Abidjan, 22 mars 2015 (AFP) - Le président ivoirien Alassane Ouattara sera investi dimanche par son parti comme candidat à la présidentielle d'octobre, une élection cruciale pour ce pays qui sort d'une décennie de crise politico-militaire et qui a renoué ces dernières années avec forte croissance économique.
Plus de 6.000 membres du Rassemblement des républicains (RDR), sa formation, sont attendus dimanche au palais des sport de Treichville (un quartier d'Abidjan) pour un Congrès extraordinaire de désignation aux allures de plébiscite:
Alassane Ouattara, 73 ans, n'a pas de concurrent, ni même d'adversaire, au sein du RDR. "Ce congrès va sonner le départ d'une large campagne, pour la réélection du président Alassane Ouattara dès le premier tour à un taux de 75%", a assuré à l'AFP le député RDR Adama Bictogo, président du comité d'organisation.
- Croissance très forte -
Le président ivoirien, arrivé aux affaires au terme d'une crise postélectorale sanglante, causée par le refus de l'ex-chef de l'État Laurent Gbagbo de reconnaître la victoire de M. Ouattara à la présidentielle de novembre 2010, s'est fixé 2020 comme horizon.
Face à une opposition divisée, il est d'ailleurs favori du scrutin d'octobre. "J'ai trouvé un pays complètement en ruine, effondré, qui avait et a besoin d'être reconstruit, expliquait-il à l'AFP en juin 2013 lors d'un voyage au Japon. J'ai indiqué clairement que je ne suis pas sûr de pouvoir finir ce travail dans le temps qui me reste et que vraisemblablement je briguerai un second mandat".
Après une décennie de crise politico-militaire, marquée par la partition du pays, ayant laissé la Côte d'Ivoire exsangue, l'ancien vice-président du Fonds monétaire international (FMI) peut se vanter d'une réussite économique certaine en quatre ans de règne.
Sous sa houlette, la Côte d'Ivoire, premier producteur mondial de cacao, a retrouvé une croissance très forte, d'environ 9% par an entre 2012 et 2014, soutenue par un investissement public fort. Le troisième pont enjambant la lagune d'Abidjan, chantier monumental désormais en fonction, constitue le symbole de son premier mandat.
Ses soutiens lui tressent des lauriers, tel le ministre du Plan Albert Toikeusse Mabri, qui louait mardi le "leadership éclairé" de ce "gagneur", cet "homme providentiel", lors d'une conférence régionale qui avait justement pour thème l'"émergence".
Alassane Ouattara a fait de l'"émergence" - un fort développement économique et social - son objectif pour la Côte d'Ivoire en 2020. Une ambition dont se gausse l'opposition, qui critique une mauvaise répartition des fruits de la croissance.
Le président Ouattara peut également se flatter d'avoir accompagné l'apaisement de la Côte d'Ivoire. Plus de 3.000 personnes sont mortes en cinq mois de violences postélectorales entre décembre 2010 et mai 2011.
Mais son action pour la réconciliation demeure en l'état critiquée. La commission vérité et réconciliation, censée provoquer une catharsis dans la société ivoirienne par l'audition de victimes et de leurs bourreaux, n'a débouché sur rien de concret.
Les témoignages, souvent très émouvants, n'ont pas été retransmis à la télévision comme prévu.
- 'Justice des vainqueurs' -
De même, aucun cadre pro-Ouattara n'a été inquiété pour son rôle dans la récente crise alors que des exactions ont été commises par les deux camps, nourrissant les accusations de "justice des vainqueurs".
L'ex-Première dame Simone Gbagbo a été condamnée le 10 mars à 20 ans de prison pour "attentat à la sûreté de l'État" au terme d'un procès dont la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) a pointé les "insuffisances", notamment l'"absence d'éléments de preuve probants".
Alassane Ouattara est également accusé par ses détracteurs de "verrouiller" le processus électoral, à l'image de l'ex-président de l'Assemblée nationale sous Laurent Gbagbo, Mamadou Koulibaly, qui dénonce une volonté de "se garantir une victoire trop facile".
Le Parti démocratique de Côte d'Ivoire, allié du RDR, a décidé de ne pas présenter de candidat en octobre pour garantir la victoire du président sortant, au nom d'un hypothétique renvoi d'ascenseur lors de la présidentielle de 2020, provoquant la colère de certains de ses cadres.
Quant au Front populaire ivoirien (pro-Gbagbo), dont des cadres sont inquiétés par la justice, on ne sait s'il présentera un candidat. Une coalition anti-Ouattara, aux contours encore flous, composés de membres de l'opposition et de la majorité, dont des frondeurs du FPI et PDCI, a également vu le jour mercredi. Mais son poids n'est pas encore connu.
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JEAN ROCHEFORT RÉSUME "MADAME BOVARY" DE GUSTAVE FLAUBERT EN LANGAGE DE JEUNES
Jean Rochefort bien assit sur son fauteuil, parle de Madame Bovary, l'une des œuvres majeures de Gustave Flaubert en langage de jeunes
La vidéo a été publiée sur YouTube et résumée comme suit:
La vérité Jean Roch balance son premier feat avec les boloss des belles lettres !!!!! Il envoie sans aucune pression les bails littéraires façon gros moonwalk sur la piste avec ce classique posé : Madame Bovary, par Gustave Flaubert !
Me Amath Bâ brise le silence. Le bâtonnier de l'ordre des avocats, qui est l'invité du quatrième numéro de Grand Format du groupe Sud Communication, tire la sonnette d'alarme sur les risques que le procès de Karim Wade pourrait avoir sur l'image de la justice sénégalaise mais aussi sur sa démocratie.
Dans cette interview exclusive réalisée le 27 février dernier, l'avocat suggère également la révision de tout le dispositif de lutte contre la corruption.
Parce que, selon lui, "la volonté politique n'est pas suffisamment forte pour aller le plus loin possible dans la lutte contre la corruption".
