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24 novembre 2024
Culture
DÉBAT SUR LE FUTUR DU FRANÇAIS AU MALI, UN PAYS QUI COMPTE 70 LANGUES
Quelques lignes dans un projet de Constitution ont relancé un vieux débat au Mali: le français, langue des colons désormais partis, doit-il rester la seule langue officielle d'un pays qui en compte des dizaines ?
L'opportunité d'étendre ce statut à certains des nombreux idiomes davantage utilisés au quotidien que celui de l'ancien colonisateur resurgit cycliquement depuis que le Mali, vaste mosaïque de groupes humains, a accédé à l'indépendance en 1960.
La question s'est reposée avec la présentation en octobre d'un texte qui pourrait devenir la nouvelle Constitution du pays.
Les langues n'occupent qu'un des 195 articles de ce document présenté par la junte militaire au pouvoir comme une des réformes cruciales pour sauver le pays confronté à la propagation jihadiste et à une multitude de crises. Mais cet article a ranimé une ancienne discussion sur les plateaux télé et au "grin", forum informel où les Maliens échangent sur tout autour d'un thé.
"Est-ce normal que, 60 ans après l'indépendance, le français soit notre seule langue officielle ?", demande un Bamakois, Ali Guindo, devant sa résidence du quartier Torokorobougou de Bamako. "On a beaucoup de langues ici au Mali, ce serait bien de les ancrer dans notre culture officielle".
Plus de 70 langues sont parlées au Mali, 13 ont été reconnues langues nationales, et une seule, exogène, le français, est officielle, rappelle Amadou Salifou Guindo, spécialiste de sociolinguistique. Le français est utilisé dans l'administration, sur les panneaux de circulation, à la télévision d'Etat, mais très peu dans la rue à Bamako, et encore moins en brousse.
Les langues vernaculaires, parlées par des millions de personnes pour certaines, lient des communautés enracinées dans leurs territoires: le sonrhaï et le tamashek dans le nord, le fulfulde (peul) au centre, le bamanankan (bambara) dans le sud et à Bamako, le senoufo et le soninké encore plus au sud...
Question identitaire
Les rédacteurs de l'avant-projet constitutionnel proposent de rehausser leur rang. Comme dans la Constitution de 1992, "le français est la langue d’expression officielle", stipule l'article 31. Mais les langues locales "ont vocation à devenir des langues officielles".
Le débat ravivé "montre que les Maliens souhaitent que les langues maliennes occupent une plus grande place dans la sphère publique", assure le linguiste Guindo. Le français est un héritage colonial comme dans une grande partie de l'Afrique de l'Ouest, où des populations très jeunes remettent en question la relation avec la France.
Sur fond de ruptures abruptes avec l'ancienne puissance dominante depuis l'avènement des militaires, un certain nombre de voix se sont emparées de l'article 31 pour réclamer d'en finir avec le français et faire par exemple du bamanankan, le plus usité, la langue officielle. Mais plus que le souverainisme en vogue, le débat pince une corde identitaire sensible.
Le Mali a déjà essayé de faire des langues locales les principales langues d'enseignement à l'école sous le régime autoritaire de Moussa Traoré (1968-1991). Patatras: faute d'investissements de l'Etat, ces écoles expérimentales sont devenues des "écoles de seconde catégorie" aux yeux des parents et des enseignants, déplore Ismaïla Samba Traoré, écrivain et éditeur. Il se demande comment on a pu "faire le choix aussi révolutionnaire que de faire entrer les langues nationales à l'école et ne pas mettre les moyens qu'il faut".
Sujet de crispation
Les langues vernaculaires restent enseignées, à petite échelle. A la faculté des langues de Bamako, Mahamadou Kounta, directeur des études, donne des cours de bamanankan à une vingtaine d'étudiants."Quand nos étudiants sortiront, ils sauront écrire et lire les langues nationales, ils pourront à leur tour travailler à les perpétuer", assure-t-il.
Dans son bureau des éditions La Sahélienne, Ismaïla Traoré y croit lui aussi. Depuis 1992, il est un des seuls à éditer des livres en langue locale.
Nombre de livres en langue vernaculaire restent des ouvrages pédagogiques commandés par des ONG internationales. La littérature malienne demeure élitiste. Et l'éditeur admet qu'il ne suffira pas d'une nouvelle législation pour changer les usages: "Certains processus ne se définissent pas à coup d'humeur, il faut laisser l'incubation se faire".
Comme depuis que le débat a cours, les mêmes interrogations sont fourbies sur la praticabilité d'employer dans les administrations ou les tribunaux des langues plus orales qu'écrites, ou sur la capacité de l'Etat à réformer un système éducatif délabré. Et la question des sensibilités communautaires demeure.
Certes, les auteurs de l'avant-projet constitutionnel ont adopté une "formulation dynamique" pour, souligne l'un d'eux sous couvert de l'anonymat, "éviter toute forme de crispation".
Mais le sociolinguiste Guindo laisse entendre que tous ceux qui parlent le fulfulde par exemple ne sont pas forcément prêts à voir officialiser le seul bamanankan de l'élite bamakoise. Le débat "montre que les Maliens ont peur qu'une langue officielle soit imposée au détriment des autres", met-il en garde.
LA REVOLUTION TORODO A L’ECRAN
Après «Kaw Cheikh le patriarche», un film documentaire sur l’auteur de «L’Aventure ambiguë», Cheikh Hamidou Kane, le réalisateur sénégalais, Moe Sow, a lancé jeudi dernier, le clap de départ du film «1776 : Ceerno Sileymaan Baal».
Après «Kaw Cheikh le patriarche», un film documentaire sur l’auteur de «L’Aventure ambiguë», Cheikh Hamidou Kane, le réalisateur sénégalais, Moe Sow, a lancé jeudi dernier, le clap de départ du film «1776 : Ceerno Sileymaan Baal». En réalisant ce docufiction, Moe Sow veut restituer l’histoire du Sénégal d’une manière qui enchante les jeunes.
Moe Sow, qui a déjà produit un film sur Cheikh Hamidou Kane et un autre sur le mythique groupe de musique sénégalais Xalam, va sortir un docufiction basé sur le personnage de Ceerno Sileymaan Baal. 1776 : Ceerno Syleymaan Baal, produit par l’Association Ceerno Sileymane Baal et les Produc-tions Suba, avec l’aide du Fopica, qui a financé ce film, d’après Moe Sow, à hauteur de 80 millions de francs Cfa, soit 60% du budget, est en cours de tournage. «C’est un documentaire de fiction. Si vous avez remarqué, on le fait sur un fond vert et cela veut dire qu’il y a quelque chose derrière. On veut vraiment restituer l’histoire d’une manière qui enchante les jeunes», a déclaré le réalisateur lors du clap de lancement du film au Grand Théâtre Doudou Ndiaye Coum-ba Rose. Le film est basé sur le personnage de Cernoo Siley-maan Baal, connu également pour avoir mené la Révolution torodo de 1776. Alors, en parallèle avec Alexander Hamilton, qui a théorisé la révolution américaine, Ceerno Sileymaan Baal a fait la même chose pour la révolution torodo. Surnommé le Briseur du mouddo horma (paiement d’une dime aux Maures), Ceerno Sileymaan Baal est décrit comme un homme pieux, intègre, humble et dont l’action a permis d’instaurer au Fouta, une institution solide reposant sur l’imamat. Grand intellectuel et homme d’éthique, il a combattu dans le Fouta, la corruption, l’impunité, l’enrichissement illicite et la dévolution monarchique du pouvoir, pour asseoir l’audit, la transparence, la déclaration de patrimoine, la reddition des comptes, la compétence, l’efficacité. «Ceerno Sileymaan Baal a combattu et instauré un Etat démocratique», a expliqué M. Sow pour justifier son choix de faire un film sur lui.
