Organisations évoluant dans le domaine de la culture, l’observatoire de la Musique et des Arts du Sénégal (omart) et «Say wi» réclament la tête du ministre Abdoulaye Diop. ils demandent sa démission de la tête du ministère de la Culture. Dans une lettre ouverte adressée au Président Macky Sall, ils reprochent à ce dernier ce qu’ils considèrent comme la gestion nébuleuse de la Sodav.
Le torchon brûle entre le ministre de la Culture Abdoulaye Diop et certaines organisations de ce secteur. Très remontés contre leur ministre de Tutelle, l’Observatoire de la Musique et des Arts du Sénégal (Omart) et «Say wi» réclament la tête du ministre Abdoulaye Diop. Ces deux organisations culturelles pensent que le responsable apériste de Sédhiou est à l’origine de tous les maux dont souffre la Sodav. «Alors que le Président Macky Sall a donné des instructions fermes lors du Conseil des Ministres du mercredi 14 octobre 2020 pour l’évaluation institutionnelle et financière de la Sodav et la mise en place de la Commission permanente de contrôle afin d’auditer la Société de gestion collective des droits d’auteur et droits voisins, rien n’est fait.
Pire, pour contourner la Commission permanente de contrôle composée de représentants de la Cour des Comptes, de la Cour suprême, de l’Inspection générale des Finances et du Ministère en charge de la Culture, un cabinet privé est mis en branle pour faire un semblant de contrôle. Ce qui n’est pas de son ressort.
Les textes de la Sodav sont clairs, nets et précis, car y figure la Commission permanente de contrôle», fulminent, dans une lettre ouverte adressée au président de la République, les responsables de l’Omart et «Say Wi» avant d’ajouter : «Donc, le ministre en charge de la Culture est complice de cette situation de précarité, de la gestion nébuleuse de la Sodav depuis que vous avez accordé par décret l’agrément le 7 mars 2016 pour sa fonctionnalité.
Avec votre subvention et les redevances perçues avoisinant des milliards, la gestion est décriée par les ayants droit, faute de commission de contrôle». Les contestataires rappellent par ailleurs que la Sodav a terminé, depuis le 7 Mars 2021, son cycle de validité suite à l’agrément délivré par le Décret n° 2016- 322 du 07 mars 2016. Ils estiment que la fin de l’agrément de la Sodav crée un vide juridique préjudiciable aux artistes, acteurs culturels et ayants droit. Ils signalent dans la foulée que «la Sodav, après cinq ans de gestion opaque, n’est pas soumise au contrôle de la Commission permanente dans les conditions fixées par la loi».
Thione Seck, Ablaye Mbaye, Habib Faye n’ont jamais eu de cartes de membre de la Sodav Poursuivant leurs dénonciations, l’Omart et «Say Wi» soutiennent que la gestion «nébuleuse» de la Sodav se traduit par l’absence de cartes de membre jusqu’à la date de l’expiration de l’agrément, le 7 Mars 2021. «Thione Seck, Ablaye Mbaye, Habib Faye, Baye Peulh entre autres sont décédés sans carte de membre de la Sodav.
Le management et la gestion de la Sodav sont très loin des attentes de l’écrasante majorité des ayants droit. Nous, sociétaires de la Sodav, déplorons la gestion opaque, nébuleuse de la Sodav par une administration tatillonne», assènent les deux organisations qui exigent dans le même sillage le départ du Conseil d’administration et de la Direction gérante de la Sodav pour faute de gestion. Toutefois, elles saluent les efforts financiers, sociaux, économiques, juridiques consentis par le Président Macky Sall.
MARODI, LE FILM QUI CRÉE LA POLÉMIQUE !
Procès, Problèmes avec Marodi… Mage crache ses vérité
La polémique continue d’enfler à Marodi. Après le départ de Halima Gadji alias Marième Dial, d’autres acteurs montent au créneau pour dénoncer la «précarité» dont ils sont victimes. James, Mage et Léna, avaient même traîné en justice le producteur Massamba Ndour. Dans cet entretien accordé à iGFM, «Mage» revient sur ce litige qui a été porté devant les tribunaux. C’est une actrice dégoûtée, voire remontée et déçue, qu’on a eu au bout du fil. Depuis les Etats-Unis, elle parle...
Le Silence de Mage…
«Si je me suis tue pendant tous ces derniers mois depuis la fin du tournage de la saison 1 de Golden, c’était pour différentes raisons. Mais aujourd’hui je tiens à dissiper le doute et faire taire des rumeurs. Partout les gens me demandent pourquoi Golden 2 n’est pas tournée comme si cela ne dépendait que de moi. J’ai toujours répondu et me répète encore que, je ne suis que l’un des Acteurs principaux de cette série et non pas la Productrice. Donc la suite de cette série ne dépend pas de moi, mais de Marodi, donc de Mass Ndour», a-t-elle fustigé (…) Les acteurs et les artistes doivent connaître leur valeur. Je suis avant tout une Artiste qui respecte le secret professionnel et les termes des contrats qu’elle a signé. Quand je commence un travail je me donne à fond afin que le résultat puisse s’approcher de la perfection. Nous autres Artistes nous avons un devoir que je m’évertue à remplir : il ne s’agit pas seulement de distraire un public mais aussi d’éduquer, de transmettre un message, de réconcilier, d’animer, de calmer…»
Les débuts avec Mass et Golden…
«J’ai passé presque toute ma vie à l’étranger avec plus de 20 ans aux États-Unis, un peu moins en France et au Brésil, et quand j’ai éprouvé l’envie d’avoir un pied-à-terre solide chez moi au Sénégal c’était parce que je voulais vraiment y travailler et faire un retour dans le monde de l’audiovisuel Sénégalais et en ramenant mes expériences, apporter mon humble participation à l’amélioration de notre cinéma Sénégalais. Je ne peux donc pas me permettre de venir signer un contrat, avec soi-disant l’une des meilleurs boîtes de production pour m’amuser, perdre mon temps et faire perdre du temps, après avoir fini de tourner un long métrage! Mass Ndour m’a proposé Golden à Ouagadougou, au moment où le long métrage ‘’Frontières’’ où je suis Actrice principale, avait remporté depuis sa sortie plus de 10 prix dans le monde entier. J’ai tout de suite adoré Golden».
«Les conditions étaient très difficiles»
«Il est anormal que les autres pays réussissent dans leur cinéma et que nous on traîne derrière, alors qu’on a les capacités et peut-être même mieux que les autres. Les choses doivent changer. Quand je m’engage dans quelque chose j’y vais à fond et avec Marodi j’ai plongé les yeux fermés dans ce projet, avec une confiance aveugle et passionnément. Les conditions de travail étaient très difficiles, et parfois insupportables, et j’ai supporté ce que je n’aurai jamais supporté ailleurs. Mais encore une fois quand je crois en quelque chose je fonce la tête baissée et plus on avançait, plus le public aimait cette série et cela me motivait pour continuer à donner le meilleur de moi-même.»
«Tout le monde s’imaginait que j’avais gagné le jackpot…»
«Quelle ne fut ma surprise d’apprendre sur les réseaux sociaux, à peu près 6 à 7 mois après la fin du tournage, que Golden passait sur la chaîne A+. Des amis m’apprenant que l’affiche de Golden se trouvait dans près de 500 stations de métro en Europe, spécialement cette énorme affiche avec toute la famille Gaye, à la Gare du Nord en plein croisement de la ligne du RER ! Tout le monde s’est dit que j’avais gagné le jackpot, que la saison 2 allait démarrer de suite avec des millions qui tomberaient à flot! Marodi avait vendu Golden à Canal sans que cela ne soit spécifié dans mon contrat ni dans un autre. Je ne vais pas dévoiler ici les termes de mon contrat de travail avec Marodi, mais cela n’était pas dans nos accords et ce préjudice avait donc entraîné des conséquences sur ma vie familiale, professionnelle et sur ma santé. De surcroît doublé en Français, ce que j’aurai tant souhaité moi-même faire...Puis Golden était ensuite diffusée sur d’autres chaînes liées à Canal».
