illicites tout au long d’une législature et dans la vie de tous les jours.
L’honorabilité ne peut pas être un titre parlementaire, elle doit être une reconnaissance sociale, individuelle. Combien de députés savent ce que représente la sublime étoffe colorée qu’ils portent du haut de l'épaule droite à la hanche gauche ? Les éblouissantes couleurs de cette étoffe sont-elles celles d’un parti politique ou celles de la République ? Ils ne savent rien ou ne savent que ce que l’on leur demande de répéter lors des plénières de l’Assemblée nationale par le président du Groupe parlementaire qui tient les instructions de la direction du parti et ce, depuis Sédar et Lamine Coura : le parti avant la patrie pour défendre les infamantes postures.
Quand est-ce nos présidents, nos ministres, nos autres élus et nommés de notre République vont-ils se convaincre qu’ils sont nos serviteurs et non nos seigneurs ? En campagne électorale, ils viennent s’aplatir devant nous, doux comme des agneaux, implorant nos suffrages avec une humilité et une disponibilité d’esclaves de case. Une fois élus, nommés, ils nous parlent avec condescendance quand ils nous rencontrent et refusent de nous recevoir quand on leur demande une audience. Plongés dans une amnésie de soûlards, ils ne nous connaissent plus.
Disons-le, derechef, les adversaires historiques du peuple de Sénégal, ce sont les politiciens sénégalais et les électeurs sénégalais eux-mêmes : ″trompez-moi une fois, honte à vous ; trompez-moi dix fois, honte à moi″. Le peuple sénégalais a, toujours, été gouverné sans savoir comment il l’a été. Si, quand même et heureusement ! Apaté soit louée ! La famille des … nouveaux régnants en sait quelque chose plus que ceux qui suaient abondamment sous le soleil incandescent non pas de « L’Été indien » de Joe mais bien de l’été sine-sine sous des chaleurs torrides lors des meetings, plus que ceux qui ont été éborgnés ou tués lors des batailles rangées entre adversaires politiques, plus que les familles de ceux qui ont succombé suite à des blessures par armes blanches des nervis, par des manifestants, pistolets en mains ou par balles perdues des forces de défense et de sécurité en mission, plus que ceux qui ont vécu les misères carcérales pour avoir été au mauvais moment et au mauvais endroit lors d’une manifestation politique où chaque camp croit devoir répondre à la radicalité de l’autre en faisant fi de la quiétude, de la dignité de ceux qui n’y sont mêlés ni de près ni de loin.
Diamniadio et Dakar, le 2 avril 2024 ! C’était l’investiture de Monsieur Bassirou Faye comme cinquième président de la République du Sénégal et la passation de pouvoir entre le susnommé et le président sortant, Monsieur Macky Sall avec d’affectueuses fausses embrassades et de théâtrales tapes fraternelles sur les épaules. Les Sénégalais étaient à la fois médusés et émus par ce spectacle qu’ils n’avaient jamais imaginé « mort ou vif », une expression tout-terrain, à tout va, chère à mon ami Mbissane Mossane Sène, l’évaporé.
Avril 2025 ! Il ne s’agit pas de faire le bilan d’un an au pouvoir du président de la République Bassirou Diomaye Faye. Il convient juste de faire des constats sur le vécu des Sénégalais et de la conduite des affaires publiques par son régime au cours des douze derniers mois et quelques jours après le mémorable plébiscite du candidat de la « Coalition Diomaye Président » à la présidentielle du 24 mars 2024 au cours de laquelle nous avons donné notre voix, notre suffrage et n’avons été économe ni de notre temps ni de notre énergie pour qu’advienne la troisième alternance démocratique (voir notre lettre : À mes cousins candidats Amadou Ba et Bassirou Faye du 20 mars 2024). Rendons grâce au Dieu des fats dirigeants confortablement installés et des dupées gens dont la votation ne compte plus, désormais, d’avoir agréé nos prières !
Honnêtement, nous pouvons dire que le pays est dans une situation de « Blokas », comme le disait, Babacar, le Sing-Sing du ″Super Etoile de Dakar″. Les ménages sont accablés par la cherté de la vie, ils sont ″fauchés comme les blés″. Les entreprises sont épuisées par la pression fiscale et la dette intérieure. La marche du pays semble être tributaire de la bonne coopération avec le FMI, c’est du moins ce que l’on apprend auprès de la vendeuse d’arachides grillées, au coin de la rue, bravant le froid crépusculaire ; du Maïga dans sa gargote où les agents du Service d’Hygiène ne sont, visiblement, jamais entrés pour contrôle ; du charretier qui arpente avec nonchalance et effronterie les avenues et rues de la Capitale, créant un déprimant embouteillage et du mécano qui répare les véhicules sur le trottoir, mettant en difficulté la circulation piétonne au vu et au su de l’Agent Voyer Municipal (AVM).
"Je n’ai pas changé … toi non plus, tu n’as pas changé″, nous berçait Julio. Le train de vie de l’Etat a-t-il, réellement, changé ? Est-il ″réduit à sa plus simple expression″ dans un « pays en ruine » ? Sont-ce toujours les mêmes ambassades et consulats, les mêmes directions et agences nationales, les mêmes postes de Haut-Représentant, de ministres-conseillers, de conseillers techniques sans la science, d’envahissants chargés de mission, de PCA, de PCS, de Haut-Conseil du Dialogue Social, les mêmes cortèges avec des véhicules au prix de plusieurs centaines de milliers de dollars comme ceux des colonnes funèbres pour l’enterrement des grandes stars hollywoodiennes, …, les mêmes missions inutiles à l’intérieur et à l’extérieur du pays dans le même confort princier avec perdiems, avec de vrais et de faux collaborateurs dans les délégations, sans grand profit pour le Sénégalais et la Sénégalaise qui cherchent à survivre ?
