Le 15 septembre 2021, le Musée Theodore Monod d’Art africain de l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) s’est joint au Musée des îles Canaries (Espagne) pour présenter une exposition d’archéologie des îles Canaries. Une exposition itinérante qui exhibe des ressemblances entre les cultures africaines et celles des îles espagnoles des Canaries, intitulées «Dialogue entre deux cultures». L’exposition retrace la vie des anciens habitants des îles Canaries à travers une quarantaine de pièces archéologiques et une série de photographies de l’artiste visuel canarienne Teresa Correa.
L’exposition présente une quarantaine de pièces archéologiques, des tableaux et des textes complémentaires qui retranscrivent «le retour à la mémoire, à l’origine des premières îles canariennes qui ont des liens très étroits avec l’Afrique du Nord et notamment avec tout le continent africain, une société inégale et spécialisée, des manufactures, des enterrements», précise Teresa Correa, artiste visuel. Ces objets archéologiques, témoins de l’histoire des îles Canaries, renseignent sur le peuplement, le mode de vie avec des ustensiles et matériaux divers qui illustrent de manière étroite, les affinités dans les manières de faire et dans les modes de vie dialoguant ainsi avec la collection du musée de l’Ifan, une institution dont les recherches sont axées sur l’histoire de l’Afrique. «L’ex position montre que le peuplement des îles Canaries a beaucoup de choses qu’il partage avec le Nord de l’Afrique et avec l’Afrique tout entière. Une histoire commune parce que, à côté de ces objets, nous avons nos propres objets du Musée Theodore Monod qui montrent des similitudes, sur l’évolution des technologies dans l’histoire et l’échange de compétences et de transfert culturel», a expliqué El Hadji Malick Ndiaye, conservateur du Musée Théodore Monod. «Dialogue entre deux cultures est donc une exposition qui porte bien son titre car elle rapproche les deux terres et les artistes également qui ont pratiquement une histoire commune», reprend M. Ndiaye. Les deux univers artistiques se rejoignent pour rehausser le niveau de compréhension des enjeux liés au partenariat axé sur l’apprentissage mutuel, le développement d’initiatives conjointes qui contribuent à l’amélioration des connaissances, du patrimoine culturel et des opportunités professionnelles.
Deux formes d’art complémentaires
«Je pense qu’on a beaucoup de choses à apprendre et à s’inspirer de cette exposition pour découvrir les différentes similitudes de nos cultures mais surtout rencontrer la richesse dans la diversité. On doit travailler ensemble pour continuer le développement pour les jeunes générations des opportunités professionnelles dans le domaine de la culture», explique Daniel Perez Estevez, le directeur du Musée des îles Canaries. Pour sa part, le Recteur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, le professeur Ahmadou Aly Mbaye, s’est réjoui du vivier fécond que constituait cette exposition sur l’archéologie des îles Canaries, un signe d’un profond attachement de l’institution universitaire aux valeurs de dialogue. «Cette exposition nous rappelle que la créativité des hommes et femmes à travers les âges reste le meilleur témoin de la résilience de l’humanité. Elle illustre notre potentiel d’adaptation aux mutations du monde», a-t-il commenté. Pour rappel, l’Institut fondamental d’Afrique noire Cheikh Anta Diop et le Musée canarien avaient noué en fin 2020, à Las Palmas (îles Canaries, Espagne), une convention intitulée : «Projet de coopération pour le développement de l’assistance de technique institutionnelle.» Ainsi, les deux institutions entendent se mettre en réseau pour échanger de bonnes pratiques en matière de gestion et de tourisme culturel et soutenir le développement et la professionnalisation des pratiques de médiation muséale par la formation et par des approches novatrices.
Coopération Espagne/ Sénégal
Une «étroite coopération» saluée par l’ambassadrice d’Espagne au Sénégal, Olga Cabarga Gomez. «Cette exposition qui abrite les plus importantes collections archéologiques et documentaires de l’archipel des îles Canaries est un autre échantillon de la coopération étroite entre les îles Canaries et le Sénégal», at-elle ajouté. D’après elle, les relations essentielles entre les deux pays avaient permis de tisser au fil du temps, des liens économiques et socio-culturels très solides. «L’emplacement physique et stratégique du Sénégal renforce une relation qui devient avant tout une relation fraternelle, vivante et plurielle», a-t-elle magnifié. En attendant, les visiteurs ont jusqu’au 15 octobre prochain pour découvrir l’ensemble des pièces archéologiques et littéraires de l’exposition «Dialogue entre deux cultures».
par Florian Bobin
POUR UNE VALORISATION DU PATRIMOINE NATIONAL EN AFRIQUE
Toutes les quelques années, le débat sur le déboulonnement de la statue de Faidherbe à Saint-Louis fait rage au Sénégal. La question de fond, non encore résolue, persiste : que et qui célébrons-nous dans l’espace public ?
« Tu vois la place Maréchal Leclerc au croisement des rues Hugo et Carnot ? Prends à droite sur avenue Jules Ferry et, à ta gauche, tu arriveras à la rue Maréchal Foch ». Bordeaux, Poitiers, Dakar ; les indications se valent.
Indéboulonnables, ces noms trônent au centre des villes de millions de Sénégalais. Combien savent qui se cache derrière ? À force d’emprunter tous les jours le même axe, routine quotidienne oblige, les patronymes qui habillent ses rues – auxquels peu s’identifient – ne deviennent plus que de simples repères spatiaux. On s’y attache. On se les approprie.
Vivre avenue Faidherbe, c’est adopter une identité géographique indissociable du nom de l’intéressé, qui déterminera l’appellation de la boulangerie, la pharmacie, la gendarmerie, l’hôtel, le guichet automatique, la station-service, etc. Il devient lieu de vie ; théâtre d’interminables discussions autour du thé, d’embouteillages à la descente du travail, de négociations avec le commerçant du coin. Devenu partie intégrante de notre quotidien, on en vient presque à oublier qu’il appartient au gouverneur colonial qui industrialisa la conquête du Sénégal par l’empire français au milieu du 19ème siècle, comptable de la mort de milliers de personnes et de la destruction, par le feu, de dizaines de villages.
Une démarche pédagogique voudrait que le public soit informé du contexte derrière telle ou telle inscription dans l’espace public : « Avenue Faidherbe. Gouverneur colonial du Sénégal (1954-1961, 1963-1965) » ; « Bibliothèque Mariama Bâ. Romancière, auteure d’Une si longue lettre (1929-1981) » ; « Théâtre Laba Sosseh. Musicien, premier disque d’or africain (1943-2007) », « Place Lamine Senghor. Tirailleur, militant anticolonialiste (1889-1927) ». Mais il s’agit également de se questionner sur leur portée symbolique.
Quelles mémoires célébrer ?
Le 18 juin 1940 est bien connu à travers la « francophonie » : le fameux discours du général Charles de Gaulle appelant à la résistance face à l’occupation de l’Allemagne nazie et son allié le régime de Vichy. Le gouverneur d’alors du Tchad, Felix Eboué, sera d’ailleurs l’un des premiers cadres politiques à soutenir de Gaulle, depuis Brazzaville, capitale de la « France libre » entre 1940 et 1943. À Dakar et Bamako, comme dans toutes les villes de France, existe au moins une référence à cet évènement. Qui, à l’inverse, se souvient du cinglant réquisitoire anti-impérialiste de Lamine Senghor devant la Ligue contre l’impérialisme, réunie à Bruxelles le 11 février 1927 ? Un discours sur l’occupation coloniale, qu’il appelle à « détruire et remplacer par l’union des peuples libres ». Quel est, alors, le sens de disposer d’une rue célébrant, dans les artères des capitales sénégalaise et malienne, la première date quand aucune ne porte référence à la seconde ?