Mais pour incarner Ceerno Sileymaan Baal, le réalisateur a choisi un acteur anglais du nom de Oris Erhuero. «C’est quelqu’un qui a joué aujourd’hui à peu près dans une cinquantaine de films. On a besoin d’apprendre de ces gens-là. Nos acteurs sont encore jeunes, ils n’ont pas encore cette expérience. Et c’est bien qu’on les mette ensemble pour qu’ils puissent apprendre», a soutenu Moe Sow, qui précise qu’après ce tournage au Grand Théâtre, d’autres décors sont prévus au Fouta et à Lompoul. «Et la post-production va se faire au Maroc et en Roumanie», informe-t-il, tout en annonçant que le film sera peut-être diffusé en février-mars 2023.
Reconstituer l’histoire du pays
Moe Sow, en réalisant ce docufiction, veut faire partie de cette mouvance qui veut recréer l’histoire du Sénégal. «Mon combat, c’est de reconstituer l’histoire du pays. Je dois vraiment rendre mon pays, mon continent, aussi attrayant que Hollywood a rendu les Etats-Unis ou que les Français, les Anglais ont rendu leur pays. Le cinéma, c’est un outil de marketing incroyable. Et il faudra qu’on apprenne à s’y mettre et qu’on l’utilise pour nous-mêmes», fait savoir le cinéaste sénégalais. Revenu au Sénégal en 2014, Moe Sow a voulu reconstruire ce pan du patrimoine historique du Sénégal. «J’ai voulu vraiment constituer un hub culturel pour que les jeunes puissent en bénéficier et je sais qu’aujourd’hui, on en forme pas mal», a indiqué celui qui dit avoir travaillé des années à l’Institut supérieur des arts et métiers du numérique (Sup’Imax).
Pr Aliou Sow, ministre de la Culture et du patrimoine : «Ce film devait exister depuis des décennies»
En venant découvrir ce film sur Ceerno Sileymaan Baal, le ministre de la Culture et du patrimoine historique, Aliou Sow, explique : «Je suis à la fois joyeux, content et malheureux. Malheureux parce que cela devait exister depuis des décennies. Mais heureusement qu’il y a des compatriotes qui nous donnent l’occasion de rattraper, de rectifier.» Et il poursuit : «Ceerno Sileymaan Baal, aujourd’hui, devrait être le parrain des réalisations extrêmement importantes de l’Afrique, je ne parle pas du Sénégal. Cette belle initiative fait honneur à celle qui célèbre aujourd’hui la République en redorant son blason à travers une telle démarche qui nous permettra de retrouver une fierté bafouée, salie ou raturée. Et cela montre que le cinéma au Sénégal et l’audiovisuel méritent tous les égards, traitements, marques d’attention et tous les investissements.» Pour le ministre de la Culture et du patrimoine historique, il est temps que les gens cessent de dire que le cinéma est cher. «Que les gens commencent par dire que l’histoire n’a pas de prix. La valeur d’une Nation dépend de son patrimoine historique, de ses faits du passé, de son identité. Et nous sommes en train de réorganiser notre identité sur la base de la vérité et en extirpant toutes les altérations, manipulations, désorientations de la réalité», a défendu Aliou Sow.
JOURNÉE INTERNATIONALE DE L'ÉCRIVAIN AFRICAIN, UN SUCCES ECLATANT
Le siège de l’Association des écrivains du Sénégal (AES) « Keur Birago » a encore refusé du monde à l’occasion de la 30ème édition de la Journée Internationale de l’Ecrivain Africain (JIEA) qui s’est déroulée du 07 au 11 novembre 2022.
Compte-rendu de El Hadj SOW |
Publication 17/11/2022
Le siège de l’Association des écrivains du Sénégal (AES) « Keur Birago » a encore refusé du monde à l’occasion de la 30ème édition de la Journée Internationale de l’Ecrivain Africain (JIEA) qui s’est déroulée du 07 au 11 novembre 2022.
Présidée par le tout nouveau ministre de la Culture et du Patrimoine Historique, M. Aliou SOW, la séance d’ouverture s’est déroulée en présence du Parrain, son Excellence Monsieur Maurice Kouakou BANDAMAN, des Ambassadeurs de Côte d’Ivoire au Sénégal, Son Excellence le Général de Brigade de Corps d’Armée Sékou TOURE, et de la République Islamique de Mauritanie. Cette dernière, en tant que pays invité d’honneur de cette édition, i était représentée par une dizaine d’écrivains.
« Keur Birago » a fait le plein cinq jours durant avec la présence des écrivains de l’AES, des artistes comédiens, des anciennes gloires du football, des sportifs d’autres disciplines, de musiciens etc.
Dans son discours de bienvenue, le président de l’Association des Ecrivains du Sénégal, M. Alioune Badara BEYE, a remercié chaleureusement le ministre de la Culture et du Patrimoine Historique, à propos duquel il a dit que c’est un intellectuel de haut niveau qui a vitre compris les missions de la culture par une présence assidue, une écoute attentive et surtout par une grande considération envers les acteurs culturels.
En peu de temps, a souligné l’éminent dramaturge, la communauté artistique et littéraire a été conquise par les qualités humaines et intellectuelles de ce professeur des Universités qui collectionne des distinctions et des diplômes, mais surtout humble et attentif à tous les problèmes des acteurs culturels.
Le président de l’AES a d’ailleurs annoncé la cooptation du ministre Aliou SOW comme membre honoraire de l’Association à cause de sa riche production et des nombreuses sollicitations dont il fait l’objet de la part de multiples universités dans le monde. Alioune Badara Bèye a ensuite salué le Parrain, l’écrivain Maurice Kouakou BANDAMAN, ancien président de Union des Ecrivains de Côte d’Ivoire, ancien ministre de la Culture et de la Communication et ancien Grand Prix Littéraire de l’Afrique Noire en 1993, actuellement Ambassadeur de Côte d’Ivoire en France.
Un Parrain dont le choix a fait l’unanimité tellement son cursus est exemplaire car fait de succès, de hauts faits et de reconnaissances. L’Ambassadeur de Côte d’Ivoire au Sénégal, le Général TOURE Sékou, a été salué pour sa proximité avec les écrivains et sa disponibilité.
Toujours au chapitre des salutations, M. BEYE a rendu hommage aux écrivains africains, particulièrement ceux du pays invité d’honneur, la République islamique de Mauritanie, mais aussi ceux du Togo, du Mali, de la Guinée Conakry, du Congo Brazzaville, du Gabon, de la Guinée Bissau, de Gambie, de la Tunisie, de la Côte d’Ivoire et de la diaspora tous représentés à cette Journée internationale de l’Ecrivain africain.
Bien évidemment, la palme des remerciements est allée au Président de la République du Sénégal, Son Excellence Monsieur Macky SALL, premier protecteur des Arts et des Lettres, pour son appui constant aux activités de l’AES et particulièrement à la Journée Internationale de l’Ecrivain Africain.
