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12 avril 2025
Politique
LES JEUNES BRISENT LE PLAFOND DE VERRE
Agés respectivement de 50 ans, 44 ans, et 42 ans, Ousmane Sonko, Bassirou Diomaye Faye, et El Malick Ndiaye incarnent aujourd’hui l’élite dirigeante du Sénégal. Ils ont ainsi mis à la retraite toute une génération d’acteurs politiques
Agés respectivement de 50 ans, 44 ans, et 42 ans, Ousmane Sonko, Bassirou Diomaye Faye, et El Malick Ndiaye incarnent aujourd’hui l’élite dirigeante du Sénégal. ils ont ainsi mis à la retraite toute une génération d’acteurs politiques qui voulait faire encore de la résistance
Jamais dans l’histoire du Sénégal, on n’a eu en même temps de si jeunes Présidents d’institutions. Bassirou Diomaye Faye a été porté à la magistrature suprême, à 44 ans, à l’issue de la présidentielle du 24 mars 2024. Une fois au pouvoir, il nomme son mentor en politique, Ousmane Sonko, 50 ans, Premier ministre. Neuf mois après, le nouveau régime organise des élections anticipées qu’il remporte haut la main. Avec 54, 97% de l’électorat, PASTEF se retrouve avec 130 députés à l’hémicycle. Ce qui lui a permis d’élire El Malick Ndiaye, à 42 ans, Président de l’Assemblée nationale. Ces trois hommes ont en commun d’être tous issus de PASTEF, le parti au pouvoir ; et personne parmi les trois ne dépasse la cinquantaine. Ils sont relativement jeunes comparés à ceux qui, jusque-là, occupaient ces positions-là au sein de l’architecture institutionnelle.
Avec ces nouveaux hommes forts de la République, une nouvelle ère politique s’ouvre au Sénégal.
Mieux, l’alternance générationnelle est définitivement actée. La présence de ces jeunes au sommet de nos institutions est perçue d’ailleurs par certains observateurs comme une exception. Or, cela doit être la norme au regard de la proportion des jeunes dans la population sénégalaise. En effet, selon les dernières statistiques de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), les personnes âgées de moins de 35 ans représentent 72,2% de la population.
Souvent, on disait que les jeunes n’étaient pas trop engagés en politique, qu’ils n’étaient pas suffisamment représentés dans les institutions ou qu’ils jouaient les seconds rôles dans les formations politiques. Mais avec l’avènement PASTEF, la tendance a été renversée. Les Patriotes ont à vrai dire bouleversé les codes établis dans les cercles politiques sénégalais.
«CETTE ALTERNANCE GENERATIONNELLE POURRAIT OUVRIR LA VOIE A UN CHANGEMENT SYSTEMIQUE …»
Cette alternance générationnelle réclamée depuis longtemps vient ainsi à son heure. En effet, les jeunes se voient facilement en Ousmane Sonko, Bassirou Diomaye Faye, ou El Malick Ndiaye. Et ces nouveaux leaders d’une autre génération ont plus de facilité à communiquer avec la jeunesse et à comprendre ses préoccupations.
Aussi, dans ce monde en perpétuel mutation, il est plus facile pour ces leaders Patriotes de se mouvoir dans le concert des nations. Ils sont en effet branchés sur les avancées technologiques et ils ne nourrissent aucun complexe d'infériorité envers les pays occidentaux ou les partenaires internationaux.
Par contre, ils ne sont pas très expérimentés dans la gestion d’un Etat. Ils sont taxés à tort ou à raison de stagiaires. Il demeure évident cependant qu’ils sont résolument déterminés à changer le pays avec tous les risques que cela peut comporter en termes d’engagement ou de prise de décision politique.
En outre, le spécialiste des questions politiques et de développement en Afrique de l'Ouest, Ousmane Faye a publié récemment une tribune pour dire que le Sénégal se trouve à un moment décisif de son histoire, marqué par l’émergence d’une nouvelle génération d’acteurs politiques. Selon lui, cette alternance générationnelle pourrait ouvrir la voie à un changement systémique attendu depuis longtemps par le peuple, qui exige des élus des actions concrètes et transparentes. Les jeunes, particulièrement impatients, dit-il, aspirent à un avenir meilleur dans leur pays, sans envisager de migrer vers d’autres horizons. “Ils ont besoin de formation et de compétences pour pouvoir eux aussi assurer l’élite de transition à venir. Ils représentent l’avenir du Sénégal et ont soif de changement”, a-t-il déclaré.
Toutefois, il souligne que la concrétisation de ces aspirations dépend, d’une part, largement de la volonté du gouvernement à promouvoir le progrès, surtout dans un contexte économique favorable, marqué par l’exploitation du gaz et du pétrole, qui propulsera le pays parmi les nations bénéficiant de ces ressources. D’autre part, ajoute-t-il, le changement tant attendu ne pourra avoir lieu que dans un environnement où la justice et les institutions sont indépendantes et justes.
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BARTH ÉVINCÉ DE L'HÉMICYCLE
Malgré les appels d'Alioune Tine dénonçant "un coup dur pour la démocratie sénégalaise" et ceux de Seydi Gassama plaidant pour "la voix forte et discordante" du maire de Dakar, ce dernier est déchu de son mandat de député
(SenePlus) - L'Assemblée nationale a officiellement prononcé ce vendredi 6 décembre 2024, la radiation de Barthélémy Dias de son mandat de député. Cette décision est intervenue lors de la séance plénière consacrée à l'installation des 14 commissions parlementaires.
Le président de l'Assemblée nationale, El Malick Ndiaye, a formellement annoncé la nouvelle devant l'hémicycle : "Sur demande du ministre de la Justice, garde des Sceaux et en application des dispositions de l'Article 61 de la Constitution, dernier alinéa et de l'Article 51 de notre Règlement intérieur, le bureau de l'Assemblée nationale, réuni le jeudi 5 décembre 2024, a procédé à la radiation de Barthélémy Dias."
Cette radiation trouve son origine dans l'affaire Ndiaga Diouf, un dossier judiciaire qui poursuit le maire de Dakar depuis plus d'une décennie. En effet, la Cour suprême du Sénégal, par son arrêt n°76 du 22 décembre 2023, avait définitivement confirmé la condamnation de Barthélémy Dias à deux ans d'emprisonnement, dont six mois ferme, pour "coups mortels" sur Ndiaga Diouf, ainsi qu'au paiement de 25 millions de francs CFA de dommages et intérêts.
Cette situation juridique complexe soulève d'importantes questions sur l'éligibilité de l'ancien député. Comme l'explique Mamadou Salif Sané, enseignant-chercheur en droit public cité par Le Soleil, Barthélémy Dias "ne fait plus partie du corps électoral, c'est-à-dire des personnes qui bénéficient juridiquement du droit de vote, même s'il n'est pas radié de la liste."
Avant cette radiation, plusieurs voix s'étaient élevées pour défendre le mandat de Dias. Alioune Tine, figure respectée de la société civile, avait notamment déclaré : "Ce serait un coup dur pour la démocratie sénégalaise que de chercher à liquider politiquement Barthélémy Dias." Dans le même sens, Seydi Gassama, directeur d'Amnesty International Sénégal, avait souligné que "l'Assemblée nationale a besoin, pour la qualité des débats, de la voix forte et discordante de Barthélémy Dias."
Il est à noter que le désormais ex-député n'avait pas assisté à la cérémonie d'installation des députés le 2 décembre, étant présent à Saint-Louis pour soutenir ses gardes du corps impliqués dans une affaire de violences électorales.
Cette radiation constitue un nouveau chapitre dans la vie politique mouvementée de Barthélémy Dias, figure majeure de l'opposition et tête de liste de la coalition Samm Sa Kaddu, qui conserve néanmoins son poste stratégique de maire de Dakar.
LOI SUR LA PARITÉ, UN TEXTE INTERPRÉTÉ AU GRÉ DES INTÉRÊTS POLITIQUES
Le leadership féminin en politique est-il tributaire de celui des hommes ? C’est à cela que ressemble le coup de théâtre qui vient de se jouer, le 2 décembre dernier, lors de l’installation de l’Assemblée nationale composée de 41% de femmes
Le groupe parlementaire Takku Wallu Sénégal se voit privé d’un poste de vice-président pour non-respect de la parité. Pourtant, il leur suffisait de présenter une femme ou au groupe Pastef de reconstituer la composition de sa liste pour se conformer à la législation en vigueur. il faut aussi relever que, dans plusieurs cas, la justice a été obligée d’intervenir pour faire respecter cette disposition.