Une même date peut, par ailleurs, commémorer deux réalités diamétralement opposées. Selon le point de vue, le 8 mai 1945 est synonyme de libération ou de carnage. En Europe, il s’agit de la capitulation de l’Allemagne et la victoire des Alliés. En Algérie, pour avoir osé exiger leur propre libération du joug colonial au cours du défilé célébrant la fin de la guerre, des milliers (sans doute plusieurs dizaines de milliers) d’Algériens furent tués dans les villes de Sétif, Guelma et Kherrata. Entre l’arrêt de bus 8 mai 1945 à Paris ou la place du 8 mai 1945 à Lyon et l’aéroport 8 mai 1945 à Sétif ou l’université 8 mai 1945 à Guelma, deux mémoires se font face.
L’odonyme (nom propre désignant une voie de communication) est ainsi tout autant porteur d’information que d’une mémoire spécifique. Si une rue, une place, un pont, une gare, une université arborent fièrement un nom, c’est parce que quelqu’un l’a ainsi décidé. À ce propos, l’historien Khadim Ndiaye explique : « Les colonisateurs n’ont pas érigé la statue de Faidherbe en 1887 par hasard. C’est quand tous les résistants ont été vaincus par la puissance des canonnières que la statue de Faidherbe a été érigée au milieu de Saint-Louis en signe d’allégresse. Lat Dior est assassiné en 1886, la statue est inaugurée le 20 mars 1887 pour célébrer la victoire sur les résistants et montrer la grandeur de la métropole ».
Ainsi, la Libération de 1944-1945, commémorée par la longue avenue longeant le port de Dakar, fait bien référence à celle de l’Europe, et non du Sénégal. Au même moment, à Thiaroye, des centaines de tirailleurs africains, la plupart enrôlés de force dans l’armée française, étaient froidement exécutés pour avoir réclamé la compensation qui leur revenait de droit. De même, en mai 2018, en réponse à l’inauguration de la « Place de l’Europe » sur l’île de Gorée – siège multiséculaire de la déshumanisation des Africains asservis et déportés vers les Amériques – le philosophe Felwine Sarr fustigeait cette « haine de soi et [ce] viol de sa propre mémoire ».
Le piège de la récupération
Comme l’indique le sociologue Alioune Sall, dit Paloma, « il faut que le nom ait un sens, c’est-à-dire qu’il renvoie à une signification et à une direction », car « nommer est un acte de pouvoir ». Aucune inscription n’est anodine ; elle est le résultat d’un choix politique. Ces dernières années, la figure de Cheikh Anta Diop a été largement remobilisée. Tout le monde semble désormais l’ériger en référence, lui qui fut combattu de toutes parts jusqu’à son dernier souffle. Comment se fait-il que l’université qui porte son nom, et qui abrite depuis un an une statue à son effigie, n’enseigne pas ses travaux ? En ce sens, l’odonyme peut aussi servir d’alibi aux gouvernants souhaitant s’assurer une légitimité populaire face à l’Histoire.
Ne peut-on pas se questionner sur le sens de rebaptiser cinq lycées, en février 2020, au nom d’Aminata Sow Fall (Patte d’Oie) et Cheikh Hamidou Kane (Mbao) alors que l’édition au Sénégal peine à survivre ; d’Ousmane Sembène (Yoff) et Ousmane Sow (Diamnadio) alors que les arts visuels ont été relégués au fond de la classe ; d’Amath Dansokho (Ouakam) alors que tous les principes politiques pour lesquels il s’est battu sont systématiques bafoués ? Ce à quoi s’ajoute cette obsession de « rentrer dans l’Histoire » : le CEM (Collège d’enseignement moyen) de Darou Salam, sous l’impulsion de son frère maire de Guédiawaye, porte déjà le nom du président Macky Sall. Au Cameroun, le plus grand stade du pays, construit pour la Coupe d’Afrique des nations de football 2021, honore l’actuel président Paul Biya. Alors qu’en Côte d’Ivoire, après seulement deux ans au pouvoir, Alassane Ouattara décidait que l’université de Bouaké porterait son nom.
La question de fond qui se pose ici est celle de la conservation du patrimoine national, sous toutes ses formes. Matériel à travers, notamment, la réhabilitation des lieux et bâtiments emblématiques du pays et la restitution des biens culturels. Immatériel par la restitution des archives audiovisuelles conservées dans les fonds étrangers et une révision approfondie des odonymes. Humain par un soutien franc aux artistes et jeunes âmes créatives. Pour que personne ne puisse dire, quand il sera trop tard : « Elles ont fait de leur mieux, malgré les obstacles. Si seulement on les avait davantage soutenues de leur vivant ».
Florian Bobin est chercheur en histoire.
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LA PENSÉE AFRICAINE S'ÉRODE
Y a t-il des valeurs que l’Afrique peut revendiquer à son compte ? Existe-t-il encore une pensée africaine ? Conversation avec l'historien Achille Mbembe, Felwine Sarr, économiste et Annick Thebia-Melsan ancienne fonctionnaire à l’Unesco
Selon un dicton de Sénèque, il est très difficile d’arriver - surtout quand on ne sait pas où l’on va…
Dans les années précédant les l’indépendances et dans la foulée, justement, la pensée africaine n’a pas manqué de maîtres, de « Vordenker », lorsque les intellectuels tenaient le haut du pavé.
De Dakar à Nairobi, les étudiants se sont inspirés de Cheickh Anta Diop, Léopold Sedar Senghor, Mongo Beti, Ngungui Wa Thiongo, Wole Soyinka, Marcien Towa, Amadou Kourouma, Amadou Hampate Ba ou de Paulin Hountondji, Miriam Makeba, entre beaucoup d’autres, pour questionner le rapport de l’Afrique à elle-même et la modernité, son rapport à l’Occident et au monde, pour s’imprégner des idées panafricanistes, inclure la diaspora et penser le politique.
Aujourd’hui, cette effervescence visionnaire semble avoir capitulé en rase campagne devant les diktats consuméristes et mercantiles du FMI et de la loi du marché.
Comment irriguer nos sociétés par une pensée toujours active? Repenser le politique, l’économie, le social et l’environnemental?
Y a t-il des valeurs que l’Afrique peut revendiquer à son compte et, à son tour, inspirer le reste de l’humanité?
Existe-t-il encore une pensée africaine? Une conversation avec de grands esprits.
Achille Mbembe, historien et philosophe originaire du Cameroun, enseignant universitaire en Afrique du Sud, auteur de nombreux ouvrages dont le dernier « Brutalisme » (2020)
Felwine Sarr, économiste et enseignant universitaire, depuis quelques mois aux Etats-Unis. Avec Achille Mbembe, il a créé les Ateliers de la Pensée, un rendez-vous intellectuel organisé périodiquement à Dakar.
• Annick Thebia-Melsan, agrégée de lettres originaire de Guyane, ancienne diplomate et fonctionnaire à l’Unesco, une voix pertinente de la diaspora.
Débat illustré par un hommage au Prof. Babayola Yai Olabiyi, un connaisseur émérite des cultures du monde qui savait singulariser le legs civilisationnel de l’Afrique, tout en approfondissant son actualité. Sur sa vie et son oeuvre témoignent Christine Desouches, Annick Thébia-Melsan et le Prof Robert Dossou.
Une émission produite par MRB-Productions
Ecrite et présentée par Marie-Roger Biloa
Alors que la sous-région ouest-africaine a été le théâtre de trois putschs (deux au Mali, un en Guinée), ces derniers mois, et que certaines élites semblent s’en réjouir, le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne rame à contre-courant. “Les militaires ne sont pas la solution, ils font partie du problème, considère-t-il dans un entretien accordé à Jeune Afrique. La conséquence, c’est que nous sommes confrontés à une crise de l’intégration ouest-africaine, qui était pourtant en bonne voie. En Guinée, comme au Mali, la solution aurait dû passer par les institutions, par la voie démocratique’’. Poursuivant, l’écrivain note que ces prises de pouvoir par les militaires “sont d’autant plus problématiques que, dans un cas comme dans l’autre, on ne sait pas quand le pouvoir sera effectivement remis aux civils. Au Mali, beaucoup de questions se posent quant au respect du calendrier, qui prévoyait des élections en février prochain. Et en Guinée, la situation est encore floue’’.
