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7 mars 2025
Opinions
PAR L’ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, BOUBACAR BORIS DIOP
CE VIEIL HOMME, NOTRE ENFANT…
Wade a desservi Karim, renforcé la cote de popularité de Macky tout en donnant de lui-même une image négative. En somme, trois coups de pierre contre sa réputation et contre la libération de son fils
Boubacar Boris Diop, Éditorialiste de SenePlus |
Publication 24/03/2015
Des analystes pourtant peu suspects de passion partisane continuent à regretter que la Crei n’ait été apparemment réactivée que pour juger Karim Wade. Même si on peut leur reprocher de tenir pour quantité négligeable ses co-inculpés ou d’oublier trop vite les nombreux dossiers déjà instruits, leur trouble mérite la plus grande attention. Il nous rappelle qu’au Senegal l’autorité publique n’a jamais vraiment su quelle attitude adopter à l’égard des auteurs de crimes économiques. C’est peu de dire que ces derniers, du fait de leur forte capacité de redistribution, sont plus souvent admirés que stigmatisés.
Il se raconte du reste, sous forme de blague populaire, qu’à des détenus ordinaires se plaignant des faveurs accordées à ces prisonniers de luxe, un régisseur aurait répliqué, excédé : «Ecoutez, ce n’est pas pareil, vous, vous êtes des voleurs alors qu’eux ont détourné !» Cette complaisance à l’égard de ceux qui dilapident nos maigres ressources s’explique-t-elle par le fait que le même personnel politique se partage le pouvoir depuis l’Indépendance ? L’hypothèse peut être avancée sans risque.
Le plus fascinant, c’est que Me Abdoulaye Wade, alias le «pape du Sopi», a été élu, après une exceptionnelle mobilisation populaire, pour briser ce cercle vicieux de la gabegie et de l’impunité. Quel Sénégalais peut s’en souvenir aujourd’hui sans un formidable éclat de rire ? Sous son règne, le système est devenu complètement fou ! Dès ses premières heures au Palais, il déclare à Idrissa Seck, qui l’enregistre en secret– drôle de gens, n’est-ce pas ?- : «Nos problèmes d’argent sont désormais derrière nous», avant d’ajouter cette phrase hallucinante : «Même les gangsters savent s’en tenir a un strict code d’honneur quand vient l’heure de se partager le butin.»
Il n’est dès lors pas étonnant qu’au cours de ses deux mandats à la tête du pays, on ait eu l’impression d’un gigantesque foutoir financier. Bien des cadres ayant travaillé avec Me Wade, en particulier ceux qui venaient de la Gauche, n’étaient pas des corrompus, loin s’en faut. Mais ceux qui l’étaient ne se sont pas du tout gênés. Les affaires en tous genres– terrains, trafic de devises voire de drogue– ont sans cesse défrayé la chronique et des milliers de gens qui tiraient le diable par la queue, ont amassé en peu de temps une colossale fortune.
Dans un petit pays à l’élite aussi «compacte», tout finit par se savoir, même, et peut-être surtout, ce que les medias choisissent, pour diverses raisons, de taire. Et– ne soyons donc pas si oublieux– Karim Meissa Wade, à la tête de moult ministères stratégiques, était au centre de tout. La justice lui demande depuis juillet 2014 de justifier l’accroissement phénoménal de sa fortune à l’époque où son père était chef de l’Etat. Il n’en a pas été capable et cela lui a valu une peine ferme de six ans et une amende de 138 milliards de francs Cfa.
On peut certes entendre les critiques des ONG des Droits de l’homme qui voient dans la Crei une juridiction d’exception violant les normes du droit international mais on a aussi eu le sentiment que pour ses avocats leur client, lâché par certains de ses prête-noms et complices, confondu sur des points importants, était devenu indéfendable. On les a donc davantage entendus en conférence de presse qu’à la barre du tribunal qu’ils ont du reste finalement boycotté. Il est d’ailleurs difficile de savoir à quoi ont bien pu servir les avocats étrangers supposés plaider en faveur de Karim Wade.
Malgré le gros cafouillage sur le compte de Singapour– un point, il faut le souligner, non pris en compte par le juge Henri-Grégoire Diop–, personne n’a été surpris par le verdict du 23 mars. Il n’y a pas lieu de se réjouir qu’une personne encore dans la force de l’âge soit obligée de rester quatre années en prison mais des dizaines de milliers d’autres Sénégalais purgent la même peine sans que cela n’émeuve personne.
L’avertissement vaut pour tous nos futurs chefs d’Etat. Ce qui arrive à Karim Wade doit leur faire comprendre qu’il est inadmissible et dangereux de détourner les suffrages populaires au profit de sa famille.
L’ex-président Wade, naguère tout-puissant, n’a rien pu faire pour sauver son fils. Il n’a même pas pu trouver un hôtel pour y organiser ce que le politologue Mbaye Thiam a appelé sur Sud FM «la dévolution paternelle du parti». Cela en dit long sur la brutalité de la chute de Wade. Il s’était pourtant montré si agressif à maintes reprises que le pays a eu de sérieuses craintes pour la sécurité des biens et des personnes le jour du verdict. A l’arrivée il y a eu plus de peur que de mal.
Me Wade, conscient de son faible pouvoir de nuisance ces temps-ci, s’y était sûrement attendu et c’est sans doute pour cela qu’il a fait de son fils le candidat du PDS à la présidentielle de 2017. Le projet, c’est de lui faire porter les habits de lumière du prisonnier politique, si populaire que le régime n’aura d’autre choix que de ne pas le maintenir en détention. Est-ce bien sérieux ? En vérité, cela s’appelle raisonner la tête à l’envers.
Tout d’abord, Karim Wade, qui n’a jamais remporté le moindre scrutin, est un binational. On le voit mal renoncer à son passeport français pour briguer les suffrages des électeurs sénégalais. Et au fait, dans quelle langue leur demanderait-il de voter pour lui ? C’est un point central que tout le monde semble avoir oublié. Sauf, probablement, l’intéressé lui-même et son père. Me Wade, qui a affronté tous les présidents, de Senghor à Macky Sall, sait bien ce qu’élection veut dire dans notre pays. Il serait étonnant qu’il entretienne au fond de lui-même la moindre illusion quant aux chances de son fils pour l’élection de 2017.
Il sait bien, pour le dire familièrement, que les carottes sont cuites.
Wade aura en effet tout essayé mais les appels du pied à l’armée n’ont pas eu plus d’écho que sa menace insolite de prendre le maquis. Et pour faire monter la tension, il ne s’est interdit aucune grossièreté à propos de la famille Sall. Ce faisant, il a desservi Karim Wade, renforcé la cote de popularité de Macky Sall tout en donnant de lui-même une image encore plus négative qu’à l’ordinaire. En somme, trois coups de pierre contre sa réputation et contre une cause, la dernière d’un vieux combattant, qui lui tient tant à cœur : la libération de son fils.
Une fin de parcours aussi douloureuse– il est des moments où le vieil homme suscite en effet une vague compassion– rappelle, toutes proportions gardées, celle d’Alboury Ndiaye. La tradition rapporte qu’au soir de sa vie, affamé et au bord de l’épuisement, le Bourba Djoloff fut obligé de voler une écuelle de lait dans l’arrière-cour d’une maison de Dosso, dans l’actuel Niger. Surpris par la propriétaire, il n’eut d’autre choix que de nier avec véhémence. En vain : un enfant l’avait vu en secret, qui témoigna contre lui. Il aurait alors déclaré à son griot : « J’ai été tout-puissant au Djoloff et voilà à quoi je suis réduit. Tout est perdu et je sais que ma fin est proche.»
