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26 avril 2025
Culture
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JAH GAL DOULSY, PROPHETE CHEZ LES AUTRES ?
Comme le dit l'adage nul n'est prophète chez soi. Jah Gal Doulsy crée des œuvres, mais ce n'est qu'à l'étranger que son art est reconnu manifestement puisque c'est la ou il les vend.
Comme le dit l'adage nul n'est prophète chez soi. Jah Gal Doulsy crée des œuvres d'art , mais ce n'est qu'à l'étranger que ses creation sont reconnues manifestement puisque c est la ou il les vend.
Artiste designer, créateurs de costumes, il compte parmi les artistes africains qui ont collaboré à donner corps au projet "Musée abandonné" de l'artiste argentin Diego Bianchi dans le cadre de la Biennale internationale d'art contemporain du Sud Global.
Ses poupées géantes faites de plastique en tout genre impressionnent à plus d'un titre (l'expo est encore en cours au Centre culturel espagnol de Dakar.
En marge du vernissage de l'exposition, le samedi 30 septembre dernier, Jah Gal Doulsy a répondu à quelques questions d'AfricaGlobe Tv.
«BEAUCOUP D’ARTISTES AFRICAINS ESSAIENT DE COPIER CE QUI SE FAIT EN EUROPE»
Zulu Mbaye, un des peintres sénégalais les plus connus, a gagné le droit de partager sans fioriture son regard sur le monde. Au cœur du Village des arts où il nous reçoit, c’est un homme sage et riche de ses nombreuses expériences qui se livre
Au moment de célébrer ses 50 ans de pratique artistique, l’homme s’est entouré de grands noms de la peinture africaine. Abdoulaye Konaté, Siriki Ki ou encore El Anatsui, voilà quelques-uns des artistes qui occuperont les cimaises du Musée Theodore Monod, le 27 octobre prochain, pour «célébrer Zulu Mbaye». Reconnaissance pour un homme qui aime à se présenter comme un «Sénégalais artiste». Zulu Mbaye, un des peintres sénégalais les plus connus, a gagné le droit de partager sans fioriture son regard sur le monde. Au cœur du Village des arts où il nous reçoit, c’est un homme sage et riche de ses nombreuses expériences qui se livre.
Plus de 50 ans de pratique artistique, que retenir de cela ?
Un grand vécu. C’est en 1970 que j’ai commencé la pratique artistique. Donc, une vie d’artiste très chargée que j’ai vécue ici et ailleurs en Europe, aux Usa. Pendant 50 ans, je n’ai fait que peindre. Je ne sais rien faire d’autre dans ma vie que peindre. En 2019, j’ai eu l’idée de fêter mes 50 ans parce que Massamba Mbaye est venu me voir et m’a dit : «Grand, 50 ans, ça se fête.» J’ai voulu le faire en 2020, mais comme le Covid19 était là, j’ai dû le repousser à 2023. J’ai eu, en tant que président du Village des arts, l’honneur de recevoir ici, en novembre 2016, le Roi Mohamed VI. Et j’ai eu à passer deux journées avec lui pour visiter les ateliers des artistes. Et en mars 2017, Sa Majesté m’invite à l’exposition, L’Afrique en capitale, dans le musée qui porte son nom à Rabat. C’est comme ça que j’ai commencé à rencontrer les décideurs marocains, de grands artistes et depuis quatre ans, je vis entre le Sénégal et le Maroc. Il faut dire que Sa Majesté m’a ouvert les portes du Maroc artistique et culturel. En 2019, quand je suis allé au Maroc me soigner, j’ai parlé au directeur de l’Agence marocaine de coopération internationale (Amci), de mon souhait d’organiser mes 50 ans. Il me dit : «On peut vous soutenir en invitant dix pays africains à Dakar pour vous rendre hommage.» C’est comme ça que l’idée est née, mais quand je suis rentré à Dakar en janvier2020, j’en parle à mon ami Racine Talla de la Rts, qui me dit : «Non, on ne peut pas regarder un pays étranger venir célébrer notre fils. Je vais en parler au Président Macky Sall.» J’ai été reçu par le Président qui a gracieusement soutenu et accompagné cet évènement. Et le 27 octobre prochain, avec une dizaine de pays africains invités, je vais célébrer ces 50 ans de pratique artistique dans deux espaces simultanément. Le Musée Theodore Monod, le 27 octobre, et l’Espace Vema, le 28 octobre. 46 exposants qui vont célébrer Zulu Mbaye, je pense que c’est une marque de reconnaissance, une sorte de consécration que l’on m’offre de mon vivant. Beaucoup n’ont pas cette chance-là. Il y aura un panel intitulé : «L’art comme levier de rapprochement des peuples.» L’art, la culture on va dire, est d’ailleurs le plus grand vecteur de rapprochement des peuples. Et c’est donc l’occasion de se parler entre différentes cultures, différentes sensibilités artistiques. C’est le sens que je donne à ce panel qui va regrouper d’éminentes personnalités, de grands hommes de culture de plusieurs pays, le 28 octobre au Musée Theodore Monod. Le 3e jour aussi, il y aura un film que je suis en train de faire depuis 4 ans sur mon travail et qui s’appelle Zulu, l’Africain.
Vous vous voyez d’abord comme un Africain ?
Je suis africain de naissance, de cœur, culturellement, historiquement. Je le revendique. Tout le monde sait que je revendique cette africanité à travers ma peinture, mon attitude, mon comportement, ma vie. Et c’est le cas même en Europe où j’ai vécu plus d’une vingtaine d’années, et où je ne m’habillais qu’africain. Et c’est une fierté, une manière de montrer notre appartenance, notre spécificité d’Africain. On n’a rien à envier aux autres. Il faut s’affirmer. Quand je vois aujourd’hui que beaucoup d’artistes africains, pour se faire connaître à l’international, essaient de copier ce qui se fait en Europe, parler d’art conceptuel, machin truc, j’ai envie de gerber. C’est comme si on n’avait pas de génie. Et pourtant, notre imaginaire de négro-africain est très riche. Nous sommes chargés par une force qui a bouleversé le monde par la rencontre entre Picasso et la statuette négroafricaine. A partir de ce moment, au début du 19e siècle, toutes les expressions artistiques étaient bouleversées. Ça ne s’arrête pas seulement à la peinture, mais la musique, la danse.