Mieux, ajoute-t-il, "les poursuites ne doivent être politisées, sélectives et attentatoires aux libertés fondamentales, aux droits des gens".
LES LIGNES DE TIDIANE KASSÉ
DEVENEZ DES HÉROS
Ce que les "Lionceaux" ont réussi en renversant toutes les sentences sans sursis, ne peut réellement marquer le football sénégalais que si ce dimanche est un jour de sueur, de rires et de larmes à la fois
L'Histoire (la grande) peut ressembler à une course vaine vers l'infini. Quand toutes les quêtes s'évanouissent et que les itinéraires finissent toujours dans le vide, le perpétuel recommencement de l'échec vous fait penser à une sorte de damnation qui condamne à rester en marge des grands destins qui se façonnent. Le football africain va sur ses soixante ans et le football sénégalais n'y a laissé que de vagues souvenirs. Jamais il n'a réussi à fixer des repères pour marquer une époque.
La finale de la Ja en Coupe de la Caf en 1998, suivie d'une autre finale des "Lions" lors de la Can-2002 ne sont que des pointillés. Ce sont les vainqueurs qui avaient écrit l'histoire.
Ce dimanche, le trait sera un peu plus rempli, quand les juniors auront disputé la première finale du Sénégal dans cette catégorie.
Qu'il serait alors merveilleux de voir se tracer une ligne pleine et franche, sanction d'un premier titre continental, plutôt que de nouveaux pointillés pour rappeler le finaliste.
La qualification des "Lionceaux" rappelle que les plus belles histoires sont celles qu'écrivent les hommes dits sans histoire. Quand on les découvre, elles enchantent. Elles apportent du neuf là où les sentiers battus ont fini d'ennuyer. Une finale Ghana-Nigeria aurait été une fade évidence. Voilà que le Sénégal impose une autre lecture du football africain, ouvrant des perspectives nouvelles, donnant un autre sens au réel.
On est comme face à un "Big bang". Une sorte de commencement quand n'existe que le néant. On a encore du mal à saisir d'où tout cela vient, mais les belles œuvres ne s'expliquent pas. On les savoure. C'est la force de l'instant présent. Le "making of" viendra plus tard.
Comme sous le burin du sculpteur, la création part souvent d'une masse informe. Les lignes se dessinent ensuite, les traits se détachent et les contours commencent à donner vie et mouvement. On semble assister à un tel enfantement, avec la progression des "Lions" depuis leur première sortie de route devant le Nigéria.
Ainsi donc, un football des jeunes dont on a du mal à sentir la réelle existence, est en train de bousculer les doutes dans lesquels on l'a enfermé. Et l'impressionnant aboutissement auquel sont parvenus les "Lionceaux", avec une qualification en finale du Chan des U23, montre que si l'histoire se façonne avec des idées, elle s'écrit par les actes.
Au début de cette compétition, le 8 mars dernier, parier sur Roger Gomis et compagnie aurait ressemblé à une grosse blague. Ni leur préparation ni leurs capacités intrinsèques, encore moins leur cheminement au cours de ces deux dernières années, ne pouvaient fonder des certitudes carrées.
Depuis plusieurs mois, aussi bien les dirigeants fédéraux que l'encadrement technique avaient limité leurs ambitions au "miracle" d'une demi-finale. Voilà que la volonté des jeunes transforme leur maigre semis en belle moisson. C'est comme jeter du plomb dans la forge, pour se retrouver avec de l'or entre les mains. Et peut-être même avec un joyau lumineux au doigt, si les "Lionceaux" maintiennent le foyer à incandescence, dimanche, face aux "Flying Eagles".
Violer l'histoire, dit-on, est permis. "A condition de lui faire un enfant", avait ajouté Alexandre Dumas.
Ce que les "Lionceaux" ont réussi en renversant tous les préjugés, les prémonitions et les sentences sans sursis, ne peuvent réellement marquer le football sénégalais que si ce dimanche est un jour de sueur, de rires et de larmes à la fois.
Les "Lions" de 2002 ont écrit une légende. C'est beau, ça se raconte encore, mais rien n'en atteste dans un coin de l'armoire à souvenirs, sinon un fanion échangé entre Aliou Cissé et Rigobert Song avant le coup d'envoi.
Plus qu'une légende, les "Lionceaux" sont appelés à écrire une histoire.
Ne la ratez pas, jeunes hommes. Sinon, demain, il ne restera plus rien de vous. Vous êtes trop jeunes pour faire des vedettes, devenez alors des héros !
Satisfait des primaires du Pds, à l’issue desquelles son fils, Karim Wade, a été désigné candidat du parti pour la prochaine présidentielle, l’ancien Président Abdoulaye Wade a encore laissé éclater sa colère. S’il se considère comme un non-violent, il met en garde ceux qui seraient tentés de le pousser ‘’à bout’’.
‘’Je suis capable diriger un mouvement de libération dans le maquis, a-t-il déclaré à l’issue du bureau politique du Pds transformé en congrès d’investiture de Karim Wade. Je suis vieux mais j’ai le courage de mes idées. Si Macky confisque le pouvoir, je peux appeler l’armée à intervenir.’’
S’il assure garder ce potentiel de nuisance, celui qui se qualifie de ‘’vieux jeune’’ assure que ce n’est pas la voie qu’il privilégierait. Il y a quarante ans, rappelle l’ancien Président, alors opposant à Léopold Senghor, il fustigeait, dans un article, la prise du pouvoir par les armes.
Et, rappelle-t-il, ce ne sont pas les occasions qui ont manqué. Wade confie, une nouvelle fois, que de nombreux pays qu’il s’est gardé de citer, lui auraient proposer de lui larguer des armes sur une partie du sol sénégalais de son choix, afin de lui permettre de s’emparer du fauteuil de Senghor. Il déclinera toujours les propositions d’insurrection. Gardant le cap d’une opposition républicaine, pacifique, jusqu’à son élection en 2000.