«Les conditions de tournage étaient horribles»
«C’est dommage ! Car, jamais au plus grand jamais je ne me serai lancée dans cette aventure où j'ai été, en quelque sorte, humiliée, moi qui viens des USA avec une expérience plutôt grand écran. Je me suis faite avoir comme une débutante parce que j’ai fait confiance en quelqu’un de mon pays pour notre cinéma. Après tous les efforts donnés, et l’appréciation du public après 8 longs pénibles mois de tournage qui ont fini par me faire hospitaliser à Paris pendant 10 jours (énorme stress causant d’horribles maux d’estomac), voilà ce que je méritais comme coup de massue ? J’étais déçue, en colère, triste, et malgré cela, pendant un an (depuis mai 2020), je me suis tue, sans jamais parler de cela à qui que ce soit sur les réseaux.»
Le procès...
«M’étant jointe à Dany (Léna Thomas Ndiaye) et à James (Julo Souleymane Ndiaye) pour intenter un procès contre Marodi, contre Mass Ndour: Dany avait déjà gagné son 1er procès contre Marodi, nous avons fait bloc à 3 et malgré de multiples tentatives de conciliation avec Mass Ndour, le procès a finalement eu lieu et nous avons gagné. C’était en mars 2021.... Et pendant tout ce temps-là, je n’ai jamais révélé quoi que ce soit de cette situation (horreur du buzz !) malgré les relances du public et questions de mes proches et amis. Durant les tentatives de conciliation je m’étais dit simplement qu’une solution à l’amiable serait trouvée et que l’aventure pouvait continuer sur de nouvelles bases: à un moment donné j’ai moi-même pris la décision de parler directement à Mass pour même arrêter la procédure et trouver un terrain d’entente, tellement la pression de la demande pour la saison 2 était forte.»
La médiation et la condamnation
«Quelques personnes ont tenté médiations. Mass Ndour n’a jamais accepté et on est donc allés droit au procès d’où on est sortis victorieux. Bien sûr que j’ai un goût amer dans la bouche car cela aurait pu se passer autrement : ce n’est pas pour l’argent que j’ai fait cela mais c’est pour une question de principe. L’artiste est une personne qui doit se faire respecter, les termes d’un contrat doivent être respectés et surtout nous devons tous tirer des leçons de cette situation : sans éducation, sans formation, sans coaching, sans conseillers compétents en cinéma, les Acteurs continueront à signer des contrats incomplets, ambigus, il faut connaître ses droits. Sans cela il y aura toujours des frustrations, des grincements de dents, des séries inachevées et notre cinéma sénégalais n’ira nulle part.
«Des acteurs vont toujours jouer dans de mauvaises conditions»
«Nous avons au Sénégal un très bon potentiel, il nous faut juste ces quelques efforts, de la discipline, et de la rigueur au travail pour que nous puissions faire plus ce que nous avons déjà fait et notre cinéma pourra même dépasser les autres pays pourquoi pas, nous sommes en très bonne voie. (…) Je pensais que les choses allaient changer et que Massamba Ndour allait comprendre. Mais rien, il a enfoncé le clou. Hélas, on aura toujours certains acteurs qui vont accepter de jouer dans de mauvaises conditions, juste pour se faire voir à l'écran et ça arrange les maisons de production, comme Marodi qui en profitent. Mais, en même temps, avec cette (malheureuse) situation qu’est la nôtre, les gens ont les yeux ouverts».
Golden saison2
Serai-je prête pour Golden 2? Bien sûr ! Mais....Cela ne dépend pas de moi. Alors « les fans de Mage », sachez que ce n’est ni à cause de mon absence du Sénégal (avec le modernisme le problème de distance n’est plus un problème et cela ne l’a pas été en saison 1), et ce n’est ni à cause de ce virus, ni à cause de l’argent que Golden2 n’est pas (encore) tournée.
LE FRANÇAIS N'A D'AVENIR EN AFRIQUE QUE S'IL RECONNAÎT LES LOCALES
Le philosophe Souleymane Bachir Diagne prévient que l’évolution de la francophonie ne dépends pas du facteur démographique, mais reposera sur le plurilinguisme et la bonne santé de l’éducation en Afrique
Jeune Afrique |
Fatoumata Diallo |
Publication 25/04/2021
D’ici 2050, 70% des francophones vivront sur le continent africain. Le philosophe Souleymane Bachir Diagne prévient cependant que l’évolution de la francophonie ne dépends pas du facteur démographique, mais reposera sur le plurilinguisme et la bonne santé de l’éducation en Afrique.
S’approprier la langue française et l’inscrire pleinement dans le pluralisme linguistique. Et en particulier dans le contexte de l’Afrique francophone. C’est le credo de Souleymane Bachir Diagne pour en finir avec une vision archaïque d’une francophonie crispée, campée sur « une défense du français contre l’hégémonie de l’anglais ». Pour le philosophe sénégalais, professeur de français à l’université de Columbia (New York), c’est la langue française qui doit s’adapter à la société africaine, et non l’inverse.
En clair, les Africains francophones peuvent, et doivent, modifier la langue, l’adapter à leurs langues nationales, leurs pratiques, leurs vécus. Et, surtout, ne pas attendre pour ce faire d’obtenir l’aval de l’Académie française.
L’Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone (ODSEF) prévoit que, d’ici à 2050, 70% des francophones seront des Africains. Un chiffre largement mis en avant ce 20 mars, Journée internationale de la francophonie. Mais Souleymane Bachir Diagne balaie cet argument démographique. Pour lui, la pérennité du français en Afrique n’est possible que si les locuteurs participent à l’évolution de la langue.
Vous défendez la nécessité de la reconnaissance des langues locales et nationales dans l’espace francophone africain. Comment concevez-vous la cohabitation entre le français et celles-ci ?
Souleymane Bachir Diagne : Pendant de nombreuses années, la francophonie a été perçue comme une défense frileuse de la langue française contre l’hégémonie de l’anglais. Aujourd’hui, le maître mot pour la définir est le pluralisme linguistique. Ce pluralisme se caractérise par la reconnaissance de l’existence de plusieurs langues dans l’espace francophone. Ces langues locales méritent d’être considérées et renforcées.
Le français, l’anglais et le portugais sont des langues d’Afrique, à côté des langues africaines. Ainsi, la cohabitation des langues est naturelle en Afrique. Sur le continent, il est rare de trouver un africain qui ne parle pas plusieurs langues. Donc, le français n’a d’avenir en Afrique francophone que si il reconnaît les langues locales, et fonctionne avec elles.
Que pensez-vous du mode d’apprentissage du français en Afrique, au regard de celui des langues locales ?
L’école doit être un espace plurilingue qui doit faire l’objet d’une vraie politique linguistique. Il faut renforcer le français, car sa maîtrise a faibli dans les écoles africaines.
Dans le même temps, il est crucial d’introduire les langues africaines dans l’enseignement. Celles-ci doivent devenir des langues de savoirs et de créations dans lesquelles les écrivains écrivent. Je plaide que l’on puisse écrire la philosophie et d’autres disciplines en langues africaines. Boubacar Boris Diop – auteur de l’ouvrage Les tambours de la mémoire – en est l’exemple. La francophonie aura de l’avenir si, et seulement si, l’école et la société sont des espaces plurilingues.