Engagements électoraux en instance de traitement ou classés sans suite ! Quel sort pour les caisses obscures ; la pénalisation de l’homosexualité ; le retrait de l’Exécutif du CSM ; la gestion saine et transparente de tout le patrimoine des sénégalais ; la fin du népotisme et l’isolement de la famille dans la vie publique ; l’abrogation de la loi portant amnistie de 2024 sans explication, sans commentaire, sans interprétation, voire sans débats comme la LFi 2025 ?
Raté ! Cette loi de la volte-face est votée, finalement, le 2 avril 2025 avec de minuscules modifications invisibles à l’œil nu, avec des virgules, des trémas sur les «i», et des accents circonflexes qui manquaient sur un mot, un seul mot, dans la loi du président Macky Sall.
C’est encore raté ! Messieurs Thierno Alassane Sall, Abdou Karim Gueye, Cyrille Oumar Touré, le Premier ministre Ousmane Sonko, Me Abdoulaye Tall et les parents des victimes des violences électorales de 2021 à 2024 qui détestaient cette loi félonne en voudront à la majorité parlementaire pastéfienne qui a imposé la dictature du plus grand nombre. Ils attendront une autre fois. Ce sera ″Another day in Paradise″, comme le promet Phil.
Maladresses ! Maladresse dans la communication de certains membres du gouvernement. On se croirait dans les marchés hebdomadaires de Djilass ou de Boutolatte. Quand ils parlent, on rit ou on pleure. Leurs familles, leurs amis et leurs voisins guettent leurs prochaines sorties médiatiques pour se boucher les oreilles pudiques pour ne rien entendre.
Maladresse, aussi, dans une diplomatie qui avait rayonné dans toutes les instances internationales, aujourd’hui brouillonne avec une voix blanche, aphone, atone. Pas grave ! La redynamisation est en cours.
« Blokas » ! Personne ne bouge ! Plus de marches pour les mécontents, pour les travailleurs licenciés à tort ou à raison et à qui l’on doit des réparations, pour des organisations politiques, syndicales ou des regroupements du secteur informel victimes de mesures non encadrées dans le temps et dans l’espace, pour les étudiants qui ne voient pas les bourses d’études à la bonne heure.
Les libertés sont, systématiquement, confisquées au nom du principe ″bananier″ de risque de trouble à l’ordre public.
Les opposants sont menacés et humiliés partout. Leurs mouvements sont restreints sur « ordre de la hiérarchie » comme si l’on est encore dans le règne de Salmone Faye où tout est permis et tout est interdit selon la volonté du roi sanguinaire. Les procureurs de la rue publique annoncent, fièrement, les arrestations et l’emprisonnement prochains d’opposants politiques au régime actuel. Quelques heures, quelques jours après, ils ont presque raison ! Nous ne sommes pas dans une ripoublique comme le dit l’autre mais nous ne sommes pas très loin. Force est de constater que nous sommes revenus aux odieuses pratiques du régime de BBY.
Que voyons-nous ? Imiter l’adversaire politique jusqu’à lui ressembler ! Pire, nous sommes dans la logique du Casino où le gagnant rafle tout sur le tapis vert sans un petit geste consolatoire à l’endroit des perdants. Duñulen may dara ! Tuss !
Halte-là ! Stop aux dérapages ! Ne tombons dans aucune forme de radicalité qui exclut, qui éloigne. La République a besoin d’équilibre et de mesure. Comment comprendre l’adresse du Premier ministre Ousmane Sonko sur les libertés face aux organisations syndicales et au patronat au Grand Théâtre ? « Si vous voyez les pays qui ont décollé ces dernières années, c’est là où les libertés ont été réduites. Je ne vais pas citer de noms mais allez dans des pays asiatiques, arabes, les libertés (politiques, syndicales ou d’association) ont été réduites pour ne pas dire annulées, ce qui a laissé une marge (de manœuvre) pour que les autorités puissent dérouler ».
Bel exemple ! Monsieur le Premier ministre a, parfaitement, raison. Par contre, nous devons demander si le Premier des ministres a déjà visité la Suède, la Norvège, l’Allemagne, le Canada ou la Finlande ? Dans ces pays, les libertés, toutes les libertés sont sacrées, le citoyen est presque un monarque ou un bambin qui fait ce qu’il veut là où il ne voit ni papa ni maman. Ce trop-plein de libertés n’empêche point « les autorités (de) dérouler » pour faire de leurs pays ce qu’ils sont : des paradis que leur envient les pauvres sahéliens que nous sommes ?
«Blokas» ! Les cadres supérieurs sénégalais compétents aux pertinentes expériences plusieurs fois reconnues à l’intérieur et à l’intérieur du pays attendent les appels à candidatures fermement promis par Ousmane Sonko et Bassirou Faye alors candidats aux élections de 2017, 2019, 2022 et 2024, prêts à aider le pays à sortir de son indéniable morosité économique.
« Blokas » ! Magistrats, sociétés politique et civile attendent l’application des conclusions des Assises de la Justice et la décision du président de la République, Monsieur Bassirou Diomaye Faye, de ne plus siéger au Conseil Supérieur de la Magistrature conformément à son engagement répété des dizaines de fois devant les journalistes. Un engagement cher à son Premier ministre, Ousmane Sonko, patron du Pastef, par ailleurs.