Alioune Badara Bèye a rappelé qu’en 2006, déjà, alors Premier ministre, Macky Sall disait sur cette même tribune où il s’exprimait : « Jamais je ne laisserai tomber le toit de « Keur Birago ». Ce conteur mythique nous a laissé des vers inoubliables, incrustés dans les consciences des peuples d’Afrique ».
Ce fut ensuite au tour du Président du PEN Sénégal, le colonel Moumar GUEYE, de s’exprimer en mettant l’accent sur l’importance de préserver les secrets d’Etat et en fustigeant les anti-valeurs. Après quoi, il a beaucoup insisté sur le choix du thème : « Littérature et citoyenneté » avant de rappeler les mission du PEN dont il dirige la section du Sénégal.
Après le colonel Moumar Guèye, Mme Pulchérie, présidente de l’Union des Ecrivains de Gabon, a pris la parole au nom des écrivains africains. Elle aussi n’a pas manqué de remercier vivement le Chef de l’Etat sénégalais connu pour son appui constant aux écrivains sénégalais. Quant au représentant des écrivains de la République Islamique de Mauritanie, pays Invité d’honneur, il a beaucoup insisté sur les relations historiques, culturelles et séculaires qui lient les deux pays c’est-à-dire le Sénégal et la Mauritanie.
Arriva le tour du parrain, son Excellence Monsieur Maurice Kouakou BANDAMAN, qui a lui aussi retracé les relations historiques et culturelles entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal, entre les deux gouvernements et les deux Présidents Son Excellence Macky SALL et Son Excellence Alassane OUATARA. Il a salué vivement le Ministre Aliou SOW mais aussi le dramaturge Alioune Badara BEYE qu’il a qualifié de monument de la littérature africaine et surtout de grand frère très respecté en Afrique.
Il remercia la délégation ivoirienne qui a quitté Paris et Abidjan pour assister à cet hommage. Le temps fort de la cérémonie d’ouverture fut la remise des distinctions par le ministre Aliou SOW. Des distinctions qui se sont établies ainsi qu’il suit :
Prix David DIOP de la Poésie
M. Papa Ibnou SARR (Sénégal)
Prix SEMBENE Ousmane du Roman
Mme Aisha JAWARA (Gambie)
Prix Aminata Maïga KA de la Nouvelle
Dr Maguèye TOURE (Sénégal)
Prix Amadou Cissé DIA du Théâtre
M. Marouba FALL (Sénégal)
Prix Magib SENE du Journalisme culturel
M. Alassane CISSE (Sénégal)
Prix Pr Hamidou DIA d’Encouragement jeunes talents
M. Assane Marc NGOM (Sénégal)
Prix de Reconnaissance pour sa fidélité et sa constance à l’Association des Ecrivains du Sénégal
Mme Mariama NDIAYE (Sénégal)
Prix Ahmadou Hampaté BA de Reconnaissance pour l’ensemble de ses œuvres
S.E.M. Maurice Kouakou BANDAMAN (Côte d’Ivoire)
Distinction de Reconnaissance pour le rôle joué par le CAFED pour services rendus à l’édition africaine francophone
Mme Raoudha BEDIRI Ep NAJI Raoudha (Tunisie)
Prix de Reconnaissance de l’Association des Ecrivains du Sénégal
Mme Khady Cheikhna Mohamed (Mauritanie)
Prix d’honneur pour son talent et la richesse de sa production
Seydi SOW (Sénégal)
Distinction de Reconnaissance de l’Association des Ecrivains du Sénégal pour Bon voisinage
M. Aimé SENE (Sénégal)
Distinction du Parrain de la 30ème édition de la Journée Internationale de l’Ecrivain Africain
S.E.M. Maurice Kouakou BANDAMAN (Côte d’Ivoire)
Très Haute Distinction A S.E.M. Mohamed Ould EL-GHAZOUANI Président de la République Islamique de Mauritanie pour ses relations fraternelles avec le Sénégal
Très Haute Distinction A S.E.M. Macky SALL, Président de la République du Sénégal pour son soutien constant à l’Association des Ecrivains du Sénégal (AES) Diplôme d’Honneur et de Reconnaissance
A Monsieur Aliou SOW, Ministre de la Culture et du Patrimoine historique du Sénégal, pour avoir présidé la 30ème Edition de la Journée Internationale de l’Ecrivain Africain et avoir soutenu l’AES Le jury était présidé par le professeur Djibril Diallo Falémé.
En dehors de son prix pour l’ensemble de son œuvre, Son Excellence l’Ambassadeur Maurice Kouakou BANDAMAN a reçu la distinction d’honneur du Parrain de la 30ème édition de la JIEA. Le Ministre Aliou SOW a eu droit pour sa part à une distinction offerte par l’AES composée d’un Diplôme et d’un lot de livres issus du Prix de 5 continents organisé par l’OIF.
L’AES est la seule Association africaine membre du dit Comité. Les deux Présidents de la République Son Excellence M. Mohamed Ould EL-GHAZOUANI et Son Excellence M. Macky SALL ont reçu des trophées de luxe et des diplômes de Reconnaissance pour services rendus aux lettres mauritaniennes et sénégalaises. Le clou de la cérémonie fut le discours du Ministre Aliou SOW qui a démontré une nouvelle fois sa parfaite maitrise de la langue de Molière et du département qui lui est confié. Un discours dans lequel il a annoncé non seulement l’augmentation des indemnités des Lauréats par le Président de la République mais aussi l’institution de trois nouvelles distinctions qui seront attribuées pour la première fois lors du FESNAC qui se tiendra en janvier à Kaffrine.
- Prix Alioune Badara BEYE de la polyvalence et de la persévérance d’un montant de 10 millions
- Prix Abdoulaye Elimane KANE de la diversité culturelle d’un montant de 10 millions
- Prix Ousmane DIAKHATE pour le Théâtre Universitaire d’un montant de 05 millions.
- Le ministre Aliou Sow a remercié vivement le président de la République pour son attachement à la culture.
Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, il a promis d’augmenter toutes les subventions de l’AES et du PEN Sénégal, du Cinéma, des peintres, du théâtre, et toutes les activités culturelles de notre pays.
A la fin de la cérémonie, le ministre Aliou Sow a eu du mal à quitter les lieux tellement l’animation assurée par la troupe Mame Ndiaré de Yoff et d’autres artistes de talent a été rythmée et entraînante. Cerise sur le gâteau, il a offert le même soir un diner aux écrivains africains présents dans notre capitale à l’occasion de cette édition 2022 de la Journée internationale de l’Ecrivain africain. C’était au Lagon 2.
Le lendemain, le ministre de la Culture a remit leur argent aux écrivains étrangers lauréats des différents prix. Les nationaux sont programmés pour cette semaine. Les participants du colloque ont eu droit à un cours magistral du professeur Penda MBOW. Un véritable régal intellectuel !
Les motions de remerciements et la déclaration de Dakar ont clôturé cette rencontre internationale de très haute facture. Les premiers pas du nouveau Ministre de la Culture et du Patrimoine Historique sont tout simplement rassurants et encourageants : - d’abord les 50 ans de présence culturelle de Alioune Badara BEYE au Grand Théâtre (sa première sortie officielle) - la 30ème édition de la Journée Internationale de l’Ecrivain Africain.
Compte-rendu de El Hadj SOW
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MORT DE JEAN-PHILIPPE OMOTUNDÉ KALALA
L'enseignant- chercheur est décédé en Guadeloupe le 13 novembre à la suite d'un accident vasculaire cérébral. Les hommages affluent de l'Afrique et des Antilles
Né Jean-Philippe Corvo, il est diplômé de l'École de publicité de Paris 1. Chercheur en histoire, spécialiste des sciences et mathématiques africaines et des humanités classiques africaines, il était également enseignant à l'institut Africamaat de Paris et chargé de mission auprès de l'Unesco.