Le Pds est sur la même ligne. Et la tenue de son congrès, ‘’dans l’unité’’, en est une preuve. ‘’Les oiseaux de mauvais augure avaient prévu un clash au sein du Pds lors de ce bureau politique. Ils avaient tout prévu’’, ironise Wade. Comme pour dire qu’il ne s’est rien passé de tel.
Son fils Karim Wade désigné candidat du PDS pour la prochaine présidentielle, Abdoulaye Wade met au défi l’APR de Macky Sall, l’AFP de Moustapha Niasse et le PS de Tanor Dieng de faire autant pour choisir leur candidat.
C’est fait. Karim Wade est désigné, à l'issue d'un Bureau politique transformé en Congrès extraordinaire, pour porter les couleurs du Parti démocratique sénégalais (PDS) à la prochaine présidentielle. En effet, sur les 268 votants, composés des membres de différentes fédérations, dont celles étrangères, Karim Meïssa Wade a enregistré 257 voix, contre 7 pour Amadou Kane Diallo, et 1 respectivement pour Amadou Seydi et Mountaga Guèye. Doudou Dieng, le 5ème candidat en lice n’a reçu aucune voix. Tandis que 2 bulletins nuls ont été enregistrés.
Les militants qui se sont fortement mobilisés ont tressailli de joie à l’annonce du résultat du scrutin qui n’était pas une surprise. Satisfait et galvanisé par ce choix, Abdoulaye Wade n’en attendait pas moins. Pendant le dépouillement, des militants surexcités scandaient : "Karim président, Karim président". A l’annonce du verdict, c'était l’extase à la permanence Oumar Lamine Badji qui était grouillante de monde.
Prenant la parole, l’ancien président s'est dit très satisfait de la qualité du "processus ouvert et démocratique" qui, selon lui, n’existe nulle part au monde. Ni en France ni chez les démocrates américains dont il a dit assister à l’investiture depuis 15 ans, minimisant du coup, la fiabilité du vote électronique en cours de l'autre côté de l'Atlantique. Abdoulaye Wade a aussi insisté sur le fait que l’urne n’a pas été bourrée, comme savait bien le faire le PS à l’époque.
"Ce choix s’est fait selon un processus démocratique, transparent, en public, en présence des militants, des délégués et même de la presse", s’est félicité le chef de file du PDS, à l’issue d’un scrutin qui lui permet de se donner bonne conscience.
Benno bokk yaakaar défiée
"Un choix ne peut être plus démocratique que ce que nous venons de faire. Ça n’existe nulle part au monde", a ajouté Wade devant ses militants. Il considère même que c’est un exploit des temps révolus que vient d’accomplir le Parti démocratique sénégalais. "C’est une tradition qu’on ne retrouve qu’à Rome, il l y a 2000 ans. C’est l’Agora. Je suis fier d’être à la tête de ce grand parti, un parti qui donne l’exemple, un parti courageux qui affronte ses militants, qui ose demander à ses militants de choisir son candidat", s’est félicité le pape du Sopi.
Le vote s’est en effet déroulé devant un parterre de militants et de sympathisants, de la presse nationale et internationale qu’il a voulu prendre à témoin par rapport à ce qui venait de se passer. Dans l’euphorie, Abdoulaye Wade, plein d’humour, a mis au défi ses adversaires politiques de faire autant. En effet, il a appelé expressément Macky Sall et ses alliés à procéder de la même façon que le PDS pour le choix de leur candidat à la prochaine présidentielle.
"Nous venons de donner l’exemple. Il appartient aux autres de faire ce minimum Macky Sall, Moustapha Niasse. Nous les invitons à faire comme nous. Mais s’ils ne le font pas, nous allons considérer leur candidat comme imposé par les bureaux politiques de leurs parti", a lancé Abdoulaye Wade à l’endroit de la majorité. Il a estimé que ce que vient d’accomplir son parti à travers ce choix de Karim n’est pas seulement un acquis du PDS, mais du peuple sénégalais tout entier.
King Fahd Palace Hôtel
Ironique, Wade ne s’est pas contenté de lancer un défi à ses adversaires, il leur promet aide est assistance du PDS pour la réussite de leurs primaires. "Nous serons prêts à les aider techniquement à organiser les primaires ouvertes et démocratiques", a-t-il dit entre un large sourire et le tonnerre d’applaudissement des militants médusés et acquis à sa cause. Relevant que même les fédérations les plus reculées ont participé à ce vote, pour s’en féliciter.
Il s’est, par contre, permis de dire à l’endroit des autres parti : "On n’organise pas un congrès avec des militants qu’on va ramasser à Guédiawaye, dans la banlieue." Revenant sur le King Fahd Palace Hôtel (ex-Méridien Président) qui a refusé la salle à son parti pour la tenue de ce congrès, Wade a dit qu’il aurait pu porter plainte contre l’établissement qui serait, sans doute, condamné. Mais, il ne voulait pas de cette option.
Il a rappelé que cet hôtel était pendant longtemps géré par des étrangers et que c’est lui, alors président de la République, qui l’a arraché de la main des étrangers pour le confier aux Sénégalais. Mais, aujourd’hui, ces mêmes Sénégalais lui refusent d’y tenir son congrès. Toujours est-il que les frais de location (3 millions) qu’ils avaient versés leur ont été rendus avec la note de refus.
Rendez-vous après le Verdict
Les primaires se sont bien déroulées. Un candidat est élu. Mais, ce n’est que la première manche de la bataille qui est gagnée pour le PDS. Le plus difficile est assurément devant. Karim Wade est choisi comme candidat à la présidentielle. Mais seulement, il n’est pas à ce jour un citoyen libre. Détenu depuis environ deux ans pour enrichissement illicite, il a été jugé par la Cour de répression de l’enrichissement illicite, (CREI) qui donnera son arrêt lundi 23 mars.