Puisque la France considère que nous parlons sa langue, alors elle devrait nous exprimer sa gratitude à nous qui la faisons rayonner, la réinventons et l’enrichissons de nos ailleurs, de notre multiplicité
Du 13 au 21 mars s’est tenue la semaine de la Francophonie. Comme tous les ans lors de ce temps d’échange, j’ai été invitée, ainsi que plusieurs auteurs, à m’exprimer sur l’incidence du français dans mon écriture. Un certain type de questions me sont invariablement posées lors de ces rencontres. Considérez-vous que le français est votre langue ? Pourquoi écrivez-vous en français? Vos autres langues influencent-elles votre écriture? Pensez-vous que votre littérature pourrait émouvoir des personnes qui ne s’intéressent pas à l’Afrique ?
Leur récurrence n’estompe pas le malaise qu’elles continuent de susciter en moi. J’y ai répondu souvent, sans doute de façon imparfaite puisqu’elles reviennent. L’autre hypothèse, celle à laquelle je souscris car elle me semble réaliste, serait que personne n’écoute. Ni les questions, ni les réponses ne présentent le moindre intérêt pour quiconque.
Amnésie française
Quel sens donner à cette communauté de langue qui m’inclurait tout en m’enjoignant de signifier mon allégeance ? Bien que j’écrive en français des livres publiés en France, il m’est demandé de réitérer, à échéance régulière, mon appartenance et ma légitimité. Pourquoi serait-ce à moi de justifier les circonstances historiques m’ayant menée au français ?
La France connaît aussi bien que moi les réponses à ces questions. Elle sait mieux que moi pourquoi l’Afrique subsaharienne, si on exclut l’Hexagone, est la partie du monde qui réunit le plus grand nombre de locuteurs. Par quel extraordinaire retournement de situation est-ce à moi d’expliquer cette histoire commune dont la violence réelle et symbolique a été pensée en France ? Faut-il y voir une forme peu ordinaire de désordre mental dont l’amnésie serait le symptôme ?
LA DEPORTATION, L’INTERNEMENT ET LA MORT DE ALINE SITOË DIATTA EN 1944
A seulement 24 ans, le destin de Aline Sitoë Diatta s’est accompli tragiquement à Tombouctou en 1944. Elle y avait été condamnée à purger une peine d’internement de dix ans ; elle n’a pas tenu un an, victime du scorbut
A seulement 24 ans, le destin de Aline Sitoë Diatta s’est accompli tragiquement à Tombouctou en 1944. Elle y avait été condamnée à purger une peine d’internement de dix ans ; elle n’a pas tenu un an, victime du scorbut. A Tombouctou, la mémoire locale n’a pas gardé d’elle beaucoup de souvenirs . Par contre, au Sénégal, le débat sur le rapatriement de ses restes est encore d’actualité dans un contexte où l’engagement mémoriel toise la lecture politique.
On en sait beaucoup sur Gbéhanzin , Samori, Chérif Hamahoullah, tous capturés et brandis comme des fauves de foire avant d’être déportés dans des territoires aux conditions climatiques rudes ; en Martinique, en Guinée, en Côte d’Ivoire, en Mauritanie, au Gabon, à Madagascar, au Soudan français,… S’y ajoute le flot d’assignation à l’intérieur de chacun des territoires colonisés par la France, la « grande nation des droits de l’Homme ». C’était l’époque des « camps d’internement », des « camps d’enfermement administratif » et même des « camps de concentration » sous les tropiques, dans l’ombre de la deuxième guerre mondiale !
Aline Sitoë Diatta, elle, a été « affectée » au Soudan français. D’armes, elle n’avait que son intelligence ! De munitions, elle n’avait que son charisme, et son verbe ! Elle n’a pas été jugée par un tribunal, car l’administration n’a jamais pu réunir contre elle des preuves. Elle a cependant été condamnée à « internement administratif à titre préventif » parce que son engagement en faveur de l’autonomie et de la renaissance de son peuple dérangeait. Mue par une force intérieure propre à l’univers animiste des diolas de la Casamance, Aline était tout simplement un leader. Elle avait des pouvoirs mystiques.
Le Lieutenant-Colonel Sajous, Commandant du cercle de Ziguinchor, à l’époque des faits, donne un portrait de Aline en ces termes : « Servie par le prestige d'avoir procuré aux Diolas un hivernage très pluvieux gage d'une excellente récolte de riz et succédant à une année 1941 sèche, elle prescrivait à son entourage de féticheurs de ne pas obéir aux Blancs, de leur refuser les hommes pour le service militaire, de ne pas accepter les achats obligatoires de paddy, de ne pas entretenir les routes » (Archives d'outre-mer d' Aixen-Provence, 14 MI 1835 2G 42, Rapport politique du Sénégal). Ce court extrait résume la volonté du colonisateur d’en finir avec elle. Ces propos seront confortés par Christian Roche, un historien, le dernier proviseur français du lycée de Ziguinchor, dans un article intitulé « Chronique casamançaise.
Le cercle de Ziguinchor au Sénégal pendant la guerre de 1939-1945 » ( Revue des Outre- Mères, revue d’histoire, 1986) . D’après Roche, parce que justement Aline avait une aura et un discours nationaliste, qui débouchait sur une sorte de subversion, le Lieutenant-Colonel Sajous a décidé « de frapper les imaginations ». Pour le militaire français, Aline Sitoé pouvait être considérée comme « l'inspiratrice des troubles » ayant secoué la Casamance. Cette déduction était suffisante pour justifier qu’il se rende en mission dans la zone d’évolution de Aline. Sajous est d’une grande barbarie. Il tue, frappe et menace de mettre le feu à tous les villages. Pour couper court à cette barbarie qui s’abattait sur des innocents, Aline a préféré se rendre. Roche précise que cet évènement a lieu le 31 janvier vers midi. « … la jeune prophétesse, appuyée sur des cannes en raison d'une infirmité congénitale, vint se livrer aux Français afin d'éviter toute effusion de sang », rapporte l’historien. Mais Sajous n’est pas content. Il veut humilier la nationaliste et la gifle ; ce qui ne passe pas .
Captive désormais, elle prend la direction de Ziguinchor en même temps que certains de ses proches, entre 20 et 23 personnes. Elle sera condamnée à la déportation. Dans un premier temps, elle est à Kayes. Elle finira par Tombouctou. L’historien sénégalais Papis Comakha Fall qui a travaillé sur les mêmes faits « Automne-hiver 2020 » (page 19, n° 9-10 ), insiste sur le caractère pacifique de la lutte engagée par Aline Sitoë Diatta. Malgré tout, l’armée française avait décidé de la réduire en silence avec la consigne suivante : « faire respecter les ordres, arrêter les rebelles et mettre fin par la force, à toute tentative de rébellion jusqu’à la soumission complète ». (Télégramme lettre n° 31 adressée au gouverneur général de l’AOF, Saint Louis, 22 janvier 1943). Dès lors, les mobiles ne devaient plus être compliqués. Ils seront condensés en trois points : « mensonges, escroquerie et rébellion ». Pour Roche, Aline a été condamnée « administrativement », parce qu’elle tenait un « message religieux qui préconisait un retour au riz rouge, au lieu du riz blanc recommandé par les Français, par sa prédiction que les Blancs partiraient un jour… . ».