Les Occidentaux en ont tiré profit, mais pas les Africains, c’est ce que vous voulez dire ?
Mais c’est parce que nous avons une haine de nous-mêmes. Nous nous sous-estimons, nous foulons aux pieds ce que nous sommes et ça, personnellement, je ne le supporte pas. Tahar Ben Jelloun, dans un de ses livres, Moha le Fou, Moha le sage, disait : «Autrefois, c’étaient les étrangers qui nous déshabillaient. Aujourd’hui, c’est nous qui ôtons nos haillons et les jetons dans les fosses de la honte.» Par exemple, ici au Sénégal, si tu portes un thiaya, c’est comme si tu étais… on préfère se mettre en costume, cravate, on se dit qu’on est dans l’air du temps. Nous avons des choses à montrer au monde, à proposer et il faut que nous croyions à ça, que nous arrêtions de nous regarder avec des yeux d’ailleurs. Nous sommes là à mimer, singer et copier les autres. C’est comme si nous avions peur de nous-mêmes. Et pourtant, nous avons une belle histoire, une belle civilisation qui a enfanté toutes les autres civilisations du monde. Mais par-là, sont passés les religions, l’esclavage, la colonisation. Ça nous a donné des complexes et les artistes doivent être là pour faire resurgir ces ruptures qu’on a créées en nous. Il faut les combattre et c’est tout le sens que je donne à ma pratique artistique, mon œuvre, ma vie artistique. Il faut déconstruire et il faut redéfinir l’art. Les autres sont venus voir nos statuettes et nous ont dit, c’est de l’art. Oui c’est de l’art ! Bien que, quand on va dans les académies occidentales, les canaux de beauté qu’on y enseigne, la composition, il y a une rencontre. Alors que nos sorciers africains qui sculptaient, sortaient naturellement ces règles que l’on retrouve dans des académies, mais ce n’est pas pour des questions esthétiques, c’était plus que ça. Nos œuvres étaient chargées, nos œuvres n’étaient pas des décorations que l’on mettait dans un salon, dans des musées, des cages de verre et de fer. Comment se fait-il qu’autrefois, quelqu’un portait un masque, quelqu’un d’autre tapait à coup de tambours codifiés, un troisième esquissait quelques pas de danse et il pleuvait. Voilà, ce qu’était fondamentalement notre art. Je pense qu’il faut que les Africains, par le biais d’évènements comme la Biennale, essaient de montrer leur génie. Etre là à montrer que nous sommes des élèves qui savent réciter leurs leçons … Les autres nous regardent et rient sous cape. Nous croyons que puisqu’on fait la même chose que ce qui se fait à Paris, on existe. On n’existe pas. Et c’est pour ça que je ne participe plus à la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar.
Vous avez une seule participation à cette biennale…
En 1992. En 1996, au Nietti Gouy à Almadies, j’ai organisé le premier Off qui n’était pas encore le Off, et que j’appelais un boycott intitulé Amour interdit. On voulait ghettoïser l’art africain, vivre en autarcie alors que nous devons nous ouvrir au monde, inviter les artistes du monde entier, faire la fête avec le monde à Dakar. Et comme l’Etat sénégalais avait d’autres préoccupations, moi j’ai fait ce boycott pour revendiquer cette ouverture de l’art africain au monde. Quand on nous a interdit ça, j’ai appelé l’exposition Amour interdit. Et aujourd’hui, je suis content que la presse parle du Off de la biennale et qu’à chaque édition, il y ait 300, 400 expositions.
Vous n’aimiez pas le format dans lequel la Biennale s’inscrivait ?
Oui. La Biennale, à cette époque, aux deux tiers, était soutenue par la coopération française et par d’autres représentants de cette même coopération. Et ce sont eux qui donnaient des ordres aux organisateurs. On leur a dit d’africaniser la Biennale. L’édition de 2014 avec le Pr Babacar Mbaye Diop, il a initié une exposition parallèle au In, Regards croisés, dans laquelle il y avait d’autres nationalités occidentales. Ça, c’était une manière de s’ouvrir, mais depuis, ils sont repartis dans leur erreur et ont refermé la Biennale aux artistes étrangers. Il faut ouvrir la Biennale. Comme toutes les biennales, Sao Paulo, Venise, elles sont ouvertes au monde. Il n’y a pas de coloration raciale. Et tant que cette biennale est organisée dans cet esprit, je «m’excuse», je les laisse faire leur fête. Mais j’organise toujours des activités, je participe à ma façon en faisant des projets internationaux que tout le monde apprécie.
Sur la scène internationale, on a comme l’impression que l’art africain est perçu comme une case globale…
On est un peu considéré comme des artistes de seconde zone. Mais quand même, ça commence à s’ouvrir. Mais malheureusement, l’ouverture est pour les copistes, les bons élèves des Occidentaux. Mais pas ceux qui revendiquent leur appartenance négro-africaine comme moi. J’ai eu la chance qu’il n’y ait pas deux ou trois artistes sénégalais plus cotés que moi. Je suis sur le marché international, je n’aime pas en parler, mais je suis dans les galeries. Les gens confondent exposer à Paris et être sur le marché international. Ce sont deux choses différentes.
Vous êtes autodidacte comme on dit…
Comme tous les artistes. On apprend des choses à l’Académie comme on apprend des choses comme moi, dans l’atelier. L’académie, c’est pour connaître le rudiment. Mais le véritable apprentissage, c’est dans l’atelier. Et ça, même après 50 ans de pratique, dans l’atelier, tu apprends. Donc tout le monde est autodidacte. L’artiste est fondamentalement autodidacte parce que personne ne lui enseigne. J’ai fait les Ateliers libres de Pierre Lods pendant 7 ans, sans contraintes, sans qu’on me donne des notes, des sujets. A l’école des beaux-arts, les élèves font 4 ans. L’art n’aime pas le dirigisme. On doit laisser à l’artiste la liberté de faire son travail. Je ne crois pas aux professeurs d’art, mais plutôt aux conseillers d’art. Quelqu’un qui a la même expérience que moi et qui me conseille. L’esprit de l’enseignement des écoles, c’est copier ce qui se fait en Occident. Les élèves restent dans le même moule et je pense qu’au Sénégal, on ne peut plus parler d’une école des beaux-arts. Quand une école ne peut pas fournir à l’élève un pinceau ou un tube de peinture, c’est quand même grave. Et quand on met cette école des beaux-arts dans des petits appartements, il faut que l’Etat réfléchisse à cette situation. Les artistes, les apprenants en art méritent beaucoup plus que ça.