Si le tribunal suit la réquisition du parquet, c’est que le candidat choisi du PDS ce dimanche purgera une peine de 7 ans avec une amende de 250 milliards francs CFA et la perte de ses droits civiques. Donc il ne peut pas sur le plan constitutionnel être candidat. Dans ce cas, le parti démocratique devra se trouver un autre candidat pour faire face à l’actuel chef de l’Etat qui est porté par une coalition avec laquelle, il gère le pouvoir depuis 2012 (la coalition Benno Bokk Yakaar; BBY).
Mais les libéraux avaient déjà promis qu’ils ne croiseront pas les bras si Karim Wade est condamné lundi. Parlant justement de l’arrêt de la CREI , Wade espère que le pouvoir en place ne tentera pas d’empêcher les militants du PDS d’aller au tribunal écouter la délibération. Ce, d’autant plus que depuis quelques jours les autorités gouvernementales sont aux aguets. Les forces de l’ordre sont mobilisées et promptes à interpeller des membres du parti qui s'agiteraient d'une certaine manière.
Tout compte fait Abdoulaye Wade a demandé à ses militants de se rendre au tribunal comme lui-même, lundi, d écouter le l’arrêt de la Cour et de rentrer tranquillement chez eux comme ils sont venus sans rien casser. Il a promis qu’après la délibération de la CREI, il fera face à ses militants pour faire "un commentaire" tout comme d’autres aussi en feront. On se dirige, en toute vraisemblance, vers un lundi très mouvementé.
Après leur séjour carcéral en république démocratique du Congo (rdc), les responsables du mouvement « Y en a marre » ont profité de leur rencontre avec la presse, hier, pour apporter des éclaircissements sur leur voyage au pays du président Kabila. Ainsi, ils sont revenus sur les circonstances de leur arrestation par la police militaire congolaise. Mais cette page douloureuse n’altère en rien leur détermination à lutter pour l’émergence d’une citoyenneté inclusive africaine.
La rencontre avec la presse a été l’occasion pour Fadel Barro & Cie e réagir contre la campagne de déstabilisation et de sabotage à l’encontre du mouvement «Y en a marre», suite à leur séjour carcéral en République démocratique du Congo (Rdc). Ainsi, vêtus de tee-shirts floqués d’un sifflet et d’un carton rouge, ils ont répondu aux détracteurs de leur structure qui les disent être à la solde de l’Occident. « Nous ne sommes pas des activistes à la solde de puissances étrangères comme le prétendent certaines rumeurs.
En outre, nous ne sommes pas manipulés par des pays pour tenter de déstabiliser des régimes africains », vocifère Fadel Barro. D’après lui, toute cette manipulation fait suite à des procès d’intention souvent faits à « Y en a marre ». « Les gens s’arrêtent sur nos rencontres avec les puissants de ce monde (Obama, Laurent Fabius), alors que nous sommes engagés dans beaucoup de projets sociaux et la promotion de la bonne gouvernance», se plaint-il.
Avant d’ajouter : « Nous n’allons pas nous faire divertir par ce discours rétrograde qui veut subordonner tout mouvement de lutte africain à des puissances coloniales. Cette tentative de déstabilisation ou de musèlement de «Y en a marre» ne marchera pas. Nous restons fidèles à nousmêmes dans la défense de nos convictions. Nous sommes comme l’or et le feu ; plus on nous brûle et plus on brille », nargue-t-il.
Poursuivant son propos, il réaffirme leur engagement pour l’émancipation de la jeunesse et le renforcement d’une citoyenneté africaine participative, malgré toutes les difficultés. « Durant cette affaire, nous avons toujours tenté de respecter les lois et règlements du Congo. Nous sommes entrés avec des visas délivrés par l’ambassade du Congo à Dakar. Ceci en réponse à l’invitation de Filimbi qui est une organisation citoyenne congolaise qui signifie coup de sifflet en Swahili. Ces derniers, en collaboration avec des organismes internationaux comme l’Usaid, la jeunesse de partis politiques et de lucha, nous ont fait venir à Kinshasa pour animer des conférences sur le civisme et la citoyenneté.
Après notre arrivée, les membres de Filimbi nous ont assuré que toutes les autorisations ont été obtenues pour cette manifestation. Mais au deuxième jour (dimanche) des travaux, la police militaire est venue nous appréhender pour nous envoyer à l’Agence nationale du renseignement (Anr) où nous avons été détenus séparément des autres membres de la société civile congolaise », relate Fadel Barro.
«NOUS N’AVONS SUBI AUCUNE VIOLENCE, NI D’INTIMIDATIONS ET BRIMADES DE LA PART DES FORCES DE SECURITE CONGOLAISES»
Toutefois, le rappeur Malal Talla a tenu à préciser n’avoir subi aucune violence, ni intimidations, ni brimades de la part des forces de sécurité congolaises. «Nous avons même reçu la visite du chef de l’agence qui nous a demandé si on n’a pas été violenté. Ainsi, après les interrogatoires des agents congolais où on a exposé toute notre démarche dans la transparence, ils nous ont libérés le mercredi dernier à 15 heures avant de nous conduire à l’aéroport pour prendre l’avion pour Bruxelles. Et Fadel Barro d’ajouter : «cette parenthèse n’est qu’une petite étape dans notre parcours pour l’émancipation de la jeunesse africaine. Mais, cela n’ébranle pas notre conviction et la réussite de la mobilisation à Ouagadougou contre Blaise Compaoré nous conforte dans notre combat».
Pour le journaliste, cette lutte est le symbole d’une jeunesse africaine qui se prend en main. « Nous voulons faire bénéficier de votre expérience et notre expertise à toute organisation de la société africaine. Ainsi, l’émergence des mouvements citoyens au Togo, au Mali, au Burkina Faso et en Mauritanie témoigne de la vigueur de ce concept qui vise à l’émancipation des jeunes et à se battre contre tous les fossoyeurs de la démocratie en Afrique », conclut-il.