Le leadership féminin en politique est-il tributaire de celui des hommes ? C’est à cela que ressemble le coup de théâtre qui vient de se jouer, le 2 décembre dernier, lors de l’installation de l’Assemblée nationale composée de 41% de femmes. Il s’est déroulé le 2 décembre dernier lors de la première session de la nouvelle législature. En effet, faute de présenter une femme au poste de huitième vice-président de l’Assemblée nationale, le seul groupe parlementaire de l’Opposition Takku Wallu s’est vu privé d’un siège qui, pourtant, lui revenait de droit. En conséquence, le groupe de la majorité a décidé de s’accaparer du poste en présentant une femme.
Dans un hémicycle éminemment politique, les deux groupes parlementaires se sont donnés en spectacle en se rejetant la balle. Ils s’accusent mutuellement de violation des dispositions de la loi de 2010 sur la parité. « Le poste de vice-président que nous avons, nous le tenons de la loi. Nous avons fait notre proposition pour le poste de vice-président. Il vous revient d’en prendre acte quelles que puissent être les conséquences. La proposition a été bien faite et bien pensée avant de la faire. Nous vous demandons de la soumettre au vote », a déclaré la présidente du groupe parlementaire Takku Wallu.
Dans sa réplique, le chef de file de la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale rétorque : « Nous avons déposé notre liste en respectant la parité. Nous avons demandé à nos collègues de déposer leur candidature. Mais, je ne sais pourquoi ils s’obstinent à proposer une candidature qui ne respecte pas la parité. Il y a une réelle volonté de bloquer les travaux de l’Assemblée nationale. Si vous continuez à bloquer les travaux de l’Assemblée nationale, la majorité va présenter une candidature pour compléter le bureau ». Dans la foulée, le groupe de l’opposition qui a boudé les travaux de la plénière a annoncé un recours devant la justice pour amener l’Assemblée nationale à se conformer à la loi.
Mais derrière cette polémique de non-respect de la parité se cache un réel problème de reconnaissance du leadership politique féminin. En effet, à l’Assemblée nationale, l’article 14 du règlement intérieur qui traite de l’élection des membres du bureau est sujet souvent à des interprétations avec des connotations politiques. Il ressort de cet article que : « Les vice-présidents, les secrétaires élus et les questeurs sont élus au scrutin de liste pour chaque fonction respectant la parité homme-femme, conformément aux dispositions de la loi 2010- 11 du 28 mai 2010 »
Mais, dans la pratique parlementaire, la parité semble ne tenir que d’un seul registre homme-femme et jamais l’inverse. Et pour preuve, le débat sur la parité qui se pose très régulièrement à l'Assemblée nationale. Les tenants du Parlement ont tendance à sortir le président de l’Assemblée nationale du champ d’application de la loi sur la parité. Ils font souvent une dichotomie entre le président de l’Assemblée nationale élu pour toute la législature et les membres du bureau élus pour la durée de la législature, c’est-à-dire un renouvellement par an. « C’est une erreur de penser que la parité ne s’applique qu’à partir de l'élection des vice-présidents », estime Me Mamadou Diouf, Doctorant en droit public dans une tribune publiée dans les médias. Le président de l’Assemblée nationale, ajoute-t-il, étant membre du bureau, doit avoir une première vice-présidente à la place du sieur Ismaila Diallo. « Cette mauvaise interprétation qui voudrait écarter le chef de l’institution de l’application de la parité est balayée constamment par la jurisprudence sénégalaise. La lecture de l’article 1er de la loi de 2010, le bureau de l’Assemblée nationale y compris le Président(voir l’article 13 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale), doit être intégralement et alternativement composé d’un homme et d’une femme. Mieux, le décret n°2011-819 du 16 juin 2011 portant application de la loi sur la parité, en son article 02, énumère l’Assemblée nationale, son bureau et ses commissions parmi les institutions dans lesquelles la parité doit être respectée », a-t-il soutenu.
Dans sa tribune, Me Mamadou Diouf s’est penché aussi sur l’argument faisant une dichotomie entre le président de l’Assemblée et les membres du bureau. « La cour d’appel de Kaolack, qui avait fait une mauvaise interprétation de cette loi en arguant que le maire étant élu au suffrage universel n’était pas concerné par l’application de la parité, a vu son arrêt cassé et annulé par la cour suprême du Sénégal. En effet, dans l’arrêt n°47 du 27 octobre 2022, Cheikh Bitèye et autres contre le maire de Fatick, la chambre administrative de la Cour suprême a déclaré que le maire, étant le premier membre du bureau municipal (comme le président de l’Assemblée nationale), est soumis à l’exigence de la parité absolue et que même son élection au suffrage universel ne saurait constituer un obstacle à l’application de la loi sur la parité », a rappelé le juge.
Outre l’Assemblée nationale, le respect de la parité se pose également dans la constitution des bureaux municipaux. Souvent, c’est la justice qui en dernier ressort fait plier les hommes politiques sur fond de recours pour les amener à se conformer à la loi. C’est le cas notamment en 2022 avec beaucoup de décisions rendues par les cours d’appel qui ont ordonné la dissolution et la reconstitution de tous les bureaux ayant violé la loi sur la parité. A Dakar, par exemple, les bureaux municipaux des Hlm, de Biscuiterie, de Dieuppeul-Derklé, de Plateau, de la Ville de Dakar, de Diamniadio, de Malika entre autres ont été tout simplement dissous. Face aux bravades des hommes politiques, la justice a été souvent un rempart pour faire rayonner le leadership féminin en politique.
VERS LA RÉVOCATION DE BARTHÉLÉMY DIAS ?
Le député-maire de Dakar fait face à une nouvelle épreuve découlant de l'affaire Ndiaga Diouf. Le bureau de l'Assemblée nationale a été saisi pour enclencher la procédure de révocation de son mandat parlementaire
Condamné de manière définitive dans l’affaire Ndiaga Diouf, le député Barthélémy Dias est sur siège éjectable. Une procédure de révocation de son mandat à l’Assemblée nationale a été déclenchée, en application des articles 51 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale et 61 de la Constitution.
Aussitôt élu, aussitôt révoqué ? Le maire de Dakar et tête de liste nationale de la coalition « Jamm ak njarign » est sur le point de perdre son poste de député à l’Assemblée nationale. Et pour cause, selon des informations relayées par la presse et confirmées à lesoleil.sn par une source parlementaire, le bureau de ladite institution aurait été saisi, depuis mardi, pour la révocation du responsable de « Taxawu Senegaal ». Ce dernier est donc rattrapé par l’affaire Ndiaga Diouf, tué par balle, en 2011n devant la mairie de Mermoz-Sacré-Cœur, dont il était le maire à l’époque.
En effet, par l’arrêt n°76 rendu par la Cour suprême du Sénégal le 22 décembre 2023, le pourvoi de Barthélemy Toye Dias a été rejeté et sa condamnation par la Cour d’appel de Dakar, à une peine de deux ans, dont six mois de prison ferme pour « coups mortels sur le sieur Ndiaga Diouf », ainsi que l’obligation de payer des dommages et intérêts de 25 millions de francs CFA à la famille de la victime, a été confirmée. En d’autres termes, sa condamnation est devenue définitive.
Cela prive M. Dias de son droit d’éligibilité, selon des juristes, qui indiquent qu’une telle condamnation entraîne de plein droit la déchéance des droits civils et politiques de Barthélemy Dias, l’empêchant ainsi de s’inscrire sur la liste électorale, conformément à l’article L29 du Code électoral. L’article LO 160 dudit code va plus loin : « sont inéligibles les individus condamnés, lorsque leur condamnation empêche, de manière définitive, leur inscription sur une liste électorale. Les individus dont la condamnation empêche temporairement l’inscription sur une liste électorale sont inéligibles pendant une période double de celle durant laquelle ils ne peuvent être inscrits sur la liste électorale. Sont, en outre, inéligibles : les individus privés, par décision judiciaire, de leur droit d’éligibilité en application des lois qui autorisent cette privation ; les personnes placées sous protection de justice ou pourvues d’un tuteur ou d’un curateur ».