L’Ecole de Dakar est très renommée, en ce moment, quels sont les courants qui parcourent l’art sénégalais ?
Depuis l’avènement de l’Ecole de Dakar, il n’y a pas eu de, je n’ose pas dire nouveauté, mais le soubassement de ce qui se fait aujourd’hui, provient de cet Ecole de Dakar. Seulement, cette Ecole de Dakar, il faut la dépasser, lui apporter un plus, mais sans rupture. C’est ça ma démarche. Quand on regarde mon travail, on sent que je viens de cette Ecole de Dakar, mais j’apporte un plus, je suis ouvert aux autres souffles du monde et je sais ce qui se passe dans le monde. Je vis le 21e siècle et forcément, il y a des influences, des nouveaux souffles qui viennent vers moi. Mais j’essaie, avant de les pratiquer, de les digérer, les comprendre. Je ne prends pas tout simplement un concept qui vient d’ailleurs, qui n’a rien à voir avec moi, pour en faire mon discours artistique. Il faut toute une spiritualité, une religiosité et un regard clair. L’art ne traduit que ce que nous sommes. Nous avons des différences avec les autres, des différences civilisationnelles, historiques et même géographiques. Nous sommes en Afrique avec le soleil. Et ça déteint sur la palette chromatique des artistes. Ils font des couleurs vives, qui chantent. C’est l’environnement, mais ces spécificités, il faut savoir les décoder. Toute ma vie, j’ai réfléchi à ces questions et c’est pourquoi, beaucoup pensent que je suis difficile. Je ne suis pas difficile. Je ne veux pas me mentir tout simplement. En art, quand on ment, on ment sur son travail, son œuvre. C’est pour ça que quand je regarde l’œuvre de quelqu’un, même sans le connaître, je peux dire les caractéristiques de l’individu. S’il est timide, agressif, violent. Parce que l’art ne ment pas.
Il y a aussi le cas de ce Village des arts où nous sommes. Quelle est la situation en ce moment ?
Catastrophique ! On nous a offert une mine d’or, mais on est en train de cultiver des cacahuètes dessus. Quand des gens d’un autre pays arrivent ici et que je leur dis qu’on ne paie pas le loyer, l’eau et l’électricité, ils tombent par terre parce que ça ne se fait nulle part. Ailleurs, les artistes participent à la vie de leur village des arts. Mais ici, on nous a offert tout ça. Mais nous sommes en train de dormir et le village va à vau-l’eau. Par notre manque d’organisation, notre laxisme, l’incompréhension aussi de cet outil qui est la fenêtre de l’art sénégalais. Par exemple, à chaque fois qu’il y a une sélection nationale, 75% des sélectionnés sortent de ce Village des arts. Il y a de grands artistes, mais il y a aussi un manque terrible d’organisation. Alors que ce village peut accueillir le monde entier. Où est ce qu’il y a un village avec 52 signatures ? Si on était organisés, on aurait pu bénéficier de beaucoup de choses pour animer le village.
Il y avait un projet de rénovation sur le village…
C’est tombé à l’eau. On nous avait sommés de déguerpir un moment, mais les artistes se sont battus pour garder leur outil de travail. Parce que quand même, sortir de ce village serait un suicide collectif. Un artiste qui n’a que son atelier pour peindre, où les gens peuvent le trouver et acheter son travail, si on l’amène à Guédiawaye ou Mbadakhoune parce qu’il habite là-bas, il va mourir de sa belle mort parce que personne ne s’intéressera à son art là-bas. Ils ont eu raison de se battre pour garder cet outil parce que leur profession en dépend. Avec le ministre de la Culture, on est en train d’échanger. Il faut que le ministère s’implique dans ce village qui appartient à l’Etat sénégalais. Les artistes qui y vivent sont des Sénégalais et ce sont les ambassadeurs de l’art sénégalais dans le monde. Ce ne sont pas comme des menuisiers ou des mécaniciens qui gagnent leur pain. Nous ne sommes pas en reste dans l’œuvre de construction nationale. Un artiste qui vend une toile à 2000, 3000 euros, ça entre dans l’économie nationale. Nous participons à l’économie de ce pays. Nous apportons de la valeur ajoutée à l’économie de ce pays. Par exemple, le Roi du Maroc, en deux jours, a acheté 144 pièces dans ce village. Tous les artistes étaient devenus des millionnaires. Et cet argent va dans l’économie du pays. Il ne faut pas prendre les artistes pour des fainéants ou des dormeurs. Moi je suis polygame, j’ai 8 enfants. Je les nourris, je les mets à l’école, je paie leurs études, je paie mes loyers. Il ne faut pas penser que les artistes sont des gens en dehors de la société. Ils sont au milieu.
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SORANO SUNUGAL, SYMBOLE DU MOUVEMENT D’ENSEMBLE DU PEUPLE SÉNÉGALAIS
La nouvelle trouvaille totémique de la compagnie du théâtre national Daniel Sorano intitulé « Sorano Sunugal », symbolise le mouvement d’ensemble du peuple sénégalais et son engagement à la préservation des traditions artistiques
Dakar, 20 oct (APS) –La nouvelle trouvaille totémique de la compagnie du théâtre national Daniel Sorano intitulé « Sorano Sunugal », symbolise le mouvement d’ensemble du peuple sénégalais et son engagement à la préservation des traditions artistiques, a déclaré le ministre de la Culture et du Patrimoine historique, en procédant, jeudi, à son inauguration.
‘’Le totem incarne plus qu’une simple œuvre signalétique et d’embellissement. Il symbolise le mouvement d’ensemble du peuple du Sénégal, notre engagement envers la préservation de nos traditions artistiques et renforce notre lien avec les peuples de l’eau d’ici et d’ailleurs’’, a souligné Aliou Sow.