Alboury Ndiaye, immortalisé entre autres par le dramaturge Cheik Aliou Ndao, a été peut-être le moins ambigu, le moins controversé de nos héros nationaux mais un cruel destin avait pris avantage sur le guerrier errant, panafricaniste avant la lettre. Du célèbre politicien libéral aussi, on peut dire, mais hélas pour de moins glorieuses raisons, que tout est perdu aujourd’hui, même l’honneur.
Il ne lui reste plus qu’à solliciter la clémence de celui dont il a dit tout récemment que jamais il ne serait au-dessus de Karim Wade. Peut-être s’exprimait-il ainsi en surestimant ses capacités à infléchir le cours de la justice. En homme qui a toujours cru au seul rapport de force, il est bien conscient d’être à la merci du régime de Sall. La surenchère verbale va rester de mise pendant quelque temps pour sauver les apparences mais il est très probable qu’il va bientôt jouer, en coulisses, la seule carte qui lui reste raisonnablement : solliciter la grâce présidentielle. Et si Macky Sall venait à céder aux pressions, l’on n’entendra probablement plus parler ni de l’homme Karim Wade ni encore moins du candidat sans peur et sans reproche. On peut supposer qu’il sera aussi oublié des Sénégalais que l’est à l’heure actuelle sa sœur. Le président pourrait être tenté de se montrer magnanime après avoir su se montrer ferme.
Qu’adviendrait-il des Bibo Bourgi et autres Mamadou Pouye, condamnées en même temps que Karim ? La question n’est pas simple car une libération générale ferait désordre dans l’opinion.
Quoi qu’il arrive, gardons-nous de jeter trop vite la pierre à Me Abdoulaye Wade. Ce quasi centenaire au regard perdu, si tragiquement solitaire, c’est nous-mêmes qui l’avons librement enfanté dans l’allégresse générale il y a une quinzaine d’années. Au-delà du sort personnel de son fils, c’est de cela que nous devrons nous souvenir demain et après-demain.
Lorsque l’on parvient à vendre la haine à une faune en colère, il faut bien lui justifier le pourquoi du comment par qui, n’est-ce pas ? Le catastrophisme a simplement changé de camp, servant désormais d'excuse à ceux qui promettaient la lune hier
Lorsque l’on parvient à vendre la haine à une faune en colère, il faut bien lui justifier le pourquoi du comment par qui, n’est-ce pas ? Le catastrophisme se présente comme l’explication logique au misérabilisme que l’actuel régime distille depuis une dizaine d’années, depuis les réseaux sociaux incendiaires jusqu’aux meetings exaltés d’une opposition définitivement va-t-en-guerre…
L’ennemi du peuple : le régime de Macky Sall, qui ne s’encombre pas de scrupule. La preuve par les embastillements de Khalifa Sall et Karim Wade, tous deux coupables de juste lorgner le fauteuil présidentiel. Si ce n’était que ça : ce gang non seulement verse le sang des Sénégalais, mais il pille le pays, comme dirait l’autre, «il arrose son couscous de leur sueur».
Passons sur ce qui relève de la gnognotte : les partages écœurants de terres à coups de lotissements sauvages, l’avion présidentiel qui fait la navette entre Dakar et La Mecque pour que la Camorra puisse aller y déposer son sac de péchés…
Bref, le train de vie agaçant de ces épicuriens qui nous gouvernent alors… Les scandales à milliards se suivent sans se ressembler, entre les six mille milliards Cfa de Aliou Sall, qui vend notre pétrole avant même le premier forage (devenant de la sorte le débiteur de chaque Sénégalais à hauteur de quatre cent mille francs), et les vingt-neuf milliards de Mame Mbaye Niang, s’intercalent les mille milliards du fonds Covid et les quatre-vingt-quatorze milliards de Mamour Diallo et Tahirou Sarr…
Et quand l’héroïque peuple se rebiffe pour sauver son «Projet», ça le canarde comme un tir aux pigeons de kermesse : cinquante-et-un Sénégalais meurent alors par balles entre mars 2021 et février 2024. La «mackyavélique» ploutocratie est doublée d’une dictature sanguinaire qui charrie des rivières d’hémoglobine. Voilà la catastrophe dont le duo «Sonko môy Diomaye» sauve les Sénégalais par la magie des urnes le 24 mars 2024, une semaine après être sorti de prison par on ne sait quelle pirouette. Bien sûr que ce tandem qui échange les petites attentions l’un envers l’autre est capable de miracles. Il pilote un projet que quatre mille cadres, d’authentiques Sénégalais, peaufinent depuis une décennie. Retrouver notre souveraineté perdue depuis plusieurs siècles, en sortant du Cfa en virant la France, et les bailleurs de fonds ; ils vont faire mieux : rendre à la justice son véritable lustre et jeter en prison toute cette mafia qui suce le sang du pauvre Sénégalais.
Ça va démarrer au quart de tour après la passation de pouvoir entre l’imberbe rondouillard Macky et le barbu svelte Diomaye. On change de planète, en résumé, mais que d’émotions pour en arriver à ça…
Et puis, patatras, une fois aux commandes du navire Sénégal, qui ressemble de loin à un majestueux yacht, ça se rend compte que l’héritage est un rafiot rafistolé qui prend l’eau de toutes parts.
Alerte : c’est la cata !
Il ne faut pas attendre longtemps pour que le tandem commence à étaler ses états d’âme sur la place publique. Sortez les mouchoirs, snif : c’est le Premier ministre qui ouvre le feu, annonçant urbi et orbi que la mafia qu’ils viennent de virer du pouvoir est de surcroît un repaire de faussaires qui truquent les chiffres comme un compteur de casino, et que la dette crève les plafonds. On ne vous dit pas, les institutions budgétivores à dissoudre dans de l’acide parlementaire, les recrutements fantaisistes dans les sociétés nationales, les salaires mirobolants aux copains…
Bien entendu, le Fmi, qui compte jusque-là poursuivre sa collaboration avec l’Etat sénégalais, est pris subitement d’un doute ; il faudra réfléchir et attendre que les vrais chiffres sortent ; sur les marchés financiers également, la signature du Sénégal devient sujette à caution ; les bailleurs traditionnels deviennent plus regardants, surtout après avoir découvert que l’Etat sénégalais «aura emprunté alors qu’il n’en avait pas vraiment besoin»… Sur cette délicate question, la demande d’explication tarde à obtenir une réponse convenable. Et puisqu’on est dans le redressement de torts, dans la foulée, ça dédommage tous les braves casseurs de mars 2021 à janvier 2024, les rescapés du massacre, tout de même victimes des exactions des Forces de l’ordre. Quant aux proprios des biens saccagés, ils peuvent s’estimer heureux de ne pas être poursuivis pour détention de biens mal acquis.
En attendant, la traque aux Rapetous est lancée avec comme principal repère le délit de sale gueule : ils sont quelques-uns à vite se retrouver au cachot, pour avoir commis l’impardonnable péché d’arborer des mines trop réjouies et de l’embonpoint en ces temps d’austérité.
En attendant que le «chef de gang», comprenez Sa Rondeur Macky Sall, se retrouve devant la Haute cour de Justice ?
Par Baba DIOP
IMAM
Plusieurs tours de table ne permirent pas de nommer un remplaçant de l’imam de la mosquée robinet bagarre, pour le nafila.
Plusieurs tours de table ne permirent pas de nommer un remplaçant de l’imam de la mosquée robinet bagarre, pour le nafila. L’argument de Ton’s pour diriger les prières, était pourtant béton. Il arguait qu’une mosquée sans toiture n’en était pas une. Or comme il était l’unique contributeur de la toiture en ardoise et avait surveillé l’enfaîtement. Donc il devait être élu de facto. Les autres ne l’entendirent pas de cette oreille. Il menaça de déboulonner la toiture. Mais en vain.