« Aadi bil aadi ; salaade aadi ɓuri firtude aadi ». Serment pour serment ; autant ne pas prêter serment s’il faut le violer ensuite, disait ma grand-mère, au bord du grand fleuve septentrional. Un nouveau serment vient d’être fait, solennellement : ne plus décevoir brutalement avec inhabileté les citoyens. Bravo les doctes ! Désormais, il faut expliquer avec pédagogie, interpréter avec pédagogie toute rétractation, toute abjuration avec l’intervention de femmes et d’hommes, à la télé, dans les réseaux sociaux, payés pour faire le job auprès de personnes plus polies, plus intelligentes, plus érudites qu’eux.
Le devoir du citoyen n’est pas d’être sur les plateaux de télé pour répéter ce qu’on demande de défendre avec une fausse conviction. À tout citoyen, l’on demande d’être un patriote, c’est-à-dire, une personne qui aime sa patrie plus que tout autre chose et la sert avec honneur, dévouement, sincérité, loyauté en transcendant l’esprit partisan. Il est vrai que la première chose qu’un homme doit défendre, c’est son honneur. Évidemment quiconque ne peut défendre son honneur, ne peut défendre ni sa patrie ni son parti.
Nous sommes plein dans le mille ! La propagande par les naïfs, par les obtus dans les médias. Ma génération est « À la recherche du temps perdu » comme Marcel. Il était une fois des hommes et des femmes nommés : Cheikh Anta Diop, Djibo Leyti Ka, Marie Angélique Savané, Abdoulaye Bathily, Penda Mbow, Boubacar Boris Diop, Annette Mbaye d’Erneville, Sémou Pathé Gueye, Doudou Sine, Abdoulaye Elimane Kane, Babacar Touré (Sud), Hamidou Dia, Mame Moussé Diagne, Souleymane Bachir Diagne, Henriette Niang Kandé, Fadel Dia, Amsatou Sow Sidibé, … Quel délice que d’écouter ou de lire ces femmes et ces hommes !
Ajourd’hui, face à la bonne parole qui fait défaut, nous sommes soumis à la dictature médiatique des chroniqueurs.
Paul Nizan dénonçait dans « Les chiens de garde » les philosophes et les écrivains de son époque qui, sous couvert de neutralité intellectuelle, s'imposaient en véritables gardiens de l'ordre établi. Nos intellectuels, prétendument, désintéressés par les privilèges sont dans une douce collision avec le pouvoir. Ils tournent la langue française dix fois dans la bouche jusqu'à la gorge avant de s’exprimer en public pour bien se faire entendre et se faire recruter par les décideurs.
Les universitaires ne veulent plus continuer à côtoyer, chaque matin, dans les amphis les sauvageons disciples, capricieux, impertinents, violents. Ils s’arrangent, finement, pour se retrouver dans le cabinet du président de la république, du Premier ministre ou ceux des ministres. De ces positions, ils défendent ce qu’ils n’ont rien appris de leurs émérites professeurs et rien enseigné à leurs étudiants. Ainsi, ils se seront condamnés au devoir de réserve, garant du grand confort pour hauts fonctionnaires dévoués et consciencieux.
Où entend-on, où voit-on les intellectuels qui décriaient les petites comme les grandes dérives du régime de BBY ? « Les philosophes d'aujourd'hui rougissent encore d'avouer qu'ils ont trahi les hommes pour la bourgeoisie. Si nous trahissons la bourgeoisie pour les hommes, ne rougissons pas d'avouer que nous sommes des traîtres ». Que dire de cette réflexion de Paul Nizan ? Pour notre part, nous considérons que l’alignement d’un intellectuel au pouvoir est la dépossession de ce qu’il est. « Ku log du wax », parole de Wolof Ndiaye.
Revenons aux … grands esprits des studios de télévision, mesdames et messieurs les chroniqueurs, et référons-nous à Serge Halimi qui a fait l’updating : «Les nouveaux chiens de garde ». Ceux-là qui construisent, éhontément, la destruction de nos valeurs, de nos croyances et de notre mieux-vivre ensemble par la grossièreté, la diffamation, la malfaisance, le trafic d’influence et le mensonge. Ils sont, à la fois, journalistes, experts en communication, palefreniers, vendeurs d’encens, soldats de dernière classe libérés insultant l’honneur de vaillants généraux aux faits d’armes que nul ne peut ensevelir, politiciens de carrière bouffant à toutes les mangeoires, gens de la mode, responsables d’ONGs embourgeoisés ou simplement hommes et femmes de mauvaise éducation depuis l’enfance. Ils sont docteurs-en-tout. Ils sont constitutionnalistes, pénalistes, médecins-légistes, économistes, politistes, gynécologues, géologues, psychologues, sociologues, procureurs, juges. Ils sont dans la cour du ministre, du député et de ce grand opposant politique qui leur allouent un salaire, les dotent d’habits d’apparat pour les émissions de télé et assurent la rémunération de leurs gardes du corps. Chroniqueurs et gardes du corps ! Des métiers d’avenir. Préparez-y vos enfants !
Notre pays est, aujourd’hui, fissuré par les ambitions des politiciens, la volonté de conquérir le pouvoir et la hargne de le conserver par tous les moyens. En vérité, ils se soucient peu du développement du pays, or la bataille du développement est d’abord celle des convictions et de l’exemple, disons de l’exemplarité. Il nous faut tous être du bon côté de l’Histoire : pouvoir, opposition, citoyens ordinaires et extraordinaires. Un pays se construit, se développe avec l’ordre et la justice. Le pouvoir a le devoir de donner aux citoyens le goût de la vérité quel que soit la situation et démontrer par l’exemple la supériorité de la raison et du vrai sur la propagande.