Or, selon Mamadou Salif Sané, enseignant-chercheur en droit public, le maire de Dakar « ne fait plus partie du corps électoral, c’est-à-dire des personnes qui bénéficient juridiquement du droit de vote, même s’il n’est pas radié de la liste ». Il est frappé d’une incapacité électorale qui le prive du droit de vote et de l’éligibilité. La perte de sa qualité d’électeur découle de l’article 29 du Code électoral, qui précise que « ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale ceux condamnés à plus de trois mois d’emprisonnement sans sursis ou à une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à six mois avec sursis ».
Cependant, dans une décision rendue le 10 octobre 2024, les « 7 sages » du Conseil constitutionnel ont jugé irrecevable le recours introduit par Serigne Modou Dièye, mandataire de la coalition And Liggey Sunu Reew (Alsr), contre la candidature de Barthélemy Dias, au motif que seul le ministre en charge des élections (ministre de l’Intérieur, ndlr) peut saisir le Conseil constitutionnel pour statuer sur l’inéligibilité d’un candidat.
Il faut toutefois signaler que, même si le député est élu, il peut être déchu de son poste. C’est en substance ce qui est prévu dans les dispositions de l’article LO 162 du Code électoral : « sera déchu de plein droit de son mandat de député celui dont l’inéligibilité se révélera après la proclamation des résultats et l’expiration du délai de recours, ou qui, pendant son mandat, se trouvera dans un cas d’inéligibilité prévu par le présent code ». Et c’est cette même disposition qui a été évoquée. Cette perte de la qualité de député est confortée par l’article 51 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale et l’article 61 de la Constitution, qui disposent que le député qui fait l’objet d’une condamnation pénale est radié de la liste des députés de l’Assemblée nationale sur demande du ministre de la Justice.
Pour rappel, Barthélémy Dias n’a pas assisté à la cérémonie d’installation des députés, le 2 décembre dernier. Ce jour-là, il s’est rendu à Saint-Louis pour apporter un soutien moral à ses dizaines de gardes du corps, qui devaient être jugés dans le cadre des violences électorales survenues dans la vieille ville.
AVIS CONTROVERSÉS À PROPOS DE L'ABROGATION DE LA LOI D’AMNISTIE
Le débat met en lumière un dilemme fondamental : comment concilier la paix sociale avec les droits des victimes, tout en respectant les principes du droit international ?
Votée le 6 mars 2024 et promulguée le 13 mars, la loi portant amnistie générale des actes de violence liés à la politique, survenus entre février 2021 et février 2024, continue de créer la polémique. Son éventuelle abrogation divise les juristes et même la classe politique.
Le 6 mars 2024, l’Assemblée nationale a voté une loi d’amnistie. Celle-ci couvre « tous les faits susceptibles de revêtir la qualification d’infraction criminelle ou correctionnelle, commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, tant au Sénégal qu’à l’étranger, se rapportant à des manifestations ou ayant des motivations politiques, y compris celles faites par tous supports de communication, que leurs auteurs aient été jugés ou non ».
Depuis sa promulgation, et bien avant même, elle suscite une vive polémique. Car, même si elle est passée comme lettre à la poste, avec 95 députés qui ont voté pour, 49 contre et 2 abstentions, beaucoup la contestent. Certains plaident même pour son abrogation. D’ailleurs, l’actuel parti au pouvoir, le Pastef, qui était dans l’opposition à l’époque, était contre. Une position que continue de défendre la formation politique. Durant la campagne électorale pour les législatives anticipées, Ousmane Sonko avait promis son abrogation. Le Premier ministre, qui revenait sur les événements de mars 2021 et de juin 2023 qui s’étaient soldés par près d’une centaine de morts, avait déclaré : « Ces victimes ne peuvent pas être oubliées. C’est pourquoi, le 17 novembre, après avoir conquis une majorité écrasante à l’Assemblée nationale, l’abrogation de la loi d’amnistie fera partie des premières décisions ».
Le débat a été ravivé la semaine dernière par celui qui était encore ministre des Infrastructures et des Transports terrestres et aériens, El Malick Ndiaye, devenu, depuis, président de l’Assemblée nationale. Il avait préconisé une abrogation partielle. « Je ne suis, certes, pas juriste, mais une abrogation partielle serait mieux, car je pense que les crimes de sang ne doivent pas être amnistiés. De même, des gens qui n’ont absolument rien fait n’ont pas à être amnistiés. Je ne peux citer tous les cas, mais ils sont nombreux. À ces gens-là, justice doit être rendue », avait-il indiqué lors de l’émission « Débat de Fond » de la 2stv du mercredi 27 novembre 2024.
Cependant, de l’avis d’un magistrat qui a gardé l’anonymat, on ne peut pas parler d’abrogation partielle dans la mesure où l’on amnistie des faits et non des personnes. Toutefois, il estime que « si d’aventure on abroge la loi, ce sera des poursuites ciblées ».
La position de Me Aïssata Tall Sall, ministre de la Justice au moment du vote de la loi, est plus catégorique. L’ancienne Garde des Sceaux évoque des obstacles liés à l’abrogation. « Ils n’ont qu’à essayer d’abroger la loi d’amnistie. C’est beaucoup plus facile à dire qu’à faire et c’est une spécialiste qui vous parle, sous le contrôle de mes confrères. En droit pénal, il y a ce qu’on appelle l’intangibilité des droits acquis et la non-rétroactivité des lois. Certaines personnes bénéficient de la loi d’amnistie, particulièrement l’actuel président de la République et son Premier ministre, qui sont sortis de prison grâce à cette loi. Et la non-rétroactivité ne permet pas à une loi qui abroge cette loi d’amnistie de rétroagir et d’aller chercher des actes couverts par celle-ci », a déclaré la nouvelle parlementaire lors d’une conférence de presse des élus de la coalition « Takku Wallu Sénégal ».
La jurisprudence internationale comme panacée ?
Son argumentaire est battu en brèche par Amadou Bâ de Pastef. « Les crimes du régime Macky ne peuvent être couverts ni par l’immunité, ni par l’imprescriptibilité, ni par l’impunité. Ce sont, pour le coup, des crimes et délits intangibles, car pouvant relever de ceux définis et punis dans le statut de Rome sur la Cour pénale internationale et qui ne peuvent être couverts par aucune loi d’amnistie, d’amnésie ou d’immunité », tranche catégoriquement le député.
Poursuivant, il ajoute : « Quand on sortira les rapports d’autopsie et de non-autopsie des 80 manifestants non armés, démontrant qu’ils ont été savamment exécutés de façon coordonnée et grâce à des moyens de répression d’État spécialement achetés à cette fin ; qu’on démontrera que le procureur, le ministre de la Justice et le président de la République ont refusé ou empêché l’ouverture d’enquêtes, et ont précipité les enterrements pour cacher la vérité aux familles ; qu’il sera établi que toutes les victimes (morts, blessés, emprisonnés, exilés) appartiennent à un même parti politique, et qu’elles étaient traquées sur l’ensemble du territoire de façon systématique ; aucune loi d’amnistie ne pourra empêcher que les auteurs de ces crimes de masse échappent aux fourches caudines de la justice », a-t-il écrit sur sa page Facebook. L’ancien ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Ismaïla Madior Fall, a émis un avis contraire. « Après la controverse juridico-politique sur « l’abrogabilité » ou la « révocabilité » ou encore l’annulation de la loi sur l’amnistie de 2024, il conviendra de faire place au juge constitutionnel qui pourra se prononcer bien avant ou juste après l’adoption de ladite loi. Il ne restera qu’à s’incliner devant le verdict des Sages », a déclaré l’ancien ministre de la Justice.
Juriste publiciste, Amadou Guèye, président du mouvement « Yitté », a soutenu dans une tribune qu’il y a « une part de manipulation ou d’ignorance dans les propos de Me Sall Aïssata Tall ». Selon son argumentaire, « le premier véritable problème de cette loi d’amnistie du régime précédent est qu’elle couvre des faits non jugés. Cela blesse à jamais les victimes et freine la sécurité juridique ». Ainsi, M. Guèye estime que « ne serait-ce que sous cet angle, elle mérite d’être modifiée, ou tout simplement abrogée, même de façon partielle ».