La condamnation devenait possible du seul fait de l’application du décret colonial du 15 novembre 1924, une des illustrations du régime de l’indigénat. La volonté qui sous-tendait l’invocation de ce texte qui autorisait tous les abus était qu’ « il importe au plus haut point pour le retour de la tranquillité dans le pays que la visionnaire Aline Sitoë Diatta et ses adeptes soient écartés pour longtemps des lieux où ils ont exercé leur emprise ». ( Rapport d’ensemble tendant à faire interner la dame de Kabrousse, Aline Sitoë Diatta et ses principaux adeptes, 1943). L’autorité coloniale parle de la « rebellion d’Effok et des villages environnants qui croient, à la lettre, aux promesses que ( Aline) leur avaient faites » ( Archives Nationales du Sénégal, Rapport d’interrogatoire du 15 mars 1943). Aline Sitoë est donc coupable. Sur sa condamnation-même , nous n’avons pas trouvé meilleure source que Papis Fall. Il écrit que Aline Sitoë a été condamnée le 15 juin 1943, par un Arrêté général du Gouverneur. Le prononcé de l’acte admnistratif précise qu’il s’agit d’une peine de « dix ans de réclusion à passer dans le cercle de Kayes ». ( procès verbal d’interrogatoire du 15 mars 1943). On retrouve donc la trace de Aline à Kayes, mais pour quelques temps seulement.
L’administration a soudainement pris la décision de durcir les conditions de détention de la prisonnière en l’envoyant à Tombouctou. Le 27 août 1943, est pris l’arrêté qui fixe désormais son lieu de détention à Tombouctou. ( Histoire d’Aline Sitoë : mourir à Tombouctou, Soleil, mardi 11 octobre 1983, p.2). On sait maintenant que le « voyage » de Aline a été préparé à partir de Kayes. De Kayes, elle a embarqué dans un train pour Bamako et de Bamako à Koulikoro, le terminus du « Dakar-Niger » . De Koulikoro, elle a pris un bateau pour Tombouctou. Pour bien comprendre ce qui est arrivé à Aline Sitoë Diatta, il faut se placer dans le contexte de la deuxième guerre mondiale ; une guerre qui a ébranlé la France, dans ses fondements. En un quart de tour, Hitler a occupé Paris.
La France est divisée entre ceux qui pensaient qu’il fallait collaborer avec l’occupant nazi (Vichy, Pétain et consorts) et ceux qui appelaient à la résistance ( De Gaulle et alliés). La défaite de la France a eu un écho énorme dans les colonies. Mais la « puissance » ne voulait pas montrer de faiblesse. Les administrateurs fidèles à Vichy vont s’évertuer à briser toute forme de résistance locale. C’est dans ce contexte qu’il faut situer les évènements qui vont placer au devant de la scène Aline Diatta et Chérif Hamaoullah, entre 1941 et 1943. Voilà, pourquoi Aline a été mise aux arrêts et déportée à Tombouctou. La symbolique est forte. Aline Sitoë provient d’un milieu fondamentalement animiste. La condamner et l’interner à Tombouctou, une ville pieuse musulmane, était un autre supplice. Les colonisateurs ont apparemment vite réussi leur besogne. La résistante vivra à peine un an.
LA POLEMIQUE ET LA RECUPERATION
Le rapatriement des restes de Aline Sitoë est toujours de haute importance politique et stratégique au Sénégal. La question avait été soulevée depuis, sous le Président Senghor, dans la ligne de mire de l’indépendance du pays en 1960. Sans succès. Le 15 décembre 2011, une décision du Conseil des ministres du Sénégal s’est emparée du sujet. On y lit que : « Le Chef de l'Etat a, …, tenu à faire une déclaration solennelle sur sa volonté de faire rapatrier les restes de l'héroïne nationale Aline Sitoë DIATTA, très jeune résistante, enlevée puis déportée à Tombouctou au Mali où elle est décédée et enterrée dans un petit cimetière ….. Il a déjà obtenu l'autorisation du Président du Mali pour un éventuel rapatriement des restes d'Aline Sitoë DIATTA.
A cet effet, le Chef de l'Etat a instruit le Conseil de mettre en place une Commission, présidée par le Dr Christian Sina DIATTA et composée d'historiens, de chercheurs et de cadres casamançais, qui devra, suivant ses instructions, se rapprocher des autorités coutumières et religieuses de la Basse - Casamance, notamment, le Roi d'Oussouye et les autorités de Cabrousse, afin de solliciter leur avis. En cas d'avis contraire, le Président de la République a indiqué que le Sénégal demandera au Mali une concession pour y édifier un symbole digne du rang de notre héroïne nationale. » (Communiqué du conseil des ministres du Sénégal, 15 décembre 2011). Depuis, plus rien, jusqu’en 2019. Cette année-là, le militant des droits de l’homme, Alioune Tine a « reveillé » le dossier de Aline Sitoë. Il venait d’effectuer une mission à Tombouctou ; mission au cours de laquelle il a pris certaines informations.
Tine a placé son plaidoyer au plus haut niveau politique en interpellant directement le Président Macky Sall et Abdoulaye Baldé, le maire de Ziguinchor. Que dit Tine ? « Nous demandons solennellement au Président de la République Macky Sall et le maire de Ziguinchor Abdoulaye Balde de prendre toutes les initiatives diplomatiques opportunes auprès de leurs homologues maliens pour que le corps de Aline Sitoë Diatta soit rapatrié à Cabrousse auprès des siens », a-t-il lancé, sur sa page électronique. « Le Sénégal doit absolument promouvoir la mémoire de cette héroïne qui a été déportée comme d'autres résistants africains au colonialisme, comme Samory Touré, Serigne Cheikh Bamba Mbacké. », a-t-il ajouté. Ses arguments, il les tire encore de l’histoire, car « ne pas honorer la mémoire de Aline Sitoë, c'est comme la punir une deuxième fois après sa déportation, en confinant sa tombe dans un anonymat infamant.'' !
Ainsi donc, Alioune Tine entendait réussir une grande « mobilisation de l'opinion pour rapatrier au Sénégal la dépouille de l'héroïne Aline Sitoë Diatta enterrée de façon anonyme au milieu de nulle part à Tombouctou » ! Alioune Tine donne des informations capitales de façon pathétique. Il écrit : « Elle a été enterrée devant sa maison, juste devant le lit d'une rivière asséchée, pratiquement seule au monde ». « Les inscriptions en arabe sur sa tombe ont été effacées par les groupes armés djihadistes. La tombe est gardée par une famille musulmane très pieuse…. ». Il affirme avoir pu se recueillir sur la tombe
…. LES NECESSAIRES RECOUPEMENTS
Sur ce chapitre, il convient de relativiser le cri de coeur de Aliou Tine, car les faits se présentent autrement à Tombouctou. Tine et les autres sources, dont certaines sont encore vivantes, ne sont pas concordantes sur la matérialité des faits se rapportant à la mort de Aline Sitoë Diatta. Tine s’est, peut-être recueilli sur une tombe qui n’était pas celle de la grande dame de Casamance. Papis Fall reste toujours notre principale source d’information. Il est d’une grande précision dans le déroulement des faits qu’il écrit, que Aline a été placée dans « le camp des internés ». Aujourd’hui, cette place est occupée par l’école fondamentale qui porte le nom de « Bahadou Boubacar ».