Il faut se rendre à l’évidence : l’irréversibilité du réveil du citoyen dormant, suborné, un autre jour d’un autre mois de mars à venir comme en 2000, 2012 et 2024.
Quel vaccin devons-nous inventer pour lutter contre le vieux laxisme et la nouvelle méchanceté chez le sénégalais afin qu’il puisse s’occuper, journellement, de l’essentiel au lieu de se fourrer dans les nids de frelons pour écraser tous les petits frelons ? Pour le moment, nous sommes dans l’univers de l’immoralité, du dévergondage où l’insulte est la première valeur cardinale des acteurs politiques. On ne se scandalise plus de l’insulte mais de l’insulteur et du sens de l’offense dans une langue ou dans une autre. Gare à ceux qui parlent ou écrivent dans le sens contraire de la girouette militante, la meute populiste braillarde partisane et les aboyeurs sont en alerte !
Hélas, Ce n’est pas … Ce Sénégal-là … que nous voulons bien construire, bien co-construire en bons sénégalais de bonne éducation, patriotes sincères sans calculettes dans les poches et pochettes.
Nous terminons avec Marguerite Duras : «si j’avais su que j’aurais un jour une histoire, je l’aurais choisie, j’aurais vécu avec plus de soin pour la faire belle et vraie en vue de me plaire. Maintenant, c’est trop tard». Plaire aussi à la postérité, devait-elle ajouter !!!
Vive le Sénégal éternel ! Dieu bénisse le Sénégal !
LA CONDAMNATION DE BOUALEM SANSAL OU L’OBSESSION DE MUSELER UN ECRIVAIN ICONOCLASTE
L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal a été condamné, le jeudi 27 mars 2025, à une peine de 5 ans de prison ferme et à une amende de 500 000 dinars (environ 3500 euros). C’est une forfaiture. C’est sa grande plume qui dérange
L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal a été condamné, le jeudi 27 mars 2025, à une peine de 5 ans de prison ferme et à une amende de 500 000 dinars (environ 3500 euros). On lui a reproché, entre autres, au bout d’un procès injuste, d’atteinte à l’unité et à l’économie nationales, d’outrages à un corps constitué (notamment l’Armée), de détention de vidéos et de publications menaçant la sécurité et la stabilité. C’est une forfaiture. C’est sa grande plume qui dérange.
L’on savait que son sort était déjà scellé. Le procès n’était rien d’autre qu’une farce. L’Algérie, qui a un sérieux problème avec son passé colonial, a décidé d’emprisonner un écrivain pour ses idées. Il semble que, en Algérie, la colonisation et la guerre de décolonisation hantent et traumatisent, empêchant ainsi la fécondation des possibles et la naissance de nouvelles utopies. Cette affaire, faut-il le rappeler, a exacerbé les tensions diplomatiques entre l’Algérie et la France, car l’auteur de 2084 : la fin du monde (Gallimard, 2015) a récemment acquis la nationalité française. L’écrivain Kamel Daoud -un autre indésirable d’Alger- disait que, aujourd’hui, pour être un Algérien authentique, il faut détester l’ancienne puissance coloniale. Les autorités ont développé cet imaginaire de la haine. De la vengeance.
Opa sur la liberté d’expression
La condamnation de Boualem Sansal constitue une attaque inacceptable contre la liberté d’expression et le droit fondamental des intellectuels de penser librement. Ce procès pour ses écrits ou ses prises de position est non seulement une tentative éhontée de museler une voix dissidente, mais aussi une entrave au débat d’idées, fondement de toute démocratie. Hommes de plume et citoyens attachés aux principes de liberté, nous dénonçons fermement cette injustice et appelons à la mobilisation contre cette censure ignominieuse, qui vise à étouffer toute pensée critique.
A travers la condamnation de Boualem Sansal, c’est tout un principe fondamental qui est mis à mal : celui de la liberté d’expression, de la pensée libre, de la résistance par la parole. Mais à chaque tentative de museler l’écrivain, ce dernier se redresse, plus fort, plus déterminé. A chaque injustice, à chaque censure, il répond par l’écrit. Et ce faisant, il unit les voix de tous ceux qui, partout dans le monde, résistent à l’oppression, à la violence, à l’injustice.
Ecrire est un art de résister
Dans les interstices de l’histoire humaine, une force silencieuse et tenace, tissée d’encre, de mémoire et d’audace, traverse les âges : l’écriture. Non celle qui se contente de satisfaire les attentes d’un lectorat mondain ou qui se plie aux contraintes du système académique, mais celle qui, dans son essence la plus pure, s’oppose aux systèmes d’oppression, qu’ils soient visibles ou insidieux. Cette écriture-là n’est pas un ornement ; elle est un acte de résistance. Elle dérange, ébranle et trouble les certitudes qui rassurent. Elle s’élève contre l’injustice, contre l’oubli, contre la tyrannie du conformisme. Elle résiste.
L’écrivain véritable, celui qui incarne l’éthique du courage intellectuel, est sans cesse placé au cœur d’une contradiction essentielle : oser dire, c’est risquer l’anathème, mais se taire, c’est consentir à l’oppression. Dans des contextes historiques et politiques précis, l’écriture devient un acte de rébellion, une manière de préserver sa dignité, une quête de vérité et de liberté face à l’arbitraire. Boualem Sansal a fait ce choix. Dans une démarche consciente, il a pris la plume comme une arme, un cri de résistance contre une réalité défigurée par la peur et l’injustice. Son œuvre, nourrie d’une lucidité implacable, devient une forme de subversion permanente. Ce n’est pas un simple délit d’opinion qu’il a commis, mais un crime symbolique : celui de l’écriture, celui de la vérité, celui de la parole libre.