Ce totem construit sous forme de pirogue, demeurant un symbole culturel, revêt d’une « signification profonde dans de nombreuses cultures à travers le monde », a indiqué le ministre, en présence de son collègue en charge de l’Artisanat, Birame Faye ainsi que l’ancien ministre de la Culture Mbagnick Ndiaye.
Réalisé par trois jeunes artistes sculpteurs, le totem en question est une pirogue de huit mètres de long et quatre 4, 5 mètres de hauteur qui va embellir le boulevard de la République, a-t-on appris lors de la cérémonie d’inauguration.
Il est composé de balafon, de la kora et un tam-tam, des instruments traditionnels mettant en valeur l’identité culturelle du Sénégal.
Selon le ministre de la Culture et du Patrimoine historique, « le totem incarne des valeurs telles que le voyage, l’unité, la tradition et surtout la résilience ».
‘’En inaugurant ce totem, nous célébrons notre héritage culturel commun, nos voyages en tant que société et notre capacité à surmonter les grands défis’’, a-t-il souligné.
Le ministre a par ailleurs salué le travail ‘’remarquable’’ abattu par le directeur général de Sorano Ousmane Baro Ndione qui dit-il, « en un an, a fait du théâtre Daniel Sorano une destination, un lieu où tout le monde a envie d’aller en famille », parlant d’une diversification des activités de la compagnie à travers notamment les concepts ‘’Sorano chez vous’’, ‘’Sorano à l’école’’ et ‘’Sorano et sa diaspora’’.
Deux bus pour la mobilité des artistes et une salle de sport dédiée à l’amélioration du cadre de vie et de la performance physique et émotionnelle des artistes ont été également réceptionnées en marge de la cérémonie d’inauguration.
Il en est de même pour une nouvelle salle de spectacle de 250 places et une galerie d’exposition.
LA 34EME EDITION DES JCC ANNULEE EN SOLIDARITE AVEC LE PEUPLE PALESTINIEN
Le ministère tunisien des Affaires culturelles a décidé d’annuler la 34ème édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), en solidarité avec le peuple palestinien qui subit « une tragédie inacceptable »
Dakar, 20 oct (APS) – Le ministère tunisien des Affaires culturelles a décidé d’annuler la 34ème édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), en solidarité avec le peuple palestinien qui subit « une tragédie inacceptable », a appris l’APS du comité directeur du festival.
Les JCC étaient prévues pour se tenir du 28 octobre au 4 novembre dans la capitale tunisienne, avec le Sénégal comme invité d’honneur.
Le programme de la manifestation prévoyait un hommage au cinéaste Ousmane Sembène, dans le cadre de la célébration du centenaire de la naissance du premier lauréat du Tanit d’or des Journées cinématographiques de Carthage lors de sa création en 1966.
»Le comité directeur de la 34e session des Journées cinématographiques de Carthage a l’immense regret de vous informer, que dans le contexte de la tragédie inacceptable subie actuellement par les populations palestiniennes frères, le ministère tunisien des Affaires culturelles a décidé, ce 19 octobre 2023, l’annulation de la session prévue du festival des Journées cinématographiques de Carthage », lit-on dans un communiqué.
Cette décision s’inscrit « dans le cadre de la solidarité manifestée au plus haut niveau en Tunisie avec le peuple palestinien », en raison de la « situation critique » que vivent les habitants de Gaza soumis à « un siège complet » et victimes de bombardements quotidiens, en réaction aux attaques meurtrières du Hamas en territoire israélien le 7 octobre.
Le gouvernement israélien a coupé l’électricité, le carburant, l’eau et la nourriture à Gaza dans le cadre de ce siège, ce qui fait craindre une catastrophe humanitaire de grande ampleur.
Avant l’annonce de l’annulation pure et simple du festival, le comité directeur des Journées cinématographiques de Carthage avait indiqué que la session 2023 se tiendrait en solidarité avec la Palestine et « dans le respect des luttes d’un peuple qui subit meurtres et destructions et qui résiste pour reconquérir sa terre ».
Le communiqué publié à cet effet portait sur une « annulation du côté festif du festival », les organisateurs précisant que la session va se dérouler « avec la ferme conviction que l’engagement des JCC en faveur d’une Palestine libre passe aussi à travers des projections de films, de débats et de rencontres ».
La liste des films en compétition, toutes catégories confondues, avaient déjà été dévoilés, dont « Le mouton de Sada » du Sénégalais Pape Bounama Lopy.
Les noms des présidents des jurys avaient aussi été dévoilés. Il s’agit du réalisateur tchadien Mahamat Saleh Haroun pour la fiction et de la productrice tunisienne Dora Bouchoucha pour les documentaires.
L’affiche du festival, qui rendait hommage aux figures féminines du cinéma tunisien, avait également été rendue publique.
JCC 2023, UNE EDITION SUR FOND DE SOLIDARITÉ AVEC LA PALESTINE
La 34ème édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), prévues du 27 octobre au 4 novembre en Tunisie, va se tenir en ‘’solidarité avec la Palestine »
Dakar, 18 oct (APS) – La 34ème édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), prévues du 27 octobre au 4 novembre en Tunisie, va se tenir en ‘’solidarité avec la Palestine », a appris l’APS des organisateurs.
‘’Les Journées cinématographiques de Carthage tiendront leur session de 2023 en solidarité avec la Palestine et dans le respect des luttes d’un peuple qui subit meurtres et destructions et qui résiste pour reconquérir sa terre’’, écrit un communiqué des promoteurs reçus, mercredi, à l’APS.
Le texte parle notamment d’une ‘’annulation du côté festif du festival’’ et précise qu’il y aura un lancement direct de la 34ème session avec la projection des films de la compétition officielle.
A cet effet, les organisateurs annoncent que la session va se dérouler avec ‘’la ferme conviction que l’engagement des JCC en faveur d’une Palestine libre passe aussi à travers des projections de films, de débats et de rencontres’’.
‘’Plus que jamais, le cinéma, l’art et la culture restent parmi les moyens de résistance les plus habilités à s’opposer aux discours insidieux et perfides de nombreuses productions audiovisuelles », souligne la même source, notant que ‘’l’idée d’une Palestine libre a été au cœur des préoccupations des organisateurs ainsi que du public des JCC’’.
Les Journées cinématographiques de Carthage ont été pensées depuis leur création pour être ‘’une plateforme de réflexion et de résistance’’, estiment les initiateurs.