Sur la question du troisième mandat qui a cristallisé les tensions en Côte d’Ivoire, en Guinée et demeurent une source d’incertitudes pour le Sénégal, Souleymane Bachir Diagne semble séduit par l’idée défendue par le chef d’État libérien, George Weah : “La solution pourrait être celle que préconise le président libérien George Weah : il plaide pour que la Cedeao se porte garant de la limitation du nombre de mandats. Ajouter des critères de convergence démocratiques aux critères de convergence économique est indispensable”.
Toutefois, Souleymane Bachir Diagne appelle à faire un distingo entre le troisième mandat d’Alpha Condé et celui d’Alassane Ouattara. ’’Dans le cas du président ivoirien, ses partisans expliquent qu’il a pu briguer un troisième mandat parce que la Constitution le lui permettait, puisque la réforme adoptée en 2020 n’est pas rétroactive, souligne-t-il. On peut trouver l’explication paradoxale, mais elle a le mérite de mettre la Constitution au cœur du débat. Dans le cas d’Alpha Condé, c’est le contraire : il a décidé de faire une réforme constitutionnelle via un référendum. Cela a été un passage en force, dans le but non avoué de briguer un troisième mandat, même si personne n’était dupe’’.
par Charles Faye
GÉOCULTUREL
Capitale jadis des événements culturels et pas que de ça d’ailleurs, Dakar s’est fait distancer par Abidjan, sa concurrente, qui a toujours rêvé de lui damner le pion
Capitale jadis des événements culturels et pas que de ça d’ailleurs, Dakar s’est fait distancer par Abidjan, sa concurrente, qui a toujours rêvé de lui damner le pion, en lui arrachant ses lampions contrastés, faisant sa beauté dans ses chaudes nuits bercées par ses sirènes marines, désormais absorbées par les bétons de front de mer.
Orpheline, prise au piège par un absentéisme totalitaire et assourdissant, la culture a pris le large. Se laissant courtiser par la ville lagune, que feu Félix Houphouët Boigny, premier président de Côte d’Ivoire, a dressée droit au ciel, pour porter ombrage au vieux Ndakaru de son vieil ami et non moins rival, Léopold Sedar Senghor.
Une revanche, s’il en est du progressiste sur le poète, pour qui pourtant, Dakar ne pouvait avoir pour destin, que d’être une ville lumière millésimée, élevée au rang de Paris, Vienne, Rome, New-York.
Pacheco s’était même laissé prendre aux lambris de l’an 2000.
Que s’est-il passé ?
Que nous ayons perdu le Cinéma, nous n’avons même plus de salle de projection, que nous mobilisons des fonds pour des films que nous ne voyons jamais, hormis les séries que de jeunes génies s’évertuent à sortir avec peine de leurs objectifs numériques, que nous ayons fait de la culture, la locomotive manquante du développement, ne dérange pas.
Dans un tel contexte, la culture, prise trivialement pour une activité satanique dans laquelle s’exhibent l’oisiveté et les damnés de l’enfer, ne peut que manquer d’air et prendre le large afin de se mettre à l’abri de contenants sans contenus autres que l’obscurantisme et les frontières hermétiques de communautarismes.
Tant pis ! Abidjan brille ! Ouaga projette ! Dakar se rurbanise.
Heureusement pour nous, il y a les affaires de la cité. Celles de la justice. Notamment cette affaire de trafics de visas filmée à la Dakarwood, à laquelle s’invite sans surprise la politique.
Qui est fou pour laisser passer l’opportunité d’aider Simon à porter à sa croix et donner à Landing un statut de Kilifeu.
Chapeau le Sonko pour la scénarisation d’une prise de position immédiate et sans faille, campant un discours sans gants, clair comme l’eau de roche.
Le leadership culturel passé sous le nez et la barbe de Dakar ne saurait être au profit de coalitions sans âmes quand bien même elles se définiraient en angles triangulaires.
El phénoméno n’a que trop bien vu l’angle politique, pour laisser passer l’occasion d’affirmer un statut de leader et qui sait, celui du seul vrai patron de l’opposition. Si ce n’est de la culture politique, c’est ignorer comme le disait Marcus Garvey qu’un peuple qui ne connaît pas son passé, ses origines et sa culture ressemble à un arbre sans racines. Déraciné !
«J’AI DÉMISSIONNÉ POUR MONÉTISER MA PASSION DU VOYAGE»
L’ancien ingénieur des télécoms a réussi une reconversion magistrale vers sa passion du voyage. Sans détour, il raconte dans cet entretien le secret d’une réussite qui a remis au goût du jour, «le voyager à l’intérieur du Sénégal»
Ziggy Faye n’a pas la carrure du baroudeur. Ce n’est pas non plus un risque-tout. Sa conception du voyage intègre surtout confort et agrément. A la tête de «Travel with Ziggy», comprenez «Voyager avec Ziggy», l’ancien ingénieur des télécoms a réussi une reconversion magistrale vers sa passion du voyage. Sans détour, il raconte dans cet entretien le secret d’une réussite qui a remis au goût du jour, «le voyager à l’intérieur du Sénégal».
Comment vous est venue l’idée de lancer Travel with Ziggy qui veut dire voyager avec Ziggy ?
J’ai commencé dans le secteur du voyage en 2008. Mais au début, ce n’était qu’une passion parce que je travaillais comme ingénieur des télécoms. J’avais cette passion-là et je me demandais, en tant que Séné-galais, est-ce que je connaissais bien mon pays. Donc j’allais dans les villages faire des immersions. Et je rentrais de ces villages avec plein de photos et des textes où j’expliquais comment ça s’était passé. Je rencontrais les chefs de village qui me racontaient l’histoire de leurs localités, les premiers peuples, etc. Je partageais tout ça sur les réseaux sociaux quand je rentrais à Dakar. Les gens ont commencé à me dire : «Amènes-moi avec toi la prochaine fois.» En 2016, comme je travaillais pour une grande boîte, j’ai pris un congé et je suis parti en Asie. J’ai fait le tour, Kuala Lumpur en Ma¬laisie, Guangzhou en Chine. Quand je suis rentré de ce voyage-là, tout me disait que le travail que j’étais en train de faire dans cette entreprise-là, n’est pas vraiment le travail qui me permettrait d’être épanoui. Donc j’ai décidé tout simplement de démissionner et de réfléchir sur comment monétiser cette passion du voyage que j’ai. D’où ce concept Travel with Ziggy.
C’était difficile, les dé¬buts ?
Quand j’ai démissionné de mon travail, je rentrais d’un voyage où j’avais claqué toutes mes économies. Deuxième¬ment, il y avait ma mère à côté qui me disait : «Pourquoi tu décides de démissionner pour des caprices ? Tu dis que tu as un déclic. On t’a payé des études super chères pour que tu puisses avoir un bon boulot ! Tu es le plus jeune dans l’entreprise, pourquoi tu décides de démissionner pour faire autre chose ?» Donc c’était beaucoup de stress, beaucoup de pressions. Mais il fallait que je me batte, que je prouve à ma mère que ça pouvait être un bon projet. Et que ce projet me permettrait d’être épanoui, de faire ce que j’aime et de vivre pleinement de ça. Après, les problèmes ont été nombreux. On ne travaille pas seul, il y a des prestataires côté transport et côté hébergement d’hôtel. Et souvent, il y a des couacs avec les clients. Mais comme on dit en entreprenariat, des erreurs que tu fais, tu ne peux pas les répéter parce que tu apprends tous les jours. Aujourd’hui, ça fait plus de quatre ans, donc l’expérience est là et il y a plein d’erreurs qu’on faisait avant, on ne les répète plus. Tout se passe super bien pour le moment.