L’histoire des Lettres universelles est marquée par ces figures de plume qui, comme Sansal, ont défié les pouvoirs dominants, qu’ils soient politiques ou idéologiques, au nom d’une vérité supérieure. Victor Hugo, depuis son exil à Guernesey, n’a cessé de harceler de ses pamphlets incendiaires Napoléon III, dénonçant l’injustice et l’oppression sous toutes ses formes. George Orwell, dans 1984, a esquissé le portrait d’une société dystopique où la langue est instrumentalisée pour briser l’individu et manipuler la vérité. Anna Akhmatova, contrainte de réciter ses poèmes à voix basse, dans la clandestinité, savait que chaque mot écrit pouvait lui coûter la vie. Ces écrivains ont compris que l’écriture n’est pas un simple exercice littéraire : elle est un instrument de dénonciation, un cri de résistance contre le totalitarisme et l’aliénation.
L’écriture est résistance, car elle est mémoire. Face à l’effacement programmé des événements, à la manipulation de l’Histoire et au révisionnisme institutionnel, elle devient le dernier rempart contre l’amnésie collective. A travers ses mots, l’écrivain garde la trace des injustices, conserve la mémoire de ce que les pouvoirs cherchent à effacer. C’est ce que fit Aimé Césaire avec son Discours sur le colonialisme, où il n’exposa pas seulement une analyse froide, mais dénonça un crime contre l’humanité. De même, Assia Djebar, en donnant voix aux femmes algériennes dans L’Amour, la fantasia, n’a pas seulement écrit une œuvre littéraire : elle a inscrit dans l’Histoire ces voix étouffées, ces vécus invisibilisés. Ces écrivains ont fait de leur écriture un acte politique, un acte de justice
Boualem Sansal, tout au long de son parcours, n’a cessé de faire ce choix : celui de décrire l’Algérie postcoloniale avec une franchise parfois insupportable pour les élites, mais aussi pour les puissances internationales qui, souvent, ferment les yeux sur les dérives du pouvoir. Ses romans sont des accusations, ses essais des révélations. Et c’est cette parole libre qui dérange. Ce n’est pas simplement un écrivain que l’on veut réduire au silence, mais la parole même. Ce n’est pas un homme que l’on emprisonne, mais la possibilité même de la pensée libre.
L’écrivain, même incarcéré, ne se laisse pas confiner. L’écriture, une fois lancée, ne se résigne pas. Les livres circulent malgré les interdictions, les idées se transmettent à travers les frontières, défiant les lois et les censeurs. C’est là le pouvoir réel de la littérature : sa capacité à transcender les régimes, à survivre à la censure et à l’oubli. Le livre, une fois dans le monde, ne meurt jamais. Il devient une archive vivante, un témoignage pérenne qui défie les tentatives d’effacement.
Ce qui se joue avec Boualem Sansal aujourd’hui n’est pas un incident isolé, mais le symptôme d’un phénomène plus vaste. Partout dans le monde, les écrivains, redevenus des figures menaçantes, sont l’objet de surveillance et de répression. Leur danger n’est pas leur pouvoir matériel, mais leur liberté intellectuelle. L’écrivain ne dépend de personne ; il n’a de comptes à rendre qu’à sa conscience. C’est cela qui fait de lui un ennemi des régimes autoritaires : il n’est pas un instrument entre les mains de ceux qui détiennent le pouvoir, il est la voix qui échappe, qui dénonce, qui résiste.
Les régimes qui persécutent les écrivains révèlent leur propre fragilité. Car ce qu’ils redoutent, ce n’est pas tant l’individu, mais la pensée qu’il incarne. Le mot écrit est plus puissant que les murs de la prison, plus inaltérable que les forces répressives. Il s’étend, il traverse les continents, il s’infiltre dans les esprits. Et c’est là l’essence de la littérature : elle perdure au-delà des tyrans. Chaque texte, chaque parole libre devient un acte de défi contre l’oubli.
Une plume ne se juge pas
L’écrivain n’écrit pas pour flatter les pouvoirs en place. Il écrit pour la vérité, pour la liberté, pour la justice. Il ouvre des brèches là où d’autres se résignent. Et c’est en cela qu’il incarne la résistance. Chaque mot qu’il écrit, chaque phrase qu’il forge, devient une arme. L’écrivain porte en lui la flamme de la liberté, une flamme qui ne se laisse pas éteindre. Même dans les ténèbres, cette braise continue de briller.
Boualem Sansal, par son courage et sa plume, incarne cette flamme. Il est un porteur de braise. Et chaque mot qu’il écrit est un défi lancé à l’oppression. Il nous rappelle que la pensée libre ne s’éteint jamais, qu’elle résiste, même sous les cendres les plus épaisses.
Boualem Sansal, à travers son œuvre, incarne cette quête permanente de vérité, ce défi lancé à l’ordre établi. Son écriture est une insurrection pacifique, une dénonciation sans fard des injustices. Aujourd’hui, il est persécuté pour avoir osé dire ce qu’il fallait dire. Mais son courage, loin de l’abattre, ne fait que renforcer la portée de ses mots. Ses écrits, tout comme ceux de nombreux écrivains avant lui, traverseront le temps. Ils seront lus, relus, étudiés, et dans chaque lecture, dans chaque réflexion, sa pensée continuera de vivre, d’éclairer, de libérer.