En faisant allusion aux JCC, le document parle ‘’d’un espace rassemblant des cinéphiles d’Afrique et du monde arabe, pour défendre l’art et la beauté face à la laideur des politiques répressives’’.
Elles constituent également un lieu pour « discuter des films et, à travers eux, des questions et problématiques mondiales et essentiellement la cause palestinienne », poursuit le communiqué.
‘’Grâce aux Journées cinématographiques de Carthage, une carte des films indépendants du continent et du Proche-Orient a été établie et des générations de cinéastes et de créateurs ont partagé leur croyance en des valeurs telles que la liberté de création, l’indépendance, la résistance et le refus des oppressions’’, peut-on lire dans le même document.
Le texte indique que les JCC ont toujours été ‘’l’un des plus importants espaces, et aussi un lieu de consécration pour les différentes expressions et la richesse du cinéma arabe engagé pour la cause palestinienne’’.
L’édition de cette année rend hommage au cinéaste palestinien, Hany Abu Assaad, souligne le communiqué qui évoque par ailleurs la longue participation des cinéastes de la Palestine, à l’image de Hani Jawharia, Borhan Alaouié, Rachid Masharawi, Mai Masri, Jean Chamoun, Michel Khleifi, Elia Suleiman, Najwa Najjar, Raed Andouni et Mohamed Bakri.
Le jury des films longs métrages et courts métrages documentaires sera présidé par la productrice tunisienne Dora Bouchoucha et celui des films fictions par le réalisateur tchadien Mahamat Saleh Haroun, rappelle la même source.
par l'éditorialiste de seneplus, alymana Bathily
KEHINDE WILEY : LA CHOQUANTE GLORIFICATION DU POUVOIR NÉOCOLONIAL AFRICAIN
EXCLUSIF SENEPLUS - Avec ces portraits de chefs d’État africains, il opère une rupture artistique par rapport à ses œuvres antérieures. L’hubris de ces dirigeants, leurs égos démesurés, rencontré ici la naïveté politique de l’artiste Africain-américain
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 16/10/2023
L’exposition du peintre Africain-Américain Kehinde Wiley ouverte le 26 septembre dernier au musée du Quai Branly à Paris intitulée « Dédale du pouvoir » ou « Maize of Power » est une glorification d’autocrates et de despotes africains.
Elle se compose de douze portraits de très grands formats de chefs d’Etat africains contemporains : Olusegun Obasanjo. (Nigeria), Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Paul Kagamé (Rwanda), Denis Sassou-Nguesso (République du Congo), Alpha Condé (Guinée), Faure Gnassingbé (Togo), Sahle-Work Zewde (Ethiopie), Macky Sall (Sénégal), Nana Akufo-Addo (Ghana), Félix Tshisekedi (RDC) et Hery Rajaonarimampianina (Madagascar).
Ces tableaux qui reprennent comme toute l’œuvre du peintre les canons de la portraiture aristocratique, royale et militaire européenne des 17e, 18e et 19e siècle, suggèrent par les pauses, les attributs exhibés et l’éclairage tantôt l’autorité calme, l’audace inspirée, la vision prophétique, la majesté et la grâce au pouvoir. Ils confèrent ainsi à ces chefs d’État africains les attributs qu’ils cherchent à s’octroyer habituellement par la force et par une propagande effrénée, avec la complicité de thuriféraires et de propagandistes rétribués par toutes sortes de rapines et de prébendes.
Pourtant, contrairement aux artistes européens classiques dont il s’inspire, Wiley n’est pas le peintre de cour de ces présidents africains. Ils ne l’ont ni payé ni récompensé.
C’est lui-même qui a initié le projet qu’il a réalisé selon ses propres canons et méthodes, en mettant en œuvre son imaginaire et ses fantasmes.
Ces portraits sont cependant en complet déphasage dans leur signification avec les œuvres antérieures du peintre.
Considérons son « Napoleon traversant les Alpes » de 2005, œuvre iconique, qui est une reconstruction détournée de « Bonaparte franchissant le Grand-Saint Bernard », portrait équestre de Napoleon Bonaparte de Jacques Louis David. La figure héroïque de Napoléon devient sous son pinceau celle d’un jeune Noir quelconque, nommé Williams, habillé en streetwear des ghettos américains : pantalon de treillis, boots Timberland et bandana.
Regardons son portrait du rappeur Ice T de 2005 représenté dans le cadre et la composition de « Napoléon 1er sur le trône impérial » de Jean Dominique Ingres.
Ces œuvres sont éminemment révolutionnaires : elles subvertissent la peinture occidentale classique et la détournent pour montrer et valoriser des personnages d’Africains-Américains ordinaires.
Wiley se préoccupait alors en effet de « placer des jeunes Noirs dans des situations de pouvoir, établie par des sources historiques …Le but de la peinture étant de s’en prendre à l’histoire de la création d’images, à l’histoire du pouvoir dans la création d’images et façonner un espace pour les gens qui qui n’occupent pas d’ordinaire cet espace… ».
Son portrait du président Barack Obama qui date de 2018, qui l’a consacré comme l’un des plus grands noms de la peinture contemporaine, est naturellement une représentation du Noir au pouvoir. Mais aucunement dans le mode hagiographique : ici aucune emphase, aucune référence à une grandeur surhumaine. Obama qui pose en tant que 44e président des Etats-Unis d’Amérique, est représenté assis sur une simple chaise, le buste légèrement penché en avant, les bras croisés sur les jambes, dans une pause naturelle. Seule touche excentrique, le fond touffu de fleurs de lys, de chrysanthèmes et de jasmins.
Obama avait en effet exigé de l’artiste qu’il soit représenté avec sobriété.
« Je lui expliqué », rappellera-t-il plus tard, « qu’il devait se retenir…que j’avais assez de problèmes politiques, pour qu’il me représente en Napoléon… »
Hubris et culturalisme
Avec ces portraits de chefs d’État africains, Kehinde Wiley opère une rupture artistique par rapport à ses œuvres antérieures, particulièrement par rapport à son portrait du président Obama.
Aucune subversion ici, aucun second degré, aucun détournement de sens révolutionnaire. C’est plutôt l’emphase dans la mise en scène et la glorification du sujet représenté.