Vous avez commencé par organiser des séjours le week-end, avant de viser plus grand ? Comment ça s’est fait ?
Au départ, ce sont des choses que je faisais tout seul. Après j’ai essayé avec un groupe d’amis. On prenait la voiture du père ou de l’oncle. Et quand il a fallu lancer, il fallait créer le site internet, faire les papiers à la chambre de commerce pour être crédible. C’était étape par étape et c’est devenu ce que c’est devenu aujourd’hui. On arrive à vendre tous nos voyages avant même les deadline et les gens commencent à adopter le concept.
On a l’impression que les Sénégalais viennent tout juste de se rendre compte que le pays a des coins sympas…
C’était ça le combat de base. Parce que moi, j’avais remarqué que pour nous Sénégalais, les seuls voyages qu’on fait, c’est quand on prend nos passeports pour aller à l’aéroport. On ne prenait pas le temps de profiter de ce qu’on a ici. Dès qu’on prenait nos congés, on pensait aller à la Tour Eiffel, aux Usa, sans pren¬dre vraiment le temps de voir les beaux endroits qu’on avait ici. Le challenge, c’était ça déjà et de créer cette envie chez le Sénégalais, de découvrir son pays et de dépenser son argent pour découvrir son pays. Et aussi booster tout ce qu’il y a comme économie locale. Et ce combat-là, aujourd’hui, on l’a presque réussi. Les groupes qu’on a dans nos excursions, ce sont souvent des sénégalais qui ont toujours vécu au Sénégal ou qui ont vécu en Europe et qui sont revenus chez eux, ou des Africains qui sont là pour le travail ou les études. Mais la jeunesse commence à comprendre que c’est bien de découvrir.
Et vous avez réussi à faire comprendre aux gens qu’aller aux îles du Saloum ou à Kédougou est aussi intéressant que d’aller ailleurs…
Au départ, ce n’était pas vraiment une stratégie qu’on avait mis en place pour les convaincre. Mais quand on fait les choses de façon naturelle et que ça vient du cœur, ça va rentrer dans le cœur des gens. C’est une passion que je voulais partager avec les gens et je l’ai fait avec le plus de naturel possible. Je partais dans ces coins, je vivais l’expérience et je partageais l’expérience comme je l’avais vécu sur les réseaux sociaux. Et les gens se sont intéressés à ça et ça a créé l’envie chez eux de venir. Ce sont des choses qu’on ne pouvait pas faire il y a 5 ans.
Quelles sont les destinations les plus prisées ?
On aime beaucoup le désert de Lompoul. C’est un endroit où les gens ne partaient pas forcément. Soit par paresse, soit parce qu’ils ne connaissent pas. Mais depuis qu’on a commencé à y aller, on a amené des mil¬liers de personnes et aujourd’hui, les gens y vont même de leur propre initiative. On est aussi beaucoup présent en Côte d’Ivoire à Abidjan parce que culturellement, il y a beaucoup de similitudes avec le Sénégal. Il y a aussi le Cap-Vert qu’on fait chaque année pour le carnaval qui se passe avant le carême.
Sur toutes vos offres, il y a un moment de networking et de partage d’expériences. C’est pour inciter les jeunes à entreprendre ?
C’est très important pour nous. C’est bien beau de voyager, de découvrir mais on s’est dit pourquoi ne pas joindre l’utile à l’agréable et permettre à ces jeunes de se connecter de façon professionnelle avec d’autres gens. On rigole toute la journée et on fait des découvertes mais le soir, on se pose et ça va dans des présentations beaucoup plus profondes et ça va parler parcours professionnel et présenter des projets.
Côté financier, est-ce que toutes ces offres ne sont finalement accessibles que pour une certaine élite ?
Ce n’est peut-être pas accessible à tout le monde mais moi personnellement, j’essaie de tout faire pour baisser les coûts. J’arrive à négocier des rabais auprès des établissements hôteliers qui me permettent de proposer un prix beaucoup plus accessible. Après, on aurait souhaité que tout le monde puisse le faire mais on connait le Smic sénégalais. Peut-être que l’Etat aurait pu subventionner les résidents sénégalais comme cela se fait dans d’autres pays comme les Etats-Unis.
Comment vous avez vécu cette période Covid-19 dans vos activités ?
Je suis le genre de personne qui regarde toujours le verre à moitié plein. C’était très dur au départ. On est rentré d’un voyage au Cap-Vert et dès la semaine qui a suivi, les frontières ont été fermées et il y a eu un couvre-feu. Du mois de mars à juillet, on est resté sans activité mais on a profité de ces moments pour se reposer les bonnes questions, refaire le lead et voir ce qu’il y avait à améliorer par rapport aux services qu’on proposait. Et on a préparé la reprise avec beaucoup d’énergie et on s’est retrouvé à faire un chiffre d’affaires plus important que celui qu’on faisait avant Covid. Les gens ont compris aussi qu’il fallait voyager dans le Sénégal puisqu’il n’y a plus possibilité de sortir et que la seule possibilité de changer d’air, enlever le stress était de voyager à l’intérieur du pays.
Vous avez dû emmagasiner de nombreuses anecdotes de vos voyages …
J’aime raconter les choses naturellement et c’est ce qui fait l’originalité. Je ne suis pas le genre à poster que les belles choses. On parle aussi de nos mésaventures, quand on tombe en panne en plein désert. Quand une de nos clientes a eu un accident en conduisant un quad et qu’il fallait l’amener à l’hôpital à 3h du matin. Il y a plein de mésaventures qui arrivent mais c’est aussi ce qui donne du charme à tout ça. Le plus important, c’est que quand des choses de ce genre arrivent, qu’on puisse développer un réflexe qui permet de prendre le dessus et d’anticiper.
Des challenges pour le futur ?
Mes challenges prochains, comme on a des partenaires en Côte d’Ivoire, au Cap-Vert, à Dubaï, à Las Palmas et Zan¬zibar, c’est d’avoir des représentations partout dans le monde et permettre au Séné¬galais qui a envie de voyager, de ne pas se prendre la tête, de nous contacter et on lui gère tout.
Aucun regret d’avoir lâché les télécoms ?
Du tout, du tout. (Rires). Là je suis un homme épanoui à 300%, j’adore ce que je fais et je souhaite à tout le monde de travailler dans sa passion. S’il y a une chose que j’aurais rectifié dans ma décision, c’est de démissionner alors que je n’avais plus d’économies. Les projets, au départ ça ne donne pas forcément d’argent, alors il faut avoir une certaine assise financière avant de se lancer, sinon ça peut être très dur.
LE PRINTEMPS DES JOURNALISTES-ECRIVAINS
Il faut certainement remonter très longtemps pour voir des journalistes sénégalais aussi prolifiques sur le plan littéraire
Il faut certainement remonter très longtemps pour voir des journalistes sénégalais aussi prolifiques sur le plan littéraire. ‘’Billets de Salon’’ de Mame Ngor Ngom, ‘’Idrissa Seck, l’ombre du passé‘’ de Mor talla gaye ou encore ‘’la vie est un temps de parole‘’ de Alassane Samba Diop. la production littéraire des journalistes semble prendre un souffle nouveau ces derniers mois voire ces dernières années.
C’est un livre qui risque de faire couler beaucoup d’encre et de salive. D’ailleurs sur les réseaux sociaux, les impressions se multiplient tout en ayant le mérite d’être aussi riches que diversifiées. Même si force est de constater que parfois les discussions sont passionnées et houleuses.