À son avis, il n’y a aucun obstacle à l’abrogation et que « la pire insécurité serait de laisser à tout régime politique la latitude, ou la malveillance, de pouvoir commettre autant de crimes, et même de génocide, pourquoi pas, sans pouvoir être poursuivi, juste sous la tutelle de la sécurité juridique ». Car, poursuit le juriste, « il suffira juste de voter « sa loi d’amnistie » pour se protéger et par la suite invoquer le principe de la non-rétroactivité entériné par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (Ddhc) de 1789, auquel (principe) la loi n’assigne que les trois exceptions connues de tous, à savoir les lois pénales plus douces (principe de la rétroactivité in mitius), les lois interprétatives et les lois civiles expressément rétroactives. Ainsi, chaque régime aura « sa loi d’amnistie » pour échapper à toute forme de poursuite ».
Le directeur de cabinet du ministre de la Justice du Sénégal de 2017 à 2019, le Pr Meïssa Diakhaté, a rappelé, dans une contribution, que « des États comme le Sénégal ont volontairement souscrit à des engagements internationaux qui consacrent le principe de l’ »imprescriptibilité » de certaines infractions graves au sens de l’article 29 du Statut de Rome de la Cour pénale international (Cpi). Il a cité, à titre illustratif, « le crime contre l’humanité en cas de torture ou d’actes inhumains causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique et psychique inspirés par des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste ».
Même s’il partage le même avis que le Pr Diakhaté, Me Amadou Aly Kane pense qu’il y a des obstacles à l’abrogation. « En votant la loi, le législateur était dans une logique d’oublier des faits précis. Donc, il est interdit de parler des faits qui ont été amnistiés or, on ne peut pas abroger la loi sans débat. Le faire, ce serait une violation de la loi », a-t-il argué. Toutefois, la robe noire déclare qu’il est bien possible d’exclure certains faits de l’amnistie. Il s’agit, selon lui, de tout ce qui touche les crimes internationaux, notamment les actes de torture, qui sont des infractions imprescriptibles et qui ne peuvent pas faire l’objet d’amnistie. L’avocat militant des droits humains explique que le champ de l’amnistie peut être restreint par la jurisprudence nationale ou communautaire. À ce propos, Me Kane renseigne qu’une victime de torture peut toujours porter plainte au niveau de l’ordre juridique international. Dans ce cas, dans l’examen des faits, la justice peut considérer qu’il y a des faits qui échappent à l’amnistie.
« Cela a été le cas des victimes des dictatures en Amérique latine après l’adoption de lois auto-amnistiantes par les généraux au pouvoir en son temps. Ces victimes avaient saisi la Cour interaméricaine des droits de l’homme qui a considéré que ces lois ne pouvaient pas couvrir les violations graves des droits de l’homme », illustre Me Kane. Il est conforté par le juriste Amadou Guèye qui a évoqué une jurisprudence de la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l’homme, dans sa décision relative à l’affaire Marguš c. Croatie (27 mai 2014). « La juridiction a estimé que les « poursuites pénales portant sur des crimes de torture et de mauvais traitements ne devaient faire l’objet d’aucune prescription et qu’aucune amnistie ne devait être tolérée à leur endroit, et que les mesures d’amnistie étaient généralement incompatibles avec l’obligation d’enquêter sur les infractions graves, notamment les crimes de guerre, et de poursuivre les auteurs présumés » », a-t-il indiqué.
En somme, pour le président du mouvement « Yitté », « l’amnistie neutralise toute idée de poursuite, certes, mais, en vertu du principe du parallélisme des formes, le même législateur qui la vote peut l’abroger ». Cela, d’autant plus que, a argué M. Guèye, « celle en l’espèce est tristement impertinente, car protégeant une dizaine de Sénégalais au détriment de milliers d’autres (plus de 80 morts, des disparus, des handicapés…) ».
Mécanisme de réparation pour les victimes préconisé
Abrogation ou pas, Me Baba Diop est sceptique quant au sort des victimes. L’avocat à la Cour craint un problème de mise en œuvre. « Ce sera compliqué d’engager à nouveau des poursuites sur le plan procédural et pénal », pense-t-il. Il considère qu’abroger ne peut pas régler le problème des événements de juin 2021 et de mars 2023. « C’est dommage ! C’est une grosse erreur des politiciens qui ne pourrait jamais être réparée », a lâché Me Diop.
Cependant, Me Amadou Kane estime que tout n’est pas encore perdu. Il a plaidé pour la mise en place d’un mécanisme de réparation des préjudices causés à toutes les victimes. « Sans l’institution de ce mécanisme, notamment un fonds, un fort sentiment d’arbitraire ou de totale impunité va s’ancrer dans la conscience des victimes. Et à juste titre », pense Me Kane.
Lamine Niass, bénéficiaire de la loi d’amnistie
« Vivement l’abrogation de la loi »
« J’habite à Kaolack et je travaille à Mbour. J’ai été arrêté le 16 mars 2023 lors du procès Mame Mbaye Niang. J’ai été emprisonné à la prison de Rebeuss pendant 314 jours. La loi d’amnistie était destinée aux gens de l’ancien régime. Je suis pour son abrogation, car il y a plusieurs victimes qui, jusqu’à présent, attendent réparation. Je n’ai aucune crainte par rapport à nous qui faisions l’objet de poursuites, car nous avions usé d’un droit constitutionnel, le droit à la marche, d’autres avaient été emprisonnés à tort parce qu’ils portaient tout simplement le bracelet Sonko ».
FAMA BACHIR BA VEUT INCARNER L’IMAGE D’UN DEPUTE MODELE
Son rêve de devenir députée s’est réalisé le 17 novembre dernier. Fama Bachir Ba, élue sur la liste nationale de Pastef (8e position) fait donc partie des novices qui font leur entrée à l’Hémicycle.
Son rêve de devenir députée s’est réalisé le 17 novembre dernier. Fama Bachir Ba, élue sur la liste nationale de Pastef (8e position) fait donc partie des novices qui font leur entrée à l’Hémicycle. Un mandat de parlementaire qui ressemble à un saut dans l’inconnu, mais que cette professeur d’Anglais et diplômée en Ingénierie du Développement local à l’université Gaston Berger (Ugb) compte mener à bout la mission qui lui a été confiée par le peuple avec beaucoup de cœur et avec toute la passion qui l’anime.
Elle fait partie des députés de la 15e législature. Mais Fama Bachir Ba qui est entrée en politique pour faire bouger les choses, ne compte pas être une simple spectatrice reléguée au rang de béni-oui-oui. Elle veut s’impliquer pleinement et incarner l’image d’un député modèle, à l’écoute de ses concitoyens et déterminé à agir pour leur bien-être ; un député qui agit avec intégrité, loyauté, honnêteté et transparence. Son destin politique s’est écrit en 2017, quand elle a été charmée par le discours de Ousmane Sonko, sa promesse de rupture. Mais le déclic a été provoqué par le meurtre de Mariama Sagna, une militante de Pastef tuée en octobre 2018 après le meeting de son leader à Keur Massar. Cet acte barbare a réveillé le monstre qui sommeillait en elle. Parce que Fama n’aime pas l’injustice. « Avec ce meurtre et toutes les injustices subies par Ousmane Sonko qui a traversé les chemins les plus terribles de l’acharnement, de la persécution et de la privation, je me suis dit que le temps de s’engager avait sonné », indique-t-elle. Soutenue par ses amis, elle saute finalement le pas. Depuis lors, Fama Bachir Ba, forte de convictions, a su, sans faire trop de bruits, tracer une trajectoire politique tout en restant fidèle aux valeurs qui l’ont guidée et qui lui ont été transmises par sa famille.
Diplômée en Ingénierie du Développement local à l’Université Gaston Berger (Ugb) et doctorante en sociologie, Fama Bachir Ba, Professeur d’anglais, a une ascendance politique : même si elle est lointaine. Sa grand-mère maternelle, militante au Pds, était très impliquée dans la sphère politique. Elle sollicitait souvent ses services pour enregistrer les noms des membres de leur comité, mais Fama Bachir Ba n’a jamais été emballée par leur méthode de faire la politique. Mais aujourd’hui, le virus s’est entièrement emparé de son esprit et de son cœur. À Saint-Louis, cette militante de la première heure du Pastef à Saint-Louis prend part à toutes les luttes, à tous les combats pour l’implantation de sa formation dans le département, grâce à une politique de proximité qui porte ses fruits. « Notre première cellule, nous l’avons installée en 2018, à Ngallèlle. Un de mes élèves en était le coordinateur de cette première cellule parce qu’on avait peur parce qu’on nous disait que les enseignants ne devaient pas faire de la politique », renseigne-t-elle.