Saloum Ould Elhaj, un instituteur et un historien de Tombouctou, d’une grande réputation confirme ces propos. Il nous a précisé, au cours d’une conversation téléphonique, que l’école « Bahadou Ben Boubacar » dont il s’agit est l’ancienne « école nomade » de Tombouctou ; école qui a connu des enseignants illustres comme Modibo Kéïta, le futur président de la République du Mali. Dans le camp des internés, rapporte Fall, Aline sera mise à l’isolement. Elle qui vient de la forêt va manquer de fruits. Sa santé ne va pas tarder à se dégrader. Elle est transférée au dispensaire local où elle va rendre l’âme, le 22 mai 1944. Elle a souffert du scorbut, une avitaminose sévère. La date du 22 mai est aussi celle qui a été communiquée, dans un rapport, par le président Abdou Diouf, sur la base d’une enquête menée à Tombouctou en 1989. Cependant, Jean Girard qui a travaillé de façon indépendante sur le même sujet ( « Genèse du pouvoir charismatique en Basse Casamance (Sénégal) », (Institut fondamental d'Afrique noire », (1969) avance une autre date qui se situerait en 1946. Mamadou Nkruma Sané, un des leaders du mouvement indépendantiste casamançais ne retient pas lui aussi la date du 22 mai, comme celle de la mort de Aline. Il penche pour 1945, car , soutient-il, à cette date, il dispose d’informations , notamment un rapport médical qui recommandait à l’administration coloniale de libérer Aline et son mari.
Aline, dit Sané, n’était même pas morte. Ses assurances, les voici : « Je peux vous confirmer qu’elle est vivante quelque part puisque son mari qui est plus âgé qu’elle n’est disparu qu’aux environs de 1998. La reine avait été arrêtée les 28-29 janvier 1943. Elle n’avait que 23 ans. En plus, elle n’a jamais été déclarée morte par ceux qui l’ont arrêtée et l’ont incarcérée à Tombouctou. C’està-dire l’autorité coloniale de l’époque. C’est cette même autorité coloniale qui a produit le document que je mets à votre disposition. Lequel document me dit qu’elle a été libérée vivante avec son mari et le reste des Casamançais qui étaient emprisonnés avec elle à Saint-Louis, Matam, Podor et Kayes. C’est elle seule qui n’a pas pu regagner sa terre natale.
Par contre son mari est rentré. Vous verrez le décret colonial qui avait motivé son arrestation et le second décret qui avait donné l’autorisation de la libération des détenus politiques casamançais arrêtés pendant la période coloniale. » ( Wal fadjiri, 2007, repris sur le site du Soleil, 26 décembre 2007). Sur la mort même de Aline Sitoë Diatta, Saloum Ould Elhadj est catégorique. Il parle de la consignation de ce décès dans le registre de la mairie de Tombouctou, document aujourd’hui malheureusement disparu depuis l’entrée barbare des djihadistes dans la ville en 2012. Saloum Ould El Hadj et plusieurs autres sources qui ont travaillé sur l’identification de la tombe de Aline Sitoë sont formels.
Aline repose, non pas au bord d’un quelconque ruisseau, mais bien au cimetière qui porte le nom de Sidi El Ouaffi Araouani, sis à Sarey Keyna, à quelques pas seulement du dispensaire où a été constaté le décès de la « dame de Kabrousse ». Du reste, se demande Saloum Ould Elhadj : « pourquoi l’enterrer au bord d’un ruisseau alors qu’il y a un cimetiere à moins de cent mètres ? » Saloum Ould Elhaj a les preuves de son affirmation en la personne de Gobi, à l’époque, Maçon du cercle de Tombouctou. C’est à ce titre, qu’à l’aide de quelques prisonniers, il a procédé à l’inhumation du corps. Cette version locale est crédible. Elle détruit littéralement les assertions de Alioune Tine qui dans son plaidoyer, affirme que « Aline a été enterrée devant sa maison, juste devant le lit d'une rivière asséchée, pratiquement seule au monde.
Les inscriptions en arabe sur sa tombe ont été effacées par les groupes armés djihadistes.La tombe est gardée par une famille musulmane tres pieuse qui nous a révélé que Aline Sitoé Diatta est considérée comme une sainte dans la ville aux 333 saints qu'est Tombuctou ». Outre Saloum Ould Elhadj, nous avons également pris contact avec Modibo Sidibé, un enseignant natif de Tombouctou. Modibo Sidibé qui a effectué de solides études en histoire est diplômé de l’Ecole Normale Supérieure de Bamako, promotion 1985. Il est très engagé dans la vie de la communauté. Au cours d’une entretien téléphonique, il nous a donné une confirmation irréfutable de l’existence d’une tombe au nom de Aline Sitoë Diatta à Sareykeyna. Au cours d’une visite, il a été surpris de constater qu’une stèle avait été posée sur un emplacement qui jouxtait une des tombes qu’il était venu visiter dans le cimetière cité.
La stèle était récente. Donc, Aline repose bien à Tombouctou et non « au mileu de nulle part ». L’épitaphe dit ceci : « Ici repose Ainsétou Assétou, Aline Sitoé Diatta, Décédée 29 Mai 1944 à Tombouctou ». Bien sûr que cette annotation induit de nouvelles interrogations. La première est relative au nom « Ainsétou Assétou ». Est-ce le nom par lequel, la résistante a été adoptée à Tombouctou ? Il y a une sorte d’homophonie qui peut soutenir cette hypothèse. La deuxième porte sur la date du décès de la personne. L’épitaphe parle du 29 mai, alors que les documents évoqués avant retiennent la date du 22 mai 1944. C’est dire que la confusion n’est pas encore à son terme. Il reste que la jeunesse de Tombouctou ne sait quasiment pas qui a été Aline Sitoë Diatta, qu’est ce qui l’a conduit ici et comment elle est passée dans la postérité mémorielle de son pays.
Au Sénégal, plusieurs infrastructures porte son nom : des écoles, des stades, une résidence universitaire, le ferry qui relie Dakar à Ziguinchor,….
Le sens de son combat doit être entretenu et évoqué dans la mémoire, car plus que la Casamance et le Sénégal, Aline est une combattante de la liberté pour l’Afrique. Elle ne se battait pas pour les femmes, mais pour son peuple. Il ne faut jamais perdre de vue qu’elle a été une victime, elle aussi, des partisans de Vichy. Elle est une preuve de la négation des droits de l’homme, tout court. La ville de Tombouctou pourrait ériger un monument en la mémoire de cette héroïne. Ne s’agit- il pas ici aussi d’un autre bien culturel ? Cela, au nom de la légendaire fraternité qui lie Tombouctou à la grande communauté sénégalaise, bien au-delà de la colonisation française. En témoignent la broderie, la musique, les arts culinaires, les échanges religieux…
*Paru dans L’Essor, le Quotidien national d’information du Mali, « Supplément culturel », du 12 mars 2021
DOCUMENTS CONSULTÉS
Archives d'outre-mer d' Aix-en-Provence, 14 MI 1835 2G 42, Rapport politique du Sénégal Archives Nationales du Sénégal, Rapport d’interrogatoire du 15 mars 1943 Christian Roche, Chronique casamançaise. Le cercle de Ziguinchor au Sénégal pendant la guerre de 1939-1945, Outre- Mères, revue d’histoire, 1986 Communiqué du conseil des ministres du Sénégal, 15 décembre 2011 Jean Girard, intitulé : Genèse du pouvoir charismatique en Basse Casamance (Sénégal), 'Institut fondamental d'Afrique noire (Ifan), 1969 Le Soleil , Histoire d’Aline Sitoe : mourir à Tombouctou, , mardi 11 octobre 1983, p.2 Papis Comakha Fall, « Automne-hiver 2020 » (page 19, n° 9-10) Télégramme lettre n° 31 adressée au gouverneur général de l’AOF, Saint Louis, 22 janvier 1943
EN RÉALITÉ, LES FEMMES NE CONNAISSENT PAS LA LOI SUR LE VIOL
Wasso Tounkara, présidente de Genji hip-hop -«Doyna ! Dotouniou noppi ! Daguenn wara di bolé» (Ça suffit ! Nous ne nous tairons plus ! Dénoncez-les)
Propos recueillis par Mame Woury THIOUBOU |
Publication 23/04/2021
«Doyna ! Dotouniou noppi ! Daguenn wara di bolé» (Ça suffit ! Nous ne nous tairons plus ! Dénoncez-les). Ces paroles qui forment le refrain de la chanson de Zarah B et Mina La Voilée sont un plaidoyer fort de l’Association Genji hip-hop qui regroupe des artistes, activistes et féministes. Le single, qui sera couplé à un document audiovisuel, met l’accent sur la prise en charge des victimes de viol.