C’est que l’hubris de ces chefs d’État, leurs égos démesurés, leur désir pathétique et souvent criminel de capturer et de représenter le pouvoir totalement et sans partage, ont rencontré ici la naïveté politique de l’artiste Africain-américain. Celui-ci est visiblement inspiré par le culturalisme nationaliste noir, cet avatar idéologique de la Négritude, selon lequel le Noir au pouvoir, c’est l’avènement du Black Power, l’apothéose de la lutte de libération Noire.
La Dédale du pouvoir, un faux-pas
De ce fait, au plan artistique, la Dédale du pouvoir représente un faux-pas dans l’œuvre de Kehinde Wiley.
Les grands artistes se fourvoient quelques fois en commettant des œuvres antithétiques par leur formes ou leurs sens à leurs réalisations antérieures et à leur crédo artistique.
Ceci n’enlève cependant rien à l’importance de cet artiste qui reste l’un des plus grands peintres contemporains, sans doute l’un des plasticiens Africains-américains les plus significatifs de l’histoire avec Jacob Laurence et Jean-Michel Basquiat.
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CE QUE L'ARGENTINE DOIT À L'AFRIQUE
En guise de reconnaissance de la contribution des peuples africains au développement de l'Argentine, ce pays offert la sculpture d'une résistante noire contre les colons espagnole, au Monument de la Renaissance africaine à Dakar
Directeur de la Biennale internationale de l'art contemporain du Sud (BIENALSUR) et recteur de l'université nationale de Tres de Febrero (UNTREF), Anibal Jozami était à Dakar pour l'ouverture de cette biennale qui se pose pour la première fois au Sénégal.
En marge de l'une des trois expositions au programme, en l'occurrence le projet «Musée abandonné » de Diego Bianchi, nous avons interviewé Anibal Jozami au Centre culturel espagnol de Dakar.
BIENAL SUR est très particulière sur bien des plans d’après son directeur parce qu’elle veut avant tout exprimer le droit à la culture énoncé par la déclaration universelle des Droits de l’Homme.
Par ailleurs, selon lui monsieur Jozami, les Argentins se sentent proches de l'Afrique et cherchent à bâtir les ponts entre Africains et Argentins. Il reconnaît que les Africains au cours du 19è siècle ont participé au développement de l'Argentine.
C'est d’ailleurs en reconnaissance de ce fait que l'Argentine a offert une sculpture d'une femme noire argentine qui a été une vaillante résistante en Argentine contre la colonisation espagnole et qui avait été capitaine de l'armée argentine. Il s'agit de Maria Remedios del Valle.
Le détail dans cette entrevue
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BIENALSUR À LA CONQUÊTE DE L'AFRIQUE
Pour la première fois, la Biennale internationale d'art contemporain du Sud (BienalSur) est venue au Sénégal avec une série de trois expositions dont le Musée abandonné qui tourne autour de la question de la pollution des océans avec du plastique.
Née il y a seulement 5 ans, au sein au sein de l’Universidad Nacional de Tres de Feberao, en Argentine, la Biennale internationale d’Art contemporain du Sud (Bienal Sur), gagne de plus en plus en popularité et va à la conquête du monde afin d'apporter la culture à tous en tan que droit.
Lors de sa première édition, BienalSur était au Bénin. Depuis quelques jours, elle est à nouveau sur le continent, notamment au Sénégal puis au Maghreb.
Au Sénégal les organisateurs propose une série de 3 expositions dont le projet de « Musée abandonné» basé au centre culturel espagnol, Instituto Cervantes Dakar.
De jeunes artistes africains ont contribué à proposer diverses créations sur la question de la pollution plastique autour de l’initiateur du projet, l’artistes argentin Diego Bianchi.
Vivez le reportage du vernissage avec les différents acteurs.
DE LA DOUBLE DOMINATION, COLONIALE ET CAPITALISTE
EXCLUSIF SENEPLUS - D'une part, persiste l'archaïsme colonial dans les mentalités. D'autre part, l'imaginaire capitaliste s'impose, avec son culte de l'argent, de la compétition et de l'individualisme. Patrick Chamoiseau : art, politique et engagement
Le célèbre écrivain martiniquais, Patrick Chamoiseau, est bien plus qu'un auteur renommé. Dans cette discussion, avec Barbara Jean-Elie dans "A coeur ouvert", il partage ses réflexions sur sa vie en tant qu'écrivain, travailleur social et figure politique. Tout en explorant le besoin de transcender l'angoisse existentielle par le biais de l'art, Chamoiseau évoque son engagement politique en faveur de la reconnaissance des peuples de la Caraïbe et des Amériques.
Sublimer l'angoisse existentielle par l'art
Pour Chamoiseau, le bonheur chez un être humain ne peut être un état permanent. Il considère le bonheur comme des instants précieux que l'on s'efforce d'agrandir autant que possible. Cependant, il estime que donner un sens à sa vie est tout aussi crucial. Pour lui, l'activité artistique et le fait d'être un créateur jouent un rôle essentiel dans la sublimation de l'angoisse existentielle qui accompagne chaque être humain.
Engagement politique et conscience élargie
Patrick Chamoiseau ne se limite pas à son rôle d'écrivain. Il a également été un travailleur social, s'occupant de jeunes en situation difficile. Cette expérience a contribué à développer une conscience élargie, l'amenant à explorer en profondeur l'histoire de la Martinique et les réalités anthropologiques des Caraïbes. Cette acuité l'a conduit à s'engager politiquement, bien qu'il précise qu'il est un intellectuel politique et non un politicien.
La reconnaissance des peuples de la Caraïbe et des Amériques
Chamoiseau souligne l'importance de la reconnaissance des peuples de la Caraïbe et des Amériques, des nations uniques et inédites. Son travail est à la fois une préoccupation esthétique, éthique et politique, dans laquelle l'idée politique est intrinsèquement liée à l'éthique et à l'esthétique.
Les manifestes et le projet global
L'auteur du roman primé au Goncourt 1992 « Texaco » a publié plusieurs ouvrages majeurs avec une dimension politique importante dont "Écrire en pays dominé" et "L'éloge de la créolité". Il a également été journaliste, tenant une rubrique culturelle intitulée "Une semaine en pays dominé". Cette préoccupation politique découle de sa prise de conscience précoce de la richesse esthétique des réalités anthropologiques complexes et nouvelles qui n'étaient pas encore reconnues politiquement.