«Y en a marre» appelle à la libération des membres de la société civile congolaise
Lors de la rencontre d’hier avec la presse, les responsables du mouvement Y en a marre en ont profité pour lancer un appel aux autorités congolaises pour la libération de Sylvain Sanousseké, leader de Filimbi et des membres de l’organisation la Lutte pour le changement (Lucha) en provenance de l’Est du Congo. Pour les responsables de Y en a marre, «ces organisations citoyennes ne mènent pas des idées subversives, mais seulement un travail de conscientisation des jeunes congolais afin de les imprégner dans les principes de civisme et de la citoyenneté». Ces organisations ont pour mission de siffler la fin du massacre de la population congolaise qui depuis des décennies souffre dans l’indifférence de la communauté internationale.
KARIM WADE
Avec 257 voix sur 268, l’ancien ministre d’État est désigné candidat du Pds pour la prochaine présidentielle
FRÉDÉRIC ATAYODI DE SENEPLUS |
Publication 21/03/2015
Karim Wade a remporté les primaires du Pds, ce samedi 21 mars. Il est désigné par les libéraux pour affronter Macky Sall à la prochaine présidentielle. L’ancien ministre s’est imposé en obtenant 257 voix sur 268. Un véritable plébiscite. Le mieux classé de ses quatre adversaires, Amadou Kane Diallo, a récolté 7 suffrages.
Au départ, les candidats à la candidature du Pds pour la course à la magistrature suprême étaient au nombre de douze. Quatre seront recalés. Sur les huit personnalités retenues, trois se sont finalement désistés. Au profit de Karim Wade. Il s’agit de Serigne Mbacké Ndiaye, Habib Sy et Aïda Ndiongue, en détention préventive dans le cadre de la traque aux biens supposés mal acquis.
L’ancien ministre d’État a été investi au cours d’un Bureau politique transformé en congrès et présidé par l’ex-Président Abdoulaye Wade. Lequel était entouré du coordonnateur du parti, Oumar Sarr, et d’autres responsables libéraux.
La désignation de Karim Wade intervient à trois jours du verdict de son procès, fixé lundi prochain. Il est poursuivi pour enrichissement illicite présumé. Le procureur a requis à son encontre 7 ans de prison ferme, une amende de 250 milliards de francs Cfa et la perte de ses droits civiques. Une éventualité qui, si elle se confirmait, pousserait sûrement les libéraux à revoir leur copie. À désigner un autre candidat pour la présidentielle.
Se retrouver du jour au lendemain derrière les barreaux, privé de la liberté d’aller et venir et vivre constamment sous la haute surveillance de gardes, c’est une expérience qu’aucun individu au monde ne souhaite connaître. Naturellement, cette épreuve doit être beaucoup plus douloureuse pour des célébrités souvent habituées à vivre dans l’opulence, à mener grand train, et brusquement contraints de se contenter du strict minimum. Depuis l’accession de notre pays à la souveraineté internationale, beaucoup d’hommes politiques, d’hommes d’affaires, d’acteurs du showbiz et du monde des médias ont connu l’enfer du séjour carcéral. On peut citer pêle-mêle Mamadou Dia, Me Abdoulaye Wade, Idrissa Seck, Abdoulaye Bathily, Mamadou Diop Decroix, Mbaye Diack, Dr Diallo Diop, Mademba Sock, Bara Sady, Sada Ndiaye, Abdoul Aziz Tall, Ndèye Khady Guèye, Thierno Ousmane Sy, Amadou Kane Diallo, Barthélémy Diaz, le célèbre importateur de riz Moustapha Tall, Cheikh Béthio Thioune, Luc Nicolaï, les journalistes Cheikh Yérim Seck, Madiambal Diagne et Moustapha Sow, et enfin le célébrissime pensionnaire de Rebeuss Karim Wade. Et la liste est loin d’être exhaustive. «L’As» est allé à la rencontre de certains d’entre eux (le politicien Mamadou Diop Decroix, le syndicaliste Mademba Sock et l’homme d’affaires Moustapha Tall) qui ont accepté de raconter les différentes péripéties de leur séjour carcéral.
«La prison, c’est quelque chose de difficile. On ne souhaite pas la prison à son pire ennemi». Ces propos tenus par Barthélémy Dias juste après son élargissement de la prison le 22 mai 2012, résument parfaitement l’appréhension des Sénégalais par rapport à la prison. Des déclarations qui confortent la position de Me Ousmane Sèye selon laquelle personne au monde ne peut dire qu’il n’a pas peur de la prison. Si l’emprisonnement inspire une telle phobie, c’est parce qu’au-delà de la privation de liberté qu’il implique, il est vécu comme une déchéance sociale suprême, voire une malédiction.
Chez une importante frange de la société sénégalaise, l’incarcération est assimilée à une cinglante et humiliante défaite. Mais Mamadou Diop Decroix, qui a été incarcéré à quatre reprises, bat en brèche l’idée selon laquelle tout le monde a peur de la prison. «Les hommes politiques se foutent pas mal de la prison», recadre le leader d’Aj/Pads tendance opposition. Car en Afrique, indique-t-il, «la prison est la seconde maison des hommes politiques».
DECROIX: «DANS UNE SOCIETE INJUSTE, LA JUSTE PLACE DES JUSTES C’EST LA PRISON»
Un des principaux animateurs du mouvement estudiantin qui a fortement ébranlé le régime de Senghor entre les années 60 et 70, Mamadou Diop Decroix a fait les frais de sa rébellion en subissant la répression du pouvoir qui l’a mis au frais. Sa première incarcération intervient en 1971. Plus de quatre décennies après, Decroix qui est crayonné comme un homme courageux et teigneux en garde des souvenirs impérissables. «Mon premier contact avec le milieu carcéral ne m’a fait aucun effet. Je découvrais avec intérêt la prison, mais cela ne m’a pas du tout perturbé. Je n’avais absolument pas peur de la prison. Car tout dépend de pourquoi vous allez en prison, ce qui est à la base de votre emprisonnement », rectifie d’emblée l’ancien ministre du Commerce avant de retracer le contexte dans lequel est intervenue son incarcération. «Au début des années 70, le régime de Senghor a été sérieusement secoué. Et ce fut une décennie de répression très violente. Il y avait dans le pays un mouvement populaire insurrectionnel puisque les étudiants avaient fait front avec les travailleurs pour combattre Senghor. Donc c’était un contexte assez difficile pour Senghor qui avait durci ses positions au point de fermer l’université. Si bien que nous qui étions dans l’opposition clandestine, nous nous attendions à tout moment à être assassinés.