Il a rejeté son prénom occidental pour affirmer ses racines africaines, en choisissant de se faire appeler Nioussérê Kalala Omotunde. Nioussérê d'origine égyptienne, comme le berceau du savoir selon ses thèses, et Kalala, comme l'organe traditionnel de résolution de problèmes du Congo.
Fervant partisan de la mise en valeur des cultures africaines, il a poussé ses travaux de recherches sur les civilisations du continent noir.
Il animait la rubrique Focus sur la chaîne tv Canal 10.
Il a fait une apparition dans un évènement de l'UNESCO intitulé « La semaine africaine » , le 22 mai 2017, sur le thème « Investir dans la jeunesse africaine par le biais des mathématiques ».
Des hommages du monde entier
Jean-Philippe Kalala Omotunde venait régulièrement en Martinique animer des conférences. Il était très connu et très apprécié pour ses travaux et ses analyses de la société.
La nouvelle de sa mort a vite fait le tour de la toile et de nombreux hommages de personnalités africaines et antillaises ont salué sa mémoire sur les réseaux sociaux
LES BOUFFÉES MYSTIQUES DU THIOURAYE
Élément important de l’arsenal de séduction de la femme sénégalaise, l’encens assure d’autres fonctions dans bien des espaces de vie
Des maux de tête et des crises ! C’est le calvaire de Ramatoulaye Niang, depuis des lustres. Elle est élève en classe de première S au lycée Seydina Limamoulaye de Guédiawaye. La jeune fille vit avec cette souffrance depuis ses 12 ans. Un jour, sa maman, Mariama Mbaye, en touche un mot à un marabout se trouvant aux Parcelles assainies. Et depuis lors, sa santé est meilleure. « Le marabout m’a donné du thiouraye (encens). Je l’utilise deux fois par jour. Le matin et le soir vers 19 heures », confie-t-elle, la mine contractée. Une autre vertu de l’encens, au-delà de ses senteurs. Ce que confirme un guérisseur traditionnel, accueillant ses « patients » à la Gueule Tapée. Il préfère garder l’anonymat. Dans la chambre où il accueille ses clients, le décor n’est pas des plus gais. Tout y est sombre. Seuls quelques rayons de soleil perçant la fenêtre y jettent une lueur blafarde. Pour lui, l’encens fait partie de la médecine traditionnelle. Dans certains cas, cette substance est « incontournable » et très « efficace ». Quelquefois, « des femmes viennent me demander, révèle-t-il, le type d’encens qu’il faut utiliser pour retenir leurs maris mystiquement ».
Élément important de l’arsenal de séduction de la femme sénégalaise, l’encens assure d’autres fonctions dans bien des espaces de vie. Seynabou Dieng, la dentition belle, l’allure altière et le teint noir, en connait un rayon. « Les débuts de mon mariage ont été difficiles. Mon foyer était instable. Un jour, je suis allée voir un marabout pour des prières. Il m’a donné de l’encens que je devais mettre dans un coin de la chambre », raconte cette trentenaire habitant à Pikine qui a connu, par la suite, des « jours plus heureux ». S’il y a des femmes qui utilisent le produit pour « se soigner », d’autres y font recours pour se protéger contre les caprices du sort. « À quelques jours de mon mariage, ma tante est venue me remettre un sachet contenant de l’encens destiné à protéger mon foyer contre le mauvais œil », se souvient Mariama, la mère de Ramatoulaye.
Thiouraye « dépucelage »
Un tour dans les boutiques spécialisées de Tilène où les senteurs sont pénétrantes. Dès l’entrée de la boutique « Makine cosmétique et thiouraye », l’odeur de l’encens titille les narines. Un lieu bouillant où des femmes se ravitaillent. Pas moins de 10 hommes, tous portant des teeshirts noirs, gèrent ce grand commerce. Moussa Konaté Guéye est l’un d’eux. Chez lui, le thiouraye Oud est le plus prisé. « Les femmes utilisent beaucoup ce produit. Car il est recommandé pour l’intimité, surtout pour une femme qui s’apprête à faire son premier rapport sexuel », soutient-il, heureux de cette vogue qui lui profite.
Quant au « thiouraye Liban Zakar », il mènerait à la prospérité et attirerait les clients dans le domaine du commerce. Le guérisseur traditionnel, lui, recommande à ses clients l’encens « Bois santal » pour s’épanouir dans le travail. Dans une élégante combinaison, Khoudia Guèye vient de décrocher un contrat de travail dans une banque. Pour se protéger des mauvaises langues, son marabout lui a recommandé d’acheter l’encens « Nur Muhamad ». Et elle a ainsi « bon espoir de conjurer le sort ».
C'EST LA CULTURE DU VIOL VERSION FÉODALE QUI PRÉVAUT AU SÉNÉGAL
Le code de la famille contient d'innombrables dispositions discriminatoires contre les femmes. Les mariages de mineur.es, les mariages forcés se poursuivent. Le patriarcat s’enracine avec l’onction religieuse - ENTRETIEN AVEC NDEYE KHAIRA THIAM
Psychologue clinicienne et criminologue, Ndeye Khaïra Thiam est avant tout une fervente militante féministe qui vit entre le Sénégal et la France. Elle intervient régulièrement auprès des instances nationales et internationales comme consultante. Elle était présente lors du Forum génération égalité qui s’est tenu à Paris du 30 juin au 2 juillet 2021.
Même si le dernier rapport de la CEDEF (Convention sur l’Élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des Femmes) a salué en février dernier des avancées dans le traitement des salaires, l’accès à l’éducation et à des postes à responsabilité ainsi qu’à une parité au niveau politique avec une représentativité féminine accrue dans les institutions électives et semi-électives, l’égalité reste extrêmement loin d’être acquise. Certaines villes du Sénégal comme Touba se déclarant « ville religieuse » résistent obstinément à l’application des différentes règles de droit national et aux accords ratifiés par l’Etat.
Au Sénégal, République laïque, démocratique et sociale ainsi que le proclame encore l’article 1er de sa Constitution, le religieux tend à surpasser les pouvoirs institutionnels et le patriarcat s’enracine de plus en plus avec l’onction religieuse. L’inégalité entre les femmes et les hommes est à ce point ancrée dans les mentalités et institutionnalisée que les femmes peinent à accéder à leurs droits fondamentaux et principalement aux droits reproductifs. Le code de la famille n’est toujours pas remanié alors qu’il contient un nombre incalculable de dispositions discriminatoires contre les femmes. Les mariages de mineur.es, les mariages forcés et la polygamie pratiquée, au mépris même des règles islamiques, conduisent régulièrement à des problèmes de santé physique et psychique, notamment de santé mentale, allant jusqu’au suicide ou tentatives de suicides. L’avortement est toujours interdit et, seules, les femmes sont poursuivies pour néonaticide alors que l’article 14 du protocole de Maputo a été signé et ratifié par le Sénégal et n’est toujours pas appliqué en raison du véto des religieux et par manque de courage du gouvernement. Les chiffres de l’excision, des violences conjugales ou des viols n’ont toujours pas diminué voire, ont augmenté depuis la pandémie de Covid. En 2020, une loi a été adoptée criminalisant les actes de viol et de pédophilie. Néanmoins, les affaires présentées devant le juge sont très souvent correctionnalisées afin d’en minimiser les peines.