L’auteur même est conscient que cette nouvelle publication ne fera pas que des heureux, surtout du côté des affidés de l’ancien puissant Premier ministre du président Abdoulaye Wade. ‘’Dans le cas de la tentative d’assassinat du défunt écrivain égyptien « Naguib Mahfouz », le juge a demandé à l’homme qui a poignardé Naguib Mahfouz : Pourquoi l’avez-vous poignardé ? Le terroriste a déclaré : À cause de son roman « Les enfants de notre quartier ». Le juge lui a demandé : Avez-vous lu ce roman ? Le criminel a dit : Non. On parle de l’ignorance. Elle est la pire chose qui puisse arriver à une communauté, à une société. Allez lire le livre : « Idrissa Seck, l’ombre du passé » et revenez avec des arguments…pas des insultes’’, a fait savoir le journaliste sur sa page Facebook pour anticiper sur la polémique qu’engendrera sans aucun doute cette publication.
En effet, Mor Talla Gaye a manifestement tapé fort cette fois-ci en prenant le risque de disséquer sans langue de bois la carrière politique d’un homme d’Etat aussi clivant que l’actuel président du CESE, Idrissa Seck. Connu et reconnu dans la presse pour ses talents journalistiques surtout en portrait, genre où il est passé maître, Mor Talla Gaye vient de sortir ‘’Idrissa Seck, l’ombre du passé‘’. Toutefois, avoir raison quand on est journaliste demande un peu d’habilité. Avoir raison, quand on est écrivain, ça n’existe pas. Mais il a eu le mérite et le courage de franchir cette frontière poreuse qui existe entre le journaliste et l’écrivain. Et il n’est pas le seul. Cette année, il y a eu pas mal de journalistes qui sont venus étoffer les librairies.
Ancien rédacteur en chef du journal la Tribune, Mame Ngor Ngom est de ceux-là. En effet, par le biais de ‘’Billets de Salon’’, son nouveau livre qui est un condensé de chroniques, l’ancien rédacteur en chef du journal Le Matin analyse et commente les faits relatifs aux événements de février-mars 2021, avec les accusations de viols contre l’opposant Ousmane Sonko. Préfacé par le chevronné et brillant journaliste Ibrahima Bakhoum, il met en exergue les maux qui assaillent le pays, surtout dans un contexte de pandémie. Sans langue de bois, le billettiste soutient en substance : ‘’Notre société peut être si intelligente, si mesurée, si raisonnable. Il lui arrive aussi d’être si bête, si pernicieuse, si violente... Elle fait souvent peur et fait penser au pire. Soyons optimistes : le côté positif domine.’’
Ainsi ces deux publications qui ont été certainement les plus illustratives ces derniers mois montrent à quel point les journalistes investissent de plus en plus le monde des livres. Et à celles-là viennent se greffer en outre d’autres livres comme ‘’La Vie est un Temps de parole’’ d’Alassane Samba Diop, sans oublier ‘’Le Sénégal et Mandela : Le Grand Secret’’, sorti en fin 2020 par son ‘’binôme‘’ de toujours Mamadou Ibrahima Kane. D’ailleurs le présentateur de JDD sur Iradio n’est pas un novice dans ce domaine. Il avait déjà coécrit un essai sur l’économiste Mamadou Touré et publié ‘’Habib Thiam, l’homme d’Etat’’. Dans le même ordre d’idées, il est important de citer aussi ‘’Chambre 7’’ de la journaliste de la TFM Faty Dieng ou encore ‘’Pluie de vies, pluies d’histoires’’ de sa consœur Merry Bèye Diouf, tous édités ces deux dernières années. Arraché à l’affection des Sénégalais, l’ancien formateur au CESTI Jean Meissa Diop a aussi laissé un bel héritage avec son ouvrage ‘’Le cybersalon des épouses qui ont mal au lit’’ et qui met en exergue la faillite de la société et des familles qui généralement jouaient le rôle de conseillers conjugaux.
L’animateur de l’émission Faram Facce, Pape Ngagne Ndiaye, fait partie aussi de cette lignée des journalistes-écrivains. Mame Less Camara, Djib Diédhieu, Sada Kane, Mamadou Koumé, Diatou Cissé, Ibrahima Bakhoum … Ces grands ‘’mémoires’’ attendus ¨Par ailleurs, il faut souligner que ce goût pour l’écriture avait connu une léthargie ces dernières années.
Dans les années 2000, des journalistes comme Abdou Latif Coulibaly ou encore le défunt PDG du groupe Walfadri avaient publié plusieurs ouvrages pour vilipender les tares de la gouvernance du président Abdoulaye Wade. Dans ‘’Un Arabisant en Pouvoir et Presse’’, le journaliste Sidy Lamine Niasse était revenu aussi sur son parcours atypique. Des livres de ce genre, la presse en a besoin visiblement. Les riches parcours de certains journalistes qui ont marqué cette profession mériteraient des Mémoires. De Djibril Diédhiou dit ‘’Djib’’ à Mame Less Camara en passant par Sada Kane, Mamadou Koumé, Diatou Cissé, Ibrahima Bakhoum, Thierno Talla, Babacar Justin Ndiaye, leurs riches parcours et expériences dans la profession seraient des balises utiles pour la jeune génération de journalistes. Un monument comme Babacar Touré aurait dû certainement écrire ses mémoires. Il a tiré sa révérence sans laisser un ‘’guide‘’ aux jeunes journalistes. Un livre sur ses relations avec les hommes de pouvoir auraient certainement servi aux journalises politiques.
Toutefois, peut-être, les autres feront prochainement partie du printemps des journalistes-écrivains. Peut-être aussi, ils pensent comme Marguerite Duras qu’écrire, c’est aussi de ne pas parler. C’est se taire. C’est hurler sans bruit.
PAR Maguèye Touré
MOHAMED MBOUGAR SARR, ENTRE INQUIÉTUDE, PASSION ET IDÉAL
EXCLUSIF SENEPLUS - La littérature considérée comme un terrain d’interrogation, de résistance aux clichés et aux postures radicales du grand nombre - Écrire tout en interrogeant l’écriture, voilà bien une gageure
Il faut lever une possible équivoque : dans le titre de cette note de lecture, les termes « inquiétude » et « passion » sont employés dans leurs sens étymologiques respectifs « d’état de non tranquillité » d’une part, de « souffrance » ou de « ce qu’on subit », d’autre part, comme on parlerait, par exemple, de la Passion du Christ.
Cette précision faite, il est loisible d’aborder le rapport de cet auteur à la littérature considérée comme un terrain d’interrogation, de résistance aux clichés et aux postures radicales du grand nombre. En effet, chez Mohamed Mbougar Sarr, l’écriture est d’abord exigence et, en premier lieu, exigence par rapport à la langue dont les ressources cachées, magiques, sont appelées à servir de matériau à l’écrivain véritable qui ne peut se contenter de retranscrire la langue commune telle qu’elle s’exprime communément. Il faut donc écrire autrement pour être un écrivain.
L’écrivain doit s’inscrire en permanence dans la tension ; l’écriture est nécessairement souffrance, mais souffrance voluptueuse. Chez Mohamed Mbougar Sarr, l’acte d’écrire n’est pas une opération de transcription du réel tel qu’il peut se présenter au commun ; il s’agit davantage de la sublimation de celui-ci, pour en faire une matière littéraire unique, non transposable, idiosyncrasique. C’est pourquoi le choix du thème importe moins que la manière dont on l’aborde. En poussant le raisonnement à son extrême, la question habituelle : « De quoi parle le livre ? » devient caduque, non pertinente. Les grandes questions de la littérature – Qu’est-ce qu’écrire ? Quoi écrire ? Comment écrire ? Pourquoi écrire ? Pour qui écrire ? – semblent se concentrer en une seule : qu’est-ce qu’écrire ?