Par conséquent, c’était une aubaine qu’on nous envoie en prison. Notre credo à l’époque, c’était ceci : dans une société injuste, la juste place des justes c’est la prison ». A la faveur de la forte agitation qui régnait à l’université de Dakar, Decroix est arrêté en 1971 en compagnie des Abdoulaye Bathily, Mbaye Diack, Famara Sarr, Mamadou Sall, Bassirou Faty, Sakhewar Diop, Mohamadou Sanokho, Mbaye Diouf, Tidiane Ly, Pape Konaré Niang, Alhousseynou Cissé. Decroix est ensuite enrôlé de force dans l’armée pendant 18 mois et envoyé à la prison militaire de Tambacounda où la chaleur était étouffante. «Il faisait 45° à l’ombre. Dans nos cellules, on avait remplacé les fenêtres par des contreplaqués de sorte qu’on ne pouvait pas distinguer le jour de la nuit. Nous étions douze dans la pièce et les toilettes se trouvaient à l’intérieur. Les gens pensaient qu’on allait y rester», se rappelle le coordonnateur du Fpdr qui ne manque pas de relever la grande capacité d’adaptation de l’être humain. «Car malgré l’installation des contreplaqués, le jour on arrivait pratiquement à lire. Le commandant du camp, qui voyait qu’on n’était pas malheureux, a décidé de nous faire sortir et de nous larguer».
DANS LES CELLULES, LES FENETRES ONT ETE BOUCHEES PAR DES CONTREPLAQUES
Véritables têtes brûlées, Decroix et ses codétenus n’avaient pas hésité pas à défier le commandant du camp en observant pendant une semaine une grève de la faim. «Malgré la grève de la faim, on nous apportait toujours des repas et des fruits. Ce qui constituait pour nous une torture. La plus grande torture quand vous avez faim et que vous avez décidé de ne pas manger, c’est qu’on vous apporte des repas et que vous n’y touchez pas», se souvient-il en guise d’anecdote. Autre anecdote : «pendant la guerre de libération de la Guinée Bissau menée par l’armée de libération du Paigc qui se battait contre les troupes coloniales portugaises, on nous a balancés à la frontière bissau-guinéenne. Car Senghor ne voulait pas que les guerrilleros traversent la frontière, pour ne pas impliquer le Sénégal. Dans le quartier général où j’étais à Pakour dans le Kolda, toute la nuit on entendait le bruit des armes. On se disait qu’à tout moment les gars pouvaient venir. Du coup, on ne dormait pas et on était sur le qui-vive».
BALANCES A LA FRONTIÈRE BISSAU-GUINEENNE AVEC DES MINUTIONS AVARIEES
Mamadou Diop Decroix et les autres soldats sénégalais positionnés à Pakour, près de la frontière bissau-guinéenne sont de véritables miraculés. Il suffisait juste d’une petite incursion des guerrilleros ou des troupes portugaises dans leur base pour qu’ils passent de vie à trépas. Car durant tout le temps qu’ils étaient à Pakour, ils étaient sans moyens de défense puisqu’ils ne disposaient que de minutions avariées. «Lorsque nous avons quitté Pakour et que nous sommes retournés à Tambacounda pour les exercices de tir, nous nous sommes rendu compte que les caisses de minutions étaient toutes avariées. Donc, si les gens nous avaient surpris sur place, ils nous auraient égorgés tout simplement», relate-t-il.
«TUE A SANTHIABA MANJACK, L’ETUDIANT ALHOUSSEYNOU CISSE A ETE ENTERRE SANS TETE»
Sur les douze étudiants enrôlés de force dans l’armée et envoyés à la frontière sud lors de la guerre de libération de la Guinée Bissau, si les onze s’en sont sortis indemnes, ce n’est malheureusement pas le cas de Alhousseynou Cissé. Etudiant en deuxième année de droit, Cissé est mort au front à Santhiaba Manjack, tué par les supplétifs portugais qui lui ont coupé la tête. «On l’a enterré sans tête à Ziguinchor. Mamadou Sall, frère de l’ancien ministre Seydou Sy Sall, était présent au moment où Alhousseynou Cissé a été tué. A l’annonce de sa mort, il y a eu beaucoup de grabuges à l’université de Dakar», affirme Decroix avant d’ajouter : «quand nous avons appris la nouvelle à Bignona où nous étions, Sakhewar Diop et moi, notre seule réaction c’était de savoir qui allait être le suivant. Tous les jours, on s’attendait à ce qu’un ou plusieurs d’entre nous meurent. Pourtant, nous n’avons jamais flanché». Après 18 mois de séjour sous les drapeaux marqués par 45 jours de prison militaire, Decroix est de nouveau envoyé derrière les barreaux en 1975. Une fois de plus, les motifs de son arrestation sont relatifs à son opposition aux réformes universitaires instituées par le régime de Senghor.