On proposa de tirer à la courte paille qui désignerait le vainqueur. Proposition rejetée. Comme à l’école primaire, essayons donc le « un verre cassé ne vaut plus rien, ni pour de l’eau, ni pour du vin. « Haro sur le baudet « ! Comment peut-on parler de mosquée et y mêlait le vin ? Une fatwa s’abattit sur celui qui avait osé émettre une telle ânerie. Modou que tout le monde prenait pour le débile du coin, dans un soupir, dit « Mon grand-père le sage et que les anges veillent sur lui, avançait que pour élire un imam, il faut consulter les femmes du quartier qui connaissent les déplacements nocturnes des hommes. On fit venir Khoudia Ndiaye l’indiscrète du quartier. Dès qu’elle ouvrit la bouche une pluie de marakiss lui tomba dessus. On ne sut jamais le pourquoi.
PAR MALICK CISS
UN BUSINESSMAN À LA MAISON-BLANCHE
"L’Amérique d’abord ! Les affaires d’abord. Aux commandes : un businessman à la Maison-Blanche. Tel pourrait être l’intitulé d’un livre sur Donald Trump, au vu de ses premières décisions aux relents capitalistiques."
L’Amérique d’abord ! Les affaires d’abord. Aux commandes : un businessman à la Maison-Blanche. Tel pourrait être l’intitulé d’un livre sur Donald Trump, au vu de ses premières décisions aux relents capitalistiques. Avant même de s’asseoir dans son fauteuil de Président, il avait déjà imprimé sa marque sur les grands dossiers du monde : la guerre en Ukraine ; le financement de l’Otan ; la reprise de la guerre commerciale sur fond de droits de douane ; le conflit israélo-palestinien ; les déclarations (sérieuses ?) pour une annexion du Groenland pour ses ressources naturelles ou du Canada… Rarement, les moindres mots, faits et gestes d’un Président qui n’avait même pas encore pris fonction n’auront été scrutés et analysés de la sorte, semant espoir par-ci (Israël) et inquiétudes par-là.
Dès sa prise de fonction, une batterie de mesures s’ensuit, à savoir coupes budgétaires fatales à l’aide au développement, cure d’amaigrissement des services publics, droits de douane contre des voisins alliés et la Chine). Selon un décompte de l’Afp, il en est à 79 décrets en l’espace de 40 jours, soit autant que Joe Biden pendant toute sa première année à la Maison-Blanche. Objectif de ce bousculement de l’ordre national et international : renflouer les caisses de l’Amérique. Donald Trump et le monde, c’est comme un manager d’entreprise prompt à se délester de ses charges dans un univers de profit.
Il rebat les cartes de la géopolitique mondiale plus en fonction de ses intérêts économiques que stratégique. Le tout sur fond de rapport de force. Il faut convoquer l’état d’esprit de l’homme pour comprendre sa logique. Le successeur de Biden n’a ni ami ni allié ; il n’a que des intérêts. C’est un businessman ! Il dirige son pays comme un chef d’entreprise. « You’re fired ! » (vous êtes viré ! en anglais), aimait-il lancer, durant son premier mandat, à ses collaborateurs en disgrâce, pour s’en débarrasser comme on le fait avec un employé fautif.
La couleur, il l’a annoncée et serinée : « Mon administration effectue une rupture nette avec les valeurs de politique étrangère de l’administration précédente et, franchement, du passé ». Le fardeau du parapluie militaire de l’Otan coûtant cher, il somme les Européens de casser leur tirelire pour augmenter leur budget défense.
Avec l’Union européenne, ce concurrent qui ne dit pas son nom et dédaignerait certains produits américains, selon ses dires, « pour emmerder les États-Unis », Trump brandit la menace de 25 % de droits de douane à son encontre. Taïwan, qui a, jusqu’ici, confié son sort Washington, n’a pas une idée claire de la position américaine sur les prétentions de la Chine sur l’île. L’Ukraine, humiliée, a reçu un message clair : céder ses terres rares à Washington ou être laissée à la merci de la Russie.
De toute façon, Volodymyr Zelensky n’a pas les cartes en main ! D’ailleurs, devant Trump, qui a les cartes en main ? Avec lui, « on est tous présumés ennemis de l’Amérique, présumés coupables. On doit faire la preuve de notre innocence en négociant avec Trump », disait Richard Werly du journal suisse Blick. Les analystes politiques sont complètement désarçonnés par ce mode opératoire inédit. Beaucoup estiment qu’il s’agit plutôt d’un retrait officiel des États-Unis en tant que leader du nouvel ordre mondial.
À la place du droit, Trump apporte la loi du plus fort. Exit les valeurs morales. Il faut s’enrichir, encore s’enrichir, et c’est ce qu’il a promis à ses concitoyens pour arriver au pouvoir. « Cette aberration d’ordre moral qui se déroule devant nos yeux n’est-elle pas le symptôme inévitable d’une société qui, depuis plusieurs générations, ne parle plus que d’accumulation de bébelles ? Le rêve américain, cette toute dernière consécration de la « bonne vie », le voici », constate, dans le journal « Le Devoir », Marina Pronovost, conseillère en relations internationales. L’économiste Arnaud Orain, lui, appelle cela le début d’un « capitalisme de la finitude » (in Le Monde confisqué : essai sur le capitalisme de la finitude, 16e – 21e siècle, Flammarion, 2025). Il définit ce monde comme « une vaste entreprise navale et territoriale de monopolisation d’actifs —terres, mines, zones maritimes, personnes esclavagisées, entrepôts, câbles sous-marins, satellites, données numériques— menée par des États-nations et des compagnies privées afin de générer un revenu rentier hors du principe concurrentiel ».
Et cela se fait en déstructurant les règles du marché.
PAR ME ABDOULAYE TINE
DÉGRADATION DE LA NOTE DU SÉNÉGAL, LES TAUX D’INTÉRÊT N’AUGMENTERONT PAS !
La récente dégradation de la note de crédit du Sénégal par l’agence Standard & Poor’s a suscité des inquiétudes quant à une éventuelle hausse des taux d’intérêt. Cependant, cette perception est simpliste et mérite d’être nuancée.
La récente dégradation de la note de crédit du Sénégal par l’agence Standard & Poor’s a suscité des inquiétudes quant à une éventuelle hausse des taux d’intérêt. Cependant, cette perception est simpliste et mérite d’être nuancée.
Notation de Crédit : Pas un Verdict Absolu
Une note de crédit dégradée ne se traduit pas automatiquement par des taux d’intérêt plus élevés. Les marchés obligataires sont influencés par divers facteurs, tels que la conjoncture économique mondiale et la confiance des investisseurs.
Contexte Mondial : Un Avantage Potentiel
Dans un environnement de taux d’intérêt bas, le Sénégal peut emprunter à des conditions compétitives, indépendamment de sa notation.
Sources de Financement Diversifiées
Le Sénégal dispose d’un éventail de sources de financement qui ne reposent pas uniquement sur sa note de crédit. Les investissements étrangers et les partenariats public-privé constituent des alternatives solides. Croissance Économique : Un Atout Majeur
Les projets d’infrastructure ambitieux en cours d’exécution attirent les investisseurs et renforcent la position du Sénégal sur le marché, rendant ainsi son économie plus résiliente.
Perception des Investisseurs : Une Vision Optimiste
Les investisseurs évaluent la stabilité et les perspectives de croissance. Si le Sénégal maintient sa dynamique actuelle, l’intérêt pour ses obligations devrait rester fort, ce qui contribuera à maintenir des taux d’intérêt compétitifs. Il est essentiel de souligner que les taux d’intérêt se négocient librement sur le marché des capitaux, où ils sont déterminés par l’offre et la demande de fonds. Les prêteurs, tels que les banques et les investisseurs, établissent les taux en tenant compte de divers facteurs, et pas seulement de la note du pays.