Comment expliquez-vous ces résistances dans l’application des lois nationales et supra-nationales, des recommandations de la Convention sur l’Élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des Femmes (CEDEF) et des différents accords internationaux en faveur de l’égalité F-H ?
L’ancienne ministre de la femme, l’ancienne directrice du genre et l’ancienne directrice de la famille ont toutes les trois soutenu l’idée que la polygamie n’était pas une forme de violence. Toutes les trois sont des secondes épouses. L’experte onusienne de l’Egypte a failli s’étrangler lors de la dernière réunion de la CEDEF quand celles-ci ont justifié la polygamie par la religion et la culture, sans aucune distance et sans égard pour toutes les femmes, première, seconde, troisième ou quatrième femme qui souffrent dans nos hôpitaux ou dans nos prisons. Sans non plus prendre en considération toutes celles issues de ces familles polygames qui ne veulent pas reproduire ce modèle ou d’autres encore qui ne partagent pas ces pratiques.
A côté de cela, de la police au juge, le taux d’attrition est une catastrophe car tout est fait pour que les victimes n’obtiennent jamais justice puisque c’est la culture du viol version féodale qui prévaut au Sénégal. Certaines associations féminines s’en défendent en arguant des formations ou des actions de sensibilisation qu’elles ont menées avec ces fonctionnaires. Il n’en demeure pas moins qu’au quotidien, on doit slalomer entre les services pour éviter aux personnes que l’on accompagne d’être revictimisées par des propos extrêmement violents ou une désinvolture dans le traitement des plaintes ou demandes des justiciables. Au surplus, les victimes n’ont pas d’aide juridictionnelle, tout est à leur charge alors que les présumés auteurs, eux, l’obtiennent. Rajoutons à cela, le traitement médiatique réservé aux affaires de viol qui est scandaleux ! L’intimité des victimes est étalée partout y compris au mépris du secret médical ou du secret de l’instruction. Devant la CEDEF, l’ancienne ministre avait dû reconnaitre qu’en deux ans il n’y avait que 14 dossiers de viol recensés devant les cours criminelles. Un juge nous a sorti lors d’un atelier de juristes sénégalaises « qu’on ne distribue pas des peines criminelles comme on distribue des bananes » alors que les dénonciations pour viol y compris sur mineures ne font que grimper. Rien qu’au mois d’octobre 2022, il y a eu une série de meurtres plus atroces les uns que les autres. En une semaine, il y a eu quatre féminicides, sans que cela n’émeuve le gouvernement sénégalais.
Une partie de la société civile est sous emprise de l’Etat voire simultanément à la tête de certaines associations travaillent pour l’Etat. Ce dernier les contrôle et ne présente que les rapports partisans de ces groupes aux instances internationales. Celles-ci ferment bien les yeux sur les réalités de terrain et font le jeu du gouvernement pour sécuriser d’autres intérêts. L’ancienne directrice d’ONU femmes est devenue, au dernier remaniement, ministre de l’Économie du gouvernement sénégalais.
Les défenseuses des droits des femmes comme les féministes sont régulièrement la cible d’agressions dans la réalité comme sur les réseaux sociaux. Rien n’est prévu de rapidement fonctionnel pour elles. Sans compter qu’elles subissent des pressions familiales énormes. Et rien n’est prévu non plus pour les aider à prendre soin de leur santé physique et surtout mentale.
La Sénégalaise n’a pas toujours été soumise. Il existait des matriarcats. Y a t’il actuellement un travail de recherche pour réhabiliter l’histoire des femmes en Afrique ?
Le matriarcat n’était pas un gage de liberté des femmes telle qu’elle est aujourd’hui réclamée. La parole des femmes était soumise à celle du frère ou du père, et l’exercice du pouvoir, s’il était bien d’origine matrilinéaire, l’attribuait en priorité aux hommes. Dans le royaume du Waalo, il a fallu un coup d’Etat d’une Linguère au 17/18e siècle pour que ses filles Njeumbet Mbodj et Ndaté Yalla Mbodj prennent le pouvoir.
Des recherches sur l’apport des femmes dans le matrimoine existent mais manquent parfois de rigueur scientifique ou sont totalement partisanes. L’histoire de l’Afrique noire a été remaniée pour des raisons politiques, par les colons qui se sont succédé. Nombre d’archives sont manquantes ou bien sont conservées en France et restent ainsi peu accessibles aux chercheuses et chercheurs sénégalais. C’est compliqué de reconstituer nos histoires en se soustrayant à celle imposée par les colons ou même à l’ethnologie coloniale qui fait encore recette de nos jours et qui nous encombre. Spécialement quand des Européen.nes viennent nous parler de nos histoires ou de nos cultures et cherchent à nous imposer une vision surréaliste de nos pays.
Les Sénégalaises ont toujours lutté pour leurs droits. Il y a eu des mouvements féministes dans les années 70 et 80 qui ont permis de mettre en débat certaines problématiques. En 2018, le #balancetonsaïsaï (pervers) a-t-il eu l’effet d’un raz de marée ? La société sénégalaise a-t-elle pris conscience des violences faites aux femmes ou continue-t-elle dans le déni ?
#balancetonsaïsaï n’a pas pris du tout au Sénégal. On a eu en revanche « l’affaire Songhé » qui a provoqué un énorme scandale. Pendant des jours et des jours, il y a eu des torrents de témoignages sur les viols. Ensuite, un petit groupe de femmes ont maintenu la pression sur les médias. Cependant, j’ai fini toute seule avec cette histoire, mes consœurs s’étant désistées par peur. On a continué à parler régulièrement des viols dans les médias jusqu’en 2019. Cette année-là, une série de viols suivie de meurtres ont été commis et tout le monde est descendu dans les rues pour crier notre ras le bol que ce soit à Dakar comme dans les autres régions du Sénégal. C’est officiellement cette dernière mobilisation qui a conduit à l’adoption de la loi contre les violences faites aux femmes. Mais en réalité, c’est surtout la personnalité de la dernière victime, fille d’un ami du chef de l’état, qui a fait que la loi a été rédigée et adoptée dans la précipitation. Malgré de nombreuses imprécisions, cette loi a le mérite d’exister… Mais à cette période, le mouvement féministe mort dans les années 80, n’était pas encore revenu de ses cendres. Il a fallu attendre 2020 pour qu’il y ait de plus en plus de femmes se déclarant féministes et 2021-2022 pour qu’elles commencent à s’organiser.
La société sénégalaise vit dans le déni de la gravité de sa violence de manière générale mais spécifiquement des violences vis à vis des femmes et des enfants. Les gens ne veulent pas se regarder en face et faire un travail individuel et collectif pour traiter l’Histoire et ses psycho-traumas mais aussi tous les autres psychi-traumas qui se transmettent d’une génération à l’autre dans les familles. Et ça il va falloir qu’on le fasse si l’on veut réguler d’abord les violences et faire de la place au cas particulier des violences faites aux femmes et aux enfants qui ont aussi des fondements patriarcaux (précoloniaux, arabo-musulmans et européens). De plus il va falloir faire un gros travail de déconstruction et c’est là aussi qu’on attend les féministes. Mais on va continuer à espérer…
Vous interviendrez à Paris les 26 et 27 novembre prochain à l’occasion de la 28ème université d’autonome de Ligue des droits de l’homme pour parler de féminismes africains. Quels sont ces féminismes et leurs défis ?