Comment est né ce projet «Dotouniou noppi» ?
Dotouniou noppi est une initiative de l’Association Genji hip-hop qui regroupe des femmes artistes, activistes et féministes qui évoluent dans le hip-hop et les cultures urbaines. Dotouniou noppi fait partie d’un projet qui s’appelle «Femme, ma santé d’abord. Femmes, mes droits d’abord». Le clip Dotouniou noppi est accompagné d’un single et d’un reportage-vidéo dans lequel intervient une avocate pour parler de la loi sur le viol et de son contenu, et une psychologue qui parle de l’importance d’une prise en charge mentale et médicale des victimes. Ce projet fait partie de ceux que Genji devait réaliser au mois de novembre dernier dans le cadre des 16 jours d’activisme. Après avoir participé à plusieurs séminaires avec d’autres mouvements comme l’Association des juristes sénégalaises (Ajs), les collectifs Dafa doy, Femmes : occupez les médias, et après avoir vu la recrudescence des violences basées sur le genre, des femmes mariées battues par leurs maris, tous ces témoignages de femmes qui s’expriment sous le couvert de l’anonymat sur les réseaux sociaux, en tant qu’artiste, nous avons voulu prêter notre voix pour sensibiliser toute la population sénégalaise. On se rend compte qu’il y a beaucoup de femmes qui savent que le viol a été criminalisé, qu’on a la possibilité quand on est violenté de porter plainte. Mais en réalité, les femmes ne connaissent pas le contenu de la loi. Et on s’est dit qu’une personne qui sait ce que la loi a prévu quand ses droits ne sont pas respectés, elle personne saura au moins les démarches qu’il faut faire pour que justice lui soit rendue. Pourquoi on a choisi aussi le domaine de la santé mentale ? C’est parce qu’au Sénégal, à chaque fois qu’on demande à quelqu’un d’aller consulter un psychologue, la réponse est souvent de dire : «Je ne suis pas folle.» Alors que ça n’a rien à voir. Donc pour nous, il est temps que la psychologie soit démystifiée au Sénégal et que les gens aillent consulter, surtout les victimes de viol qui ont souvent des problèmes pour parler de ce qu’elles ont vécu. Ce sont des facteurs bloquants qui font qu’elles ont du mal à revenir dans la société et continuer leur vie.
Comment les artistes du collectif ont travaillé ensemble ?
D’habitude, on faisait des singles dans lesquels intervenaient plusieurs artistes. Mais cette fois-ci, on a voulu changer de démarches en choisissant deux artistes. Mina La Voilée travaille déjà sur ce thème et Zarah B y est aussi très sensible. On a choisi des artistes qui sont déjà sur cette lancée et qui sont en train de travailler sur ces thèmes, le viol et les Violences basées sur le genre (Vbg). Elles ont travaillé ensemble de l’écriture et à l’enregistrement. Elles ont eu toute la documentation, le contenu de la loi, certaines informations et interviews que nous avions faites avec l’Ajs et une psychologue. Ce qui leur a permis de mieux orienter le plaidoyer parce que l’objectif de ce single, c’est vraiment de rendre cette loi accessible pour tout le monde, que les gens puissent comprendre que la loi est là pour tout le monde et surtout en faisant un focus sur les femmes et les enfants. Le projet a été soutenu par l’African women development fund (Awdf).
Genji hip-hop est un collectif qui organise le Festival «Wakhal sunu bopp» qui veut dire «Parler par nous-mê¬mes». Est-ce que vous pensez que le viol n’est pas suffisamment évoqué dans la musique ?
Genji hip-hop organise ce festival Wakhal sunu bopp qui est à sa deuxième édition. L’année passée, on avait choisi comme thème «Je suis femme, je connais mes droits». On parle toujours des droits des femmes, de l’amélioration des conditions de vie des femmes. Pour nous, le viol reste encore tabou au Sénégal même si, avec l’avènement des réseaux sociaux, on note une nette amélioration. Le débat est posé sur les réseaux sociaux, mais tout le monde n’y est pas. Qu’il s’agisse de viols ou d’autres violences comme l’excision, on ne sensibilise jamais assez. Et on se rend compte que même la définition du viol par la loi n’est pas bien comprise par les Sénégalais. Il suffit de voir comment on décrit les victimes de viol, comment on en parle. Tout ça, c’est parce que les textes de loi ne sont pas accessibles et seuls les magistrats et les avocats les comprennent. Du coup, l’objectif qu’on a, c’est qu’en parlant de viol, l’on puisse parler de la sanction prévue par la loi, mais dans un langage accessible à tous. Qu’on puisse parler des bénéfices et avantages de la prise en charge mentale et médicale, de ce que ça va apporter de positif à une victime de viol. On peut en parler de différente manière, mais nous avons décidé de parler de ce qui se passe une fois que l’acte a été commis, comment se passe la prise en charge mentale. Même si on ne peut jamais guérir du viol, au moins apprendre à vivre avec.
Est-ce que le fait que cela soit évoqué par des femmes peut changer la portée du message ?
Le fait que des femmes en parlent a un impact. Ce sont elles qui subissent les viols généralement. Et ce traumatisme et cette douleur peuvent être racontés par une autre femme. Généralement, dans le hip-hop, quand on parle de la femme, c’est la maman, la fille facile, la copine qui ne sait pas ce qu’elle veut, etc. Elle n’est jamais représentée sous les traits d’une femme forte et qui sait se défendre. Nous avons voulu envoyer un message parce qu’à force d’écouter des messages négatifs et dévalorisants, ça contribue à fragiliser la femme. Si aujourd’hui on peut passer un message sur ce que la loi dit et prévoit, ce serait bien. Il ne faudrait pas être surpris si demain Genji sorte un single sur le Code de la famille parce que, pour nous, toujours dans cette recherche de solutions, il faut que les femmes connaissent le contenu de ce Code.
Quel est le message de Dotouniou noppi
Le message, c’est vraiment le contenu de la loi 2020-05 du 10 janvier 2020 portant criminalisation du viol et de la pédophilie au Sénégal. Le refrain dit : «Doyna, dotougnou noppi» (Ça suffit, nous n’allons plus nous taire). C’est déjà une façon de demander aux victimes de viol de ne pas avoir peur de dénoncer leur violeur, aussi proche qu’il puisse être, d’avoir ce courage et cette force de continuer, de savoir qu’elles ne sont pas seules, qu’elles auront des gens autour d’elles pour les soutenir après la dénonciation, jusqu’à ce que la justice fasse son travail et que si les faits sont avérés, que le violeur soit puni. La loi est là et il faut l’appliquer. C’est aussi une façon de lancer un message à nos autorités, de leur demander de faire valoir la loi quand il y a un procès, qu’elles n’oublient pas que pour une victime de viol, ça prend du temps, des années parfois, avant que le procès ne démarre. Il y a beaucoup de temps avant que la victime ne puisse être fixée sur l’issue du procès. Et entre-temps, il peut se passer beaucoup de choses. Nous, c’est vraiment des messages que l’on a essayé de faire passer du côté des autorités comme des populations.