Secrétaire générale du Mouvement Jiguen Pastef (Mojip) de Saint-Louis et adjointe du Mouvement national des Enseignants patriotiques (Monep) organisait des vacances citoyennes avec les élèves et une synthèse de philosophie qui mobilisait entre 500 et 800 élèves.
« Avec le Monep on réalisait beaucoup d’activités citoyennes. Quand Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko ont vu les images de nos actions, ils ont été séduits par mon engagement et m’ont intégré dans le bureau politique national comme vice-coordonnatrice du Mouvement national des Enseignants patriotiques (Monep) », informe la nouvelle parlementaire.
Une nomination qui lui a permis de sortir de l’ombre et de mettre davantage son engagement et son dévouement au service du parti.
Femme de conviction, son entrée en politique marque un tournant dans sa vie déjà assez remplie. Son engagement au sein du Monep lui a offert un espace de liberté et de sérénité qu’elle apprécie particulièrement, tout en lui permettant de porter haut et fort les valeurs humanistes et patriotiques qui lui sont chères.
Investie en huitième position sur la liste nationale, cette doctorante en sociologie qui vient de terminer une formation en diplomatie en relations internationales en Chine, concrétise son rêve. Celui d’endosser la fonction de députée pour servir sa patrie et accompagner le Président Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko dans leur ambition de faire du pays un Sénégal plus juste, plus prospère, plus souveraine et ancrée dans des valeurs fortes. « Je suis élue députée du peuple, donc je serai là pour l’intérêt général et non pour l’intérêt personnel. Notre combat est de veiller à ce que le Président de la République Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko puissent dérouler convenablement leurs projets et programmes sans être bloqués et pour un Sénégal meilleur », relève Fama Bachir Ba.
Selon la parlementaire, le peuple mérite une Assemblée nationale de rupture avec des élus à la hauteur de la lourde responsabilité qui leur incombe et aptes à remplir en conscience les devoirs de leur charge. Et à son avis, tous les parlementaires, anciens comme novices, doivent travailler pour l’intérêt de tous les Sénégalais et promouvoir une meilleure culture du dialogue pour permettre à notre pays d’être encore plus apte à poursuivre son processus de développement et à relever les innombrables défis.
Si voter des projets de loi et contrôler l’action du gouvernement peuvent changer concrètement le quotidien des Sénégalais, Fama Bachir Ba est prête à en faire son cheval de bataille pour contribuer à bâtir un avenir meilleur pour chacun et pour tous les Sénégalais.
AYIB DAFFÉ VS AÏSSATA TALL SALL, LE JEUNE LOUP ET LA VIEILLE GARDE
La présence simultanée des deux personnalités à la tête des principaux groupes parlementaires promet des débats d'une rare intensité. De quoi révolutionner la pratique parlementaire sénégalaise ?
Sous la 15e législature, deux figures politiques marquantes se dessinent au sein de l'Assemblée nationale : Mohamed Ayib Salim Daffé, à la tête du groupe parlementaire Pastef les Patriotes, et Aïssata Tall Sall, présidente du groupe Takku Wallu.
Mohamed Ayib Salim Daffé, à la tête du groupe parlementaire Pastef les Patriotes, incarne un leadership forgé par une riche expérience politique. Élu député pour la première fois en juillet 2022, il s’est rapidement imposé comme une figure incontournable du mouvement, surtout après avoir succédé à Birame Souleye Diop à la présidence du groupe Yewwi Askan Wi en avril 2024. Aujourd'hui, sous la 15e législature, son parcours symbolise la montée en puissance d’une génération qui prône la rupture avec les anciennes pratiques politiques. Juriste spécialisé en droit de l’environnement, formé à l’Université Bordeaux-IV, M. Daffé a d'abord fait ses armes au sein du Parti démocratique sénégalais (PDS), où il gravit les échelons, notamment au sein du Mouvement des élèves et étudiants libéraux (Meel) et de l’Union des jeunesses travaillistes et libérales (UJTL). Après la défaite de 2012, il quitte le PDS pour rejoindre Bokk Gis Gis avant de créer, en 2017, son propre mouvement citoyen, Idéal Sénégal. Son parcours éclectique témoigne d’une capacité à s’adapter et à construire des alliances stratégiques.
À l'Assemblée nationale, Ayib Daffé s’impose comme un débatteur redoutable, notamment en wolof, maîtrisant les subtilités juridiques et politiques. Il devra affronter une opposition aguerrie, représentée par des figures telles qu’Amadou Bâ ou Barthélémy Dias, mais il pourra compter sur une majorité solide pour faire avancer les projets du Pastef. Son premier grand défi sera de défendre le projet de loi sur l’amnistie, une question cruciale qui pourrait façonner la législature.
Il sera assisté dans ses tâches par Mme Marie Angélique Diouf, élue vice-présidente du groupe parlementaire du Pastef. Elle incarne une nouvelle génération de leaders engagés, prête à accompagner Ayib Daffé dans ses responsabilités stratégiques au sein de l'Assemblée nationale. Résidant à Keur Massar, le bastion politique du Pastef, Mme Diouf est l'une des premières femmes à rejoindre ce mouvement politique, marquant ainsi une étape importante dans l'intégration de la femme dans la sphère politique sénégalaise, notamment dans des positions de leadership. Sa présence aux côtés d’Ayib Daffé dans la direction du groupe parlementaire Pastef renforcera, sans aucun doute, la représentation de la voix féminine dans les débats parlementaires et permettra à son groupe d’avoir un leadership dynamique, inclusif et tourné vers l’avenir.
Aïssata Tall Sall, l’expérience et la fermeté
À la tête du groupe parlementaire Takku Wallu, Aïssata Tall Sall incarne l’expérience et la fermeté. Avocate chevronnée, ancienne ministre de la Justice et des Affaires étrangères, elle dispose d’une maîtrise parfaite des rouages politiques et juridiques sénégalais. Députée et maire de Podor de 2009 à 2022, elle est reconnue pour sa combativité et son éloquence. Son parcours au sein du gouvernement, notamment dans la défense de la loi d’amnistie, lui confère une légitimité indéniable dans les débats parlementaires.
Elle devra mobiliser ses compétences pour guider une opposition diverse, mais déterminée à contrer les initiatives du Pastef. Aux côtés de son vice-président, Djimo Souaré, elle constitue une force capable de challenger la majorité, en particulier sur des dossiers sensibles comme l’amnistie. Sa déclaration incisive sur ce sujet témoigne de sa volonté de défendre les acquis de l’ancien régime face à ce qu'elle perçoit comme des menaces potentielles pour la stabilité juridique.
La 15e législature s’annonce comme un terrain d’affrontements intenses entre ces deux personnalités marquantes. Ayib Daffé, porteur des idéaux de rupture et de changement, devra s’imposer habilement pour maintenir la cohésion de la majorité Pastef, tandis qu’Aïssata Tall Sall, forte de son expérience et de sa rigueur juridique, représente une opposition solide et stratège. Leurs échanges, en particulier sur des questions brûlantes comme l’amnistie, promettent de marquer profondément l’histoire parlementaire du Sénégal.
LE BUREAU DE L'ASSEMBLÉE FAIT MÂLE
Pastef et Takku Wallu s'opposent sur la présence de deux hommes aux plus hauts postes du bureau. La loi sénégalaise sur la parité, adoptée en 2010, continue de susciter des interprétations divergentes
L'application de la loi sur la parité a fait l'objet de vives controverses, à l'Assemblée nationale entre les groupes Pastef et Takku Wallu. Décryptage.