Il est ainsi des thématiques qui imposent leur autorité parce qu’elles font déployer un surplus de tension et de réflexion, parce qu’elles font franchir un palier dans l’exigence. De toutes ces thématiques, il semble bien que celle relative à l’écriture et à la littérature en constitue l’aristocratie. Écrire tout en interrogeant l’écriture, voilà bien une gageure. L’écriture qui se déploie en questionnant son être et son devenir. La littérature qui prend pour sujet la littérature. Une complexité supplémentaire. On se prendrait les pieds dans le tapis pour moins que ça. Avec cette forme d’exigence esthétique, la littérature flirte toujours avec le vertige, court le risque de l’incommunicabilité avec le plus grand nombre, celui de l’enfermement dans une forme d’oligarchie de l’esprit. Mais c’est un risque calculé, car on n’écrit pas pour plaire, et surtout pas à la masse, a fortiori juste pour gagner sa vie – expression malheureuse que « gagner sa vie », comme si, sans ressources matérielles, on devrait se déclarer mort car inutile. L’aristocratie de l’esprit doit être assumée. L’auteur interroge également la notion d’engagement attachée sournoisement à l’écrivain africain comme un boulet dont il arrive difficilement à se débarrasser. L’engagement en littérature est d’abord lié à la qualité esthétique irréductible et inaliénable. Si l’écriture peut aider à penser, à faire voir les ressorts cachés d’un réel à la simplicité trompeuse, à interroger les évidences, ou ce qui prend l’apparence d’évidences, à éveiller les consciences, il faut préciser que ce n’est pas son objet premier, qu’on écrit d’abord parce qu’on ne peut pas faire autrement. C’est cela le tragique de même que la beauté de la littérature.
Mais s’il s’avère que le bon sens est effectivement la chose du monde la mieux partagée, il n’y a pas de risque que l’écrivain véritable ne trouve pas de larges publics, ici et maintenant, ailleurs, demain, dans deux siècles.
On n’écrit pas aussi pour la gloire. L’écriture s’impose à l’auteur comme la parole divine s’impose au prophète chargé de la transmettre à l’humanité ; elle arrive et se déploie dans la souffrance comme une nécessité incontournable, inaliénable, à la différence que l’écrivain n’est pas traversé par la parole de la littérature comme la lumière une eau diaphane. Non : l’écrivain, seul producteur du langage littéraire, en est tout entier responsable. Ce qui l’amène parfois à affronter des tentatives d’excommunication du texte littéraire. L’écriture est donc un destin. Et l’écrivain véritable toujours un résistant. Malgré lui. C’est pourquoi aussi, ultimement, l’écriture ne peut être un métier, parce qu’elle vous choisit plus qu’on ne la choisit, parce qu’elle vous domine toujours. Si l’écriture devient un métier, ce n’est que de manière incidente, par accident, fortuitement. Le but de l’écriture, pour l’écrivain total, c’est d’abord et finalement l’écriture. La littérature est une fin en soi.
Le grand mérite de Mohamed Mbougar Sarr est de nous proposer une œuvre sublime – à entendre aussi au sens étymologique -, magique, vertigineuse, inclassable, fondée sur la quête, au cœur des ténèbres de la littérature, d’une œuvre inachevée comme il se doit, Le labyrinthe de l’inhumain, et d’un écrivain, T.C. Elimane, tous deux mythiques et donc insaisissables. « Chercher la littérature, c’est toujours poursuivre une illusion », dit bien le narrateur. D’où le refus de la conclusion, y compris dans des situations particulières comme quand se présente la facilité d’une relation charnelle et qu’on choisît de passer outre. Mohamed Mbougar Sarr est plus qu’un simple magicien des mots, c’est un prestidigitateur qui nous montre une chose pour qu’on en devine d’autres, qui sort de sa manche une pensée surprenante sur la littérature et sur la vie au détour d’une phrase, qui brouille à dessein les repères de la fiction en mêlant les discours. Ce que nous dit l’auteur, la question qui irrigue l’ensemble de l’œuvre, c’est que la littérature se présente en définitive comme un idéal vers lequel il faut tendre sans cesse, de toutes ses forces, en ayant conscience qu’elle est nécessairement une ligne de fuite permanente. À ce propos, le narrateur de La plus secrète mémoire des hommes réinvente – ou actualise – l’idéal flaubertien du livre sur rien, sans attaches extérieures, sans sujet, ou plutôt où le sujet serait le style, dont on a dit que c’est l’homme lui-même. Mais le livre sur rien signifie ici aussi une œuvre qui se suffit à elle-même, qui n’est jugée que par son contenu, une production dont on ne devrait pas avoir besoin de connaître l’auteur en tant que personne relevant de l’état-civil, sa vie, ses amours, etc. Dans l’absolu, idéalement, une grande œuvre pourrait se passer d’un auteur connu, identifié.
Il est très difficile de classer finalement l’œuvre dans un genre, même si elle est insérée dans le vaste champ du roman. C’est aussi ce qui fait sa force et son originalité. On y devine l’essai, le journal intime, le roman d’enquête policière, la biographie (ou plutôt les biographèmes), l’enquête journalistique ; on y rencontre les articles de presse datés (datés au regard du temps, mais aussi au regard de l’approche clichéique du génie de l’écrivain africain T.C Elimane), les échanges épistolaires entre scientifiques de leur temps ; on y repère le ton pamphlétaire, l’humour, la dérision, l’autodérision, l’ironie, la critique, la mélancolie. Nul doute que l’auteur ait adopté volontairement cette posture qui convient parfaitement à son objet, lui qui est conscient que les classements, les étiquetages sont surtout des limitations et des enfermements.
Cette œuvre, sorte de mise en abyme de la littérature sénégalaise, africaine et mondiale, convoque des auteurs dont certains sont cités explicitement, tandis que d’autres se devinent derrière des figures singulières comme celle de cette Siga D. mystérieuse, transmetteur de flambeau littéraire, et un peu entremetteuse, dont le portrait fait inévitablement songer à un mélange de Ken Bugul et de Fatou Diome, écrivaines d’origine sénégalaise dont les sujets originaux et polémiques, la posture scandaleuse de femmes africaines engagées à lever des tabous jusque-là inexprimables, leur ont conféré une étrange destinée de fascination et de rejet.
C’est la même logique de citation des contemporains et des devanciers illustres qui pousse le narrateur, écrivain africain francophone vivant à Paris, - statut qui est déjà d’une certaine façon un cliché –, à interroger son destin et celui de ses semblables en écriture. Cela passe par une tentative de meurtre des pères, au moyen d’un réquisitoire sans concession contre les illustres devanciers, icônes intouchables, dont pourtant un examen sans compromis semble mettre à jour des faiblesses rédhibitoires ; le narrateur prend le risque d’interroger, de manière provocante, leur valeur véritable en tant que créateurs et que guides, leur légitimité, leur indépendance. Mais la sévérité et le parti-pris de la charge sont immédiatement atténués, dans un moment de lucidité, ou de culpabilité, salvatrice, par l’incertitude accrochée à l’auto-interrogation sur la légitimité même du critiquant à adopter une telle position, en raison notamment de la difficulté éprouvée soi-même à se définir, à s’évaluer en tant que créateur et en tant qu’homme, en raison des interrogations et des doutes sur l’identité de l’écrivain africain vivant à Paris, sommé de s’inscrire dans une certaine voie. Comment juger l’autre si on n’arrive pas à se définir soi-même ? Ce que nous dit en filigrane le narrateur, c’est que l’originalité du créateur contemporain est, en définitive, toujours sujette à questionnement, dans la mesure où l’écrivain est nécessairement poussé à interroger les devanciers, à les louer, à les citer, à les critiquer, mais toujours à les faire exister dans son œuvre, consciemment ou non. La littérature est donc, toujours, d’une certaine manière, trace, mémoire, citation, miroir, palimpseste. Pour être un grand écrivain, il faut bien posséder le « génie du collage ».