J’ai l’honneur de remplacer la Professeure Fatou Sow, une très très grande universitaire féministe. Je parlerai de ce que j’estime être un » malaise dans le féminisme sénégalais » actuel. Une manière d’abord, de parler de mon rapport au féminisme et à ce qui se fait ou pas au Sénégal et d’essayer aussi de pousser des féministes sénégalaises à intensifier sérieusement la lutte, à avoir le courage de prendre en charge certains sujets laissés en rade et à travailler de manière encore plus hargneuse à déconstruire les poncifs éculés qui tiennent la femmes sénégalaise esclave de l’homme sénégalais alors que l’esclavage est aboli au Sénégal depuis le 23 juin 1848. Il y a urgence aujourd’hui à changer radicalement le visage de la société sénégalaise. Des enjeux économiques et géopolitiques telles que la découverte du pétrole ou du gaz ainsi que la poussée islamiste qui est à nos portes menacent très sérieusement la stabilité du pays mais encore plus directement la vie des femmes sénégalaises.
Les mouvements féministes sénégalais reçoivent-ils l’appui de la diplomatie féministe, stratégie internationale luttant pour l’égalité F-H en appliquant les mesures adoptées par le G7 et le Forum Génération Egalité ?
Je ne sais pas ce que vous appelez la « diplomatie féministe ». Ce qui déjà est en soi signifiant de l’insignifiance de cette « diplomatie » dans nos pays. Il y a des institutions internationales qui gravitent autour de certaines féministes dans le but de capter leur énergie et de la mettre à profit de leurs propres objectifs. C’est-à-dire la schizophrénie diplomatique qui veut l’égalité sans la vouloir vraiment dans les faits en se cachant derrière le non-interventionnisme dans les politiques des pays concernés, qu’ils financent par ailleurs pour ces questions. Pffff ! Les féministes ont démarré leur lutte sans ces institutions et d’autres groupes sont morts à cause de ces mêmes institutions. Vous me permettrez donc d’étaler ma parano à la face du monde quand on me parle d’institutions internationales ou de « diplomatie féministe ». Au Sénégal, les diplomates femmes que nous avons tout comme les quelques rares femmes ministres par exemple, n’ont rien de féministes. Et je parle aussi à celles qui se revendiquent « plus féministes » que les féministes sénégalaises. A bon entendeur ! Elles sont les bonnes garantes du patriarcat qui les salue dès qu’il peut pour leurs bons et loyaux services et qui sont surtout en charge de faire rentrer les récalcitrantes dans le rang. A ma connaissance, il n’y a qu’une seule personne dans le gouvernement qui appuie réellement les féministes dans certaines de leurs actions. A elle seule, elle ne peut pas représenter toute la diplomatie. Il serait nécessaire que les femmes sénégalaises jouent davantage des coudes pour s’imposer comme un contre-pouvoir. Elles ont l’avantage numérique et le cuir plus dur au mal. Qu’elles rompent avec la peur d’être mal vues ! Evidemment que vous serez mal vue par ceux que votre liberté et votre leadership réel (pas celui des grands hôtels ou sommets internationaux) effraient car il risque de leur faire perdre leurs petits avantages de despotes.
Le chanteur et compositeur sénégalais a dit toute sa fierté d’avoir participé en tant qu’acteur et chanteur au film ‘’Black Panther : Wakanda forever’’ projeté au cinéma ‘’Pathé Dakar’’
Le chanteur et compositeur sénégalais Baaba Maal a dit toute sa fierté d’avoir participé en tant qu’acteur et chanteur au film ‘’Black Panther : Wakanda forever’’ projeté au cinéma ‘’Pathé Dakar’’.
‘’C’est à l’honneur de mon pays et du continent, on ne peut pas être plus fier que ce que l’on a ressenti en voyant l’image que l’on donne de l’Afrique dans ce film. Je suis très honoré de faire partie de cette deuxième édition de Wakanda forever’’, a dit l’artiste sénégalais, vendredi.
Il s’exprimait lors d’une séance de projection spéciale organisée par l’Agence culturelle africaine fondée par la Sénégalaise Aminata Diop Johnson du ‘’Pavillon des cinémas d’Afrique’’ du festival de Cannes en France.
Le film ‘’Black Panther : Wakanda forever’’ produit par les ‘’studio Marvel’’ très attendu par les cinéphiles a fait sa sortie mondiale ce 11 novembre et distribué au Sénégal par ‘’Les films 26’’.
Baaba Maal avait déjà participé à la bande originale son du premier opus à succès sorti en 2018 et réalisé par l’Américain Ryan Coogle qui a aussi signé le scénario avec son compatriote Joe Robert Cole.
‘’C’est un honneur pas seulement de Baaba Maal, mais du Sénégal et de l’Afrique parce que si on entend la musique, on sait que c’est le Sénégal, les percussions, les voix et même les bruitages’’, s’est réjoui le lead vocal du Dandé Lenol.
Pour Baaba Maal, le premier opus de ‘’Black Panther’’, ‘’représente une Afrique, je ne dirais pas utopique, mais c’est une très belle Afrique qui a été montrée avec toutes les opportunités du futur surtout en matière technologie. On n’en a beaucoup besoin.
Dans ce deuxième opus qui rend hommage à l’acteur Tchalla, roi du Wakanda interprété par l’Américain Chadwick Boseman décédé en août 2020, la culture africaine y est très présente dans ces costumes, dans l’organisation sociale du royaume de Wakanda.
Cette culture africaine est aussi dans les parures portées par les acteurs.
Selon Baba Maal, ‘’Black Panther 2’’ est un film sur ‘’la bravoure’’ et le ‘’dynamisme’’.
‘’C’est un film de combat, mais c’est un combat positif, c’est une histoire éclatante qu’on retrouve partout en Afrique’’, a-t-il ajouté.
Baaba Maal a participé à plusieurs scènes du nouveau film en tant qu’acteur d’abord lors de la procession funèbre organisée tout pour honorer la mémoire du roi Tchalla.
L’artiste, tout de blanc vêtu, comme tous les acteurs sur une des séquences, est debout à côté de la reine Ramonda (Angela Bassett) lors d’une cérémonie sacrée, entonnant de sa voix grave un rythme sénégalais faisant référence à la mort.
‘’Massamba Diop (percussionniste du Dande Lenol) est venu avec une idée formidable sur ces quelques secondes de la séquence, avec un rythme sénégalais disant +si un serpent te mord, tu penses à la mort+, c’était un rythme triste’’, a expliqué l’artiste.
Cette séquence du film est aussitôt suivie d’une scène de joie, car estime Baaba Maal ‘’Chadwick n’a jamais voulu que les gens soient tristes. On a célébré dans la joie sa mort, car il voulait qu’on ait de l’espoir, c’est pourquoi on a enchainé avec la danse’’.
Au milieu du film, la voix de l’artiste sénégalais a à nouveau entonné des envolées lyriques inspirées du Yéla, la musique traditionnelle pulaar pour marquer le retour de la reine dans le royaume de Wakanda.
La musique ‘’Wango arti’’ de Baaba Maal qui renvoie à la bravoure, à la jeunesse est aussi entendue dans une autre séquence du film où le tama de Massamba Diop résonne à nouveau.
Il estime qu’avec cette expérience Massamba Diop a réussi à transcrire le tama en regardant le film, ‘’ce qu’il n’a jamais fait auparavant’’, lance-t-il.