Le respect de la loi sur la parité a encore été au centre des débats lors de l'installation de la 15e législature, le 2 décembre 2024. Les deux groupes parlementaires se rejettent la balle, chacun accusant l'autre d'avoir violé les dispositions de la loi – du 28 mai 2010 sur la parité. Face au refus du groupe Pastef de leur laisser mettre un homme au poste de 8e vice-président qui leur revenait, la présidente du groupe Me Aissata Tall Sall s'indigne après avoir boudé la session avec certains de ses collègues. “Ce que j'ai vu est inédit. Je n'aurais jamais imaginé que cela pourrait se passer dans cette assemblée nationale du Sénégal. Le président Malick Ndiaye a décidé que le poste qui nous revenait de droit, il va le prendre et l'attribuer au Pastef. C'est tout simplement inédit et en violation de toutes les règles”, accuse-t-elle très en colère. L'ancienne ministre de la Justice estime que Pastef a violé la parité en choisissant comme premier vice président un homme alors que le président est aussi un homme. Elle a promis que son groupe va saisir les juridictions pour être rétabli dans ses droits.
Mais d'où vient la polémique ? Il ressort en effet de l'article 13 du Règlement intérieur de l'Assemblée nationale citée en référence par Me Sall, que le bureau de l'Assemblée nationale est composée, outre le président, de 8 vice-présidents qui se suivent dans l'ordre protocolaire, du premier au huitième, de six secrétaires et d'un premier et deuxième questeur. A la suite de cette disposition, l'article 14 a précisé les modalités de désignation des préposés à ces différents postes. En ce qui concerne le président, il n'y a aucun problème majeur. Le texte précise qu'il “est élu au scrutin uninominal à la majorité des suffrages exprimés. Si cette majorité n'est pas atteinte au premier tour, il est procédé à un second tour, pour lequel l'élection est acquise à la majorité relative”. Le problème qui revient souvent à l'Assemblée nationale, c'est celui des autres membres du Bureau. Il ressort de la même disposition que : “Les vice-présidents, les secrétaires élus et les questeurs sont élus au scrutin de liste pour chaque fonction respectant la parité homme-femme, conformément aux dispositions de la loi 2010-11 du 28 mai 2010.”
Le règlement intérieur, toujours à son article 14, indique que : ''Tous les scrutins sont secrets et ont lieu à la représentation proportionnelle selon la méthode du quotient électoral, calculé sur la base du nombre de députés inscrits dans chaque groupe, avec répartition des restes selon le système de la plus forte moyenne. Les postes de vice-présidents et de questeurs dans l'ordre fixé à l'article 13 en donnant la priorité au groupe ayant obtenu le plus de voix.” Il en a résulté, selon les deux blocs, que Pastef devait prendre les sept premiers postes de vice-président. Le 8e devait ainsi revenir à Takku Wallu. Ayant le privilège de choisir en premier, Pastef a proposé un homme comme vice-président, puis une femme, puis un homme jusqu'au septième vice-président qui est donc un homme.
Pour Takku Wallu, le 8e leur revenant, il leur était loisible d'y mettre qui ils veulent. Cependant tout en veillant que le candidat soit une femme, pour respecter la parité. Mais, dira la présidente du groupe, Pastef ne s'est pas conformé à la parité en mettant un homme comme premier vice-président. Finalement, Pastef a désigné un autre de ses membres comme 8e vice-présidente. S'accaparant ainsi de tous les postes de vice-président.
Il faut noter que ce débat sur la parité revient très régulièrement à l'Assemblée nationale. Les majorités ayant tendance à soutenir que le président de l'Assemblée ne doit pas être pris en compte pour ce qui est de la parité. Selon les arguments souvent avancés, c'est qu'il est lui élu pour toute la législature, alors que les autres ne sont pas élus pour la durée de la législature. Entre autres arguments.
Pour sa part, Me Mamadou Diouf, Doctorant en droit public, estime que “c’est une erreur de penser que la parité ne s’applique qu’à partir l’élection des vice-présidents.” Le président de l’Assemblée nationale, étant membre du bureau, doit avoir une première vice-présidente à la place du sieur Ismaila Diallo, a-t-il tenu à éclairer dans une tribune publiée dans les médias. A en croire le juriste, cette mauvaise interprétation qui voudrait écarter le chef de l’institution de l’application de la parité est balayée constamment par la jurisprudence sénégalaise. Il justifie : ”A la lecture de l’article 1er de la loi de 2010, le bureau de l’Assemblée nationale y compris le Président (voir l’article 13 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale), doit être intégralement et alternativement composé d’un homme et d’une femme. Mieux, le décret n°2011-819 du 16 juin 2011 portant application de la loi sur la parité, en son article 02, énumère l’Assemblée nationale, son bureau et ses commissions parmi les institutions dans lesquelles la parité doit être respectée.”
Revenant sur la posture du juge sénégalais par rapport à cette lancinante et récurrente question, il a rappelé qu'une jurisprudence constante tant à comptabiliser le président. Mais cette jurisprudence a souvent porté sur les élections des bureaux municipaux au niveau des collectivités territoriales. C'était le cas notamment en 2022 avec beaucoup de décisions rendues par les cours d'appel. “La question de l’application de la loi sur la parité a fait couler beaucoup d’encre lors des élections territoriales de janvier 2022. La cour d’appel de Dakar a annulé toutes les élections dans lesquelles un Maire ''Homme” n’avait pas une première adjointe (voir les arrêts n°29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37 du 19 avril 2022).”
A ceux qui sont tentés de relever la durée des mandats, il rappelle cette jurisprudence de la cour suprême, qui précisait : “ La cour d’appel de Kaolack, qui avait fait une mauvaise interprétation de cette loi en arguant que le Maire, étant élu au suffrage universel n’était pas concerné par l’application de la parité, a vu son arrêt cassé et annulé par la cour suprême du Sénégal. En effet, dans l’arrêt n°47 du 27 octobre 2022, Cheikh Biteye et autres contre le Maire de Fatick, la chambre administrative de la Cour suprême a déclaré que le Maire, étant le premier membre du bureau municipal (comme le Président de l’Assemblée nationale), est soumis à l’exigence de la parité absolue et que même son élection au suffrage universel, ne saurait constituer un obstacle à l’application de la loi sur la parité.”
En ce qui le concerne, Ngouda Mboup, dans une télé de la place, a souligné que, depuis 2012, le président de l’hémicycle n’est pas comptabilisé dans le décompte, lorsqu’il s’agit de mettre en pratique la loi sur la parité. Il reconnait, cependant, que cette ‘’pratique parlementaire’’ est sujette à interprétation. Mais, précise que le Conseil constitutionnel a déjà été saisi sur cette question. La réponse de la haute juridiction a été, dit-il : ‘’s’agissant de l’Assemblée nationale, tout ce qui concerne le fonctionnement de son bureau, je ne m’en mêle pas, parce que, ce sont des mesures d’ordre intérieur’’. ‘’Le Conseil, poursuit-il, considère que c’est une cuisine interne et a déclaré la requête irrecevable.’’
Quel sort sera donc réservé au recours des députés de Takku-Wallu, annoncé par Me Aissata Tall Sall ?
SONKO FAIT DÉPOUSSIERER LES DOSSIERS AUTREFOIS MIS SOUS LE COUDE PAR SOUS MACKY SALL
Aussitôt reconduit à la tête du gouvernement par le président , Ousmane Sonko a insisté sur sa volonté d’accélérer le processus judicaire de la reddition des comptes.
Aussitôt reconduit à la tête du gouvernement par le Président de la République Bassirou Diomaye Faye, le Premier ministre Ousmane Sonko a insisté sur sa volonté d’accélérer le processus judicaire de la reddition des comptes. Une traque aux voleurs d’Etat au motif qu’elle correspondait à une demande sociale qui ne pouvait être occultée. « Le Témoin » a appris, hier, que le Premier ministre a donné des instructions fermes pour que tous les dossiers de l’Ofnac, Ige, Armp et Cour des Comptes « coudés » par Macky Sall soient dépoussiérés pour une remise en état d’instruction. S’ajoutent à ces dossiers, les nouveaux audits et rapports sous Diomaye.
Reconduit au poste de Premier ministre, Ousmane Sonko a fait une brève déclaration dans le hall du Palais de la République. D’abord, il a remercié le Président de la République Bassirou Diomaye Faye de lui avoir renouvelé sa confiance. Ensuite, le Chef du gouvernement a évoqué cinq priorités majeures qu’il entend fixer à son gouvernement légèrement remanié. Il s’agit de la lutte contre la cherté de la vie, l’amélioration des systèmes de sante, l’éducation, la mise en œuvre d’une politique de jeunesse ouvrant l’avenir à chacun et à tous et la reddition des comptes. Justement, ici, il est question de la traque aux délinquants financiers qui correspondait à une demande sociale pressante du peuple sénégalais que le Premier ministre Ousmane Sonko ne pouvait occulter.