Sous le coup de l’article 80 du Code pénal, il est jugé pour troubles à l’ordre public, actes et manoeuvres de nature à jeter le discrédit sur les institutions de la République et condamné à huit mois de prison ferme. «Je retournais en prison avec fierté. Durant mon emprisonnement, mon épouse qui portait notre premier enfant était fière de voir son mari s’opposer à un régime autocratique. Elle était au front du combat. Ma maman ne m’a jamais découragé, mon père non plus», déclare l’ancien ministre d’Etat sous Wade, avant d’ajouter : «le pouvoir d’alors savait que je m’en foutais pas mal de la prison. Alors par décret du président de la République, j’ai été exclu de l’université de Dakar et empêché de m’inscrire dans toutes les écoles supérieures du Sénégal». En 1985, à l’occasion d’une marche anti-apartheid, Decroix est encore arrêté en même temps que Wade, Mazid Ndiaye, Bathily, etc. Ils passent la Tabaski en prison. C’était la première fois que Me Wade allait en taule. «Diouf a considéré qu’on voulait saboter la visite de Mobutu, alors que je n’étais même pas au courant que Mobutu venait au Sénégal», argue-t-il.
MADEMEBA SOCK
Seize ans après, la bravoure et l’héroïsme de Mademba Sock sont encore loués à la maison d’arrêt et de correction de Rebeuss où il a séjourné de juillet 1998 à 22 janvier 1999. Emprisonné en compagnie de 26 dirigeants syndicaux pour s’être opposé au projet de privatisation de la Senelec, le leader du Sutelec n’a jamais flanché en prison, selon des agents de l’administration pénitentiaire. Le principal concerné joue à fond la carte de la modestie et vend sa recette qui consiste, dit-il, à «penser sa vie et vivre sa pensée».
Pour Mademba Sock, «c’est un concept qui vous permet de surmonter toutes les épreuves. Quand on est dans certaines situations, on est obligé de recourir à la foi et l’engagement». En tant que leader d’un groupe «qui est agressé et pour lequel l’Etat attendait des moments de faiblesse», Sock s’est construit une carapace autour de sa personne. Et cela, bien avant la prison. «Cela peut m’arriver et voilà comment je devrais me comporter », explique le leader de l’Unsas, attablé dans un célèbre restaurant de la place en cette journée de mars. «En prison, je faisais du sport, je lisais beaucoup et je réfléchissais. C’est quand même un lieu de réflexion. Le rôle du leader c’est de tirer les autres. Chaque fois, j’essayais d’appuyer des camarades qui n’étaient pas forts psychologiquement. Le sport m’a beaucoup aidé à tenir le coup à Rebeuss», soutient l’emblématique leader du Sutelec. Quand on a fait la prison, note-t-il, on n’a plus peur de rien.
«EN PRISON, ON ESSAIE DE VOUS DEPERSONNALISER»
D’un caractère trempé et vrai dur à cuire, Sock a tenu à marquer son territoire dès son arrivée à Rebeuss. Il raconte : «les relations ont été houleuses entre les gardes et moi. L’administration pénitentiaire n’admettait pas que les détenus achètent des produits à l’extérieur et les amènent à l’intérieur de la prison. Mais nous, nous étions 27 personnes et nous avions l’habitude d’acheter du pain et du sucre à l’extérieur. A un moment donné, le régisseur a tenté de nous vendre par tous les moyens certains produits comme le sucre et le café. Le petit sachet de café qui coûtait 25F était vendu à 50F dans la prison.
Considérant cela comme de l’arnaque, j’ai refusé de prendre. Résultat : j’ai eu des problèmes avec le régisseur. C’est ainsi que j’ai adressé une lettre au ministre de la Justice de l’époque, Serigne Diop, via le régisseur qui était obligé de transmettre le courrier. Dans la lettre, j’attaquais le régisseur lui-même. Ce commerce déguisé, pratiqué par l’administration pénitentiaire, était une manière pour le pouvoir de nous affaiblir. Mais cela ne m’a jamais fait flancher. Au contraire, un jour j’ai apostrophé des gardes en leur disant : «on vous amène toujours de l’argent à la porte : il faut que vous arrêtiez, sinon je vais vous dénoncer. A partir de ce moment, les gardes ont compris que j’étais décidé à me battre».
SOCK EN A FAIT BAVER LES GARDES
Alors que la majorité des Sénégalais ont une grande appréhension du milieu carcéral, Mademba Sock relativise : «la prison est plus accueillante que les violons des commissariats de police. Mais le problème de la prison, c’est qu’on essaie de vous dépersonnaliser. Quand vous êtes pudique, vous êtes obligé d’aller aux toilettes très tôt le matin, avant que les autres ne se réveillent et vous observent». Pour tuer le temps, Sock se jette dans la lecture et s’adonne à la belotte et au sport. Le pensionnaire de la cellule 38, qui a adopté les caïds de l’époque comme le célèbre Ino et Pape Ndiaye, se montre alors fervent amateur des séances de lutte. «Ino qui m’appelait «père» était un excellent lutteur, mais il n’y avait que moi pour le faire lutter. Dès que je le lui demandais, il priait quatre rakkas et s’introduisait dans l’enceinte de l’arène. La prison est un milieu à part», indique Sock qui s’offusque du fait que la reconversion soit souvent ratée.
Un des rares détenus à ne pas porter de gris-gris lors de son incarcération et acclamé par les prisonniers à son arrivée à Rebeuss, Sock faisait beaucoup dans le social. Si bien qu’il a été adoubé par la plupart des détenus. Soutenu par ses deux épouses qui se sont beaucoup impliquées dans le combat, le syndicaliste est davantage ragaillardi par le fameux tube «Mademba» que Youssou Ndour a chanté en son honneur. «En prison, la chanson passait en boucle sur la bande Fm et les autres détenus la reprenaient en choeur», se rappelle Mademba Sock qui, à la veille de sa sortie le 21 janvier 1999, a demandé à goûter pour la première fois au fameux «Diagan» (Ndlr, le repas préparé en prison et qu’on sert aux détenus).