Les jeunes écrivains et intellectuels africains, filles et garçons, qui entourent Diégane Faye vivent avec lui en quelque sorte leur aventure ambiguë, s’interrogent sur les particularités de leur génération 2.0. On n’est pas toutefois sûr qu’ils « fassent génération », qu’ils soient portés par l’idée d’une libération culturelle de leurs Peuples, comme leurs lointains devanciers du mouvement de la Négritude, par exemple. Il faut dire qu’ils ne semblent pas porter le combat de l’engagement collectif : la littérature, la création, restent affaires individuelles, même si la communion des esprits n’est jamais loin. Leur seul engagement, s’il en est un, demeure celui de la quête inquiète de la littérature.
Mohamed Mbougar Sarr, à travers le personnage de Diégane Faye, son double peut-être, s’ingénie, comme les auteurs exigeants, à traquer sans relâche le cliché, l’idée reçue, le lieu commun comme éléments antithétiques de la littérature. Mais une telle opération demande, paradoxalement, qu’on cite d’abord le cliché, l’idée reçue, le lieu commun, c’est-à-dire qu’on les endosse provisoirement, avant d’entreprendre de les excommunier. Parfois, le cliché lui-même, trompant la vigilance du narrateur, joue à pointer son nez là où on ne l’attend pas. Étrange situation qui montre la prégnance de la bêtise, sa force, son caractère totalitaire. En même temps le recours au cliché paraît inévitable, car il est un signe de reconnaissance communautaire, un terrain de rencontre partagé qui facilite la fonction de communication de la langue. On le voit bien, la difficulté consiste, en voulant combattre l’ordre établi, à faire finalement dans la pose, voire la préciosité, et de risquer, à force de systématicité, de recréer un autre ordre, en parallèle. Ce risque, Mohamed Mbougar Sarr arrive toutefois à le conjurer dans une œuvre en miroir, bâtie sur plusieurs niveaux de lecture et d’interprétation, et dont, on le répète, le classement dans un genre s’avère une opération malaisée.
L’auteur, à travers son narrateur, fait preuve de courage. De sa posture d’écrivain tout court et d’écrivain sénégalais et africain, il dit le fond de sa pensée sur la littérature, sans concession, ce qui ne signifie pas qu’il porte en bandoulière une obsession pour la critique, car il se pare souvent des nuances utiles. L’auteur dit la force de la littérature, et la fragilité assumée de l’auteur exigeant, laquelle se fonde sur une inquiétude consubstantielle à la création.
Chez l’écrivain, la quête - la tension -, toujours renouvelée, est un prédicat définitoire, une composante de son identité, en même temps une fin en soi et un aboutissement ; et aussi une aporie : « Désir d’absolu, certitude du néant : voilà l’équation de la création », constate le narrateur. L’écrivain de génie, souvent incompris, nécessairement incompris, est l’ennemi de cette coterie constituée notamment des critiques littéraires qui vit de la littérature en faisant la promotion des médiocrités ; ces critiques, parasites de la littérature, ne méritent finalement, pour ce crime de lèse-génie, que la mort, fût-elle symbolique. Ainsi, le roman est parsemé de cadavres réels (dans l’ordre de la fiction) ou symboliques ; tous ceux qui essaient d’interpréter la littérature – et souvent mal – de lui donner un ou des sens enferment celle-ci, tentent de limiter son horizon ; de même, quand on tente de cerner l’écrivain véritable, on bouche l’horizon de la littérature. La seule punition qui convienne à tous ceux-là, c’est bien la mort. La littérature, pour être totale, doit demeurer, paradoxalement et idéalement, dans le domaine de l’incommunicable et de l’indicible. Toutefois, malgré la reconnaissance de la puissance de la littérature, il demeure que peut se poser toujours la question de sa légitimité par rapport aux bouleversements sociaux. C’est la responsabilité même de l’écrivain qui est engagée, partagé qu’il est entre habiter la littérature et habiter la vie, vivre et écrire, écrire en oubliant de vivre, écrire pour vivre…
On aurait pu penser que cette œuvre qui questionne l’être de la littérature devait être le fait d’un auteur établi, devenu « classique », à la trajectoire longue, presque « en fin de carrière ». Eh bien non : l’auteur de La plus secrète mémoire des hommes est un jeune auteur, par l’âge, quoique un écrivain déjà important par la qualité de la production. S’il prend la responsabilité de produire une œuvre « de la maturité » qui lui ressemble le mieux sans doute, c’est qu’il est tenaillé par cette inquiétude du créateur et qu’il fallait inévitablement cette parturition pour continuer à écrire. On devine, avec l’écriture de cette œuvre complexe, un plaisir jubilatoire, l’accomplissement d’une mission, un soulagement. En même temps, la nécessité, pour le créateur, d’interroger, en marchant, sa propre pratique, son destin littéraire et d’homme, celui du texte en général. Un texte donc aux vertus thérapeutiques.
Cette œuvre s’adresse aussi, au-delà de ceux qui triturent les mots pour en extraire la substantifique moelle, à tous les autres créateurs. Elle leur trace une voie et leur donne la voix en les citant ; elle les met en garde contre l’apparence de la facilité ; elle leur révèle l’idiosyncrasie de la création. Dans La plus secrète mémoire des hommes, la référence aux autres arts, et aux autres genres, est présente en filigrane : ainsi en est-il du clin d’œil – c’est le cas de le dire – au cinéma avec le sulfureux Basic Instinct, pour nous rappeler que l’écrivain est aussi voyeur, mais un voyeur particulier qui fixe l’endroit pour révéler l’envers. On y devine la chanson avec Omar Pène et Jean-Jacques Goldmann : « Elle a fait un bébé toute seule », pour rappeler le brouillage des repères sur l’identité d’un père, la danse (le tango). L’auteur montre bien qu’il n’y a pas de cloisonnement entre les différents arts qui ne sont que des manières différentes et complémentaires d’appréhender et de rendre le réel.
Finalement, l’auteur interroge l’être de la littérature en disant surtout ce qu’elle n’est pas plutôt que ce qu’elle est, ce qui serait revenu, en définitive, à conclure sur la littérature, c’est-à-dire à l’enfermer, alors que celle-ci demeure dans la tension, dans l’ouverture, bref un idéal.
On ne peut aussi manquer de penser que La plus secrète mémoire des hommes est un miroir que se tend l’auteur lui-même pour combattre ses démons, ses doutes, exposer peut-être ses espoirs et ses incertitudes, et son statut d’écrivain à l’identité problématique. Sommé de jouer un rôle qui ne doit pas être le sien, l’écrivain de génie est brandi comme une « bête de foire », autant par ceux de sa terre d’origine qui se cherchent des héros que par ceux de sa terre d’adoption, celle des Blancs, qui pointent l’intelligence exceptionnelle chez un Noir africain, comme la résultante du travail achevé de la colonisation ou alors le fruit d’une magie africaine mystérieuse. L’écrivain préfère emprunter une troisième voie, en se réfugiant à corps perdu dans la littérature, seule patrie qui reste entièrement la sienne. En cela, cette œuvre présente une vertu cathartique pour l’auteur et pour tout véritable créateur qui s’y reconnaîtrait.