En somme : Une Réalité Économique Complexe
Croire que la dégradation de la note de crédit entraînera inévitablement des taux d’intérêt plus élevés est une erreur. Grâce à une économie dynamique et à des sources de financement diversifiées, le Sénégal est bien positionné pour naviguer dans cet environnement économique complexe.
Par Baba DIENG
LE DESESPOIR, PILIER FONDAMENTAL DU «PROJET»
Waly Diouf Bodian, plus gendarme que Directeur général, avait pourtant annoncé la couleur : les opposants milliardaires sont incompatibles avec le bon déroulement du «Projet». Au royaume du misérabilisme, avoir de l’argent est un crime de lèse-majesté.
A l’école élémentaire de ma bourgade natale, j’avais un camarade, devenu étudiant en médecine, qui, en classe, avait la manie de lever la main avant de réfléchir. Il s’obstinait à être envoyé au tableau pour, ensuite, mijoter sa réponse devant nos yeux écarquillés, accusateurs. Ce qui ne manquait pas d’irriter l’enseignant, qui le passait à tabac. Opiniâtre qu’il était, il revenait toujours à la charge, avec son antienne au bout des lèvres, pour taper sur la table : «Moi, monsieur !» Je plagie, après Ibou Fall, Madiambal Diagne, le nouvel homme politique devenu taciturne…
Après quelques années dans le maquis pour renverser le pouvoir de Macky, la litanie du «Projet» à protéger en bandoulière, le parti Pastef a été désigné par le Peuple pour aller au tableau, avec tous les outils nécessaires. Objectif : faire du Sénégal, comme l’avait prédit le Pmos, une terre où coulent du lait et du miel, au bout de trois petits mois. Quelques mois déjà d’exercice du pouvoir, résultat : rien. Sinon cibler et traquer des pestiférés (surtout ceux qui trimballent des milliards dans un pays pauvre) jusque dans leurs toilettes. A côté des grandes urgences -la cherté de la vie, les licenciements abusifs, l’atonie de notre économie, les innombrables revendications des différents syndicats, que sais-je encore-, on a droit, cependant, de manière effrénée, à des historiettes au sujet d’éventuels chapardeurs d’argent public. L’essentiel, qui n’est rien d’autre que la satisfaction des énormes attentes du Peuple, est volontairement ostracisé.
L’on est tenté de penser que le parti Pastef est arrivé au pouvoir les mains vides. L’insurrection n’a pas été mâtinée de «Solutions». Les génies taiseux qui étaient chargés de rédiger le «Projet», semble-t-il, se sont momifiés dans leur caverne. Hélas ! Mais le silence suffocant du Palais présidentiel rappelle les énormes promesses faites à la populace, qui croupit dans la misère en attendant mieux. En attendant le miracle. D’où l’urgence de bricoler, dans la confusion et à la sauvette, des initiatives -ou agitations- pour faire mine de se mettre au travail.
C’est le porte-parole du gouvernement, Moustapha Njekk Sarré, qui donne l’information tant attendue : Macky Sall, «chef de gang», sera jugé et, naturellement, jeté au fond d’un bagne. Pour quel motif ? Si le pays est au «troisième sous-sol», complètement ruiné, en mauvais termes avec ses partenaires techniques et financiers, c’est de sa faute. Il s’est arrangé à ce que nos souverainistes, comme se plaignait Diouf à la fin de son règne, «gouvernent dans la douleur».
En un mot comme en mille, nos deux Messies -l’autre miraculé rachitique devenu incidemment président de la République et son «meilleur Premier ministre de tous les temps»- ont hérité d’un pays en ruine dont l’Administration maquille des chiffres. Un Etat faussaire. Macky et sa bande de bouffeurs de deniers publics sont les seuls responsables de cette situation chaotique. On pourrait déduire que, demain, ces «diables boiteux» justifieront leur éventuelle déconfiture. Les partis populistes -Pastef en est unexcellent dans la recherche de boucs émissaires.
La communication gouvernementale est apocalyptique : il n’y a plus rien sous nos tropiques. Les temps sont crépusculaires. Nos dirigeants, tenaillés par leurs grandes promesses électorales, sont décidés à faire émerger non pas l’économie, mais nos peurs, nos angoisses. L’ancien «sanguinaire» et ses acolytes ont tout volé, bradé, falsifié. Par exemple, la dette, largement maquillée par Macky et ses maquilleurs, consume, en réalité, nos entrailles. Bref, tout est en capilotade.
Cette situation exige de tenir un langage de vérité aux 54%, qui piaffent d’impatience en attendant de cueillir enfin les premiers fruits de leur engagement. Le Pmos se veut réaliste, moins belliqueux, voire obséquieux. Il a convoqué certaines forces vives de la Nation -le patronat et les syndicats pour un dialogue sincère, afin de s’extirper de l’abîme. Il faut, prêche-t-il, que chaque partie, à son niveau, fasse des concessions pour redresser ce pays, qui a été pillé pendant plus d’une décennie.
Les sacrifices des gouvernés, et non ceux des gouvernants, sont donc inéluctables. Les Sénégalais, qui doivent se ceindre les reins, essayeront d’accepter l’amoindrissement des salaires, l’arrêt des subventions de l’Etat sur certains produits, l’inflation, etc. Vive l’austérité économique ! Et celle de nos libertés, pourquoi pas ? En tout cas, le Pmos a insinué son souhait de durcir son régime. Démocratie et développement, selon son exposé nuancé de quelques secondes, ne seraient pas compatibles. Avec lui, on n’aura pas droit, pour les cinquante prochaines années, à l’ennui...
Un chef, c’est quelqu’un qui vend un rêve, un devenir, qui mobilise des énergies, harangue des foules, libère des forces. Un chef, c’est aussi, écrit récemment Hamidou Anne, «un propulseur d’espoir et un embrayeur de récits d’espérance, qui chasse les démons de l’apathie et du découragement». Mais, avec nos marchands de cauchemars qui jouent la carte du catastrophisme et du misérabilisme, c’est la rhétorique de l’apocalypse, de la misère, de la souffrance, de l’indigence. Le «Projet», si tant est qu’il existe, a le désespoir, et non le rêve, comme pilier fondamental, comme fil rouge.
Pour finir, je m’enorgueillis tout de même d’avoir raison, d’avoir prédit le déroulement exact de l’histoire. Farba, je vous l’avais dit ! Dans «Le «Projet» de Pastef contre lui-même», tribune en date du 18 janvier 2025 que j’avais publiée dans ces colonnes, j’écrivais ceci : «Quand le Pmos, déguisé en procureur de la République, avait notifié à Farba Ngom -qu’il qualifie péjorativement de «griot de Macky»- que les Législatives étaient la dernière élection à laquelle il participait, il devait deviner que sa dernière demeure sera une geôle.» Quand les déclarations du Premier ministre coïncident avec la décision des juges, il sera très difficile, pour un esprit sérieux, de ne pas penser à la justice des vainqueurs.
Waly Diouf Bodian, plus gendarme que Directeur général, avait pourtant annoncé la couleur : les opposants milliardaires sont incompatibles avec le bon déroulement du «Projet». Au royaume du misérabilisme, avoir de l’argent est un crime de lèse-majesté. Comprendre cela, ce n’est pas Soumbédioune à ingurgiter, après tout.
Par Baba DIOP
TONS ET LE CHIEN
A l’heure de la rupture du jeûne, tout le village se pointa chez Ton’s, bol, soupière, calebasse, toutes sortes de récipients sous le bras, provoquant un tohu-bohu indescriptible dans la cuisine de Tata.
Dans le Ferlo natal où la canicule sévit, Ton’s, au troisième jour du Ramadan, était sec comme la langue du Diable. Il avait fondu. Tata était décidée de le remplumer. Ton’s avait les yeux rivés sur la vieille pendule, bijou de famille dont on ne sait pas comment elle avait échappé à la morsure du temps. Ton’s avait pris soin de ce qui était devenu la prunelle de ses yeux. Le tic-tac de la pendule, à ses oreilles, se transformait en une berceuse. Chaque seconde était une victoire sur la faim qui creusait ses joues.