‘’Il s’agissait de regarder le film est de comprendre les sentiments et de le traduire en musique’’, dit Baaba Maal qui est disposé à continuer à faire du cinéma en tant qu’acteur ou musicien.
L’artiste estime que le cinéma africain doit aujourd’hui ‘’capitaliser toute cette ouverture’’.
Le film ‘’Black Panther : Wakanda forever’’ comme le premier volet met en scène des héros noirs, mais cette fois les villes de tournage sont bien réelles avec Haïti et Porto Rico.
L’histoire est aussi une continuité du premier film, car le royaume se trouve un nouveau Black Panther en la personne de Shuri, la petite sœur de Tchalla, le roi décédé.
Le film met en avant des femmes qui se battent pour protéger leur royaume riche en uranium très convoitée par les pays occidentaux.
La saga américaine garde la beauté de ses images et de sa mise en scène et fait un clin d’œil à l’histoire des Amérindiens.
En dehors de Baaba Maal, des chanteurs nigérians et américains dont Rihanna ont signé la bande originale du film.
Les cinéphiles venus nombreux pour cette première projection du film à Dakar ont participé au tirage au sort d’un billet d’avion offert par ‘’Air Sénégal’’.
TREKKING A KEDOUGOU : UNE ESCALADE A COUPER LE SOUFFLE
Le Sénégal est un pays généralement plat. Et les excursions touristiques privilégient souvent le confort. Mais pour aller à l’assaut des montagnes de Kédougou, endurance physique et volonté sont nécessaires.
Par Mame Woury THIOUBOU (de retour de Kédougou) |
Publication 12/11/2022
Le Sénégal est un pays généralement plat. Et les excursions touristiques privilégient souvent le confort. Mais pour aller à l’assaut des montagnes de Kédougou, endurance physique et volonté sont nécessaires. Loin des photos glamours et des images idylliques partagées par les randonneurs, ce parcours tient plus du stage de survie. Efforts physiques, expérience de l’humilité et de la vie simple des habitants de ces contrées oubliées sont autant de leçons apprises au cours des 5 jours que dure le périple !
Le village de Dindéfello semble se blottir dans les bras de la montagne. Les petites maisons aux toits parfois colorés sont éparpillées. La route qui traverse le village passe devant ce qui ressemble au cœur de cette localité de la région de Kédougou, célèbre pour ses attractions touristiques. Des femmes sont installées devant des cantines. Elles s’apprêtent à lancer la cuisson des repas. Une jeune fille est occupée à découper des légumes, une vieille maman assise sur un banc garde l’œil sur ses jeunes protégées, prête à intervenir. Des hommes en petits groupes discutent. A l’entrée du village, un groupe de 5 jeunes gens écoutent joyeusement Sitya Loss de Eddy Kenzo. Le volume est fort, mais cela donne un air de fête. Comme un colosse, la montagne observe tout et voit tout. Bientôt, il faudra se lancer sur ses pentes. Mais avant cela, le groupe se pose pour un petit debrief au Musée communautaire de Dindéfello. Djibril Camara explique les règles de l’ascension et présente les différents sites à visiter. Ensuite, le guide désigné, Saliou, prend la tête du cortège qui se forme. On s’arrête une nouvelle fois au pied de la montagne, dans un campement tenu par les jeunes du village. La voiture ne peut pas aller plus loin. Il faut marcher pour rejoindre le point de départ de la piste qui escalade la montagne. L’air est vif et la chaleur, malgré l’heure, reste supportable. La file se reforme et en route pour 5 à 6h de marche, d’escalade et de trekking. Travel With Ziggy (Twz), une start-up orientée sur le voyage, organise chaque année une randonnée dans ces contrées. Loin des sentiers battus, l’expérience fait appel à l’endurance.
A flanc de montagne
Le sentier qui permet d’arriver au sommet de la montagne est tracé à flanc de colline. Comme des escaliers, mais ici, ce sont les rochers qui en forment les marches. Les premiers mètres franchis, la montée se fait sentir. Les muscles commencent un long travail. Les premiers mètres sont sans doute les plus difficiles. Surtout pour les corps non entraînés. Sous la frondaison des arbres, le chemin s’étire et c’est en colonne que l’on poursuit la montée. Au bout de quelques petites minutes, les respirations se font sifflantes, le souffle devient laborieux ! Il faut convaincre le guide Saliou, un natif de Dindéfello, de marquer une pause. Elles vont beaucoup se répéter durant l’heure qu’il aura fallu pour arriver au sommet de la montagne. Il faut dire que les natifs des lieux n’en auraient eu que pour un quart d’heure au plus. D’ailleurs, des élèves font le trajet tous les jours pour aller en classe au bas de la montagne. Et tout au long du chemin, il arrive de croiser un homme lourdement chargé. Les marchandises, les vivres doivent tous emprunter ce chemin pour parvenir à Dandé, un des villages installés sur le plateau. Une dame, bébé au dos, un sac posé en équilibre sur la tête, nous dépasse, le pied léger. Elle descend dans la vallée, escortée par un jeune garçon portant sa valise. Sur la piste, la végétation est dense et toutes sortes de terreurs commencent à surgir. Mais avec la fatigue, elles seront finalement reléguées très loin. L’esprit se concentre sur les obstacles. Une roche escaladée après l’autre. Difficile de lever le regard sur ce qui nous entoure sous peine de trébucher. Il faudra attendre d’arriver à un des observatoires que la nature a aménagés à flanc de colline. La vue est à couper le souffle. Au loin, les montagnes de la Guinée sont nimbées d’une belle couleur bleue, les nuages semblent toujours leur murmurer de belles histoires. Au bout de longues minutes d’escalade, on arrive enfin au sommet du plateau. La beauté que l’on découvre efface instantanément les souffrances. L’impression de surplomber le monde est encore plus présente quand on arrive aux Dents de Dandé. Un plateau rocheux surplombe le site et le regard ne peut se rassasier de cette vue. Les dents sont une formation rocheuse en pointe qui évoque justement des dents. Les roches, de couleur ocre, sont parsemées de végétation. Le calme est olympien. On s’entend vivre et respirer. La communion avec la nature est totale.