L’écriture, plus que jamais, est notre bien le plus précieux. Elle est notre mémoire, notre combat, notre révolte. Elle est l’âme du peuple, la voix des opprimés, le miroir de l’Histoire. Elle ne craint pas les dictatures, elle ne se laisse pas écraser sous les talons des tyrans. Elle est la braise qui, une fois allumée, continue de brûler dans le cœur des hommes, éclairant le chemin de la liberté. Cette braise, même menacée par le vent de l’oppression, résiste. Elle perdure, elle éclaire, elle libère.
Nous écrivons, donc, non seulement pour Boualem Sansal, mais pour tous ceux qui, à travers le monde, se battent pour que la pensée demeure libre. Nous écrivons pour la mémoire, pour la vérité, pour la justice. Et à chaque ligne, à chaque mot, nous affirmons notre refus de la soumission. Nous affirmons que l’écriture ne peut être jugée, elle doit être lue, défendue et préservée. Car c’est dans l’écriture que réside la véritable force de la liberté humaine.
Le monde des Lettres doit se mobiliser davantage contre cette forfaiture, en écrivant, car c’est dans l’écriture que se forgent les imaginaires de liberté, de paix et de justice. Somme toute, chaque écrivain est porteur d’une flamme qu’aucun vent de censure de la part de dirigeants ignares ne peut éteindre.
SIGNATAIRES :
1- Baba DIENG, Chroniqueur, Sénégal ; 2- Mama Ndiaw GOUMBALE, Ecrivain, poète et romancier, Maître en Droit Public, Université Gaston Berger, Sénégal ; 3- Mamadou CISS, Journaliste, Sénégal ; 4- Mamadou DIOP, Etudiant en Droit public, Université Gaston Berger, Sénégal ; 5- Mackiyou DIOUF, Etudiant en Science politique, Université Gaston Berger, Sénégal ; 6- Moussa THIMBO, Etudiant en Droit public, Université Gaston Berger, Sénégal ; 7- Ousmane BALDE, Etudiant en Droit privé, Ecrivain, Université Gaston Berger, Sénégal ; 8- Djibril BA, Université Gaston Berger, Sénégal ; 9- Pathé NDIAYE, Etudiant en Droit public, Poète, Université Cheikh Anta Diop, Sénégal ; 10- Seydou Barham DIOUF, Etudiant en Science Politique, Université Cheikh Anta Diop, Sénégal.
Par Baba DIENG
POLITIQUES DE L’INIMITIE
Politiques de l’inimitié (La Découverte, 2016) est le premier opus d’une trilogie du Camerounais Achille Mbembe – grand penseur de notre époque.
Politiques de l’inimitié (La Découverte, 2016) est le premier opus d’une trilogie du Camerounais Achille Mbembe – grand penseur de notre époque. Dans cet essai magnifique, et brûlant d’actualité, le lauréat du prestigieux prix Holberg 2024, y «explore cette relation particulière qui s’étend sans cesse et se reconfigure à l’échelle planétaire : la relation d’inimitié.» Il semble que la constitution d’un «monde hors relation», et littéralement fragmenté, est irréversible. Les différences, qui devraient être célébrées, deviennent des problèmes insolubles. Le réflexe d’appartenance à une tribu, qui est de l’ordre instinctif, domine celui de la conscience d’une humanité partagée et riche de sa diversité. En Europe, par exemple, les partis d’extrême-droite pullulent. Le rejet de l’Autre est un sport national. On cherche, par tous les moyens, à imputer aux étrangers la responsabilité des déconfitures des pouvoirs publics.
La figure de l’étranger, c’est-à-dire le «non-semblable», remplit une «fonction défensive» dans notre monde. Elle est celle qui n’appartient pas à la tribu, à la communauté ; celle dont la présence est nuisible, dissimulée ; celle qui se caractérise par son ubiquité, sa dangerosité, la menace permanente qu’elle représente. L’ennemi, qui «devrait être entendu dans son acception concrète et existentielle et non point comme une métaphore ou comme une abstraction vide et sans vie», est partout. Il représente un réel danger puisqu’il avance masqué, «sans visage, sans nom et sans lieu.» La menace, selon cet imaginaire d’un ennemi omniprésent, devient diffuse et mortifère. Elle justifie de ce fait toutes les violences exercées sur ceux que l’on considère comme nuisibles à la communauté – le musulman, la femme voilée, le Nègre, l’immigré, l’intrus, le juif, le réfugié, l’Arabe, pour n’en citer que quelques-uns.
La guerre, qui «aura été la matrice du développement technologique au cours des siècles précédents», est devenue le «sacrement de notre époque». Au sortir de la Grande Guerre, qui a été extrêmement traumatisante pour la mémoire collective, l’on s’est donné l’illusion de conjurer à jamais la guerre sous toutes ses formes. L’invasion de l’Ukraine par la Russie – qui est, aujourd’hui, dit-on, une menace pour la sécurité du Vieux Continent – est venue ébranler toutes les certitudes. Le mythe de la souveraineté, qui a longtemps été érigé en balustrade pour empêcher à certains États de s’attaquer à d’autres, est en train de s’effondrer. Mais, pis encore, la guerre se fait au milieu des populations civiles, causant ainsi d’innombrables victimes, principalement les femmes et les enfants.
Parallèlement à ces guerres entre armées régulières, surgissent, au sein des États, d’autres forces clandestines qui cherchent à affaiblir, voire à supplanter, ceux-ci. Il faut dire que la «guerre n’oppose plus nécessairement des armées à d’autres ou à des États souverains à d’autres. Les acteurs de la guerre sont, pêle-mêle, des États proprement constitués, des formations armées agissant ou non derrière le masque de l’État, des armées sans État mais contrôlant des territoires bien distincts, des États sans armées, des corporations ou compagnies concessionnaires chargées de l’extraction de ressources naturelles mais qui, en outre, se sont arrogé le droit de guerre.»