"Faire Pays" : Une dimension éminemment politique
En 2000, le Parti Communiste Martiniquais a publié le "Manifeste pour un projet global", signé par Gérard Delvert, Édouard Glissant, Bertène Juminer et Patrick Chamoiseau. Ce manifeste visait déjà à refonder les outre-mer. Chamoiseau revient sur ce même concept dans son dernier texte, "Faire Pays", soulignant la nécessité de trouver de nouveaux concepts pour résister à la nouvelle réalité de l'outre-mer.
Chamoiseau conclut en expliquant que le monde a considérablement évolué depuis l’an 2000. Aujourd'hui, il estime que la meilleure manière d'être utile à son pays est d'alimenter le débat politique avec des idées basées sur l'imaginaire de la relation, mettant en lumière l'interdépendance entre les cultures et les civilisations. Pour lui, une déclaration pertinente ne serait pas une déclaration d'indépendance, mais plutôt une déclaration d'interdépendance.
Responsabilisation pour sortir de la domination
Patrick Chamoiseau analyse la complexité de la situation actuelle, caractérisée par une double domination. D'une part, persiste l'archaïsme colonial dans les mentalités des territoires d'Outre-mer. D'autre part, l'imaginaire capitaliste s'impose, avec son culte de l'argent, de la compétition et de l'individualisme. Cette combinaison postcoloniale ou néocoloniale associée au capitalisme crée, selon Chamoiseau, une situation qu'il qualifie de "monstre d'Outre-mer".
Pour sortir de cette situation, Chamoiseau plaide en faveur de la responsabilisation. Il fait l'éloge de la responsabilité, expliquant qu'il s'agit de donner aux peuples d'Outre-mer un pouvoir de décision sur les grandes réformes qui affectent leur vie. Depuis 1946, les décisions importantes échappent en grande partie à ces territoires, ce qui a engendré des illusions successives. D'abord, l'illusion de l'assimilation, puis celle de la décentralisation. Enfin, une illusion plus récente, qui consiste à placer les territoires d'Outre-mer dans un cadre de déresponsabilisation collective, avec la possibilité de réclamer des habilitations et des compétences.
L'Appel de Fort-de-France : Une étape cruciale
L'Appel de Fort-de-France est pour Chamoiseau un événement politique majeur. Il marque la fin de l'illusion de la responsabilité en tant qu'option. Plusieurs grands responsables politiques et élus s'unissent dans une unanimité rare pour réclamer davantage de pouvoir et de responsabilisation. Cette unanimité souligne l'urgence de la situation et la nécessité de comprendre pourquoi les réformes précédentes n'ont pas abouti.
Chamoiseau estime que la proposition de "Faire Pays" repose sur l'idée que les peuples d'Outre-mer sont des nations avec une histoire, une culture, une identité, et un désir profond de décider de leur propre destin. Cette prise de conscience de la durée historique et de la conscience identitaire est ce qui, selon lui, peut être le moteur du changement. Il conclut en insistant sur la nécessité de comprendre cette dynamique pour espérer dépasser les obstacles systémiques qui persistent depuis des décennies.
Vers la reconnaissance des peuples sans État
Patrick Chamoiseau évoque un changement d'approche par rapport à l'imaginaire des années 50, où la conscience nationale était souvent associée à la revendication d'un État souverain, avec ses frontières et ses symboles nationaux. Dans le monde contemporain, marqué par l'interdépendance, Chamoiseau reconnaît que l'idée de drapeaux nationaux peut persister, même dans un cadre d'interdépendance. En tant qu'indépendantiste, il exprime le désir de voir le drapeau de la Martinique reconnu.
Cependant, Chamoiseau propose une catégorie juridique alternative : celle de "pays". Il estime que la reconnaissance des peuples en tant que nations peut se faire sans nécessairement aboutir à la création immédiate d'États souverains. Il souligne que de nombreux peuples dans le monde vivent sans État souverain et participent à l'intelligence collective mondiale. Il cite l'exemple des Kanaks et d'autres peuples qui ont conservé une vision atavique, inspirée des années 50.
La spécificité des peuples d'Outre-mer réside dans leur composition complexe, résultant de la colonisation et de l'immigration. Cette diversité rend leur situation unique. Dans le monde interdépendant d'aujourd'hui, Chamoiseau estime que les peuples puissants sont ceux qui peuvent mobiliser toutes leurs ressources géographiques, historiques, et culturelles. Cela nécessite une responsabilisation collective et le développement de systèmes relationnels pour tirer parti de ces sources diverses.
Chamoiseau insiste sur l'importance de la responsabilisation collective, qui permettra aux peuples d'Outre-mer de développer leur intelligence collective et de mobiliser leurs ressources pour s'épanouir dans ce nouveau contexte mondial d'interdépendance.
Repenser la Constitution et la République
Patrick Chamoiseau souligne que la constitution française, datant de l'après-guerre, est obsolète dans un monde de plus en plus interconnecté. Il critique la vision verticale de la République française, basée sur l'indivisibilité et l'unité linguistique, et propose une vision plus ouverte. Pour lui, il est envisageable d'avoir une République unique qui rassemble des pays et des peuples différents, fondée sur un pacte démocratique et républicain. Il insiste sur la nécessité de repenser ces notions pour l'avenir.
Responsabilité collective
Chamoiseau met en avant la responsabilité collective comme un élément essentiel pour sortir de la situation actuelle. Il estime que les peuples d'Outre-mer ont la responsabilité de conquérir davantage de compétences, d'habilitations et de pouvoir collectif. Cette responsabilisation doit les pousser à faire un bilan des grands défis qui se posent à eux et à voir s'ils sont véritablement responsables.
Méthode pour la responsabilisation collective
Pour Chamoiseau, la méthode pour parvenir à la responsabilisation collective consiste à soutenir toutes les demandes politiques dans le cadre juridique existant, en récupérant toutes les habilitations et compétences disponibles. Il s'agit d'obtenir un socle solide de pouvoirs. Cependant, il reconnaît que depuis 50 ans, cela n'a pas suffi, et il insiste sur le caractère systémique du problème.