Aujourd’hui plus que jamais, la reddition des comptes est impérative. Et les citoyens se font de plus en plus exigeants eu égard à la destruction du patrimoine économique et aux ravages financiers qui ont engendré une profonde crise insoutenable marquant le début du régne du président Bassirou Diomaye Faye. D’où la volonté du chef du gouvernement d’accélèrer le processus judiciaire de la reddition des comptes. Dans ce cadre, il a joint le geste à la parole en donnant des instructions fermes pour dépoussiérer tous les dossiers et rapports que le président Macky Sall avait mis sous le coude. Il s’agit des centaines de dossiers et rapports de l’Ofnac, Ige, Armp et Cour des Comptes. S’ajoutant à cela aux nouveaux audits demandés sous Bassirou Diomaye Faye. D’ailleurs face à la presse il y a quelques mois, le premier ministre Ousmane Sonko avait révélé que sous le couvert du « Secret défense », plus de 2500 milliards cfa ont été détournés sous forme de dépenses qui n’existaient que dans l’imagination des anciens dignitaires « Ils se cachaient derrière le code des marchés, soit par des ententes directes, soit par le Secret défense pour détourner l’argent. Ainsi plus 2500 milliards cfa ont été dépensés sous le sceau du secret défense, ouvrant la porte à de potentiels enrichissements sans cause. Alors que la dette publique était annoncée à 13 mille milliards cfa au lendemain de la prise du pouvoir par le président Bassirou Diomaye Faye, Ousmane Sonko la situe aujourd’hui à 15 mille milliards cfa, soit 83 % du PIB » a-t-il révélé tout en qualifiant la gestion de Macky Sall « d’une gravité extrême »
« Le Témoin » a appris que la plupart des affaires relatives à des crimes financiers ne sont pas encore frappées de prescription. Autrement dit, le délai prévu par la loi passé interdit toute saisine de la justice.
Tout est fin prêt !
Cette fois-ci, tout semble être prêt pour que la reddition des comptes soit enfin une réalité. Ce qui permet de penser que les audits de l’Inspection générale d’Etat (Ige) et des autres corps de contrôle de l’Etat sont terminés.
Rappelons-le, le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, avait ordonné la publication des rapports de la Cour des comptes et de l’Ofnac pour les années 2019 à 2023. En parallèle, il avait déployé les Inspecteurs généraux d’État (Ige) dans plus de 70 directions, agences et fonds publics pour réaliser des audits. Ces missions avaient pour but de détecter d’éventuelles erreurs, fraudes, vols, irrégularités, surfacturations, détournements de fonds publics, ainsi que d’identifier les responsables et complices de ces possibles « carnages » financiers afin de les traduire devant la justice.
Dans le lot des structures auditées, la Société nationale d’exploitation du Train express régional (Senter), le Fonds de soutien à l’Energie (Fse), la Commission d’attribution des licences de pêche, les Fonds pour la pêche artisanale, Air Sénégal, l’Aide à la Presse nationale, le Fonds d’appui à l’édition (Fae), l’Agence pour la promotion des investissements et des grands travaux (Apix), l’Aéroport international Blaise Diagne de Diass (Aibd), Handling (2as), le Fonds d’entretien routier autonome (Fera), La Poste, la Société africaine de raffinage (Sar), ainsi que les budgets Coupe du Monde (Qatar 2022), Coupe d’Afrique des Nations(Can 2024), Loterie nationale sénégalaise (Lonase), Caisse des dépôts et consignations (Cdc), Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Arpt), Office des lacs et cours d’eau (Okac), Conseil exécutif des transports urbains durables(Cetud), Agence autonome des travaux et gestion des routes (Ageroute), Autoroute Ila Touba, et le Building administratif de Dakar, entre autres.
PAR Amadou Lamine Sall
THIAROYE 44, LES MISÈRES DE LA FRANCE
EXCLUSIF SENEPLUS - Il y a beaucoup de Français au Sénégal, mais il n'y aura plus la France ? Que non. Souffler sans répit sur les flammes ne sert pas à venger des mémoires. L'impératif au sommet de l'État sénégalais indiquent, désormais, la voie
Notre cher frère, le bien nommé Malick Rokhaya Ba, nous a envoyé un message par WhatsApp, pour s'interroger ainsi qu'il suit : « …on attendait de toi un texte sur Thiaroye 44 pour avoir plus d'éclairages sur les écrivains et le massacre, le contexte de sortie du film de Sembene Ousmane, les perspectives culturelles ouvertes par la nouvelle attitude de la France, les biens culturels spoliés… »
Ma réponse et ce que j'en rajoute ici, est la suivante : « Vous lirez mon cher Malick Rokhy Ba, sous envoi séparé, par WhatsApp, suite à votre message, mon poème en hommage aux tirailleurs tombés à Thiaroye. Vous me faites sourire… Si vous aviez suivi de près ce que nous avons écrit et chanté sur les tirailleurs tombés à Thiaroye, vous m'auriez décerné ne serait-ce qu'un tout petit prix ! Les poètes, dont Senghor, ont écrit et chanté ces héros ! Mais c'est comme si rien n'avait jamais existé ! Peut-être que je ne suis pas bien informé, mais les poètes, les écrivains, les artistes ont été comme écartés et oubliés de cette touchante et si émouvante commémoration du massacre de Thiaroye ! Cette commémoration, depuis Senghor, a été toujours célébrée. Il faut se féliciter qu'elle ait pris une telle ampleur sous le président Diomaye ! On ne pouvait pas rêver mieux !
Quant à la pauvre France, il y a bien longtemps qu'elle a reconnu son forfait ! J'ai lu et appris qu'elle avait mis à la disposition du Sénégal ses archives ! Tout, tout se saura alors si ce n'est déjà fait ! Que nous reste-t-il encore à demander ou à exiger d'une France fatiguée, assiégée, humiliée ? Sur la tragédie de Thiaroye, elle a capitulé ! Elle a rendu les armes ! Faut-il encore et encore continuer et sans répit à l'acculer, la punir ? N'avons-nous pas d'autres combats plus pressants à mener ? Je crois que si ! Alors, sans tourner la page, mais en y laissant un signet, allons vers des combats plus urgents !
Rien, rien que nous ne sachions où ne devinons, ne sera une surprise ! Nos historiens, poètes, cinéastes, ont fait un solide travail il y a déjà bien longtemps Il faut rester avec l'histoire, dans l'histoire et la vérité de l'histoire ! Halte aux révisionnistes qui tentent de réinventer l'histoire pour mieux empoisonner et faire ferrailler les civilisations entre elles. L'heure est à la paix et non à la guerre. L'heure est à l'apaisement et à la sérénité, sans rien céder, et pas un seul pouce, de notre souveraineté, notre identité. Souffler, souffler sans répit sur les flammes, ne sert pas à venger des mémoires ! Personne, même les bêtes de la forêt, n'ignorent cette tragédie innommable ! Le Sénégal, c'est acté, défendra de mieux en mieux ses acquis, ses conquêtes, sa dignité, l'avenir de ses enfants !
Quelque chose s'est levée dans ce pays et cette chose bâtira, vaincra ou décevra et périra ! Mais nous gagnerons, car ce pays a toujours gagné et il a encore mieux gagné quand tout est devenu glauque, injuste et tragique ! C'est ainsi la marche des nations et des peuples. Il n'existe pas de génération spontanée. Il n'existe que des femmes et des hommes qui, au bout de toutes les épreuves, nourris par le vécu et la marche de l'histoire de leur peuple, s'engagent à grandir davantage leur pays, non en effaçant tout, mais en additionnant la volonté de construire de tous, pour gagner ensemble ! Il fallait bien que la cabane ait existé pour que la maison se fasse. Viendra le gratte-ciel au bout de l'effort, de l'exigence, du patriotisme, du civisme ! Le Sénégal est déjà grand, très grand ! Il faut continuer à le grandir dans l'ouverture et l'alliance des civilisations ! Chaque régime politique ajoute une page à l'histoire. Reste toujours à souhaiter que cette page soit noble, forte, inoubliable !