En Afrique subsaharienne, particulièrement, les factions terroristes – qui pèsent sur les «marchés régionaux de la terreur» du fait de leur «capacité de se déplacer sur des distances, d’entretenir des alliances changeantes, de privilégier des flux au détriment des territoires, et de négocier l’incertitude» – deviennent de plus en plus invincibles. Les pays de l’Aes, où les militaires ont arraché le pouvoir pour restaurer la sécurité, font face à cette montée en puissance meurtrière de ces groupes terroristes. Les victimes ne se comptent plus. Ces États dont les armées, squelettiques, et incapables d’assurer la sécurité des personnes et des biens, ont décidé de faire appel à des mercenaires. Mais en vain. Cette impuissance devant les terroristes constitue, au fond, un anéantissement de l’idée de politique, gage de l’ordre et du progrès dans une communauté.
La «sortie de la démocratie» est aussi un des faits majeurs de notre époque. La crise de la démocratie est mondiale, profonde. La période de l’euphorie démocratique, après la chute de l’Union des républiques socialistes soviétiques (Urss), dans les années 1990, relève désormais de l’histoire ancienne. Les démocraties, dans leur fonctionnement, deviennent de plus en plus illibérales – c’est l’historien et sociologue français Pierre Rosanvallon qui parle, non sans oxymore, de «démocratie illibérale.» Le rétrécissement des libertés se manifeste, entre autres, par la manipulation des règles du jeu démocratique, la répression des voix dissidentes, les diverses mesures visant à torpiller la presse, l’interdiction systématique des manifestations, le non-respect du Droit, etc. L’utilisation excessive de la violence témoigne, en outre, de la tendance illibérale des démocraties contemporaines. Celles-ci, précise-t-il, «ont intégré dans leur culture des formes de brutalité portées par une gamme d’institutions privées agissant en surplomb de l’État, qu’il s’agisse des corps francs, des milices et autres formations paramilitaires ou corporatistes.»
L’essai se termine par un appel à habiter le monde ensemble, à «passer constamment d’un lieu à un autre», à tisser, avec les autres, un «rapport de solidarité et de détachement.» Pour ce faire, il faut développer une politique de l’en-commun, qui permet à tous les peuples du monde de s’insérer pleinement dans les «Circulations», avec «l’éthique du passant», sans être détestés, traqués et éconduits. En réalité, cette utopie révèle plus d’une obligation qu’un choix puisque le «monde n’ayant plus de pharmacie unique, il s’agit donc, véritablement, si l’on veut échapper à la relation sans désir et au péril de la société d’inimitié, d’habiter sous tous ses faisceaux.»
La lecture de ce texte, in fine, rappelle, et fort malheureusement, la manière dont, chez nous, le parti Pastef a fait de la haine un instrument politique. Le leader de cet avatar du populisme, conformément à sa vision manichéenne et étriquée du monde, a toujours présenté ses adversaires comme de la vermine. Il a vendu de la haine à ses inconditionnels. L’inimitié, avec ces gens là, est devenue une valeur ; elle est célébrée. L’ennemi est celui qui s’oppose à la moraline sociale dominante. Le lien social commence à devenir celui de l’inimitié. Notre pays devient, progressivement, pour reprendre Amin Maalouf de l’Académie française, une «jungle de haines où tout le monde se sent victime et voit autour de lui que des prédateurs.» Les nantis, accusés de tous les maux de Nubie, sont les prédateurs qui, avec la complicité de «l’élite corrompue», sucent le sang de la populace.
POST-SCRIPTUM : Notre pays a perdu le président du Conseil constitutionnel, le juge Mamadou Badio Camara. Les Sénégalais retiendront de lui celui qui a eu les coudées assez franches pour dire non à l’autorité politique. La tenue de la Présidentielle a été salvatrice pour notre démocratie. Le président de la République Bassirou Diomaye Faye, contrairement à son Premier ministre qui a récemment traité cet éminent magistrat de «corrompu», a rendu hommage à un «grand serviteur de l’État.» Je m’incline devant la mémoire de ce grand Sénégalais.
Par Henriette Niang KANDE
QUI TROP EMBRASE, MAL ÉTEINT
L’art de gouverner, de militer ou d’informer ne devrait pas ressembler à un concours de pyrotechnie, mais à un exercice d’architecture : un peu de hauteur, beaucoup de méthode, et une solide charpente intellectuelle pour éviter que tout parte en fumée.
Dans le tumulte de la sphère politico-médiatique une vérité surgit : qui trop embrase, mal éteint. Dans ces moments où tout le monde veut mettre le feu pour mieux briller, il faudrait peut-être rappeler que l’éclat d’une flamme est aussi éphémère que dangereux. L’art de gouverner, de militer ou d’informer ne devrait pas ressembler à un concours de pyrotechnie, mais à un exercice d’architecture : un peu de hauteur, beaucoup de méthode, et une solide charpente intellectuelle pour éviter que tout parte en fumée.
La scène publique du moment est digne d’un western : regards foudroyants, promesses de tolérance zéro, invectives et « contre-invectives » qui claquent comme des coups de feu. Pourquoi construire quand on peut cramer ? Pourquoi dialoguer quand on peut hurler ? Pourquoi argumenter quand on peut incendier ? À chaque coin de débat, un bûcher est dressé. Un tweet malheureux ? Feu. Une déclaration maladroite ? Feu. Une opinion contraire ou dissidente ? Feu. Doit-on s’attendre à un déluge de napalm en prime ? A force de jouer avec l’allumette de la surenchère, certains finiront par se brûler eux-mêmes, et avec eux, tout espoir d’un débat lucide.