Dandé, le village dans la montagne
Avant d’arriver à ce lieu enchanteur, il aura fallu marcher, encore escalader des rochers et crapahuter au cœur d’une nature généreuse. Sur le plateau par contre, le bowal et ses champs d’herbes ondulent au vent. Sur les versants, des bruits de rires. Ce sont des villageois qui travaillent sur leurs champs de Tigua (arachide) et de fonio. Cette céréale miraculeuse ressemble fortement à de l’herbe. Mais ses tiges sont chargées de minuscules graines. Ce sont elles qu’il faudra battre pour en ressortir cette petite graine blanche qui constitue la base de l’alimentation. Procédé difficile par lequel les femmes sont contraintes de passer. Pas d’électricité dans ces zones, mais un forage au village de Dandé où nous arrivons au bout de quelques heures de marche pour remplir les bidons. L’eau coule à gros débit et le plaisir est immense de s’en asperger la tête. Pour arriver aux grottes de Dandé, la piste serpente dans la brousse. Tantôt nous traversons des marécages ou des sols gorgés d’eau, tantôt c’est sous les arbres qu’il faut se frayer un chemin. Si vous vous demandez pourquoi les villageois marchent toujours à la queue leu-leu, l’explication est là, la piste ne permet pas à deux personnes de passer de front. Il faut passer par une descente périlleuse pour arriver aux grottes de Dandé. Il y a de nombreuses années, Bassaris et Bedicks avaient occupé ces grottes pour échapper aux hordes guerrières de Alpha Yaya, le conquérant peul venu de la Guinée voisine et décidé à islamiser ces populations de religion animiste. Sanguinaires, les envahisseurs n’hésitaient pas à enlever les femmes et à tuer les vieillards. Les hommes valides étant réduits en esclavage ou massacrés sur place. C’est pour échapper à cela qu’ils trouvèrent refuge dans ces grottes. Largement ouverte sous le flanc de la montagne, la première grotte où l’on arrive après une descente périlleuse, s’ouvre sur quelques mètres. Le sol est recouvert d’argile fine. Et du fond, partent des cavités. Ce sont, paraît-il, des tunnels qui courent sur des kilomètres, sous la montagne. Certains disent même qu’ils vont jusqu’en Guinée. Mais personne n’est allé vérifier. Il faudra attendre que des spéléologues viennent s’en assurer. Encore plus bas, une cascade jette son filet d’eau du plateau surplombant les grottes. A quelques mètres en dessous, une autre grotte beaucoup plus grande. Les fuyards y passaient la nuit après avoir parcouru la brousse dans la journée pour chercher de la nourriture et surveiller les troupes ennemies. Une fois la visite effectuée, il faut remonter encore pour aller à la recherche des sources de la chute de Dindéfello. Comme pour les autres parcours, le chemin n’est pas simple. Il faut suer, beaucoup suer, pour espérer voir ces beautés cachées au cœur d’une épaisse végétation.
par Birane Diop
VIVRE VITE, UN ROMAN INTIMISTE LAURÉAT DU GONCOURT 2022
Brigitte Giraud revient sur le drame qui a changé sa vie et celle de son fils Théo, avec la mort brutale de son mari Claude dans un accident de moto à Lyon
Jeudi 3 novembre 2022. La messe est dite au restaurant parisien Drouant, situé dans le 2e arrondissement. Le successeur du talentueux et généreux écrivain sénégalais, Mohamed Mbougar Sarr est connu. Il passe le flambeau à une consœur. Une femme pleine de grâce et discrète.
Il s’agit de Brigitte Giraud. Son roman « Vivre vite » publié aux éditions « Flammarion » a finalement remporté le prestigieux prix littéraire, au détriment du livre favori, le grand texte politique, historique et sociologique, de Giuliano da Empoli « Le Mage du Kremlin ». Petite précision, je supportais l’auteur italo-suisse. Je considère comme beaucoup de gens que c’est un magnifique livre, qui nous éclaire sur cette formidable époque. Car il décrit avec clarté, l’invasion russe en Ukraine, la vision conservatrice de Vladimir Poutine, l’émergence d’un nouvel impérialisme, etc.
Mais malgré sa profondeur, sa puissance, sa justesse, les membres de l’Académie du Goncourt ont désigné « Vivre vite », de la lyonnaise Brigitte Giraud ; après quatorze tours de scrutin. Cela dit, il a fallu la voix de Didier Decoin, président du jury pour départager les deux romans en compétition. Car sa voix compte double.
Brigitte Giraud, je ne l’avais jamais lu, avant son sacre. C’est ce roman primé qui m’a fait découvrir l’écrivaine, in fine, sa littérature.
En un mot, j’ai découvert une belle plume, une excellente romancière, qui mérite ce prix, même si comme je l’ai dit plus haut, je souhaitais que Giuliano da Empoli gagne.
Dans ce roman intimiste, ponctué d’histoire, de politique, de sens, Brigitte Giraud revient sur le drame qui a changé sa vie et celle de son fils Théo, avec la mort brutale de son mari Claude dans un accident de moto à Lyon. Une tragédie survenue à la fin du XXe siècle. Un matin du 22 juin 1999. Elle raconte ce qui serait passé, si son petit frère n’avait pas laissé sa moto dans le garage de leur nouvelle maison. Si elle n’avait pas changé la date de son déplacement chez son éditeur à Paris. Si elle avait un téléphone portable. Si elle avait accepté que son fils parte en vacances avec son frère, etc. Cette bouleversante litanie de « Si » fait de sa vie « une réalité au conditionnel passé. »
Brigitte Giraud interroge la notion de l’existence. « Vivre vite » est un livre universel au sens Kantien, qui parle de la vie, le tout drapé dans un épais manteau de pudeur. Je le recommande sans réserve !
DESACRALISATION DU «TAMBOUR PARLEUR» AVANT SA RESTITUTION A LA COTE D’IVOIRE
L’objet a été pillé par les Français, en 1916. Paris s’est engagée, l’an passé, à le restituer, mais avant son retour, une restauration est nécessaire.
Qualifié de «parleur», ce tambour était plus qu’un instrument de musique, c’était un outil de communication. Il permettait à ce peuple de la région d’Abidjan de prévenir les villages lorsque les colons français venaient réquisitionner les populations.
L’objet a été pillé par les Français, en 1916. Paris s’est engagée, l’an passé, à le restituer, mais avant son retour, une restauration est nécessaire. Pour permettre la restauration de cet objet sacré, une cérémonie rituelle était organisée, ce lundi 7 novembre, au Musée du Quai-Branly, en présence de membres de la communauté bidjan.
En déambulant vers la Muséo¬thèque, où est actuellement exposé le tambour, les dix représentants de la communauté bidjan dont trois chefs de village, ont d’abord entonné, à l’aide d’un cor et d’un tambour, des chants de guerre, comme le faisaient leurs ancêtres avant de partir au combat. Une fois arrivés dans la salle, la cérémonie rituelle a pu débuter.
Les membres de la communauté ont entrepris la désacralisation du tambour, en demandant à l’esprit qui est à l’intérieur de se retirer. Ils ont effectué sept fois le tour du «Djidji Ayokwe», pour signifier le nombre de villages bidjan. Une libation a également été faite par le chef du plus ancien village bidjan, Cocody village.
Cette cérémonie était nécessaire pour permettre à des mains profanes de restaurer cet objet sacré. Sa base est en effet infestée par les termites. Et pour cause : le «Djidji Ayôkwé» est resté dehors, de 1916 à 1930, posé à même le sol dans les jardins de la résidence de l’administrateur colonial à Bingerville. Une entreprise spécialisée va donc se charger de consolider le tambour et de le poser sur un socle, des travaux de restauration qui doivent débuter le 15 novembre prochain.
Processus de restitution
Ce retour du tambour parleur, «Djidji Ayokwe», est donc préparé par les communautés bidjan du village d’Abidjan-Adjamé. Le tambour devrait leur être restitué en 2023. Bénédicte Savoy, historienne de l’art et co-autrice d’un rapport sur le patrimoine africain, revient sur les blocages qui ont, jusque-là, retardé ce processus : «Pendant 100 ans, les Européens ont surtout souffert d’un blocage psychologique. Il était pour eux pratiquement impossible de penser la restitution. Ce grand blocage-là est parti. L’autre blocage qui l’accompagnait, qui était un soi-disant blocage législatif, c’est-à-dire que la France annonçait toujours l’argument de l’inaliénabilité des collections, de l’imprescriptibilité des spoliations. Ces éléments juridiques-là ont été annulés par une nouvelle loi qui a permis la restitution des 26 pièces de la République du Bénin. Pour le tambour, une loi doit aussi être votée au Par¬lement et dans la situation parlementaire actuelle en France, c’est une question de temps, probablement…»