SEJOUR DE IDRISSA SECK ET DE BARA TALL
Si Mademba Sock est cité en exemple de détenu courageux, Idrissa Seck, ancien Premier ministre de Abdoulaye Wade, n’est pas en reste. Pendant son séjour de plus de six mois à Rebeuss, il serait resté intact, assure une source pénitentiaire. Il disait aux gardes qu’il ne leur demandera jamais un service, révèle notre interlocuteur. «Si je le fais, on me le reprochera quand je serai Président de la République et que je sois amené à vous voir défiler devant moi. Durant donc tout le temps que je passerai ici, je ne vous demanderai rien». Ainsi dit, ainsi fait. D’autres sources indiquent toutefois que Idrissa Seck était devenu nerveux vers la fin de son séjour. «Il se montrait de plus en plus désagréable envers les gardes pénitentiaires et leur criait dessus », assure un de nos interlocuteurs. «Surtout quand les négociations avec Wade ont commencé à piétiner», croit savoir un autre de nos interlocuteurs. Il n’est pas le seul à s’être montré désagréable envers les gardes pénitentiaires. Tel personnage célèbre pour ses écrits et séjournant au Camp pénal ne supportait pas de ne pouvoir recevoir sa mère dans un pièce confortablement aménagée. Aussi, refusait-il tout simplement de recevoir. Tel autre Directeur général de société nationale, emprisonné en fin 2001, se défoulait sur son avocate et sur le régime de Wade pour déverser son trop plein de rancoeur.
Autre exemple de courage en prison, c’est bien l’entrepreneur Bara Tall, inquiété dans l’affaire dite des chantiers de Thiès. «Fort du soutien constant du personnel de Jean Lefebvre, de ses amis et parents, Bara est resté le même», soutient un élément de l’administration pénitentiaire qui l’a côtoyé.
MOUSTAPHA TALL, HOMME D’AFFAIRES LE SUCRE SALE DE L’IMPORTATEUR DE RIZ
Dans le monde des affaires, ils ne sont pas nombreux ceux qui ont survécu à la prison. Adel Korban, Oumar Ba (un richissime commerçant qui était établi à Kaolack) et Khadim Bousso sont tous décédés alors qu’ils avaient maille à partir avec la justice. Moustapha Tall, le célèbre importateur de riz, est l’un des rares hommes d’affaires à se rappeler et à raconter les 58 jours qu’il a passés derrière les verrous. Ecroué le 7 septembre 2004 dans une sombre affaire de fraude douanière sur le sucre, qu’il considère comme un faux dossier monté de toutes pièces, l’homme d’affaires affirme avoir été imperturbable à l’annonce de sa mise sous mandat de dépôt par le juge Moustapha Fall qui siégeait à l’époque au 3ème cabinet d’instruction. «Quand le juge Moustapha Fall m’a placé sous mandat de dépôt, cela ne m’a pas surpris parce que je savais que je serais pris. Sur le coup d’ailleurs, j’en ai rigolé parce qu’on m’a écroué sans dossier et sans que je sois entendu. Il ne pouvait même pas soutenir mon regard», dit-il en se redressant dans son fauteuil. A la chambre 43 de la Mac de Rebeuss qu’il partage avec 20 détenus, il se montre stoïque et parvient à tenir le coup. «J’ai un mental fort, j’ai été éduqué comme cela. Donc ce n’est pas cela qui pourrait m’ébranler. Je considérais mon séjour à Rebeuss comme un pèlerinage, à l’image de mon guide le vénéré Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké qui a été déporté par les Blancs. Je l’ai pris avec philosophie», clame-t-il.
Alors qu’il avait refusé de transiger avec la Douane qui lui réclamait 650 millions F en guise de différentiel de péréquation, Moustapha Tall s’est senti lâché aussi bien par l’Unacois que ses collègues commerçants a compris qu’il ne devait compter que sur lui-même pour s’en sortir. Il casse sa tirelire et décaisse un milliard de francs Cfa pour recouvrer la liberté, après 58 jours de détention au cours desquels il a reçu de nombreuses visites. N’empêche, il considère que c’est dangereux de mettre les gens en prison. «J’ai été particulièrement frappé par la promiscuité dans le milieu carcéral. Des personnes qui viennent de divers horizons sont entassées par dizaines dans des cellules et on les entendait crier, se cogner la tête contre le mur», raconte notre interlocuteur qui ne s’étonnerait guère que des individus en arrivent à se suicider dans le seul but d’éviter la prison.
CONFIDENCE D’UN PROCUREUR : «Placé sous mandat de dépôt, un homme marié demande souvent s’il peut appeler son épouse…»
Avec plus d’une dizaine d’années d’exercice dans la magistrature, un parquetier qui a eu à notifier à des centaines d’individus leur mise sous mandat de dépôt a relevé les mêmes réactions chez ces clients particuliers et noté l’importante place que la mère, l’épouse, bref la femme occupe dans les moments de difficultés. Sous le sceau de l’anonymat, un procureur qui a longtemps servi au tribunal régional hors classe de Dakar déflore les conduites adoptées dans le secret de son bureau. «Très souvent, quand un homme marié est inculpé et placé sous mandat de dépôt, la première réaction qu’il a c’est de dire : « est-ce que je peux appeler mon épouse ?». S’il s’agit d’homme célibataire, il dira : «puis-je appeler ma mère ? » Et d’habitude, ce sont les épouses et les mères qui font les différentes tractations et les démarches pour trouver un avocat. Il peut arriver qu’une femme qui a un bébé soit mise sous mandat de dépôt. Dans ce cas, elle est souvent accompagnée de son mari qui s’empresse de prendre le bébé et de le mettre face au mur, pour qu’il ne voie pas la détresse de la maman», confie un procureur qui a aussi remarqué la grande propension des personnes écrouées à invoquer Dieu. «Ce sont des gens qui retournent rapidement vers Dieu et retrouvent la foi. «Allahou Akhbar», «Mouhamed Rassoulilahi» font partie des premiers mots qu’ils prononcent. A la cave, quelle que soit l’heure, ils demandent aux gardes s’ils peuvent faire leurs ablutions et prier, ne serait-ce que quatre rakkas».