A mi-parcours de l’après-midi, Tata rentra du louma, le marché hebdomadaire, chargée de victuailles : poulet, tête de mouton, jarrets de bœuf, laxass, tiéré niondi et deux sachets de grains de nénuphar pour le tiébou diaxar. Au vu de la calebasse de Tata, les yeux de Ton’s sortirent de leurs orbites. Il ne put refreiner son cri de joie : « Thiébou diaxar, Thiébou diakhar ak bopu xar », continue-t-il de crier les mains jointes aux oreilles, tel un muezzin. Le voisin sortit sa tête de derrière le muret attenant. Il en souffla un mot à son voisin qui en fit de même et de maison en maison, le tiébou diaxar fit son bonhomme chemin.
A l’heure de la rupture du jeûne, tout le village se pointa chez Ton’s, bol, soupière, calebasse, toutes sortes de récipients sous le bras, provoquant un tohu-bohu indescriptible dans la cuisine de Tata. On ne fit pas attention que quelqu’un avait dérobé la marmite encore toute chaude. Ton’s tomba raide évanoui.
ENJEUX GEOPOLITIQUES ET ECHEC DE LA DIPLOMATIE DANS LA CRISE UKRAINIENNE
EXCLUSIF SENEPLUS - Ce conflit, par ses répercussions globales, met en lumière l'urgence pour le continent africain de renforcer son unité interne et de développer une vision géopolitique commune face aux grandes puissances
Dans un contexte international où les relations entre nations sont de plus en plus marquées par des tensions géopolitiques et une compétition de puissance, la crise ukrainienne, qui dure désormais depuis plus de trois ans, illustre d'une manière poignante l'incapacité de la communauté internationale à instaurer un ordre mondial stable, respectueux des principes de souveraineté et d'intégrité territoriale.
Depuis son éclatement en 2014, ce conflit n'a pas seulement déstabilisé l'Ukraine, mais a également déclenché des répercussions profondes et imprévisibles qui continuent de perturber l'équilibre de l'ordre international tel que nous l'avons connu.
Le 28 février 2025, une rencontre historique entre Donald Trump, le vice-président JD Vance et le président ukrainien Volodymyr Zelensky à la Maison-Blanche a mis en lumière les profondes fractures dans les relations internationales : une rencontre censée favoriser la paix s'est rapidement transformée en un affrontement public, symbolisant l'ampleur de la division entre les grandes puissances et la divergence de leurs visions du futur. Ce rendez-vous a cristallisé un changement majeur dans les rapports de force mondiaux, mettant en exergue l'inefficacité de la diplomatie traditionnelle face à des enjeux géopolitiques de cette ampleur.
Le conflit ukrainien, devenu l'un des plus complexes et dévastateurs du XXIe siècle, alimente les tensions géopolitiques mondiales et redéfinit les rapports de puissance entre les nations.
Véritable mosaïque de causes historiques, ethniques et géopolitiques, il dépasse largement les frontières de l'Ukraine, affectant la stabilité régionale, mais aussi mondiale. Notre analyse article propose de saisir la portée de cette crise en explorant ses origines, ses tentatives de règlement et les conséquences géopolitiques qu'elle engendre.
La genèse du conflit : Un péril géopolitique aux racines multiples
Les origines du conflit ukrainien sont marquées par une série de facteurs géopolitiques, ethniques et historiques profondément ancrés.
En 2014, la Russie, sous la direction de Vladimir Poutine, a procédé à l'annexion de la Crimée, une région stratégique de la mer Noire, au moment même où l'Ukraine subissait un bouleversement politique majeur avec la chute du président pro-russe Viktor Ianoukovytch.
La Crimée, à majorité russophone, était perçue par Moscou comme un territoire stratégique essentiel à ses intérêts militaires et géopolitiques. Bien que la Russie ait justifié son action par la protection des Russes de Crimée et la nécessité de contrer une Ukraine de plus en plus orientée vers l'Occident, l'annexion a été fermement condamnée par l'ONU et l'Occident, exacerbant ainsi une rupture sans précédent dans les relations internationales, en violation flagrante des principes d'intégrité territoriale.
Toutefois, la question de la Crimée n'était que le point de départ d'un conflit bien plus vaste. L'intensification de la guerre dans le Donbass, où des séparatistes prorusses ont pris les armes contre le gouvernement ukrainien, a plongé la région dans une guerre de tranchées, marquée par des milliers de victimes et un déplacement massif de populations. Cette guerre hybride, marquée par des frontières floues et un soutien militaire occulte, a non seulement redéfini les rapports de force en Europe de l'Est, mais a également installé un nouveau type de conflit, où l'usage de la force est couplé à des manipulations géopolitiques complexes.
Tentatives de Résolution : L'échec des initiatives diplomatiques
Malgré plusieurs tentatives de règlement, telles que les accords de Minsk (2014 et 2015), la situation demeure figée et sans issue.
Ces accords, bien qu’ils aient été conçus pour instaurer un cessez-le-feu et amorcer une solution politique, ont en réalité exacerbée les tensions entre l'Est et l'Ouest, tout en divisant encore davantage l'Ukraine elle-même.
Les sanctions économiques imposées par les États-Unis et l'Union européenne à la Russie, ainsi que les pressions exercées sur l'Ukraine pour parvenir à une solution politique, ont mis en lumière l'incapacité des grandes puissances à imposer un règlement durable.
L'échec des négociations a permis à la Russie de renforcer son emprise sur le Donbass et de s'opposer fermement à l'intégration de l'Ukraine à l'OTAN et à l'Union Européenne, rejetant ainsi l'élargissement de l'Occident à ses frontières.
L'Ukraine, quant à elle, se trouve prise en étau entre un Ouest résolument pro-européen et un Est prorusse, ce qui accentue les fractures internes du pays et déstabilise profondément sa structure politique et sociale. L'échec de la diplomatie a ainsi révélé la profonde fracture qui déchire le pays et son incapacité à dépasser ses divisions internes.
Répercussions géopolitiques : La mutation du paysage mondial
Les répercussions de la guerre en Ukraine vont bien au-delà de ses frontières et ont des implications majeures pour l'ordre mondial.
En ravivant les tensions d'un monde bipolaire à la guerre froide, la crise ukrainienne a ouvert une nouvelle phase de confrontation entre la Russie et l'Occident. Les sanctions économiques imposées à la Russie ont montré leurs limites, n'affectant que marginalement les choix politiques de Moscou, tout en renforçant sa posture défiant l'ordre mondial établi.
En revanche, la guerre a permis à la Russie de se réorganiser stratégiquement et de renforcer ses liens avec des puissances émergentes, comme la Chine, consolidant ainsi une alliance qui pourrait redéfinir l'équilibre mondial dans les années à venir.
La réorganisation des rapports de sécurité en Europe de l'Est s'est traduite par une augmentation des dépenses militaires et une coopération accrue au sein de l'OTAN, entraînant un redéploiement stratégique de l'Alliance. Cette évolution s'accompagne de nouveaux « conflits gelés » en Moldavie, en Géorgie et ailleurs, redéfinissant le paysage géopolitique de l'ex-Union Soviétique.
Conclusion : L'Ukraine, symbole d'un ordre mondial en pleine transformation
La crise ukrainienne, épicentre de tensions géopolitiques mondiales, met en exergue l'incapacité de la communauté internationale à répondre aux défis d'un monde multipolaire en constante évolution. L'échec de la diplomatie, l'escalade des rivalités géopolitiques et l'instabilité persistante soulignent les obstacles majeurs qui se dressent sur la voie de la réorganisation de l'ordre mondial. Si la résolution du conflit ukrainien demeure incertaine, il est évident que ses conséquences redéfiniront durablement les rapports de force internationaux pour les décennies à venir.