Des projets en cours pour Genji hip-hop ?
Actuellement, Genji est en train de réaliser le projet Janji sur le renforcement de capacités de ses membres en gestion de projets culturels, en graphisme, en marketing digital, en sonorisation et en photo-vidéo. Avec le soutien de la Fondation Heinrich Böll, on a ciblé les activités dont on a besoin pour continuer notre travail et avoir une certaine autonomie technique. Et les sessions vont se poursuivre jusqu’en août.
TROIS CENTS ÉCRIVAINS ONT BÉNÉFICIÉ DU FONDS D’AIDE À L’ÉDITION EN 2020
Les frais d’édition et l’acquisition d’exemplaires des livres bénéficiaires ont coûté 600 millions de francs CFA au fonds d’aide à l’édition, selon le rapport
Dakar, 23 avr (APS) – Trois cent écrivains ont bénéficié en 2020 du fonds d’aide à l’édition du ministère de la Culture et de la Communication, qui a permis d’aider à éditer ou à acheter 365 titres au cours de la même année, indique un rapport de la direction du livre et de la lecture.
‘’Trois cent soixante-cinq titres (éditions et achat) ont pu être appuyés, pour un total de 365.000 exemplaires produits grâce au concours du fonds d’aide à l’édition’’, lit-on dans le document.
Les frais d’édition et l’acquisition d’exemplaires des livres bénéficiaires ont coûté 600 millions de francs CFA au fonds d’aide à l’édition, selon le rapport.
Selon le document, le sous-secteur du livre et de la lecture a connu en 2020 des ‘’perturbations majeures’’ liées à la pandémie de Covid-19.
‘’Ces aléas ont eu un impact négatif sur plusieurs segments de la chaîne’’ du livre, constate la même source, rappelant que le fonds d’aide à l’édition permet, en plus de l’assistance financière fournie aux maisons d’édition, d’‘’apporter une plus-value aux entreprises d’imprimerie et aux librairies’’, en vue de ‘’la diffusion et la commercialisation des ouvrages’’.
Grâce à la subvention de l’Etat, les écrivains bénéficient ‘’des retombées des droits d’auteur’’.
Soixante-cinq maisons d’éditions, 35 imprimeries, 20 librairies, 53 bibliothèques régionales et centres de lecture et d’animation culturelle ont bénéficié en 2020 du fonds d’aide à l’édition, précise le rapport.
Il ajoute que 20 associations s’activant dans le sous-secteur du livre et de la lecture ont aussi bénéficié du fonds, qui a aidé à leur fonctionnement et au déroulement de leurs ‘’activités d’animation, de formation et de capacitation de leurs membres’’.
La direction du livre et de la lecture déclare aussi avoir édité 20.800 exemplaires de ‘’L’exégèse coranique en langue arabe : Tafsir Al Qur’an Diya Nayrayni’’, un livre d’El Hadji Amadou Dème, le khalife de Sokone (centre) décédé en 1973.
Comme d’autres pays, le Sénégal célèbre, ce 23 avril, la Journée mondiale du livre et du droit d’auteur.
LE PHOTOGRAPHE OMAR VICTOR DIOP REALISE L’AFFICHE DU FCAT
La 18e édition du Festival de cinéma africain de Tarifa-Tanger aura lieu du 28 mai au 6 juin prochain
La 18e édition du Festival de cinéma africain de Tarifa-Tanger aura lieu du 28 mai au 6 juin prochain. En cette période de pandémie, le festival tiendra une Edition hydride «qui regarde à nouveau la révolution filmique des cinémas africains», informent les organisateurs.
Pour cette édition, le Sénégal est à l’honneur puisque l’affiche du festival a été réalisée par le photographe sénégalais de renom, Omar Victor Diop. L’image sur l’affiche représente une femme vêtue en blanc, suspendue dans l’air, sur fond bleu. «Un portrait mis en scène» qui fait partie de la série Bird stories, selon son auteur. La présentation s’est faite au cours d’une cérémonie au Centre d’initiatives culturelles de l’Université de Séville (Cicus) à laquelle le photographe a participé depuis Dakar. «Il a dit se sentir heureux et fier de contribuer à l’effort du festival d’enseigner l’Afrique dans toute sa diversité, de montrer les Africains dans leur vie quotidienne : leurs rêves, leurs peines, mais aussi leur joies», rapportent les organisateurs du festival. «La philosophie (du festival) est celle de toujours : être à cheval entre deux pays, deux continents, des langues différentes et entre diverses traditions culturelles, de nouveau adaptés avec certitude à la réalité dans laquelle nous nous trouvons», rappelle la directrice Mane Cisneros. «Les profonds changements qui ont eu lieu dans les cinémas du continent africain ont mené ces cinématographies dans le passé largement ignorées par les festivals internationaux de cinéma à être aujourd’hui l’objet d’ambition et de compétition entre grands festivals», a souligné la directrice du Fcat qui se réjouit de l’ouverture toujours plus grande à ces réalités qui sont «une pure révolution filmique et qui émergent comme une conquête esthétique unique dans le cinéma contemporain».
Cette année, le festival mettra l’accent sur le regard du cinéma espagnol vers l’Afrique et qui se reflète sur les listes de nominés et lauréats par l’Académie de cinéma espagnol. A cet effet, une table ronde se tiendra autour du thème : «Le cinéma espagnol se diversifie : un regard (enfin) vers l’Afrique», qui réunira cinéastes et journalistes autour de questions telles que à quoi répond ce changement dans le cinéma espagnol d’aujourd’hui ? Quelle image de l’Afrique est diffusée dans ces nouvelles productions ? Peut-on parler d’une nouvelle relation entre l’Espagne et l’Afrique à travers le cinéma ?
Le Soudan, invité d’honneur
Le Soudan, qui est le pays invité d’honneur et sa cinématographie, très méconnue mais qui a acquis un nouveau dynamisme ces derniers temps avec une présence dans les festivals internationaux, sera mis en lumière. Ainsi, le Fcat prévoit une rétrospective des courtsmétrages des premiers cinéastes du Sudanese Film Group, Ibrahim Shaddad, Eltayeb Mahdi et Suliman Elnour, qui sont également les personnages du film gagnant du prix Aecid au Fcat 2020, Talking about très de Suhaib Gasmelbari.
L’œuvre de Gadalla Gubara, le réalisateur le plus prolifique de l’histoire du cinéma au Soudan, sera également revisitée. Comme chaque année, le festival se tient entre l’Espagne et le Maroc. Mais cette année, le festival aura une extension dans l’enclave de Ceuta avec des projections de films, des courts-métrages et longs-métrages de la programmation de cette édition qui sont prévus, ainsi que des entretiens personnels avec les réalisateurs.
ANTON WILHELM AMO (1703-1753), PREMIER AFRICAIN NOIR A AVOIR OBTENU UN DOCTORAT DANS UNE UNIVERSITE EUROPEENNE
Coin d’histoire – Il fut pourtant un esclave «offert» à un duc allemand !
La vie et l’œuvre de ce philosophe ghanéen sont méconnues de beaucoup d’Africains. Mais, en Allemagne, une université lui a construit une statue et un prix « Anton Wilhem Amo » est remis chaque année, depuis 1994, aux étudiants étrangers les plus brillants par l’université Martin Luther de HalleWittemberg.