Ne perdons pas trop de temps à compter et à recompter caillou après caillou, les forfaits du colonisateur. Ce qui est fait est fait ! Nous ne ressusciterons pas les morts, mais nous pouvons les habiller d'un manteau royal dans toutes les mémoires. La jeune génération des Français de 2024 n'est en rien coupable de ce que leur pays a commis comme tragédie par le monde, à l'époque des conquêtes coloniales. La jeunesse sénégalaise n'a pas non plus pour mission de se venger à la hauteur des crimes et forfaits. Mais elle doit tout savoir, tout apprendre. Elle doit toujours se souvenir, rien oublier, mais avancer ! Commençons au plus vite par l'école pour protéger notre histoire et la mettre à l'abri de la seule version coloniale. Les « vaincus » doivent répondre aux « vainqueurs » pour que la vérité triomphe ! Ce n'est pas le combat de la jeunesse de rester scotchée au rétroviseur. D'ailleurs Diomaye comme Sonko, doivent également regarder devant, mais en sachant tout de l'histoire du rétroviseur !
Nous ne changerons pas tout en un jour ! Nous ne réinventerons pas un autre Sénégal dans la rage et la passion ! Mais ce pays doit changer, évoluer et il y faudra beaucoup d'autorité, de fermeté, d'échange sans compromission. Continuerons-nous à avoir le français comme langue officielle inscrite dans notre Constitution ou allons-nous vers une ou d'autres langues nationales ? Notons que près de 20% de notre population parlent et écrivent le français ! Si tous les Sénégalais parlent le Wolof, combien la lisent et l'écrivent ? Certains font de ce combat un combat d'avant-garde, mais la précipitation et le populisme viral conduiraient à l'irréparable ! Rien ne presse ! Pensons-y et travaillons-y ! Par contre, notre système éducatif doit déjà amorcer le combat des langues nationales à l'école ! Nous y arriverons mais pas en une génération ! L'Afrique est condamnée à vivre en partenariat avec le monde !
Notre identité culturelle et nos valeurs culturelles ne sont pas négociables mais nous continuerons longtemps encore, longtemps, à prendre des avions construits par Airbus, Boeing, le temps de construire nos propres avions, nos propres trains, nos propres voitures ! Que ceux qui disent et réclament de tout changer tout de suite et maintenant, de jeter la France à la mer et tous les autres compris, doivent commencer par eux-mêmes : ne plus parler, ni écrire le français. Ne plus prendre l'avion. Ne plus prendre le train. Ne plus conduire de voitures françaises, japonaises, américaines, allemandes, italiennes, et attendre les avions, les trains, les voitures africaines !
Thomas Sankara était charmant ! Il avait le génie de la répartie et de la moquerie : « Si nous ne payons pas, les bailleurs ne mourront pas. Mais si nous payons, nous allons mourir ! »
Pour revenir à Thiaroye 44, il s'est toujours agi, depuis Senghor, de réhabiliter nos morts et qu'au tribunal de l'histoire, les génocidaires soient reconnus et que ces derniers acceptent et assument leur imposture. Son poème sur Thiaroye est entré dans l'histoire ! C'est le 06 septembre 1988, que Thierno Faty Sow et Ousmane Sembene réalisèrent leur film « Camp de Thiaroye ». Le film obtiendra le « Grand Prix du jury de la Mostra de Venise, Silver Lion » ! Les deux fabuleux réalisateurs sénégalais auraient pu refuser ce Prix décerné par les « Grands Blancs », comme les appelait Senghor. Qui connait Sembene Ousmane, sait de quoi il était capable comme homme de refus et intraitable ! Mais, ils acceptèrent de recevoir ce Prix !
Réinventons une nouvelle alliance avec la France et qui commence par le respect mutuel. À elle, surtout, d'y travailler, d'y veiller dans de nouvelles approches dictées par l'humilité, l'écoute, l'échange, l'ouverture, la fraternité et non l'arrogance. La France est restée toujours belle et grande à chaque fois qu'elle a regagné la lumière. Il s'agit pour elle de restaurer une nouvelle grandeur dans un monde qui semble cruellement lui échapper ! Les journalistes qui allument des incendies sur les chaînes de télévisions françaises en fusillant ces jours derniers le Sénégal et le peuple sénégalais face à la rectification du pouvoir politique sénégalais sur la tragédie de Thiaroye et courageusement validé par le mea-culpa de la France, sont ceux-là mêmes, français d'adoption de surcroît, qui demandent à ce que la France ferme ses frontières aux Sénégalais et à ceux qui viennent pour s'y soigner !
Ces Français d'adoption qui constituent désormais la majorité en France, ou presque, - les Français de souche, de génération en génération, se font rares- et dont la France est devenue, tout naturellement, avec générosité, leur pays avec leurs pleins droits, sont ceux-là, qui, dans la presse de droite et d'extrême droite, dans le milieu faisandé de la politique et des partis fiévreux, ajoutent le feu au feu partout où la France est chassée, mise dehors !
L'impératif, la fermeté, l'inflexibilité au sommet de l'État sénégalais indiquent, désormais, la voie à suivre. Et personne n'y pourra rien.
De Senghor à Bassirou Diomaye Faye, ce n'est pas le peuple qui a changé, c'est la jeunesse Sénégalaise qui a changé, évolué et qui dicte sa feuille de route ! Gare à ceux qui s'en écarteront ! Cette jeunesse, osons le dire, ne s'est jamais véritablement adressée à Macron, Biden, Poutine, Xi Jinping, mais plutôt à Senghor, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade, Macky Sall. On ne l'a pas vu venir dans sa masse, son nombre, ses armes, ses cris, sa témérité. Un certain Ousmane Sonko, lui, l'a vue, pesée, soupesée et s'est préparé en chamane et gourou, à l'hypnotiser, la conquérir. Rester à la dompter et elle ne se dompte pas. Attention à la dissipation de l'hypnose, au réveil !
C'est cette admirable et exigente jeunesse qui a ouvert les portes de tous les pouvoirs à Pastef ! À Pastef de gagner le combat ou rendre les armes ! Mais le combat sera gagné, car tous nous voulons qu'il soit gagné pour continuer à bâtir un pays et un grand pays. Rien n'est impossible au peuple sénégalais. Mais il demande le respect et ce respect à un nom et une demeure : bienien vivre et chez soi ! ! La jeunesse, c'est le destin du Sénégal et de l'Afrique ! Tout ce qui est en face d'elle, n'est que de la politique et des «combinaisons» !
Aujourd'hui, l'Afrique face à la France et la France face à l'Afrique, nous apparaissent comme le théâtre douloureux d'une concurrence de souffrances ! L'Afrique a décrété que l'injustice, l'humiliation, l'exploitation, l'inacceptable déséquilibre des « termes de l'échange », sont terminés ! Elle en a trop, trop longtemps souffert et ce depuis les indépendances africaines. La France, humiliée, « déshéritée », souffre également, au regard de son rejet et de son expulsion brutale de l'Afrique. Le Sénégal, fidèle à sa délicatesse sans faiblesse, a trouvé les mots et pris les décisions qu'il lui fallait prendre. Sans violence. « Rester soi-même, coûte moins cher », disait étrangement d'ailleurs le plus grand des Français et des colonisateurs : Charles de Gaulle !
Une histoire se termine. Une autre commence.
« Le petit Nègre avec le coeur bleu, blanc, rouge » a tourné les pages de tout le livre maudit ! Cela n'a jamais été facile d'être longtemps à la fois bête, soumis et muet !
Il y a beaucoup de français au Sénégal, mais il n'y aura plus la France ? Que non ! Il y en aura encore et encore des Français au Sénégal, dans plus de 50 ans et toujours. Ils sont des nôtres. Nous avons fondé des familles avec eux. La France sans la « France », n'est qu'une formule ! La France ne disparaitra pas. Elle ne disparaitra jamais, mais elle aura beaucoup, beaucoup appris de son histoire et de ses « conquêtes » en payant le prix !
Amadou Lamine Sall est poète, lauréat des Grands Prix de l’Académie française, lauréat du Prix international de poésie 1573 Golden Antilope Tibétain 2025, Chine.