Cette situation met en lumière la nécessité impérieuse pour les puissances européennes de repenser leur position et leur rôle sur la scène internationale. L'Union européenne, malgré ses divisions internes et la montée en puissance d'acteurs comme la Chine, est-elle en mesure de consolider sa place dans le concert des nations mondiales ? Parviendra-t-elle à surmonter ses désaccords internes pour affirmer une politique étrangère et de défense commune, ou se retrouvera-t-elle marginalisée dans un monde de plus en plus polarisé où les rapports de force redéfinissent sans cesse les règles du jeu ?
Dans un contexte international multipolaire et de plus en plus instable, marqué par des tensions géopolitiques croissantes et une remise en question des fondements de l'ordre mondial traditionnel, l'Europe se trouve à un carrefour stratégique.
Malgré ses divergences internes, l'Union européenne possède un potentiel indéniable pour redéfinir ses relations internationales et renforcer sa coopération interne, si elle parvient à transcender ses différences.
L'Europe peut-elle réellement prendre l'initiative de renforcer son autonomie stratégique, notamment en matière de défense, de technologie et de gestion des crises, tout en réduisant sa dépendance vis-à-vis des États-Unis ? Peut-elle surmonter des enjeux complexes, tels que la politique migratoire, la souveraineté nationale et les tensions économiques internes, pour s'unir autour d'une politique étrangère cohérente ?
Dans le même temps, la montée en puissance de l'Asie, et en particulier de la Chine, associée à l'incertitude quant à l'engagement des États-Unis sous certaines administrations, impose une réflexion sur l'impératif d'une recomposition européenne.
Cette dynamique sera-t-elle suffisamment solide pour surmonter les obstacles géopolitiques internes et externes, ou l'Europe risque-t-elle de se retrouver marginalisée dans un monde de plus en plus divisé ?
En définitive, bien que l'Union européenne dispose des ressources et du potentiel nécessaires pour redéfinir son rôle sur la scène internationale, elle se trouve confrontée à des défis d'une ampleur considérable. Les divergences internes, les questions de souveraineté nationale et l'ascension d'autres puissances mondiales comme la Chine compliquent sérieusement toute tentative d'unité. La réduction de la dépendance aux États-Unis et la construction d'une véritable autonomie stratégique soulèvent de nombreuses interrogations quant à la capacité de l'Europe à évoluer de manière cohérente face aux menaces globales.
L'Europe, bien qu'elle soit en mesure de renforcer son influence sur la scène mondiale, devra surmonter des obstacles redoutables pour parvenir à une coopération interne solide et à une stratégie internationale cohérente. Pour devenir un acteur véritablement clé, elle devra surmonter ses fractures internes et faire preuve d'une volonté politique commune, une condition indispensable mais encore fragile à réaliser.
Le cas de la crise ukrainienne offre au continent africain de nombreuses leçons essentielles qu’il peut tirer pour renforcer sa position dans un monde géopolitique de plus en plus complexe.
Tout d’abord, la situation actuelle met en évidence l’importance capitale de l’unité et de la solidarité régionale. Dans un monde multipolaire, la force d’un groupe d’États unis par des objectifs communs est incontestable. L’Ukraine, bien qu’elle se trouve au centre des tensions internationales, incarne cette nécessité d'une alliance solide face à des crises mondiales. L'Afrique, en tant que continent riche de diversité, doit poursuivre ses efforts d'intégration régionale à travers des organisations comme l’Union africaine ou les communautés économiques régionales. En renforçant la coopération intra-africaine, le continent peut jouer un rôle plus influent dans la définition des relations mondiales.
Une autre leçon importante de la crise ukrainienne concerne la nécessité de diversifier ses partenariats stratégiques. La guerre en Ukraine a montré à quel point certains pays peuvent se retrouver dépendants d’un nombre restreint de partenaires géopolitiques, une vulnérabilité que l'Afrique ne peut se permettre. En diversifiant ses relations avec des puissances émergentes telles que la Chine, la Russie ou l’Inde, tout en maintenant des liens avec les États-Unis et l’Europe, l'Afrique peut préserver son autonomie et éviter d’être subordonnée à un seul acteur majeur. Cette diversification géopolitique est un levier pour garantir une influence plus équilibrée dans le concert des nations.
La crise a également mis en lumière l’importance de la gestion des ressources naturelles et énergétiques, un domaine où l'Afrique dispose d'un potentiel inestimable. La dépendance des pays européens aux importations d’énergie a montré la fragilité de systèmes énergétiques trop centralisés et vulnérables aux conflits. Dans ce contexte, l'Afrique, riche en ressources naturelles, doit impérativement développer ses infrastructures énergétiques internes, promouvoir les énergies renouvelables et améliorer sa gestion des ressources naturelles pour renforcer son indépendance et assurer une résilience face aux crises mondiales. Cela passe par une gestion plus durable de ces ressources, mais aussi par une plus grande intégration énergétique au sein du continent.
Parallèlement, la crise ukrainienne met en évidence l'importance d'une diplomatie proactive et indépendante. L'Afrique doit renforcer son rôle sur la scène internationale en devenant un acteur diplomatique plus actif, capable de défendre ses propres intérêts. Cela implique la capacité à s'engager dans des négociations mondiales tout en préservant ses priorités, telles que le développement économique, la sécurité et la lutte contre les inégalités mondiales. La crise en Ukraine a montré qu’un continent peut se retrouver marginalisé si ses voix ne sont pas suffisamment fortes dans les grandes discussions internationales. L'Afrique doit donc mettre en place des mécanismes pour affirmer sa diplomatie et sa souveraineté face aux puissances mondiales.
L’Afrique pourrait également tirer des enseignements sur la gestion des conflits internes. La guerre en Ukraine a mis en exergue l'impact dévastateur des conflits internes non résolus, mais aussi des ingérences extérieures. Pour l'Afrique, cela souligne l'importance de trouver des solutions pacifiques et diplomatiques aux conflits internes, plutôt que de se laisser déstabiliser par des tensions politiques. Le renforcement des institutions de gouvernance, la promotion de la réconciliation nationale et l’établissement de processus de paix durables sont essentiels pour éviter l’escalade des conflits et garantir la stabilité régionale.
Un autre aspect fondamental est la prise de conscience de la vulnérabilité face aux dynamiques mondiales. La guerre en Ukraine a démontré que les crises géopolitiques peuvent rapidement affecter tous les continents, y compris l'Afrique, notamment en termes d’augmentation des prix des matières premières, de perturbation des chaînes d'approvisionnement ou d’instabilité alimentaire. L'Afrique doit être prête à anticiper ces effets et à mettre en place des stratégies de résilience, notamment en matière de sécurité alimentaire et d'indépendance économique. Cela nécessite une diversification de ses économies et le renforcement de ses infrastructures locales.
Enfin, l'une des leçons majeures que l’Afrique peut tirer de la crise ukrainienne est la nécessité d’une vision commune pour son avenir face aux bouleversements mondiaux. Le continent doit se doter d’une stratégie géopolitique claire et cohérente qui repose sur des principes de coopération, de souveraineté et de solidarité intra-africaine. Cela passe par une volonté politique forte de surmonter les défis mondiaux, qu’il s’agisse du changement climatique, des migrations ou de la sécurité mondiale. Pour que l’Afrique puisse véritablement jouer un rôle clé sur la scène internationale, elle devra dépasser ses divisions internes et adopter une vision partagée de son développement et de son influence dans le monde.