Anton Wilhelm Amo est né au Ghana. On situe sa date de naissance vers 1703, mais peut-être est-il né bien avant cette date. Car, c’est en 1707 qu’il a été capturé par des esclavagistes de la Compagnie néerlandaise des Indes occidentales dans une région du Ghana colonisée à l’époque par l’État de Brandebourg-Prusse, appelée Groß Friedrichsburg, et offert en « cadeau » à Anton Ulrich, duc de Brunswick-Wolfenbüttel. On suppose qu’il n’a pu être capturé à l’âge de quatre ans seulement, ce qui soulève des doutes sur sa date de naissance officielle.
Quoi qu’il en soit, Anton Wilhem Amo a été baptisé le 29 juillet 1707. Il est ainsi mentionné pour la première fois dans les registres de la chapelle de Brunswick-Wolfenbüttel, sous le nom d’Anton Wilhelm, par ses deux parrains, le duc Anton Ulrich et son fils August Wilhelm de Brunswick-Wolfenbüttel.
Dans cette famille de l’aristocratie prussienne, Anton reçoit une solide éducation bourgeoise. Les historiens ont consulté les registres financiers du château de Brunswick-Wolfenbüttel qui font état de deux dons au nom d’Amo aux années 1716/1717 et 1719/1721 pour financer ses études.
En 1727, Amo est inscrit au Collège de Philosophie et de Sciences Humaines à l’université de Halle où il obtient une licence en droit en 1729, après un mémoire sur les droits des Noirs en Europe, intitulé « De Jure Maurorum in Europa » (Du droit des Maures en Europe). Une année plus tard, en septembre 1730, il rejoint l’Université de Wittemberg où il poursuit ses études en médecine. En avril 1734, il soutient sa thèse intitulée « De Humanae mentis apatheia » (De l’Apathie de l’âme humaine).
Il devient alors le premier Africain noir à être docteur en lettres et philosophie dans une université européenne. Il est nommé professeur à l’université de Halle en 1736. C’est là qu’en 1738 il publie son deuxième ouvrage, le « Traité sur l’art de philosopher de manière simple et précise ». Et en 1740, il reçoit une chaire de philosophie à l’Université d’Iéna où il enseigne la philosophie jusqu’en 1747. Puis, sans doute pour éviter le contexte raciste de l’époque où les préjugés sur les Noirs restaient encore tenaces, il décide de retourner au Ghana en 1751.
Naturellement, du fait de ses origines, la philosophie d’Amo a été largement occultée. Néanmoins, celui-ci est mentionné par différents auteurs dans le but de prouver la valeur potentielle des Noirs, dans une époque où les préjugés racistes sont nombreux. En 1787, dans « Von den Negern » (Des Nègres), Johann Friedrich Blumenbach, biologiste de renom, cite le nom d’Amo parmi d’autres Africains pour prouver l’égalité intellectuelle entre Africains et Européens. En 1808, l’abbé Grégoire, dans son ouvrage intitulé « De la littérature des Nègres », présente des « Notices de Nègres et de Mulâtres distingués par leurs talents et leurs ouvrages ».
Dans cet ouvrage, il accorde quatre pages à la vie et à l’œuvre d’Amo et déclare que « l’Université de Wittemberg n’avait pas, sur la différence de couleurs, les préjugés absurdes de tant d’hommes qui se prétendent éclairés ». Au XXe siècle, Anton Amo a surtout passionné quelques auteurs par son parcours atypique. En 1916 et en 1918, un bibliothécaire du nom de Wolfram Suchier consacre deux biographies à la vie d’Amo, soulignant son caractère exceptionnel.
C’est cette même exceptionnalité de voir des Africains qui expliquerait, selon Suchier, la reconnaissance de ses pairs pour la philosophie d’Amo. En 1946, dans un contexte international encore largement inégalitaire, Beatrice Fleming et Marion Pryde publient « Distinguished Negroes Abroad » (Noirs éminents à l’étranger), où la vie d’Amo est décrite. En 1957, dans son autobiographie, Kwame Nkrumah, président du Ghana, rappelle qu’il a éprouvé un grand intérêt pour cette personnalité africaine de premier plan dont l’œuvre était jusque-là ignorée.
La figure d’Amo a été également instrumentalisée par le régime communiste de la République démocratique allemande. L’université de Halle, située en Allemagne de l’Est, s’est enorgueillie d’avoir accueilli un des premiers étudiants noirs en Europe. Elle cherchait ainsi à prouver l’existence d’une alliance historique entre les pays socialistes et les pays africains.
Dans ce contexte, l’université a dressé une statue d’Anton Wilhelm Amo. Burchard Brentjes, en 1976, dans « Anton Wilhelm Amo – Der schwarze Philosoph in Halle » (Anton Wilhelm Amo – Le Philosophe noir à Halle) présente Amo comme un contre-exemple de l’histoire de la colonisation. Si la figure d’Amo a été largement utilisée pour défendre les droits des Noirs ou revendiquer leur égalité intellectuelle, son œuvre a rarement été prise en compte comme pilier des « Aufklärung ».
Anton Amo est ainsi largement emblématique, mais sa philosophie est peu connue et peu discutée. C’est dans une perspective symbolique que, depuis 1994, l’université Martin Luther de Halle-Wittemberg remet un prix « Anton Wilhelm Amo » destiné aux étudiants étrangers. Au Ghana, Anton Amon s’est paradoxalement reconverti dans… l’orfèvrerie, ce qui confirme que c’était un personnage atypique, touche-à-tout et curieux de tout. C’est là, dans son pays d’origine, qu’il trouvera la mort en 1753.
Par Mohamed Bachir DIOP
LA SÉRIE INSPIRÉE DE L'AFFAIRE ADJI SARR SERA RETIRÉE DE LA DIFFUSION
Le producteur et le scénariste en avaient déjà pris la décision et la rencontre de ce dimanche avec le CNRA a entériné la suspension de la diffusion de ce qui avait initialement été intitulé « Thiey Adji Sarr’’
La série télévisée « Baline Coumba, auparavant ‘intitulée « Thiey Adji Sarr », du nom de la jeune femme masseuse, va être retirée de la diffusion, bien que déjà objet d’une bande-annonce sur Walf Tv.
Selon un communiqué de presse, rendant compte de la réunion entre le CNRA et l’équipe du film, le producteur et le scénariste en avaient déjà pris la décision et la rencontre de ce dimanche avec le CNRA a entériné la suspension de la diffusion de ce qui avait initialement été intitulé « Thiey Adji SARR’’.
Déjà, note le texte du CNRA, les réactions indignées et les condamnations anticipées avaient déjà entraîné le changement de titre, ‘’Thiey Adji SARR’’ devenant Baline Coumba. Comme relevé d’ailleurs par le communiqué, à l’origine, ce titre mis en exergue renvoyait à une affaire pendante devant la Justice. « Les réactions multiformes dans l’espace public n’ont été ignorées, ni par les intervenants dans la série ni par le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel » lit-on dans le texte.
Ainsi, le président du CNRA, Babacar DIAGNE a convoqué, ce dimanche au siège de l’institution, une réunion d’explications impliquant le producteur de série, Serigne Modou Diop, le scénariste Aziz Niane par ailleurs membre de la Troupe théâtrale Soleil Levant de Thiès, en présence du directeur de la Cinématographie, Germain Coly et de Pape FAYE, président de l’ARCOTS, l’Association regroupant les Artistes et Comédiens du Sénégal dont ce dernier est le représentant au CNRA.
« Les principaux concernés par la production, en amont comme en aval n’ont pas mis du temps à s’entendre sur ce qu’il fallait faire de Baline Coumba. Le Scénario (provisoirement) retiré de la diffusion, sera revu par l’auteur avec l’accord du producteur, en collaboration avec la direction de la Cinématographie » informe le compte-rendu du CNRA.