Charte de pays et vision d'avenir
Chamoiseau propose de se battre pour que les Martiniquais puissent définir ce qu'il appelle le "pays Martinique" en élaborant une charte de pays. Cette charte permettrait de visualiser le pays que les générations futures souhaitent avoir dans les 15 à 20 ans à venir. Il estime que cela nécessite une responsabilisation collective optimale obtenue par les habilitations, tout en maintenant l'idée d'indépendance et d'une perspective nationaliste.
Il appelle à remettre en marche une pensée politique qui permette de sortir de l'impasse actuelle et de créer un avenir plus prometteur pour les peuples d'Outre-mer.
Hommage à Édouard Glissant et appel à l'action collective
En conclusion, Patrick Chamoiseau souhaite rendre hommage à Édouard Glissant, dont l'influence a été déterminante dans sa propre réflexion esthétique et politique. La notion centrale de "relation" qu'il a puisée chez Glissant a profondément marqué son travail, tant sur le plan esthétique que politique. Il invite tous les responsables culturels, politiques et ceux qui cherchent à comprendre la réalité complexe de la Caraïbe, des Amériques et du monde contemporain à lire l'œuvre de Glissant, particulièrement "La Poétique de la Relation". Pour Chamoiseau, cette notion de relation reflète la dynamique du monde contemporain, que nous devons affronter pour construire un avenir meilleur.
Chamoiseau conclut en exprimant son espoir que, dans les années à venir, avant que les catastrophes liées à la transition climatique ne nous affectent irrémédiablement, il y aura un véritable élan de responsabilisation collective. Il appelle à sortir des contraintes politiciennes pour repenser notre monde et mettre en place une politique culturelle qui projette notre pays dans le contexte mondial. Pour lui, il est urgent de faire progresser cette vision avant que les défis climatiques ne deviennent insurmontables.
MAMADOU DIOUF PUBLIE L’AFRIQUE DANS LE TEMPS DU MONDE
L'intellectuel et historien sénégalais offre une réflexion approfondie sur l'histoire de l'Afrique et de la diaspora noire, mettant en lumière les conséquences de la colonisation et la résilience des communautés africaines face à cette tragédie
Dans son dernier ouvrage intitulé « L’Afrique dans le temps du monde », l'intellectuel et historien sénégalais Mamadou Diouf offre une réflexion approfondie sur l'histoire de l'Afrique et de la diaspora noire, mettant en lumière les conséquences de la colonisation et la résilience des communautés africaines face à cette expérience traumatisante.
Le livre explore les dynamiques complexes de la colonisation de l'Afrique par les puissances européennes, en soulignant le rôle de l'idéologie de la hiérarchie raciale dans ce processus. Diouf met en évidence comment cette idéologie a été utilisée pour déposséder les communautés africaines de leurs cultures, les reléguant ainsi à la périphérie de l'histoire et les privant de leur place légitime dans le temps du monde.
Face à cette expropriation et à ce bannissement, l'Afrique et la diaspora noire ont réagi en produisant des contre-récits qui remettent en question la prétendue mission civilisatrice de l'Occident. L'auteur explore comment l'histoire africaine et noire a puisé dans les narrations orales et les cultures matérielles dédaignées pour revitaliser l'identité africaine et reconstruire un récit universel débarrassé de l'impérialisme occidental.
Mamadou Diouf, qui enseigne l'histoire et les études africaines à l'université Columbia de New York, est un spécialiste renommé de la colonisation africaine et des sociétés subsahariennes. Avec une œuvre historiographique abondante à son actif, dont des ouvrages tels que « Le Kajoor au XIXe siècle » et « Histoire du Sénégal », il apporte une perspective unique sur l'histoire africaine et les enjeux qui lui sont associés.
En tant que co-directeur des ouvrages « Déborder la négritude » et « Afrika N'ko : la bibliothèque coloniale en débat », Diouf a déjà contribué à la réflexion sur la déconstruction des paradigmes coloniaux et à la valorisation des voix africaines dans le discours académique.
Né à Rufisque, au Sénégal, Mamadou Diouf puise dans son expérience personnelle et académique pour livrer une analyse nuancée et approfondie de la condition africaine et de la diaspora noire. Son livre « L’Afrique dans le temps du monde » offre une contribution précieuse à la compréhension de l'histoire africaine et à la reconstruction d'un récit universel plus inclusif et équilibré.
En mettant en lumière les complexités de l'histoire africaine et en soulignant le rôle central de l'Afrique et de la diaspora noire dans la construction d'un récit universel, Mamadou Diouf invite les lecteurs à repenser les paradigmes coloniaux et à reconnaître la richesse et la diversité des cultures africaines. Son travail contribue à la valorisation des voix africaines et à la réaffirmation de l'importance de l'Afrique dans le concert des nations.
« L’Afrique dans le temps du monde » est un ouvrage incontournable pour tous ceux qui s'intéressent à l'histoire de l'Afrique, à la déconstruction des récits coloniaux et à la recherche d'un avenir plus juste et égalitaire pour le continent africain et ses diasporas à travers le monde.
À l’occasion de la sortie de "L’Afrique dans le temps du monde", Mamadou Diouf sera en France du 13 au 22 octobre pour une série de présentations étincelantes…
Vendredi 13 octobre, 19h00
En avant-première à la sortie de son livre, Mamadou Diouf sera en dialogue avec Nadia Yala Kisukidi à la Maison des Relations Internationales, 14, rue Descente en Barrat, Montpellier, une rencontre animée par Salim Mokaddem, dans le cadre de la Biennale Euro-Africa.
Jeudi 19 octobre, 19h30
Lancement de "L’Afrique dans la temps du monde" à la librairie Petite Égypte, 25, rue des Petits Carreaux, Paris. Une rencontre animée par Alexis Argyroglo.
Samedi 21 octobre, 15h30
Mamadou Diouf présente "L’Afrique dans la temps du monde", à la Gaîté Lyrique, 3 bis, rue Papin, Paris. Une rencontre animée par Jean-Marie Durand, dans le cadre du festival Et maintenant ?
Dimanche 22 octobre, 13h30
Mamadou Diouf présente "L’Afrique dans la temps du monde", au Carreau du Temple 4, rue Eugène Spuller, Paris. Une rencontre animée par Valérie Nivelon, dans le cadre de la foire AKAA.