En somme, la crise ukrainienne offre à l'Afrique une occasion unique de réfléchir à son rôle dans un monde en constante évolution. Si elle réussit à renforcer son unité interne, à diversifier ses partenariats, à gérer ses ressources de manière durable et à affirmer sa diplomatie, elle pourra non seulement préserver sa souveraineté, mais aussi s’imposer comme un acteur incontournable dans la réorganisation de l’ordre mondial à venir.
Par Baba DIOP
RAMADAN À DEUX VITESSES
L’information je l’ai tirée du tweet de la présidence qui déclare que, vu l’ampleur de la crise, cette année, le jeûne se fera par rotation. La moitié des Sénégalais jeûnera du premier jour au quinze et l’autre moitié du quinze au trente
Ton’s avait enjambé le caniveau pour rejoindre sa bande de « alatraités » qui avaient érigé la devanture de la menuiserie de Baye Diagale en grand’place.
Les Alatraités cotisaient pour acquérir tous les quotidiens, comblant ainsi leur manque de lecture au moment où ils étaient en activité. Pour tout dire, la grand’place de Ton’s était devenue au fil du temps le lieu où se débattait à coup de postillon, l’avenir de notre cher Sénégal.
Les membres de ce cénacle se prenaient pour des experts en tout. C’était à se demander pourquoi on les avait oubliés dans l’attelage gouvernemental. Ton’s de sa hauteur de Kouss Condrong gesticulait à en crever l’œil de son voisin.
Vendredi, alors qu’on discutait ferme sur le début du Ramadan, Ton’s annonça détenir une information de dernière minute, un décret signé de son cher président et contresigné par le vice-président. Un décret qui va révolutionner le jeûne au Sénégal et pourquoi pas, dans toute la Umma africaine.
Ton’s se hissa sur l’établi de Baye Diagal et déclara de manière docte : « En temps de crise, la bonne riposte ». Il ajouta que le Sénégal est la terre des bonnes idées, un puits où le monde entier vient puiser. Ton’s avait plaisir à faire languir l’assistance. « L’information je l’ai tirée du tweet de la présidence qui déclare que, vu l’ampleur de la crise, cette année, le jeûne se fera par rotation. La moitié des Sénégalais jeûnera du premier jour au quinze et l’autre moitié du quinze au trente. Ceci pour ne pas ralentir le travail ». Des EUSKEY fusèrent.
Un mendiant qui passait par là déroula sa banderole « Dou gnouka nangou, koorgui sugnu traite là »
Par Abdoul Aly KANE
RESTAURER LE POUVOIR DES ORGANES DE CONTROLE, UN GAGE DE BONNE GOUVERNANCE
Le rapport de la Cour des comptes sur l’endettement public est devenu accessible à tous les Sénégalais, témoignant d’une volonté de transparence inédite de l’actuel gouvernement, soucieux de soumettre au Peuple la situation difficile que traverse le pay
Le rapport de la Cour des comptes sur l’endettement public est devenu accessible à tous les Sénégalais, témoignant d’une volonté de transparence inédite de l’actuel gouvernement, soucieux de soumettre au Peuple la situation difficile que traverse le pays.
Le Premier ministre avait déjà attiré l’attention des Sénégalais et des partenaires financiers sur l’état réel des finances du pays, en s’inscrivant en faux par rapport aux chiffres du déficit budgétaire et de l’endettement public de la gestion précédente.
En annonçant des encours supérieurs, il prenait le risque d’un retour de manivelle pouvant conduire à un gel des financements escomptés des bailleurs, devenus indispensables au bon fonctionnement de la machine économique.
La Cour des comptes, invitée à faire l’audit sur la situation des finances publiques de 2019 au 31 mars 2024, se mit au travail et déposa des conclusions confirmant les faux chiffres du budget et de la dette, confirmant ainsi les déclarations du Premier ministre Ousmane Sonko.
Les premières réactions officielles sont venues du ministre-Secrétaire général du gouvernement qui a commenté le contenu du rapport d’un ton gravissime, faisant craindre un retour vers l’ajustement structurel des années 80, à l’initiative de la Banque mondiale et du Fmi.
Les interventions postérieures du ministre en charge des Finances et du budget, puis du ministre en charge de l’Economie et des finances, et enfin du Premier ministre (à l’Assemblée) ont apporté des éléments d’information sur les actions de redressement envisagées et les perspectives.
Le débat public qui s’est engagé par la suite doit être salué, même s’il a été parfois pollué par des interventions purement politiciennes, alors qu’on attendait (on attend encore) des réponses claires de la part des responsables ministériels et de hauts fonctionnaires désignés comme les principaux responsables des manquements évoqués.
A la lecture du rapport, on constate qu’au-delà de l’importante question du déficit budgétaire, la question cruciale est celle de l’encours réel de la dette au 31 mars 2024 et sa soutenabilité, soit la capacité à faire face aux échéances sans appui extérieur spécifique.
Le déficit du budget de 12, 3% contre 4, 9%, annoncé par l’ancienne gestion pour un standard de 3%, ne pose pas de problème en soi, précise le Secrétaire général, puisqu’il s’agit d’une prévision annuelle susceptible d’être ajustée à la baisse à mi-parcours, via une loi de finance rectificative, en «ajustant» les prévisions de dépenses aux recettes réellement mobilisables.
L’ancienne gestion avait surtout voulu dissimuler les vrais chiffres de la dette publique, en omettant volontairement de comptabiliser dans les livres publics et selon règles de la comptabilité publique, les dettes contractées auprès des banques commerciales et les dépenses correspondantes.
Dans un contexte de dépendance financière à l’égard de créanciers dont les décisions sont basées sur des indicateurs macroéconomiques arbitrairement imposés et l’appréciation des agences de notation, la dissimulation des chiffres réels valent aujourd’hui au pays une perte de confiance que les nouvelles autorités ont pris l’option de rétablir en jouant la carte de la transparence.
Pour situer les responsabilités, le rapport de la Cour des comptes a pointé du doigt des directions du ministère des Finances et du budget, en particulier celle chargée de l’ordonnancement des dépenses (Dodp) pour défaut d’enregistrement comptable des mouvements des comptes ouverts dans les banques, et d’ordonnancement des dépenses hors la connaissance des comptables publics.
La Cour des comptes elle-même, productrice du rapport, a été pointée du doigt dans le cadre des débats.
«On se demande où était la Cour des comptes pendant la période contrôlée», a commenté M. Youssou Diallo, président du Club Sénégal émergent. «L’ensemble des dirigeants de la Cour doivent démissionner. Ce sont des institutions qui fonctionnent au gré de ceux qui sont au pouvoir.»
La réponse que les juges de cette institution soumis au droit de réserve auraient du mal à donner, est pourtant à portée du regard.
En effet, déjà dans son rapport définitif de 2022, sur l’audit financier de la dette 2018/2020 (en ligne), la Cour des comptes faisait les mêmes observations et recommandations.
Citons-en quelques extraits :
«La Dodp, qui ne tient pas de comptabilité conformément au plan comptable de l’Etat, gère un portefeuille important de projets, entraînant des mouvements de fonds de montants significatifs.»
«Recommandation n°1: La Cour recommande au ministre des Finances et du budget, en relation avec le Ministre de l’économie, du plan et de la coopération (Mepc), de veiller à la mise en place d’un système intégré d’information sur la dette publique.»
«La Dodp dispose de plusieurs comptes bancaires et n’effectue pas de rapprochements bancaires ; d’ailleurs, les documents de suivi ne permettent pas de dégager des soldes comptables pour procéder auxdits rapprochements.»
La «Recommandation n°4 de la Cour» demandait respectivement :
Au ministre des Finances et du budget de «mettre fin au cumul de fonctions d’ordonnateur et de comptable par le Directeur de l’ordonnancement des dépenses publiques (Dodp) conformément à l’article 14 du Règlement général sur la comptabilité publique, et de veiller à la tenue de la comptabilité des prêts conformément au plan comptable de l’Etat» ;
Au directeur de l’Ordonnancement des dépenses publiques de «procéder périodiquement au rapprochement bancaire des comptes dont il est gestionnaire».