Ce roman est aussi une histoire de parentèle, d’unicité et de singularité, de gémellité et de double, de fratrie, de fraternité et d’amitié trinitaires. Le caractère fragmenté de ces composantes, comme les handicaps (cécité, folie) et les désespérances (suicides) questionne la validité d’une vérité qu’on n’arrive pas à capter et à domestiquer entièrement. La vérité est souvent problématique dans cette œuvre, enfermée dans une forme d’illusion (comme la littérature elle-même), prise en étau par la fuite permanente des êtres qu’on croit posséder, la paternité aléatoire, le rêve, la folie, la peur, la cécité, toutes choses qui la font considérer de biais ou, a contrario, en dévoilent mieux la surréalité. Par ailleurs, la quête de T.C. Elimane et de son œuvre est aussi une sorte de circumnavigation érudite dans la littérature mondiale.
L’une des idées essentielles de ce roman vertigineux réside par ailleurs dans la leçon que le livre idéal est toujours à venir et que la littérature n’existe par la quête illusoire du chef d’œuvre ultime. Dans cette recherche effrénée, comme dans une course de relais, les grands écrivains se passent le témoin – et le flambeau -, chacun tentant de combler à sa manière une part du vide. Ainsi la littérature devient une affaire de transmission et d’héritage, en d’autres termes de tentative de raccordement du passé, du présent et du futur ; le passé, la mémoire occupent toutefois la plus importante part de l’espace temporel. Ce que nous dit aussi le roman, c’est que l’écrivain n’est finalement qu’un copiste, quelle que soit la force de son imagination et quelque génie qu’il ajoute à ce travail.
Servie par la virtuosité, l’audace esthétique, la grande culture de son auteur, cette œuvre originale, qui questionne la possibilité même de la littérature et le statut de l’écrivain dans la société et dans l’histoire, fera date, à n’en pas douter.
Considérer comme un grand pays de culture, le Sénégal a encore une fois joué pleinement son rôle à Abidjan au Festival des musiques urbaines d’Anoumabo (Femua)
Considérer comme un grand pays de culture, le Sénégal a encore une fois joué pleinement son rôle à Abidjan au Festival des musiques urbaines d’Anoumabo (Femua). La 13e édition s’est déroulée du 7 au 12 septembre 2021 entre Abidjan et Grand Bassam avec le Sénégal comme pays invité d’honneur.
La 13e édition s’est déroulée du 7 au 12 septembre 2021 entre Abidjan et Grand Bassam avec le Sénégal comme pays invité d’honneur. Cette année, le festival s’est déroulé autour du thème majeur : L’Alliance Afrique Europe égale Paix et Développement. Pour une bonne participation, la Di - rection des arts a misé sur les artistes jeunes dits créateurs contemporains émergents aussi bien au niveau de la mode, qu’au niveau de la musique et de l’artisanat. Les tam-tams, chants et danses des ethnies du Sénégal devant l’aéroport Félix Houphouët Boigny d’Abidjan, annonçaient déjà les couleurs d’une ambiance populaire et culturelle riche en rythmes. L’Institut national de la jeunesse et des sport (Injs), qui est le site officiel du festival, a abrité le pavillon du Sénégal conçu par la Direction des arts. Le ministre de la Culture et de la communication, Abdoulaye Diop, y a présidé la journée dédiée au pays de la Teranga. C’était le 8 septembre 2021 avec diverses manifestations dont une exposition retraçant l’histoire du cinéma sénégalais, coordonnée par Maguette Diop, président des Cineseas et une autre exposition valorisant les instruments membranophones, c’est-à-dire les percussions et les cordophones qui désignent les instruments à cordes. Des expositions qui reflètent la diversité culturelle nationale. Après ces visites, le ministre de la Culture et de la communication, Abdoulaye Diop, accompagné de Asalfo, Commissaire général du Femua, s’est arrêté devant l’espace réservé à la mode et aux textiles sénégalais. On y a exhibé des boubous et des chaussures d’hommes et de femmes et autres accessoires.
Continuité culturelle
Un panel a bouclé cette matinée autour du thème : continuité culturelle entre le Sénégal et la Côte d’ivoire. Racine Senghor, président du Conseil d’administration du Musée des civilisations noires et Djako Romaric, gestionnaire de la ville historique de Grand Bassam, ont fait des présentations. Racine Senghor a insisté sur la parenté à plaisanterie qui existe dans les deux pays avant de parler du métissage linguistique. «Toutes les langues sont des langues métissées et on arrive même à en créer d’autres», dira-t-il. Des moments forts, les festivaliers en ont vécu au bord de la lagune Ebrié. La soirée à l’institut français autour de la mode et de la musique a tenu ses promesses. Les jeunes créateurs de mode que sont Chekha, Selly Raby Kane, Maguette Dièye et Ousseynou Owens Ndiaye ont proposé des modèles pour hommes et femmes alliant la tradition à la modernité et accompagnés d’accessoires. Comme pour la mode, ce sont de jeunes artistes musiciens émergents qui ont représenté le Sénégal. Samira Fall, Cherifu Job sa brain, OMG, Dieyla, Chadia, Jeeba, NGaka Blinde et Sidy Diop se sont produits dans une salle pleine. Un public composé de Sénégalais, d’Ivoiriens et d’Européens. Le ministre de la Culture et de la communication dira que le Sénégal a démontré encore une fois qu’il a des atouts culturels à vendre. Ces propos ont comme qui dirait obtenu l’approbation de Asalfo qui a soutenu, au lendemain du concert époustouflant de Pape Diouf à l’Injs, que le Sénégal a montré encore une fois sa force de frappe culturelle.
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JE ME SUIS DÉCOUVERT ARTISTE PENDANT LA DÈCHE
Après avoir claqué la porte de l’école dès la 4è malgré un potentiel qui aurait pu le conduire loin, Ibrahima Mbaye se retrouve chômeur. Un statut quelque peu humiliant pour un jeune aussi intelligent. Très vite, un talent dormant en lui se révèle.
Peut-on réussir dans le showbiz sans un bon carnets d'adresses, sans des sacrifices, sans les bras longs? Pour certains c'est impossible. Mais ce n'est pas le cas de Corvo Phenomeno, de son vrai nom Ibrahima Mbaye. Invité d’AfricaGlobeTv et AfricaGlobe.net, Le jeune artiste Corvo Phenoméno se prête volontiers et sans détour à nos questions dans cette entrevue exclusive. Au menu, les raisons de son renoncement à l’école, sa kyrielle de petits boulots, ses débuts dans la musique et ambitions, découvrez davantage cette petite étincelle de la scène musicale sénégalaise.
Artiste chanteur, auteur compositeur, c’est en période de dèche que les dieux de la musique se sont révélés à lui. Après avoir claqué la porte de l’école dès la 4è malgré un potentiel qui aurait pu le conduire loin, Ibrahima Mbaye, se retrouve chômeur. Un statut quelque peu humiliant pour un jeune aussi intelligent. Mais il se savait mélomane. Et la musique la musique son unique drogue. Éclectique, il en consomme de longues heures de musiques diverses et variées. Il se préparait à une carrière musicale sans s’en apercevoir. Il découvre des artistes de renom comme le sénégalo-américain Akon ou l’Italien Éros Ramazzotti, les Ivoiriens Alpha Blondy Tiken Jafakoly, entre autres.
Confronté aux affres du chômage et se sachant déjà mélomane, il s’est dit pourquoi pas ? Le jeune prodige décide alors de se lancer timidement. Mais Il doit ménager sa mère qui ne voit aucun avenir dans la musique si ce n’est de l’incertitude à bâtir une vie digne et respectable. Mais en évoluant, sa mère finira par comprendre et lui donne son onction Corvo Phenomeno trace petit à petit son chemin. Que ce soit en tant que mélomane comme chanteur, Ibrahima Mbaye reste éclectique : il ne se met pas de barrières, pas de cloisons. Juste laisser libre cours à ses sens. Il embrasse et toutes sorte de musique. Conscient de son potentiel, il entend créer son pro