Le gouvernement, lui, n’est pas en reste. Il embrase à coups de décisions expéditives, de menaces à peine voilées et de discours enflammés sur la justice et les libertés. Il allume une plateforme numérique de régulation pour la presse. Il enflamme des mesures pour « encadrer » la liberté d’informer. Et convoque pour garder à vue, au nom de l’ordre public. Une forme de bûcher, sans bois ni flamme, Et pour couronner le tout, des prises de parole publique aux tons dramatiques, dignes d’un scénario de film catastrophe, où l'on brandit des réformes comme un extincteur miraculeux.
Et les médias ? Certains jouent les sentinelles, d’autres les incendiaires. Une info posée, vérifiée et nuancée ? Peu vendeur. Une phrase sortie de son contexte, une photo bien cadrée, une fausse exclusivité ? Là, on a du combustible. La concurrence pousse à la pyromanie éditoriale : le scoop avant la vérité, l’émotion avant la raison, le clash avant l’analyse. Les plateaux télé deviennent des barbecues géants où l’on grille à petit feu du responsable politique, qu’il appartienne ou pas à la majorité, du magistrat, de l’homme d’affaire (des affaires), du confrère…. Les réseaux sociaux ? Des champs de bataille numériques où les clashs font office de torches. Et pendant que les journalistes indépendants tentent de jouer les pompiers, d’autres arborent fièrement le casque de l’outrance pour booster leurs vues. Résultat : on distingue mal, la fumée du feu. Et que dire des éditorialistes pyrophiles ?
Ceux qui, à la moindre étincelle, sortent leur plume comme d’autres dégainent un lance-flammes. Le moindre mot de travers devient brasier, le plus petit froncement de sourcil est érigé en bûcher de la pensée et de la culture démocratique. Sur les plateaux télé ou dans les studios radio, ce ne sont pas des idées qu’on échange, mais des cocktails Molotov rhétoriques. Sur certains sites devenus casernes d’incendie improvisées, zones de départ de feu, « plus ça chauffe », plus ça plait. Chacun jouant au leader de l’allumette. L’analyse ? Réduite en cendres. Puis, tout retombe en fumée, laissant les lecteurs, les téléspectateurs ou les internautes avec une légère odeur de poudre dans les marines.
Le plus savoureux, c’est que ceux qui ont craqué l’allumette en premier, multiplient les prises de parole pour dire que « les allumettes, c’est dangereux », et appellent au dialogue entre deux braséros lancés sur leurs opposants. La contradiction ? Aucune, voyons. C’est de la stratégie de communication. L’art de hurler au feu tout en versant discrètement un litre d’essence sur la nappe.
Le plus ironique, dans ce climat inflammable, c’est qu’on finit par oublier la question initiale : pourquoi allume-t-on tous ces feux ? Pour cacher l’absence de solutions ? Pour remplir un vide idéologique avec du bruit ? Ou tout simplement, parce que c’est devenu un réflexe pavlovien : dès qu’un problème surgit, les uns accusent, les autres ripostent. Que reste-t-il de l’incendie dont on croyait être la seule manière d’éclairer l’opinion et qu’on a pris pour un feu d’artifice passé ? De la suie, et de la désolation. Et au milieu de cette combustion généralisée, qu’on ne s’étonne pas que les extincteurs institutionnels puissent fondre sous la chaleur.
Qui trop embraSe, mal éTeint. Dans ce théâtre des vanités, personne ne semble avoir prévu de plan d’évacuation. À force de faire monter la température, les institutions suffoquent, les citoyens transpirent, et les extincteurs finiront par céder à la chaleur. Parce qu’en politique comme en mathématiques, les soustractions s’additionnent. Ainsi, on finira en haut d’un tas de cendres, à contempler les restes fumants d’un pays dont des citoyens croyaient encore au feu sacré du débat d’idées.
Allez, sur ces mots, je souffle un bon coup… et je garde un seau d’eau à portée de main. Parce que dans cette époque inflammable, même les métaphores peuvent prendre feu.
PAR SIDY DIOP
LE SWING D’ABDOUL MBAYE
Il faut dire que la politique n’a jamais été son fairway préféré. Technocrate raffiné, homme de dossiers, de chiffres, de tableaux Excel, Abdoul Mbaye semblait souvent mal chaussé pour le terrain accidenté des arènes politiques...
Abdoul Mbaye quitte la présidence de l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail. Il n’abandonne pas tout à fait le navire, non : il devient président d’honneur. Une belle formule, douce comme un adieu sans défaite, un retrait sans bruit. Désormais, il pourra s’adonner à sa passion, le golf, où l’on choisit ses trajectoires, où l’on évite les flaques avec plus d’aisance qu’en banlieue inondée.
Il faut dire que la politique n’a jamais été son fairway préféré. Technocrate raffiné, homme de dossiers, de chiffres, de tableaux Excel, Abdoul Mbaye semblait souvent mal chaussé pour le terrain accidenté des arènes politiques. L’image lui colle à la peau : celle de l’ancien Premier ministre arpentant les ruelles inondées de Pikine Wakhinane, mocassins blancs immaculés aux pieds, comme un invité mal orienté à une garden-party. Son successeur, Ibrahima Thiam, hérite d’un parti sobrement actif, sans fracas ni scandales, mais aussi sans grande percée. Sa tâche ? Ramener l’ACT dans le jeu, trouver le bon tempo, et peut-être, un jour, le bon swing politique. Pendant ce temps, Abdoul Mbaye affinera le sien sur les greens, là où l’on parle bas, où l’on vise loin et où l’on espère que la balle retombe, enfin, dans le trou.