Dans sa recommandation n°6, la Cour demandait au Directeur général du Budget de «veiller au contrôle et au suivi des opérations de la Direction de l’ordonnancement des dépenses publiques».
Elle ajoutait que «la Direction du contrôle interne de la Direction générale du Budget n’avait pas mené de mission de vérification à la Direction de l’investissement (actuelle Dodp) depuis au moins dix (10) ans, et ne recevait plus les états de synthèse de ladite direction aux fins de contrôle et suivi».
Pour l’essentiel, ces constats et recommandations de 2022 ont été réitérés dans l’audit de 2025.
En sus, des dérives graves ont été signalées par l’institution dans le dernier rapport, concernant les dépenses du budget général, en particulier des transferts de fonds faramineux effectués au profit de «services non personnalisés de l’Etat» par débit de comptes ouverts au Trésor, gérés en dépit des procédures prévues par la réglementation.
Ces manquements ont été constatés sur des mouvements de fonds très importants en valeur.
Ainsi, les recommandations formulées en 2021 par la Cour des comptes, n’ayant pas donné lieu à des correctifs demandés au ministre des Finances et du budget, il peut être permis de considérer qu’il y aurait eu une volonté délibérée de l’ancienne gestion, d’observer le statu quo sur les irrégularités, source d’opacité dans la gestion de la dette publique durant près de 12 années.
Aussi, l’idée que la Cour des comptes aurait été «bernée» ne nous parait pas juste, en ce qu’elle a souligné tout au long de ses rapports d’audit, les manquements organisationnels et comptables dans la gestion de la dette.
En effet, quand elle souligne l’absence d’états de rapprochements bancaires permettant de confirmer les soldes, elle alerte sur les possibilités de «fausser» les encours réels de la dette.
La Bceao, certainement contre son gré, aurait subi la situation d’opacité constatée.
Par la voie de son ancien Directeur national, actuel Secrétaire général du gouvernement, elle avance avoir subodoré l’octroi de financements à l’Etat de la part des banques, se basant sur les besoins de refinancement manifestés par les banques concernées, alors qu’elles étaient censées être en situation de liquidité.
Toutefois, si l’on sait que les banques font des déclarations décadaires et mensuelles à la Bceao portant sur les mouvements de leurs principaux comptes et leurs situations comptables périodiques, comment l’analyse documentaire n’a-t-elle pas pu relever la dégradation de leur liquidité et en cerner l’origine ?
L’autre explication possible est que les banques concernées auraient caché la réalité à la Bceao, donc auraient été partie prenante de cette politique du silence.
C’est dire que dans les mesures conservatoires à prendre, doit figurer le contrôle régulier des banques en rapport à l’endettement public, via des déclarations idoines et une procédure de rapprochement des mouvements et des soldes de comptes entre celles-ci et le Trésor.
Concernant le ratio d’endettement sur Pib (99, 65% en 2023), il est certes élevé par rapport aux engagements souscrits en Uemoa (seuil de 70%), mais il faut signaler qu’il était de 73% en 2021.
Ailleurs, le ratio a une valeur encore moins contraignante.
Au 3ème trimestre 2024, la Grèce, avec un ratio de 163, 6%, détient le plus fort taux d’endettement de l’Union européenne, devant l’Italie (137%), la France (112, 2%), la Belgique (108%), l’Espagne (105, 3%) et le Portugal (100, 6%) ; les Etats-Unis sont loin devant avec un ratio de 122, 30 % en 2023.
Pourtant en zone euro, dans un contexte de crise de la dette publique et de taux d’intérêts hauts, des pays très endettés (Endettement/Pib supérieur à 100%), avaient la possibilité d’obtenir de la part des banques centrales, le rachat massif de leurs titres publics anciens sur le marché secondaire.
Cette politique «non conventionnelle» avait permis de baisser les taux d’intérêts et par conséquent de réduire les charges financières pesant lourd sur la dette publique et sur la mobilisation des ressources pour le financement du déficit budgétaire.
Le problème des Etats de l’Umoa est qu’ils n’ont d’autre source alternative de financement que le marché obligataire international en devises (Eurobonds) et le marché régional des titres publics (Umoa) centré sur les obligations d’Etat à court terme (bons du Trésor) et peu animé faute d’un marché secondaire dynamique.
Au Sénégal, les souscripteurs de titres publics sont essentiellement les banques dont la préférence pour les opérations de trésorerie à court terme est avérée, au détriment des opérations d’intermédiation classiques («dépôts/prêts» à la clientèle).
Ainsi, le pays est forcé de subir le «diktat» du système financier international pour les ressources longues et le reprofilage d’un endettement lourd.
Pour en revenir au rapport de la Cour des comptes, malgré les alertes des organes de contrôle, les autorités du régime de Macky Sall ont persévéré dans les mêmes pratiques prenant à revers les règles de fonctionnement de l’Etat en la matière.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, «ce qui devait arriver arriva».
Concernant l’avenir, les autorités, de concert avec les institutions financières internationales, confirment que le Sénégal n’est pas en ajustement structurel.
On est loin en effet de l’ajustement structurel des années 80 qui avait un objectif plutôt politique.
Le soubassement était l’insertion du Sénégal dans la mondialisation naissante, en délestant l’Etat de ses moyens d’intervention dans l’économie (suppression des sociétés publiques à vocation agricole, destruction de la petite et moyenne industrie embryonnaire via la suppression du dispositif de protection, élimination des banques nationales enclines à distribuer le crédit aux Pme, ouverture tous azimuts du marché intérieur aux industries étrangères plus compétitives).
Malgré l’échec de cette politique d’ajustement structurel, le Fmi est demeuré l’institution difficilement contournable en matière de levée de fonds auprès des bailleurs et des marchés financiers.
Aussi, à ceux qui recommandent de ne pas signer de programme avec le fonds, il faudrait peut-être nuancer le propos, compte tenu du défaut d’alternative immédiate, l’essentiel étant de bannir les engagements à moyen et long termes qui mettraient en péril les programmes économiques engagés.
C’est en faisant appel à la mobilisation populaire autour d’un pacte social menant à la fondation d’une économie endogène, moins réactive aux chocs extérieurs (hausse des prix des produits alimentaires, de l’énergie, baisse des prix à l’export des matières premières) et fondée sur la transformation industrielle, l’érection d’une industrie culturelle créative, numérique, la promotion des Pme que le Plan de développement «Sénégal 2050» atteindra ses objectifs.
Pour finir, nous sommes donc de ceux qui pensent qu’avec le rapport d’audit de 2025, la Cour des comptes a, une fois de plus, «fait le job» !
C’est le lieu de féliciter ces juges des comptes pour la qualité du travail accompli dans la constance.
Les autorités politiques doivent également bénéficier d’un large soutien pour la poursuite de cette opération «mains propres», du nom de celle mise en œuvre au début des années 90 en Italie, «Mani pulite», qui avait abouti à la mise en examen de près de 4000 entrepreneurs, hommes politiques et fonctionnaires, et à près de 700 condamnations.
Ils annoncent ainsi une vraie rupture avec les pratiques antérieures, car les Sénégalais ont pu remarquer que jusque-là, les rapports et prescriptions des organes de contrôle subissaient la loi du «tiroir», du «coude» auguste du prince ou alors de l’inertie du procureur.
On ne saurait terminer sans fustiger avec la dernière énergie, les pratiques d’un pouvoir sorti par les urnes, qui ne s’embarrassait aucunement des normes présidant au bon fonctionnement de l’Etat, foulant aux pieds les recommandations des corps de contrôle, quitte à trahir ses propres engagements pris dans l’espace communautaire (Règlement n°09/2007/CM/Uemoa).